Brevets

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Référence : The Curators of the University of Missouri (Re), 2024 CACB 2

Décision du commissaire no 1661

Commissioner’s Decision #1661

Date : 2024-01-11

SUJET :

B00

G00

O00

 

Caractère ambigu ou indéfini (incomplet)

Utilité

Évidence

 

TOPIC:

B00

G00

O00

Ambiguity or indefiniteness (incomplete)

Utility

Obviousness

Demande no 2 836 288
Application No. 2836288

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 199(1) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251), la demande de brevet numéro 2 836 288, a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets. La recommandation de la Commission d’appel des brevets et la décision du commissaire sont de rejeter la demande.

Agent du demandeur :

Gowling WLG (Canada) LLP

550, rue Burrard, bureau 2300, Bentall 5

Vancouver (Colombie-Britannique) V6C 2B5

Introduction

[1] La présente recommandation concerne l’examen de la demande de brevet canadien refusée numéro 2 836 288, portant le nom « Animaux résistants au virus du syndrome reproducteur et respiratoire porcin ». The Curators of the University of Missouri est le seul demandeur (le « Demandeur »). Un comité de la Commission d’appel des brevets (« la Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251).

[2] Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, nous recommandons au commissaire aux brevets de rejeter la demande.

Contexte

La demande

[3] La présente demande a été déposée en vertu du Traité de coopération en matière de brevets (PCT) et a une date de dépôt en vigueur au Canada en date du 16 mai 2012. Elle est devenue accessible au public le 22 novembre 2012.

[4] Les revendications de la demande refusée concernent des cellules porcines génétiquement modifiées comprenant des mutations inactivantes dans un ou les deux allèles d’un gène CD163, où les porcs comprenant lesdites cellules porcines génétiquement modifiées présentent une résistance accrue au virus du syndrome reproducteur et respiratoire porcin (SRRP).

[5] La demande contient 70 revendications au dossier, lesquelles ont été reçues au Bureau des brevets le 23 décembre 2020.

Historique de la poursuite

[6] Le 24 septembre 2021, une décision finale a été rédigée conformément au paragraphe 86(5) des Règles sur les brevets. La décision finale stipule que l’objet des revendications 1 à 70 au dossier au moment de la décision finale est contraire à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets et que les revendications 1, 8 à 13, 15, 31, 34, 52, 59 et 61 sont également imprécises et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[7] La réponse à la décision finale datée du 24 janvier 2022 conteste l’évaluation de l’évidence, aborde les questions liées au caractère indéfini et comprend en outre un ensemble de revendications modifiées contenant les revendications 1 à 69 proposées (premier ensemble de revendications proposées), qui, selon ce qu’elle soutient, sont acceptables.

[8] Le 15 septembre 2022, la demande a été acheminée à la Commission d’appel des brevets aux fins de révision en vertu de l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets, ainsi qu’un résumé des motifs expliquant que le refus est maintenu et que les arguments du Demandeur présentés en réponse à la décision finale ne sont pas convaincants et que les modifications proposées présentées en réponse à la décision finale ne corrigeaient pas l’ensemble des irrégularités relevées dans la décision finale.

[9] Dans une lettre datée du 16 septembre 2022, la Commission d’appel des brevets a transmis une copie du résumé des motifs au Demandeur et a demandé qu’il confirme s’il voulait toujours que la demande soit révisée.

[10] Dans une lettre datée du 14 décembre 2022, le Demandeur a confirmé qu’il souhaitait que la révision soit menée et a présenté un deuxième ensemble de revendications proposées (deuxième ensemble de revendications proposées).

[11] Le présent Comité a été constitué dans le but de procéder à la révision de la demande refusée en vertu de l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets. Le 9 août 2023, le Comité a envoyé une lettre de révision préliminaire détaillant son analyse préliminaire et son opinion selon laquelle l’objet des revendications 1 à 3, 5 à 17, 19 à 35, 37 à 48, 50 à 54 et 56 à 70 au dossier est évident et que l’objet des revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 33, 52, 59 et 61 entraîne de l’imprécision, de l’ambiguïté ou un manque de clarté, ce qui va à l’encontre de l’article 28.3 et du paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. En outre, et conformément au paragraphe 86(9) des Règles sur les brevets, la lettre de révision préliminaire a avisé le Demandeur qu’il est de notre avis préliminaire que l’utilité de l’objet revendiqué n’a pas été établie par démonstration ou par une prédiction valable dans l’ensemble de la portée des revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 et, par conséquent, ces revendications contreviennent à l’article 2 de la Loi sur les brevets. Enfin, la lettre de révision préliminaire exprimait l’opinion préliminaire selon laquelle les modifications proposées ne satisfont pas aux exigences d’une modification nécessaire en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

[12] La lettre de révision préliminaire a également donné au Demandeur la possibilité de présenter des observations orales ou écrites.

[13] Le 29 septembre 2023, le Demandeur a fourni une réponse écrite à la lettre de révision préliminaire et une audience virtuelle a eu lieu le 5 octobre 2023.

Questions

[14] Compte tenu de ce qui précède, les questions suivantes sont examinées dans le cadre de la présente révision :

  • si l’utilité de l’objet des revendications au dossier n’a pas été établie par une démonstration ou une prédiction valable dans toute leur portée, contrairement à l’article 2 de la Loi sur les brevets;
  • si les revendications au dossier sont évidentes en contravention à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • si les revendications 1, 8 à 13, 15, 31, 34, 52, 59 et 61 au dossier sont imprécises en contravention au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[15] En plus des revendications au dossier, les revendications proposées ont également été étudiées.

Interprétation téléologique

Contexte juridique

[16] Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc, 2000 CSC 66 [Free World Trust] et Whirlpool Corp c. Camco Inc, 2000 CSC 67 [Whirlpool], l’interprétation téléologique des revendications est menée à partir du point de vue de la personne versée dans l’art (PVA) à la lumière des connaissances générales courantes (CGC) pertinentes, tenant compte du mémoire descriptif et des dessins. En plus d’interpréter le sens des termes d’une revendication, l’interprétation téléologique distingue les éléments essentiels de la revendication des éléments non essentiels. La question de savoir si un élément est essentiel dépend de l’intention exprimée dans la revendication ou déduite de celle-ci et de la question de savoir s’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art qu’une variante a une incidence matérielle sur le fonctionnement de l’invention.

[17] Dans l’exécution de la détermination des éléments essentiels et non essentiels, tous les éléments établis dans une revendication sont présumés être essentiels, à moins qu’il n’en soit établi autrement ou lorsqu’une telle présomption est contraire au libellé des revendications.

Analyse

La PVA et les CGC pertinentes

[18] La lettre de révision préliminaire, aux pages 4 à 8, indique ce qui suit concernant l’identité de la personne versée dans l’art et la définition de ses CGC :

À la page 3, la décision finale identifie la PVA et les CGC pertinentes :

La personne versée dans l’art est une équipe composée de chercheurs dans les domaines de la virologie porcine, de la biologie cellulaire et de l’immunologie.

[…]

Les connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art comprennent les techniques de production de cellules porcines génétiquement modifiées et d’animaux (examinées dans D7, par exemple), ainsi que la connaissance de la biologie de l’infection par le virus du syndrome reproducteur et respiratoire du porc (SRRP), y compris le rôle de la sialoadhésine et du gène CD163 dans l’entrée du SRRP dans les macrophages alvéolaires porcins (voir par exemple D3, D4 et D5). La personne versée dans l’art qui examine ces documents saurait que le fait de perturber la fonction du gène CD163 réduit ou inhibe l’infection par le SRRP in vitro.

Par souci de commodité, nous présentons ici les documents D3, D4, D5 et D7.

D3 :

Van Gorp et coll., Journal of General Virology, 89, pages 2943-2953, 2008

D4 :

Van Gorp et coll., Journal of Virology, 84(6), pages 3101-3105, mars 2010

D5 :

Welch et Calvert, Virus Research, 154, pages 98 à 103, 2010

D7 :

Aigner et coll., Journal of Molecular Medicine, 88, pages 653 à 664, 2010

Le document D3 révèle que l’incubation de macrophages alvéolaires primaires porcins avec soit de la sialoadhésine, soit des anticorps propres au gène CD163 a réduit l’infection par le SRRP de jusqu’à 75 %, tandis qu’une combinaison des deux anticorps bloquait complètement l’infection. L’analyse de l’entrée du SRRP dans des cellules non permissives exprimant uniquement la sialoadhésine, le produit du gène SIGLEC1, a montré l’internalisation du SRRP, mais aucune décapsidation. Aucune internalisation du virus n’a été observée lorsque seul le gène CD163 était exprimé, quoique les cellules ont été infectées de façon productive. La co-expression de la sialoadhésine recombinante et du gène CD163 dans les cellules non permissives a augmenté la production de virus de 10 à 100 fois comparativement aux cellules exprimant uniquement le gène CD163, ce qui indique que les deux sont nécessaires pour une infection efficace au SRRP.

Le document D4 divulgue l’utilisation de mutants de délétion et chimériques du gène CD163 pour identifier les domaines protéiques impliqués dans l’infection par le SRRP. Le domaine 5 du récepteur scavenger riche en cystéine (domaine 5 du RSRC) a été jugé essentiel pour l’infection, contrairement aux domaines 1 à 4 du RSRC. Des anticorps propres au domaine 5 du RSRC ont permis de réduire l’infection au SRRP.

Le document D5 passe en revue le rôle du gène CD163 dans l’infection au SRRP. Une prédiction de la région du domaine 5 du RSRC impliquée dans la liaison du virus comprend la région de la boucle 5-6, qui est conservée entre les espèces. On prévoit que la région contiendra la poche principale de liaison aux ligands, tandis que le reste du domaine 5 du RSRC peut fournir un échafaudage structurel.

Le document D7 examine l’utilisation de porcs transgéniques comme modèles pour la recherche biomédicale translationnelle. Le document D7 examine les techniques efficaces et précises disponibles pour la modification génétique des porcs. Les techniques comprennent la micro-injection d’ADN dans les pronucléus d’ovocytes fécondés, le transfert de gènes induit par le sperme, la transgenèse lentivirale et le transfert nucléaire de cellules somatiques à l’aide de cellules donneuses nucléaires génétiquement modifiées. Le document D7 enseigne qu’on est en train de perfectionner davantage les techniques transgéniques, y compris l’expression transgénique inductible, le système Cre/loxP pour les modifications transgéniques conditionnelles, les systèmes d’expression épisomique non viraux et la technologie de nucléase type doigt de zinc. Les techniques disponibles permettent de créer des porcs transgéniques sur mesure.

La réponse à la décision finale et la réponse datée du 14 décembre 2022 ne contestent et ne commentent pas cette définition de la PVA et de ses CGC pertinentes. De plus, le Demandeur ne propose pas d’éléments supplémentaires à prendre en considération en ce qui concerne la PVA ou les CGC pertinentes dans ces communications.

Compte tenu du domaine technique auquel se rapporte la présente demande de brevet et de l’objet des revendications au dossier, nous estimons que la définition de la PVA en tant qu’équipe composée de chercheurs dans les domaines de la virologie porcine, de la biologie cellulaire et de l’immunologie est raisonnable. Nous ajoutons que, à notre avis préliminaire, cette équipe devrait également comprendre un biologiste moléculaire qui connaît bien les techniques de production animale transgénique et leurs applications.

En ce qui concerne la détermination des CGC, il est bien établi que ces dernières sont limitées aux connaissances généralement connues des personnes du domaine de l’art ou de la science auxquelles se rapporte un brevet : Apotex Inc c. Sanofi-Synthelabo Canada Inc, 2008 CSC 61, au par. 37 [Sanofi]; Free World Trust, au paragraphe 31.

Plus précisément, nous estimons que l’évaluation des CGC est régie par les principes énoncés dans Eli Lilly & Company c. Apotex Inc, 2009 CF 991, au par. 97 [Lilly], confirmée par 2010 CAF 240, citant General Tire & Rubber Co c. Firestone Tyre & Rubber Co Ltd, [1972] RPC 457, [1971] FSR 417 (CA du R-U), aux p. 482 et 483 (du RPC).

[traduction] Il faut évidemment prendre soin de distinguer les connaissances générales courantes attribuées à une personne à qui s’adresse un tel brevet de ce que le droit des brevets considère comme des connaissances publiques. Cette distinction est bien expliquée dans Halsbury’s Law of England, vol. 29, paragraphe 63. Pour ce qui est du mémoire descriptif du brevet, la notion quelque peu artificielle (d’après lord Reid dans l’affaire Technograph, [1971] F.S.R. 188, à la page 193) du droit des brevets veut que chaque mémoire descriptif, des 50 dernières années, fasse partie des connaissances publiques pertinentes s’il se trouve à quelque endroit du bureau des brevets, même s’il est peu vraisemblable qu’il sera consulté et quelle que soit la langue dans laquelle il est rédigé. Par ailleurs, les connaissances générales courantes sont un concept différent dérivé d’une conception rationnelle de ce qui serait en fait connu par une personne adéquatement versée dans l’art—le genre d’homme, qui fait bien son travail et qui existerait réellement.

Les deux catégories de documents à examiner relativement aux connaissances générales courantes en l’espèce étaient un mémoire descriptif de brevet individuel et des « publications à grand tirage ».

En ce qui concerne la première catégorie de documents, il est clair que les mémoires descriptifs de brevets individuels et leur contenu ne font habituellement pas partie des connaissances générales courantes, bien que des mémoires descriptifs puissent être si bien connus chez ceux qui sont versés dans l’art que lorsque cet état de choses est établi, ils font partie de ces connaissances et il peut y avoir des secteurs d’activité précis (comme celui de la photographie couleur) dans lesquels la preuve peut indiquer que tous les mémoires descriptifs font partie des connaissances pertinentes.

Pour ce qui est des documents scientifiques en général, le juge Luxmoore a déclaré ce qui suit dans British Acoustic Films (53 R.P.C. 221, à la page 250) :

[traduction] « À mon avis, pour les connaissances générales courantes, il ne suffit pas de prouver qu’une divulgation a été faite dans un article, une série d’articles, dans une revue scientifique, peu importe l’importance du tirage de cette revue, en l’absence de toute preuve selon laquelle la divulgation est généralement acceptée par ceux versés dans l’art auquel se rapporte la divulgation. Une connaissance précise divulguée dans un document scientifique ne devient pas une connaissance générale courante simplement parce que le document est lu par de nombreuses personnes et encore moins parce qu’il a un fort tirage. Une telle connaissance fait partie des connaissances générales courantes uniquement lorsqu’elle est connue de manière générale et acceptée sans hésitation par ceux versés dans l’art particulier; en d’autres mots, lorsqu’elle fait partie du lot courant des connaissances se rapportant à l’art. Un peu plus loin, faisant la distinction entre ce qui a été écrit et ce qui a été utilisé, il a déclaré ce qui suit :

[traduction] « Il est assurément difficile d’évaluer comment l’utilisation d’une chose, qui dans la réalité n’a jamais été utilisée dans un art particulier, peut être reconnue comme appartenant aux connaissances générales courantes de l’art. »

Ces passages ont souvent été cités et aucune décision ne nous a été présentée dans laquelle ils étaient critiqués. Nous les acceptons comme énonçant correctement le droit en général sur ce point, bien que nous réservions pour un examen plus approfondi la question de savoir si les mots « acceptée sans hésitation » ne mettent pas la barre plutôt haute : pour les fins de la présente affaire, nous sommes disposés, sans souhaiter présenter une définition complète, à leur substituer les mots « généralement considérée comme un bon fondement pour continuer ».

Gardant à l’esprit les principes énoncés ci-dessus, nous sommes d’avis préliminaire que la question pertinente dans le contexte actuel est de savoir si un élément de connaissance donné était généralement connu et accepté sans aucun doute par la majorité de ceux qui travaillent dans les domaines particuliers de la virologie porcine, de la biologie cellulaire, de l’immunologie, de la biologie moléculaire et des techniques de production animale transgénique au moment pertinent ou généralement considéré comme un bon fondement pour continuer.

Afin de répondre à cette question, les ouvrages de référence établis (tels que les manuels, les articles de revue et les recueils, etc.) ou l’aspect courant démontré de certaines connaissances dans un certain nombre de divulgations dans le domaine sont pertinents à l’enquête : voir le Recueil des pratiques du Bureau des brevets (RPBB) à la section12.02.02c, révisée en octobre 2019.

En outre, nous sommes d’avis que les renseignements contenus dans le mémoire descriptif en instance peuvent constituer une preuve des CGC, puisqu’il serait raisonnable de considérer les affirmations générales ou rédigées de façon générale de la pratique ou des connaissances traditionnelles comme étant des CGC (voir Corning Cable Systems LLC c Canada (Procureur général), 2019 CF 1065 et Newco Tank Corp c Canada (Procureur général), 2015 CAF 47).

Après avoir examiné les connaissances générales courantes énumérées dans la décision finale, et après avoir examiné le mémoire descriptif dans son ensemble ainsi que la littérature scientifique pertinente à l’objet revendiqué, à notre avis préliminaire, les connaissances et les méthodes suivantes étaient généralement connues et acceptées sans aucun doute par la majorité des personnes qui travaillent dans les domaines particuliers de la virologie porcine, de la biologie cellulaire, de l’immunologie, de la biologie moléculaire et, en ce qui concerne les techniques de production animale transgénique, couramment utilisées dans l’art au moment en cause :

Les techniques de production de cellules porcines génétiquement modifiées et d’animaux génétiquement modifiés (comme en témoignent le document D7 et le mémoire descriptif en instance aux paragraphes [0053] à [0056], [0058], [0059] et [0067] à [0069]).

Les structures génétiques et protéiques du gène CD163 ainsi que ses principales fonctions biologiques, par exemple, celle de récepteur pour la clairance de l’hémoglobine (comme en témoignent Van Gorp et coll., Molecular Immunology, 47(7-8), pages 1650-1660, 2010 (D9) et le mémoire descriptif en instance au paragraphe [0011]).

Le rôle important du gène DC163 dans l’infectiosité du SRRP (comme en témoignent les documents D5, D9 et Van Breedam et coll., Journal of General Virology, vol. 91, pages 1659-1667, 2010 (D10).

Nous faisons remarquer que les documents D9 et D10 sont tous deux cités au paragraphe [0011] (D9) et aux paragraphes [0008] et [0009] (D10) du mémoire descriptif en instance. En outre, le Demandeur est par les présentes avisé, conformément au paragraphe 86(9) des Règles sur les brevets, que nous estimons que la divulgation de ces documents est pertinente à l’enquête sur l’évidence ci-dessous.

[19] Le Demandeur n’a pas contesté l’identité de la PVA et n’a pas formulé d’autres commentaires sur celle-ci dans la réponse à la lettre de révision préliminaire ou à l’audience et nous adoptons donc la définition ci-dessus de la PVA pour notre analyse finale.

[20] En ce qui concerne les CGC, le Demandeur a soutenu à l’audience que les CGC exposées dans la lettre de révision préliminaire ne peuvent pas avoir autant de poids dans l’analyse de l’évidence et que l’écart entre l’art antérieur cité et l’objet revendiqué est trop grand pour être comblé par lesdites CGC.

[21] Plus précisément, le Demandeur a soutenu que : i) les méthodes de modification génétique d’une cellule porcine en effectuant des modifications génétiques ciblées ne sont pas des CGC; et ii) les méthodes de régénération d’un porc génétiquement modifié à partir d’une cellule porcine génétiquement modifiée ne sont pas des CGC.

[22] Selon les observations du Demandeur, même si l’exposé de synthèse D7 indique que le transfert de noyau d’une cellule somatique (TNCS) était une approche visant à obtenir un porc génétiquement modifié en apportant des modifications génétiques ciblées qui étaient connues d’au moins certains dans l’art, très peu de cas avaient réussi et, par conséquent, l’approche n’avait pas été largement adoptée, probablement en raison de graves difficultés techniques pour faire fonctionner ces méthodes.

[23] En outre, le Demandeur soutient que le document D1 fournit la preuve que la production d’un porc génétiquement modifié en apportant des modifications génétiques ciblées ne faisait pas partie des CGC, car les méthodes décrites dans le document D1 ne pouvaient pas mener à la production réussie de porc génétiquement modifié pour des raisons expliquées dans une déclaration du Dr Randall S. Prather (l’inventeur inscrit dans le mémoire descriptif en l’instance) qui a été signée le 2 septembre 2015 et soumise à l’Office européen des brevets.

[24] Respectueusement, nous ne sommes pas d’accord pour les raisons suivantes.

[25] Les CGC mentionnées dans notre lettre de révision préliminaire ne sont pas une suggestion générale que ces connaissances étaient « connues de tous » ou une proposition générale que « tout le monde savait » comment faire des modifications génétiques ciblées dans les lignées de cellules porcines afin d’arriver à des porcs viables, comme l’a suggéré le Demandeur à l’audience. Les CGC exposées dans la lettre de révision préliminaire sont celles que la PVA devrait avoir. La Cour suprême du Canada a expliqué que même si la PVA est réputée ne posséder aucune étincelle d’esprit inventif ou d’imagination, un mémoire descriptif de brevet s’adresse aux « aux personnes suffisamment versées dans l’art dont relève le brevet pour être en mesure, techniquement parlant, de comprendre la nature et la description de l’invention » : Whirlpool, au paragraphe 53. En outre, « dans le cas de brevets de nature hautement technique et scientifique, cette personne peut être quelqu’un qui possède un niveau élevé de connaissances scientifiques spécialisées et d’expertise dans le domaine spécifique des sciences dont relève le brevet » : Consolboard c. MacMillan Bloedel (Sask) Ltd, [1981] 1 RCS 504, à la page 525. En outre, la PVA peut représenter un ensemble de scientifiques—des personnes hautement qualifiées et formées qui effectuent de la recherche scientifique pour faire progresser les connaissances dans un domaine d’intérêt—et des chercheurs : Bayer Aktiengesellschaft c. Apotex Inc [1995] 60 CPR (3d) 58, à la page 79.

Le technicien fictif compétent peut être un ensemble de scientifiques, de chercheurs et de techniciens qui apportent leur expertise combinée pour s’attaquer au problème à l’étude. « Cela est particulièrement vrai lorsque l’invention se rapporte à une science ou à un art qui vise plusieurs disciplines scientifiques » (le juge Wetston dans l’affaire Mobil Oil Corp. c. Hercules Canada Inc. non publiée, 21 septembre 1994, C.F. 1re inst., à la page 5 [maintenant publiée à 57 C.P.R. (3d) 488, à la p. 494, 82 F.T.R. 211].)

[26] À la lumière de ces principes, la PVA a été définie dans la lettre de révision préliminaire comme une équipe composée de chercheurs dans les domaines de la virologie porcine, de la biologie cellulaire et de l’immunologie et qui comprend également un biologiste moléculaire qui connaît les techniques de production animale transgénique et leurs applications. Comme il est indiqué ci-dessus, le Demandeur n’a pas contesté l’identité de la PVA et n’a pas formulé d’autres commentaires sur celle-ci dans la réponse à la lettre de révision préliminaire ou à l’audience.

[27] Nous reconnaissons que la divulgation de la demande en instance est de nature hautement technique et scientifique et, par conséquent, nous considérons que la PVA définie possède quant à elle en tant que CGC un degré élevé de connaissances et de compétences scientifiques spécialisées dans les domaines particuliers de la science auxquels le brevet se rapporte, y compris la biologie moléculaire, la transgenèse cellulaire et les techniques de production animale transgénique. Par conséquent, nous sommes d’avis qu’il n’est pas déraisonnable que ladite PVA possède en tant que CGC les méthodes actuelles et les plus couramment utilisées dans le domaine de la modification génétique des porcs.

[28] À cet égard, nous sommes d’avis que le document D7 donne une meilleure image que le document D1 de ce qui était les CGC de la PVA en ce qui concerne les porcs génétiquement modifiés par des modifications génétiques ciblées. Le document D7 est un exposé de synthèse qui résume les techniques actuelles, en date de mars 2010, pour la modification génétique des porcs. Le D7 enseigne que la TNCS est l’une de ces techniques qui ont été rendues disponibles au moins 10 ans avant la date de publication du document D7 et que la TNCS était, à ce moment-là, la seule voie pour introduire des mutations ciblées dans le génome du porc. À notre avis, les étapes et les techniques liées à la transgénèse porcine par TNCS (p. ex., des modifications génétiques par recombinaison homologue ciblée dans les cellules donatrices nucléaires, la récupération et l’énucléation des ovocytes matures, le transfert et l’activation nucléaires, la culture in vitro des embryons reconstruits et le transfert aux destinataires synchronisés) étaient communément connues par la PVA comme la transgénèse porcine par TNCS puisqu’il s’agissait de la technique la plus courante dans le champ au moment pertinent pour introduire des mutations dans le génome du porc.

[29] En ce qui a trait à l’argument selon lequel le document D7 est la preuve que de telles techniques n’ont pas été largement adoptées, probablement en raison de graves difficultés techniques pour faire fonctionner ces méthodes, étant donné qu’il ne présente que quelques exemples de succès à l’aide de l’approche par TNCS pour obtenir un porc génétiquement modifié avec des modifications génétiques ciblées, nous offrons ce qui suit.

[30] Nous comprenons que le document D7, même s’il s’agit d’un exposé de synthèse, ne divulgue pas une liste exhaustive et complète de toutes les tentatives réussies de production de porcs génétiquement modifiés en apportant des modifications génétiques ciblées, car il donne un aperçu des « porcs transgéniques comme modèles de recherche biomédicale translationnelle ». En outre, le fait que la TNCS était, au moment de la publication, la seule voie pour introduire des mutations ciblées dans le génome du porc donne à penser que l’approche de la TNCS aurait été généralement connue et largement adoptée par la majorité de ceux qui participent à la création de porcs génétiquement modifiés en apportant des mutations ciblées ou généralement considérées comme l’une des meilleures, sinon la meilleure approche disponible à l’époque.

[31] De plus, une méthode ou une technique des CGC n’est pas nécessairement simple ou toujours couronnée de succès lorsqu’elle est appliquée et cette information fait également partie des CGC liées à cette méthode ou cette technique particulière. À cet égard, nous reconnaissons qu’il faisait partie des CGC qu’en recourant à l’approche de TNCS, l’efficacité du clonage chez les porcs était encore relativement faible, variant entre 0,5 % et 5 % de progéniture par embryon de TNCS transféré (comme en témoigne le document D7 à la page 656). Il s’agit d’une considération pertinente à notre évaluation de la question de l’évidence ci-dessous et aux facteurs de l’essai allant de soi.

[32] Comme il est indiqué ci-dessus, le Demandeur a aussi soutenu que les méthodes de modification génétique d’une cellule porcine en effectuant des modifications génétiques ciblées ne sont pas des CGC, sans fournir de motifs ou d’arguments précis en guise d’explication. Nous avons déjà exprimé l’opinion que l’approche de TNCS pour générer des porcs transgéniques en apportant des mutations ciblées faisait partie des CGC pour les raisons susmentionnées et que les modifications génétiques ciblées dans les cellules donatrices nucléaires constituent la première étape générale de la méthode de TNCS (comme en témoigne le document D7 à la page 656). Nous sommes donc d’avis que les techniques de ciblage génique axé sur l’homologie pour introduire des mutations précises dans les cellules somatiques, y compris les cellules somatiques porcines, faisaient partie des CGC pour un biologiste moléculaire qui connaît bien les techniques de production animale transgénique et leurs applications.

[33] Comme il est indiqué dans la lettre de révision préliminaire, différents passages du mémoire descriptif en instance appuient de façon indépendante nos conclusions relatives aux CGC et nous trouvons les parties suivantes les plus pertinentes à cet égard en ce qui concerne la transgenèse des porcs par TNCS et les techniques de ciblage génique axé sur l’homologie pour introduire des mutations spécifiques dans les cellules somatiques [soulignement en caractères gras ajoutés] :

[0043] Le ciblage génique effectué pour fabriquer les animaux de l’invention peut entraîner l’inactivation de gènes par perturbation, la suppression, la modification ou le remplacement de séquences de gènes cibles. Les méthodes d’inactivation de gènes sont bien connues dans l’art. Par exemple, un gène cible peut être inactivé par l’insertion d’une séquence hétérogène (comme un marqueur sélectionnable ou un codon non sens) dans un gène cible, par la suppression d’une partie d’un gène ou du gène entier, par la modification d’un gène (p. ex., par décalage du cadre de lecture, mutation non sens, mutation faux sens, mutation ponctuelle, remplacement d’une partie ou d’un gène entier par une autre séquence d’acide nucléique), ou une combinaison des éléments ci-dessus.

[0054] Les animaux transgéniques de l’invention peuvent être créés à l’aide de la procédure générale de transfert nucléaire de cellules somatiques suivante. Bref, le génome d’une cellule somatique porcine (p. ex., un fibroblaste fœtal) est génétiquement modifié par le ciblage génique décrit ci-dessus afin de créer une cellule donatrice. Le noyau d’une telle cellule donatrice génétiquement modifiée (ou toute la cellule donneur, y compris le noyau) est ensuite transféré dans une cellule receveuse, par exemple, dans un ovocyte énucléé. La cellule donatrice peut être fusionnée avec un ovocyte énucléé, ou le noyau de la cellule donatrice ou encore la celle donatrice elle-même peut être injectée dans la cellule receveuse ou injectée dans l’espace périvitellin, adjacent à la membrane de l’ovocyte.

[0055] Ainsi, dès l’obtention de cellules somatiques dans lesquelles un gène cible a été ciblé (un allèle ou les deux, comme décrit ci-dessus), un transfert nucléaire peut être effectué. Les cellules donatrices génétiquement modifiées peuvent aussi être cryoconservées avant le transfert nucléaire. Les cellules receveuses qui peuvent être utilisées comprennent les ovocytes, les zygotes fécondés ou les cellules d’embryons à deux cellules, qui peuvent toutes avoir été énucléées ou non.

[0056] Il est possible d’obtenir des ovocytes receveurs en recourant aux méthodes connues dans l’art ou en s’en procurant auprès de sources commerciales (p. ex., BoMed Inc., Madison [Wisconsin].). L’ovocyte peut être obtenu à partir d’une « cochette », une truie qui n’a jamais eu de portée ou d’une « coche », un cochon femelle qui a déjà eu une portée.

[0058] Les méthodes d’énucléation d’ovocytes porcins sont connues dans l’art, et il est possible d’obtenir une énucléation en recourant à n’importe laquelle des méthodes standard. Par exemple, il est possible d’énucléer un ovocyte avec une micropipette dans un milieu de micromanipulation.

[0059] Il est possible d’introduire un noyau lié à la membrane d’une cellule porcine donatrice dans un ovocyte porcin énucléé receveur pour former un ovocyte contenant le noyau de la cellule donatrice en fusionnant la membrane du noyau lié à la membrane de la cellule donatrice de mammifère avec la membrane de l’ovocyte de mammifère énucléé receveur pour former un ovocyte contenant le noyau de la cellule donatrice de mammifère. On peut aussi microinjecter le noyau lié à la membrane de la cellule donatrice de mammifère dans l’ovocyte de mammifère énucléé receveur pour former un ovocyte contenant le noyau de la cellule donatrice de mammifère. Par exemple, on peut introduire une cellule donatrice (ou un noyau) dans l’espace sous la zone pellucide ou dans l’espace périvitellin de l’ovocyte énucléé receveur, puis effectuer une fusion membranaire pour produire un ovocyte contenant dans son cytoplasme le noyau de la cellule donatrice. Toutes les façons d’introduire du matériel nucléaire de cellule donatrice dans un ovocyte de mammifère énucléé receveur connues des personnes versées dans l’art sont utiles dans les méthodes divulguées aux présentes.

[0067] Après l’activation, l’ovocyte est généralement cultivé pendant une courte période in vitro. L’embryon qui en résulte est ensuite transféré dans une femelle porteuse, où le développement de l’embryon se poursuit. Par exemple, les embryons peuvent être cultivés pendant environ une semaine, puis transférés chirurgicalement ou non chirurgicalement dans le système reproducteur d’une femelle porteuse. Les embryons peuvent être transférés dans une trompe utérine par frange ovarienne de la femelle porteuse. Les embryons peuvent aussi être transférés dans la trompe ovarienne d’une femelle porteuse en utilisant un cathéter qui pénètre la paroi de la trompe. Une autre façon de transférer des embryons est de les cultiver jusqu’au stade du blastocyste, puis de les introduire dans le système reproducteur d’une femelle porteuse de l’espèce porcine. Ces méthodes sont bien connues dans l’art et peuvent être facilement appliquées dans la production de porc génétiquement modifié de la présente invention.

[34] Par conséquent, pour les raisons énoncées dans la lettre de révision préliminaire et les autres raisons exposées ci-dessus, nous sommes d’avis que les connaissances et les méthodes suivantes étaient des CGC de la PVA définie :

  • Les structures génétiques et protéiques du gène CD163 ainsi que ses principales fonctions biologiques, par exemple, celle de récepteur pour la clairance de l’hémoglobine;
  • Le rôle important du gène DC163 dans l’infectiosité du SRRP;
  • Les techniques de production de cellules porcines génétiquement modifiées et d’animaux génétiquement modifiés, plus particulièrement les étapes et les techniques liées à la transgénèse porcine par TNCS (p. ex., des modifications génétiques par recombinaison homologue ciblée dans les cellules donatrices nucléaires, la récupération et l’énucléation des ovocytes matures, le transfert et l’activation nucléaires, la culture in vitro des embryons reconstruits et le transfert aux destinataires synchronisés) ainsi que les techniques de ciblage génique axé sur l’homologie pour introduire des mutations spécifiques dans des cellules somatiques, y compris des cellules somatiques de porc.

Les revendications au dossier

[35] Il y a 70 revendications au dossier. Les revendications indépendantes 1, 15, 30, 33, 46, 52, 59 à 61 et 66 se lisent comme suit :

1. Une cellule porcine génétiquement modifiée comprenant des mutations inactivantes dans un ou les deux allèles d’un gène CD163, où les porcs comprenant lesdites cellules porcines génétiquement modifiées présentent une résistance accrue au virus du syndrome reproducteur et respiratoire du porc (SRRP).

15. Une cellule porcine génétiquement modifiée comprenant des mutations inactivantes dans un ou les deux allèles d’un gène CD163, où les porcs comprenant lesdites cellules porcines génétiquement modifiées présentent une résistance accrue au virus du syndrome reproducteur et respiratoire du porc (SRRP) et où la cellule est produite par une méthode comprenant.

a) énucléer un ovocyte porcin;

b) fusionner l’ovocyte avec une cellule somatique donatrice de porc, le génome de la cellule somatique comprenant au moins un allèle muté du gène CD163;

c) activer l’ovocyte pour produire un embryon comprenant la cellule;

d) transférer l’embryon dans le système reproductif d’une femelle porteuse de l’espèce porcine, où la femelle porteuse de l’espèce porcine est en chaleur, mais n’a pas encore ovulé; et où la gestation et l’accouchement à terme produisent une cellule porcine génétiquement modifiée dont le génome comprend les mutations dans les deux allèles du gène CD163;

e) accoupler un mâle de l’espèce porcine génétiquement modifié produit par la méthode décrite aux étapes a) à d) avec une femelle de l’espèce porcine génétiquement modifiée produite par la méthode décrite aux étapes a) à d) pour produire une descendance F1;

f) dépister la descendance F1 afin d’identifier les porcs génétiquement modifiés où les deux allèles du gène CD163 ont été mutés dans la cellule.

30. Une méthode de production d’un porc génétiquement modifié comprenant une mutation dans au moins un allèle d’un gène CD163, la méthode comprenant :

énucléer un ovocyte porcin;

fusionner l’ovocyte avec une cellule somatique donatrice de porc, le génome de la cellule somatique comprenant au moins un allèle muté du gène CD163;

activer l’ovocyte pour produire un embryon.

33. Une méthode de production d’un porc génétiquement modifié comprenant des mutations dans les deux allèles d’un gène CD163, la méthode comprenant :

accoupler un mâle de l’espèce porcine génétiquement modifié produit par la méthode décrite à l’une des revendications 30 à 32 avec une femelle de l’espèce porcine génétiquement modifiée produite par la méthode décrite à l’une des revendications 30 à 32 pour produire une descendance F1;

dépister la descendance F1 afin d’identifier les porcs génétiquement modifiés dans lesquels les deux allèles du gène CD163 ont été mutés dans la cellule.

46. Une méthode de production d’un porc génétiquement modifié comprenant une mutation dans un allèle d’un gène CD163, la méthode comprenant :

modifier le contenu génétique d’une cellule porcine pour créer une modification qui change l’expression ou l’activité du gène CD163;

créer un animal à partir de la cellule.

52. Une méthode de production d’un porc génétiquement modifié comprenant une mutation dans un allèle d’un gène CD163, la méthode comprenant :

introduire une nucléase spécifique au site dans une cellule porcine, la nucléase étant adaptée pour se lier à une séquence cible se trouvant dans un acide nucléique d’un allèle du gène CD163;

incuber la cellule dans des conditions qui permettent à la nucléase d’agir sur l’ADN à la séquence cible ou près de celle-ci, ce qui entraîne une recombinaison, une réparation dirigée par l’homologie ou une ligature d’extrémités non homologues à la séquence cible ou à proximité de celle-ci dans l’acide nucléique.

59. Une cellule porcine génétiquement modifiée produite par la procréation du porc, comme défini dans l’une des revendications 30 à 58, comprenant des mutations dans les deux allèles d’un gène CD163.

60. Utiliser des porcs ayant la cellule porcine génétiquement modifiée de l’une ou l’autre des revendications 1 à 24, pour la production de la descendance.

61. Une cellule porcine génétiquement modifiée comprenant une ou plusieurs altérations dans une séquence de gènes CD163, où une ou plusieurs altérations se trouvent dans une séquence non codante du gène CD163 et inactivent le gène CD163, et où les porcs ayant lesdites cellules porcines génétiquement modifiées présentent une résistance accrue au virus du syndrome reproducteur et respiratoire du porc (SRRP).

66. Une méthode de production d’une cellule porcine génétiquement modifiée de l’une des revendications 61 à 65, la méthode comprenant :

introduire une nucléase spécifique au site dans une cellule porcine, la nucléase étant adaptée pour se lier à une séquence cible se trouvant dans un acide nucléique d’un allèle du gène CD163;

incuber la cellule dans des conditions qui permettent à la nucléase d’agir sur l’ADN à la séquence cible ou près de celle-ci, ce qui entraîne une recombinaison, une réparation dirigée par l’homologie ou une ligature d’extrémités non homologues à la séquence cible ou à proximité de celle-ci dans l’acide nucléique.

[36] Les revendications dépendantes définissent d’autres limites concernant l’absence de mutation dans le gène SIGLEC1 (revendications 2, 16, 34 et 65), les mutations envisagées dans le gène CD163 (revendications 3 à 6, 8 à 14, 17 à 20, 22, 35 à 38, 40, 48, 49, 54, 55, 62 à 64 et 68), le système ou la méthode spécifique utilisés pour muter le gène CD163 (revendications 7, 21, 39, 47, 53 et 67) et la méthode ou l’étape utilisée pour produire la cellule ou le porc génétiquement modifié envisagée (revendications 23 à 29, 31, 32, 41 à 4) 5, 50, 51, 56 à 58, 69 et 70).

Éléments essentiels

[37] Comme il est énoncé ci-dessus, tous les éléments présentés dans une revendication sont présumés essentiels, à moins que le contraire soit établi ou qu’une telle présomption aille à l’encontre du libellé de la revendication. De plus, l’élément d’une revendication est essentiel lorsqu’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art que son omission ou son remplacement aurait un effet matériel sur le fonctionnement de l’invention : Free World Trust, au par. 55

[38] La lettre de révision préliminaire, à la page 11, indique ce qui suit à l’égard des éléments des revendications que la personne versée dans l’art considérerait comme essentiels : [traduction]

En ce qui a trait au libellé des revendications, notre opinion préliminaire est que la PVA lisant les revendications 1 à 70 dans le contexte du mémoire descriptif dans son ensemble, et tenant compte de ses CGC, comprendrait qu’il n’y a rien dans le libellé des revendications qui indique que l’un des éléments est optionnel, préféré ou autrement destiné à être non essentiel. Par conséquent, nous sommes d’avis, à titre préliminaire, que la personne versée dans l’art considérerait tous les éléments des revendications comme étant essentiels.

[39] Le Demandeur n’a pas contesté ou commenté d’une autre façon notre opinion préliminaire sur les éléments essentiels des revendications au dossier et nous l’adoptons donc aux fins du présent examen final.

Utilité

Contexte juridique

[40] L’utilité est exigée par l’article 2 de la Loi sur les brevets :

« invention » toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[41] Dans AstraZeneca Canada Inc c. Apotex Inc, 2017 CSC 36, au par. 53 [AstraZeneca], la Cour suprême du Canada a déclaré que « [l’]utilité […] variera en fonction de l’objet de l’invention cerné à la suite de l’interprétation des revendications » et a expliqué l’approche qui devrait être adoptée pour déterminer si un brevet divulgue une invention avec suffisamment d’utilité en vertu de l’article 2 de la Loi sur les brevets :

[54] Pour déterminer si un brevet divulgue une invention dont l’utilité est suffisante au sens de l’art. 2, les tribunaux doivent procéder à l’analyse suivante. Ils doivent d’abord cerner l’objet de l’invention suivant le libellé du brevet. Puis, ils doivent se demander si cet objet est utile—c’estàdire, se demander s’il peut donner un résultat concret.

[55] La Loi ne prescrit pas le degré d’utilité requis. Elle ne prévoit pas non plus que chaque utilisation potentielle doit être réalisée—une parcelle d’utilité suffit. Une seule utilisation liée à la nature de l’objet est suffisante, et l’utilité doit être établie au moyen d’une démonstration ou d’une prédiction valable à la date de dépôt : AZT, au par. 56.

[42] Par conséquent, l’utilité doit être établie au moyen d’une démonstration ou d’une prédiction valable à la date de dépôt de la demande de brevet canadien. L’utilité ne peut pas être étayée par les éléments de preuve et les connaissances qui ne sont devenues disponibles qu’après cette date (voir également Apotex Inc c. Wellcome Foundation Ltd, 2002 CSC 77, au par. 56 [AZT], cité dans le passage ci-dessus).

[43] La doctrine de la prédiction valable permet l’établissement d’une utilité affirmée même lorsque cette utilité n’a pas été complètement vérifiée à la date de dépôt. Cependant, une demande de brevet doit fournir un « solide enseignement » de l’invention revendiquée plutôt que de « simples spéculations » (AZT, au par. 56).

[44] 69). La validité d’une prédiction est une question de fait (AZT, au par. 71). L’analyse de cette validité devrait tenir compte de trois éléments (AZT, au paragraphe 70) : i) la prédiction doit avoir un fondement factuel; ii) à la date de la demande de brevet, l’inventeur doit avoir un raisonnement clair et valable qui permette d’inférer du fondement factuel le résultat souhaité; iii) il doit y avoir divulgation suffisante du fondement factuel et le raisonnement.

[45] Ces éléments sont évalués du point de vue de la PVA à qui s’adresse le brevet, en tenant compte de ses CGC. De plus, à l’exception des CGC, le fondement factuel et le raisonnement doivent être inclus dans la demande de brevet (voir Bell Helicopter Textron Canada Limitée c. Eurocopter, société par actions simplifiée, 2013 CAF 219, aux par. 152 et 153).

[46] Bien qu’une prédiction n’ait pas à être une certitude pour être valable, il doit à première vue y avoir une conclusion raisonnable d’utilité (Eli Lilly Canada Inc c. Novopharm Limited, 2010 CAF 197, au par. 85 [Eli Lilly]; Gilead Sciences, Inc c. Idenix Pharmaceuticals Inc, 2015 CF 1156, au par. 251; Mylan Pharmaceuticals ULC c. Eli Lilly Canada Inc, 2016 CAF 119, au par. 55).

Analyse

[47] La lettre d’examen préliminaire explique, aux pages 13 à 18, qu’il est de notre avis préliminaire que l’utilité de l’objet revendiqué n’a pas été établie par démonstration ou par une prédiction valable dans l’ensemble de la portée des revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 et, par conséquent, ces revendications contreviennent à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Quel est l’objet de l’invention tel qu’elle est revendiquée?

À notre avis préliminaire, l’objet de l’invention tel qu’il est énoncé dans les revendications 1 à 29 et 60 qui doit être utile vise les cellules porcines génétiquement modifiées comprenant des mutations inactivantes dans un ou les deux allèles d’un gène CD163, où les porcs comprenant lesdites cellules porcines génétiquement modifiées présentent une résistance accrue au virus du SRRP (revendications 1 à 29), ainsi que l’utilisation de celles-ci (revendication 60). Nous estimons que l’utilité de l’objet des revendications 1 à 29 et 60 dépend de la production d’un porc génétiquement modifié comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées ayant des mutations inactives dans les deux allèles d’un gène CD163 et qui présentent une résistance accrue au SRRP.

En ce qui concerne les revendications 30 à 32, 46 à 49, 52 à 56 et 58, nous sommes d’avis préliminaire que l’objet de l’invention comme il est mentionné dans ces revendications qui doit être utile vise une méthode de production d’un porc génétiquement modifié comprenant une mutation dans au moins un allèle d’un gène CD163. Nous estimons que l’utilité de l’objet des revendications 30 à 32, 46 à 49, 52 à 56 et 58 dépend de la production d’un porc génétiquement modifié comprenant au moins un allèle à muter d’un gène CD163.

En ce qui concerne les revendications 33 à 45, 50, 51 et 57 à 59, nous sommes d’avis préliminaire que l’objet de l’invention comme il est mentionné dans ces revendications qui doit être utile vise une méthode de production d’un porc génétiquement modifié comprenant des mutations dans les deux allèles d’un gène CD163. Nous estimons que l’utilité de l’objet des revendications 33 à 45, 50, 51 et 57 à 59 dépend de la production d’un porc génétiquement modifié comprenant des mutations dans les deux allèles d’un gène CD163.

En ce qui concerne les revendications 61 à 70, nous sommes d’avis préliminaire que l’objet de l’invention, comme il est mentionné dans ces revendications qui doit être utile vise des cellules porcines génétiquement modifiées comprenant une ou plusieurs modifications d’une séquence du gène CD163, où une ou plusieurs modifications sont dans une séquence non codante du gène CD163 et inactivent le gène CD163 dans un allèle ou les deux, et où les porcs ayant lesdites cellules porcines génétiquement modifiées présentent une résistance accrue au SRRP (revendications 61 à 65) ainsi qu’à leurs méthodes de production connexes (revendications 66 à 70).
Nous estimons que l’utilité de l’objet des revendications 61 à 70 dépend de la production d’un porc génétiquement modifié comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une ou plusieurs modifications dans une séquence non codante du gène CD163 qui inactivent le gène CD163 dans un allèle de ce gène ou les deux allèles et qui présentent une résistance accrue au SRRP.

En raison des expressions « comprenant des mutations inactives dans les deux allèles d’un gène CD163 » (revendications indépendantes 1 et 15), « comprenant une mutation dans au moins un allèle d’un gène CD163 » (revendication indépendante 30), « comprenant des mutations dans les deux allèles d’un gène CD163 » (revendication indépendante 33), « comprenant une mutation dans un allèle d’un gène « comprenant des mutations dans les deux allèles d’un gène CD163 » (revendication indépendante 59), « comprenant une ou plusieurs altérations dans une séquence d’un gène CD163, où une ou plusieurs altérations sont dans une séquence non codante du gène CD163 » (revendication indépendante 61), la portée des revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 englobe les porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163.

L’utilité de l’objet revendiqué est-elle établie par la démonstration à la date de dépôt?

Porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163, y compris les porcs présentant une résistance accrue au SRRP.

Rien n’indique dans le dossier dont nous sommes saisis une production démontrée de porcs présentant une résistance accrue au SRRP et qui comporte des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163.

Porc comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec des mutations inactivantes ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans un allèle d’un gène CD163 ou les deux, y compris les porcs présentant une résistance accrue au SRRP.

Rien n’indique dans le dossier dont nous sommes saisis une production démontrée de porcs ayant des cellules porcines génétiquement modifiées comprenant des mutations inactivantes ou une délétion partielle dans un allèle du gène CD163 ou les deux, y compris les porcs qui présentent une résistance accrue au SRRP.

Cellules porcines génétiquement modifiées ayant une ou plusieurs altérations dans une séquence du gène CD163, où une ou plusieurs modifications se trouvent dans une séquence non codante du gène CD163 et inactivent le gène CD163 dans un allèle ou les deux et méthodes connexes pour créer un porc qui présente une résistance accrue au SRRP.

Rien n’indique dans le dossier dont nous sommes saisis une production démontrée de cellules porcines génétiquement modifiées ayant une ou plusieurs modifications dans une séquence du gène CD163, où une ou plusieurs modifications se trouvent dans une séquence non codante du gène CD163 et inactivent le gène CD163 dans un allèle ou les deux et méthodes connexes pour créer un porc qui présente une résistance accrue au SRRP.

Compte tenu de ce qui précède, nous sommes d’avis préliminaire que l’utilité des modes de réalisation visés par la portée des revendications 1 à 70 n’a pas été établie sur la base d’une démonstration à la date de dépôt.

L’utilité de l’objet revendiqué est-elle établie par une prédiction valable à compter de la date de dépôt?

Porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163, y compris les porcs présentant une résistance accrue au SRRP

Le fondement factuel, le raisonnement et le niveau de divulgation requis pour une prédiction valable doivent être évalués en fonction de la connaissance que la PVA devrait avoir pour étayer cette prédiction, et en fonction de ce que cette PVA comprendrait du mémoire descriptif comme un raisonnement logique menant à l’utilité de l’invention.

En ce qui concerne un fondement factuel à l’appui de la prédiction de l’utilité et à partir de laquelle le résultat souhaité peut être déduit, nous sommes d’avis préliminaire que le fondement actuel trouvé dans le présent mémoire descriptif ou dans les CGC a des lacunes au chapitre de la production de porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163, car la spécification ne divulgue aucune réalisation représentative ou toute autre preuve factuelle pertinente pour prédire la viabilité d’un porc génétiquement modifié qui n’exprime pas le gène CD163.

En outre, nous sommes d’avis préliminaire qu’il serait évident pour la PVA, après avoir lu le mémoire descriptif, que celui-ci n’expose pas le raisonnement selon lequel les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 pourraient donner lieu à des porcs génétiquement modifiés présentant une résistance accrue au SRRP. Au contraire, la description au paragraphe [0045] exprime un raisonnement qui est le contraire du raisonnement valable requis [soulignement ajouté] :

Dans le cas du gène CD163, il est souhaitable de ne désactiver que sa fonction liée à la liaison et/ou à la décapsidation au SRRP tout en laissant les autres fonctions du gène CD163 à peine touchées, voire aucunement touchées. Bien que cela ne soit pas lié à une théorie particulière, on croit qu’il ne serait pas viable d’éliminer complètement le gène CD163 ou que celui-ci pourrait être sérieusement compromis en raison de son rôle dans la liaison et l’internalisation des complexes hémoglobine-haptoglobine. Il est donc possible d’inactiver le gène CD163 en perturbant le cinquième domaine du récepteur scavenger riche en cystéine (RSRC) N-terminal du gène CD163, qui a déjà joué un rôle de premier plan dans l’infection par le virus du SRRP (Van Gorp et coll., 2010), tout en laissant les autres domaines intacts. Le domaine 5 du RSRC peut être génétiquement modifié, par exemple en introduisant des mutations ponctuelles qui modifient la structure de ce domaine ou en échangeant ce domaine avec un autre. Par exemple, le domaine 5 du RSRC peut être remplacé par le domaine 8 du RSRC à partir du ligand du gène CD163 (CD163L), car il a été démontré que cet échange de domaine réduit l’infectiosité relative du SRRP à 0 % dans les cellules cultivées (Van Gorp et coll., 2010).

Un autre passage de la description au paragraphe [0121] ne confirme pas non plus la validité de la production de porcs génétiquement modifiés avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 [soulignement ajouté] :

Comme il a déjà été établi, la délétion du domaine cytoplasmique du gène CD163 élimine l’infectiosité du SRRP, tout comme la délétion ou la modification du domaine 5 du RSRC. Étant donné que certains des domaines du RSRC du gène CD163 ont des fonctions importantes pour la survie de l’animal, par exemple l’enlèvement de l’hémoglobine, la modification du gène de telle sorte que ces autres fonctions restent intactes représente une stratégie solide pour créer des porcs qui sont résistants au SRRP. Des recherches antérieures ont également suggéré que le remplacement du domaine 5 du RSRC par le domaine 8 du CD163L bloque également l’infectiosité (Van Gorp et coll., 2010b).

Porc comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans un allèle d’un gène CD163 ou les deux et qui présentant une résistance accrue au SRRP.

Contrairement à nos opinions préliminaires concernant les porcs génétiquement modifiés qui n’expriment pas le gène CD163, nous estimons qu’il serait évident pour la PVA d’avoir lu la spécification selon laquelle le para [0045] cité ci-dessus contient un raisonnement valable selon lequel les cellules de porc génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans l’un de ses allèles ou les deux seraient capables de donner naissance à des porcs génétiquement modifiés qui présentent une résistance accrue au SRRP, à savoir l’utilisation de cellules porcines génétiquement modifiées comprenant des mutations dans l’un des allèles d’un gène CD163 ou les deux qui inactivent les fonctions du gène CD163 liées à la liaison ou à la décapsidation du SRRP tout en laissant les autres fonctions du gène CD163 à peine touchées, voire aucunement touchées. Nous estimons également que les résultats de la littérature pertinente rapportés dans le même passage constituent un fondement factuel approprié à l’appui de la prédiction de l’utilité et à partir de laquelle on peut déduire le résultat souhaité.

Cellules porcines génétiquement modifiées ayant une ou plusieurs altérations dans une séquence du gène CD163, où une ou plusieurs modifications se trouvent dans une séquence non codante du gène CD163 et inactivent le gène CD163 dans un allèle ou les deux et méthodes connexes pour créer un porc qui présente une résistance accrue au SRRP

Nous croyons qu’il serait évident pour la PVA d’avoir lu la spécification indiquant que le raisonnement valable selon lequel les cellules porcines génétiquement modifiées avec une ou plusieurs altérations dans une séquence non codante d’un allèle d’un gène CD163 présenteraient une résistance accrue au SRRP ne repose sur aucun fondement factuel.

En outre, et en ce qui concerne les représentations où une ou plusieurs altérations se trouvent dans une séquence non codante des deux allèles du gène CD163 et entraînent la non-expression du gène CD163, nous sommes d’avis préliminaire que leur utilité n’a pas été établie sur la base d’une prédiction valable à la date de dépôt pour les mêmes raisons que celles qui ont été exprimées ci-dessus en ce qui concerne les porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163.

Conclusion concernant l’utilité

Au vu de ce qui précède, nous sommes donc d’avis préliminaire que l’utilité de l’objet revendiqué n’a pas été établie par démonstration ou par une prédiction valable dans l’ensemble de la portée des revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 et, par conséquent, ces revendications contreviennent à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[48] À l’audience et dans la réponse à la lettre de révision préliminaire aux pages 1 à 3, il a été soutenu que la présente demande établit l’utilité de l’objet des revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 7, y compris : cellules porcines avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou avec altérations d’un seul allèle.

[49] En ce qui concerne les porcs résistants au SRRP comprenant des cellules de porc génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163, le Demandeur soumet d’abord dans la réponse à la lettre de révision préliminaire qu’il serait clair pour une personne versée dans l’art lisant notamment le paragraphe [0045] du mémoire descriptif qu’il n’est pas souhaitable de supprimer entièrement le gène CD163 dans toutes les représentations, car le mémoire descriptif enseigne des solutions de rechange comme l’inactivation de la fonction du gène CD163 liée à la liaison ou à la décapsidation du SRRP tout en laissant les autres fonctions du gène CD163 à peine touchées, voire aucunement touchées.

[50] Comme il est mentionné dans la lettre de révision préliminaire, l’utilité de l’objet revendiqué doit être établie pour l’ensemble de la portée des revendications, de façon indépendante pour chaque réalisation revendiquée. Si une revendication est suffisamment large pour englober à la fois un objet utile et un objet inutile, elle contrevient toujours à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[51] Le Demandeur est aussi en désaccord, avec toute déférence, avec l’affirmation du Comité selon laquelle les énoncés dans la demande au sujet des effets potentiellement délétères de l’inactivation des deux allèles aux paragraphes [0045] et [0121] correspondent à des énoncés selon lesquels ces réalisations de l’invention revendiquée manquent définitivement d’utilité ou qu’il n’y a pas la moindre parcelle d’utilité. En particulier, le Demandeur fait remarquer que la demande vise spécifiquement les réalisations de l’inactivation des deux allèles, en indiquant que même dans les circonstances où cette approche peut avoir des effets délétères, elle peut être utile dans d’autres contextes, ce qui appuie les arguments du Demandeur selon lesquels il existe une prédiction valable d’une parcelle d’utilité. Lorsqu’on lui a demandé précisément, à l’audience, la nature de ces autres contextes et où, dans le mémoire descriptif, de tels contextes sont divulgués, le Demandeur a soutenu qu’il pourrait s’agir d’un très large éventail de types de porcs d’intérêt technologique et où ces modifications, les délétions du gène CD163, sont considérées comme pouvant être utilisées dans tous ces contextes possibles et pour tous ces différents antécédents génétiques. Le Demandeur a donné des exemples de porcs destinés à la transplantation d’organes chez l’humain ou à la production de viande.

[52] Le fait qu’un mode de réalisation d’inactivation de deux allèles puisse être utile ou non dans d’autres contextes n’est pas la considération pertinente dont nous sommes saisis. Ce qui est pertinent, c’est le contexte de l’objet revendiqué en l’espèce. Dans AstraZeneca, au paragraphe 53, la Cour suprême a déclaré ce qui suit :

Ce qui constitue une utilité acceptable variera en fonction de l’objet de l’invention cerné à la suite de l’interprétation des revendications. Ainsi, la portée des utilisations potentielles acceptables pour qu’il soit satisfait à la condition énoncée à l’art. 2 est limitée—ce n’est pas n’importe quelle utilisation qui suffira. Puisqu’il est exigé que l’utilité de l’invention proposée soit liée à la nature de l’objet, une invention proposée ne peut être sauvée par une utilité qui n’a aucun lien avec lui. Il ne suffit pas que l’inventeur voulant faire breveter une machine fasse valoir qu’elle est utile en tant que pressepapier.

[53] Par conséquent, une seule utilisation est suffisante, mais elle doit être liée à la nature de l’objet revendiqué indiqué. Nous avons d’abord identifié, aux pages 13 et 14 de la lettre de révision préliminaire, l’objet de l’invention revendiquée comme il est énoncé dans les revendications 1 à 70 qui doit être utile, comme il a été énoncé dans AstraZeneca. Fait important, le Demandeur n’a pas contesté ces identifications et déclarations et n’a formulé aucun autre commentaire à leur sujet. Les revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 englobent des cellules porcines génétiquement modifiées comprenant des mutations inactivantes dans les deux allèles d’un gène CD163, où les porcs ayant lesdites cellules porcines génétiquement modifiées montrent une résistance accrue au SRRP. Ainsi, l’utilité de l’objet des revendications dépend de la production d’un porc génétiquement modifié viable comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées ayant des mutations inactives dans les deux allèles d’un gène CD163 et qui présentent une résistance accrue au SRRP.

[54] S’il est impossible d’établir, par une démonstration ou une prédiction valable, que les cellules porcines génétiquement modifiées comprenant des mutations inactivantes dans les deux allèles d’un gène CD163 peuvent mener à la génération réussie de porcs génétiquement modifiés qui présentent une résistance accrue au SRRP, alors l’objet revendiqué manque d’utilité dans la mesure où il se rapporte à ce mode de réalisation revendiqué.

[55] En ce qui concerne la démonstration de l’utilité, nous avons indiqué dans la lettre de révision préliminaire que rien n’indique, dans le dossier dont nous sommes saisis, une production démontrée de porcs qui présentent une résistance accrue au SRRP et qui comprennent des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163 à la date de dépôt.

[56] Le Demandeur n’a ni contesté ni commenté d’une autre façon cette conclusion préliminaire ou toute autre conclusion concernant un manque d’utilité démontrée pour l’ensemble de l’objet revendiqué à la date de dépôt et nous adoptons donc ces conclusions ici aux fins du présent examen final.

[57] C’est en ce qui concerne une prédiction valable de l’utilité, et plus particulièrement si le mémoire descriptif contient un raisonnement valable selon lequel les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 seraient capables de donner naissance à des porcs génétiquement modifiés qui présentent une résistance accrue au SRRP, que les déclarations contenues dans les paragraphes [0045] et [0121] ont été prises en considération et mentionnées dans la lettre de révision préliminaire.

[58] Nous reconnaissons que la demande envisage spécifiquement des modes de réalisation de l’inactivation des deux allèles et décrit de façon prophétique la façon d’exécuter ces modes de réalisation souhaités. Nous estimons toutefois que cette divulgation équivaut plutôt au résultat utile prévu et souhaité de l’analyse prévue dans AZT—il s’agit du point de départ de l’enquête plutôt que du fondement factuel ou du raisonnement suggéré par le Demandeur. Nous nous demandons si l’inventeur a un raisonnement clair et valable à partir duquel il est possible de déduire, selon le fondement factuel, la prédiction selon laquelle les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 pourraient donner lieu à des porcs génétiquement modifiés présentant une résistance accrue au SRRP.

[59] En ce qui concerne le fondement factuel, le mémoire descriptif ne divulgue pas de réalisations représentatives ou aucun autre élément de preuve factuel appuyant la prédiction selon laquelle un porc génétiquement modifié qui n’exprime pas le gène CD163 serait viable. Nous estimons que les faits pertinents ne font également pas partie des CGC.

[60] En outre, nous sommes d’avis que, dans l’ensemble, le mémoire descriptif ne divulgue pas un raisonnement clair et valable soutenant la prédiction selon laquelle les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 seraient capables de donner lieu à des porcs génétiquement modifiés présentant une résistance accrue au SRRP. Comme il est indiqué dans la lettre de révision préliminaire, les paragraphes [0045] et [0121] contiennent des déclarations qui ne confirment pas la validité de la production de porcs génétiquement modifiés avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163. Ainsi, nous estimons qu’il n’y a pas de présomption d’utilité raisonnable à première vue dans la mesure où les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 seraient capables de donner naissance à des porcs génétiquement modifiés présentant une résistance accrue au SRRP.

[61] À l’audience, le Demandeur a établi un parallèle entre la présente affaire et celle dont la Cour suprême était saisie dans AZT. Il a été soutenu que, comme AZT, la présente affaire porte sur une prédiction valable et tout aussi prophétique de l’utilité dans des circonstances où il y avait des raisons de qualifier la prédiction au point de suggérer que d’autres modes de réalisation pourraient être meilleurs, mais rien ne donnait à penser qu’ils ne pourraient pas fonctionner du tout, ou qu’ils seraient inutiles dans la demande elle-même ou dans la technique.

[62] Dans AZT, le brevet portait sur l’utilisation d’un médicament dans le traitement du VIH/sida. La Cour suprême du Canada a confirmé le brevet en vertu de la doctrine de la prédiction valable. Dans ce cas, les inventeurs disposaient à la fois d’un fondement factuel (tests in vitro positifs) pour leur prédiction selon laquelle AZT fonctionnerait chez les patients humains et d’un raisonnement valable reliant ces faits au résultat souhaité. Au paragraphe 75, il a été conclu que dans ce cas, « les inventeurs possédaient et divulguaient dans le brevet les données factuelles sur lesquelles pouvait reposer une prédiction et le raisonnement (l’effet bloquant sur l’élongation de la chaîne) leur permettant de faire une prédiction valable au moment où ils ont déposé leur demande de brevet ». Il suffisait que les inventeurs aient alors divulgué dans le brevet un motif rationnel de prédire valablement que l’AZT se révélerait utile dans le traitement et la prophylaxie du sida (voir par. 3).

[63] Ce n’est pas la situation dont nous sommes saisis. Même si la présente demande contient des renseignements sur la production de porcs hypothétiques qui présentent une résistance accrue au SRRP comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163, elle ne divulgue pas de fondement factuel et n’expose aucun un raisonnement valable pour prédire que les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 pourraient donner lieu à des porcs génétiquement modifiés qui présentent une résistance accrue au SRRP.

[64] Dans AZT, les inventeurs ont divulgué un fondement factuel sous la forme de tests in vitro positifs. En revanche, même si le mémoire descriptif en instance divulgue des preuves factuelles sur la raison pour laquelle un porc génétiquement modifié avec une altération ou une suppression partielle dans une partie de la séquence de gènes CD163 des deux allèles d’un gène CD163 serait résistant au SRRP, le mémoire descriptif ne divulgue aucune preuve factuelle permettant de prédire que les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 pourraient donner naissance à un porc viable résistant au SRRP.

[65] Dans AZT, les inventeurs ont divulgué un raisonnement (l’effet bloquant sur l’élongation de la chaîne) sur lequel pouvait reposer une prédiction valable. La demande en instance ne divulgue pas un raisonnement clair et valable expliquant pourquoi des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 seraient capables de donner lieu à des porcs génétiquement modifiés viables présentant une résistance accrue au SRRP. Au contraire et comme expliqué ci-dessus, le mémoire descriptif dans son ensemble, et notamment les paragraphes [0045] et [0121], indique à la PVA que les porcs génétiquement modifiés qui n’expriment pas le gène CD163 ne seraient pas viables, ce qui mine donc directement la prédiction selon laquelle des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 seraient capables de créer des porcs modifiés qui présentent une résistance accrue au SRRP.

[66] Lors de l’audience, le Demandeur a également fait allusion au seuil relativement bas pour justifier une prédiction valable de l’utilité et a soutenu que si la simple spéculation n’est pas suffisante, une parcelle d’utilité, elle, suffit.

[67] Nous notons tout d’abord que le bon seuil pour une prédiction valable est une « inférence raisonnable prima facie d’utilité », et non une « parcelle d’utilité » (voir la section Contexte juridique ci-dessus, et notamment Eli Lilly au paragraphe 85). Nous avons exprimé notre point de vue quant à la validité de la prédiction selon laquelle les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 seraient capables de donner lieu à des porcs génétiquement modifiés présentant une résistance accrue au SRRP en ayant ce seuil à l’esprit.

[68] Par ailleurs, le seuil de la « parcelle d’utilité » se rapporte au degré d’utilité requis (voir AstraZeneca, au paragraphe 55). En d’autres termes, « [un] brevet valide exige l’utilité, bien qu’une moindre parcelle d’utilité soit suffisante » (Apotex Inc. c. Janssen Inc., 2021 CAF 45, au par. 37). Bien qu’une « parcelle d’utilité » suffise, cette parcelle doit se rapporter à la nature de l’objet revendiqué : AstraZeneca, au par. 55.

[69] Comme indiqué ci-dessus, nous avons d’abord identifié, aux pages 13 et 14 de la lettre de révision préliminaire, l’objet de l’invention revendiquée comme il est énoncé dans les revendications 1 à 70 qui doit être utile et l’utilité connexe. À la lumière de l’objet revendiqué, nous avons constaté que l’utilité alléguée des cellules porcines avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 doit être liée à la production de porcs génétiquement modifiés viables qui présentent une résistance accrue au SRRP. S’il pouvait être établi par une démonstration ou une prédiction valable que les cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou qui n’expriment pas le gène CD163 étaient capables de donner naissance à des porcs génétiquement modifiés viables présentant une résistance accrue au SRRP, nous aurions un objet utile. Après avoir examiné l’ensemble du dossier dont nous sommes saisis, nous sommes d’avis que ce n’était pas le cas pour les raisons énoncées dans la lettre de révision préliminaire et pour les autres raisons décrites ci-dessus.

[70] En ce qui a trait aux modifications d’un seul allèle comme celles qui sont visées par la revendication indépendante 61 au dossier et les revendications dépendantes de celles-ci, la réponse à la lettre de révision préliminaire fait valoir à la page 3 qu’ [traduction] « il était évident, à la date de dépôt, pour une personne inventive versée dans l’art, qu’il pourrait être utile d’altérer un seul allèle ».

[71] Premièrement, notre avis préliminaire exprimé à la page 17 de la lettre de révision préliminaire concernant les modes de réalisation d’altérations d’un seul allèle ne portait pas sur la question de savoir s’il pouvait être utile de modifier un seul allèle dans n’importe quel contexte. Il s’agissait plutôt de savoir si les cellules porcines génétiquement modifiées avec une ou plusieurs altérations dans une séquence non codante dans un seul allèle d’un gène CD163 et qui inactiveraient le gène CD163 pourraient donner naissance à des porcs modifiés présentant une résistance accrue au SRRP, car il s’agissait de l’objet revendiqué pour lequel l’utilité devait être établie.

[72] Deuxièmement, notre point de vue préliminaire reposait sur le fait que les réalisations d’altérations d’un seul allèle englobées par la revendication indépendante 61 au dossier et les revendications dépendantes expriment encore le gène CD163 non modifié et, par conséquent, ces réalisations hétérozygotes devraient encore être susceptibles d’être infectées par le SRRP. Par conséquent, nous estimons qu’il serait évident pour la PVA, après avoir lu le mémoire descriptif, qu’il n’y a pas de fondement factuel ou de raisonnement valable pour prédire que le porc hétérozygote génétiquement modifié englobé qui exprime encore le gène CD163 non modifié présenterait une résistance accrue au SRRP.

Conclusion concernant l’utilité

[73] Au vu de ce qui précède, nous sommes donc d’avis que l’utilité de l’objet revendiqué n’a pas été établie par démonstration ou par une prédiction valable dans l’ensemble de la portée des revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 et, par conséquent, ces revendications contreviennent à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Évidence

Contexte juridique

[74] L’article 28.3 de Loi sur les brevets exige que l’objet d’une revendication ne soit pas évident pour la PVA :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

(a) qui a été faite, soit plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, soit, si la date de la revendication est antérieure au début de cet an, avant la date de la revendication, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

(b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[75] Dans Sanofi, au para 67, la Cour suprême du Canada indique qu’il est utile, pour évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes présentées ci-essous :

(1)a) Identifier la « personne versée dans l’art »;

b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui soustend la revendication ou son interprétation;

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituentelles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotentelles quelque inventivité?

[76] Dans le contexte de la quatrième étape, la Cour dans Sanofi déclare qu’il peut être indiqué dans certains cas de faire l’analyse de l’« essai allant de soi ».

[77] La Cour dans Sanofi relève les facteurs non exhaustifs suivants à évaluer dans une analyse de l’essai allant de soi [les expressions définies sont ajoutées] :

Estil plus ou moins évident que l’essai sera fructueux? Existetil un nombre déterminé de solutions prévisibles connues des personnes versées dans l’art? [le facteur de l’évidence]

Quels efforts—leur nature et leur ampleur—sont requis pour réaliser l’invention? Les essais sontils courants ou l’expérimentation estelle longue et ardue de telle sorte que les essais ne peuvent être qualifiés de courants? [le facteur de l’ampleur et de l’effort]

L’art antérieur fournit-il un motif de rechercher la solution au problème qui sous-tend le brevet? [le facteur du motif]

Analyse

[78] La lettre de révision préliminaire explique, aux pages 19 à 27, que nous d’avis préliminaire que les porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète de l’un des allèles d’un gène CD163 ou de ses deux allèles ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163 ainsi que des méthodes connexes n’auraient pas été évidentes pour la PVA compte tenu de l’art antérieur cité et des CGC. Toutefois, nous avons exprimé l’opinion préliminaire selon laquelle les revendications 1 à 3, 5 à 17, 19 à 35, 37 à 48, 50 à 54 et 56 à 70 au dossier englobent un objet qui aurait été évident pour la PVA compte tenu de l’art antérieur cité et des CGC pertinentes.

La PVA et les CGC pertinentes

[79] La PVA et les CGC pertinentes ont été identifiées dans le cadre de l’interprétation téléologique des revendications ci-dessus, où les arguments du demandeur concernant les CGC ont été pris en considération. Bien que dans ce contexte, les renseignements formant les CGC sont définis par la date de publication, ces renseignements sont également considérés comme des CGC à la date de revendication et sont donc pertinents pour évaluer l’évidence.

Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[80] La lettre de révision préliminaire énonce ce qui suit, à la page 20, en ce qui concerne les idées originales des revendications au dossier :

Comme il est indiqué ci-dessus, notre opinion préliminaire est que la PVA considérerait tous les éléments des revendications comme étant essentiels et qu’ils devraient donc être reflétés dans les idées originales des revendications. Par conséquent, aux fins de cette évaluation, nous tenons compte de tous les éléments essentiels des revendications. Notre opinion préliminaire est que la combinaison des éléments essentiels des revendications indépendantes 1, 15, 30, 33, 46, 52, 59 à 61 et 66 représente également leurs idées originales.

Nous sommes également d’avis préliminaire que les éléments des revendications dépendantes concernant l’absence de mutation dans le gène SIGLEC1, les mutations envisagées dans le gène CD163 et le système ou la méthode spécifique utilisé pour muter le gène CD163 et la méthode ou l’étape utilisée pour produire la cellule ou le porc génétiquement modifié envisagée comme indiqué ci-dessus, font partie des idées originales respectives des revendications dépendantes.

[81] Le Demandeur n’a pas contesté l’identification des idées originales des revendications au dossier et n’a formulé aucun autre commentaire à cet égard. Nous estimons donc que la combinaison des éléments essentiels des revendications indépendantes 1, 15, 30, 33, 46, 52, 59 à 61 et 66 représente leurs idées originales et que les éléments supplémentaires des revendications dépendantes font partie de leurs idées originales respectives.

Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui soustend la revendication ou son interprétation

[82] La lettre d’examen préliminaire énonce ce qui suit aux pages 20 et 21 en ce qui concerne les différences qui existent entre l’objet cité comme faisant partie de l’« état de la technique » et les idées originales qui sous-tendent les revendications :

En plus des documents D3, D4, D5 et D7 présentés ci-dessus, la décision finale cite les documents suivants en tant qu’art pertinent :

D1 :

US 20110016546 A1

Bedell et coll.

20 janvier 2011

D6 :

Oetke et coll., Molecular and Cellular Biology, 26(4), pages 1549-1557, 2006

D8 :

Lunney et Chen, Virus Research, 154, pages 161 à 169, 2010

Le document D1 divulgue l’utilisation de nucléases type doigt de zinc pour introduire des mutations dans des séquences chromosomiques porcines codant la protéine CD163, où les séquences chromosomiques modifiées comprennent une mutation de telle sorte que la protéine CD163 n’est pas produite. Les porcins génétiquement modifiés et leurs cellules comprenant ledit codage de séquence chromosomique modifié pour la protéine CD163 peuvent être hétérozygotes ou homozygotes pour la mutation introduite. Le D1 enseigne que ces animaux auront une résistance accrue aux maladies, comme à l’infection au SRRP. Le D1 enseigne que les animaux peuvent être croisés pour créer des animaux comprenant plus d’une séquence chromosomique modifiée ou pour créer des animaux homozygotes pour une ou plusieurs séquences chromosomiques modifiées.

Le document D6 divulgue la génération de souris à sialoadhésine -/-. Les souris étaient viables et fertiles, et n’ont montré aucune anomalie développementale. Le D6 enseigne que les orthologues de la sialoadhésine partagent une identité d’acides aminés de 69 % à 78 % entre la souris, le cochon et l’humain, et que le modèle d’expression cellulaire est bien conservé chez les espèces de mammifères. Cela donne à penser que les fonctions spécifiques de la sialoadhésine peuvent également être conservées. Le document D6 enseigne que les souris à sialoadhésine -/- sont un modèle idéal pour étudier le rôle de la sialoadhésine dans la modulation des réponses immunitaires et inflammatoires.

Le document D8 passe en revue les progrès réalisés à l’aide d’approches génomiques pour identifier les biomarqueurs qui sont corrélés avec la résistance des porcs à l’infection par le SRRP. Le document D8 enseigne qu’il n’y a aucune preuve d’individus à récepteurs nuls pour le SRRP probablement parce qu’il y a plusieurs récepteurs, de la sialoadhésine et la protéine CD163. Le document D8 enseigne que de nombreux récepteurs viraux sont probablement des protéines de surface essentielles des cellules et que leur délétion n’entraînerait donc probablement pas de porcs viables. Le document D8 enseigne que la sélection génétique pour la résistance à la maladie doit tenir compte des effets négatifs potentiels sur d’autres caractéristiques commercialement importantes.

À notre avis préliminaire, la principale différence entre les idées originales des revendications 1 à 70 au dossier et l’un des documents D1, D3, D4, D5, D9 ou D10 réside dans la production d’un porc génétiquement modifié qui présente une résistance accrue au SRRP et qui comprend des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération, une délétion partielle ou une délétion complète de la séquence du gène CD163 dans les deux allèles d’un gène CD163 ou dans une séquence non codante du gène CD163.

[83] Le Demandeur n’a pas contesté notre caractérisation des différences qui existent entre l’affaire citée comme faisant partie de l’« état de la technique » et les idées originales des revendications et n’a formulé aucun autre commentaire à cet égard. Nous adoptons donc la caractérisation ci-dessus pour notre analyse finale.

Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituentelles des étapes évidentes pour la personne versée dans lart ou dénotentelles quelque inventivité?

[84] La lettre de révision préliminaire explique, aux pages 22 à 26, pourquoi nous étions d’avis préliminaire que les revendications 1 à 3, 5 à 17, 19 à 35, 37 à 48, 50 à 54 et 56 à 70 au dossier englobent un objet dont l’essai allait de soi et qui n’aurait donc pas exigé un degré d’invention de la PVA compte tenu de l’art antérieur cité et des CGC en ce qui concerne les différences qui existent entre la matière citée comme faisant partie de l’« état de la technique » et les idées originales qui sous-tendent les revendications :

Bien que la Cour, dans Sanofi, prévoit une approche en quatre étapes pour trancher la question de l’évidence, il est important de se souvenir que l’analyse de l’évidence concerne la question de savoir si rapprocher la différence entre l’art antérieur et un second point constitue des étapes qui nécessitent un degré quelconque d’inventivité : Société BristolMyers Squibb Canada c. Teva Canada Limitée, 2017 CAF 76, au par. 65.

Il pourrait être utile de garder à l’esprit que l’analyse de l’évidence vise à vérifier si la personne versée dans l’art peut rapprocher deux points dans le perfectionnement de la technique en se fondant uniquement sur ses connaissances générales courantes. Si tel est le cas, il y a évidence. Le premier de ces points concerne l’état de la technique à la date pertinente. Dans la jurisprudence, les mentions de l’« idée originale », du « concept inventif », de la « solution enseignée par le brevet », de « ce qui est revendiqué » ou simplement de « l’invention » tentent de définir le second point.

Étant donné que l’objet des présentes revendications concerne la production de cellules porcines génétiquement modifiées et de porcs présentant une résistance accrue à un virus porcin, un domaine que nous considérons comme un domaine d’activité « où les progrès sont souvent le fruit de l’expérimentation » (Sanofi, au par. 68), nous avons donc considéré une analyse de l’« essai allant de soi ».

Pour conclure qu’une invention résulte d’un « essai allant de soi », il doit aller « plus ou moins de soi de tenter d’arriver à l’invention. La seule possibilité d’obtenir quelque chose ne suffit pas » (Sanofi, au par. 66).

Avant d’évaluer les faits de la présente affaire, il vaut souligner qu’une conclusion qu’il aurait été plus ou moins évident que « l’essai sera fructueux » ne signifie pas qu’une certitude de réussite est requise, autrement il n’y aurait aucune logique à le décrire comme quelque chose « à tenter ». En effet, une analyse de l’« essai allant de soi » est utilisée précisément dans les domaines où les avancées sont réalisées par des expériences, de manière que la réussite ne puisse pas être garantie avant d’essayer (Les Laboratoires Servier c. Apotex Inc, 2019 CF 616, au par. 269). 269). En fait, ce qui doit être examiné est la question de savoir s’il est plus ou moins évident que « l’essai » sera fructueux à la lumière des CGC et de l’art antérieur; une simple possibilité ne suffira pas, mais un certain niveau d’incertitude est permis dans l’analyse de l’essai allant de soi; voir Janssen Inc c. Apotex Inc, 2021 CF 7, au par. 135 :

Pour ce qui est de la question de savoir si « l’essai sera fructueux », il est clair que la certitude du succès n’est pas nécessaire sinon il ne serait pas utile de le décrire comme quelque chose à « tenter ». Le terme « tenter » sous-entend la possibilité d’un échec, mais avec l’attente d’un succès. Il n’est jamais facile de le définir sur un spectre de succès probables, mais il ne s’agit pas d’une passe « Hail Mary » de Doug Flutie de Boston College ni d’un « but dans un filet ouvert » de Wayne Gretsky. Certaines expériences limitées sont autorisées dans le contexte du deuxième facteur. Elles ne doivent pas être ardues, inventives ou inhabituelles.

Compte tenu de ce qui précède et dans le contexte de l’objet revendiqué, nous estimons que les questions pertinentes sont de savoir si cela aurait été plus ou moins évident pour la PVA, à la lumière des divulgations faites dans les documents D1, D3, D4, D5, D9 et/ou D10, et des CGC pertinentes, que : 1) les porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète des deux allèles d’un gène CD163 ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163 devraient présenter une résistance accrue au SRRP; et 2) les porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 ou dans l’un des deux allèles du gène CD163 ou les deux devraient présenter une résistance accrue au SRRP.

Porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec délétion complète de l’un des deux allèles d’un gène CD163 ou des deux allèles ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163.

Même si le document D1 avait enseigné à la PVA d’introduire des mutations dans les séquences chromosomiques porcines codant la protéine CD163, où les séquences chromosomiques modifiées comprennent une mutation qui donne lieu à l’absence de production de la protéine CD163 nous sommes d’avis préliminaire que cela aurait été plus ou moins évident pour la PVA, étant donné les CGC pertinentes concernant les principales fonctions biologiques de la protéine CD163 et en particulier le rôle homéostatique de la protéine CD163 pour prévenir la toxicité de l’hémoglobine, qu’un porc génétiquement modifié qui n’exprime pas la protéine CD163 serait viable avant des essais courants.

Nous estimons que l’évaluation ci-dessus est déterminante pour l’enquête sur l’« essai allant de soi » pour les revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53, 55 à 60, 69 et 70, dans la mesure où elles englobent des porcs comprenant des cellules porcines modifiées génétiquement avec délétion complète de l’un des allèles d’un gène CD163 ou des deux allèles, ou comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées qui n’expriment pas le gène CD163, ainsi que des méthodes connexes.

L’enquête ne s’arrête toutefois pas là, car la portée de plusieurs de ces revendications englobe également des objets liés au porc comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans l’un des allèles du gène CD163 ou les deux.

Porc comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans un allèle d’un gène CD163 ou les deux

Les documents D1, D3, D4, D5, D9 et D10 révèlent tous que le gène CD163 est un récepteur important aux fins de l’infection par le SRRP.

Les documents D1, D4, D5, D9 et D10 révèlent en outre que les domaines du RSRC du CD163 qui sont essentiel à l’infectivité du SRRP sont plus centraux et qu’ils ont un rôle clé à jouer dans le domaine 5 du RSRC, tandis que les quatre premiers domaines du RSRC et la queue cytoplasmique ne sont pas requis. Sinon, le document D9 enseigne également que les complexes hémoglobine-haptoglobine ont une affinité élevée avec le domaine 3 du RSRC.

Compte tenu des enseignements ci-dessus et des CGC susmentionnées, nous sommes d’avis préliminaire qu’il aurait été plus ou moins évident pour la PVA que les porcs comprenant des cellules porcines modifiées ayant une altération, une délétion partielle ou un échange de domaine du RSRC dans une partie des deux séquences alléliques du gène CD163 qui est reconnu pour influencer l’infectivité du SRRP (p. ex., domaine 5 du RSRC) tout en laissant les autres domaines intacts, devraient être viables et présenter une résistance accrue au SRRP.

En outre, il aurait été plus ou moins évident pour la PVA que l’accouplement d’animaux femelles et mâles provenant de cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération, une délétion partielle ou un échange de domaine d’un RSRC dans une partie de l’un des allèles du gène CD163 qui est reconnu pour influencer l’infectivité du SRRP (p. ex., domaine 5 du RSRC) tout en laissant les autres domaines intacts devraient produire du porc comprenant cellules porcines ayant subi cette altération, cette délétion partielle ou cet échange de domaine de RSRC dans les deux allèles du gène CD163 et présentant une résistance accrue au SRRP.

Bien que nous estimions que les évaluations ci-dessus sont en grande partie déterminantes de l’analyse de l’« essai allant de soi » en l’espèce, nous formulons les observations suivantes à l’égard des autres facteurs non exhaustifs à considérer.

En ce qui concerne le facteur du motif, qui comprend les considérations fournies dans l’art antérieur pour trouver la solution visée par le brevet, ainsi que le motif pour combiner les enseignements de l’art antérieur cité, nous offrons les opinions préliminaires suivantes.

Nous estimons que l’art antérieur était généralement motivé à s’attaquer aux infections par le SRRP dans les troupeaux de porcs et qu’il était particulièrement motivé dans l’art antérieur à le faire en empêchant le récepteur CD163 de jouer son rôle central dans l’infectiosité du SRRP.

Nous estimons en outre que chacun des documents D1, D4, D5 et D10 fournit de façon indépendante un motif solide pour produire des porcs génétiquement modifiés comprenant des modifications dans les domaines du RSRC du CD163 qui sont essentielles à l’infectiosité du SRRP et estimons également que le document D9 ou les CGC fournissent un motif solide pour laisser les autres parties du CD163 intactes, y compris les domaines nécessaires pour les fonctions de clairance de l’hémoglobine du gène CD163.

Par conséquent, nous estimons à titre préliminaire que la PVA aurait été motivée par le document D1 et les résultats divulgués dans chacun des documents D4, D5, D9 et D10 à produire des porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans les deux allèles de ce gène en accouplant des animaux femelles et mâles générés à partir de cellules porcines génétiquement modifiées ayant une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans l’un des allèles d’un gène CD163.

Enfin, en ce qui concerne le facteur de l’ampleur et de l’effort, nous estimons que l’ampleur, la nature et la quantité d’efforts nécessaires pour utiliser les techniques des CGC pour la production de cellules porcines génétiquement modifiées et d’animaux génétiquement modifiés auraient relevé des capacités de la PVA à la date de revendication.

Par conséquent, et compte tenu des considérations qui précèdent des facteurs pertinents relatifs à une analyse de l’« essai allant de soi », nous sommes d’avis préliminaire qu’il était évident d’essayer d’obtenir un porc génétiquement modifié comprenant des cellules porcines modifiées ayant une altération, une délétion partielle ou un échange de domaine du RSRC dans une partie des deux séquences alléliques du gène CD163 qui est reconnu pour influencer l’infectivité du SRRP (p. ex., domaine 5) tout en laissant les autres domaines intacts de sorte que les autres fonctions du gène CD163 restent intactes. Il s’ensuit également que nous sommes d’avis préliminaire qu’il allait de soi d’essayer d’obtenir ledit porc génétiquement modifié en accouplant des animaux femelles et mâles générés à partir de cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans un allèle d’un gène CD163.

Cellules porcines génétiquement modifiées ayant une ou plusieurs altérations dans une séquence du gène CD163, où une ou plusieurs modifications se trouvent dans une séquence non codante du gène CD163 et inactivent le gène CD163

En ce qui concerne maintenant les revendications 61 à 70, dans la mesure où la portée de ces revendications englobe les porcs génétiquement modifiés comprenant des cellules de porc modifiées ayant une ou plusieurs modifications dans une séquence non codante du gène CD163 qui inactivent un ou plusieurs des domaines du RSRC du gène CD163 qui sont essentiels à l’infectivité du SRRP et aux méthodes de production connexes, nous estimons qu’il aurait été plus ou plus moins évident pour la PVA d’essayer d’obtenir de telles cellules porcines génétiquement modifiées et des porcs génétiquement modifiés à la lumière des enseignements des documents D1, D9, des résultats divulgués dans l’un ou l’autre des documents D4, D5 ou D10 et des CGC pertinentes pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus en ce qui concerne les porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans les deux allèles d’un gène CD163 ciblant plutôt les parties de séquence non codantes ou les parties codantes afin d’inactiver les domaines du RSRC du gène CD163 qui sont essentiels à l’infectiosité du SRRP tout en laissant les autres domaines intacts, ne nécessitant aucun degré d’invention.

[85] Comme nous l’avons indiqué dans la lettre de révision préliminaire à la page 22, nous étions d’avis préliminaire qu’étant donné que l’objet des présentes revendications concerne la production de cellules porcines génétiquement modifiées et de porcs présentant une résistance accrue à un virus porcin, un domaine que nous considérons comme un domaine d’activité « où les progrès sont souvent le fruit de l’expérimentation » (Sanofi, au par. 68), une analyse de l’« essai allant de soi » était justifiée.

[86] Le Demandeur n’a pas contesté la pertinence d’une analyse de l’« essai allant de soi » et n’a formulé aucun commentaire à ce sujet. Il a toutefois présenté des arguments en réponse à notre analyse qui sont alignés sur l’approche de l’essai allant de soi adoptée. Nous adoptons donc le cadre analytique de l’« essai allant de soi » pour notre analyse finale.

[87] Dans la lettre de révision préliminaire à la page 23 et en ce qui concerne le facteur de l’évidence et le porc comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans l’un des allèles d’un gène CD163 ou les deux, nous avons déclaré que la question pertinente était de savoir si cela aurait été plus ou moins évident pour la PVA, à la lumière des divulgations faites dans les documents D1, D3, D4, D5, D9 ou D10 les CGC pertinentes, que ce porc comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans l’un des allèles d’un gène CD163 ou les deux allèles devrait présenter une résistance accrue au SRRP.

[88] Le Demandeur n’a pas contesté la pertinence de cette question pour le facteur de l’évidence et n’a formulé aucun commentaire à cet égard. Nous allons donc également examiner cette question pour notre analyse finale.

[89] En ce qui a trait à l’art antérieur cité et à toute indication que le fait de modifier génétiquement le gène CD163 seulement peut produire des porcs résistants à l’infection par le SRRP, la réponse à la lettre de révision préliminaire soutient ce qui suit :

  • Le document D1 ne décrit pas la modification du génome de la séquence chromosomique du gène CD163 et ne fournit pas de renseignements précis à cet égard. En outre, le document D1 nomme le gène CD163 parmi une liste d’autres gènes et ne fait que spéculer que le gène CD163 peut être édité à l’aide d’une nucléase de telle sorte qu’il n’est pas produit et que cela peut produire une résistance accrue aux maladies chez les porcs;
  • Les documents D3, D4 et D5 ne fournissent que des données in vitro;
  • Le document D4 enseigne la co-transfection du gène SIGLEC1 en combinaison avec différents modèles du gène CD163 dans une lignée de cellules hépatiques humaines et cette expression des deux médiateurs d’entrée offre un modèle pour l’entrée du virus et l’infection à celui-ci (c.-à-d. SIGLEC1 et CD163);
  • À la lumière des documents D8 et D4, la PVA ne pouvait raisonnablement s’attendre à ce qu’une des modifications apportées uniquement au gène CD163 entraîne une résistance à l’infection par le SRRP;
  • En résumé, l’art antérieur cité ne fournit aucune indication selon laquelle le fait de modifier génétiquement le gène CD163 seulement peut produire des porcs résistants à l’infection par le SRRP. Il serait plutôt totalement imprévisible que la réalisation d’une modification dans le gène CD163 confère une résistance au SRRP.

[90] Lorsque l’art antérieur cité est examiné dans son ensemble, nous sommes d’avis que l’art antérieur cité oriente la PVA vers la modification de la séquence du gène CD163 dans les cellules porcines afin de conférer une résistance à l’infection par le SRRP chez les porcs comprenant lesdites cellules de porc modifiées.

[91] Chacun des documents D1, D4, D5, D9 et D10 divulgue que le gène CD163 est un récepteur important de l’infectivité du SRRP et enseigne que les domaines du CD163 qui sont essentiels à l’infectiosité du SRRP sont plus centraux et jouent un rôle clé dans le domaine 5 du RSRC [soulignement ajouté] :

(D1, au par. [0027]) De plus, le récepteur scavenger du gène CD163 est un médiateur d’entrée clé pour le SRRP. Dans une étude, les domaines protéiques du gène CD163 impliqué dans l’infection par le SRRP ont été identifiés par la création de mutants de délétion et de mutants chimériques. Des expériences d’infection ont révélé que le domaine 5 du récepteur scavenger riche en cystine (RSRC) [RSRC 5] est essentiel pour l’infection au SRRP, tandis que les quatre domaines du RSRC N-terminal et la queue cytoplasmique ne sont pas nécessaires. Les autres domaines protéiques du gène CD163 doivent être présents, mais peuvent être remplacés par les domaines du RSRC correspondants de CD163-L1, ce qui entraîne une réduction (RSRC 6 et régions interdomaines) ou une inversion (RSRC 7 à RSRC 9) de l’efficacité de l’infection. En outre, les anticorps spécifiques au gène CD163 qui reconnaissent le RSRC 5 sont en mesure de réduire l’infection par le SRRP.

(D4 aux pages 3102 et 3104) Le remplacement simultané des domaines RSRC 4, 5 et 6 du gène CD163 avec les domaines correspondants du CD163-L1 a entraîné une perte d’infectiosité (mutant L). Pour évaluer la contribution de chacun des trois domaines, les trois ont été remplacés séparément. La substitution du RSRC 4 du gène CD163 n’a eu aucune influence sur l’infection (mutant P), tandis que le remplacement du RSRC 5 du CD163 a complètement inhibé l’infection (mutant Q). Le remplacement du RSRC 6 du gène CD163 a entraîné une réduction de l’efficacité de l’infection (mutant R). Tout comme le RSRC 6, le PST I et le PST II ne semblaient pas essentiels, mais la présence des domaines correspondants du CD163-L1 réduisait l’infection (mutants M et O). Fait intéressant, les domaines 7, 8 et 9 du RSRC du gène CD163, les plus proches de la membrane plasmique, pourraient être remplacés par les domaines correspondants du CD163-L1 sans avoir d’influence significative sur l’infection par SRRP (mutant N).

Cependant, dans le cas du PAb incubé sur des cellules exprimant le mutant Q, tous les anticorps, à l’exception de ceux qui reconnaissent le RSRC 5 du gène CD163, avaient été épuisés, et les autres anticorps ont quand même été en mesure de réduire l’infection du SRRP au même niveau que le PAb initial, confirmant que les anticorps reconnaissant le RSRC 5 sont responsables de l’effet de blocage observé.

En conclusion, on peut se passer de la queue cytoplasmique du gène CD163 pour l’infection au SRRP, tout comme les quatre domaines RSRC extracellulaires N-terminal. Les domaines essentiels sont plus centraux, et le RSRC 5 est un élément clé. Jusqu’à présent, on a constaté que seuls le RSRC 2 et le RSRC 3 avaient été impliqués dans des processus biologiques. Les complexes d’hémoglobine-haptoglobine (HbHp) sont internalisés en se liant au RSRC 3 du gène CD163 (11, 14). Auparavant, il a été démontré que les complexes HbHp ne sont pas en mesure de réduire l’infection au SRRP (30), ce qui correspond aux résultats obtenus avec les mutants décrits ici, montrant que les quatre domaines RSRC N-terminal ne sont pas impliqués. De plus, un motif de 13 acides aminés dans le RSRC 2 a été identifié comme un site d’interaction putatif qui médie la liaison de l’érythroblaste (8) et l’interaction avec les bactéries Gram-positif et Gram-négatif (9).

(D5 aux pages 100 et 102) Même si le CD169 lie et intériorise les particules du SRRP, il s’agit d’un processus incomplet qui ne mène pas à l’initiation de la réplication de virus (Vanderheijden et coll., 2003). En revanche, la transfection transitoire du gène CD163 dans des lignées cellulaires non permissives du SRRP (CHO-K1, BHK-21 et PK-15) a rendu les cellules vulnérables à l’infection par le SRRP (Van Gorp et coll., 2008). Des titres de SRRP plus élevés ont été obtenus dans les cellules qui coexpriment de façon transitoire le CD169 et le CD163 que dans les cellules exprimant uniquement le CD163. Cependant, dans nos laboratoires, nous n’avons pas pu démontrer l’amélioration de la production de SRRP en transférant de façon stable le CD169 dans une lignée cellulaire qui a déjà exprimé de façon stable le CD163, en utilisant des virus du SRRP qui ont été adaptés auparavant pour croître sur des cellules exprimant uniquement le gène CD163 (données non publiées). (Voir le document D5 à la page 100)

4. Domaines du gène CD163 impliquant l’infectiosité du SRRP

Les domaines du gène CD163 impliqués dans l’infection au SRRP ont été disséqués en détail (Van Gorp et coll., 2010b). Divers mutants de délétion de l’espèce porcine CD163 et des constructions chimériques de l’espèce porcine CD163-L1 avec le CD163-L1 humain ont été générés et testés afin de déterminer l’activité des récepteurs du SRRP. CD163-L1 est un gène de duplication du gène humain CD163. Le gène CD163-L1 a une structure semblable au gène CD163, mais la protéine CD163-L1 exprimée n’a pas conféré le phénotype permissif du SRRP (Van Gorp et coll., 2010b). Les expériences de délétion et de remplacement du domaine du RSRC ont révélé que le RSRC 5 du gène CD163 du porc est essentiel pour l’infection, tandis que les quatre premières répétitions N-terminales et la queue cytoplasmique ne sont pas nécessaires. Les quatre répéteurs C-terminal restants peuvent être remplacés par des répéteurs CD163-L1 correspondants, mais la délétion de ces quatre répéteurs ou du domaine PST II (domaine II riche en proline-sérine-thréonine riche ou deuxième segment interdomaine) a supprimé l’infection. La délétion du domaine PST I (premier segment interdomaine) a réduit l’infectiosité. À la lumière de ces résultats, il semble que la distance entre le RSRC 5 et la membrane cellulaire soit essentielle à la fonction du récepteur. L’identification du RSRC 5 comme domaine critique pour l’infection au SRRP est conforme à la constatation d’autres personnes selon laquelle les RSRC 1-2 et 9 ne sont pas impliqués (Calvert et coll., 2007; Das et coll., 2010).

Plusieurs études réalisées ces dernières années ont confirmé que le gène CD163 jouait un rôle central dans le déclenchement de l’infection par le SRRP. On découvre des interactions moléculaires entre les domaines du gène CD163 et des protéines virales spécifiques. On construit de nouvelles lignées de cellules stables afin d’examiner les premiers événements menant à l’entrée virale et à l’infection productive du SRRP, et certains d’entre eux pourraient être utiles dans la fabrication de nouveaux vaccins.

(D9 à la page 1654) L’analyse de l’interaction entre SRRP et le gène CD163 a révélé que l’on peut se passer de la queue cytoplasmique contenant le motif d’internalisation pour l’infection au SRRP, tout comme les quatre domaines N-terminal du RSRC. Les domaines essentiels sont situés plus au centre et jouent un rôle clé pour le domaine 5 du RSRC, mais d’autres domaines du RSRC et les 2 domaines PST sont également requis (Van Gorp et coll., 2010). Jusqu’à présent, aucun rôle biologique n’a été attribué à ces domaines, car il a été démontré que d’autres ligands interagissaient avec les domaines 2 ou 3 du RSRC (Fabriek et coll., 2007b, 2009; Madsen et coll., 2004).

(D10 à la page 1663) On ne connaît pas encore le mécanisme d’action exact du gène DC163. Récemment, cependant, des domaines du gène CD163 cruciaux pour l’infection au SRRP ont été identifiés. Différentes formes mutantes du gène CD163 ont été évaluées afin de déterminer si elles pouvaient conférer un phénotype permissif du SRRP aux cellules non permissives. Dans une approche, des mutants du gène CD163 ont été obtenus en délétant des domaines spécifiques de la protéine. Dans une autre approche, des protéines chimériques ont été obtenues en échangeant des domaines spécifiques du CD163 avec les régions correspondantes du CD163-L1 humain, un paralogue du CD163 humain qui ne permet pas l’infection par le SRRP, ou vice versa. Les résultats de cette étude indiquent que les quatre domaines N-terminaux du récepteur scavenger riche en cystéine (RSRC) ne sont pas impliqués, tandis que le cinquième domaine du RSRC joue un rôle de premier plan dans l’infection au SRRP. En outre, la présence du sixième domaine du RSRC et des deux interdomaines riches en proline-sérine-thréonine (PST) du CD163 a une influence positive sur l’efficacité de l’infection. La présence des domaines 7, 8 et 9 du RSRC semble importante pour une bonne structure globale et une bonne présentation des domaines du gène CD163 qui sont essentiels pour l’infection. On peut se passer de la queue cytoplasmique du gène CD163, qui contient un motif YxxΦ qui dirige l’endocytose constitutive de cette molécule, ce qui confirme le rôle du gène CD163 comme récepteur d’internalisation pour le SRRP (Van Gorp et coll., 2010).

[92] L’absence de données probantes pour les individus ayant des récepteurs nuls au SRRP, comme l’indique le document D8, ne révèle rien sur le rôle réel du gène CD163 dans l’infection du SRRP. Ainsi, le document D8 ne prouve pas que le gène CD163 ne joue pas un rôle essentiel dans l’infection au SRRP ou que les modifications apportées au gène CD163 seulement ne peuvent pas entraîner une résistance à l’infection du SRRP. Nous estimons que la PVA comprendrait, contrairement au document D8, que les enseignements pertinents des documents D1, D4, D5, D9 et D10 traitent carrément du rôle du gène CD163 et des domaines du RSRC du gène CD163 dans l’infectivité du SRRP.

[93] De plus, nous sommes d’avis que la PVA comprendrait, à la lecture des documents D1, D5, D9 et D10, que leurs enseignements sur le rôle critique du gène CD163, et plus particulièrement le domaine 5 du RSRC du gène CD163 concernant l’infectivité du SRRP sont principalement fondés sur la divulgation du document D4. Comme le Demandeur l’a fait remarquer à juste titre dans la réponse à la lettre de révision préliminaire à la page 5, le document D4 décrit les régions modifiées du gène DC163 qui ont eu peu ou pas d’effet sur l’infectiosité du SRRP. Cependant, le document D4 signale également qu’aucune infection n’a été observée dans les cellules exprimant conjointement le gène SIGLEC1 et un mutant du gène CD163 dont le domaine 5 du RSRC a été remplacé par le domaine 8 du RSRC. Nous sommes d’avis que la PVA comprendrait à partir de ces résultats que la modification du gène CD163 seulement, plutôt que du gène SIGLEC1 et du gène CD163, suffit pour conférer une résistance à l’infection par le SRRP et que les mutations ciblant le domaine 5 du RSRC du gène CD163 sont plus susceptibles de conférer une résistance à l’infection par le SRRP que les mutations ciblant d’autres parties du gène CD163.

[94] La réponse à la lettre de révision préliminaire fait également valoir, à la page 5, que la PVA est bien consciente du fait que la modification de l’ADN génomique peut avoir une incidence sur la transcription et la traduction de l’ADN génomique modifié et que les modifications peuvent avoir une incidence sur le pliage et le transport de la protéine dans la cellule.

[95] Nous reconnaissons que la PVA serait consciente que la modification de l’ADN génomique peut ou non affecter la transcription et la traduction de l’ADN génomique modifié et que les modifications peuvent ou non affecter le pliage et le transport de la protéine dans la cellule. Cependant, comme il est mentionné dans la lettre de révision préliminaire, il faut souligner qu’une conclusion qu’il aurait été plus ou moins évident que « l’essai sera fructueux » ne signifie pas qu’une certitude de réussite est requise; autrement, il n’y aurait aucune logique à le décrire comme quelque chose « allant de soi ». En effet, une analyse de l’« essai allant de soi » est utilisée précisément dans les domaines où les avancées sont réalisées par des expériences, de manière que la réussite ne puisse pas être garantie avant d’essayer (Les Laboratoires Servier c. Apotex Inc, 2019 CF 616, au para 269). 269). En fait, ce qui doit être examiné est la question de savoir s’il est plus ou moins évident que « l’essai » sera fructueux à la lumière des CGC et de l’art antérieur; une simple possibilité ne suffira pas, mais un certain niveau d’incertitude est permis dans l’analyse de l’essai allant de soi; voir Janssen Inc c. Apotex Inc, 2021 CF 7, au par. 135 :

Pour ce qui est de la question de savoir si « l’essai sera fructueux », il est clair que la certitude du succès n’est pas nécessaire sinon il ne serait pas utile de le décrire comme quelque chose à « tenter ». Le terme « tenter » sous-entend la possibilité d’un échec, mais avec l’attente d’un succès. Il n’est jamais facile de le définir sur un spectre de succès probables, mais il ne s’agit pas d’une passe « Hail Mary » de Doug Flutie de Boston College ni d’un « but dans un filet ouvert » de Wayne Gretsky. Certaines expériences limitées sont autorisées dans le contexte du deuxième facteur. Elles ne doivent pas être ardues, inventives ou inhabituelles.

[96] À la lumière des divulgations des documents D1, D4, D5, D9 et D10, et des CGC pertinentes, nous sommes d’avis que le succès probable d’une modification dans une partie des séquences alléliques du gène CD163 qui est reconnue pour influencer l’infectivité du SRRP pour conférer une résistance au SRRP (p. ex., domaine 5 du RSRC) tout en laissant les autres parties du CD163 intactes, y compris les domaines nécessaires aux fonctions de clairance de l’hémoglobine du CD163, est moins qu’une certitude, mais plus qu’une simple possibilité.

[97] Il s’en suit que nous sommes d’avis préliminaire qu’il aurait été plus ou moins évident pour la PVA que les porcs comprenant des cellules porcines modifiées ayant une altération, une délétion partielle ou un échange de domaine du RSRC dans une partie des deux séquences alléliques du gène CD163 qui est reconnue pour influencer l’infectivité du SRRP (p. ex., domaine 5 du RSRC) tout en laissant les autres domaines intacts, devraient être viables et présenter une résistance accrue au SRRP.

[98] En outre, et pour les même raison, il aurait été plus ou moins évident pour la PVA que l’accouplement d’animaux femelles et mâles provenant de cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération, une délétion partielle ou un échange de domaine d’un RSRC dans une partie de l’un des allèles du gène CD163 qui est reconnue pour influencer l’infectivité du SRRP (p. ex., domaine 5 du RSRC) tout en laissant les autres domaines intacts devraient produire du porc comprenant cellules porcines ayant subi cette altération, cette délétion partielle ou cet échange de domaine de RSRC dans les deux allèles du gène CD163 et présentant une résistance accrue au SRRP.

[99] En ce qui concerne maintenant les revendications 61 à 70, dans la mesure où la portée de ces revendications englobe les porcs génétiquement modifiés comprenant des cellules de porc modifiées ayant une ou plusieurs modifications dans une séquence non codante du gène CD163 qui inactivent un ou plusieurs des domaines du RSRC du gène CD163 qui sont essentiels à l’infectivité du SRRP (p. ex., le domaine 5 du RSRC) et aux méthodes de production connexes, nous formulons les opinions suivantes. Nous estimons qu’il aurait été plus ou plus moins évident pour la PVA d’essayer d’obtenir de telles cellules porcines génétiquement modifiées et des porcs génétiquement modifiés à la lumière des enseignements des documents D1, D9, des résultats divulgués dans l’un ou l’autre des documents D4, D5 ou D10 et des CGC pertinentes pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus en ce qui concerne les porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD1663dans les deux allèles d’un gène CD163 ciblant plutôt les parties de séquence non codantes ou les parties codantes afin d’inactiver les domaines du RSRC du gène CD163 qui sont essentiels à l’infectiosité du SRRP (p. ex., domaine 5 du RSRC) tout en laissant les autres domaines intacts, ne nécessitant aucun degré d’invention.

[100]Bien que nous estimions que les évaluations ci-dessus sont en grande partie déterminantes de l’analyse de l’« essai allant de soi » en l’espèce, nous formulons les observations suivantes à l’égard des autres facteurs non exhaustifs à prendre en considération et les arguments correspondants présentés par le Demandeur, en commençant par le facteur de motivation.

[101]La réponse à la lettre de révision préliminaire traite du facteur de motivation aux pages 4 à 5 lorsqu’elle n’est pas d’accord pour dire que l’art antérieur cité fournit une motivation particulière pour traiter l’infection par le SRRP chez le porc en empêchant le récepteur CD163 de jouer un « rôle crucial » dans l’infectiosité du SRRP.

[102]La réponse à la lettre d’examen préliminaire indique plus précisément que le document D1 ne décrit pas la modification du génome de la séquence chromosomique du gène CD163 et ne fournit pas de renseignements précis à cet égard. En outre, le document D1 nomme le gène CD163 parmi une liste d’autres gènes et ne fait que spéculer que le gène CD163 peut être édité à l’aide d’une nucléase de telle sorte qu’il n’est pas produit et que cela peut produire une résistance accrue aux maladies chez les porcs.

[103]En ce qui concerne les documents D3, D4 et D5, la réponse à la lettre de révision préliminaire soutient que ces documents ne fourniraient aucune motivation à la PVA en ce qui concerne l’inactivation du CD163 uniquement parce que les documents D3, D4 et D5 fournissent simplement des données in vitro et parce que le document D4 enseigne l’expression des deux médiateurs d’entrée (c.-à-d. SIGLEC1 et CD1663) dans un modèle pour l’entrée du virus et l’infection par celui-ci.

[104]Avec égards, nous ne sommes pas d’accord. Nous estimons que la PVA comprendrait de chacun des documents D1, D4, D5, D9 et D10, ou l’aurait appris des CGC, que le SRRP est l’un des agents pathogènes viraux les plus importants dans l’industrie porcine et comprendrait, pour les raisons expliquées ci-dessus, que chacun des D1, D4, D5, D9 et D10 divulgue que le gène DC163 est un récepteur important pour l’infectivité du SRRP et enseigne que les domaines du RSRC du CD163 qui sont essentiels à l’infectivité du SRRP sont plus centraux et que le domaine 5 du RSRC joue un rôle clé.

[105]Nous estimons donc que l’art antérieur était généralement motivé à s’attaquer aux infections par le SRRP dans les troupeaux de porcs et qu’il était particulièrement motivé dans l’art antérieur cité à le faire en empêchant le récepteur CD163 de jouer son rôle central dans l’infectiosité du SRRP.

[106]À cet égard, nous estimons : i) que le document D1 est un motif solide pour produire des porcs génétiquement modifiés comprenant des modifications dans le gène CD163, notamment aux paragraphes [0027] et [0028]; ii) que chacun des documents D4, D5 et D10, de façon indépendante, fournit un motif solide pour concentrer les modifications dans les domaines du RSRC du gène CD163 sont essentiels à l’infectiosité du SRRP (p. ex., domaine 5 du RSRC); et iii) que le document D9 ou les CGC fournissent un motif solide pour ne pas altérer les autres parties du gène CD163, y compris les domaines nécessaires aux fonctions de clairance de l’hémoglobine du gène CD163.

[107]En ce qui concerne le facteur de l’ampleur et de l’effort, nous estimons que l’ampleur, la nature et la quantité d’efforts nécessaires pour utiliser les techniques des CGC pour la production de cellules porcines génétiquement modifiées et d’animaux génétiquement modifiés auraient relevé des capacités de la PVA à la date de revendication.

[108]Nous avons examiné les arguments du Demandeur concernant les CGC dans la section « La PVA et les CGC pertinentes » ci-dessus et nous avons déclaré qu’une méthode ou une technique des CGC n’est pas nécessairement simple ou toujours réussie lorsqu’elle est pratiquée. Nous avons reconnu le fait que, en utilisant l’approche de TNCS, l’efficacité prévue du clonage dans les porcs était relativement faible, variant entre 0,5 % et 5 % de progéniture par embryon transféré (comme l’indique le document D7 à la page 656). Cela dit, certaines expérimentations limitées sont permises dans le contexte de ce facteur, mais elles ne doivent pas être ardues, inventives ou inhabituelles (voir Janssen au paragraphe 135).

[109]Comme nous l’avons indiqué ci-dessus, nous avons déjà déterminé que l’approche de TNCS n’était pas inventive ou inhabituelle, car il s’agissait d’une technique qui a été rendue disponible au moins 10 ans avant la date de revendication, qui était la seule voie pour introduire des mutations ciblées dans le génome du porc et qui était autrement considérée comme une CGC. Nous sommes du même avis général concernant les techniques de ciblage génétique axé sur l’homologie pour introduire des mutations spécifiques dans les cellules somatiques.

[110]Bien que les techniques de production de cellules porcines génétiquement modifiées et de porcs génétiquement modifiés ne soient objectivement pas simples, nous estimons que l’approche de la TNCS était néanmoins la technique la plus courante pratiquée par un biologiste moléculaire qui connaît les techniques de production de porcs transgéniques pour introduire des mutations spécifiques.

[111]Les mesures concrètes ayant mené à l’invention (Sanofi, au paragraphe 70) sont également pertinentes pour l’effort requis. Comme indiqué ci-dessus, rien n’indique dans le dossier dont nous sommes saisis une production démontrée de porcs ayant des cellules porcines génétiquement modifiées comprenant des mutations inactivantes ou une délétion partielle dans un allèle du gène CD163 ou les deux, y compris les porcs qui présentent une résistance accrue au SRRP. Le mode de réalisation le plus proche se trouve dans l’exemple 1, qui décrit aux pages 21 à 27 de la description la production réelle de porcs comprenant des cellules porcines génétiquement modifiées avec les deux allèles du gène SIGLEC1 supprimés. Nous considérons que l’exemple 1 applique des techniques de CGC pour la production de cellules porcines génétiquement modifiées et de porcs génétiquement modifiés, plus particulièrement les étapes et les techniques liées à la transgenèse des porcs par TNCS ainsi que les techniques de ciblage génétique axé sur l’homologie pour introduire des mutations spécifiques dans les cellules somatiques. L’exemple 1 et les différents passages du mémoire descriptif en instance qui sont cités ci-dessus au paragraphe [33] appuient de façon indépendante nos constatations selon lesquelles la transgenèse porcine par TNCS et les techniques de ciblage génétique axé sur l’homologie pour introduire des mutations spécifiques dans les cellules somatiques n’étaient pas ardues, inventives ou inhabituelles.

[112]Sous la rubrique « Succès commercial », la réponse à la lettre de révision préliminaire indique à la page 7 que :

[L]a présente demande fait partie d’un portefeuille mondial de demandes de brevets qui a été autorisé par Genus PLC. En partenariat avec Genus PLC, le demandeur a déposé 38 demandes de brevets dans le monde, dont 12 ont été octroyées.

La présente demande vise à prévenir le SRRP, une maladie très difficile et coûteuse dans l’industrie mondiale du porc. Cependant, les thérapies actuelles, comme les vaccins, ne fournissent souvent pas une protection satisfaisante en raison de la variation des souches et de la stimulation inadéquate du système immunitaire. La présente demande vise à offrir une autre approche par l’utilisation de porcs génétiquement modifiés présentant une résistance accrue au SRRP. Par conséquent, la présente demande a été autorisée par Genus PLC à développer des porcs résistants au SRRP pour lutter contre cette maladie.

[113]Le succès commercial de l’invention revendiquée peut être un facteur secondaire pertinent, mais non concluant, dans l’évaluation de l’évidence, principalement dans les affaires limites (Pollard Banknote Limited c BABN Technologies Corp, 2016 CF 883, au par. 221). Cela dit, le succès commercial ne peut pas sauver une invention qui est évidente, et il doit y avoir un lien de causalité entre l’invention alléguée et tout succès commercial, car il se peut que le succès commercial soit attribuable à d’autres facteurs (voir Teva Canada Limited c Janssen Inc, 2018 CF 754 aux par. 91 et 92).

[114]Nous ne savons pas trop comment le fait qu’une demande donnée fasse partie d’un portefeuille de licences plus vaste ou comment le fait que 12 brevets visant un objet non spécifié ont été accordés est particulièrement pertinent au succès commercial de l’invention revendiquée en instance. « Comme on l’a dit à maintes reprises, le brevet n’est pas une distinction ou une récompense civique accordée pour l’ingéniosité » (AZTM, au paragraphe 37).

[115]En outre, nous estimons que le cas en instance n’est pas le type de cas limite dans lequel une invention par ailleurs évidente pourrait être sauvée en démontrant le succès commercial pour les raisons décrites ci-dessus.

[116]Enfin, nous estimons que le Demandeur n’a pas présenté de preuve en ce qui concerne le succès commercial de l’invention revendiquée, plus particulièrement les cellules porcines génétiquement modifiées avec une altération ou une délétion partielle dans une partie de la séquence du gène CD163 dans les deux allèles d’un gène CD163 qui confère une résistance au SRRP aux porcs génétiquement modifiés qui comprennent lesdites cellules. Nous sommes du même avis en ce qui concerne les cellules porcines génétiquement modifiées ayant une ou plusieurs modifications dans une séquence non codante du gène CD163 qui inactivent un ou plusieurs des domaines du RSRC du gène CD163 qui sont essentiels à l’infectivité du SRRP.

[117]En ce qui concerne les revendications dépendantes qui définissent d’autres limites concernant l’absence de mutation dans le gène SIGLEC1 (revendications 2, 16, 34 et 65), les mutations envisagées dans le gène CD163 (revendications 3 à 6, 8 à 14, 17 à 20, 22, 35 à 38, 40, 48, 49, 54, 55, 62 à 64 et 68), le système ou la méthode spécifique utilisés pour muter le gène CD163 (revendications 7, 21, 39, 47, 53 et 67) et la méthode ou l’étape utilisée pour produire la cellule ou le porc génétiquement modifié envisagée (revendications 23 à 29, 31, 32, 41 à 4) 5, 50, 51, 56 à 58, 69 et 70) la lettre de révision préliminaire indiquait que les caractéristiques additionnelles citées n’exigent aucune ingéniosité inventive à la lumière de l’art antérieur cité ou des CGC identifiées.

[118]Le Demandeur n’a pas contesté ou commenté spécifiquement d’une autre façon les opinions préliminaires susmentionnées sur les revendications dépendantes et nous adoptons donc ces opinions aux fins du présent examen final.

Conclusion concernant l’évidence

[119]Nous sommes donc d’avis que les revendications 1 à 3, 5 à 17, 19 à 35, 37 à 48, 50 à 54 et 56 à 70 au dossier englobent un objet qui aurait été évident pour la PVA, à la date pertinente, compte tenu des documents D1, D9 et D4, D5 ou D10 aussi bien que les CGC pertinentes, contrairement à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Caractère indéfini

Contexte juridique

[120]Le paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets exige que les revendications définissent distinctement et en des termes explicites l’objet de l’invention :

Le mémoire descriptif se termine par une ou plusieurs revendications définissant distinctement et en des termes explicites l’objet de l’invention dont le demandeur revendique la propriété ou le privilège exclusif.

[121]Dans Minerals Separation North American Corp c. Noranda Mines Ltd, [1947] EX CR 306, à la p. 352, 12 CPR 99, la Cour a souligné l’obligation du demandeur de préciser dans les revendications la portée du monopole recherché, ainsi que l’exigence selon laquelle les termes utilisés dans les revendications sont clairs et précis : [traduction]

En formulant ses revendications, l’inventeur érige une clôture autour des champs de son monopole et met le public en garde contre toute violation de sa propriété. La délimitation doit être claire afin de donner l’avertissement nécessaire, et seule la propriété de l’inventeur doit être clôturée. La teneur d’une revendication doit être exempte de toute ambiguïté ou obscurité pouvant être évitée, et sa portée ne doit pas être flexible; elle doit être claire et précise de façon que le public puisse savoir non seulement où il lui est interdit de passer, mais aussi où il peut passer sans risque.

Analyse

[122]La lettre de révision préliminaire, aux pages 27 et 28, explique pourquoi notre opinion préliminaire est que les revendications 1 à 3 au dossier sont imprécises :

La décision finale, à la page 6, indique que les revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 52, 59 et 61 sont imprécises et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets :

Les revendications 1, 15 et 61 sont imprécises et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Les revendications visent une « cellule porcine » (forme singulière), mais font ensuite référence à des « cellules porcines » (forme plurielle), ce qui crée de l’ambiguïté.

Les revendications 8 à 13 ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Ces revendications dépendantes visent un « porc » plutôt qu’une « cellule porcine » comme le précisent les revendications dont elles dépendent.

La revendication 30 est imprécise et n’est pas conforme au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Le résultat de la méthode n’atteint pas son but tel qu’il est énoncé dans le préambule. La méthode a pour but de « produire un porc génétiquement modifié », mais le résultat est d’« activer l’ovocyte pour produire un embryon ». Toutes les étapes requises pour exécuter la méthode revendiquée doivent être définies de façon précise.

La revendication 34 est imprécise et n’est pas conforme au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. On ne sait pas trop si l’élément « le porc » fait référence à l’élément « un porc génétiquement modifié » (revendications 30, 33), « une femelle porteuse de l’espèce porcine » (revendication 31), « un porc génétiquement modifié de sexe féminin » (revendication 33) ou « un porc génétiquement modifié de sexe masculin » (revendication 33).

La revendication 52 est imprécise et n’est pas conforme au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Le résultat de la méthode n’atteint pas son but tel qu’il est énoncé dans le préambule. La méthode a pour but de « produire un porc génétiquement modifié », mais le résultat est d’« incuber la cellule ».

La revendication 59 est imprécise et n’est pas conforme au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. L’expression « mutations dans les deux allèles » manque de clarté.

La réponse à la décision finale et la lettre datée du 14 décembre 2022 ne font pas de commentaires sur les points de vue ci-dessus et ne les contestent pas. Elles présentent plutôt des revendications proposées avec des modifications portant sur les questions cernées.

Après avoir examiné les revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 52, 59 et 61, nous sommes d’accord avec la décision finale pour dire que l’objet de ces revendications entraîne de l’imprécision, de l’ambiguïté ou un manque de clarté pour les raisons reproduites ci-dessus. Par conséquent notre opinion préliminaire est que les revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 52, 59 et 61 ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[123]Le Demandeur n’a pas contesté ou commenté autrement ces conclusions préliminaires et nous adoptons donc le raisonnement qui précède et concluons que les revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 52, 59 et 61 ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

Les revendications proposées ne corrigent pas les irrégularités

[124]Dans le cadre de la révision, le Comité peut examiner les modifications proposées.

[125]Comme il a été mentionné ci-dessus, le Demandeur a présenté les revendications 1 à 69 proposées (ensemble de revendications proposées -1) le 24 janvier 2022 avec la réponse à la décision finale et a de plus soumis un deuxième ensemble de revendications proposées (ensemble de revendications proposées -2) le 14 décembre 2022.

[126]Dans la réponse à la lettre d’examen préliminaire et à l’audience, le Demandeur n’a pas abordé spécifiquement les ensembles de revendications 1 et 2 proposés, mais il a indiqué que le Comité devrait tenir compte des soumissions présentées au moment d’examiner les deux ensembles de revendications proposés.

[127]Un examen de l’ensemble de revendications proposées -1 indique que la revendication 1 au dossier a été modifiée pour incorporer la limitation de la revendication 6 et que la revendication 6 au dossier a été annulée. En outre, la revendication 7 est également modifiée pour avoir une dépendance adéquate et pour maintenant dépendre des revendications 1 à 5 en raison de l’annulation de la revendication 6. Autrement, il est soutenu que les revendications proposées correspondant aux revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 52, 59 et 61 au dossier ont été modifiées pour corriger l’imprécision, l’ambiguïté ou le manque de clarté des revendications au dossier.

[128]Selon la page 2 du Résumé des motifs, les modifications apportées aux revendications 1, 7 à 12, 14, 29, 32, 33, 51, 58 et 60 proposées permettraient de surmonter les irrégularités relevées au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets dans la décision finale concernant les revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 5 2, 59 et 61 au dossier. Nous sommes d’accord.

[129]Cependant, étant donné l’absence de différence significative entre la portée des revendications 6 à 70 au dossier et les revendications proposées 1 à 69, nous sommes d’avis que : 1) l’utilité de l’objet revendiqué n’a pas été établie par démonstration ou par prédiction valable dans toute la portée des revendications proposées 1, 2, 4 à 6, 14, 15, 17 à 20, 22 à 3, 35, 3, 3 8, 40 à 46, 48 à 52 et 54 à 69 pour les mêmes raisons que celles mentionnées ci-dessus pour les revendications correspondantes au dossier; et 2) les revendications 1 à 3, 5 à 16, 18 à 34, 36 à 47, 49 à 53 et 55 à 69 ne seraient pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets pour les mêmes raisons que celles fournies ci-dessus pour les revendications correspondantes au dossier.

[130]En outre, comme il est indiqué à la page 2 du Résumé des motifs, la revendication 49 proposée n’est pas conforme au paragraphe 63(2) des Règles sur les brevets parce qu’elle renvoie à elle-même. Nous faisons également remarquer que la revendication 7 proposée ne devrait pas dépendre de la revendication 4 proposée, car la revendication 4 proposée indique des délétions complètes. Qui plus est, la revendication 47 proposée renvoie à la revendication 46 proposée deux fois.

[131]Dans les revendications proposées de l’ensemble 2, les revendications 1, 14, 29, 32, 45 et 51 incorporent les limites des revendications 2, 7, 15 et 33 des revendications proposées de l’ensemble 1 afin de préciser que (traduction) « …l’allèle muté (au moins un) du gène CD163 comprend une modification d’une partie de la séquence du gène CD163 qui code le domaine RSRC 5 de la protéine CD163… » et que (traduction) « la cellule porcine ne comprend pas de mutation inactive dans l’un ou l’autre des allèles d’un gène SIGLEC1 ». La dépendance de la revendication 49 de l’ensemble de revendications proposées -1 aurait également été abordée.

[132]Étant donné que l’ensemble de revendications proposées -2 comprend les modifications trouvées dans l’ensemble de revendications proposées -1 qui ont été apportées pour régler les questions relatives à l’imprécision, à l’ambiguïté ou au manque de clarté des revendications au dossier, nous sommes d’avis que les modifications trouvées dans l’ensemble de revendications proposées -2 surmonteraient également les irrégularités relevées en vertu du paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets dans la décision finale concernant les revendications 1, 8 à 13, 0, 34, 52, 59 et 61 au dossier.

[133]Toutefois, nous avons déjà examiné l’objet des revendications indépendantes de l’ensemble de revendications proposées -2 dans notre analyse de l’évidence des revendications au dossier à la lumière des arguments du Demandeur présentés dans la réponse à la lettre de révision préliminaire et à l’audience, à savoir les cellules porcines génétiquement modifiées avec des mutations inactives comprenant une modification dans une partie de la séquence du gène CD163 qui code le domaine RSRC 5 de la protéine CD163 et où la cellule porcine ne comprend pas une mutation inactive dans l’un ou l’autre des allèles d’un gène SIGLEC1 ainsi que dans le porc comprenant lesdites cellules porcines génétiquement modifiées. Par conséquent, nous sommes d’avis que l’objet de l’ensemble de revendications proposées -2 ne serait pas conforme à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets pour les mêmes raisons que celles qui ont été fournies ci-dessus en ce qui concerne les revendications au dossier.

[134]En ce qui a trait à l’utilité de l’objet visé par l’ensemble de revendications proposées -2, nous avons déjà examiné l’objet des revendications proposées 60 à 69 dans le cadre de notre analyse de l’utilité des revendications au dossier à la lumière des arguments du Demandeur présentés dans la réponse à la lettre de révision préliminaire et à l’audience. Nous sommes donc d’avis que l’utilité de l’objet n’a pas été établie par une démonstration ou une prédiction valable dans l’ensemble de la portée des revendications 60 à 69 proposées pour les mêmes raisons que celles qui ont été fournies ci-dessus en ce qui concerne les revendications correspondantes au dossier.

[135]En outre, l’ensemble de revendications proposées -2 ne contient pas les revendications portant les numéros 2, 7, 15 et 33, mais les revendications restantes n’ont pas été renumérotées en conséquence. Enfin, la revendication 49 de l’ensemble de revendications proposées -2 renvoie toujours à elle-même.

Conclusion concernant les revendications proposées

[136]Pour les raisons énoncées précédemment, nous sommes d’avis que les revendications proposées ne satisfont pas aux exigences d’une modification nécessaire en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Conclusions

[137]Nous avons déterminé que l’utilité de l’objet revendiqué n’a pas été établie par démonstration ou par une prédiction valable dans l’ensemble de la portée des revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 au dossier et, par conséquent, ces revendications contreviennent à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[138]Nous avons aussi déterminé que les revendications 1 à 3, 5 à 17, 19 à 35, 37 à 48, 50 à 54 et 56 à 70 au dossier englobent un objet qui aurait été évident pour la PVA, contrairement à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[139]Nous avons également déterminé que les revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 52, 59 et 61 au dossier ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[140]À notre avis, les ensembles de revendications proposées 1 et 2 ne corrigeraient pas les irrégularités relevées en ce qui concerne les revendications au dossier et comporteraient par ailleurs d’autres irrégularités. Par conséquent, les revendications proposées ne satisfont pas aux exigences d’une modification nécessaire en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Recommandation de la Commission

[141]Compte tenu de ce qui précède, le Comité recommande que la demande soit rejetée pour les motifs suivants :

  • l’objet visé par les revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 n’a pas d’utilité, contrairement à l’article 2 de la Loi sur les brevets;
  • l’objet visé par les revendications 1 à 3, 5 à 17, 19 à 35, 37 à 48, 50 à 54 et 56 à 70 au dossier est évident, contrairement à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • l’objet visé par les revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 52, 59 et 61 au dossier entraîne de l’imprécision, de l’ambiguïté ou un manque de clarté, contrairement au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

Marcel Brisebois

Robin Green

Christine Teixeira

Membre

Membre

Membre


 

Décision du commissaire

[142]Je souscris aux conclusions de la Commission ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande pour les motifs suivants :

  • l’objet visé par les revendications 1, 2, 4 à 7, 15, 16, 18 à 21, 23 à 34, 36 à 39, 41 à 47, 49 à 53 et 55 à 70 n’a pas d’utilité, contrairement à l’article 2 de la Loi sur les brevets;
  • l’objet visé par les revendications 1 à 3, 5 à 17, 19 à 35, 37 à 48, 50 à 54 et 56 à 70 au dossier est évident, contrairement à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • l’objet visé par les revendications 1, 8 à 13, 15, 30, 34, 52, 59 et 61 au dossier entraîne de l’imprécision, de l’ambiguïté ou un manque de clarté, contrairement au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[143]En conséquence, conformément à l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’accorder un brevet pour cette demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le Demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

Konstantinos Georgaras

Commissaire aux brevets
Fait à Gatineau (Québec),
en ce 11e jour de janvier 2024.

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.