Brevets

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Référence : Hydril Company (Re), 2023 CACB 19

Décision du Commissaire n1652

Commissioner’s Decision # 1652

Date : 2023-07-17

SUJET :

O00

 

Évidence

 

TOPIC:

O00

 

Obviousness

 

 

 

 

 

 

 


Demande no 2 777 477

Application No. : 2,777,477


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 199(1) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251) (les « Règles sur les brevets »), la demande de brevet numéro 2 777 477 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets. La recommandation de la Commission d’appel des brevets et la décision du commissaire sont de rejeter la demande.

Agent du demandeur :

BERESKIN & PARR LLP/S.E.N.C.R.L., S.R.L.

Scotia Plaza

40 rue King Ouest, 40e étage

Toronto (Ontario) M5H 3Y2

 

 

 

 


Introduction

[1] La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet canadien refusée numéro 2 777 477 (la « demande en instance »), qui est intitulée « FILETAGES cunéiformeS à revêtement lubrifiant solide » et inscrite au nom de HYDRIL COMPANY (le « Demandeur »). La Commission d’appel des brevets (la « Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251) (les « Règles sur les brevets »). Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, la Commission recommande que le commissaire aux brevets rejette la demande au motif que les revendications au dossier auraient été évidentes.

Contexte

La demande

[2] La présente demande a été déposée sous le régime du Traité de coopération en matière de brevets, et la date de dépôt au Canada est le 12 octobre 2010. Elle est devenue accessible au public le 21 avril 2011.

[3] La présente demande porte sur une connexion de tubes filetée utilisée couramment dans l’industrie pétrolière, à savoir les connexions de tubes à filetage cunéiforme où un élément intérieur « tige » comporte un filetage cunéiforme extérieur qui est lié au filetage cunéiforme intérieur d’un élément extérieur « boîtier ». Le filetage cunéiforme diffère des autres filetages en ce sens que la largeur du filetage varie en fonction de la distance le long des tuyaux. Un composé à joint fluide appelé « pâte d’étanchéité » est normalement utilisé pour améliorer le joint du filetage et pour assurer la lubrification pendant [traduction] l’« assemblage » (c.-à-d. la formation du raccord de tuyau). Cependant, la pâte d’étanchéité peut entraîner des problèmes comme l’excès de pâte ne permettant pas une connexion complètement serrée ou même des dommages au filetage en raison d’une contrainte accrue à la connexion. La demande vise à résoudre les problèmes d’utilisation de la pâte d’étanchéité en liant de façon permanente un lubrifiant solide sur l’un des filetages ou sur les deux filetages mâle et femelle. Le lubrifiant solide peut comporter une ou deux couches, dont l’une peut être un revêtement résistant à la corrosion.

Historique de la poursuite

[4] Le 23 février 2021, une décision finale (« DF ») a été rédigée conformément au paragraphe 86(5) des Règles sur les brevets. La DF indiquait que la présente demande est irrégulière aux motifs que toutes les revendications 1 à 33 au dossier au moment de la rédaction de la DF (les « revendications au dossier ») auraient été évidentes pour une personne versée dans l’art à la date pertinente.

[5] Dans une réponse à la DF (« RDF ») du 22 juin 2022, le Demandeur a soumis un ensemble de revendications modifiées proposées 1 à 30 (les « revendications proposées ») et a soumis des arguments en faveur de la brevetabilité qui mettaient l’accent sur les revendications proposées.

[6] L’examinateur ayant jugé que la demande n’était pas conforme à la Loi sur les brevets conformément au paragraphe 86(7) des Règles sur les brevets, la demande a été transmise à la Commission pour révision le 25 octobre 2022, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs (« RM »). Le RM indiquait que les revendications au dossier demeuraient irrégulières pour évidence et que les revendications proposées ne corrigeaient pas cette irrégularité.

[7] Dans une lettre en date du 26 octobre 2022, la Commission a transmis au Demandeur une copie du RM et lui a demandé de confirmer qu’il souhaitait toujours la révision de la demande.

[8] Dans une réponse en date du 19 janvier 2023, le Demandeur a indiqué qu’il voulait que la Commission procède à une révision de la demande.

[9] Le comité de la Commission (le « Comité ») soussigné a été affecté à la révision de la demande en instance et à la présentation d’une recommandation au commissaire des brevets quant à la décision à rendre.

[10] Dans une lettre de révision préliminaire (« lettre de RP ») envoyée le 12 avril 2023, le Comité a exposé son analyse préliminaire de la question de l’évidence au regard des revendications au dossier et des revendications proposées. L’opinion préliminaire du Comité était que les revendications au dossier auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art et que les revendications proposées ne corrigeraient pas cette irrégularité.

[11] La lettre de RP a également donné au Demandeur une occasion de présenter des observations orales ou écrites.

[12] Lors d’une conversation téléphonique le 26 avril 2023, le Demandeur a refusé l’occasion d’une audience orale et a demandé que la date limite pour présenter des observations écrites énoncées dans la lettre de RP soit repoussée.

[13] Une lettre confirmant la prolongation du délai accordé pour présenter des observations écrites et confirmant le refus d’une audience orale a été envoyée au Demandeur le 2 mai 2023.

[14] Le 30 mai 2023, le Demandeur a présenté des observations écrites (la « RRP ») en réponse à l’opinion préliminaire exposée dans la lettre de RP. Aucune autre modification à la demande n’a été proposée.

[15] Le Comité a terminé l’examen de la présente demande et fournit son analyse finale ci-dessous.

Question

[16] La question à trancher dans le cadre de la présente révision consiste à déterminer si les revendications au dossier auraient été évidentes pour une personne versée dans l’art.

[17] Après avoir examiné les revendications au dossier, nous examinons les revendications proposées présentées dans la RDF afin de déterminer si elles sont considérées comme une modification nécessaire en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Interprétation téléologique

Principes juridiques

[18] Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc, 2000 CSC 66, et à Whirlpool Corp c. Camco Inc, 2000 CSC 67, l’interprétation téléologique est faite du point de vue d’une personne versée dans l’art à la lumière des connaissances générales courantes (« CGC ») pertinentes, en tenant compte de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins. En plus d’interpréter le sens des termes d’une revendication, l’interprétation téléologique distingue les éléments essentiels de la revendication des éléments non essentiels. La question de savoir si un élément est essentiel dépend de l’intention exprimée dans la revendication ou déduite de celle-ci et de la question de savoir s’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art qu’une variante a un effet matériel sur le fonctionnement de l’invention.

[19] Tous les éléments présentés dans une revendication sont présumés essentiels, à moins que le contraire soit établi ou qu’une telle présomption soit contraire au libellé de la revendication.

Analyse

La personne versée dans l’art

[20] Dans la lettre de RP, à la page 4, nous exposons notre opinion préliminaire concernant la détermination de la personne versée dans l’art, la modifiant quelque peu par rapport à ce qui a été proposé dans la DF :

[traduction]

Dans la DF, à la page 2, la personne versée dans l’art a été qualifiée en ces termes :

La personne versée dans l’art est une équipe technique formée de plusieurs personnes qui connaissent les conduites d’extraction de pétrole.

Le Demandeur n’a formulé aucun commentaire sur ce qui précède dans la RDF.

Nous estimons à titre préliminaire que la définition ci-dessus devrait être légèrement modifiée. Compte tenu de la nature de l’invention divulguée et revendiquée – à savoir, un revêtement pour un type de joint de tuyau – et des renseignements énoncés dans la demande sous le titre « Contexte », nous définissons la personne versée dans l’art de façon préliminaire en ces termes :

• une équipe technique formée de plusieurs personnes qui connaissent bien la conception des conduites d’extraction du pétrole, y compris la conception des joints de tuyaux et les méthodes de réduction de l’usure et de l’érosion.

[21] Dans le document de RRP à la page 5, le Demandeur tente de caractériser la personne versée dans l’art en fonction du [traduction] « problème technique objectif » à résoudre par l’invention alléguée. Le Demandeur déclare que [traduction] « [l]a personne versée dans l’art est généralement qualifiée dans le domaine technique du problème technique objectif » et qu’une telle personne est [traduction] « versée dans l’art des raccords de filetage cunéiforme… ».

[22] Cerner un [traduction] « problème technique objectif » fait partie de l’évaluation menée par l’Office européen des brevets pour déterminer si une invention revendiquée représente ou non une étape inventive (voir les Directives relatives à l’examen pratiqué à l’Office européen des brevets, édition de mars 2023) et fait partie d’une approche généralement appelée « approche problème-solution ». La question est tranchée en fonction d’une comparaison de l’invention revendiquée et de l’art antérieur le plus proche (voir 5.2 Formulation du problème technique objectif [epo.org]). Le droit canadien des brevets et la pratique du Bureau des brevets ne comprennent pas une telle évaluation pour établir la personne versée dans l’art ou dans les CGC pertinentes. De même, l’approche en quatre étapes énoncée dans Apotex Inc c. Sanofi-Synthelabo Canada Inc, 2008 CSC 61 [Sanofi] ne prévoit pas une telle évaluation dans le cadre de l’analyse de l’évidence, bien qu’il puisse être pertinent de déterminer le problème que le Demandeur a tenté de résoudre et s’il était connu ou non antérieurement.

[23] Malgré la tentative du Demandeur dans la RRP de lier le problème technique objectif à la détermination de la personne versée dans l’art, même dans le cadre de l’évaluation de l’activité inventive effectuée par l’Office européen des brevets, la personne versée dans l’art (et les CGC d’une telle personne) est déterminée indépendamment de la détermination de tout problème technique objectif.

[24] Récemment, les caractéristiques de base de la personne versée dans l’art ont été réitérées par la Cour fédérale dans Janssen Inc c. Apotex Inc, 2022 CF 996 aux paragraphes 69 à 71 :

[traduction]

69 La personne fictive versée dans l’art ou la « personne versée dans l’art » est une construction juridique qui intègre un certain nombre de concepts qui guident une approche appropriée pour résoudre les questions d’interprétation des revendications, de contrefaçon et de validité dans une décision en matière de brevet.

70 La personne versée dans l’art possède un niveau de compétence et de connaissances nécessaires pour apprécier la nature et la description de l’invention à un niveau technique : Whirlpool, au par. 53. Il s’agit du niveau ordinaire de compétence et de connaissance de l’art ou de la science particulier auquel se rapporte le brevet : Free World, au par. 44. La personne versée dans l’art incarne les « connaissances générales courantes » (CGC) généralement connues et acceptées dans le domaine, et elle fait preuve d’une diligence raisonnable pour se tenir au courant des progrès : Pfizer Canada Inc c. Teva Canada Limited, 2017 CF 777, au par. 185.

71 Lorsqu’un brevet se rapporte à de multiples domaines scientifiques ou techniques, la personne qualifiée peut se composer d’une équipe de personnes : Amgen Inc c. Pfizer Canada ULC, 2020 CF 522, au par. 172. Toutefois, la personne versée dans l’art n’est pas définie sur la base d’une revendication par revendication : Teva Canada Limited c. Janssen Inc, 2018 CF 754, au par. 236, conf. par 2019 CAF 273, autorisation d’appel à la CSC refusée, 39007 (7 mai 2020).

[25] Comme il est indiqué ci-dessus, la personne versée dans l’art est versée dans l’art ou la science auquel se rapporte le brevet ou la demande de brevet. Dans la RDF à la page 5, le Demandeur limite l’art à [traduction] « l’art des raccords de filetage cunéiforme ». Toutefois, cette affirmation était fondée sur la relation alléguée entre le problème technique objectif et la personne versée dans l’art.

[26] Nous reconnaissons que dans la présente demande au paragraphe [0001], l’objet de la divulgation est indiqué comme étant les raccords de filetage cunéiforme. L’analyse de l’art antérieur met l’accent sur les configurations de filetage cunéiforme et sur les problèmes bien connus liés à l’utilisation de tels raccords, l’objet de la présente demande étant de résoudre ces problèmes.

[27] Cependant, comme il est indiqué au paragraphe [0002], [traduction] « [u]n type de raccord fileté couramment utilisé dans les produits tubulaires de pays pétrolifères est connu sous le nom de filetage cunéiforme ». [Soulignement ajouté] Étant donné que, comme l’a reconnu le Demandeur dans ce passage, les raccords de filetage cunéiforme ne sont qu’un type de raccord utilisé dans l’art d’extraction de pétrole, à notre avis, il ne serait pas plausible que la personne versée dans l’art soit si spécialisée qu’elle n’aurait que des compétences et des connaissances dans un type particulier de raccord fileté. Étant donné que divers types de raccords filetés feraient partie d’un tel art, on s’attendrait à ce qu’un technicien dans un tel domaine rencontre et connaisse plusieurs types de raccords.

[28] Nous notons également que dans la RRP, le Demandeur n’a pas contesté les CGC pertinentes, comme il est indiqué dans la lettre de RP, qui comprenait des connaissances plus générales sur l’extraction de pétrole souterrain et le filetage de tuyaux en général. La limitation de la personne versée dans l’art à une personne versée dans l’art qui n’est versée que dans les raccords de filetage cunéiforme serait incompatible avec ces connaissances.

[29] À la lumière de ce qui précède, nous ne pouvons accepter l’opinion du Demandeur à l’égard de la personne versée dans l’art énoncée dans la RRP. À notre avis, la détermination de la personne versée dans l’art énoncée dans la lettre de RP est plus appropriée compte tenu de l’art auquel se rapporte la demande. Nous poursuivons en conséquence.

Les connaissances générales courantes pertinentes

[30] Dans la lettre de RP, aux pages 4 à 5, nous présentons les CGC pertinentes, qui comprenaient des points de la DF et d’autres points cernés par le présent Comité et tirés de la section sur l’art antérieur de la présente demande :

[traduction]

Dans la DF, à la page 2, les CGC pertinentes sont indiquées comme incluant les points suivants :

• extraction du pétrole souterrain;

• filetages de tuyaux, plus particulièrement le filetage cunéiforme;

• lubrifiant de filetage et pâte d’étanchéité;

• lubrifiants solides; et

• inhibition de la corrosion de l’équipement d’extraction de pétrole.

Aux points généraux ci-dessus, nous ajouterions les points suivants, tirés de la section « Art antérieur » aux pages 1 à 3 de la présente demande et caractérisés comme ayant été couramment connus :

• l’utilisation bien connue de filetages cunéiformes dans l’industrie pétrolière, lesquels filetages sont caractérisés par une augmentation de la largeur le long de leur longueur dans des directions opposées sur une section de tuyau extérieur d’un élément tige et une section de tuyau extérieure d’un élément boîtier;

• que le taux de variation de la largeur le long d’un filetage cunéiforme est appelé le « rapport du coin »;

• que le joint de filetage dans le filetage cunéiforme est obtenu par pression de contact causée par l’interférence entre les flancs des filets des éléments tige et boîtier pendant l’assemblage de la connexion (appelé « assemblage »);

• qu’un composé à joint fluide appelé « pâte d’étanchéité » est normalement appliqué au filetage cunéiforme avant l’assemblage afin d’améliorer le joint de filetage et d’agir comme lubrifiant pendant l’assemblage ou le démontage (le « démantèlement »);

• les problèmes bien connus liés à l’utilisation de la pâte d’étanchéité dans les filetages cunéiformes, y compris l’excès de pâte d’étanchéité qui est piégée pendant l’assemblage et qui donne de fausses mesures de serrage, ce qui entraîne un joint mal serré et des dommages possibles à la connexion;

• les tentatives visant à atténuer les problèmes liés à l’utilisation de la pâte d’étanchéité, comme les conceptions de filets de tuyau, pour atténuer l’accumulation de pression provenant de l’excès de pâte d’étanchéité, restreindre la quantité de pâte d’étanchéité utilisée, contrôler la vitesse de l’assemblage du joint de façon à permettre l’expulsion de l’excès de pâte d’étanchéité avant qu’elle soit piégée, et serre en plus d’une étape pendant l’assemblage, de façon à expulser la pâte d’étanchéité le long des filets (appelée « serrage progressif »);

• les problèmes qui peuvent survenir en raison de la pâte d’étanchéité piégée qui mène à un joint de filetage inadéquat (appelé « espacement »), comme la perte ultérieure de la pression et le relâchement du joint. De plus, dans les applications de service à température élevée, la pâte d’étanchéité piégée peut s’écouler entre les filetages cunéiformes et entraîner des fuites aux joints;

• que des mesures supplémentaires telles que la vitesse d’assemblage plus lente et le serrage progressif conduisent à des temps d’assemblage plus longs et à une productivité réduite.

Le Demandeur n’a formulé aucun commentaire dans la RDF en ce qui concerne les CGC pertinentes. Nous procédons sur la base de ce qui précède.

[31] Dans la RRP, aux pages 2 à 5, le Demandeur présente des renseignements sur les caractéristiques et les considérations couramment connues de la conception et de la fabrication des filetages cunéiformes et des autres filetages.

[32] En particulier, le Demandeur fait valoir, à la page 3 de la RRP, que les filetages cunéiformes sont très sensibles aux variations dans la conception du filet, que les [traduction] « [v]ariations des flancs porteur et d’engagement par rapport à la valeur nominale le long du filetage peuvent entraîner des variations de la pression de contact qui sont amplifiées par le verrouillage axial du filetage cunéiforme entre les flancs porteur et d’engagement » et que [traduction] « [afin de] maintenir la pression de contact constante l’énergie dans la connexion après l’assemblage, il est important de garder les variations des flancs dans le filetage cunéiforme aussi petites que possible. »

[33] En ce qui concerne les connexions de filetage autres que cunéiformes, aux pages 3 à 4 de la RRP, le Demandeur soutient que les préoccupations relatives aux filetages cunéiformes ne s’appliquent pas à ces connexions. Par exemple, le Demandeur affirme que, parmi d’autres caractéristiques, dans les connexions de filetage qui ne sont pas cunéiformes, il n’y a pas la même interférence de filetage entre les flancs porteur et les flancs d’engagement générée lors d’un petit déplacement angulaire à l’étape finale de l’assemblage. Pour les connexions de filetages autres que cunéiformes, [traduction] « après l’assemblage, il y a généralement un dégagement entre les flancs d’engagement des sommets de l’élément tige et les fonds de l’élément boîtier ». Selon le Demandeur, « il faut moins de pression de contact et moins de serrage par rapport à une connexion de filetage cunéiforme qui repose sur l’interférence du filetage entre les flancs porteur et les flancs d’engagement ».

[34] Comme il est indiqué à la page 4 de la RRP :

[traduction]

En raison de l’espace aux flancs d’engagement, il n’y a pas d’« amplification » de la pression de contact qui résulte du verrouillage axial du filetage comme c’est le cas pour le filetage cunéiforme. Par conséquent, les connexions de filetage qui ne sont pas cunéiformes sont généralement beaucoup moins sensibles aux variations par rapport aux valeurs nominales dans les flancs que les connexions de filetage cunéiforme.

[35] Le Demandeur poursuit sa comparaison des connexions de filetage cunéiforme et des autres connexions et finit par conclure que :

[traduction]

[…] la conception de connexions de filetage cunéiforme exige la prise en compte d’exigences et de problèmes différents de la conception de filetages autres que cunéiforme. En particulier, les exigences de tolérance pour la connexion d’un filetage cunéiforme sont élevées.

[36] À la page 5 de la RRP, le Demandeur fait état des préoccupations que la personne versée dans l’art aurait soulevées en apportant des changements à une connexion de filetage cunéiforme :

[traduction]

Cette personne versée dans l’art serait également consciente que toute perturbation, qui est présente de façon permanente sur les filets, pourrait avoir une incidence sur la précision des flancs et ainsi introduire une autre cause potentielle d’une mesure prématurée de l’assemblage. Un vernis de glissement permanent est une telle perturbation.

Par conséquent, la personne versée dans l’art serait sérieusement préoccupée par l’application d’un revêtement permanent à un filetage cunéiforme, en particulier par l’uniformité de l’épaisseur de la couche et la façon d’appliquer la couche, ce qui introduirait d’autres variations et affecterait la connexion. En outre, l’ajout d’une couche permanente nécessiterait de repenser la connexion, en particulier pour établir le contact entre les flancs au moment opportun.

[37] Même si bon nombre des détails énoncés dans la RRP ne se trouvent pas dans les CGC pertinentes, nous n’avons aucune raison de douter que les caractéristiques des connexions du filetage cunéiforme et du filetage autre que cunéiforme décrites par le Demandeur dans la RRP étaient bien connues. Nous n’avons pas non plus de raison de douter que la personne versée dans l’art, qui, comme il est indiqué ci-dessus, ne se limite pas au domaine des connexions de filetage cunéiforme, aurait été au courant des préoccupations liées aux changements aux connexions de filetage cunéiforme énoncés à la page 5 de la RRP et énoncées ci-dessus.

[38] Cependant, nous ne sommes pas d’accord avec le Demandeur quant à l’effet de ces connaissances sur la question de savoir si l’objet des revendications au dossier aurait été évident, comme il en est question dans l’évaluation de l’évidence ci-dessous.

Les revendications au dossier

[39] La présente demande contient les revendications indépendantes 1, 13 et 21 visant un branchement tubulaire au moyen de filetage cunéiforme à revêtement lubrifiant solide appliqué à au moins un des filetages mâle ou femelle. La revendication 1 précise en outre que le revêtement comporte au moins deux couches et que l’une d’elles comprend un revêtement sec résistant à la corrosion solide avec des particules de zinc. La revendication 13 précise en outre que le revêtement comporte au moins deux couches et que l’une d’elles est un mélange de deux lubrifiants différents, l’un d’eux étant du disulfure de molybdène.

[40] Les revendications indépendantes 14 et 17 visent une méthode de fabrication d’un filetage cunéiforme où un revêtement lubrifiant solide est appliqué à au moins un des filetages mâle ou femelle. La revendication 14 précise en outre que le revêtement lubrifiant solide comprend deux couches de matériau.

[41] Les revendications 17 et 21 représentent les revendications les plus larges de chaque groupe et sont reproduites ci-dessous à titre d’exemples de l’objet revendiqué :

[traduction]

17. Une méthode de fabrication d’une connexion comportant des filetages cunéiformes, la méthode comprenant : usinage des filetages cunéiformes intérieur sur un élément tige et des filetages extérieurs sur un élément boîtier, où les filetages cunéiformes intérieurs et extérieurs sont configurés pour correspondre; liant de façon permanente un revêtement lubrifiant solide de composition uniforme sur presque tous les filetages cunéiformes intérieurs et extérieurs ou les deux; et une fois le revêtement lubrifiant solide durci, en faisant une connexion scellée en assemblant les filetages cunéiformes intérieurs et extérieurs, où le revêtement lubrifiant solide reste solide tout au long de l’assemblage de ladite connexion scellée.

21. Une connexion tubulaire comprenant :

un élément tige ayant des filetages cunéiformes extérieurs;

un élément boîtier ayant des filetages cunéiformes intérieurs;

où les filetages cunéiformes intérieurs ou extérieurs ou les deux sont liés de façon permanente à un revêtement lubrifiant solide qui a une composition uniforme sur presque tous les filetages cunéiformes intérieurs ou extérieurs ou les deux,

où le lubrifiant solide est durci,

où, alors que le lubrifiant solide restait solide, les filetages cunéiformes intérieurs ont été assemblés avec les filetages cunéiformes extérieurs pour établir une connexion scellée entre l’élément tige et l’élément boîtier.

[42] La figure 2 de la présente demande, reproduite ci-dessous, illustre un élément tige de filetage cunéiforme avec le revêtement lubrifiant solide des revendications au dossier. À des fins de référence, l’arrangement général de l’art antérieur des éléments tige et boîtier est illustré à la figure 1A, également reproduite ci-dessous.

Signification des éléments de la revendication

[43] Dans la lettre de RP, à la page 7, nous avons indiqué que, même si aucun problème n’a été soulevé dans la DF relativement à la clarté ou à la portée des revendications, deux précisions mineures du libellé de la revendication sont devenues pertinentes au cours de notre examen préliminaire :

[traduction]

Premièrement, le « revêtement lubrifiant solide », tel qu’il est utilisé dans les revendications, peut comprendre une couche composée d’un revêtement sec résistant à la corrosion, qui n’est pas en soi un lubrifiant. Cela est évident dans la revendication 1 en soi, qui précise un revêtement lubrifiant solide dont au moins une des couches est un revêtement sec résistant à la corrosion.

Deuxièmement, l’expression « lié de façon permanente » est interprétée comme signifiant à la page 5 de la présente demande :

[…] l’adhérence du revêtement lubrifiant solide aux surfaces de filetage cunéiforme après que le revêtement est correctement durci, de sorte que le revêtement lubrifiant solide 310 ne « s’écoule » pas pendant l’assemblage de la connexion, mais demeure plutôt comme une structure rigide.

La pertinence de ces précisions devient claire dans l’analyse de l’évidence ultérieure à l’étape 3 de Sanofi.

[44] Le Demandeur n’a fait aucun commentaire à cet égard. Nous appliquons les interprétations ci-dessus dans notre analyse de l’évidence ci-dessous.

Les éléments essentiels

[45] Comme il est indiqué dans la lettre de RP, à la page 7, la DF n’a pas présenté une analyse de l’interprétation téléologique des revendications au dossier. Étant donné que la personne versée dans l’art aurait compris que les revendications ne comprennent aucun libellé indiquant que les éléments de chaque revendication étaient un mode de réalisation facultatif, préférentiel ou de rechange, à notre avis préliminaire, tous les éléments des revendications au dossier sont considérés comme essentiels et sont pris en compte dans notre analyse de l’évidence ci-dessous.

[46] Le Demandeur n’a fait aucun commentaire à l’égard de cette position. Nous procédons au motif que tous les éléments des revendications sont essentiels.

Évidence

Principes juridiques et pratique du Bureau

[47] L’article 28.3 de la Loi sur les brevets exige que l’objet revendiqué ne soit pas évident :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, soit plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, soit, si la date de la revendication est antérieure au début de cet an, avant la date de la revendication, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[48] Dans Sanofi, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, lorsqu’il s’agit d’évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes reproduite ci-dessous :

[traduction]

(1) a) Identifier la « personne versée dans l’art ».

b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui soustend la revendication ou son interprétation;

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituentelles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotentelles quelque inventivité?

[49] Nous avons appliqué l’approche en quatre étapes de Sanofi dans la lettre de RP et dans notre analyse ci-dessous.

Analyse

[50] Dans la lettre de RP, à la page 8, nous avons indiqué qu’après avoir examiné les documents d’art antérieur utilisés dans la DF, nous avons considéré l’un d’eux, D4, comme étant le plus pertinent et que l’irrégularité relative à l’évidence présentée dans la lettre de RP était fondée sur D4 et les CGC pertinentes :

[traduction]

Aux pages 2 à 4 de la DF, une analyse indique que toutes les revendications au dossier auraient été évidentes à la lumière du document d’art antérieur D6 à la lumière du document d’art antérieur D4, présenté ci-dessous :

D4:US20040113423A1 Dell'Erba et al. Publié : Le 17 juin 2004

D6:US20070170722A1 Reynolds, JR. et al. Publié : Le 26 juillet 2007

La DF fait également référence au document d’art antérieur suivant qui a été mentionné dans D4 :

D8:US4414247A Hübecker et al. Publié : Le 8 novembre 1983

Après avoir examiné tous les documents d’art antérieur, le Comité est d’avis préliminaire que D4 est le document d’antériorité le plus pertinent. L’évidence des revendications au dossier fondées sur une combinaison de D6 et de D4 n’est plus recherchée. Nous ne faisons pas non plus référence au document d’art antérieur D8 dans notre analyse.

Le document d’art antérieur D4, en combinaison avec les CGC pertinentes, constitue la base de l’analyse de l’évidence ci-dessous, qui est présentée à l’aide de l’approche en quatre étapes de Sanofi.

[51] Nous avons également noté que les observations présentées par le Demandeur dans la RDF portaient principalement sur les revendications proposées et que, par conséquent, ces observations seraient traitées dans le cadre de l’évaluation des revendications proposées, comme elles le sont dans cette recommandation.

(1)a) Identifier la « personne versée dans l’art »

[52] La personne versée dans l’art a été définie ci-dessus dans la section « Interprétation téléologique ». Nous appliquons la même définition ici.

(1)b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne

[53] Les CGC pertinentes ont également été définies dans la section « Interprétation téléologique » et nous appliquons les mêmes CGC ici.

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[54] Dans la lettre de RP, aux pages 8 à 9, nous avons indiqué que, bien que la DF ait présenté un concept inventif courant pour les revendications au dossier, nous avons pris la combinaison d’éléments essentiels de chaque revendication pour représenter leurs concepts inventifs individuels :

[traduction]

Dans la DF, à la page 2, un concept inventif courant des revendications a été énoncé :

Le concept inventif courant de toutes les revendications concerne l’utilisation d’un lubrifiant solide durci sur un filetage cunéiforme plutôt que de la « pâte d’étanchéité » afin d’empêcher une mesure de serrage fausse et élevée ou d’endommager la connexion en raison de la pression de la pâte piégée ou accumulée.

Comme nous l’avons indiqué dans la section Interprétation téléologique, nous avons considéré tous les éléments des revendications comme essentiels et, aux fins de la présente évaluation, nous prenons la combinaison des éléments essentiels de chaque revendication pour représenter son concept inventif.

[55] Le Demandeur n’a pas formulé de commentaires sur la position susmentionnée dans la RRP. Nous procédons de la même façon ici.

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui soustend la revendication ou son interprétation

[56] Dans la lettre de RP, aux pages 9 à 11, nous avons examiné le document d’art antérieur D4 et relevé les différences entre les revendications indépendantes au dossier et D4. Nous étions d’avis préliminaire qu’il y avait une différence commune entre les revendications indépendantes et D4, à savoir que D4 concernait un agencement de filetages à espacement régulier, tandis que les revendications au dossier portaient sur un agencement de filetages cunéiformes (faisant tous deux partie d’une structure tige et boîtier) :

[traduction]

Le document d’art antérieur D4 présente un tuyau métallique fileté destiné à l’industrie de l’extraction de pétrole. Le tuyau est muni d’une protection de surface sur la partie filetée pour augmenter la résistance à la corrosion et au grippage (parties du filetage enlevé par frottement excessif à l’assemblage ou au démantèlement) dans une gamme de conditions environnementales et opérationnelles, même après plusieurs opérations d’assemblage et de démontage (démantèlement) (D4 au paragraphe [0013]). La figure 1 de D4, reproduite ci-dessous, illustre l’agencement de connexion de tuyau de base divulgué où un élément fileté extérieur est couplé à un élément fileté intérieur, comme dans l’agencement tige et boîtier des revendications au dossier.

D4 divulgue que la partie filetée du tuyau a une rugosité de surface (Ra) comprise entre 2,0 µm et 6,0 µm. La surface du filetage est couverte d’une première couche uniforme d’un revêtement sec résistant à la corrosion et d’une deuxième couche uniforme d’un revêtement sec lubrifiant (D4 au paragraphe [0016]). D4 divulgue également que la couche de revêtement sur la partie filetée peut comprendre une première couche uniforme d’un revêtement sec résistant à la corrosion contenant une dispersion de particules de lubrifiant solides (D4 au paragraphe [0023]). Un autre mode de réalisation envisage une première couche d’un revêtement sec résistant à la corrosion comprenant une résine époxy contenant des particules de zinc et ayant une épaisseur comprise entre 10 µm et 20 µm, de préférence entre 10 µm et 15 µm (D4 au paragraphe [0024]). Un autre mode de réalisation comprend une deuxième couche de revêtement sec lubrifiant composé d’un agent liant inorganique et d’un mélange de particules de lubrifiants solides, dont l’une est le disulfure de molybdène, d’une épaisseur comprise entre 10 µm et 20 µm (D4 au paragraphe [0025]).

Il est révélé que la rugosité souhaitée de la surface métallique peut être obtenue par plusieurs méthodes, y compris le sablage, le revêtement de phosphate ou d’autres procédés mécaniques ou chimiques équivalents (D4 au paragraphe [0029]).

La couche de revêtement sec résistant à la corrosion contenant la dispersion de particules de lubrifiant solide peut être appliquée par pulvérisation, brossage, trempage ou toute autre méthode qui donne une épaisseur de revêtement contrôlée (D4 au paragraphe [0040]).

Des essais ont été effectués sur deux différentes tailles de tuyaux, tous deux au moyen d’un revêtement sec résistant à la corrosion (une résine époxy contenant du zinc) et d’un revêtement sec lubrifiant comprenant un agent liant inorganique avec du disulfure de molybdène et des lubrifiants solides. La préparation de surface était sensiblement la même. Le nombre de cycles d’assemblage et de démantèlement était respectivement de 5 et 10 (D4 aux paragraphes [0042] à [0050]).

D4 indique qu’à la suite des essais, qui ont comporté plusieurs cycles d’assemblage et de démantèlement, aucun frottement n’a été observé sur la connexion et que la connexion avait un comportement d’assemblage très stable.

Différences par rapport à la revendication 1

En se concentrant d’abord sur la revendication indépendante 1, D4 divulgue clairement des éléments tige et boîtier avec un filetage extérieur et intérieur respectivement. D4 divulgue également clairement un revêtement lubrifiant solide qui peut comprendre deux couches, dont l’une peut être un revêtement sec résistant à la corrosion fait de résine époxy contenant des particules de zinc, conformément au sens de ce terme énoncé dans la section « Interprétation téléologique » et évident dans le langage de la revendication 1 elle-même.

En ce qui concerne le revêtement de D4 qui est « lié de façon permanente », comme nous l’avons vu plus haut, le revêtement de D4 est destiné à subir de multiples cycles d’assemblage et de démantèlement sans endommager le filetage ou le sceau, ce qui, selon notre avis préliminaire, indique à la personne versée dans l’art que le revêtement demeure intact. À cet égard, la personne versée dans l’art comprendrait que D4 divulgue que le revêtement demeure une structure rigide, conformément à la définition énoncée dans la présente demande et mentionnée ci-dessus dans la section « Interprétation téléologique ».

De plus, bien que D4 n’indique pas explicitement que la résine époxy est durcie, selon notre avis préliminaire, la personne versée dans l’art comprendrait d’après D4 que pour que le revêtement reste intact après plusieurs cycles d’assemblage et de démantèlement, l’époxy doit être durci.

Selon notre avis préliminaire, la seule différence entre la revendication 1 et la revendication D4 est que la revendication 1 précise que le filetage est un filetage cunéiforme, D4 divulguant un agencement de filetage régulièrement espacé avec des dents ayant un sommet perpendiculaire à la surface du fond du filetage et un flanc à un angle oblique par rapport au fond.

Différences par rapport à la revendication 13

La revendication 13 diffère de la revendication 1 en ce sens qu’au lieu de réciter les détails d’un revêtement sec résistant à la corrosion, la revendication 13 précise que l’une des deux couches de matériau comprend un mélange de lubrifiants solides dans un agent liant inorganique, l’un des lubrifiants étant le disulfure de molybdène.

Comme il a été mentionné ci-dessus et indiqué au paragraphe [0025] de D4, la deuxième couche du revêtement qui y est divulguée peut comprendre de tels matériaux.

À notre avis préliminaire, la différence entre la revendication 13 et la revendication D4 est la même que pour la revendication 1, à savoir que le filetage est un filetage cunéiforme.

Différences par rapport à la revendication 14

La revendication 14 précise une méthode de fabrication d’une connexion comportant un élément tige et un élément boîtier avec des filetages cunéiformes et formant un revêtement lubrifiant solide d’au moins deux couches de matériau sur les filetages. La connexion est alors formée et le revêtement reste solide pendant le processus de connexion.

Nous avons déjà discuté de la façon dont D4 divulgue les éléments filetés tiges et boîtiers et la façon dont un revêtement lubrifiant solide qui comprend deux couches est formé sur les filetages et reste intact après plusieurs cycles d’assemblage et de démantèlement. La méthode pour former la connexion est évidente compte tenu de la description des étapes d’assemblage et de démantèlement.

Par conséquent, la différence en ce qui concerne la revendication 14 est encore une fois que le filetage est un filetage cunéiforme.

Différences par rapport à la revendication 17

La revendication 17 diffère de la revendication 14 en ce sens que la revendication 17 ne précise que la présence d’un revêtement lubrifiant solide. Elle ne prévoit pas les détails supplémentaires selon lesquels ce revêtement doit avoir au moins deux couches. D4 divulgue un revêtement lubrifiant solide lié aux éléments filetés tiges et boîtiers.

Encore une fois, la seule différence par rapport à D4 est que les filetages de la revendication 17 sont des filetages cunéiformes.

Différences par rapport à la revendication 21

La revendication 21 vise une connexion tubulaire présentant les caractéristiques énoncées dans la méthode de fabrication de la revendication 17. Pour cette raison, la différence par rapport à D4 est également que les filetages sont des filetages cunéiformes.

Les revendications dépendantes ajoutent d’autres caractéristiques aux revendications indépendantes dont l’évidence sera évaluée en application de l’étape 4 de Sanofi.

[57] Le Demandeur n’a pas contesté la différence courante entre les revendications indépendantes et le document d’art antérieur D4. Toutefois, dans la RRP, aux pages 5 à 6, le Demandeur soutient que la personne versée dans l’art, en cherchant une solution au problème technique objectif dans le domaine technique des connexions de filetage cunéiforme, n’aurait pas trouvé D4 puisque cet art antérieur ne fait pas partie du même domaine technique.

[58] Nous avons déjà exposé ci-dessus nos avis sur l’applicabilité du problème technique objectif dans cette évaluation. De plus, nous avons expliqué nos raisons pour lesquelles nous ne sommes pas d’accord pour dire que la personne versée dans l’art se contente d’avoir des compétences ou des connaissances dans le domaine des connexions de filetage cunéiforme. Plutôt, une équipe formée de plusieurs personnes qui aurait formé la personne versée dans l’art aurait bien connu bien la conception des conduites d’extraction du pétrole de façon générale, y compris la conception des joints de tuyaux et les méthodes connexes de réduction de l’usure et de l’érosion. Ainsi, un document d’art antérieur tel que D4, qui divulgue une connexion filetée de tuyau utilisée dans l’industrie de l’extraction du pétrole, en particulier le type tige et boîtier comme dans les revendications au dossier, aurait fait partie du domaine d’art de la personne versée dans l’art.

[59] De plus, aux fins de l’étape 3 de l’approche en quatre étapes de Sanofi, la question de savoir si un document serait trouvé ou non n’est pas une raison pour l’exclure de l’examen (Corporation de soins de la santé Hospira c. Kennedy Trust for Rheumatology Research, 2020 CAF 30, aux par. 86 à 87).

[60] Les observations du Demandeur concernant ce que la personne versée dans l’art, même ayant connaissance de D4, aurait fait, seront traitées à l’étape 4.

[61] L’objet supplémentaire des revendications dépendantes sera également traité à l’étape 4, comme c’était le cas dans la lettre de RP.

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituentelles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotentelles quelque inventivité?

[62] Dans la lettre de RP, aux pages 12 à 13, nous présentons nos raisons préliminaires pour lesquelles l’objet des revendications indépendantes au dossier aurait été évident pour la personne versée dans l’art au regard du document d’art antérieur D4 et des CGC pertinentes :

Revendications indépendantes 1, 13, 14, 17 et 21

[traduction]

Comme il a été mentionné précédemment en ce qui concerne les CGC pertinentes, la présente demande décrit les problèmes qui étaient bien connus en liaison avec l’utilisation de la pâte d’étanchéité conventionnelle pour sceller un filetage cunéiforme, comme l’espacement, qui peut plus tard conduire à une défaillance de la connexion en raison de la perte de pression et de la fuite de la pâte d’étanchéité à des températures élevées. De plus, l’excès de pâte d’étanchéité piégé pendant l’assemblage peut donner de fausses mesures de serrage, ce qui entraîne un serrage inadéquat du joint et peut endommager la connexion. Tels sont les problèmes que la présente demande visait à régler. La présente demande décrit également les tentatives antérieures visant à atténuer ces problèmes, comme le serrage progressif (serrage par étape) du joint pour assurer une connexion étroite.

Il est possible que l'identification d'un problème soit suffisante en soi pour fournir l’ingéniosité inventive nécessaire pour justifier un brevet (Cabot Corp c. 318602 Ontario Ltd [1988], 20 CPR [3d] 132 [CF 1re inst], citant H.G. Fox dans son ouvrage « Canadian Law and Practice Relating to Letters Patent for Inventions », 4e éd. [Toronto : Carswell, 1969], aux pages 70 et 71). Toutefois, en l’espèce, le problème général faisait partie des CGC pertinentes et D4 y avait déjà apporté une solution.

En particulier, D4 – bien qu’il n’y soit pas question de filetages cunéiformes – décrit les problèmes qui ont mené aux configurations de revêtement solide divulguées qui entrent dans la portée des revendications indépendantes au dossier.

D4, au paragraphe [0006], traite de la question du grippage qui se produit lors du frottement du filetage et précise qu’il est courant d’utiliser la pâte d’étanchéité comme lubrifiant pour éviter ce problème. Toutefois, D4, au paragraphe [0008], traite également du problème connu au moment de la « surapplication », où l’application d’une trop grande quantité de pâte d’étanchéité conduit à ce qu’elle ne soit pas évacuée correctement pendant l’assemblage de la connexion. La pâte piégée peut développer une pression élevée dans la connexion qui peut causer des dommages au tuyau. Les traitements de surface de D4, qui sont également ceux énoncés dans les revendications indépendantes au dossier, ont été élaborés pour régler ces problèmes. De cette façon, D4 divulgue la même solution au même problème que dans la présente demande, à la seule exception que la présente demande met l’accent sur le problème en ce qui concerne les filetages cunéiformes, alors que D4 ne se concentre pas sur un type de filetage particulier (D4 illustre un exemple de filetage dans les figures 1 et 2, mais ne le décrit pas).

Comme le Demandeur l’a reconnu dans la section « Art antérieur » de la présente demande (demande en instance au paragraphe [0002]), les connexions de tuyau de type filetage cunéiforme étaient bien connues dans l’industrie pétrolière, tout comme les problèmes liés à l’utilisation de la pâte d’étanchéité sur ces connexions.

Selon notre avis préliminaire, la personne versée dans l’art, ayant connaissance de l’information divulguée par D4, y compris des problèmes bien connus qui ont mené à cette invention, et étant confrontée essentiellement aux mêmes problèmes d’utilisation de filetages cunéiformes courants, aurait immédiatement reconnu que les configurations de revêtement solide de D4 régleraient […] ces problèmes. Ce faisant, la personne versée dans l’art en serait arrivée directement et sans difficulté à l’objet de la revendication (le critère classique de l’évidence de Beloit Canada Ltée c. Valmet Oy, 8 CPR [3d] 289, à la p. 294, récemment cité avec approbation dans Janssen Inc c. Sandoz Canada Inc., 2022 CF 715, au par. 95).

[63] Dans la RRP, aux pages 6 à 7, le Demandeur allègue que si la personne versée dans l’art devait considérer D4, il y aurait eu plusieurs préjugés et problèmes techniques à surmonter en utilisant le revêtement solide permanent de D4 sur un filetage cunéiforme, ce qui aurait empêché la personne versée dans l’art d’utiliser un tel revêtement. Voici ces problèmes :

[traduction]

  • On peut s’attendre à ce que le revêtement permanent amplifie les tolérances d’usinage sur les flancs du filetage et qu’il affecte l’interférence entre les flancs lors de la connexion d’un filetage cunéiforme, ce qui a une incidence négative sur la fiabilité de la connexion;

  • Un revêtement sec de lubrifiant permanent aurait été une barrière d’obstruction indésirable qui empêche toute interférence complète sur les flancs de guidage et de prise et, par conséquent, la composition finale (c.-à-d. l’étanchéité) de la connexion. Le lubrifiant sec permanent agirait comme une « pâte d’étanchéité permanente » qui ne serait pas extraite comme le serait la pâte d’étanchéité régulière;

  • Il peut être nécessaire de revoir de façon précise la conception des filets du filetage cunéiforme puisque l’épaisseur d’une couche de lubrifiant solide aurait un effet sur la capacité à atteindre la position d’assemblage finale à atteindre avec le serrage requis, et réduirait la capacité d’étanchéité en raison de la perte d’une surface d’étanchéité appropriée.

  • Une connexion de filetage cunéiforme avec un revêtement permanent pourrait nécessiter plus de serrage pour atteindre une position d’assemblage, ce qui introduirait des contraintes supplémentaires sur les filetages et pourrait nécessiter de revoir la conception de la connexion de filetage cunéiforme pour tenir compte de la présence d’une couche de lubrification solide;

  • La personne versée dans l’art, en fonction des CGC pertinentes, ou des CGC en combinaison avec D4, n’aurait pas abouti à l’objet des revendications indépendantes au dossier et à une connexion de filetage cunéiforme qui fonctionne correctement, sans difficulté excessive. [Caractères gras ajoutés.]

 

L’obstacle d’une [traduction] « difficulté excessive »

[64] Nous avons fait ressortir le passage de la liste ci-dessus puisque la position du Demandeur à cet égard est problématique. Si, d’après les CGC pertinentes et D4, une personne versée dans l’art ne pouvait pas arriver à l’objet des revendications indépendantes (ou des revendications dépendantes) sans difficulté excessive, on s’attendrait alors à un niveau de divulgation dans la présente demande au-delà de celui de D4, qui divulgue les mêmes types de revêtements, les mêmes méthodes de préparation de surface et le cumul des épaisseurs de revêtement, bien que D4 ne l’applique pas aux filetages cunéiformes. Si ce que dit le Demandeur était vrai, des détails auraient alors été fournis dans la présente demande quant à la façon dont les problèmes allégués ont été surmontés dans l’application de revêtements comme ceux de D4 à une connexion de filetage cunéiforme. Autrement, la demande en l’espèce serait irrégulière en vertu du paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets, puisqu’elle ne serait pas suffisante en ce sens que l’invention ne pourrait être mise en œuvre sans difficulté excessive (Aventis Pharma Inc. c. Apotex Inc., 2005 CF 1283; Mobil Oil Corp. c. Hercules Canada Inc., [1995] ACF no 1243; Merck & Co c. Apotex Inc., [1995] 2 CF 723). Le Demandeur n’a pas mentionné dans la présente demande de détails qui permettraient de régler les problèmes qui surviendraient selon ses allégations. Nous ne pouvons accepter qu’il y ait eu une difficulté excessive pour surmonter les problèmes découlant de l’utilisation d’un revêtement lubrifiant solide qui aurait rendu l’utilisation d’un tel revêtement non évident.

Lubrifiant sec permanent en tant que [traduction] « pâte d’étanchéité permanente »

[65] Le Demandeur soutient également que le revêtement sec permanent de lubrifiant aurait été une barrière d’obstruction indésirable qui aurait empêché l’assemblage final (c.-à-d. le sceau) de la connexion, qu’il agirait comme une [traduction] « pâte d’étanchéité permanente » qui ne serait pas extraite comme le ferait une pâte d’étanchéité régulière. Cette position semble aller à l’encontre de la façon bien connue dont la pâte d’étanchéité traditionnelle est utilisée dans les filetages cunéiformes, comme il est indiqué dans la section sur l’Art antérieur de la présente demande et exposé ci-dessus dans le cadre des CGC pertinentes. Le fait que la pâte d’étanchéité était appliquée aux filets du filetage en coin pour améliorer l’étanchéité du sceau et agir comme lubrifiant pendant l’assemblage et le démantèlement de la connexion fait partie des CGC pertinentes. Cela aurait signifié qu’une partie de la pâte d’étanchéité serait demeurée lorsque la connexion était en place. De plus, les CGC ont inclus l’idée que la pâte d’étanchéité « excédentaire » est extraite pendant l’assemblage, ce qui laisse entendre une fois de plus qu’une partie de la pâte d’étanchéité demeurait lorsque la connexion était en place.

[66] À notre avis, la personne versée dans l’art, étant consciente du fait que la pâte d’étanchéité a déjà formé une sorte de revêtement sur une connexion de filetage cunéiforme lorsqu’elle est utilisée, ne verrait pas un autre revêtement, comme un revêtement lubrifiant solide qui reste sur le filetage, comme raison de rejeter son utilisation sur un filetage cunéiforme.

Autres préjugés et problèmes

[67] En ce qui concerne d’autres problèmes potentiels, comme le revêtement qui pourrait avoir une incidence négative sur la fiabilité de la connexion, la refonte possible de la configuration du filetage cunéiforme en raison de l’épaisseur du revêtement et la nécessité éventuelle d’augmenter le serrage pour obtenir l’assemblage de la connexion, tous ces problèmes sont décrits dans la RRP comme des choses que la personne versée dans l’art prendrait en considération dans l’application d’un revêtement lubrifiant solide à un filetage cunéiforme. En supposant que nous n’aurions pas eu à supporter une difficutlé excessive, la personne versée dans l’art aurait été en mesure de prendre ces questions en considération et d’adapter la connexion du filetage cunéiforme au besoin en raison de ces préoccupations. Nous notons que l’un des points des CGC pertinentes tirés de la section sur l’art antérieur en question comprend les tentatives antérieures de modifier la conception du filetage du tuyau pour atténuer les problèmes d’excès de pâte d’étanchéité. Par conséquent, à notre avis, la modification de la conception du filetage cunéiforme pour tenir compte d’un revêtement comme celui dû à la pâte d’étanchéité était déjà bien connue de la personne versée dans l’art et n’était pas un obstacle à l’utilisation d’un autre revêtement de filetage.

[68] Compte tenu du fait que la présente demande est suffisante en vertu du paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets, nous ne pouvons accepter que les préjugés et les problèmes que le Demandeur suggère d’évoquer dans l’application d’un revêtement lubrifiant solide à une connexion de filetage cunéiforme empêchent cette personne d’utiliser un tel revêtement ou dépassent les compétences et les connaissances de la personne versée dans l’art à aborder, une fois que l’idée d’appliquer de tels revêtements leur serait devenue évidente (ce que D4 accomplit).

Combiner D4 et les CGC pertinentes

[69] Comme nous l’avons indiqué dans la lettre de RP, les problèmes bien connus qui faisaient partie des CGC en liaison avec l’utilisation de la pâte d’étanchéité dans les connexions de filetage cunéiforme, comme l’excès de pâte d’étanchéité qui est piégé et qui cause des problèmes tels qu’un assemblage inapproprié ont été partagés par d’autres configurations de filetage dans les structures tige et boîtier, en particulier D4 (D4 au paragraphe [0008]). À notre avis, étant donné que la personne versée dans l’art connaît bien la conception des tuyaux d’extraction de pétrole en général, y compris la conception des joints de tuyauterie et les méthodes de réduction de l’usure et de l’érosion, et compte tenu des problèmes bien connus d’utilisation de la pâte d’étanchéité sur les connexions de filetage cunéiforme, cette personne, à la recherche d’une solution à ces problèmes bien connus, aurait pris connaissance du D4, qui est dans le même domaine de l’extraction de pétrole. Nous sommes d’avis qu’une telle personne aurait immédiatement reconnu l’applicabilité que les revêtements solides de D4 auraient à tisser des liens de filetage dans le même type de structure tige et boîtier et faire face aux mêmes problèmes. Bien sûr, des adaptations peuvent avoir dû être apportées aux filetages, mais comme nous l’avons vu plus haut, c’était quelque chose que la personne versée dans l’art devait déjà prendre en considération lors de l’application d’un revêtement.

[70] Comme indiqué dans la lettre de RP, à notre avis, la personne versée dans l’art en serait arrivée directement et sans difficulté à l’objet de la revendication (le critère classique de l’évidence de Beloit Canada Ltée c. Valmet Oy, 8 CPR [3d] 289, à la p. 294, récemment cité avec approbation dans Janssen Inc c. Sandoz Canada Inc., 2022 CF 715, au par. 95).

Les revendications dépendantes

[71] Dans la lettre de RP, aux pages 13 à 14, nous présentons notre point de vue préliminaire selon lequel l’objet supplémentaire des revendications dépendantes ne rendrait pas les revendications auxquelles elles renvoient non évidentes :

[traduction]

Les revendications dépendantes 2 et 23 précisent que l’une des couches de matériau des revendications 1 et 22 est un revêtement sec de lubrifiant. Comme il a été mentionné à l’étape 3, cette caractéristique a été divulguée par D4 et, par conséquent, elle ne représenterait pas l’introduction d’une caractéristique qui rend les revendications non évidentes. Nous notons en outre que la revendication 23 dépend de la revendication 22, qui précise que le revêtement lubrifiant de la revendication 21 comprend au moins deux couches. Cette caractéristique a également été divulguée par D4.

Les revendications 3 à 5 précisent l’épaisseur d’au moins une des couches de matériau de la revendication 1, l’épaisseur préférée se précisant des revendications 3 à 5. Des épaisseurs comprises entre 15 µm et 35 µm, 20 µm et 30 µm et 10 µm et 20 µm sont revendiquées. D4 divulgue une épaisseur du revêtement sec résistant à la corrosion de 10 µm à 20 µm, de préférence entre 10 µm et 15 µm. L’épaisseur de la couche de revêtement sec de lubrifiant est indiquée en D4 comme étant comprise entre 10 µm et 20 µm. Étant donné que l’épaisseur de prédilection pour au moins une des couches (revendication 5, entre 10 µm et 20 µm) est divulguée par D4 et que la présente demande n’attache aucune importance aux autres gammes d’épaisseur, à notre avis préliminaire, ces variations auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art, le choix de l’épaisseur dépendant des matériaux et de l’application de services particuliers. Les revendications 24 à 26 ajoutent les mêmes paramètres d’épaisseur aux revendications 22 ou 23 (les revendications 22 et 23 étant évidentes pour les raisons susmentionnées) et auraient été tout aussi évidentes.

La revendication 6 précise qu’au moins une des couches de matériau est un mélange d’au moins deux lubrifiants solides différents dans un agent liant inorganique et que l’un d’eux est le disulfure de molybdène. Cette caractéristique a été divulguée dans D4 au paragraphe [0025] et, par conséquent, son ajout aux revendications précédentes ne les rend pas non évidentes. La revendication 27, qui ajoute les mêmes caractéristiques à toutes les revendications, de 22 à 26, aurait été évidente pour la même raison.

La revendication 7 précise que la connexion comprend un traitement de surface et que le traitement est appliqué à l’un des filetages cunéiformes intérieurs et extérieurs avant l’application du revêtement lubrifiant solide. La revendication 8 précise en outre que le sablage ou un revêtement de phosphate sont utilisés pour traiter la surface. D4 au paragraphe [0029] divulgue que le traitement de surface pour obtenir la rugosité de surface désirée peut être accompli par ces méthodes. Par conséquent, les caractéristiques supplémentaires des revendications 7 et 8 ne rendent pas les revendications antérieures non évidentes. Les revendications 28 et 29, qui ajoutent les mêmes caractéristiques aux revendications déjà évidentes, auraient également été évidentes.

La revendication 9 précise que les couches de matériau du revêtement lubrifiant solide peuvent résister à des températures comprises entre 200 °C et 350 °C. Bien que D4 n’établisse aucune limite de température, D4 ne porte pas sur la même industrie pétrolière et gazière et, comme nous l’avons vu plus haut, divulgue le même type de revêtements sur des connexions de tuyauterie similaires. À notre avis préliminaire, si D4 ne prévoit pas intrinsèquement les mêmes niveaux de résistance à la température, tout changement au mélange et à la configuration spécifiques des couches de matériau dans D4 requis pour une application de service spécifique aurait été dans les CGC de la personne versée dans l’art. Par conséquent, à notre avis préliminaire, la revendication 9 au dossier aurait été évidente. Le même raisonnement s’appliquerait à la revendication dépendante 30.

La revendication 10 précise que les filetages cunéiformes sont généralement en forme de queue d’aronde dans la coupe transversale. Bien que cette configuration soit illustrée à la figure 2 des dessins, aucune mention n’en est faite dans la partie de description de la demande. En l’absence d’une description de cette réalisation particulière et, par conséquent, d’une discussion de son importance, nous considérons qu’il s’agissait d’une des options connues de type de filetage disponibles à la personne versée dans l’art à la date de revendication, le choix de l’utiliser ou non en fonction de ses caractéristiques ayant été évident pour la personne versée dans l’art. Le même raisonnement s’appliquerait à la revendication dépendante 31.

La revendication 11 précise que les filetages cunéiformes ont une rugosité de surface moyenne de 2 µm à 6 µm. Cette caractéristique est divulguée dans D4 aux paragraphes [0016], [0018] et [0022] en liaison avec la préparation de surface pour l’application ultérieure des deux revêtements. Par conséquent, son ajout à l’objet des revendications antérieures les rend non évidentes. Pour les mêmes raisons, l’ajout de cette caractéristique dans les revendications dépendantes 15, 19 et 32 ne rend pas les revendications auxquelles elles font référence non évidentes.

La revendication 12 précise que le revêtement lubrifiant solide des revendications précédentes comprend un revêtement sec résistant à la corrosion contenant une dispersion de particules de lubrifiant solide. Cette caractéristique est divulguée dans D4 au paragraphe [0023] comme option pour la première couche de revêtement.

Par conséquent, son ajout à l’objet des revendications antérieures ne les rend pas non évidentes. Pour les mêmes raisons, la revendication dépendante 33 aurait été évidente.

La revendication 16 précise que la rugosité de surface spécifique de la revendication 15 est obtenue par sablage ou par revêtement de phosphate. L’ajout d’une telle caractéristique était déjà considéré ci-dessus en ce qui concerne la revendication 8 et ne rendrait pas la revendication 16 non évidente. Il en va de même pour la revendication dépendante 20.

La revendication 18 précise que le revêtement lubrifiant solide de la revendication 17 comprend un revêtement d’au moins deux couches de matériau. La présence de cette caractéristique a déjà été examinée en liaison avec les revendications indépendantes 1, 13 et 14 et, par conséquent, son ajout ne rend pas la revendication non évidente. Il en va de même pour la revendication dépendante 22.

[72] Le Demandeur n’a pas présenté d’observations à l’égard de la brevetabilité particulière de l’objet des revendications dépendantes.

[73] À notre avis, pour les raisons énoncées dans la lettre de RP, l’objet des revendications dépendantes aurait été évident pour la personne versée dans l’art.

Résumé de l’évaluation de l’évidence

[74] En résumé, nous sommes d’avis que les revendications 1 à 33 au dossier auraient été évidentes eu égard au document d’art antérieur D4 et aux CGC pertinentes et qu’elles ne sont donc pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Revendications proposées

[75] Dans la lettre de RP à la page 15, nous présentons notre point de vue préliminaire selon lequel les revendications proposées soumises avec la RDF ne permettraient pas de surmonter l’irrégularité liée à l’évidence :

[traduction]

La RDF comprenait un ensemble de revendications 1 à 30 proposées. Les modifications proposées au dossier comprennent l’ajout de l’objet des revendications 2 et 9 (l’une des couches de matériaux est un revêtement lubrifiant sec et les couches résistent à des températures élevées comprises entre 200 °C et 350 °C) à la revendication indépendante 1. De plus, il est proposé de modifier les revendications indépendantes 13, 14, 17 et 21 en ajoutant la même limite de résistance à la température proposée pour la revendication 1. Conformément aux modifications proposées, le Demandeur propose de supprimer les revendications dépendantes 2, 9 et 30 au dossier.

Dans la RDF, le Demandeur a soutenu que les modifications proposées distingueraient les revendications de la référence d’art antérieur la plus proche D6, qui ne divulguait pas plusieurs caractéristiques des revendications, y compris celles des revendications dépendantes 2, 9 et 30 au dossier (voir pages 3 à 4 de la RDF). Comme nous l’avons déjà mentionné, notre opinion préliminaire n’inclut pas l’utilisation de D6 comme document d’art antérieur. Les arguments du Demandeur à l’égard de D6 ne sont donc pas pertinents à la présente évaluation.

En ce qui concerne D4, la RDF, à la page 4 affirme que D4 ne traite pas de la pertinence de la résistance à la température des revêtements solides décrits. Comme nous l’avons mentionné plus haut dans l’évaluation des revendications au dossier, nous sommes d’accord. Toutefois, nous avons également exposé notre analyse en ce qui concerne les revendications dépendantes 9 et 30 au dossier quant aux raisons pour lesquelles, selon notre point de vue préliminaire, un tel objet, combiné aux autres caractéristiques revendiquées, aurait été évident pour la personne versée dans l’art.

Étant donné que nous avons déjà exprimé notre opinion préliminaire selon laquelle l’objet des revendications dépendantes 2, 9 et 30 aurait été évident, les revendications proposées auraient également été évidentes.

[76] Le Demandeur n’a formulé aucun commentaire sur la brevetabilité des revendications proposées dans la RRP.

[77] À notre avis, pour les raisons énoncées dans la lettre de RP, les revendications proposées ne surmonteraient pas l’irrégularité relative à l’évidence des revendications au dossier et ne sont donc pas considérées comme une modification « nécessaire » pour assurer la conformité à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, comme l’exige le paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Conclusions

[78] Nous concluons que les revendications au dossier auraient été évidentes eu égard au document d’art antérieur D4 et aux CGC pertinentes et qu’elles ne sont donc pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[79] En outre, nous concluons que les revendications proposées, soumises avec la DF, ne surmonteraient pas l’irrégularité relative à l’évidence des revendications au dossier et ne sont donc pas considérées comme une modification « nécessaire » pour assurer la conformité à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, comme l’exige le paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.


 

Recommandation de la Commission

[80] Compte tenu de ce qui précède, les personnes soussignées recommandent que la demande soit rejetée au motif que les revendications de 1 à 33 au dossier auraient été évidentes et qu’elles ne sont donc pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

 

 

 

 

 

Stephen MacNeil

Membre

Leigh Matheson

Membre

Kurtis Ulicny

Membre

DÉCISION DU COMMISSAIRE

[81] Je souscris aux conclusions de la Commission ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande au motif que les revendications de 1 à 33 au dossier auraient été évidentes et qu’elles ne sont donc pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[82] Conformément à l’article 40 de la Loi sur les brevets, je rejette la présente demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le Demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

Konstantinos Georgaras

Commissaire aux brevets

Fait à Gatineau (Québec)

ce 17e jour de juillet 2023

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.