Brevets

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Référence : BWB CO., LTD. (Re), 2025 CACB 5

Décision du commissaire no 1686

Commissioner’s Decision #1686

Date : 2025-03-27

SUJET :

J00

J10

Objet des demandes—Signification de la technique

Objet des demandes—Programmes d’ordinateur

 

 

 

TOPIC:

J00

J10

Subject Matter of Applications—Meaning of Art

Subject Matter of Applications—Computer Programs

 

 

 

Demande no 2 994 068
Application No. 2994068


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Le commissaire rejette la demande de brevet no 2 994 068 sur recommandation de la Commission d’appel des brevets. La Commission a révisé la demande en vertu de l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251), à la suite du refus de la demande en vertu du paragraphe 199(1) des Règles sur les brevets.

Agent du demandeur :

KIRBY EADES GALE BAKER

300-55, rue Murray,

Ottawa (Ontario) K1N 5M3


 

Introduction

[1] La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet refusée no 2 994 068, intitulée « Système de commerce, serveur de gestion et programme » et appartenant à BWB Co., Ltd. L’irrégularité en suspens dans la demande, telle que soulevée dans la décision finale, est l’objet non brevetable des revendications. La Commission d’appel des brevets a procédé à une révision de la demande refusée, conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251). Comme il est expliqué ci-dessous, je recommande au commissaire des brevets de rejeter la demande.

Contexte

La demande

[2] La demande de brevet canadien 2 994 068 a été déposée sous le régime du Traité de coopération en matière de brevets, et sa date de dépôt effective au Canada est le 2 juin 2016. La présente demande est devenue accessible au public depuis le 30 novembre 2017.

[3] L’invention concerne généralement un système de commerce électronique visant à améliorer l’efficacité du processus de dédouanement. Plus précisément, la demande vise à fournir aux utilisateurs des renseignements préalables au dédouanement, y compris le droit de douane applicable à un produit, avant l’achat du produit.

Historique de la poursuite

[4] L’examinateur a envoyé une décision finale refusant la demande pour revendiquer un objet non brevetable. Le demandeur a répondu en proposant un ensemble modifié de revendications et en soutenant que les revendications proposées définissaient un objet brevetable. L’examinateur n’était pas d’accord et a maintenu le refus, comme indiqué dans le résumé des motifs qui a été envoyé au demandeur. La demande refusée a été transmise à la Commission d’appel des brevets aux fins de révision au nom du commissaire aux brevets.

[5] Le soussigné a été chargé d’examiner la demande refusée en vertu de l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets.

[6] Une lettre de révision préliminaire, datée du 10 février 2025, a été envoyée au demandeur, indiquant mon opinion préliminaire selon laquelle les revendications portent sur un objet non brevetable et que les revendications proposées n’ont pas remédié à l’irrégularité des revendications au dossier.

[7] Dans une lettre datée du 21 février 2025, le demandeur a refusé la possibilité de tenir une audience et a indiqué qu’il ne souhaitait pas présenter d’autres observations écrites.

[8] J’ai terminé mon examen de la demande en instance et je présente ci-dessous mon analyse relative à la demande refusée.

La question est de déterminer si l’objet est brevetable

[9] La présente révision porte sur la question de savoir si les revendications englobent un objet qui ne relève pas de la définition d’« invention » et qui n’est pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets (L.R.C. (1985), ch. P4), d’abord en ce qui concerne les revendications 1 à 7 (les revendications au dossier au moment de la décision finale; ces revendications datent du 12 juin 2019) puis à la lumière des revendications proposées 1 à 6 (datées du 6 août 2020).

Interprétation téléologique

Principes

[10] L’interprétation téléologique précède toute considération de validité : (Free World Trust c. Électro Santé Inc., 2000 CSC 66 au par. 19 [Free World Trust]; et Whirlpool Corp c. Camco Inc, 2000 CSC 67 [Whirlpool] au par. 43). L’interprétation téléologique est effectuée du point de vue de la personne versée dans l’art à la lumière des connaissances générales courantes pertinentes, compte tenu de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins : Free World Trust aux par. 31, 44, 51, 52 et 55 à 60; Whirlpool aux par. 45 à 49, et 52 à 53; « Objet brevetable en vertu de la Loi sur les brevets » (OPIC, novembre 2020) [EP2020-04], à la section « Interprétation téléologique »).

[11] En plus d’interpréter le sens des termes d’une revendication, l’interprétation téléologique distingue les éléments essentiels des revendications des éléments non essentiels. La question de savoir si un élément est essentiel dépend de l’intention exprimée dans la revendication ou déduite de celle-ci et de la question de savoir s’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art qu’une variante a un effet important sur le fonctionnement de l’invention.

[12] L’EP2020-04 (à la section « Interprétation téléologique ») aborde également l’application de ces principes, soulignant que tous les éléments revendiqués sont présumés essentiels à moins qu’il n’en soit établi autrement ou qu’une telle présomption soit contraire au libellé de la revendication.

Analyse : La personne versée dans l’art et les connaissances générales courantes pertinentes

[13] L’interprétation téléologique est effectuée du point de vue de la personne versée dans l’art à la lumière des connaissances générales courantes pertinentes. Je dois d’abord caractériser les deux (Recueil des pratiques du Bureau des brevets [OPIC] [RPBB] section 12.02.01, révisé en juin 2015).

[14] La décision finale a défini la personne ou l’équipe versée dans l’art et les connaissances générales courantes comme suit :

[traduction]

La personne versée dans l’art est compétente dans le domaine du commerce électronique.

La personne versée dans l’art peut être un individu ou une équipe de personnes compétentes dans le domaine de la vente de produits en ligne, et plus particulièrement, dans l’envoi et la réception de renseignements douaniers liés aux produits dans le but d’obtenir des renseignements préalables au dédouanement, y compris des renseignements tarifaires. La personne versée dans l’art peut également avoir des connaissances sur les serveurs informatiques, les réseaux de communication et les bases de données.

Les connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art comprennent ce qui suit :

1. connaissance du commerce électronique conventionnel;

2. connaissance de la classification tarifaire harmonisée, des codes tarifaires et des tarifs;

3. connaissance des serveurs, des bases de données et du réseautage électronique.

[15] Le demandeur n’a pas contesté ces définitions lors de la poursuite de la demande.

[16] Comme la demande concerne les systèmes de commerce électronique, le traitement de dédouanement et les éléments informatisés soutenant les deux systèmes, à mon avis, la personne versée dans l’art et les connaissances générales courantes doivent refléter les trois aspects.

[17] La lettre de révision préliminaire (page 5) a fourni mon opinion préliminaire selon laquelle la personne versée dans l’art est caractérisée par une équipe composée de spécialistes en commerce électronique et en dédouanement, ainsi que d’un technicien spécialiste en informatique soutenant les deux spécialistes.

[18] De plus, la lettre de révision préliminaire (pages 5 et 6) a fourni mon opinion préliminaire selon laquelle les connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art se caractérisent comme suit :

  • Des sites de commerce électronique qui effectuent des transactions commerciales à travers différents pays (description, par. 0002, sous [traduction] « Technique antérieure »; US 2012/0109765, Araque, le 3 mai 2012 [D1] aux par. 0006 à 0008; GB 2362242, le 14 novembre 2001 [D2] aux pages 1 et 2).
  • Des procédures de dédouanement pour l’importation de produits, y compris le calcul des tarifs pour ces produits (description, par. 0002, sous [traduction] « Technique antérieure »; D1 aux par. 0007, 0021, 0050 à 0052, 0060 et 0061, 0066 et 0068; D2 aux pages 7, 8 et 10).
  • Des processus de classification tarifaire (US 7,596,500, Thompson, et al., le 29 septembre 2009 [D3] comme décrit sous [traduction] « Renseignements contextuels » dans les colonnes 1 à 3).
  • Des systèmes de commerce électronique qui empêchent l’importation de produits à des fins commerciales tout en prétendant être un importateur individuel (description, par. 0002, sous [traduction] « Technique antérieure » et par. 0003 sous [traduction] « Liste de citations », se référant au document de brevet JP 2013-235407, FU JIHONG, le 21 novembre 2013 [D4]).
  • Des estimations en temps réel des prix du produit au marché, y compris les droits de douane, d’une expédition proposée de marchandises (comme démontré, par exemple, dans US 2008/0097933, Awaida et al., le 24 avril 2008 [D5] aux par. 0005 à 0012 et 0031).
  • Une connaissance et une mise en œuvre de processeurs, serveurs, bases de données et terminaux mis en œuvre par ordinateur et une mise en réseau entre ces composants mis en œuvre par ordinateur pour soutenir les systèmes de commerce électronique et les systèmes de dédouanement (comme démontré, par exemple, dans les documents D1 à D5).

[19] En l’absence d’observations de la part du demandeur, j’adopte les définitions cidessus de la personne versée dans l’art et les connaissances générales courantes pertinentes aux fins de ma révision finale.

Analyse : Signification des termes et des éléments essentiels des revendications

[20] Il y a sept revendications au dossier.

[21] La revendication indépendante 1 concerne un système de commerce comprenant trois serveurs : un serveur de commerce électronique, un serveur d’authentification de dédouanement et un serveur de gestion. La revendication décrit les interdépendances, les fonctionnalités et les flux de messages entre eux :

[traduction]

1. Un système de commerce, composé de ce qui suit :

un serveur de commerce électronique (CE) configuré pour mettre en œuvre le commerce électronique et se connecter à un terminal d’utilisateur;

un serveur d’authentification de dédouanement configuré pour gérer les renseignements de prédédouanement, le serveur d’authentification de dédouanement étant en communication avec un terminal douanier administré par une autorité douanière; et

un serveur de gestion connecté via un réseau au serveur d’authentification de dédouanement et au serveur de CE, le serveur de gestion étant configuré pour :

créer une demande d’enregistrement qui inclut des renseignements sur un produit,

transmettre la demande d’enregistrement au serveur d’authentification de dédouanement,

recevoir des renseignements de prédédouanement concernant le produit du serveur d’authentification de dédouanement,

transmettre les renseignements de prédédouanement au serveur du CE de sorte que les renseignements de prédédouanement soient affichés avec les renseignements sur le produit sur un site accessible par le terminal d’utilisateur;

le serveur d’authentification de dédouanement étant configuré pour :

obtenir des renseignements sur le dédouanement auprès du terminal douanier pour le produit en fonction des renseignements sur le produit,

en réponse à la demande d’enregistrement provenant du serveur de gestion, générer les renseignements de prédédouanement en fonction des renseignements sur le produit et des renseignements sur le dédouanement, les renseignements de prédédouanement comprenant des renseignements sur un droit de douane associé au produit,

transmettre les renseignements de prédédouanement au serveur de gestion, et

fournir les renseignements de prédédouanement du produit au terminal douanier après réception d’une demande du terminal douanier;

le serveur du CE étant configuré pour :

transmettre les renseignements de prédédouanement reçus ainsi que les renseignements sur le produit au terminal d’utilisateur, et

accepter, depuis le terminal utilisateur, une instruction de faire circuler le produit spécifié par les renseignements de produit par les douanes.

[22] La revendication indépendante 2 concerne un serveur de gestion, ses interdépendances, sa fonctionnalité et ses flux de messages :

[traduction]

2. Un serveur de gestion connecté par un réseau à un appareil d’authentification de dédouanement et à un appareil de transaction commerciale, l’appareil d’authentification de dédouanement étant en communication avec un terminal douanier administré par une autorité douanière, le serveur de gestion comprenant :

un processeur configuré pour :

recevoir une demande d’enregistrement qui comprend des renseignements sur un produit,

transmettre la demande d’enregistrement à l’appareil d’authentification de dédouanement,

acquérir des renseignements de prédédouanement concernant le produit à partir du terminal douanier par le biais de l’appareil d’authentification de dédouanement, les renseignements de prédédouanement comprenant des renseignements sur un droit de douane, et des renseignements de dédouanement provenant du terminal douanier, et

transmettre les renseignements de prédédouanement à l’appareil de transaction commerciale qui se connecte à un terminal d’utilisateur et exécute un commerce électronique de sorte que les renseignements de prédédouanement soient affichés avec les renseignements sur le produit sur un site accessible par le terminal d’utilisateur.

[23] Les revendications dépendantes 3 à 7 affinent davantage les fonctions du serveur de gestion de la revendication indépendante 2, énonçant les dépendances et formats de flux de messages, et en apportant des précisions sur ses fonctionnalités.

[24] L’interprétation téléologique est effectuée du point de vue de la personne versée dans l’art à la lumière de ses connaissances générales courantes et comporte l’interprétation de la signification des termes d’une revendication. Je note que le dossier n’indique aucun désaccord sur les termes entre l’examinateur et le demandeur.

[25] Cependant, comme je l’ai noté dans la lettre de révision préliminaire (pages 9 et 10), mon opinion préliminaire était que la personne versée dans l’art se référerait à la description pour comprendre le qualificatif [traduction] « prédédouanement » comme mentionné dans les revendications représentatives 1 et 2 (et également mentionné dans la revendication dépendante 7), par exemple, dans le terme [traduction] « renseignements de prédédouanement ». Bien que le qualificatif [traduction] « prédédouanement » ne soit pas défini directement dans la description, la spécification décrit [traduction] « prédédouanement » dans plusieurs contextes, par exemple :

  • Le [traduction] « traitement de prédédouanement » est défini comme [traduction] « […] le traitement d’enregistrement […] concernant le dédouanement à effectuer au bureau de douane 903 en relation avec les produits traités par le serveur [de commerce électronique] 200 » (description, par. 0015).
  • le [traduction] « prédédouanement » est décrit comme une fonction du serveur 400 d’authentification de dédouanement (description, par. 0017).
  • Le serveur de gestion 300 transmet une [traduction] « demande de prédédouanement » au serveur 400 d’authentification de dédouanement et acquiert par la suite des [traduction] « renseignements de prédédouanement » du serveur 400 d’authentification de dédouanement concernant un produit (description, par. 0020). Les [traduction] « renseignements de prédédouanement » sont stockés en association avec les renseignements sur le produit correspondant par le serveur de gestion 300 (description, par. 0021).
  • Le serveur 400 d’authentification de dédouanement génère des [traduction] « renseignements de prédédouanement » en réponse à une demande du serveur de gestion 300 (description, par. 0023 à 0026).
  • Le terminal douanier 800, géré par les autorités douanières, traite les produits qui sont arrivés à la douane 903 et détermine si le produit fait l’objet d’un [traduction] « traitement de prédédouanement ». Si le traitement de prédédouanement a été réalisé, alors le produit est transporté en dehors des douanes et livré; sinon, si le traitement de prédédouanement n’a pas été réalisé, un traitement normal (inspection, classification tarifaire et calcul du montant des droits de douane, notification d’appel à l’adresse de livraison, et ainsi de suite) est effectué (description, par. 0027 et 0028).

[26] À la lumière de ces références, la lettre de révision préliminaire (page 10) a exprimé mon opinion préliminaire selon laquelle la personne versée dans l’art comprendrait à partir de la description que le qualificatif [traduction] « prédédouanement » fait référence au traitement lié aux douanes d’un produit étant réalisé avant l’arrivée du produit dans une installation douanière.

[27] De plus, la lettre de révision préliminaire (page 10) indiquait mon opinion préliminaire selon laquelle, compte tenu de cette compréhension du qualificatif [traduction] « prédédouanement », la personne versée dans l’art comprendrait facilement l’ensemble du libellé des revendications et la portée résultante des revendications. En l’absence d’observations supplémentaires de la part du demandeur, j’adopte ces opinions pour ma révision finale.

[28] Ensuite, comme décrit plus haut sous le titre « Principes », l’interprétation téléologique identifie le caractère essentiel des éléments des revendications.

[29] En tant que question préliminaire, bien que l’examinateur ait interprété les revendications au dossier dans la décision finale selon une pratique antérieure du Bureau, l’examinateur a bien interprété les revendications au dossier dans le résumé des motifs selon la pratique actuelle du Bureau, EP2020-04, concluant que tous les éléments de la revendication sont essentiels. La lettre de révision préliminaire (page 10) a convenu à titre préliminaire de cette constatation selon laquelle tous les éléments de la revendication sont essentiels.

[30] En l’absence de nouvelles observations de la part du demandeur, j’adopte les opinions ci-dessus concernant la signification des termes et les éléments essentiels des revendications. La personne versée dans l’art comprendrait qu’il n’y a pas d’utilisation de langage indiquant qu’un des éléments est optionnel, et par conséquent, conformément à l’EP2020-04 et en accord avec l’opinion de l’examinateur dans le résumé des motifs, tous les éléments des revendications représentatives 1 et 2 au dossier sont essentiels, y compris les éléments mis en œuvre par ordinateur, leurs fonctionnalités revendiquées et les flux de messages revendiqués. Un raisonnement similaire s’applique également aux autres revendications au dossier.

Objet brevetable

Principes

[31] Le terme « invention » est défini à l’article 2 de la Loi sur les brevets :

invention Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[32] Le paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets prévoit également ce qui suit :

Il ne peut être octroyé de brevet pour de simples principes scientifiques ou conceptions théoriques.

[33] L’EP2020-04 décrit l’approche du Bureau des brevets pour déterminer si une revendication est un objet brevetable :

Afin d’être un objet brevetable et de ne pas être interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets, l’objet défini par une revendication doit être limité à, ou être moins vaste que l’invention en question qui est dotée d’une existence physique ou est une manifestation d’un effet ou changement physique discernable et qui a trait à un domaine de réalisations manuelles ou industrielles, ce qui signifie des procédés comportant ou visant des sciences appliquées et industrielles, afin de distinguer, en particulier, des beaux-arts ou des œuvres d’art qui ne sont originales que dans un sens artistique ou esthétique.

[34] La détermination de l’invention réelle est une question pertinente et nécessaire dans l’évaluation de l’objet brevetable (Canada (Procureur général) c. Amazon.com, Inc, 2011 CAF 328 [Amazon] au par. 42). Comme l’a indiqué la Cour d’appel fédérale dans Canada (Procureur général) c. Benjamin Moore & Co, 2023 CAF 168 [Benjamin Moore] au par. 68, cette détermination correspond à la déclaration de la Cour dans Schlumberger Canada Ltd c. Commissaire des brevets, [1982] 1 CF 845 (CA) [Schlumberger] qu’une évaluation de l’objet brevetable comporte la détermination de ce qui a été découvert selon la demande. L’invention réelle est identifiée dans le contexte de la nouvelle découverte ou connaissance et doit ultimement satisfaire à « l’exigence du caractère matériel » qui est implicite dans la définition de l’« invention » (Amazon aux par. 65 et 66).

[35] Amazon au par. 44, nous dit « qu’une revendication du brevet [peut] être exprimée dans un langage qui [est] trompeur, de manière délibérée ou par inadvertance » et que ce qui peut sembler à première vue être une « réalisation » ou un « procédé » peut en fait être la revendication d’une formule mathématique non brevetable, comme c’était le cas dans Schlumberger.

[36] Cette opinion est exprimée dans la position de la Cour d’appel fédérale dans Amazon concernant l’exigence du caractère matériel. Il y a l’exigence d’une chose dotée d’une existence physique ou une chose qui manifeste un effet ou un changement discernable. Malgré tout, cette exigence ne peut pas être satisfaite simplement par le fait que l’invention revendiquée a une application pratique (Amazon aux par. 66 et 69). Pour illustrer ce point, Amazon fait référence à Schlumberger, où les revendications « n’ont pas été déclarées valides en raison du fait qu’elles avaient trait à l’utilisation d’un outil matériel, un ordinateur, pour donner une application pratique à la nouvelle formule mathématique » (Amazon au par. 69).

[37] Les préoccupations en matière de brevetabilité concernant l’utilisation bien connue d’un ordinateur pour traiter un algorithme, illustré par Schlumberger, sont exprimées dans les facteurs énoncés dans l’EP2020-04 qui peuvent être pris en considération lors de l’examen des inventions mises en œuvre par ordinateur, à savoir :

  • le simple fait qu’un ordinateur figure parmi les éléments essentiels de l’invention revendiquée ne signifie pas nécessairement que l’invention revendiquée est un objet brevetable;
  • un algorithme en soi est un objet non brevetable abstrait et interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;
  • un ordinateur programmé pour traiter simplement l’algorithme abstrait d’une manière bien connue sans plus ne fera pas de l’algorithme un objet brevetable;
  • si l’exécution de l’algorithme sur l’ordinateur améliore le fonctionnement de l’ordinateur, l’ordinateur et l’algorithme formeraient donc ensemble une seule invention réelle qui serait brevetable.

[38] Les facteurs susmentionnés et les préoccupations générales entourant l’utilisation bien connue d’un ordinateur pour exécuter de nouveaux algorithmes abstraits peuvent être considérés comme impliquant des considérations de nouveauté ou d’ingéniosité. Le droit canadien n’interdit pas de tenir compte de la nouveauté ou de l’ingéniosité des éléments d’une revendication dans l’examen d’un objet brevetable et trouve son appui dans des situations comme celle dans Schlumberger, où un outil connu, un ordinateur, est utilisé pour donner à une formule mathématique abstraite une application pratique (Benjamin Moore aux par. 69 et 70, renvoyant à Amazon). Ces considérations aident à déterminer la découverte ou la nouvelle connaissance, la méthode d’application et l’invention réelle (Benjamin Moore au par. 89) qui sont en fin de compte mesurés par rapport au l’exigence du caractère matériel.

[39] Comme il est noté dans Benjamin Moore au par. 94 (et pareillement exprimé dans Amazon au par. 61), l’exigence du caractère matériel ne sera probablement pas comblée sans quelque chose de plus que seulement un outil bien connu, comme un ordinateur, étant utilisé pour mettre en œuvre un procédé abstrait. Les facteurs établis ci-dessus de l’EP2020-04 aident à déterminer si quelque chose de plus est présent.

Analyse : objet brevetable

[40] J’estime que les revendications 1 à 7 au dossier définissent un objet non brevetable.

[41] À titre préliminaire, bien que dans la décision finale, l’examinateur ait évalué l’irrégularité relative à l’objet non brevetable selon une pratique antérieure du Bureau, dans le résumé des motifs, l’examinateur a réévalué l’objet brevetable des revendications au dossier selon la pratique actuelle du Bureau, EP2020-04.

[42] L’examinateur a conclu que [traduction] « bien que les revendications mentionnent un serveur de commerce électronique, un serveur d’authentification de dédouanement, un serveur de gestion, un terminal douanier et un terminal d’utilisateur, la description décrit ces éléments comme des éléments informatiques génériques » et que [traduction] « le système est décrit comme n’utilisant que des réseaux génériques » (résumé des motifs, page 2).

[43] L’examinateur a en outre expliqué dans le résumé des motifs (pages 2 et 3) :

[traduction]

Ainsi, il n’y a aucune indication dans la spécification que des améliorations ont été apportées au fonctionnement des serveurs, des terminaux, de leurs composants ou des réseaux informatiques. Enfin, la description ne semble pas mettre l’accent sur des défis informatiques spécifiques, tels que les exigences architecturales ou de performance, associés aux éléments informatiques.

Par conséquent, les éléments de l’entrée, de sortie et de traitement ne constituent pas une seule invention réelle.

[44] L’examinateur a conclu qu’[traduction] « [é]tant donné que la divulgation est axée sur un ensemble de règles pour l’acquisition de renseignements de prédédouanement », alors [traduction] « l’invention réelle [d’un ensemble de règles administratives permettant le commerce] est considérée comme n’ayant pas d’existence physique et ne manifestant pas d’effet ou de changement physique perceptible » (résumé des motifs, page 3).

[45] Je constate que l’examinateur n’a pas directement répondu dans le résumé des motifs aux arguments du demandeur aux fins d’acceptation. Le demandeur n’a pas non plus répondu à l’opinion de l’examinateur présentée dans le résumé des motifs. Mais les arguments du demandeur dans sa réponse à la décision finale doivent être pris en compte dans cette révision.

[46] En tenant compte du contexte des arguments du demandeur dans sa réponse à la décision finale concernant l’évaluation de l’objet brevetable par l’examinateur selon une pratique de Bureau désormais obsolète, le demandeur a soutenu que (réponse à la décision finale, pages 5 et 6) :

[traduction]

Les fonctions distribuées de chacun des serveurs des présentes revendications contribuent à un système qui peut permettre à un fournisseur de commerce électronique de fournir un dédouanement préalable d’un produit et un traitement de livraison sans exiger que le fournisseur de commerce électronique construise l’infrastructure nécessaire pour fournir de tels services. De plus, ce traitement distribué permet à une autorité douanière de fournir un dédouanement anticipé des produits dans le pays et d’accélérer le traitement lorsque le produit entre dans le pays sans nécessiter que l’autorité douanière fournisse les ressources informatiques nécessaires pour permettre un tel traitement.

Un serveur de gestion distinct est fourni pour gérer l’aspect logistique de la livraison du produit au pays de destination. Le serveur de gestion s’appuie sur le serveur d’authentification de dédouanement pour interagir avec le terminal douanier afin d’obtenir le dédouanement avant l’achat du produit. Le serveur d’authentification de dédouanement doit établir une relation de confiance avec le terminal douanier et l’autorité douanière de sorte que le dédouanement soit effectué avant que le produit ne soit acheté ou expédié et également de sorte que le terminal douanier contacte le serveur d’authentification de dédouanement lorsque le produit arrive à l’autorité douanière. Le serveur de gestion peut ne pas souhaiter ou ne pas être en mesure d’établir une telle relation de confiance avec le terminal douanier et, par conséquent, le serveur d’authentification de dédouanement est exploité séparément de celui-ci. De plus, le serveur d’authentification de dédouanement peut être un serveur exploité par un tiers ou même par l’autorité douanière elle-même.

Ce qui précède illustre la nature compliquée et répartie de la fonctionnalité du système actuel. Cette nature répartie offre des avantages, comme illustré ci-dessus. Ainsi, contrairement à la position de l’examinateur, non seulement il existe de nouvelles caractéristiques qui ne sont pas présentes dans les systèmes antérieurs, mais la distribution de ces caractéristiques de la manière décrite dans les revendications offre des avantages.

[47] Le demandeur a conclu que (réponse à la décision finale, page 7) :

[traduction]

Compte tenu de ce qui précède, le demandeur soutient qu’il est clair que la présente demande concerne une configuration distribuée de serveurs pour permettre le dédouanement automatisé des produits avant l’achat et est conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[48] Au cœur de l’évaluation de l’objet brevetable, comme décrit ci-dessus sous le titre « Principes », il s’agit de déterminer ce que l’inventeur a réellement inventé ou prétend avoir inventé (Amazon au par. 42; Benjamin Moore au par. 68). Cela est mentionné dans l’EP2020-04 comme déterminant l’« invention réelle », ou autrement dit, identifiant la « découverte » (comme dans Schlumberger), ou « détermin[ant] en quoi consiste la découverte » (comme dans Benjamin Moore au par. 89). Étant donné que les revendications dans cette demande incarnent une invention mise en œuvre par ordinateur, l’évaluation porte sur le rôle, le cas échéant, des éléments informatiques dans l’invention réelle.

[49] En d’autres termes et en ce qui concerne la demande en instance, les éléments informatiques sont-ils simplement bien connus et sans amélioration en termes de leur fonctionnalité et donc en dehors de l’invention réelle, comme l’a soutenu l’examinateur? Ou bien la fonctionnalité distribuée des serveurs revendiqués faitelle partie de l’invention réelle, comme le soutient le demandeur? À mon avis, les éléments mis en œuvre par ordinateur, y compris les serveurs revendiqués, ne font pas partie de l’invention réelle.

[50] La revendication 1 incarne un système mis en œuvre par ordinateur comprenant trois serveurs. Au centre du système se trouve un serveur de gestion, connecté à un serveur de commerce électronique et à un serveur d’authentification de dédouanement. Le serveur de gestion, comme indiqué, gère les flux de renseignements entre les deux autres serveurs.

[51] Les flux de renseignements décrits dans la revendication 1 indiquent que le serveur de gestion demande l’enregistrement des renseignements sur le produit auprès du serveur d’authentification de dédouanement. En réponse, le serveur de gestion reçoit des renseignements de prédédouanement associés aux renseignements sur le produit, reçus d’un terminal sur le serveur d’authentification douanière.

[52] Les flux de renseignements décrits dans la revendication 1 indiquent également que le serveur de gestion transmet les renseignements de prédédouanement, y compris un droit de douane, associé au produit au serveur de commerce électronique. Les renseignements de prédédouanement sont affichés, avec les renseignements sur le produit, lorsqu’elles sont consultées par un terminal d’utilisateur. Le serveur de commerce électronique reçoit du terminal d’utilisateur une instruction pour faire circuler le produit à travers les douanes.

[53] De même, pour la revendication indépendante 2 visant un serveur de gestion, le serveur de gestion reçoit et demande l’enregistrement des renseignements sur le produit auprès du serveur d’authentification de dédouanement. Par la suite, le serveur de gestion reçoit des renseignements de prédédouanement associés aux renseignements sur le produit et aux renseignements de dédouanement reçus d’un terminal sur le serveur d’authentification douanière. Le serveur de gestion transmet les renseignements de prédédouanement, y compris un droit de douane, associé au produit, au serveur de commerce électronique.

[54] En résumé, en se fondant sur les fonctionnalités revendiquées et les flux de renseignements entre les serveurs revendiqués, des renseignements de prédédouanement pour un produit, y compris un droit de douane, sont demandés, enregistrés, créés et fournis à un utilisateur d’un site de commerce électronique lorsqu’il envisage d’acheter un produit. Les réalisations revendiquées prévoient qu’un utilisateur reçoit des renseignements de dédouanement sur le produit avant l’achat. Comme indiqué dans la lettre de révision préliminaire (page 17), mon opinion préliminaire était que les flux de renseignements intégrés dans les revendications représentatives 1 et 2 font partie de l’invention réelle. Mais la question devient : les éléments informatiques distribués mis en œuvre par ordinateur, incarnés dans les revendications représentatives 1 et 2 en tant que trois serveurs revendiqués qui permettent ces flux de renseignements, font-ils également partie de l’invention réelle?

[55] J’ai déjà établi ci-dessus sous « Interprétation téléologique » que les éléments mis en œuvre par ordinateur, tels que les serveurs, sont essentiels à l’invention revendiquée. Cependant, comme expliqué sous le titre « Principes », ce facteur ne fournit pas de conclusion définitive dans une évaluation de l’objet brevetable (Amazon aux par. 61 et 63; Schlumberger; Benjamin Moore au par. 94).

[56] La lettre de révision préliminaire (page 17) a indiqué mon opinion préliminaire selon laquelle le rôle des éléments mis en œuvre par ordinateur dans les revendications représentatives permet les flux de renseignements revendiqués de manière bien connue. Les éléments informatiques exécutent simplement la programmation selon les fonctions revendiquées et les flux de renseignements. La description ne décrit que des architectures bien connues de spécification et de réseautage mises en œuvre par ordinateur (description, par. 0009, figures 1 à 4) et des éléments mis en œuvre par ordinateur, bien connus (description, par. 0009, 0013, 0016 à 0022, 0024 à 0029, 0031 à 0035 et 0042).

[57] La lettre de révision préliminaire (pages 17 et 18) a en outre exprimé que l’exécution des flux de renseignements n’améliore pas le fonctionnement de l’ordinateur, par exemple, en termes d’utilisation de la mémoire ou de vitesse de traitement. Dans mon opinion préliminaire, les calculs nécessaires pour demander, enregistrer, créer et fournir les renseignements de prédédouanement à l’utilisateur pour un produit augmentent les exigences de traitement du système, plutôt que de les améliorer. De plus, la demande ne démontre aucune amélioration des éléments mis en œuvre par ordinateur résultant de l’exécution des flux de renseignements dans l’invention revendiquée.

[58] Cette situation dans la présente demande est analogue à celle soulignée par Amazon aux par. 61 et 62 décrivant Schlumberger, où les revendications d’une formule mathématique non brevetable n’étaient pas rendues brevetables en étant programmées dans un ordinateur fournissant une application pratique.

[59] La lettre de révision préliminaire (page 18) a en outre indiqué mon opinion préliminaire selon laquelle l’argument du demandeur concernant la fonctionnalité distribuée des serveurs revendiqués faisant partie de l’invention réelle n’était pas convaincant. Cette fonctionnalité distribuée fait déjà partie des connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art comme en témoigne le document D4 et comme il est noté ci-dessus dans l’analyse de la personne versée dans l’art et de ses connaissances générales courantes.

[60] La lettre de révision préliminaire (page 18) a noté que le document D4 divulgue un terminal intermédiaire connecté à un serveur qui gère les données relatives à la commande et à la livraison de produits (par. 0007). Le document D4 décrit que les résultats d’une inspection douanière, y compris le calcul des droits de douane, sont communiqués du terminal intermédiaire à l’utilisateur à travers le serveur (par. 0015).

[61] Mon opinion préliminaire présentée dans la lettre de révision préliminaire (page 18) a également noté que le serveur du document D4 fonctionne comme un intermédiaire qui gère les flux de renseignements entre le système douanier et le système de commerce électronique de manière similaire au serveur d’authentification de la demande en instance. Par conséquent, l’invention réelle de la demande en instance, lorsqu’elle est examinée par la personne versée dans l’art à la lumière des connaissances générales courantes, concerne davantage le moment des flux de renseignements, c’est-à-dire que les renseignements de prédédouanement sont déterminés et fournis à un utilisateur avant l’achat du produit.

[62] La lettre de révision préliminaire (pages 18 et 19) a conclu que, contrairement aux arguments du demandeur, la personne versée dans l’art comprendrait que les éléments mis en œuvre par ordinateur ne font pas partie de l’invention réelle, mais plutôt que l’invention réelle, telle que perçue par la personne versée dans l’art, est dirigée vers les flux de renseignements eux-mêmes et vers le moment où les renseignements douaniers sont mis à la disposition d’un utilisateur. Une telle invention réelle est un ensemble abstrait de règles ou un schéma qui permet de fournir à un utilisateur les renseignements de prédédouanement sur un produit avant l’achat du produit.

[63] En l’absence de toutes autres observations de la part du demandeur, j’adopte les opinions préliminaires ci-dessus pour ma révision finale. Par conséquent, à mon avis, les revendications représentatives 1 et 2 au dossier ne visent pas un objet brevetable au sens du terme « réalisation » tel qu’employé à l’article 2 de la Loi sur les brevets. Les revendications visent un objet exclusivement abstrait interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets. Un raisonnement similaire s’applique également aux autres revendications 3 à 7 au dossier.

Les revendications proposées corrigent-elles les irrégularités?

[64] Je ne considère pas que les revendications proposées corrigent les irrégularités dans les revendications au dossier.

[65] Dans la réponse à la décision finale, le demandeur a proposé des modifications à la revendication indépendante 1 pour incarner :

  • des zones économiques associées à la fois au site de commerce électronique et au terminal douanier;
  • des flux de renseignements revendiqués en utilisant l’expression [traduction] « moyens pour »;
  • des limitations supplémentaires précisant que les renseignements de prédédouanement sont associés au produit lorsqu’ils sont consultés ou recherchés par un terminal d’utilisateur sur le site de commerce électronique;
  • des limitations supplémentaires enregistrant des renseignements indiquant l’achèvement du traitement du dédouanement lorsque le produit arrive à l’autorité douanière.

[66] Des modifications similaires ont été proposées pour la revendication indépendante 2. L’expression [traduction] « moyens pour » a également été utilisée dans la revendication dépendante 6 proposée.

[67] La revendication 3 au dossier a été supprimée et les irrégularités liées aux revendications dépendantes ont été révisées pour les revendications proposées restantes.

[68] À mon avis, la personne versée dans l’art et ses connaissances générales courantes seraient les mêmes que celles identifiées ci-dessus. Je note que l’examinateur a soulevé une irrégularité du caractère indéfini concernant plusieurs revendications proposées dans le résumé des motifs. Comme indiqué dans la lettre de révision préliminaire (pages 19 et 20), mon opinion préliminaire était que les problèmes antécédents ou éditoriaux identifiés peuvent être facilement corrigés et n’affectent pas ma capacité à évaluer la validité des revendications proposées, étant donné que la personne versée dans l’art serait en mesure de comprendre le libellé des revendications proposées, la portée des revendications proposées et le sens des termes de revendication similaires aux revendications au dossier, comme discuté ci-dessus.

[69] La personne versée dans l’art considérerait également que les flux de renseignements, la fonctionnalité mise en œuvre par ordinateur et les éléments mis en œuvre par ordinateur sont tous essentiels, car la personne versée dans l’art comprendrait qu’il n’y a pas d’utilisation de langage indiquant qu’un des éléments est optionnel.

[70] La lettre de révision préliminaire (page 20) a également indiqué que mon analyse précédente de l’objet non brevetable des revendications déposées s’appliquait également aux revendications proposées : les flux de renseignements permettant de fournir à un utilisateur des renseignements de prédédouanement avant l’achat du produit ne modifient pas le rôle des éléments mis en œuvre par ordinateur dans les revendications proposées, étant donné que ces éléments mis en œuvre par ordinateur continuent à fonctionner de manière conventionnelle. L’invention réelle des revendications proposées n’inclut donc pas d’éléments mis en œuvre par ordinateur et est uniquement dirigée vers les flux de renseignements eux-mêmes, similaire à l’évaluation des revendications déposées.

[71] En l’absence de toutes autres observations de la part du demandeur, j’adopte les opinions préliminaires ci-dessus pour ma révision finale.

[72] Étant donné que l’invention réelle des revendications proposées est dirigée vers un ensemble abstrait de règles ou un schéma, l’objet des revendications proposées ne correspond pas à la signification du terme « réalisation » tel qu’employé à l’article 2 de la Loi sur les brevets et est uniquement dirigé vers un objet exclusivement abstrait interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

[73] Il s’ensuit que les revendications proposées 1 à 6 ne sont pas considérées comme une modification nécessaire en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Conclusions

[74] Les revendications 1 à 7 au dossier définissent un objet non brevetable, qui ne relève pas des catégories d’invention définies à l’article 2 de la Loi sur les brevets et interdites par le paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

[75] Les revendications proposées ne corrigeraient pas l’irrégularité liée à l’objet brevetable et ne sont pas considérées comme une modification « nécessaire » pour se conformer à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, comme l’exige le paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Recommandation de la Commission

[76] Compte tenu de mon analyse ci-dessus, je recommande que la demande soit rejetée pour les motifs suivants :

  • les revendications 1 à 7 au dossier visent un objet interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets et
  • les revendications 1 à 7 au dossier visent un objet qui est exclu de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 


Lewis Robart

Membre


 

Décision du commissaire

[77] Je souscris aux conclusions de la Commission et à sa recommandation de rejeter la demande au motif que :

  • les revendications 1 à 7 au dossier visent un objet interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets, et
  • les revendications 1 à 7 au dossier visent un objet qui est exclu de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[78] En conséquence, conformément à l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’accorder un brevet pour cette demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

Konstantinos Georgaras

 

Commissaire aux brevets

Fait à Gatineau (Québec)

ce 27e jour de mars 2025.

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.