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Référence : Brink’s Network, Inc. (Re), 2024 CACB 15

Décision du commissaire no 1674

Commissioner’s Decision #1674

Date : 2024-07-04

SUJET :

C00

Divulgation—Caractère adéquate ou inadéquat de la description

 

J00

Objet des demandes—Signification de la technique

 

J10

Objet des demandes—Programmes d'ordinateur

 

O00

Évidence

 

 

 

TOPIC:

C00

Disclosure—Adequacy or Deficiency of Description

 

J00

Subject Matter of Applications—Meaning of Art

 

J10

Subject Matter of Applications—Computer Programs

 

O00

Obviousness

 

Demande no 2 693 164
Application No. 2693164


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets (DORS/96-423) dans leur version antérieure au 30 octobre 2019, la demande de brevet numéro 2 693 164 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251). La recommandation de la Commission d’appel des brevets et la décision du commissaire sont de rejeter la demande.

Agent du Demandeur :

Bereskin & Parr LLP/SENCRL, srl

40 étage, Scotia Plaza

40, rue King Ouest

Toronto (Ontario), M5H 3Y2

 


 

Introduction

[1] La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet refusée numéro 2 693 164 qui s’intitule « PROCÉDÉ ET SYSTÈME POUR AVANCER UN CRÉDIT POUR DES ENCAISSEMENTS D’ARGENT LIQUIDE » et qui appartient à BRINK'S NETWORK, INC. La Commission d’appel des brevets (la « Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251) (les « Règles sur les brevets »). Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, la Commission recommande que le commissaire aux brevets rejette la demande au motif que les revendications au dossier auraient été évidentes et que la description n’est pas conforme aux Règles sur les brevets.

Contexte

La demande

[2] La présente demande a été déposée sous le régime du Traité de coopération en matière de brevets, et la date de dépôt au Canada est le 24 juillet 2008. Elle est devenue accessible au public le 5 février 2009.

[3] La présente demande a trait à un procédé visant à fournir un crédit bancaire aux détaillants pour l’encaissement d’argent liquide au cours d’une période donnée. Plutôt que de porter au crédit d’un détaillant uniquement les encaissements d’argent liquide après qu’ils ont été déposés à une banque, le procédé divulgué prévoit qu’un détaillant reçoit une avance de crédit fondée sur l’argent liquide déposé dans un coffre-fort électronique à un établissement de détaillant. Le crédit est avancé en fonction des fichiers de données transmis à la banque indiquant le montant des encaissements d’argent liquide. Le crédit peut être ajusté ultérieurement en fonction de tout écart entre le montant de crédit avancé et le montant réellement reçu par la banque.

Historique de la poursuite

[4] Le 6 septembre 2019, une décision finale (« DF ») a été rédigée conformément au paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets (DORS/96-423) dans leur version antérieure au 30 octobre 2019. La DF indiquait que la demande est irrégulière aux motifs que :

[5] Dans une réponse à la DF (« RDF ») du 4 mars 2020, le Demandeur a soumis un ensemble de revendications modifiées proposées 1 à 17 (l’« ensemble de revendications proposées 1 ») et a soumis des arguments en faveur de la brevetabilité.

[6] L’examinateur ayant jugé que la demande n’était pas conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets, la demande a été transmise à la Commission pour révision le 27 mai 2020, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs (« RM »). Le RM a indiqué que les revendications au dossier sont toujours considérées comme visant un objet non prévu par la Loi et qui aurait été évident. En ce qui a trait à l’ensemble de revendications proposées 1, le RM indiquait que, même si elle corrigeait l’irrégularité liée à l’objet non prévu par la Loi, elle ne corrigerait pas l’irrégularité liée à l’évidence et introduirait une irrégularité liée à l’absence de fondement dans les revendications.

[7] Dans une lettre en date du 29 mai 2020, la Commission a transmis au Demandeur une copie du RM et lui a demandé de confirmer qu’il souhaitait toujours la révision de la demande.

[8] Dans une réponse au RM datée du 21 août 2020 (« RRM »), le Demandeur a confirmé qu’il souhaitait toujours que l’on procède à une révision de la demande.

[9] Le Comité soussigné a été affecté à la révision de la présente demande et à la présentation d’une recommandation au commissaire aux brevets quant à la décision à rendre.

[10] Dans une lettre de révision préliminaire (« lettre de RP ») envoyée le 16 avril 2024, le Comité a exposé son analyse préliminaire des questions en suspens. Plus particulièrement, l’opinion préliminaire du Comité était la suivante :

  • les revendications 1 à 17 au dossier visent un objet brevetable qui est conforme à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets (en vertu de la plus récente pratique énoncée dans l’EP2020-04);
  • les revendications 1 à 17 au dossier auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art compte tenu de l’art antérieur et des connaissances générales courantes (CGC) pertinentes, et elles ne sont donc pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • la description n’est pas conforme aux paragraphes 57(1) et (2) des Règles sur les brevets (une irrégularité nouvellement constatée par le Comité).

[11] L’opinion préliminaire du Comité était que l’ensemble de revendications proposées 1 était également conforme à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets, aurait été évident et n’était donc pas conforme à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets, et introduirait dans les revendications un nouvel objet inadmissible, en contravention à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets.

[12] La lettre de RP a donné au Demandeur une occasion de présenter des observations orales et écrites.

[13] Le Demandeur a demandé et obtenu une prolongation de deux semaines des délais prévus dans la lettre de RP. Au cours d’une conversation téléphonique tenue le 23 mai 2024, l’agent du Demandeur a confirmé qu’il ne serait pas nécessaire de tenir une audience, mais que des observations écrites pourraient être présentées dans le délai prolongé pour les présenter.

[14] Dans une observation datée du 30 mai 2024 (« RRP »), le Demandeur a fourni un ensemble modifié des revendications proposées 1 à 17 (« ensemble de revendications proposées 2 ») pour traiter de l’irrégularité potentielle liée à un nouvel objet inadmissible, a proposé des modifications à la description et a fourni d’autres arguments pour étayer le caractère non évident des revendications.

[15] Après avoir examiné les observations et les modifications proposées dans la RRP, l’analyse finale du Comité figure ci-dessous.

Questions

[16] Les questions à trancher dans le cadre de la présente révision finale sont les suivantes :

  • les revendications 1 à 17 au dossier visent un objet brevetable qui est conforme à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 1 à 17 au dossier auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art compte tenu de l’art antérieur et des connaissances générales courantes (CGC) pertinentes, et elles ne sont donc pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • la description n’est pas conforme aux paragraphes 57 (1) et (2) des Règles sur les brevets.

[17] Après avoir examiné les revendications au dossier et la description, nous révisons l’ensemble de revendications proposées 2 joint à la RRP, ainsi que les modifications proposées à la description afin de déterminer si elles seraient considérées comme des modifications nécessaires en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Interprétation des revendications

Principes juridiques et pratiques du Bureau

[18] L’interprétation téléologique est antérieure à tout examen de la validité (Free World Trust c. Électro Santé Inc., 2000 CSC 66 au par. 19 [Free World Trust]).

[19] Conformément aux arrêts Free World Trust et Whirlpool Corp c. Camco Inc, 2000 CSC 67, l’interprétation téléologique est effectuée du point de vue de la personne versée dans l’art à la lumière des connaissances générales courantes (« CGC ») pertinentes, en considérant l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins. En plus d’interpréter le sens des termes d’une revendication, l’interprétation téléologique distingue les éléments essentiels de la revendication des éléments non essentiels. La question de savoir si un élément est essentiel dépend de l’intention exprimée dans la revendication ou déduite de celle-ci et de la question de savoir s’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art qu’une variante a un effet matériel sur le fonctionnement de l’invention.

[20] L’énoncé de pratique EP2020-04 note que tous les éléments dans une revendication sont présumés être un élément essentiel, à moins qu’une telle présomption soit contraire au libellé de la revendication ou que le contraire soit établi (voir également Free World Trust au par. 57, Distrimedic Inc c. Dispill Inc, 2013 CF 1043 au par. 201).

Analyse

La personne versée dans l’art

[21] Dans la lettre de RP, aux pages 3 et 4, nous énonçons notre opinion préliminaire de la personne versée dans l’art, en adoptant la description figurant dans la DF, mais en la complétant par un profil supplémentaire :

[traduction]

Dans la DF, à la page 2, la personne versée dans l’art a été décrite en ces termes :

Une équipe de gestionnaires d’entreprise et de programmeurs informatiques.

La caractérisation ci-dessus n’a pas été contestée dans la RDF.

Étant donné que l’objet de l’invention décrite et revendiquée comprend des procédés comme l’attribution du crédit et de rajustement ou le rapprochement du crédit fondé sur la vérification du dépôt, selon notre opinion préliminaire, la personne versée dans l’art devrait également inclure, au sein de l’équipe susmentionnée, une personne qui connaît les principes comptables de base.

[22] Le Demandeur n’a formulé aucun commentaire dans la RDF sur ce qui précède. Nous poursuivons donc en conséquence.

Les connaissances générales courantes pertinentes

[23] Aux pages 4 à 6 de la lettre de RP, nous exposons notre opinion préliminaire concernant les points pertinents des CGC, qui comprenaient les points tirés de la DF, ainsi que d’autres points déterminés par le Comité :

La DF, à la page 2, indiquait que les CGC pertinentes étaient illustrées par les discussions du contexte dans les antériorités D2, D4, D5 et D8, indiquées ci-dessous, ainsi que par la discussion du contexte portant sur la présente demande :

D2 :

US 7 216 098 B1

Le 8 mai 2007

Brooks et coll.

D4 :

Archive Internet du site Web du Demandeur, tel qu’il a été saisi le 8 juin 2004
https://web.archive.org/web/20040608083944/http://www.us.brinksinc.com:80/compusafeservice/how_it_all_works.htm

D5 :

US 6 067 530 A

Le 23 mai 2000

Brooks et coll.

D8 :

Entrée Wikipedia pour « Automated Cash Handling », le 13 juillet 2007
https://en.wikipedia.org/w/index.php?title=Automated%20cash%20handling&oldid=144428678

Selon la DF, à la page 3, les CGC pertinentes comprendraient ce qui suit :

la connaissance des aspects opérationnels quotidiens de l’exploitation d’un commerce de détail, y compris la gestion des comptes clients et des comptes fournisseurs, et la nécessité d’assurer des liquidités suffisantes pour la poursuite des activités de ce commerce de détail;

• s’assurer que diverses sources de financement ont été utilisées pour maintenir des liquidités suffisantes, y compris les fonds en caisse, les capitaux propres et les lignes de crédit disponibles, ainsi que les risques de sécurité connexes pour chaque moyen de financement;

• la connaissance de divers systèmes de gestion de l’encaisse qui offrent un moyen plus efficace et plus sûr de gérer l’argent liquide conservé dans un établissement de commerce au détail donné;

• la connaissance des installations sécuritaires de coffre-fort de dépôt provisoire ou de caisse à argent sur place utilisées dans les établissements de commerce au détail;

• la connaissance que le traitement automatisé de l’argent liquide dans les applications de vente au détail serait effectué au moyen de matériel et de logiciels spécialement conçus (y compris des accepteurs ou valideurs de l’argent) aux fins de la prévention des pertes, de la dissuasion du vol et de la réduction du temps de gestion pour la surveillance des opérations du tiroir-caisse;

• la connaissance selon laquelle certains systèmes de traitement automatisé de l’encaisse a permis le réseautage et l’exploitation à distance (distribution, comptage, déclaration}, et que l’exploitation à distance d’un système de gestion automatisée de l’argent liquide faciliterait les économies de coûts et l’efficience en centralisant toutes les activités liées à l’encaisse dans un seul endroit qui pourrait surveiller et contrôler à distance les opérations au comptant;

• la connaissance de la capacité de transmettre à un serveur central des rapports comportant des montants d’argent liquide sur place calculés;

• la connaissance des architectures de réseau standard, l’adaptation des applications logicielles pour répondre aux exigences opérationnelles particulières de la vente au détail, la programmation de bases de données, ainsi que le matériel informatique courant.

Le Demandeur n’a pas contesté la caractérisation précédente des CGC pertinentes dans la RDF.

Au CGC ci-dessus, nous ajouterons que, tels que décrits à la page 10 de la présente demande, la transmission électronique de données et le cryptage, ainsi que le matériel ou logiciel capable d’effectuer cette transmission et ce cryptage, étaient bien connus.

De plus, étant donné que la personne versée dans l’art aurait une formation en comptabilité et qu’elle connaîtrait les aspects opérationnels quotidiens de l’exploitation d’un commerce au détail, notre opinion préliminaire est également qu’une telle personne aurait eu connaissance des techniques comptables de suivi du crédit avancé à un tel commerce de détail.

Nous ajouterions également les connaissances courantes des coffres-forts exemplaires qui peuvent être utilisés pour mettre en œuvre le procédé et le système revendiqués, comme le coffre-fort CompuSafe 4000ᴹᴰ de Brink’s, mentionné dans la présente demande aux paragraphes [0031] et [0061] et illustré à la figure 3.

Comme il est indiqué au paragraphe [0031], un tel coffre-fort peut reconnaître la dénomination de la monnaie et accumuler des totaux de dépôt en espèces sur une période donnée, par exemple un jour ouvrable. Les lecteurs de billets acceptent l’argent liquide et le transfèrent dans des cassettes scellées. Des rapports de dépôts sont produits, indiquant le contenu des cassettes par dénomination, par dépôt total et d’autres renseignements.

Au paragraphe [0061], le Demandeur décrit la déclaration des jours ouvrables dans le contexte des coffres-forts qui peuvent être utilisés pour mettre en œuvre le procédé et le système revendiqués, que ces coffres-forts produisent des rapports qui indiquent les encaissements d’argent liquide ventilés par chaque jour ouvrable partiel et chaque jour ouvrable complet. Le Demandeur déclare ce qui suit :

[traduction]

Les coffres-forts dotés de cette capacité, comme le coffre-fort CompuSafe 4000ᴹᴰ de Brink’s, peuvent être utilisés dans le cadre de la présente invention pour fournir la caractéristique supplémentaire décrite ci-dessus de répartition et de déclaration de crédit sur la base des jours ouvrables.

Le Demandeur n’affirme nulle part avoir inventé, dans le cadre de la présente demande, le genre de coffres-forts qui peuvent être utilisés pour mettre en œuvre le procédé et les systèmes revendiqués. Nous reconnaissons bien sûr que le coffre-fort particulier mentionné, soit le coffre-fort CompuSafe 4000ᴹᴰ de Brink’s, est une invention antérieure du Demandeur. Toutefois, compte tenu de la façon dont ces coffres-forts sont décrits dans la demande, nous croyons comprendre qu’ils étaient bien connus à la date de la revendication et que les fonctions décrites en lien avec eux peuvent être considérées comme faisant partie des CGC. Tel qu’il est indiqué dans le passage cité ci-dessus, le coffre-fort CompuSafe 4000ᴹᴰ de Brink’s est présenté comme un exemple de ces coffres-forts et, à notre avis, peut être considéré comme représentatif du type de coffre-fort qui peut être utilisé.

Nous ajouterions également aux CGC pertinentes la divulgation figurant dans la section « CONTEXTE DE L’INVENTION » du document D2 des exploitants traditionnels de coffres-forts pour le dépôt en espèces qui remplissent des bordereaux de dépôt lorsqu’ils retirent de l’argent liquide d’un coffre-fort. Le bordereau de dépôt comprend des renseignements sur l’argent retiré et il est transporté avec l’argent à une banque. Au moment de réception de l’argent liquide, la banque rapproche l’argent liquide réellement transporté avec celui qui est indiqué dans le bordereau de dépôt.

[24] Le Demandeur n’a formulé aucun commentaire dans la RDF sur les CGC pertinentes. Nous procédons donc sur la base des CGC pertinentes précitées.

Les revendications au dossier

[25] La présente demande compte cinq revendications indépendantes : 1, 6, 9, 11 et 15.

[26] La revendication indépendante 1 porte sur un procédé visant à accorder un crédit à un détaillant pour les encaissements d’argent liquide, un procédé qui utilise un coffre-fort dans l’établissement du détaillant, ce qui comprend un lecteur de billets pour accepter l’argent liquide afin de déterminer la dénomination de l’argent. Le coffre-fort utilise le lecteur de billets pour totaliser le montant des encaissements d’argent liquide et produit un fichier de données qui est transmis à l’externe, de sorte que l’argent peut être porté au crédit du détaillant avant qu’il ne soit réellement déposé à la banque. Une fois que l’argent liquide est transféré ultérieurement à une installation et que le montant déposé a été vérifié, le montant du crédit antérieur peut être rajusté au besoin, ces rajustements étant suivis et ce suivi comprenant l’identification du créateur du dépôt et l’identité du personnel à l’installation qui a par la suite traité le dépôt.

[27] Les revendications indépendantes 6, 9 et 11 décrivent un procédé semblable à celui de la revendication 1, avec certaines variantes, comme l’endroit où le fichier de données est transmis, les détails du fichier de données et le procédé appliqué à plusieurs points de vente au détail en même temps. La revendication indépendante 15 vise un système permettant d’accorder un crédit à un détaillant pour les encaissements d’argent liquide, le système comprenant les coffres-forts du type décrit dans le procédé, ainsi que les coffres-forts et une installation effectuant les types d’étapes du procédé énoncés dans les autres revendications indépendantes.

[28] Nous considérons la revendication 1 au dossier comme représentative de l’objet revendiqué :

1. Un procédé pour accorder un crédit à un détaillant aux fins des encaissements d’argent liquide, composé des étapes suivantes :

encaisser l’argent liquide par un détaillant au cours de plusieurs jours ouvrables;

déposer par le détaillant les encaissements d’argent liquide dans un coffre-fort dont il dispose, le coffre-fort comprenant un lecteur de billets pour l’acceptation de l’argent liquide et pour l’établissement de la dénomination de l’argent liquide;

calculer, par un processeur du coffre-fort, à la fin de la journée pour chacun des jours ouvrables, un montant total d’argent liquide déposé dans le coffre-fort entre la fin de la journée précédant le jour ouvrable respectif et la fin de la journée pour le jour ouvrable respectif;

transmettre par voie électronique, à la fin de la journée de chaque jour ouvrable, un fichier de données respectif indiquant le montant respectif total calculé;

prendre les dispositions nécessaires, chaque jour ouvrable, permettant à la banque d’accorder un crédit équivalent au montant respectif total calculé indiqué dans le fichier de données respectif transmis par voie électronique;

transférer à une installation l’argent liquide déposé dans le coffre-fort;

vérifier à l’installation le montant de l’argent liquide pour produire un montant vérifié;

rajuster le crédit déjà accordé au détaillant en fonction des différences, le cas échéant, entre le montant vérifié et le montant total calculé de l’argent liquide déposé dans le coffre-fort tel qu’il est indiqué dans la fiche de données transmise;

suivre les rajustements de crédit au détaillant et saisir les rajustements suivis dans une base de données,

dans le cadre duquel l’étape du suivi comprend le suivi de l’identité d’un créateur d’un ou de plusieurs dépôts correspondant à chaque rajustement et le suivi de l’identité du personnel de l’installation qui traite le ou les dépôts à l’installation, et la saisie des identités suivies dans la base de données.

[29] Comme nous l’avons indiqué dans la lettre de RP, à la page 7, aucune question n’a été soulevée au cours de la poursuite de la présente demande quant à la signification ou à la portée des termes utilisés dans les revendications au dossier. Nous poursuivons en supposant que la signification et la portée des revendications auraient été claires à la personne versée dans l’art.

Les éléments essentiels

[30] À la page 7 de la lettre de RP, nous avons indiqué que, selon la pratique actualisée de l’EP2020-04, l’ensemble des éléments des revendications au dossier sont considérés comme essentiels aux fins de nos analyses :

La DF a présenté aux pages 2 à 4 une analyse de l’interprétation téléologique des revendications au dossier conformément à une pratique antérieure du Bureau, remplacée maintenant par l’EP2020-04.

En ce qui a trait aux revendications au dossier, la personne versée dans l’art comprendrait qu’il n’y a aucune formulation dans les revendications qui indique que les éléments de chaque revendication sont facultatifs, des solutions de rechange ou une réalisation préférée.

Par conséquent, notre opinion préliminaire est que, conformément à l’EP2020-04, tous les éléments des revendications au dossier sont considérés comme essentiels.

[31] Le Demandeur n’a pas formulé de commentaires sur la position susmentionnée dans la RRP et nous poursuivons en conséquence.

Objet brevetable

Principes juridiques et pratiques du Bureau

[32] Toute invention brevetable doit correspondre à la définition établie à l’article 2 de la Loi sur les brevets, y compris dans l’une des catégories qui y sont définies :

« invention » Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[33] Le paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets prévoit également ce qui suit :

Il ne peut être octroyé de brevet pour de simples principes scientifiques ou conceptions théoriques.

[34] L’EP2020-04 décrit l’approche du Bureau des brevets pour déterminer si une revendication est un objet brevetable :

Afin d’être un objet brevetable et de ne pas être interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets, l’objet défini par une revendication doit être limité à ou moins vaste que l’invention en question qui est dotée d’une existence physique ou est une manifestation d’un effet ou changement physique discernable et qui a trait à un domaine de réalisations manuelles ou industrielles, ce qui signifie des procédés comportant ou visant des sciences appliquées et industrielles, afin de distinguer, en particulier, des beaux-arts ou des œuvres d’art qui ne sont originales que dans un sens artistique ou esthétique.

[35] La détermination de l’invention réelle est une question pertinente et nécessaire dans l’évaluation d’un objet brevetable (Canada (Procureur général) c. Amazon.com, Inc, 2011 CAF 328 au par. 42 [Amazon]). Comme l’a déclaré la Cour d’appel fédérale dans Canada (Procureur général) c. Benjamin Moore & Co, 2023 CAF 168 au par. 68 [Benjamin Moore], cette décision est conforme à la déclaration de cette Cour dans Schlumberger Canada Ltd c. Commissaire aux brevets, [1982] 1 CF 845 (CA) [Schlumberger] selon laquelle une évaluation d’un objet brevetable consiste à déterminer ce qui, selon la demande, a été découvert. L’invention réelle est déterminée dans le contexte d’une découverte ou nouvelle connaissance et doit satisfaire en bout de compte « l’exigence du caractère matériel » qui est implicite à la définition « d’invention » (Amazon, aux par. 65 et 66).

[36] Amazon, au paragraphe 44, nous dit « qu’une revendication de brevet peut être exprimée dans un langage qui [est] trompeur, délibérément ou par inadvertance » et que ce qui semble à première vue être un « art » ou un « procédé » peut en fait être une revendication d’une formule mathématique non brevetable, comme c’était le cas dans Schlumberger.

[37] Cette opinion est exprimée dans la position de la Cour pour l’affaire Amazon que la présence d’une application pratique n’est peut-être pas, dans certains cas, suffisante pour satisfaire à l’exigence du caractère matériel, lequel exige quelque chose avec une présence physique ou qui manifeste un effet ou un changement discernable (Amazon, aux par 66 et 69). Pour illustrer ce point, Amazon fait référence à Schlumberger, où les revendications « n’ont pas été déclarées valides en raison du fait qu’elles avaient trait à l’utilisation d’un outil matériel, un ordinateur, pour donner une application pratique à la nouvelle formule mathématique » (Amazon, au par. 69).

[38] Les préoccupations relatives à l’objet brevetable concernant l’utilisation bien connue d’un ordinateur pour traiter un algorithme, illustrées par Schlumberger, sont exprimées dans les facteurs établis dans l’EP2020–04 qui peuvent être considérés dans l’examen des inventions mises en œuvre au moyen d’un ordinateur, à savoir :

  • le simple fait qu’un ordinateur figure parmi les éléments essentiels de l’invention revendiquée ne signifie pas nécessairement que l’invention revendiquée vise un objet brevetable;
  • un algorithme en soi est un objet abstrait non brevetable et interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;
  • un ordinateur programmé pour traiter un algorithme abstrait d’une manière bien connue sans plus ne fera pas de l’algorithme un objet brevetable;
  • si le traitement d’un algorithme améliore la fonctionnalité de l’ordinateur, l’ordinateur et l’algorithme formeraient ensemble une seule invention réelle qui serait un objet brevetable.

[39] Les facteurs ci-dessus et les préoccupations générales concernant l’utilisation bien connue d’un ordinateur pour traiter de nouveaux algorithmes abstraits peuvent être considérés comme impliquant des considérations de nouveauté ou d’ingéniosité. Le droit canadien n’interdit pas les considérations de la nouveauté ou de l’inventivité des éléments d’une revendication dans l’évaluation de l’objet brevetable et cela est appuyé dans des situations comme celle de Schlumberger où un outil connu, un ordinateur, est utilisé pour donner à une formule mathématique abstraite une application pratique (Benjamin Moore aux par. 69 et 70, faisant référence à Amazon). Ces considérations aident avec la détermination de la découverte ou de la nouvelle connaissance, du procédé d’application et de l’invention réelle (Benjamin Moore au par. 89) qui sont en bout de compte mesurés en fonction de l’exigence du caractère matériel.

[40] Comme il est noté dans Benjamin Moore au par. 94 (et pareillement exprimé dans Amazon au par. 61), l’exigence du caractère matériel ne sera probablement pas comblée sans quelque chose de plus que seulement un instrument bien connu, comme un ordinateur, étant utilisé pour mettre en œuvre un procédé abstrait. Les facteurs énoncés ci-dessus dans l’EP2020-04 aident à déterminer si quelque chose de plus est présent.

Analyse

[41] Aux pages 9 et 10 de la lettre de RP, nous établissons notre analyse préliminaire quant à la raison pour laquelle les revendications 1 à 17 au dossier sont conformes à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets et visent donc un objet brevetable :

Dans notre opinion préliminaire, les revendications 1 à 17 au dossier visent un objet brevetable qui satisfait à « l’exigence du caractère matériel » qui est implicite à la définition « d’invention » (Amazon, aux par. 65 et 66) et est donc conforme à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

Chacune des revendications indépendantes 1, 6, 9, 11 et 15 comprend, dans le cadre du procédé ou du système revendiqué, l’utilisation d’un coffre-fort dans l’établissement d’un détaillant, un coffre-fort qui comprend un lecteur de billets pour l’acceptation d’argent liquide physique, le lecteur de billets déterminant également la dénomination de l’argent liquide déposé. Même si le coffre-fort comprend un processeur qui effectue des calculs abstraits, comme le montant total de l’argent liquide déposé sur une période donnée, et qui exécute d’autres fonctions d’un ordinateur générique, comme la transmission des renseignements sur un réseau, notre opinion préliminaire est qu’un tel dispositif ne peut être qualifié d’ordinateur générique qui traite un algorithme d’une manière bien connue. Le coffre-fort est un dispositif spécialisé dont les composantes ne font pas partie d’un système informatique générique, notamment un lecteur de billets doté de la fonctionnalité susmentionnée.

Le lecteur de billets et sa fonctionnalité connexe fonctionnent en collaboration avec les autres fonctions du coffre-fort, comme le calcul du montant total de l’argent liquide déposé sur une période donnée et la transmission des renseignements sur le dépôt au moyen d’un réseau, et font partie de l’invention réelle des revendications indépendantes.

Par conséquent, l’utilisation du coffrefort visé par les revendications, à notre avis, n’est pas semblable à l’utilisation d’un ordinateur générique pour effectuer les calculs d’une manière prévue, comme c’était le cas dans Schlumberger. Il s’agit de plus qu’un instrument bien connu, comme un ordinateur, qui est utilisé pour mettre en œuvre un procédé abstrait (Benjamin Moore, au par. 94, exprimé de façon semblable dans Amazon, au par. 61). Les revendications au dossier définissent donc une invention réelle qui est dotée d’une existence physique ou est une manifestation d’un effet ou changement physique discernable (Amazon, aux par. 66 et 69).

[42] Le Demandeur a reconnu, sans toutefois fournir de commentaires, l’opinion préliminaire ci-dessus concernant les revendications au dossier dans le RRP.

[43] Pour les motifs énoncés dans la lettre de RP, précités, nous concluons que les revendications 1 à 17 au dossier visent un objet qui satisfait à « l’exigence du caractère matériel » qui est implicite à la définition « d’invention » (Amazon, aux par. 65 et 66) et est donc conforme à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

Évidence

Principes juridiques

[44] L’article 28.3 de la Loi sur les brevets énonce l’exigence législative selon laquelle l’objet revendiqué ne doit pas être évident :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a)

qui a été faite, soit plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, soit, si la date de la revendication est antérieure au début de cet an, avant la date de la revendication, par le Demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b)

qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[45] Dans Apotex Inc c. Sanofi–Synthelabo Canada Inc, 2008 CSC 61 [Sanofi], la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, lorsqu’il s’agit d’évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes reproduite ci-dessous, que nous utilisons ci-dessous dans notre analyse :

(1)(a)

Identifier la « personne versée dans l’art »,

(b)

Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2)

Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3)

Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous‑tend la revendication ou son interprétation;

(4)

Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent‑elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent‑elles quelque inventivité?

Analyse

[46] Dans la lettre de RP, aux pages 11 à 16, nous avons fourni notre analyse préliminaire de l’évidence. Notre opinion préliminaire est que les revendications 1 à 17 au dossier auraient été évidentes eu égard à l’antériorité D2 des CGC pertinentes :

(1)a) Identifier la « personne versée dans l’art »

La personne versée dans l’art a été définie ci-dessus dans la section « Interprétation téléologique ». Nous appliquons la même définition ici.

(1)b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne

La CGC pertinente a également été identifiée dans le cadre de l’analyse de la construction téléologique. Notre opinion préliminaire est que la même CGC s’applique aux fins de l’évaluation de l’évidence.

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

Dans cette évaluation, nous avons tenu compte de tous les éléments essentiels des revendications au dossier. Notre opinion préliminaire est que la combinaison des éléments essentiels de chaque revendication représente également leurs concepts inventifs. Cela est conforme à l’approche adoptée dans la DF, où tous les éléments de la revendication représentative 1 ont été présentés comme représentant son concept inventif.

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous‑tend la revendication ou son interprétation

Nous commençons notre évaluation par la revendication 1 au dossier. Nous présentons ci-dessous un tableau comparant les éléments de la revendication 1 à ceux de l’antériorité D2.

Éléments de la revendication 1

Divulgation correspondante de D2

1. Un procédé pour accorder un crédit à un détaillant aux fins des encaissements d’argent liquide, composé des étapes suivantes :

 

encaisser l’argent liquide par un détaillant au cours de plusieurs jours ouvrables;

Colonne 1, ligne 61 à la colonne 2, ligne 1 : système de contrôle de l’argent liquide pour les encaissements d’argent liquide sur une période comptable (par exemple, un jour ouvrable). L’argent liquide est continuellement encaissé, mais des rapports sont produits à la fin de chaque jour ouvrable (voir par exemple, la colonne 5, lignes 51 à 53).

déposer par le détaillant les encaissements d’argent liquide dans un coffre-fort dont il dispose, le coffre-fort comprenant un lecteur de billets pour l’acceptation de l’argent liquide et pour l’établissement de la dénomination de l’argent liquide;

Colonne 1, lignes 61 à 67 : [traduction] « Le système de contrôle de l’argent liquide comprend un assemblage de coffre-fort, y compris un coffre-fort pour sécuriser l’argent liquide et un lecteur de devises jumelé au coffre-fort pour déterminer le montant d’argent liquide reçu dans le coffre-fort. Une unité de contrôle centrale est configurée pour recevoir les renseignements sur le dépôt provenant de l’assemblage de coffre-fort et pour générer et transmettre des rapports sur les renseignements sur le dépôt accumulés au cours d’une période comptable. » Voir également la colonne 4, lignes 3 à 15 et la figure 1, caractéristique 7n.

calculer, par un processeur du coffre-fort, à la fin de la journée pour chacun des jours ouvrables, un montant total d’argent liquide déposé dans le coffre-fort entre la fin de la journée précédant le jour ouvrable respectif et la fin de la journée pour le jour ouvrable respectif;

Voir la colonne 1, ligne 61 à la colonne 2, ligne 1, précités. Rapports produits sur une période comptable, par exemple, un jour ouvrable. Voir également la colonne 8, lignes 64 à 66 : renseignements sur l’argent liquide déposé pendant la journée et transmis à un serveur de renseignements sur l’argent liquide et la colonne 5, lignes 51 à 59.

transmettre par voie électronique, à la fin de la journée de chaque jour ouvrable, un fichier de données respectif indiquant le montant respectif total calculé;

Voir le renvoi à la colonne 8, lignes 64 à 66, précité. Voir également la colonne 5, ligne 65 à la colonne 6, ligne 6.

prendre les dispositions nécessaires, chaque jour ouvrable, permettant à la banque d’accorder un crédit équivalent au montant respectif total calculé indiqué dans le fichier de données respectif transmis par voie électronique;

Voir la colonne 11, lignes 4 à 14 : [traduction] « Dans un autre exemple, la banque peut utiliser les renseignements sur l’argent liquide pour autoriser ou utiliser immédiatement l’argent liquide retiré de l’établissement de l’entreprise, avant qu’il ne soit déposé à la banque […] »

transférer à une installation l’argent liquide déposé dans le coffre-fort;

Voir le passage ci-dessus, ainsi que la colonne 7, lignes 37 à 50, la colonne 9, lignes 10 à 12 et la colonne 10, lignes 34 à 37.

vérifier à l’installation le montant de l’argent liquide nécessaire pour produire un montant vérifié;

Voir la colonne 10, lignes 34 à 58 et la discussion sur un agent de vérification.

rajuster le crédit déjà accordé au détaillant en fonction des différences, le cas échéant, entre le montant vérifié et le montant total calculé de l’argent liquide déposé dans le coffre-fort tel qu’il est indiqué dans la fiche de données transmise;

Même si le document D2 divulgue la vérification du montant d’argent liquide recueilli à un établissement d’entreprise et/ou le rapprochement avec ce qui a été déposé dans une banque, ainsi que l’attribution du crédit à une entreprise avant que l’argent liquide ne soit retiré d’un coffre-fort ou après son retrait et avant son dépôt dans une banque, le document D2 ne traite pas du rajustement du crédit fondé sur la vérification et le rapprochement.

suivre les rajustements de crédit au détaillant et saisir les rajustements suivis dans une base de données,

Puisque le document D2 ne traite pas des rajustements de crédit, il ne traite pas du suivi de ces rajustements. Le document D2 divulgue le suivi des dépôts de l’argent liquide au coffre-fort en fonction de la personne qui a effectué le dépôt (colonne 4, lignes 25 à 45). Le document D2 divulgue également un rapprochement de l’argent liquide reçu en magasin et/ou une vérification des dépôts bancaires (le document D2 à la colonne 10, ligne 65, à la colonne 11, ligne 3, ainsi qu’à la colonne 10, lignes 34 à 58 et la discussion sur un agent de vérification).

dans le cadre duquel l’étape du suivi comprend le suivi de l’identité d’un créateur d’un ou de plusieurs dépôts correspondant à chaque rajustement et le suivi de l’identité du personnel de l’installation qui traite le ou les dépôts à l’installation, et la saisie des identités suivies dans la base de données.

Comme il a été mentionné précédemment, le document D2 divulgue le suivi des personnes qui effectuent des dépôts dans les coffres-forts. Le document D2 divulgue également le suivi de l’identité du service blindé qui transporte l’argent liquide du coffre-fort (le document D2, la colonne 9, lignes 34 à 38). Toutefois, étant donné que le document D2 ne divulgue aucun rajustement du crédit attribué à un détaillant, il ne divulgue aucun suivi des rajustements ni de détails sur ce suivi.

À la lumière des différences indiquées ci-dessus en ce qui concerne les trois derniers éléments de la revendication 1, nous acceptons de manière préliminaire les différences indiquées à la page 8 de la DF.

Ces différences sont communes aux autres revendications indépendantes 6, 9, 11 et 15.

En ce qui a trait à toute différence supplémentaire relative aux revendications dépendantes, nous les évaluons à l’étape 4 de Sanofi, au besoin.

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent‑elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent‑elles quelque inventivité?

La DF fait référence à l’antériorité D4 et aux CGC pertinentes comme comblant l’écart entre le document D2 et le concept inventif de la revendication 1 au dossier.

Le document D4 est une divulgation du Demandeur qui traite des caractéristiques d’une unité CompuSafe®. Comme il est indiqué au bas de la page 8 jusqu’au haut de la page 9 de la DF, le document D4 divulgue que, grâce à ce coffre-fort, les écarts entre ce qui est réellement déposé dans le coffre-fort et ce qui est consigné dans le rapport sur le contenu au moment de la collecte devraient être virtuellement éliminés. Le dépôt de monnaie impropre dans des enveloppes ou sous forme de chèques constituerait une exception. La vérification des dépôts recueillis est effectuée par des employés de la salle de monnaie et, par la suite, les renseignements sur le dépôt peuvent être transmis par voie électronique à une banque.

Notre opinion préliminaire est que même si le document D4 concorde avec ce qui a été divulgué par le document D2, il ne divulgue aucune caractéristique importante en sus de celles qui ont été divulguées par le document D2.

Néanmoins, notre opinion préliminaire est que la revendication 1 au dossier aurait été évidente à la personne versée dans l’art compte tenu du document D2 et des CGC pertinentes pour les motifs suivants.

Comme nous l’avons vu à l’étape 3 de Sanofi, le document D2 divulgue l’encaissement des dépôts d’argent liquide dans un coffre-fort, la comptabilisation de ces dépôts, la transmission de ces renseignements à une banque et l’attribution du crédit pour les dépôts, soit avant que les dépôts ne soient recueillis chez un détaillant, soit après que la collecte a eu lieu, mais avant que le dépôt ne soit transféré à la banque. Le document D2 divulgue également clairement la vérification des montants de dépôt après la collecte et le rapprochement des montants avec ce qui est réellement déposé à la banque.

Prendre la mesure supplémentaire consistant à rajuster le crédit accordé à un détaillant en fonction d’une différence entre le montant déclaré à l’origine à la banque selon les renseignements produits à partir du coffre-fort et le montant vérifié à l’installation où l’argent liquide est transféré aurait été une mesure très logique et évidente pour la personne versée dans l’art. Les gestionnaires d’entreprise qui connaissent les principes comptables de base, qui font partie de la définition de la personne versée dans l’art, auraient été bien conscients du fait que si un détaillant se voyait attribuer un crédit plus important que justifié par une banque, cette dernière rajusterait le montant attribué en fonction de tout écart entre le crédit attribué à l’origine et les dépôts de l’argent liquide vérifié, ou, si le crédit avait déjà été utilisé pour une raison quelconque, veilleraient à ce que tout montant excédentaire soit perçu auprès du détaillant d’une autre manière. La personne versée dans l’art ne se serait pas attendue à ce que la banque ne prenne aucune mesure si un crédit excédentaire était attribué, tout comme un membre du public ne s’attendrait pas à ce qu’une banque ne prenne aucune mesure si le montant inscrit dans un dépôt au guichet automatique ne correspondait pas à celui vérifié ultérieurement par un employé de la banque.

Comme notre opinion préliminaire est qu’il aurait été évident de rajuster les montants crédités, notre opinion préliminaire est aussi qu’il aurait également été évident de suivre ces rajustements aux fins de la déclaration.

Étant donné que le document D2 divulgue le suivi des employés qui effectuent des dépôts dans les coffres-forts, ainsi que le suivi des services blindés qui recueillent les dépôts, notre opinion préliminaire est que le suivi de l’identification du personnel associé à tout rajustement de crédit aurait également été évident. Tout rajustement de crédit serait lié à un dépôt particulier, qui était déjà lié au personnel du détaillant et au personnel du service blindé, ce qui donnerait lieu à un suivi des employés qui ont effectué le dépôt initial dans le coffre-fort et du service blindé connexe.

Compte tenu des motifs qui précèdent, notre opinion préliminaire est que la revendication 1 au dossier aurait été évidente.

De plus, notre opinion préliminaire est que l’objet des autres revendications indépendantes aurait également été évident à la lumière du document D2 et des CGC pertinentes, compte tenu des différences mineures entre ceux-ci.

En ce qui concerne plus particulièrement les revendications indépendantes 11 et 15, le document D2, à la colonne 8, lignes 23 à 46, traite d’un mode de réalisation comprenant plusieurs assemblages de coffres-forts liés à un assemblage de coffre-fort hôte, l’assemblage sécuritaire hôte recueillant les rapports de dépôt des multiples assemblages de coffre-fort pour créer un rapport de dépôt combiné. Ainsi, le document D2 divulgue plusieurs coffres-forts qui transmettent chacun des rapports de dépôt à une installation centrale. Ces rapports sont utilisés pour attribuer le crédit.

En ce qui concerne les revendications dépendantes 2, 3 et 12, le document D2, à la colonne 11, lignes 4 à 14, indique qu’un crédit est attribué à une entreprise avant et après la collecte de l’argent liquide dans le coffre-fort, mais avant son dépôt à la banque.

En ce qui concerne la revendication dépendante 4, le document D2, à la colonne 1, ligne 61, et à la colonne 2, ligne 1, traite du système de contrôle de l’argent liquide pour les encaissements d’argent liquide sur une période comptable (par exemple, un jour ouvrable) au cours de laquelle l’argent liquide est continuellement encaissé, mais les rapports sont produits à la fin de chaque jour ouvrable (voir, par exemple, la colonne 5, lignes 51 à 53).

En ce qui concerne les revendications 5 et 14, le document D2 divulgue l’autorisation immédiate possible d’un crédit pour de l’argent liquide non encore déposé à la banque. Le document D2 divulgue également l’autorisation possible d’attribuer un crédit en fonction des rapports de dépôt quotidiens. En ce qui concerne la première possibilité, le document D2 n’établit pas de limites fixes quant au moment où l’autorisation peut être donnée et on peut supposer que l’autorisation pour l’argent liquide non encore déposé pourrait être donnée chaque fois que l’argent liquide est recueilli de l’entreprise, ce qui pourrait être effectué plus fréquemment plusieurs fois par jour, selon l’ampleur de l’entreprise et le calendrier de collecte. Notre opinion préliminaire est donc que l’attribution du crédit plusieurs fois au cours d’une journée aurait été évidente compte tenu du document D2 et des CGC pertinentes.

En ce qui concerne les revendications dépendantes 7 et 8, le document D2 divulgue à la colonne 9, lignes 10 à 15, la possibilité d’une collecte par un service blindé au cours de la journée après que l’argent liquidé a été collecté sur une période donnée. Étant donné que le document D2 ne limite pas les collectes à la fin d’un jour ouvrable, la variation de la collecte est clairement envisagée. Par conséquent, la variabilité précisée dans les revendications 7 et 8 aurait été à la discrétion de la personne versée dans l’art dans la mise en œuvre des procédés divulgués dans le document D2, en fonction de l’horaire et des exigences particulières de l’entreprise.

En ce qui concerne la revendication dépendante 10, puisque le document D2 divulgue l’autorisation de crédit pour les dépôts d’argent liquide, que ce soit avant ou après que l’argent liquide soit recueilli par un service blindé, tout registre d’argent liquide déposé représenterait un rapport sur le crédit attribué. De plus, une banque produirait sans doute un reçu quelconque pour le registre de dépôts d’argent liquide qui lui sont transmis et qui servent à attribuer un crédit à une entreprise. Notre opinion préliminaire est donc que l’objet de la revendication 10 aurait également été évident.

En ce qui concerne la revendication dépendante 13, tel que cela a été discuté ci-dessus par rapport aux revendications 11 et 15, le document D2, à la colonne 8, lignes 23 à 46, traite d’un mode de réalisation comprenant plusieurs assemblages de coffres-forts liés à un assemblage de coffre-fort hôte, l’assemblage sécuritaire hôte recueillant les rapports de dépôt des multiples assemblages de coffre-fort pour créer un rapport de dépôt combiné. Ainsi, le document D2 divulgue plusieurs coffres-forts qui transmettent chacun des rapports de dépôt à une installation centrale. Ces rapports sont utilisés pour attribuer le crédit. Étant donné que de multiples assemblages de coffre-fort peuvent communiquer avec un assemblage de coffre-fort hôte, ces assemblages de coffre-fort pourraient se trouver dans différents fuseaux horaires selon la nature de l’entreprise concernée. Dans de telles circonstances, la fin d’un jour ouvrable serait différente dans les différents fuseaux horaires, correspondant à une période comptable différente (document D2, de la colonne 1, ligne 64 à la colonne 2, ligne 1, faisant référence à un exemple de période comptable). Pour ces motifs, notre opinion préliminaire est que la revendication 13 aurait été évidente.

En ce qui concerne les revendications dépendantes 16 et 17 et la caractéristique supplémentaire de suivre un crédit antérieur attribué pour chaque cas de rajustement, notre opinion préliminaire est que cela aurait été évident. Étant donné que l’objet de la revendication 10 aurait été évident, notamment la production de rapports à un détaillant sur le crédit attribué, des registres auraient nécessairement été tenus à jour sur ces rapports qui étaient liés à des dépôts particuliers. Étant donné que notre opinion préliminaire est également que le suivi des rajustements du crédit aurait été évident, les registres de ces rajustements du crédit auraient été associés à des dépôts particuliers, qui auraient eux-mêmes été associés également à des rapports de crédit.

Nous avons révisé les observations du Demandeur dans la RDF concernant l’évidence. Toutefois, elles mettent l’accent sur les caractéristiques supplémentaires qui font partie des revendications proposées jointes à la RDF. Nous abordons ces arguments ci-dessous dans le cadre de notre examen des revendications proposées.

[47] Dans la RRP, à la page 4, le Demandeur a affirmé qu’aucune des antériorités, seules ou en combinaison, ne décrit ou ne laisse entendre ce qui suit :

rajuster le crédit déjà accordé au détaillant en fonction des différences, le cas échéant, entre le montant vérifié et le montant total calculé de l’argent liquide déposé dans le coffre-fort tel qu’il est indiqué dans la fiche de données transmise. [Soulignement dans la RRP]

[48] Le rajustement du « crédit » a été souligné par le Demandeur dans le passage cité ci-dessus, probablement parce que, comme il est mentionné dans la lettre de RP, le document D2 divulgue la vérification du montant d’argent liquide recueilli d’une entreprise et/ou un rapprochement avec ce qui a été déposé à une banque. Ainsi, le document D2, même s’il ne divulgue pas le rajustement du « crédit » attribué en fonction des différences entre le montant calculé à partir du coffre-fort et ce qui est déposé à la banque, divulgue le rajustement ou le rapprochement des registres de l’argent liquide eux-mêmes en fonction de ces mêmes différences (document D2 à la colonne 10, lignes 34 à 58), les mêmes registres de l’argent liquide qui auraient été utilisés dans le document D2 pour attribuer à l’origine le crédit à l’entreprise, comme il est indiqué dans la lettre de RP et ci-dessous.

[49] La lettre de RP citée ci-dessus indiquait que le document D2 divulguait l’attribution d’un crédit à une entreprise pour l’argent liquide retiré du coffre-fort mais non encore déposé à la banque, ou pour de l’argent liquide qui se trouve toujours dans le coffre-fort, selon les rapports quotidiens produits à partir du coffre-fort (document D2, à la colonne 11, lignes 4 à 13). Cette option a été présentée dans le document D2 après l’analyse susmentionnée du rajustement ou du rapprochement des registres de l’argent liquide. Même s’il n’a pas été précisé davantage que si cette option était exercée, le crédit attribué en fonction des rapports générés à partir du coffre-fort devrait alors être rajusté ou rapproché, notre opinion préliminaire dans la lettre de RP était que cela aurait constitué une mesure logique et évidente à prendre pour la personne versée dans l’art.

[50] Comme nous l’avons indiqué dans la lettre de RP à la page 14, il aurait été évident pour la personne versée dans l’art à l’époque que si une banque avait attribué, par exemple, un crédit excédentaire à une entreprise en se fondant sur des registres de l’argent liquide inexacts, cette banque aurait souhaité corriger le crédit attribué qui, selon le document D2, était directement lié à l’argent liquide déclaré avoir été reçu par à partir du coffre-fort. De la même façon que le document D2 divulgue le rapprochement des registres de l’argent liquide s’il existe une différence entre ce qui est déclaré à partir d’un coffre-fort et ce qui est déposé à la banque, à notre avis, il aurait été évident pour la personne versée dans l’art qu’un rapprochement du crédit attribué et de ce qui aurait dû être attribué devrait également avoir lieu.

[51] Dans la RRP, à la page 4, le Demandeur laisse entendre que le Comité généralise en adoptant la position selon laquelle il serait évident pour la personne versée dans l’art que la banque vérifierait le dépôt d’argent liquide réel par rapport au crédit accordé et apporterait les rajustements nécessaires.

[52] À notre avis, de la même façon que l’agent de vérification du document D2 (colonne 10, lignes 34 à 37) effectue une vérification ou un rapprochement pour s’assurer que l’argent liquide recueilli par un service de voitures blindées auprès de l’entreprise correspond à ce qui est déposé à la banque, de même, la banque souhaitera vérifier que le crédit attribué correspond au montant de l’argent liquide reçu, et rapprocher toute différence par rapport au montant fourni à l’origine dans les rapports envoyés à partir du coffre-fort sur lesquels le crédit attribué a été fondé (les rapports étant sous forme de courriels et correspondant à la fiche de données transmise des revendications).

[53] Contrairement à l’affirmation du Demandeur dans la RRP, notre opinion est que la motivation de rajuster le crédit accordé antérieurement à une entreprise dans le document D2 aurait été évidente tant à partir du document D2 lui-même que des CGC pertinentes. Le rapprochement est divulgué explicitement en ce qui concerne les rapports de l’argent liquide transmis à partir du coffre-fort, les rapports qui sont eux-mêmes utilisés à l’origine pour attribuer le crédit. De plus, les CGC des pratiques comptables générales de la personne versée dans l’art auraient inclus le fait de savoir que si le crédit était attribué en fonction d’un montant d’argent liquide déclaré et que le montant était ultérieurement jugé inexact, le crédit attribué serait très probablement rajusté.

[54] À la lumière de ce qui précède, nous concluons que les revendications 1 à 17 au dossier auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art compte tenu du document D2 et des CGC pertinentes et ne sont donc pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Exigences relatives à la description

Principes juridiques

[55] Les paragraphes 57 (1) et (2) des Règles sur les brevets précisent ce qui suit :

Interdiction d’incorporer par renvoi

57(1) La description ne peut incorporer un document par renvoi.

Interdiction de mentionner certains documents

57(2) La description ne peut faire mention d’un document qui ne fait pas partie de la demande de brevet, à moins qu’il ne soit accessible au public.

Analyse

[56] Dans la lettre de RP, à la page 16, nous présentons notre opinion préliminaire selon laquelle la description de la présente demande n’était pas conforme aux paragraphes 57(1) et (2) des Règles sur les brevets :

[traduction]

La présente demande, au paragraphe [0049], incorpore par renvoi une demande de brevet étrangère déposée antérieurement et appartenant au Demandeur et n’est donc pas conforme au paragraphe 57(1) des Règles sur les brevets.

De plus, aux paragraphes [0049] et [0052] de la présente demande, le numéro de série d’une demande de brevet étranger en co-instance est indiqué, mais le pays d’origine n’a pas été précisé. Afin de déterminer si le document est accessible au public, conformément aux exigences du paragraphe 57(2) des Règles sur les brevets, son pays d’origine doit être précisé.

[57] Le Demandeur n’a pas contesté notre opinion préliminaire de ces défauts et a fourni des pages modifiées proposées de la description pour les corriger.

[58] Compte tenu de ce qui précède, nous concluons que la description de la présente demande n’est pas conforme aux paragraphes 57(1) et (2) des Règles sur les brevets.

Modifications proposées

Ensemble de revendications proposées 2

[59] Dans la RRP, le Demandeur a présenté l’ensemble de revendications proposées 2, qui comprend les changements proposés dans l’ensemble de revendications proposées 1, mais qui traite également de l’irrégularité relative au nouvel objet inadmissible indiquée dans la lettre de RP.

[60] Nous examinons ci-dessous chacune des irrégularités relevées dans les revendications au dossier et la façon dont l’ensemble de revendications proposées 2 les corrige.

[61] En ce qui concerne l’interprétation téléologique, nous ne constatons aucun problème quant à la signification ou à la portée de l’un ou l’autre des termes utilisés dans l’ensemble de revendications proposées 2. Nous poursuivons en supposant que la signification et la portée de ces revendications proposées auraient été claires à la personne versée dans l’art.

[62] En outre, notre opinion préliminaire est que la personne versée dans l’art comprendrait qu’il n’y a aucune formulation dans les revendications de l’ensemble de revendications proposées 2 qui indique que les éléments de chaque revendication sont facultatifs, des solutions de rechange ou une réalisation préférée. Nous considérons donc tous les éléments de ces revendications proposées comme étant essentiels.

Objet brevetable

[63] Tout comme les revendications au dossier, les revendications indépendantes 1, 6, 9, 11 et 15 de l’ensemble de revendications proposées 2 comprennent toutes l’utilisation d’un coffre-fort dans l’établissement d’un détaillant, un coffre-fort qui comprend un lecteur de billets pour l’acceptation d’argent liquide physique, le lecteur de billets déterminant également la dénomination de l’argent liquide déposé.

[64] Notre opinion est donc que l’ensemble de revendications proposées 2 vise un objet qui satisfait à « l’exigence du caractère matériel » qui est implicite à la définition « d’invention » (Amazon, aux par. 65 et 66) et est donc conforme à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

Nouvel objet et absence de fondement

[65] Dans la lettre de RP, aux pages 17 à 19, nous expliquons la raison pour laquelle, selon notre opinion préliminaire, la question de l’absence de fondement indiquée dans le RM était mieux traitée comme une question de conformité aux dispositions de l’article 38.2 de la Loi sur les brevets, qui traite de l’ajout d’un objet au mémoire descriptif. Nous avons également exprimé notre opinion préliminaire selon laquelle l’ensemble de revendications proposées 1 comprenait un nouvel objet inadmissible.

[66] Suite à la soumission de l’ensemble de revendications proposées 2, les revendications proposées 1, 6, 9, 11 et 15 ne contiennent plus le libellé problématique qui a causé la non-conformité à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets. De plus, une clause de vérification de l’argent liquide qui est conforme au libellé des revendications au dossier a été insérée, ce qui, à notre avis, n’introduit aucun nouvel objet inadmissible.

[67] Compte tenu de ce qui précède, l’ensemble de revendications proposées 2 serait conforme à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets.

Évidence

[68] Grâce au fait que l’ensemble des revendications proposées 2 a éliminé le nouvel objet inadmissible et a ajouté une clause de vérification du montant de l’argent liquide conforme au libellé des revendications au dossier, notre évaluation de l’évidence de l’ensemble de revendications proposées 1 dans la lettre de RP, aux pages 19 et 20, et reproduit ci-dessous, s’appliquerait également à l’ensemble des revendications proposées 2 :

[traduction]

[…] le changement le plus important apporté aux revendications indépendantes proposées est l’ajout de la création de bordereaux de dépôt qui accompagnent les dépôts d’argent liquide à une installation de traitement de l’argent liquide. Chaque bordereau de dépôt comprend une indication unique qui est utilisée à l’installation de traitement de l’argent liquide pour vérifier les montants d’argent liquide reçus par rapport aux renseignements sur le dépôt figurant dans le fichier de données transmis antérieurement. Ces caractéristiques ont été soulignées par le Demandeur à la page 8 de la RDF.

Toutefois, comme il est indiqué dans le RM, le document D2, à la colonne 7, lignes 25 à 50, traite de la génération d’un reçu au moyen d’un dispositif de sortie jumelé sur le plan opérationnel avec le contrôleur du coffre-fort. Le reçu comprend un code à barres de dépôt qui est une représentation encodée des renseignements sur le dépôt et est utilisé par un ordinateur de la salle de monnaie d’un service de véhicules blindés ou par une banque pour comparer le montant d’argent liquide réellement recueilli au magasin avec ce qui est indiqué sur le reçu. Tel que divulgué à la colonne 9, lignes 22 à 30, ce reçu comprend des renseignements, comme les renseignements sur l’argent liquide et le numéro du magasin.

À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que le document D2 indique la génération d’un bordereau de dépôt qui accompagne tout dépôt d’argent liquide dans une installation de traitement d’argent liquide. Notre opinion préliminaire est également que le document D2 divulgue la fourniture d’une indication unique lien avec un bordereau de dépôt, notamment le code à barres qui est généré à partir des renseignements sur le dépôt. Ainsi, l’ajout de cette caractéristique aux revendications indépendantes au dossier (qui ont déjà été jugées comme étant évidentes à titre préliminaire compte tenu du document D2 et des CGC) ne les rend pas non évidentes.

Les autres modifications proposées aux revendications indépendantes, comme le coffre-fort électronique, y compris un processeur informatique exécutant des instructions informatiques, le transfert électronique du fichier de données « par l’intermédiaire d’un réseau informatique, à un processeur informatique de l’installation de traitement de l’argent liquide » font clairement partie du système décrit également dans le document D2.

Dans la RDF, aux pages 8 et 9, le Demandeur a souligné les caractéristiques des revendications proposées 5 et 14, en particulier le calcul et la transmission « périodiquement » d’un dépôt perçu dans un établissement de commerce de détail particulier et le traitement du crédit plusieurs fois au cours d’un jour ouvrable.

Nous avons déjà traité de la brevetabilité de l’attribution du crédit plusieurs fois au cours d’une journée relativement aux revendications 5 et 14 et de la raison pour laquelle notre opinion préliminaire est que l’ajout d’une telle caractéristique aurait été évident compte tenu du document D2 et des CGC pertinentes.

Enfin, dans la RDF, aux pages 9 et 10, le Demandeur souligne les revendications proposées 11 et 15 et les caractéristiques de la collecte de l’argent liquide auprès de plusieurs emplacements de détaillants sur plusieurs jours ouvrables, du regroupement et du calcul des renseignements sur le dépôt provenant des multiples emplacements et de l’attribution de crédit en fonction des renseignements sur le dépôt pour les multiples emplacements, lesquels peuvent être exploités selon des horaires quotidiens différents ou être situés dans des fuseaux horaires différents.

Le Demandeur a souligné les caractéristiques des revendications proposées 11 et 15, qui ont déjà été traitées dans notre évaluation préliminaire de la revendication 13, qui envisagent de multiples coffres-forts à plusieurs emplacements à différentes heures de fin de journée. Ainsi, l’ajout de ces caractéristiques aux revendications proposées 11 et 15 ne modifierait pas notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications comprenant ces caractéristiques auraient été évidentes.

[69] Les seules observations contenues dans la RRP concernant la question de l’évidence sont celles qui ont déjà été traitées relativement aux revendications au dossier, lesquelles s’appliqueraient également à l’ensemble de revendications proposées 2.

[70] Tout comme nous l’avons indiqué à l’égard des revendications au dossier, notre opinion est que selon le document D2 et les CGC pertinentes, une banque aurait souhaité vérifier que le crédit attribué correspond au montant d’argent liquide réel reçu, et rapprocher toute différence du montant fourni à l’origine dans les rapports envoyés à partir du coffre-fort sur lesquels le crédit attribué a été fondé (les rapports étant sous forme de courriels et correspondant à la fiche de données transmise des revendications mentionnées par le Demandeur dans la RRP).

[71] Par conséquent, pour les motifs énoncés dans la lettre de RP en ce qui concerne l’ensemble de revendications proposées 1 et compte tenu de l’examen des observations du Demandeur dans la RRP, notre opinion est que l’objet de l’ensemble de revendications proposées 2 aurait été évident.

Modifications proposées à la description

[72] En réponse à la détermination des irrégularités dans la description, énoncées dans la lettre de RP à la page 16, le Demandeur a joint à la RRP des pages modifiées proposées pour corriger les irrégularités.

[73] Après avoir révisé les pages de remplacement proposées, notre opinion est qu’elles seraient conformes aux paragraphes 57(1) et (2) des Règles sur les brevets.

Conclusions concernant les modifications proposées

[74] À la lumière de ce qui précède, étant donné que les modifications proposées à la demande ne permettraient pas de corriger toutes les irrégularités relevées, notamment l’irrégularité relative à l’évidence, elles ne sont pas considérées comme une modification « nécessaire » pour se conformer à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, comme l’exige le paragraphe 86(11) de la Loi sur les brevets.

Conclusions

[75] Nous concluons ce qui suit :

[76] Nous concluons également que les revendications proposées ne permettraient pas de corriger toutes les irrégularités en suspens figurant dans les revendications au dossier et ne sont donc pas considérées comme une modification « nécessaire » pour se conformer à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, comme l’exige le paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.


 

Recommandation de la Commission

[77] À la lumière de ce qui précède, nous, soussignés, recommandons que la demande soit rejetée pour les motifs suivants :

 

 

 

Stephen MacNeil

Membre

Michael Green

Membre

Howard Sandler

Membre


 

Décision du commissaire

[78] Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission de rejeter la demande pour les motifs suivants :

  • Les revendications 1 à 17 au dossier auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art et ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • La présente demande n’est pas conforme aux paragraphes 57(1) et (2) des Règles sur les brevets.

[79] Conformément à l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’accorder un brevet relativement à la présente demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le Demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

Konstantinos Georgaras

Commissaire aux brevets
Fait à Gatineau (Québec)
ce 4e jour de juillet 2024.

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