Brevets

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Référence : Howard W Lutnick, Stuart A Hersch & Laurence Rose (Re), 2024 CACB 1

Décision du commissaire no 1660

Commissioner’s Decision #1660

Date : 2024-01-02

SUJET :

A11

Nouvelle matière

 

B00

Caractère ambigu ou indéfini (incomplet)

 

F00

Nouveauté

 

J00

Signification de la technique

 

J10

Programmes d'ordinateur

 

O00

Évidence

 

 

 

TOPIC:

A11

New Matter

 

B00

Ambiguity or Indefiniteness (incomplete)

 

F00

Novelty

 

J00

Meaning of Art

 

J10

Computer Programs

 

O00

Obviousness

Demande no 2 661 905
Application No. 2661905


 


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets (DORS/96–423) dans leur version antérieure au 30 octobre 2019, la demande de brevet numéro 2 661 905 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019–251). La recommandation de la Commission d’appel des brevets et la décision du commissaire sont de rejeter la demande.

Agent du demandeur :

KIRBY EADES GALE BAKER

55 rue Murray, bureau 300

Ottawa (Ontario) K1N 5M3


 

Introduction

[1] La présente recommandation porte sur la révision de la demande de brevet canadien refusée numéro 2 661 905, qui est intitulée « PRODUITS ET PROCÉDÉS D’INDICATION DE DOCUMENTS ASSOCIÉS À UN PRODUIT D’ASSURANCE-VIE » et qui appartient à Howard W. Lutnick, Stuart A. Hersch et Laurence Rose (le Demandeur).

[2] La Commission d’appel des brevets (la Commission) a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019–251) (les Règles sur les brevets). Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, nous recommandons au commissaire aux brevets de rejeter la demande.

Contexte

La demande

[3] La demande a été déposée en vertu du Traité de coopération en matière de brevets, et la date de dépôt au Canada est le 30 août 2007. Elle est devenue accessible au public le 6 mars 2008.

[4] La demande concerne principalement la vente d’un contrat d’assurance-vie par l’assuré en échange d’un montant de règlement, dans le cadre de laquelle une cote est attribuée au contrat d’assurance-vie en fonction de la quantité et de la qualité des documents justificatifs.

[5] La demande comprend 45 revendications (les revendications au dossier), qui ont été modifiées pour la dernière fois le 2 septembre 2016.

Historique de la poursuite

[6] Le 30 décembre 2017, une décision finale a été rendue en vertu du paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets (DORS/96–423) dans leur version immédiatement antérieure au 30 octobre 2019. La décision finale a identifié les irrégularités suivantes dans la demande :

  • les revendications 1 à 45 au dossier visent un objet non brevetable et ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 1, 12, 23, 34 et 45 au dossier sont antériorisées et ne sont pas conformes à l’alinéa 28.2(1)b) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 1 à 45 au dossier auraient été évidentes et ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 1, 12, 23 et 34 manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[7] Le 14 juin 2019, le Demandeur a présenté une réponse à la décision finale qui comprenait un ensemble proposé de 17 revendications et des motifs en faveur de l’acceptation de la demande.

[8] L’examinateur ayant jugé que la demande n’était pas conforme à la Loi sur les brevets, conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets, la demande a été transmise à la Commission pour révision le 12 mai 2021, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs.

[9] Dans une lettre datée du 8 juin 2021, la Commission a transmis au Demandeur une copie du résumé des motifs. La lettre reconnaissait le refus et demandait que le Demandeur indique s’il était toujours intéressé par la révision de la demande.

[10] Dans une réponse datée du 7 septembre 2021, le Demandeur a indiqué qu’il souhaitait toujours que la Commission procède à la révision de sa demande.

[11] Un comité de la Commission, composé des membres soussignés, a été mis sur pied pour réviser la demande en instance en vertu de l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets.

[12] Dans une lettre de révision préliminaire (la lettre de RP) datée du 16 novembre 2023, nous avons présenté notre analyse préliminaire des revendications au dossier et des revendications proposées. Notre opinion préliminaire est la suivante :

  • les revendications 1 à 45 au dossier visent un objet non brevetable et ne sont pas conformes à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 1 à 45 au dossier sont nouvelles et conformes à l’alinéa 28.2(1)b) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 1 à 45 au dossier n’auraient pas été évidentes à la lumière de l’art antérieur cité et des connaissances générales courantes (CGC) pertinentes, et auraient été conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 12, 23 et 45 au dossier manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications proposées 1, 2, 3, 5, 6, 7, 10, 11, 14 et 17 visent un nouvel élément et ne seraient pas conformes à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications proposées 1 à 17 au dossier visent un objet non brevetable et ne sont pas conformes à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications proposées 1 à 17 auraient été évidentes à la lumière de l’art antérieur cité et des CGC pertinentes, et ne seraient pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications proposées 1, 5 et 17 manqueraient de clarté et ne seraient pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[13] La lettre de RP offrait également au Demandeur la possibilité de présenter des observations écrites et de participer à une audience.

[14] Dans une lettre datée du 22 novembre 2023, le Demandeur a refusé la possibilité de participer à une audience et a indiqué qu’il ne souhaitait pas fournir d’autres observations écrites.

Questions

[15] La présente révision examine les questions suivantes en ce qui a trait aux revendications au dossier :

  • Les revendications 1 à 45 au dossier visent-elles un objet brevetable et sont-elles conformes à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets?
  • Les revendications 1 à 45 au dossier sont-elles nouvelles et conformes à l’alinéa 28.2(1)b) de la Loi sur les brevets?
  • Les revendications 1 à 45 au dossier auraient-elles été non évidentes et conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets?
  • Les revendications 12, 23 et 45 au dossier sont-elles définies et conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets?

[16] La présente révision examine également la question de savoir si les dernières revendications proposées constituent des modifications nécessaires aux fins de la conformité avec la Loi sur les brevets et les Règles sur les brevets en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Interprétation téléologique

Principes juridiques

[17] L’interprétation téléologique l’emporte sur toute considération liée à la validité (Free World Trust c. Électro Santé Inc, 2000 CSC 66 [Free World Trust], au par. 19).

[18] Conformément à Free World Trust et à Whirlpool Corp c. Camco Inc, 2000 CSC 67, l’interprétation téléologique est faite du point de vue de la personne versée dans l’art à la lumière des CGC pertinentes, en tenant compte de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins. En plus d’interpréter le sens des termes d’une revendication, l’interprétation téléologique distingue les éléments essentiels de la revendication des éléments non essentiels. La question de savoir si un élément est essentiel dépend de l’intention exprimée dans la revendication ou inférée de celle-ci, et de la question de savoir s’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art qu’une variante a un effet appréciable sur le fonctionnement de l’invention.

[19] L’énoncé « Objet brevetable en vertu de la Loi sur les brevets » (OPIC, novembre 2020) [EP2020–04] indique que tous les éléments d’une revendication sont présumés essentiels, à moins qu’une telle présomption soit contraire au libellé de la revendication, ou qu’il n’en soit établi autrement (voir aussi Free World Trust, au par. 57; Distrimedic Inc c. Dispill Inc, 2013 CF 1043, au par. 201).

Analyse

[20] L’interprétation téléologique d’une revendication est réalisée à la lumière de l’ensemble du mémoire descriptif et tient compte de ce que la personne versée dans l’art, à la lumière de ses CGC, comprendrait de l’ensemble du mémoire descriptif comme étant la nature de l’invention.

La personne versée dans l’art et ses connaissances générales courantes

[21] La lettre de RP fournissait notre définition préliminaire de la personne versée dans l’art et de ses CGC pertinentes.

[22] Comme il est énoncé dans la lettre de RP, à la page 5, et relevé dans la décision finale, la personne versée dans l’art a été définie comme suit :

[traduction]

une personne ou une équipe composée d’un ou de plusieurs analystes d’assurance, d’informaticiens et de professionnels des TI qui ont une formation et une expérience pertinentes dans la conception, la programmation et la mise en œuvre d’un système informatisé pour faciliter la vente et l’achat de contrats d’assurance-vie sur Internet.

[23] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la définition ci-dessus aux fins de la présente révision.

[24] Afin d’évaluer les CGC pertinentes, la lettre de RP a examiné le document d’art antérieur D2, qui a également été cité dans le résumé des motifs :

  • D2 : US 2006/0178979 A1

Levine et al.

Le 10 août 2006

[25] Le document D2 divulgue une méthode et un système fondés sur les enchères pour l’échange secondaire d’assurance-vie, où un contrat d’assurance-vie peut être soumis et vendu par le détenteur du contrat à des groupes d’acheteurs.

[26] En ce qui concerne les CGC pertinentes, la lettre de RP, aux pages 5 à 7, indiquait ce qui suit :

[traduction]

La décision finale, à la page 4, indiquait que les CGC pertinentes étaient les suivantes :

- développement d’applications logicielles pour des compagnies d’assurance-vie dans un réseau;

- évaluation et cotation de contrats d’assurance-vie et de documents connexes en fonction de critères définis par l’utilisateur;

- connaissance générale de bases de données, comme la consultation, la mise à jour, le stockage et la récupération de données.

Le Demandeur n’a pas contesté ou commenté la définition ci-dessus dans sa réponse à la décision finale. Toutefois, compte tenu de la définition de la personne versée dans l’art, de la demande en instance [description, page 1, lignes 6 à 18; page 9, lignes 24 et 25; page 17, lignes 10 à 25] et de l’art antérieur cité [document D2, aux par. [0004] à [0011]], notre opinion préliminaire est que les CGC pertinentes comprennent également les éléments suivants :

- connaissance de l’industrie de l’assurance-vie, en particulier l’utilisation d’une assurance-vie en tant qu’actif transférable dans le marché de l’assurance-vie, y compris :

- les détenteurs de contrats qui cèdent leurs contrats à la compagnie d’assurance en échange d’une valeur monétaire,

- les détenteurs de contrats qui vendent leurs contrats à un investisseur tiers, directement ou par l’intermédiaire d’un courtier autorisé, en échange d’un montant de règlement, lequel dépend d’un certain nombre de facteurs comme la santé et l’espérance de vie de l’assuré, ainsi que des détails généraux du contrat, comme le coût des primes;

- diverses méthodes de soumission, d’échange et d’achat de contrats d’assurance par voie électronique, notamment :

- la création d’un instrument d’échange d’un actif transférable comme un contrat d’assurance-vie,

- diverses méthodes de mise aux enchères d’un article comme un contrat d’assurance-vie, notamment :

- l’établissement d’exigences de soumission, comme une période prédéterminée pendant laquelle des soumissions peuvent être reçues relativement à l’article,

- l’adjudication de l’article au plus haut soumissionnaire en l’informant et en transférant l’article en échange du paiement du prix indiqué dans l’offre la plus élevée à l’aide de différents modes de paiement;

- connaissance générale de bases de données, notamment :

- diverses méthodes de création et d’exploitation d’une base de données électronique,

- divers types de bases de données comme des tableaux, des bases de données relationnelles, des modèles fondés sur des objets et des bases de données distribuées,

- la création, le stockage, la mise à jour et la consultation de dossiers dans une base de données, où chaque dossier contient des champs correspondant à des caractéristiques différentes, ainsi que la génération d’un index de base de données fondé sur les caractéristiques des dossiers de façon à permettre aux utilisateurs d’effectuer des recherches dans les dossiers en précisant les critères de recherche.

[27] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la définition ci-dessus aux fins de la présente révision.

Les éléments essentiels

[28] La demande contient 45 revendications au dossier, y compris les revendications indépendantes 1, 12, 23, 34 et 45. La revendication 1 vise une méthode d’attribution d’une cote à un contrat d’assurance-vie en fonction des documents reçus. Les revendications 12, 23 et 34 visent respectivement l’appareil, l’article fabriqué et le système correspondants. La revendication 45 vise un système d’attribution d’une cote et d’un code de couleur correspondant à un contrat d’assurance-vie en fonction des documents reçus et authentifiés.

[29] Comme dans la lettre de RP, nous considérons les revendications 1 et 45 au dossier comme étant représentatives de l’invention aux fins de la présente révision.

[30] La revendication 1 au dossier se lit comme suit :

[traduction]

1. Une méthode comprenant les actions suivantes :

recevoir par l’intermédiaire d’un processeur une indication qu’un assuré a l’intention de vendre un contrat d’assurance-vie en échange d’un montant de règlement;

transmettre à un appareil à distance une demande d’au moins un document qui appuie le contrat d’assurance-vie, où l’appareil à distance et le processeur sont en communication dans un réseau;

recevoir par l’intermédiaire du processus, en réponse à la demande, au moins un document qui appuie le contrat d’assurance-vie;

déterminer la qualité respective de chaque document reçu en fonction d’au moins un des éléments suivants : la source du document, le type de document et le niveau d’importance prédéterminé du document;

déterminer, par l’intermédiaire du processeur, la quantité de documents reçus en réponse à la demande;

attribuer par l’intermédiaire du processeur, en fonction de la quantité des documents reçus et de la qualité de chaque document reçu, une cote au contrat d’assurance-vie, où la cote influe sur le montant du règlement;

afficher la cote attribuée au contrat d’assurance-vie.

[31] La revendication 45 au dossier se lit comme suit :

[traduction]

45. Un système transactionnel pour le marché de l’assurance-vie comprenant :

un processeur et une mémoire, où la mémoire stocke les instructions exécutées par le processeur, permettant ainsi au processeur :

reçoit et authentifie au moins un document justificatif relatif à un contrat d’assurance-vie qui peut être vendu en échange d’un montant de règlement;

évalue, sur la base d’un arbre de décision, la valeur de chaque document justificatif reçu, où la valeur indique le niveau d’importance du document justificatif en ce qui a trait à la vente du contrat d’assurance-vie;

calcule une quantité totale de documents justificatifs reçus relativement au contrat d’assurance-vie;

calcule, en fonction de la valeur évaluée et de la quantité évaluée, une cote pour le contrat d’assurance-vie;

attribue un code de couleur à la cote, où la couleur correspond à une valeur marchande du contrat d’assurance-vie;

affiche sur un écran le contrat d’assurance-vie conformément au code de couleur attribué à sa cote.

[32] Les revendications dépendantes 2 à 11, 13 à 22, 24 à 33, et 35 à 44 au dossier contiennent des détails supplémentaires sur la méthode, l’article fabriqué et le système revendiqués aux fins d’attribution de cotes à un contrat d’assurance-vie en fonction des documents reçus.

[33] La lettre de RP, à la page 9, exposait notre opinion préliminaire des éléments essentiels des revendications au dossier :

[traduction]

Notre opinion préliminaire est que la personne versée dans l’art comprendrait que les revendications au dossier ne contiennent aucun libellé qui indique que les éléments de l’une ou l’autre des revendications sont optionnels, non essentiels ou une réalisation préférentielle ou qu’ils font partie d’une liste d’éléments de rechange.

Par conséquent, notre opinion préliminaire est que tous les éléments des revendications au dossier sont présumés être essentiels.

[34] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

Objet brevetable

Principes juridiques

[35] Toute invention brevetable doit correspondre à la définition énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets, y compris correspondre à l’une des catégories qui y sont définies :

invention Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[36] Le paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets prévoit également ce qui suit :

Il ne peut être octroyé de brevet pour de simples principes scientifiques ou conceptions théoriques.

[37] L’EP2020–04 décrit l’approche du Bureau des brevets pour déterminer si une revendication vise un objet brevetable :

Afin d’être un objet brevetable et de ne pas être interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets, l’objet défini par une revendication doit être limité à ou moins vaste que l’invention en question qui est dotée d’une existence physique ou est une manifestation d’un effet ou changement physique discernable et qui a trait à un domaine de réalisations manuelles ou industrielles, ce qui signifie des procédés comportant ou visant des sciences appliquées et industrielles, afin de distinguer, en particulier, des beaux-arts ou des œuvres d’art qui ne sont originales que dans un sens artistique ou esthétique.

[38] La détermination de l’invention réelle est une question pertinente et nécessaire dans l’évaluation de l’objet brevetable (Canada (Procureur général) c. Amazon.com, inc, 2011 CAF 328 [Amazon], au par. 42). Comme l’a déclaré la Cour d’appel fédérale dans Canada (Procureur général) c. Benjamin Moore & Co, 2023 CAF 168 [Benjamin Moore], au par. 68, cette décision est conforme à la déclaration de la Cour d’appel fédérale dans Schlumberger Canada Ltd c. Le commissaire des brevets, [1982] 1 CF 845 (CA) [Schlumberger], selon laquelle l’évaluation de l’objet brevetable consiste à déterminer ce qui a été découvert selon la demande. L’invention réelle est déterminée dans le contexte de la nouvelle découverte ou des nouvelles connaissances et doit en fin de compte satisfaire à « l’exigence du caractère matériel » qui est implicite dans la définition d’« invention » (Amazon, aux par. 65 et 66).

[39] Dans Amazon, au par. 44, il est indiqué « qu’une revendication du brevet [peut] être exprimée dans un langage qui [est] trompeur, de manière délibérée ou par inadvertance » et que ce qui à première vue semble être la revendication d’une « réalisation » ou d’un « procédé » peut en fait être une revendication d’une formule mathématique non brevetable, comme c’était le cas dans Schlumberger.

[40] Ce sentiment est exprimé par la position de la Cour d’appel fédérale dans Amazon, selon laquelle la présence d’une application pratique peut, dans certains cas, ne pas suffire pour satisfaire à l’exigence du caractère matériel, laquelle exige quelque chose dotée d’une existence physique ou quelque chose qui manifeste un effet ou un changement discernable (Amazon, aux par. 66 et 69). Pour illustrer ce point, Amazon a renvoyé à Schlumberger, où les revendications « n’ont pas été déclarées valides en raison du fait qu’elles avaient trait à l’utilisation d’un outil matériel, un ordinateur, pour donner une application pratique à la nouvelle formule mathématique » (Amazon, au par. 69).

[41] Les préoccupations liées à l’objet brevetable en ce qui a trait à l’utilisation bien connue d’un ordinateur pour traiter un algorithme, comme illustré dans Schlumberger, sont exprimées dans les facteurs énoncés dans l’EP2020–04 qui peuvent être pris en compte dans l’examen des inventions mises en œuvre par ordinateur, à savoir :

· le simple fait qu’un ordinateur figure parmi les éléments essentiels de l’invention revendiquée ne signifie pas nécessairement que l’invention revendiquée est un objet brevetable;

· un algorithme en soi est un objet abstrait, non brevetable et interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;

· un ordinateur programmé pour simplement traiter un algorithme abstrait d’une manière bien connue, sans plus, ne le rendra pas brevetable;

· si le traitement d’un algorithme améliore la fonctionnalité de l’ordinateur, l’ordinateur et l’algorithme formeraient donc ensemble une seule invention réelle qui serait un objet brevetable.

[42] Les facteurs susmentionnés et les préoccupations générales concernant l’utilisation bien connue d’un ordinateur pour traiter de nouveaux algorithmes abstraits peuvent être considérés comprenant des considérations liées à la nouveauté ou à l’ingéniosité. Le droit canadien n’interdit pas les considérations liées à la nouveauté ou à l’ingéniosité d’éléments d’une revendication dans l’examen de l’objet brevetable et découlent de situations comme celle dans Schlumberger, où un outil connu, à savoir un ordinateur, est utilisé pour donner à une formule mathématique abstraite une application pratique (Benjamin Moore, aux par. 69 et 70, renvoyant à Amazon). Ces considérations aident à déterminer la découverte ou les nouvelles connaissances, la méthode d’application et l’invention réelle (Benjamin Moore, au par. 89) qui est en fin de compte mesurée par rapport à l’exigence du caractère matériel.

[43] Comme il est noté dans Benjamin Moore, au paragraphe 94 (et, de la même façon, comme exprimé dans Amazon, au par. 61), l’exigence du caractère matériel ne pourrait probablement pas être satisfaite sans qu’un instrument bien connu, comme un ordinateur, ne soit utilisé pour mettre en œuvre une méthode abstraite. Les facteurs susmentionnés tirés de l’EP2020–04 aident à déterminer s’il existe quelque chose de plus.

Analyse

[44] La lettre de RP exposait notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications au dossier visent un objet non brevetable, ne correspondent pas à la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets et sont interdites en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

[45] La lettre de RP, aux pages 12 et 13, indiquait ce qui suit :

[traduction]

Comme l’indique l’EP2020–04, « [a]fin d’être un objet brevetable et de ne pas être interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets, l’objet défini par une revendication doit être limité à ou moins vaste que l’invention en question qui est dotée d’une existence physique ou est une manifestation d’un effet ou changement physique discernable », renvoyant en partie à Amazon, aux paragraphes 42, 58, et 66 à 69.

Ayant jugé que tous les éléments revendiqués sont essentiels, il faut déterminer si ces éléments forment une seule invention réelle qui soit a une existence physique, soit manifeste un effet ou un changement physique discernable.

La revendication indépendante 1 vise une méthode d’attribution d’une cote à un contrat d’assurance-vie en fonction de la qualité et de la quantité d’au moins un document fourni à l’appui du contrat, et l’affichage de cette cote. La qualité de chaque document est fondée sur au moins un des facteurs suivants : sa source, son type ou son niveau d’importance prédéterminé. Les revendications indépendantes 12, 23 et 34 visent respectivement l’appareil, l’article fabriqué et le système correspondants. La revendication indépendante 45 vise un système d’attribution d’une cote et d’un code de couleur correspondant à un contrat d’assurance-vie en fonction des documents reçus et authentifiés.

Les revendications dépendantes 2 à 11, 13 à 22, 24 à 33, et 35 à 44 au dossier contiennent des détails supplémentaires sur la méthode, l’article fabriqué et le système revendiqués aux fins d’attribution de cotes à un contrat d’assurance-vie en fonction des documents reçus.

Les revendications au dossier contiennent un certain nombre d’éléments informatiques, comme un processeur, un serveur, une mémoire, une base de données, un réseau de communication et un écran. Ils mentionnent également que ces éléments exécutent des étapes liées à un ordinateur, comme la communication avec un appareil à distance sur un réseau, l’analyse de données fondée sur un ensemble de règles, l’affichage de couleurs en fonction de cotes, ainsi que le stockage, la recherche et l’extraction de bases de données en fonction de certains critères.

Comme il est expliqué dans Amazon (aux par. 61, 62, 63, 66 et 69), un ordinateur ne peut pas être utilisé pour donner à une idée abstraite une application pratique et ainsi satisfaire à l’exigence du caractère matériel implicite dans la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets simplement en programmant l’ordinateur au moyen d’un algorithme. C’était la situation en cause dans Schlumberger, où l’ordinateur agissait simplement d’une façon bien connue.

Selon l’EP2020–04, « [s]i un ordinateur est simplement utilisé d’une façon bien connue, l’emploi de l’ordinateur ne sera pas suffisant pour rendre l’idée désincarnée, le principe scientifique ou les conceptions théoriques en un objet brevetable et en dehors de l’interdiction prévue au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets ».

Notre opinion préliminaire est que rien dans le mémoire descriptif ne suggère que les éléments informatiques revendiqués ne représentent rien d’autre que des composants informatiques génériques. De même, notre opinion préliminaire est que rien dans le mémoire descriptif ne suggère que les étapes revendiquées liées à un ordinateur qui sont exécutées par ces éléments représentent autre chose que des fonctions bien connues de composants informatiques génériques, ou que le fonctionnement de l’ordinateur est amélioré par les étapes revendiquées (voir, par exemple, description, page 1, ligne 29 à page 3, ligne 5; page 15, ligne 15 à page 16, ligne 4; page 17, ligne 10 à page 18, ligne 10; et page 26, ligne 14 à page 17, ligne 4). Notre opinion préliminaire est que l’ordinateur est simplement utilisé d’une façon bien connue et qu’il ne fait donc pas partie de la seule invention réelle visée par les revendications au dossier. En fait, l’invention réelle est l’ensemble de règles pour coter un contrat d’assurance-vie en fonction de la quantité et de la qualité de ses documents justificatifs, qui est un ensemble de règles et de calculs abstraits et qui ne satisfait pas à l’exigence du caractère matériel énoncée dans Amazon et l’EP2020–04.

En outre, les revendications dépendantes […] contiennent des détails supplémentaires concernant le processus revendiqué d’évaluation de l’assurance-vie, y compris la détermination de la qualité en fonction d’un arbre de décision, l’attribution de couleurs en fonction de divers facteurs, le stockage dans une base de données, la recherche et l’extraction de contrats, ainsi que des détails sur le transfert de la propriété. Notre opinion préliminaire est que les revendications dépendantes n’ajoutent aucune caractéristique qui satisferait à l’exigence du caractère matériel et rendrait les revendications brevetables.

Nous notons à titre préliminaire que les observations formulées par le Demandeur dans sa réponse à la décision finale étaient fondées sur la pratique antérieure du Bureau et ne s’appliqueraient pas à la présente analyse.

À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que les revendications 1 à 45 au dossier visent un objet non brevetable, ne correspondent pas à la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets et sont interdites en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

[46] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

[47] Par conséquent, nous concluons que les revendications 1 à 45 au dossier visent un objet non brevetable, ne correspondent pas à la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets et sont interdites en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

Antériorité

Principes juridiques

[48] Le paragraphe 28.2(1) de la Loi sur les brevets exige que l’objet revendiqué soit nouveau :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas :

a) soit plus d’un an avant la date de dépôt de celle-ci, soit, si la date de la revendication est antérieure au début de cet an, avant la date de la revendication, avoir fait, de la part du demandeur ou d’un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, l’objet d’une communication qui l’a rendu accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) avant la date de la revendication, avoir fait, de la part d’une autre personne, l’objet d’une communication qui l’a rendu accessible au public au Canada ou ailleurs;

[…]

[49] Il y a deux exigences distinctes à satisfaire pour démontrer que l’art antérieur antériorise une invention revendiquée : il doit y avoir une divulgation antérieure de l’objet revendiqué et la divulgation antérieure doit permettre à une personne versée dans l’art de pratiquer l’objet revendiqué (Apotex Inc c Sanofi–Synthelabo Canada Inc, 2008 CSC 61 [Sanofi], aux par. 24 à 29, et 49).

Analyse

[50] La lettre de RP exposait notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications au dossier sont nouvelles et conformes à l’alinéa 28.2(1)b) de la Loi sur les brevets.

[51] La lettre de RP examinait le document d’art antérieur D3, qui était également cité dans la décision finale :

  • D3 : US 2003/0191672 A1

Kendall et al.

Le 9 octobre 2003

[52] Le document D3 divulgue une méthode et un système d’évaluation d’assurance-vie, y compris la réception d’une demande de produit d’assurance-vie, la transmission d’une demande de soumissions à plusieurs assureurs et l’établissement de cotes pour leurs produits proposés.

[53] La lettre de RP, aux pages 15 à 20, indiquait ce qui suit :

[traduction]

La décision finale, à la page 6, indiquait que les revendications 1, 12, 23, 34 et 45 au dossier sont antériorisées par le document D3 :

En ce qui concerne la revendication 1, le document D3 divulgue les éléments essentiels d’une méthode les actions suivantes :

• recevoir une indication qu’un assuré a l’intention de vendre un contrat d’assurance-vie en échange d’un montant de règlement (voir le document D3, figure 1 [104] et par. [0005], règlements d’assurance-viatique);

• transmettre à un appareil à distance une demande d’au moins un document qui appuie le contrat d’assurance-vie (voir […] le document D3, figure 1 [108] et par. [0048]);

• recevoir, en réponse à la demande, au moins un document qui appuie le contrat d’assurance-vie (voir le document D3, par. [0048]);

• déterminer la qualité respective de chaque document reçu en fonction d’au moins un des éléments suivants : la source du document, le type de document et le niveau d’importance prédéterminé du document (voir le document D3, figure 1 [112], par. [0052] et [0136], et tableau N);

• déterminer la quantité de documents reçus en réponse à la demande (voir le document D3, par. [0048]);

• attribuer, en fonction de la quantité des documents reçus et de la qualité de chaque document reçu, une cote au contrat d’assurance-vie, où la cote influe sur le montant du règlement (voir le document D3, par. [0067] à [0070]);

• afficher la cote attribuée au contrat d’assurance-vie (voir le document D3, par. [0074]).

Les revendications 12, 23, 34 et 45 portent sur des modes de réalisation différents qui utilisent un concept similaire et qui visent un objet similaire à celui de la revendication 1, et, par conséquent, elles sont considérées comme étant antériorisées pour les motifs susmentionnés.

En ce qui concerne le document D3, le Demandeur a soutenu ce qui suit dans sa correspondance datée du 2 septembre 2016 :

Premièrement, bien que le paragraphe [0005] du document D3 (comme il est indiqué dans le rapport du Bureau) renvoie [aux règlements d’]assurance-viatique, les autres sections du document D3 citées dans le rapport du Bureau pour rejeter la revendication 1 (et probablement les autres revendications) ne concernent pas des règlements d’assurance-viatique. Elles semblent plutôt aborder un système où un client souhaite acheter un nouveau contrat d’assurance-vie, ainsi qu’un système qui aide le client à évaluer quel est le meilleur contrat à acheter en attribuant une cote aux nouveaux contrats. La situation visée aux parties du document D3 citées dans le rapport du Bureau diffère considérablement de celle visée par les réclamations en instance, qui prévoit clairement qu’un client (un « assuré ») est déjà propriétaire du contrat d’assurance-vie et tente maintenant de vendre ce contrat d’assurance-vie en échange d’un montant de règlement. Les revendications visent un système de collecte de documents à l’appui de cette vente. En se fondant sur la quantité et la qualité des documents reçus, une certaine cote est attribuée au contrat d’assurance-vie de l’assuré, qui est visé par la vente; cette cote a une incidence sur le montant du règlement qui peut être reçu en échange de la vente du contrat. [Italique dans l’original.]

Deuxièmement, la revendication 1 précise ce qui suit :

a) recevoir […] au moins un document qui appuie le contrat d’assurance-vie;

b) déterminer la qualité respective de chaque document reçu […];

La décision du Bureau renvoie au paragraphe [0048] du document D3 en ce qui a trait à la restriction a), et aux paragraphes [0052] et [0136] du document D3 en ce qui a trait à la restriction b). Rien dans les paragraphes [0052] et [0136] du document D3 ne semble renvoyer à la détermination de la qualité d’un document mentionnée au paragraphe [0048] du document D3. Le paragraphe [0048] semble renvoyer aux profils de risque et aux données démographiques. Les paragraphes [0052] et [0136] du document D3 semblent porter sur les possibles nouveaux contrats d’assurance qu’un client peut acheter, et les cotes de ces possibles nouveaux contrats d’assurance et des entreprises qui peuvent fournir ces contrats, et non sur les cotes de profils de risque et de documents démographiques.

Troisièmement, la revendication 1 précise en outre ce qui suit :

c) déterminer […] la quantité de documents reçus en réponse à la demande[.]

La décision du Bureau renvoie au paragraphe [0048] du document D3 en ce qui a trait à la restriction c). Rien dans le paragraphe [0048] du document D3 ne semble renvoyer à une quantité de documents.

Quatrièmement, la revendication 1 précise en outre ce qui suit :

d) attribuer […], en fonction de la quantité des documents reçus et de la qualité de chaque document reçu, une cote au contrat d’assurance-vie, où la cote influe sur le montant du règlement.

La décision du Bureau renvoie aux paragraphes [0067] à [0070] du document D3 en ce qui a trait à la restriction d). Tout comme le paragraphe [0052] du document D3, les paragraphes [0067] à [0070] du document D3 semblent discuter des cotes des nouveaux contrats d’assurance qu’un client peut acheter. Pour au moins les raisons susmentionnées en ce qui a trait à la quantité et à la qualité des documents, les paragraphes [0067] à [0070] du document D3 ne semblent pas divulguer l’action d’« attribuer […], en fonction de la quantité des documents reçus et de la qualité de chaque document reçu, une cote au contrat d’assurance-vie ». Mais plus encore, rien dans les paragraphes [0067] à [0070] ne semble discuter du montant de règlement qu’un assuré peut recevoir en échange de la vente par l’assuré d’un contrat d’assurance-vie.

Nous sommes d’accord, à titre préliminaire, avec les motifs susmentionnés du Demandeur. Le document D3 divulgue un système d’évaluation d’assurance-vie à acheter, ainsi que l’évaluation et l’appréciation de contrats d’assurance-vie en vigueur. En ce qui concerne l’évaluation des contrats en vigueur, le système recueille, traite et utilise les renseignements disponibles sur le détenteur du contrat d’assurance, le contrat en vigueur et la société d’assurance afin d’évaluer et d’apprécier le contrat en vigueur et de communiquer les résultats au détenteur du contrat [document D3, par. [0077], [0078] et [0089], et figure 3]. Le système utilise six facteurs de notation, chacun pondéré en fonction de l’importance relative du facteur correspondant, afin d’obtenir une cote globale pour les contrats d’assurance-vie en vigueur [document D3, figure 3 et tableau A]. Les facteurs de notation comprennent les suivants [document D3, par. [0089]] :

- optimisation des ressources du produit : facteur fondé sur les avantages offerts à la lumière du prix calculé à l’aide d’hypothèses actuarielles, comme les données sur la mortalité propres au profil de risque du client final, et de la méthode traditionnelle de la valeur actuarielle actualisée;

- rendement de la direction : facteur fondé sur divers renseignements financiers de la société d’assurance;

- cote de l’assureur : fondé sur la cote de solidité financière de la société d’assurance.

Toutefois, notre opinion préliminaire est que le document D3 ne divulgue pas les actions suivantes :

- recevoir une indication qu’un assuré a l’intention de vendre un contrat d’assurance-vie en échange d’un montant de règlement;

- recevoir, en réponse à une demande, au moins un document qui appuie le contrat d’assurance-vie;

- déterminer la quantité de documents reçus et la qualité respective de chaque document reçu en fonction d’au moins un des éléments suivants : la source du document, le type de document et le niveau d’importance prédéterminé du document;

- attribuer une cote au contrat d’assurance-vie en fonction de la quantité et de la qualité des documents reçus;

- afficher la cote attribuée au contrat d’assurance-vie.

Bien que le document D3 mentionne les règlements d’assurance-viatique, ils sont simplement mentionnés dans le contexte de son invention comme exemple de produits offerts par l’industrie de l’assurance-vie en général [document D3, par. [0005]]. De plus, même si le document D3 divulgue la communication du résultat de l’appréciation au détenteur du contrat, il ne divulgue pas l’affichage de la cote attribuée au contrat d’assurance-vie.

Les revendications indépendantes 12, 23 et 34 au dossier mentionnent des caractéristiques similaires à celles énoncées dans la revendication 1 au dossier.

La revendication indépendante 45 au dossier mentionne également l’authentification des documents reçus et l’attribution à la cote d’un code de couleur correspondant à la valeur marchande du contrat. Notre opinion préliminaire est que le document D3 ne divulgue pas ces caractéristiques.

À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que l’objet des revendications au dossier est nouveau à la lumière du document D3.

Notre opinion préliminaire est que le document D2 est l’art antérieur qui ressemble le plus à l’objet des revendications au dossier. Il divulgue une méthode, un programme informatique et un système fondés sur les enchères pour l’échange secondaire d’assurance-vie, où un contrat d’assurance-vie peut être soumis et vendu par le détenteur du contrat à des groupes d’acheteurs.

En ce qui concerne la revendication indépendante 1 au dossier, le document D2 divulgue ce qui suit :

- recevoir par l’intermédiaire d’un processeur une indication qu’un assuré a l’intention de vendre un contrat d’assurance-vie en échange d’un montant de règlement [document D2, par. [0051], et figure 4A, étapes 410 à 420];

- transmettre à un appareil à distance une demande d’au moins un document qui étaye le contrat d’assurance-vie, où l’appareil à distance et le processeur sont en communication dans un réseau [document D2, par. [0054] et [0055], et figure 4A, étapes 460 à 480, et 500];

- recevoir par l’intermédiaire du processus, en réponse à la demande, au moins un document qui appuie la police d’assurance-vie [document D2, par. [0054] à [0056], et figure 4A, étapes 510 et 530];

- afficher le contrat pour les groupes d’acheteurs, y compris une description du contrat et des paramètres définis pour l’achat du contrat [document D2, par. [0034]].

Notre opinion préliminaire est que le document D2 ne divulgue pas les actions suivantes :

- déterminer la qualité respective de chaque document reçu en fonction d’au moins un des éléments suivants : la source du document, le type du document et le niveau d’importance prédéterminé du document;

- déterminer, par l’intermédiaire du processeur, la quantité de documents reçus en réponse à la demande;

- attribuer, en fonction de la quantité des documents reçus et de la qualité de chaque document reçu, une cote au contrat d’assurance-vie, où la cote influe sur le montant du règlement;

- afficher la cote attribuée au contrat d’assurance-vie.

Les revendications indépendantes 12, 23 et 34 au dossier mentionnent des caractéristiques similaires à celles énoncées dans la revendication 1 au dossier.

La revendication indépendante 45 au dossier mentionne également l’authentification des documents reçus et l’attribution à la cote d’un code de couleur correspondant à la valeur marchande du contrat. Notre opinion préliminaire est que le document D2 ne divulgue pas ces caractéristiques.

Notre opinion préliminaire est donc que l’objet des revendications au dossier est nouveau à la lumière du document D2.

[54] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

[55] Par conséquent, nous concluons que les revendications au dossier sont nouvelles et conformes à l’alinéa 28.2(1)b) de la Loi sur les brevets.

Évidence

Principes juridiques

[56] L’article 28.3 de la Loi sur les brevets exige que l’objet revendiqué ne soit pas évident :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, soit plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, soit, si la date de la revendication est antérieure au début de cet an, avant la date de la revendication, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[57] Dans Sanofi, au paragraphe 67, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, pour évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes suivante :

(1)a) Identifier la « personne versée dans l’art »[;]

(1)b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui soustend la revendication ou son interprétation;

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituentelles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotentelles quelque inventivité?

Analyse

[58] La lettre de RP exposait notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications au dossier n’étaient pas évidentes et conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[59] La lettre de RP, aux pages 21 à 24, indiquait ce qui suit :

[traduction]

(1) Identifier la personne versée dans l’art et déterminer les connaissances générales courantes pertinentes

Notre définition préliminaire de la personne versée dans l’art et des CGC pertinentes dans la section relative à l’interprétation téléologique s’applique également à la date des revendications et est donc applicable aux fins d’évaluation de l’évidence.

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

En l’espèce, nous considérons que la combinaison des éléments essentiels des revendications est représentative de leurs idées originales. Nous examinons ci-dessous les revendications représentatives 1 et 45 au dossier.

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui soustend la revendication ou son interprétation

La décision finale, à la page 7, indiquait ce qui suit :

Compte tenu de l’évaluation de l’antériorité ci-dessus, en ce qui a trait aux revendications 1,12, 23, 34 et 45, il n’y a aucune différence entre ces revendications et le document d’art antérieur D3.

En ce qui concerne les revendications dépendantes 2 à 11, 13 à 22, 24 à 33, et 35 à 44, le document d’art antérieur D3 ne divulgue pas l’objet et les caractéristiques revendiqués.

Comme nous l’avons indiqué ci-dessus dans la section relative à l’antériorité, notre opinion préliminaire est que le document D3 ne divulgue pas toutes les caractéristiques des revendications indépendantes. En outre, nous avons indiqué que notre opinion préliminaire est que le document D2 est l’art antérieur qui ressemble le plus à l’objet des revendications au dossier et qu’il ne divulgue pas non plus toutes les caractéristiques des revendications indépendantes.

En ce qui concerne la revendication représentative 1 au dossier, comme nous l’avons expliqué ci-dessus dans la section relative à l’antériorité, notre opinion préliminaire est que le document D2 ne divulgue pas les actions suivantes :

- déterminer la qualité respective de chaque document reçu en fonction d’au moins un des éléments suivants : la source du document, le type du document et le niveau d’importance prédéterminé du document;

- déterminer, par l’intermédiaire du processeur, la quantité de documents reçus en réponse à la demande;

- attribuer, en fonction de la quantité des documents reçus et de la qualité de chaque document reçu, une cote au contrat d’assurance-vie, où la cote influe sur le montant du règlement;

- afficher la cote attribuée au contrat d’assurance-vie.

En ce qui concerne la revendication représentative 45 au dossier, comme nous l’avons expliqué ci-dessus dans la section relative à l’antériorité, notre opinion préliminaire est que le document D2 ne divulgue pas les autres caractéristiques relatives à l’authentification des documents reçus et à l’attribution aux cotes d’un code de couleur correspondant à la valeur marchande du contrat.

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituentelles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotentelles quelque inventivité?

Notre opinion préliminaire est que les différences entre la divulgation dans le document D2 et l’idée originale des revendications représentatives 1 et 45 au dossier constitueraient une étape inventive.

L’invention revendiquée comprend les étapes suivantes : la détermination de la quantité et de la qualité des documents reçus; l’attribution d’une cote au contrat d’assurance en fonction de la quantité et de la qualité des documents reçus; et l’affichage de la cote.

Comme il est indiqué ci-dessus, le document D2 divulgue une méthode et un système fondés sur les enchères pour l’échange secondaire d’assurance-vie, où un contrat d’assurance-vie peut être soumis et vendu par le détenteur du contrat à des groupes d’acheteurs. Il divulgue une étape d’information où le courtier obtient de l’assuré un formulaire de libération pour raisons médicales signé, une divulgation signée, ainsi que d’autres renseignements comme des renseignements généraux sur le contrat, des renseignements personnels et des renseignements médicaux. Le courtier demande également des dossiers médicaux des assurés. Une demande d’évaluation de l’espérance de vie peut être présentée lorsque les documents demandés, y compris les dossiers médicaux, sont envoyés à des sociétés actuarielles. Des illustrations du contrat sont ensuite reçues [document D2, par. [0053] à [0055], et figure 4A].

Bien que les CGC pertinentes comprennent le fait que le montant du règlement pour un contrat d’assurance-vie dépend d’un certain nombre de facteurs comme la santé et l’espérance de vie de l’assuré et les détails du contrat, ces facteurs ne comprennent pas la qualité et la quantité des documents justificatifs du contrat. Par conséquent, notre opinion préliminaire est qu’il n’aurait pas été évident pour la personne versée dans l’art, compte tenu de ses CGC pertinentes, de modifier la méthode et le système divulgués dans le document D2 de façon qu’une cote soit attribuée au contrat en fonction de la quantité et de la qualité des documents reçus.

Par souci d’exhaustivité, nous notons à titre préliminaire que l’écart entre l’objet des revendications au dossier et la combinaison de la divulgation dans le document D2 et des CGC ne serait pas comblé par le document D3. Bien que le document D3 divulgue l’évaluation d’un contrat d’assurance fondée sur les renseignements reçus au sujet du contrat et du détenteur du contrat, il ne divulgue pas les documents à recevoir à l’appui du contrat, la détermination de la quantité et de la qualité des documents ou l’attribution d’une cote fondée sur la quantité et la qualité déterminées. Notre opinion préliminaire est que ni le document D2 ni le document D3 ne fournissent d’indication ou de suggestion pour inciter la personne versée dans l’art à modifier le système divulgué dans le document D2 de façon qu’une cote est établie en fonction de la quantité et de la qualité des documents reçus.

Conclusion concernant l’évidence

À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que les revendications 1 à 45 au dossier n’auraient pas été évidentes pour la personne versée dans l’art compte tenu de l’art antérieur cité et des CGC pertinentes. Par conséquent, notre opinion préliminaire est que les revendications 1 à 45 au dossier sont conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[60] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

[61] Par conséquent, nous concluons que les revendications au dossier ne sont pas évidentes et qu’elles sont conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Caractère indéfini

Principes juridiques

[62] Le paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets exige qu’une revendication définisse en termes précis et explicites l’objet :

Le mémoire descriptif se termine par une ou plusieurs revendications définissant distinctement et en des termes explicites l’objet de l’invention dont le demandeur revendique la propriété ou le privilège exclusif.

[63] Dans Minerals Separation North American Corp v. Noranda Mines Ltd, [1947] RC de l’É, 306, à la p. 352, la Cour a souligné l’obligation pour un demandeur de définir clairement dans les revendications la portée du monopole recherché et l’exigence que les termes utilisés dans les revendications soient clairs et précis :

[traduction]

En formulant ses revendications, l’inventeur érige une clôture autour des champs de son monopole et met le public en garde contre toute violation de sa propriété. La délimitation doit être claire afin de donner l’avertissement nécessaire, et seule la propriété de l’inventeur doit être clôturée. La teneur d’une revendication doit être exempte de toute ambiguïté ou obscurité pouvant être évitée, et sa portée ne doit pas être flexible; elle doit être claire et précise de façon que le public puisse savoir non seulement où il lui est interdit de passer, mais aussi où il peut passer sans risque.

Analyse

[64] La lettre de RP exprimait notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications 12, 23 et 45 au dossier manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[65] La lettre de RP, aux pages 25 et 26, indiquait ce qui suit :

[traduction]

La décision finale, à la page 8, relevait l’irrégularité suivante liée au caractère indéfini :

les revendications 12 et 23 manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Les termes suivants n’ont aucun antécédent : « l’appareil à distance » (revendication 12, ligne 8) et « l’appareil à distance » (revendication 23, ligne 6).

À titre préliminaire, nous sommes d’accord.

La décision finale indiquait également ce qui suit :

Les revendications 1, 12, 23 et 34 manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Une partie de la revendication 1 mentionne « […] au moins un document qui appuie le contrat d’assurance-vie […] » (voir les lignes 4 et 5), ce qui semble être une erreur d’écriture ou de grammaire évidente. Les mots « qui appuie le » devrait être remplacés par « justificatif du ». De même, la même irrégularité s’applique aux revendications 12, 23 et 34.

À titre préliminaire, nous ne sommes pas d’accord. Notre opinion préliminaire est que la personne versée dans l’art comprendrait le sens de l’expression susmentionnée.

Le Demandeur n’a ni contesté ni commenté les irrégularités susmentionnées relevées dans la décision finale et a présenté des revendications proposées.

Notre opinion préliminaire est que l’autre irrégularité suivante liée au caractère indéfini est également présente dans les revendications au dossier.

La revendication 45 au dossier mentionne « Un système transactionnel pour le marché de l’assurance-vie comprenant : un processeur et une mémoire, où la mémoire stocke les instructions exécutées par le processeur, permettant ainsi au processeur […] ». L’expression « une mémoire, où la mémoire stocke les instructions exécutées » n’est pas claire. Elle devrait peut-être se lire « une mémoire qui stocke les instructions qui, lorsqu’exécutées ».

Par conséquent notre opinion préliminaire est que les revendications 12, 23 et 45 au dossier manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[66] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

[67] Par conséquent, nous concluons que les revendications 12, 23 et 45 au dossier manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

Revendications proposées

[68] Comme il est indiqué ci-dessus, dans sa réponse à la décision finale, le Demandeur a proposé un ensemble de 17 revendications contenant les revendications indépendantes 1, 5 et 17.

[69] À notre avis, la revendication proposée 1 est représentative des revendications indépendantes. Il se lit comme suit :

[traduction]

1. Un appareil comprenant :

au moins un processeur d’un réseau informatique électronique comprenant plusieurs nœuds de calcul;

une mémoire qui stocke des instructions qui, lorsqu’exécutées par au moins un processeur, permettent au processeur de :

recevoir des renseignements sur plusieurs contrats d’assurance-vie et les détenteurs respectifs de chaque contrat d’assurance-vie,

calculer la valeur de chaque contrat d’assurance-vie en fonction des renseignements reçus,

produire un instrument d’échange pour chaque contrat d’assurance-vie en fonction des valeurs calculées,

produire des dossiers dans une base de données pour stocker des données indicatives de chaque instrument d’échange,

créer un index de base de données en fonction d’aspects uniques des dossiers,

recevoir, pendant une période prédéterminée, plusieurs soumissions pour un instrument d’échange donné associé à un contrat d’assurance-vie donné, où chacune des soumissions comprend un prix de soumission,

procéder à des recherches dans les données associées audit instrument d’échange dans la base de données à l’aide de l’index de base de données,

déterminer que le prix d’une soumission est plus élevé que le prix de toute autre soumission reçue pendant la période prédéterminée,

transmettre une indication d’un accord de vente dudit instrument d’échange au prix de la soumission la plus élevée,

générer un transfert dudit contrat d’assurance-vie associé audit instrument d’échange lors de l’échange d’un paiement au prix de la soumission la plus élevée.

[70] Les revendications indépendantes proposées 5 et 17 visent respectivement la méthode et le support lisible par ordinateur correspondants, et elles indiquent des restrictions semblables à celles indiquées dans la revendication proposée 1.

[71] Les revendications dépendantes proposées fournissent de plus amples détails sur l’attribution d’une cote à chaque contrat d’assurance-vie, le stockage et l’interrogation des dossiers dans la base de données, ainsi que sur le processus de soumission.

Interprétation téléologique

[72] La lettre de RP, à la page 28, exprimait comme suit notre opinion préliminaire concernant l’interprétation téléologique des revendications proposées :

[traduction]

Notre définition préliminaire de la personne versée dans l’art et des CGC pertinentes dans la section relative à l’interprétation téléologique des revendications au dossier s’applique également aux revendications proposées.

Étant donné qu’il n’y a aucun libellé indiquant que l’une des caractéristiques des revendications proposées est optionnelle, une réalisation préférée, un élément d’une liste d’éléments de rechange ou non essentiel, toutes les caractéristiques présentées dans les revendications proposées sont considérées comme essentielles.

Sens des termes

L’interprétation téléologique est également utilisée pour interpréter le sens des termes d’une revendication tels que compris par la personne versée dans l’art.

Au cours de notre examen préliminaire de la demande en instance, il nous est apparu évident qu’une expression de la revendication 8 pourrait être, à première vue, mal interprétée comme signifiant quelque chose d’autre que ce qui était prévu. C’est pourquoi nous avons procédé à l’interprétation de cette expression, comme il est indiqué ci-dessous.

La revendication proposée 8 mentionne l’action de « procéder à une évaluation médicale du détenteur du contrat ». Selon la description en instance (page 5, lignes 25 à 28, et page 8, lignes 1 à 8), notre opinion préliminaire est qu’une personne versée dans l’art interpréterait la réalisation d’une évaluation médicale du détenteur du contrat comme signifiant la réalisation d’une analyse des dossiers et des documents médicaux du détenteur du contrat, plutôt que la réalisation physique d’un examen médical.

[73] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

Nouvel élément

[74] La lettre de RP exprimait notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications proposées 1, 2, 3, 5, 6, 7, 10, 11, 14 et 17 visent un nouvel élément et ne seraient pas conformes à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets. Aux pages 28 et 33, la lettre de RP indiquait ce qui suit :

[traduction]

Le résumé des motifs, à la page 4, indique que les revendications proposées 1, 5, 10, 11, 14 et 17 visent un nouvel élément et ne sont pas conformes à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets.

Pour les raisons exposées ci-dessous, notre opinion préliminaire est que les revendications proposées 1, 2, 3, 5, 6, 7, 10, 11, 14 et 17 visent un nouvel élément et ne seraient pas conformes à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets.

Principes juridiques

L’article 38.2 de la Loi sur les brevets établit les conditions sous lesquelles des modifications peuvent être apportées au mémoire descriptif et aux dessins d’une demande de brevet :

Modification du mémoire descriptif et des dessins

38.2 (1) Sous réserve des paragraphes (2) à (3.1) et des règlements, les dessins et le mémoire descriptif qui sont compris dans la demande de brevet peuvent être modifiés avant la délivrance du brevet.

Limite

(2) Les dessins et le mémoire descriptif qui sont compris dans une demande autre qu’une demande divisionnaire ne peuvent être modifiés pour y ajouter des éléments qui ne peuvent raisonnablement s’inférer des dessins ou du mémoire descriptif qui sont compris dans la demande à sa date de dépôt.

La question de savoir si l’objet ajouté au mémoire descriptif ou aux dessins par voie de modification est conforme au paragraphe 38.2(2) de la Loi sur les brevets est évaluée du point de vue de la personne versée dans l’art.

Déterminer s’il y a un nouvel élément exige donc une comparaison entre le mémoire descriptif en instance et le mémoire descriptif initialement déposés, ainsi que de déterminer si l’objet des modifications est ce qui était divulgué ou aurait pu raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif ou des dessins originaux par la personne versée dans l’art.

Analyse

La demande, y compris le mémoire descriptif original, a été déposée en vertu du Traité de coopération en matière de brevets et sa date de dépôt au Canada est le 30 août 2007. Le Demandeur a présenté des descriptions modifiées le 18 juillet 2013, puis le 5 août 2014. Nous évaluons la question de la présence d’un nouvel élément dans les revendications proposées en fonction du mémoire descriptif initialement déposé.

Le résumé des motifs, à la page 4, relevait des irrégularités liées à un nouvel élément dans les revendications proposées 1, 5, 10, 11, 14 et 17 :

Tout d’abord, en réponse, certaines des caractéristiques modifiées sont considérées comme un nouvel élément sans fondement adéquat de la description initialement déposée. En effet, la demande en instance concerne la vente ou l’achat d’un contrat d’assurance-vie, ainsi que le calcul de la valeur du contrat d’assurance-vie. En outre, la description initialement déposée mentionne l’enregistrement de renseignements dans une base de données, la réalisation d’une recherche dans une base de données et la soumission d’une offre d’achat pour le contrat d’assurance-vie. Toutefois, la description initialement déposée ne semble pas mentionner les caractéristiques modifiées […] qui sont liées à la production d’un instrument d’échange pour chaque contrat d’assurance-vie en fonction des valeurs calculées, à la création d’un index de base de données en fonction d’aspects uniques des dossiers, et à la recherche de données associées audit instrument d’échange dans la base de données à l’aide de l’index de la base de données; par conséquent, ces caractéristiques modifiées sont considérées comme un nouvel élément sans fondement adéquat et devraient être supprimées du libellé des revendications.

De plus, étant donné que les revendications dépendantes 10, 11 et 14 mentionnent également des caractéristiques liées à l’instrument d’échange et à l’index de la base de données, ces revendications dépendantes sont donc également considérées comme un nouvel élément sans fondement adéquat et devraient être supprimées du libellé des revendications. Par conséquent, l’objet des revendications 1, 5, 10, 11, 14 et 17, telles que modifiées par le Demandeur, n’est pas conforme à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets parce qu’il ne peut pas raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif ou des dessins initialement déposés. [Style d’accentuation original modifié pour des raisons d’accessibilité.]

Notre opinion préliminaire est que le mémoire descriptif initialement déposé ne semble pas divulguer explicitement les restrictions suivantes dans les revendications indépendantes proposées :

(A) produire un instrument d’échange pour chaque contrat d’assurance-vie en fonction des valeurs calculées;

(B) produire des dossiers dans une base de données pour stocker des données indicatives de chaque instrument d’échange;

(C) créer un index de base de données en fonction d’aspects uniques des dossiers;

(D) recevoir, pendant une période prédéterminée, plusieurs soumissions pour un instrument d’échange donné associé à un contrat d’assurance-vie donné, où chacune des soumissions comprend un prix de soumission;

(E) procéder à des recherches dans les données associées audit instrument d’échange dans la base de données à l’aide de l’index de base de données;

(F) déterminer que le prix d’une soumission est plus élevé que le prix de toute autre soumission reçue pendant la période prédéterminée;

(G) transmettre une indication d’un accord de vente dudit instrument d’échange au prix de la soumission la plus élevée;

(H) générer un transfert dudit contrat d’assurance-vie associé à l’instrument d’échange lors de l’échange d’un paiement au prix de la soumission la plus élevée.

De même, le mémoire descriptif initialement déposé ne semble pas divulguer explicitement les restrictions suivantes dans les revendications dépendantes proposées 10, 11 et 14 :

(I) le paiement comprend des parts dudit instrument d’échange, qui comprend au moins l’une de : une action, une obligation et une rente;

(J) générer plusieurs champs pour chaque dossier dans la base de données;

(K) produire l’index de la base de données pour plusieurs champs.

En ce qui concerne les caractéristiques de stockage et de recherche de la base de données (B), (C), (E), (J) et (K), la description initialement déposée divulgue ce qui suit à la page 8 :

Une fois que l’utilisateur a terminé de télécharger ou de désigner les emplacements des divers documents justificatifs pertinents, le système peut enregistrer les données associées à ces documents dans une base de données située dans la mémoire. Ce faisant, le système peut autoriser les futurs utilisateurs (par exemple, les acheteurs) à procéder à des recherches et à trouver ces documents.

La description initialement déposée divulgue également ce qui suit à la page 9 :

L’utilisateur peut enregistrer un profil de recherche particulier dans la base de données du système. Le système tente alors automatiquement de faire correspondre le profil de recherche avec les contrats d’assurance-vie dans la base de données […]

Enfin, la description initialement déposée divulgue ce qui suit à la page 17 :

Lorsque des bases de données sont décrites, une personne versée dans l’art comprend (i) que d’autres structures de base de données que celles décrites peuvent être facilement utilisées et (ii) que d’autres structures de mémoire, en plus des bases de données, peuvent être facilement utilisées. Toute illustration ou description d’échantillons de bases de données présentées dans le présent document sont des dispositions illustratives de représentations stockées de renseignements. Toute autre disposition peut être utilisée en plus de celles suggérées notamment par les tableaux illustrés dans les dessins ou ailleurs. De même, toute inscription des bases de données qui est illustrée ne représente que des renseignements fournis à titre d’exemple; la personne versée dans l’art comprendra que le nombre d’inscriptions et leur contenu peuvent être différents de ceux décrits dans le présent document. En outre, malgré toute représentation des bases de données sous forme de tableaux, d’autres formats (y compris des bases de données relationnelles, des modèles fondés sur l’objet ou des bases de données distribuées) pourraient être utilisés pour stocker et manipuler les types de données décrits dans le présent document. De même, des méthodes fondées sur l’objet ou les comportements d’une base de données peuvent être utilisés pour mettre en œuvre divers processus, comme ceux décrits dans le présent document. De plus, les bases de données peuvent, d’une façon connue, être stockées localement ou à distance à partir d’un appareil qui accède aux données d’une telle base de données.

Notre opinion préliminaire est que le mémoire descriptif initialement déposé ne divulgue pas, n’enseigne pas et ne suggère pas, explicitement ou implicitement, les caractéristiques revendiquées liées à la création d’un index de base de données en fonction d’aspects uniques des dossiers, à la recherche de données à l’aide de l’index de base de données, à la création de plusieurs champs pour chaque dossier dans la base de données et à la création de l’index de base de données pour les champs. Bien que notre opinion préliminaire soit que divers types de bases de données, ainsi que des méthodes de création et de recherche des bases de données, faisaient partie des connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art à la date des revendications, notre opinion préliminaire est également que la personne versée dans l’art n’aurait pas raisonnablement inféré de la divulgation dans le mémoire descriptif initialement déposé les caractéristiques de recherche et de stockage de la base de données susmentionnées.

En ce qui concerne les caractéristiques d’échange, de soumission et de paiement (A), (D), et (F) à (I), la description divulgue simplement, à la page 9, que « [l]’utilisateur peut également présenter une offre pour acheter le contrat d’assurance-vie. Diverses méthodes de soumission, d’échange et d’achat de contrats d’assurance par voie électronique sont connues. » Notre opinion préliminaire est que le mémoire descriptif initialement déposé ne divulgue pas, n’enseigne pas et ne suggère pas, explicitement ou implicitement, les caractéristiques revendiquées liées à la production d’un instrument d’échange pour chaque contrat, à la réception de soumissions pendant une période prédéterminée et aux paiements comprenant des parts dans l’instrument d’échange. Bien que notre opinion préliminaire soit que diverses méthodes de soumission et d’échange des contrats d’assurance faisaient partie des connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art à la date des revendications, notre opinion préliminaire est également que la personne versée dans l’art n’aurait pas raisonnablement inféré de la divulgation dans le mémoire descriptif initialement déposé les caractéristiques d’échange, de soumission et de paiement.

Notre opinion préliminaire est que la personne versée dans l’art n’inférerait pas raisonnablement les restrictions susmentionnées dans les revendications proposées 1, 5, 10, 11, 14 et 17 du mémoire descriptif initialement déposé.

Notre opinion préliminaire est que l’autre irrégularité suivante liée au nouvel élément est également présente dans les revendications proposées.

Les revendications proposées 2, 3, 6 et 7 mentionnent la solvabilité de l’émetteur du contrat d’assurance-vie et l’attribution d’une cote en fonction de la solvabilité déterminée. Notre opinion préliminaire est que le mémoire descriptif initialement déposé ne divulgue pas, n’enseigne pas et ne suggère pas, explicitement ou implicitement, ces caractéristiques. La description initialement déposée, à la page 5, divulgue que « [s]i l’utilisateur choisit l’onglet “Vendre”, alors l’utilisateur est dirigé vers une nouvelle page Web et il lui est demandé de saisir des renseignements concernant le contrat d’assurance-vie qu’il souhaite vendre. Ces renseignements peuvent comprendre la société d’assurance-vie […] ». Toutefois, notre opinion préliminaire est que la personne versée dans l’art n’aurait pas raisonnablement inféré de la divulgation dans la description initialement déposée les caractéristiques susmentionnées.

Notre opinion préliminaire est donc que les revendications proposées 1, 2, 3, 5, 6, 7, 10, 11, 14 et 17 contiennent un nouvel élément et ne seraient pas conformes à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets.

[75] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

[76] Par conséquent, nous conclusion que les revendications proposées 1, 2, 3, 5, 6, 7, 10, 11, 14 et 17 contiennent un nouvel élément et ne seraient pas conformes à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets.

Objet brevetable

[77] La lettre de RP exposait notre opinion préliminaire selon laquelle l’objet des revendications proposées 1 à 17 est un objet non brevetable, ne correspond pas à la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets et est interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets. Aux pages 34 et 35, la lettre de RP indiquait ce qui suit :

[traduction]

Ayant jugé que tous les éléments des revendications proposées sont essentiels, afin de déterminer si les revendications proposées visent un objet brevetable, il faut déterminer si ces éléments forment une seule invention réelle qui soit a une existence physique, soit manifeste un effet ou un changement physique discernable.

Les revendications indépendantes proposées visent à faciliter la présentation de soumissions pour des contrats d’assurance-vie, où chaque contrat d’assurance-vie se voit attribuer une valeur en fonction des renseignements reçus, où les soumissions sont acceptées pendant une période prédéterminée et où le contrat est transféré au soumissionnaire ayant offert le prix le plus élevé au moment du paiement. Les revendications dépendantes proposées fournissent plus de détails sur le processus de soumission et l’évaluation des contrats.

Les revendications proposées mentionnent un certain nombre d’éléments d’ordinateur, comme un processeur, une mémoire, une base de données et un réseau informatique électronique. Ils mentionnent également que ces éléments exécutent des étapes liées à un ordinateur, comme la communication avec un appareil à distance sur un réseau, l’analyse de données fondée sur un ensemble de règles, ainsi que le stockage, l’indexation, la recherche et l’extraction de bases de données.

Comme il est expliqué dans Amazon (aux par. 61, 62, 63, 66 et 69), un ordinateur ne peut pas être utilisé pour donner à une idée abstraite une application pratique et ainsi satisfaire à l’exigence du caractère matériel implicite dans la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets simplement en programmant l’ordinateur au moyen d’un algorithme. C’était la situation en cause dans Schlumberger, où l’ordinateur agissait simplement d’une façon bien connue.

Selon l’EP2020–04, « [s]i un ordinateur est simplement utilisé d’une façon bien connue, l’emploi de l’ordinateur ne sera pas suffisant pour rendre l’idée désincarnée, le principe scientifique ou les conceptions théoriques en un objet brevetable et en dehors de l’interdiction prévue au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets ».

Notre opinion préliminaire est que rien dans le mémoire descriptif ne suggère que les éléments informatiques revendiqués ne représentent rien d’autre que des composants informatiques génériques. De même, notre opinion préliminaire est que rien dans le mémoire descriptif ne suggère que les étapes revendiquées liées à un ordinateur qui sont exécutées par ces éléments représentent autre chose que des fonctions bien connues de composants informatiques génériques, ou que le fonctionnement de l’ordinateur est amélioré par les étapes revendiquées (voir, par exemple, description, page 1, ligne 29 à page 3, ligne 5; page 15, ligne 15 à page 16, ligne 4; page 17, ligne 10 à page 18, ligne 10; et page 26, ligne 14 à page 17, ligne 4). Notre opinion préliminaire est que l’ordinateur est simplement utilisé d’une façon bien connue et qu’il ne fait donc pas partie de la seule invention réelle visée par les revendications proposées. En fait, l’invention réelle vise l’évaluation d’un contrat d’assurance, l’établissement d’un processus de soumission et le transfert de la propriété du contrat au plus haut soumissionnaire une fois le paiement effectué, qui est un ensemble de règles et de calculs abstraits et qui ne satisfait pas à l’exigence du caractère matériel énoncée dans Amazon et l’EP2020-04.

En outre, les revendications dépendantes proposées fournissent des détails supplémentaires sur le processus de soumission et de transfert de propriété revendiqué, y compris l’attribution d’une cote à un contrat d’assurance en fonction de l’espérance de vie déterminée du détenteur du contrat et de la solvabilité de la société d’assurance, l’attribution d’un montant de soumission minimal et l’interrogation de la base de données en fonction des champs des dossiers. De plus, en ce qui concerne la revendication proposée 8, comme il en a été discuté dans la section ci-dessus relative au sens des termes, notre opinion préliminaire est qu’une personne versée dans l’art interpréterait la réalisation d’une évaluation médicale du détenteur du contrat comme signifiant la réalisation d’une analyse des dossiers et des documents médicaux du détenteur du contrat, plutôt que la réalisation physique d’un examen médical. Par conséquent, notre opinion préliminaire est que les revendications dépendantes n’ajoutent aucune caractéristique qui satisferait à l’exigence du caractère matériel et rendrait les revendications brevetables.

À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que les revendications proposées 1 à 17 visent un objet non brevetable, ne correspondent pas à la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets et sont interdites en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

[78] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

[79] Par conséquent, nous concluons que l’objet des revendications proposées 1 à 17 est un objet non brevetable, ne correspond pas à la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets et est interdit en vertu du paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets.

Évidence

[80] La lettre de RP exprimait notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications proposées 1 à 17 auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art et ne seraient pas conformes à l’article 28.2 de la Loi sur les brevets. Aux pages 36 à 41, la lettre de RP indiquait ce qui suit :

[traduction]

(1) Identifier la personne versée dans l’art et déterminer les connaissances générales courantes pertinentes

Notre définition préliminaire de la personne versée dans l’art et des CGC pertinentes en ce qui a trait aux revendications au dossier s’appliquerait également aux revendications proposées.

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

En l’espèce, nous considérons que la combinaison des éléments essentiels des revendications proposées est représentative de leurs idées originales. Ci-dessous, nous examinons la revendication proposée 1, qui est représentative.

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui soustend la revendication ou son interprétation

Le résumé des motifs, à la page 6, indiquait ce qui suit :

En conclusion, la connaissance combinée des documents D2 et D3 divulgue toutes les caractéristiques revendiquées mentionnées dans les revendications indépendantes 1, 5 et 17. En outre, les documents D2 et D3 ne divulguent pas explicitement les caractéristiques revendiquées mentionnées dans les revendications dépendantes 2 à 4, et 6 à 16.

Notre opinion préliminaire est que le document D2 est l’art antérieur qui ressemble le plus à l’objet des revendications proposées.

En ce qui concerne la revendication proposée 1, notre opinion préliminaire est que le document D2 divulgue ce qui suit :

au moins un processeur d’un réseau informatique électronique comprenant plusieurs nœuds de calcul; une mémoire qui stocke des instructions qui, lorsqu’exécutées par au moins un processeur, permettent au processeur de [document D2, par. [0017], [0021] et [0036] à [0049], et figures 2A à 3] :

recevoir des renseignements sur plusieurs contrats d’assurance-vie et les détenteurs respectifs de chaque contrat d’assurance-vie [document D2, par. [0019]],

produire un instrument d’échange pour chaque contrat d’assurance-vie en fonction d’exigences de soumission [document D2, par. [0054] à [0061]],

produire des dossiers dans une base de données pour stocker des données indicatives de chaque instrument d’échange [document D2, par. [0069]],

recevoir, pendant une période prédéterminée, plusieurs soumissions pour un instrument d’échange donné associé à un contrat d’assurance-vie donné, où chacune des soumissions comprend un prix de soumission [document D2, par. [0059]],

procéder à des recherches dans les données associées audit instrument d’échange dans la base de données [document D2, par. [0074]],

déterminer que le prix d’une soumission est plus élevé que le prix de toute autre soumission reçue pendant la période prédéterminée [document D2, par. [0059]],

transmettre une indication d’un accord de vente dudit instrument d’échange au prix de la soumission la plus élevée [document D2, par. [0067]],

générer un transfert dudit contrat d’assurance-vie associé audit instrument d’échange lors de l’échange d’un paiement au prix de la soumission la plus élevée [document D2, par. [0067] et [0068]].

Notre opinion préliminaire est que le document D2 ne divulgue pas ce qui suit :

a) calculer la valeur de chaque contrat d’assurance-vie en fonction des renseignements reçus;

b) créer un index de base de données en fonction d’aspects uniques des dossiers utilisés aux fins de recherche.

Les revendications indépendantes proposées 5 et 17 visent respectivement la méthode et le support lisible par ordinateur correspondants, et elles indiquent des restrictions semblables à celles indiquées dans la revendication proposée 1.

En ce qui concerne les revendications proposées 2 et 6, le document D2 divulgue la détermination de l’espérance de vie du détenteur du contrat [document D2, par. [0055]]. Toutefois, bien que le document D2 divulgue des renseignements sur les contrats en général, il ne divulgue pas la détermination de la solvabilité d’un émetteur qui fournit chaque contrat d’assurance-vie.

En ce qui concerne les revendications proposées 3 et 7, le document D2 ne divulgue pas l’attribution d’une cote à chaque contrat en fonction de l’espérance de vie et de la solvabilité de l’émetteur.

En ce qui concerne les revendications proposées 4 et 9, le document D2 divulgue l’attribution d’un montant de soumission minimum pour chaque instrument d’échange stocké dans la base de données [document D2, par. [0059]].

En ce qui concerne les revendications proposées 8, 10, 11 et 14, notre opinion préliminaire est que le document D2 ne divulgue pas toutes les restrictions mentionnées dans ces revendications.

En ce qui concerne les revendications proposées 12 et 15, le document D2 divulgue la réception d’une demande qui est fondée sur au moins un champ des dossiers de la base de données et la récupération d’un premier instrument d’échange qui comprend des renseignements correspondant à au moins un champ interrogé [document D2, par. [0074]].

En ce qui concerne les réclamations proposées 13 et 16, le document D2 divulgue un accord visant à inscrire un acheteur de chaque contrat d’assurance-vie comme bénéficiaire en échange de la réception du paiement [document D2, par. [0067]].

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituentelles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotentelles quelque inventivité?

Notre opinion préliminaire est que les différences entre la divulgation dans le document D2 et l’idée originale des revendications proposées auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art.

En ce qui concerne la caractéristique a) des revendications indépendantes proposées 1, 5 et 17, ainsi que les revendications indépendantes proposées 2, 3, 6 et 7, le document D2 divulgue que les groupes d’acheteurs évaluent le contrat pour déterminer le montant de leur soumission [document D2, par. [0061]]. De plus, comme il est indiqué dans la section relative à l’interprétation téléologique, notre opinion préliminaire est que les CGC pertinentes comprennent le fait que le montant du règlement pour un contrat d’assurance-vie dépend d’un certain nombre de facteurs comme la santé et l’espérance de vie de l’assuré, ainsi que les détails du contrat. Par conséquent, notre opinion préliminaire est qu’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art, à la lumière de ses CGC pertinentes, d’évaluer et de calculer la valeur des contrats d’assurance-vie, comme indiqué dans le document D2, en fonction des renseignements reçus et des facteurs liés au détendeur du contrat, comme son espérance de vie, ainsi que des facteurs liés aux contrats, comme la solidité financière ou la solvabilité de la société d’assurance.

Par souci d’exhaustivité, nous notons également à titre préliminaire que le document D3 divulgue le calcul de la valeur de chaque contrat d’assurance-vie en fonction des renseignements reçus [document D3, abrégé, par. [0089], tableau A et figure 3]. Le document D3 divulgue également l’attribution d’une cote aux contrats d’assurance-vie en fonction au moins de l’espérance de vie du détenteur du contrat et de la solvabilité de l’émetteur, lorsque la cote détermine au moins en partie le prix du contrat [document D3, abrégé, par. [0089], tableau A et figure 3 – évaluation d’un contrat d’assurance-vie en vigueur en fonction d’un certain nombre de facteurs, y compris le « rapport qualité-prix du produit », qui est fondé sur les avantages offerts à la lumière du prix calculé à l’aide d’hypothèses actuarielles comme les renseignements sur la mortalité, ainsi que la « cote de l’assureur », qui est liée à la cote de solidité financière de la société d’assurance]. Notre opinion préliminaire est donc qu’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art, au regard du document D3 et de ses CGC, de modifier la méthode et le système exposés dans le document D2 de façon que la cote du contrat soit déterminée également en fonction de la solvabilité de la société d’assurance.

En ce qui concerne la caractéristique b) des revendications indépendantes proposées 1, 5 et 17, ainsi que les revendications proposées 11 et 14, le document D2 divulgue que « [l]es acheteurs sont en mesure d’effectuer une recherche plus ciblée de contrats qui correspondent à des paramètres spécifiques » [document D2, par. [0074]]. Comme il est indiqué dans la section relative aux CGC pertinentes, notre opinion préliminaire est que la création, le stockage, la mise à jour et l’interrogation de dossiers d’une base de données, où chaque dossier contient des champs correspondant à des caractéristiques différentes, ainsi que la création d’un index de base de données en fonction des caractéristiques des dossiers pour permettre aux utilisateurs d’effectuer des recherches en précisant les critères de recherche, faisaient partie des connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art à la date des revendications. Notre opinion préliminaire est qu’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art, à la lumière de ses CGC, de modifier le système exposé dans le document D2 de façon qu’un index de base de données soit créé en fonction d’aspects uniques des dossiers afin d’être utilisé à des fins de recherche, puisqu’une telle option était bien connue, tout comme les avantages de son utilisation.

À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que les revendications indépendantes proposées 1, 5 et 17, ainsi que les revendications dépendantes proposées 2, 3, 6, 7, 11 et 14 auraient été évidentes à la lumière du document D2 et des CGC pertinentes.

En ce qui concerne la revendication proposée 8, le document D2 divulgue que l’espérance de vie « peut être évaluée sans examen médical » [document D2, par. [0055]]. Notre opinion préliminaire est que cela signifie que l’analyse des dossiers et des documents médicaux du détenteur du contrat dans le cadre d’une évaluation de l’espérance de vie pour apprécier un contrat d’assurance-vie était bien connue. Notre opinion préliminaire est donc qu’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art de modifier la divulgation dans le document D2 de façon qu’une évaluation médicale du détenteur du contrat soit effectuée.

En ce qui concerne la revendication proposée 10, le document D2 ne divulgue pas que le paiement vise des parts de l’instrument d’échange. Toutefois, il divulgue que les acheteurs peuvent créer des portefeuilles de contrats et vendre des obligations en échange de ces portefeuilles. Notre opinion préliminaire est qu’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art de modifier les méthodes de paiement exposées dans le document D2 de façon que les paiements soient effectués au moyen de parts de l’instrument d’échange, comme des actions, des obligations ou des rentes.

En ce qui concerne les revendications proposées 4, 9, 12, 13, 15 et 16, comme il est expliqué à l’étape (3) ci-dessus, les caractéristiques supplémentaires de ces revendications étaient divulguées dans le document D2. Étant donné que les revendications auxquelles se rapportent les revendications proposées 4, 9, 12, 13, 15 et 16 auraient été évidentes à la lumière du document D2 et des CGC pertinentes, notre opinion préliminaire est que ces revendications proposées auraient également été évidentes pour la personne versée dans l’art.

Conclusion concernant l’évidence

À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que les revendications proposées 1 à 17 auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art compte tenu de l’art antérieur cité et des CGC pertinentes. Par conséquent, notre opinion préliminaire est que ces revendications ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[81] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

[82] Par conséquent, nous concluons que les revendications proposées 1 à 17 auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art et ne seraient pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Caractère indéfini

[83] La lettre de RP exprimait notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications proposées 1, 5 et 17 manqueraient de clarté et ne seraient pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Aux pages 41 et 42, la lettre de RP indiquait ce qui suit :

[traduction]

La revendication proposée 1 prévoit l’action de « calculer la valeur de chaque contrat d’assurance-vie en fonction des renseignements reçus ». Notre opinion préliminaire est que le sens de « valeur » n’est pas clair. La description en instance ne mentionne pas le calcul de valeurs des contrats en fonction des renseignements reçus. Elle divulgue, à la page 5, que l’utilisateur peut saisir la valeur du contrat lorsqu’il indique son intention de le vendre sur le site Web. De plus, aux pages 7 et 8, elle divulgue la détermination des valeurs de chaque document reçu, qui sont ensuite utilisées pour déterminer la cote globale du contrat. La revendication dépendante proposée 3 mentionne l’attribution d’une cote à chaque contrat d’assurance-vie lorsque la cote détermine le prix de chaque contrat. Notre opinion préliminaire est que les revendications proposées 5 et 17 présentent un problème semblable. Notre opinion préliminaire est donc que l’objet des revendications proposées 1, 5 et 17 n’est pas défini d’une manière claire, distincte et précise.

La revendication proposée 1 mentionne également les étapes suivantes :

- produire des dossiers dans une base de données pour stocker des données indicatives de chaque instrument d’échange;

- créer un index de base de données en fonction d’aspects uniques des dossiers;

- recevoir […] plusieurs soumissions pour un instrument d’échange donné […];

- procéder à des recherches dans les données associées audit instrument d’échange dans la base de données à l’aide de l’index de base de données.

Notre opinion préliminaire est que le but de l’étape de recherche dans la séquence d’étapes ci-dessus n’est pas clair, ce qui rend l’objet revendiqué indéfini. Il n’est pas clair pourquoi, à la réception d’une soumission pour un instrument d’échange donné, une recherche de l’instrument d’échange est effectuée et à quoi servent les résultats de la recherche. Notre opinion préliminaire est que les revendications proposées 5 et 17 présentent un problème semblable.

À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que les revendications proposées 1, 5 et 17 manquent de clarté et qu’elles ne seraient pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[84] En l’absence d’observations de la part du Demandeur, nous adoptons la position ci-dessus aux fins de la présente révision.

[85] Par conséquent, nous concluons que les revendications proposées 1, 5 et 17 manqueraient de clarté et ne seraient pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

Conclusion concernant les revendications proposées

[86] À la lumière de ce qui précède, notre opinion préliminaire est que les modifications apportées par les revendications proposées ne rendent pas la demande acceptable et ne sont donc pas des modifications nécessaires en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Conclusions

[87] Nous sommes d’avis que :

  • les revendications 1 à 45 au dossier visent un objet non brevetable et ne sont pas conformes à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 1 à 45 au dossier sont nouvelles et conformes à l’alinéa 28.2(1)b) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 1 à 45 au dossier n’auraient pas été évidentes à la lumière de l’art antérieur cité et des CGC pertinentes, et sont conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 12, 23 et 45 au dossier manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications proposées 1, 2, 3, 5, 6, 7, 10, 11, 14 et 17 visent un nouvel élément et ne seraient pas conformes à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications proposées 1 à 17 au dossier visent un objet non brevetable et ne sont pas conformes à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications proposées 1 à 17 auraient été évidentes à la lumière de l’art antérieur cité et des CGC pertinentes, et ne seraient pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications proposées 1, 5 et 17 manqueraient de clarté et ne seraient pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[88] Par conséquent, les revendications proposées ne peuvent pas être considérées comme une modification nécessaire en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Recommandation de la Commission

[89] À la lumière de ce qui précède, nous recommandons que la demande soit rejetée pour les motifs suivants :

Mehdi Ghayour

Helena Forbes

Stephen MacNeil

Membre

Membre

Membre

 


 

Décision du commissaire

[90] Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission de rejeter la demande pour les motifs suivants :

  • les revendications 1 à 45 au dossier visent un objet non brevetable et ne sont pas conformes à l’article 2 et au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 12, 23 et 45 au dossier manquent de clarté et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[91] En conséquence, conformément à l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’accorder un brevet pour cette demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le Demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

Konstantinos Georgaras

Commissaire aux brevets
Fait à Gatineau (Québec)
ce 2e jour de janvier 2024.

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