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Référence : Apple Inc. (Re), 2023 CACB 13

Décision du commissaire no 1646

Commissioner’s Decision #1646

Date : 2023-04-06

OBJET :

F01

Nouveauté – Antériorité

 

O00

Évidence

TOPIC:

F01

Novelty - Anticipation

 

O00

Obviousness

 

 

 

 

 

 

Demande no 2 915 678

Application No. : 2,915,678


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 199(1) des Règles sur les brevets, la demande de brevet no 2,915,678 a subséquemment fait l’objet d’une révision conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets. La recommandation de la Commission d’appel des brevets et la décision du commissaire sont d’annuler le refus de la demande et d’accepter cette dernière.

Agent du demandeur :

RICHES, MCKENZIE & HERBERT LLP,

1800 – 2 rue Bloor Est

Toronto (Ontario) M4W 3J5

 

 


Introduction

[1] Cette recommandation concerne l’examen de la demande de brevet canadienne refusée numéro 2 915 678 (« la présente demande »), qui est intitulée « DISPOSITIF, MÉTHODE ET INTERFACE UTILISATEUR GRAPHIQUE SERVANT À AGRANDIR UNE ZONE SUR UN ÉCRAN TACTILE » et appartient à Apple Inc. (« le Demandeur »). La Commission d’appel des brevets (la « Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets. Comme il est expliqué plus en détail ci-dessous, la Commission recommande que le commissaire aux brevets annule le refus et accepte la demande.

Contexte

La demande

[2] La présente demande, une demande divisionnaire fondée sur une demande déposée antérieurement dans le cadre du Traité de coopération en matière de brevets, est réputée avoir été déposée au Canada le 4 janvier 2008 et est devenue accessible au public le 17 juillet 2008.

[3] La présente demande concerne généralement les appareils munis d’écrans tactiles, et plus particulièrement les listes déroulantes, ainsi que la translation, la rotation et la mise à l’échelle de documents électroniques sur les appareils munis d’écrans tactiles.

Historique de la poursuite

[4] Le 31 août 2021, une décision finale (« DF ») a été rédigée conformément au paragraphe 86(5) des Règles sur les brevets. La DF a déclaré que la présente demande était irrégulière parce que toutes les revendications 1 à 12 de la demande reçue au Bureau des brevets le 30 novembre 2020 (« revendications au dossier ») étaient soit antériorisées soit évidentes et, par conséquent, n’étaient pas conformes à l’alinéa 28.2(1)b) et à l’article 28.3, respectivement, de la Loi sur les brevets.

[5] Dans une réponse du 6 janvier 2022 à la DF (« RDF »), le Demandeur a présenté des arguments en faveur de la brevetabilité des revendications au dossier.

[6] L’examinateur ayant jugé que la demande n’était toujours pas conforme à la Loi sur les brevets conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets, la demande a été transmise à la Commission pour révision le 9 mai 2022, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs (« RM »). Le RM énonçait la position selon laquelle le mémoire descriptif au dossier était toujours considéré comme défectueux.

[7] Dans une lettre en date du 13 mai 2022, la Commission a transmis au Demandeur une copie du RM et lui a demandé de confirmer qu’il souhaitait toujours la révision de la demande.

[8] Dans une lettre en date du 15 août 2022, le Demandeur a confirmé qu’il souhaitait qu’on procède à la révision.

[9] Un Comité de la Commission (le « Comité »), formé des membres soussignés, a été mis sur pied pour réviser la demande en instance en vertu de l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets. Compte tenu de notre recommandation que le refus soit annulé et que la demande soit acceptée, aucune autre observation écrite ou orale du Demandeur n’est nécessaire.

Enjeux

[10] Les questions à aborder dans le cadre du présent examen sont les suivantes :

  • les revendications au dossier n’ont pas de nouveauté et ne sont pas conformes à l’alinéa 28.2(1)b) de la Loi sur les brevets;

  • les revendications au dossier visent-elles un objet qui aurait été évident et qui n’est pas conforme à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets?

Principes juridiques

Interprétation téléologique

[11] Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc, 2000 CSC 66, les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir aussi Whirlpool Corp c. Camco Inc, 2000 CSC 67 aux alinéas 49f) et g) et au paragraphe 52). L’interprétation téléologique est effectuée du point de vue de la personne versée dans l’art à la lumière des connaissances générales courantes pertinentes.

[12] Dans l’exécution de la détermination des éléments essentiels et non essentiels, tous les éléments établis dans une revendication sont présumés être essentiels, à moins qu’il n’en soit établi autrement ou lorsqu’une telle présomption est contraire au libellé des revendications.

Nouveauté

[13] Le paragraphe 28.2(1) de la Loi sur les brevets exige que l’objet revendiqué soit nouveau :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet au Canada (la « demande ») ne doit pas avoir été divulgué

(a) soit plus d’un an avant la date de dépôt de celle-ci, soit, si la date de la revendication est antérieure au début de cet an, avant la date de la revendication, avoir fait, de la part du demandeur ou d’un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, l’objet d’une communication qui l’a rendu accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) avant la date de la revendication, avoir fait, de la part d’une autre personne, l’objet d’une communication qui l’a rendu accessible au public au Canada ou ailleurs;

[le reste du paragraphe est omis]

[14] Il y a deux exigences distinctes pour démontrer qu’un document de l’antériorité prévoit une invention revendiquée : il doit y avoir une divulgation préalable de l’objet revendiqué et la divulgation antérieure doit permettre à une personne versée dans l’art de réaliser l’objet revendiqué (Apotex Inc. c. Sanofi-Synthelabo Canada Inc., 2008 CSC 61 [Sanofi], aux paragraphes 24 à 29, 49).

Évidence

[15] L’article 28.3 de la Loi sur les brevets exige que l’objet revendiqué ne soit pas évident :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, soit plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, soit, si la date de la revendication est antérieure au début de cet an, avant la date de la revendication, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[16] Dans Sanofi, au paragraphe 67, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, pour évaluer l’évidence, de suivre une démarche en quatre étapes. Nous examinons ci-dessous les revendications selon cette démarche.

Analyse

Interprétation téléologique

La personne versée dans l’art

[17] À la page 2, la DF a identifié la personne versée dans l’art comme suit :

[TRADUCTION]

La personne versée dans l’art à qui la présente demande est dirigée a un arrière-plan dans le domaine des interfaces utilisateur pour les appareils mobiles (voir la description actuelle, paragraphes 0002 à 0005).

[18] Le Demandeur n’a pas contesté cette identification de la personne versée dans l’art.

[19] À notre avis, la personne versée dans l’art est identifiée comme une équipe composée d’un ou de plusieurs programmeurs ou d’autres technologues expérimentés avec les interfaces utilisateur, y compris les écrans tactiles, et leurs mises en œuvre dans un appareil électronique.

Les connaissances générales courantes pertinentes (CGC)

[20] À la page 2, la DF a identifié les CGC comme suit :

[TRADUCTION]

Les connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art sont les suivantes :

  • dispositifs de communication portatifs avec écrans d’affichage de petite taille,

  • interfaces utilisateur pour ces périphériques.

[21] Nous sommes généralement d’accord avec cette caractérisation et le Demandeur ne l’a pas contestée.

[22] Nous définissons les CGC comme comprenant également ce qui suit :

  • la conception, la mise en œuvre, l’exploitation et l’entretien du matériel et des logiciels des dispositifs de communication, y compris les interfaces utilisateur comme les écrans tactiles;

  • la conception, la mise en œuvre, l’exploitation et la maintenance de systèmes, de serveurs, de réseaux et de logiciels, y compris :

    • les ordinateurs à usage général et à usage spécial, les appareils électroniques, les dispositifs informatiques, les dispositifs d’entrée et de sortie, les processeurs et les interfaces utilisateur;

    • des techniques relatives au matériel informatique et à la programmation d’ordinateurs;

    • les technologies et les protocoles de réseaux informatiques et Internet.

[23] Le Comité fonde cette identification sur la définition de la personne versée dans l’art. Elle est étayée par la description de ce qui est typique dans le champ ([0002] – [0006], [0052] – [0100]) et par la quantité de détails dans la présente demande concernant la mise en œuvre du système proposé pour l’affichage des documents sur l’écran tactile des dispositifs de communication. Ce niveau de détails laisse supposer que cette mise en œuvre doit pouvoir être saisie par la personne versée dans l’art et qu’il ne doit donc pas nécessiter d’autres explications.

[24] Les revendications visent les méthodes et un dispositif visant à afficher une partie d’un document sur un écran tactile avec les mêmes éléments; par conséquent, nous pouvons considérer la revendication 1 comme étant représentative des revendications indépendantes et nous la présentons ici :

[TRADUCTION]

1. Méthode mise en œuvre par ordinateur :

sur un appareil électronique avec écran tactile :

affichage d’une première partie d’un document;

détecter le déplacement d’un objet sur l’écran tactile;

en réponse à la détection du mouvement, déplacer le document dans une première direction pour afficher une deuxième partie du document;

en réponse à un bord du document atteint tout en continuant de détecter le mouvement de l’objet sur l’écran tactile, en affichant une indication que le bord du document a été atteint;

en réponse à la détection que l’objet n’est plus en contact avec l’écran tactile, cesser d’afficher l’indication.

Éléments essentiels

[25] Aucune suggestion n’a été faite au cours de la poursuite voulant que des éléments des revendications au dossier ne soient pas essentiels.

[26] Le Comité considère que tous les éléments présentés dans une revendication sont présumés essentiels, à moins que le contraire soit établi ou qu’une telle présomption aille à l’encontre du libellé de la revendication. À notre avis, la personne versée dans l’art qui lit les revendications 1 à 12 dans le contexte du mémoire descriptif dans son ensemble et ayant les CGC comprendrait qu’aucun libellé utilisé dans les revendications n’indique que l’un ou l’autre des éléments est facultatif, préféré ou qu’il a été conçu autrement comme non essentiel. Nous estimons donc que tous les éléments des revendications 1 à 12 sont essentiels.

Signification des termes utilisés dans les revendications

[27] L’essentiel de cet examen repose sur la définition d’un « document » telle qu’elle serait comprise par la personne versée dans l’art avec sa CGC lors de la lecture de la présente demande. La DF n’a pas défini explicitement le terme, mais elle a interprété D3 comme divulguant un « document » tel que revendiqué. La RDF, aux pages 10 à 12, n’était pas d’accord avec cette interprétation {soulignement dans l’original}.

[TRADUCTION]

Il est respectueusement soutenu que la référence D3 ne divulgue pas un document tel qu’il est énoncé dans la présente revendication 1, et que la référence D3 ne divulgue pas non plus la caractéristique de « faire glisser le document dans une première direction pour afficher une deuxième partie du document ». Au lieu, la référence à D3 divulgue qu’un document qui est servi à un appareil ayant un petit affichage ou une petite fenêtre d’affichage, comme un téléphone ou un ordinateur de poche, « peut être reformaté de façon à ce que la largeur du document soit divisée en colonnes, chaque colonne étant visible sur l’ensemble de la petite fenêtre d’affichage ou d’affichage ». En d’autres termes, bien que la référence D3 renvoie à un document, la référence D3 ne concerne pas le début ou la fin du document, la « translation du document », ni l’identification d’« un bord du document ». La référence D3 vise plutôt à afficher les colonnes d’un document sur un petit affichage où le document a été « reformaté de façon à ce que la largeur du document soit divisée en colonnes, chaque colonne étant affichée sur l’ensemble de la petite fenêtre d’affichage ou d’affichage ».

Par conséquent, comme il ressort clairement de la référence D3, alors que la référence D3 traite d’un aspect « la visualisation d’un document électronique dans une fenêtre d’affichage d’un affichage », la référence D3 vise spécifiquement à « détecter une disposition d’un document électronique et à comparer la disposition du document électronique à une largeur de la fenêtre d’affichage ». La référence D3 précise ensuite explicitement que le document électronique « est reformaté en au moins deux colonnes, chacune d’elles ayant une largeur qui ne dépasse pas la largeur de la fenêtre d’affichage ».

Il est respectueusement soutenu que la référence D3 vise donc à afficher les colonnes d’un document, plutôt qu’à afficher une indication du bord ou de l’extrémité d’un document…

[28] L’examinateur a pris position, dans le RM aux pages 1 à 2, que D3 divulgue effectivement un document.

[TRADUCTION]

Compte tenu des revendications et du mémoire descriptif, un document peut être défini selon les caractéristiques suivantes : il est affiché à l’écran, translaté sur l’écran et comporte des arêtes. Une page Web, une image numérique ou un courriel dans une liste de courriels sont des exemples de documents (voir les paragraphes 0141-0142 de la description actuelle, qui décrit la translation d’une liste de courriels).

Contrairement à ce qu’a indiqué le demandeur, les colonnes reformatées du texte de D3 sont considérées comme des documents électroniques, car elles présentent les trois caractéristiques susmentionnées. Ils peuvent être affichés, translatés et avoir des bords. Il est à noter que les bords ou les limites des colonnes sont suivis par l’ordinateur, bien qu’ils ne puissent pas être distingués visuellement (ce qui n’est pas exigé par les revendications).

[29] Le mémoire descriptif définit un « document » comme une page Web, une image numérique, un document de traitement de texte, une feuille de calcul, un courriel ou un document de présentation ([00147]); [00154]). Il décrit également un document comme pouvant être affiché sur un écran électronique ([00147]). Le mémoire descriptif décrit également les documents comme pouvant être déplacés dans l’écran d’affichage ([00157] – [00160]). Nous sommes d’accord avec la DF en ce sens qu’« un document peut être défini selon les caractéristiques suivantes : il est affiché à l’écran, il est translaté sur l’écran et il a des bords ».

[30] Cependant, rien dans le mémoire descriptif n’indique que le terme « document » revendiqué comprend tout type de reformatage, de représentation logique ou de réinterprétation d’un document numérique. Le mémoire descriptif précise que si une bordure d’un document est atteinte, une zone au-delà de la limite du document peut être affichée comme étant visuellement distincte du document lui-même ([00149]; [00161]). Nous sommes d’accord avec le Demandeur pour dire que le terme « document » revendiqué est un document d’une page complète plutôt qu’une réinterprétation ou une représentation d’un document.

[31] À notre avis, une personne versée dans l’art comprendrait que le terme « document » tel qu’il est revendiqué est un élément numérique qui peut être affiché et translaté sur un écran avec des bords visuellement distincts, mais ne comprend aucune forme de reformatage, de représentation logique ou de réinterprétation d’un document numérique.

Nouveauté

[32] Dans la DF, aux pages 2 à 4, on a affirmé que les revendications 1, 2, 4 à 6, 8 à 10 et 12 manquaient de nouveauté en raison du document d’art antérieur suivant :

D3 : WO 03/081458 LIRA 2 octobre 2003

[33] D3 divulgue la capacité de détecter une mise en page Web, de comparer la mise en page aux dimensions d’affichage, puis de reformater la page Web en colonnes afin qu’elle soit visible dans la fenêtre d’affichage. D3 divulgue également la capacité de s’assurer que, pendant le défilement d’un document, les colonnes demeurent centrées sur l’affichage.

[34] Pour illustrer le manque de nouveauté de la revendication 1 au dossier, la DF, à la page 3, établit une analyse indiquant que le document D3 divulguait tous les éléments de la revendication.

[TRADUCTION]

Concernant la revendication indépendante 1, D3 divulgue une méthode mise en œuvre par ordinateur :

sur un appareil électronique avec écran tactile : affichage d’une première partie d’un document

(page 1, lignes 16 à 21);

i) détecter le déplacement d’un objet sur l’écran tactile;

(page 14, lignes 18 à 21 : l’utilisateur peut utiliser un stylet 1200 pour faire défiler une fenêtre d’affichage 1205 verticalement vers le bas d’une page 1210 afin de lire une colonne 1215, 1220 ou 1225 du texte de la page 1205…; Fig. 14B);

ii) en réponse à la détection du mouvement, déplacer le document dans une première direction pour afficher une deuxième partie du document;

(page 14, ligne 31 : l’utilisateur fait défiler la page vers le haut ou vers le bas avec le stylet 1200…; Fig. 14B);

iii) en réponse à un bord du document atteint tout en continuant de détecter le mouvement de l’objet sur l’écran tactile, afficher une indication que le bord du document a été atteint;

(Le mode de réalisation qui est pertinent à cette caractéristique est celui illustré à la fig. 14 B. Pendant que l’utilisateur déplace la fenêtre 1205 [qui correspond à « tout en continuant de détecter le mouvement de l’objet sur l’écran tactile »], en réponse au déplacement par l’utilisateur de la fenêtre 1205 au-delà de la frontière entre le centre et les colonnes de droite [qui correspond à « une bordure du document atteint »], une zone au-delà de cette limite est affichée comme le montre dans le cercle zoomé de la figure [qui correspond à « affichage d’une indication que le bord du document a été atteint »]. Étant donné que la frontière correspondante est traversée avant que la fenêtre 1205 ne revienne, l’affichage de l’indication se fait pendant que le mouvement continue d’être détecté sur l’écran tactile. Par conséquent, la fonctionnalité enseignée par D3 correspond à la caractéristique iii) de la revendication);

iv) en réponse à la détection que l’objet n’est plus en contact avec l’écran tactile, cesser d’afficher l’indication.

(Comme le montre la Fig. 14B, au moment de la levée de l’objet, la sous-page est automatiquement translatée dans une deuxième direction différente de la première direction de translation, de sorte que la zone précédemment affichée disparaisse; page 15, lignes 18 à 21 :… lorsque l’utilisateur lève le stylo 1200 de l’écran 1205. Cela fait que la colonne logique 1220 s’aligne avec la fenêtre d’affichage 1205 lorsque l’utilisateur arrête de faire défiler…).

Par conséquent, D3 enseigne toutes les caractéristiques de la revendication 1.

[35] Le Demandeur a déclaré dans la RDF, aux pages 23 à 25, que {accentuation dans l’original} :

[TRADUCTION]

Au mieux, la référence D3 divulgue qu’un document « peut être reformaté de façon à ce que la largeur du document soit divisée en colonnes, chaque colonne pouvant être affichée dans l’ensemble de la petite fenêtre d’affichage ou d’affichage » (voir la page 1 de la référence D3). Il est respectueusement soutenu que ces colonnes ne correspondent pas à un document tel qu’il est énoncé dans les présentes revendications.

La référence D3 divulgue que l’utilisateur peut utiliser un stylet 1200 pour faire défiler verticalement une fenêtre d’affichage vers le bas d’une page 1210 afin de lire une colonne 1215, 1220 ou 1225 du texte de la page. Il est respectueusement soutenu que le fait d’actionner une fenêtre d’affichage 1205 avec un stylet 1200 pour faire défiler la fenêtre d’affichage 1205 verticalement vers le bas d’une page pour lire une colonne 1215, 1220 ou 1225 de la page 1205 ne correspond pas à la caractéristique de « en réponse au mouvement en traduisant le document dans une première direction pour afficher une deuxième partie du document ». Il est respectueusement soutenu que la référence D3 n’a aucune divulgation d’un document (qui semble correspondre à la page 1210 de la référence D3) se traduisant dans une première direction pour afficher une deuxième partie du document

Les colonnes de référence D3 sont créées en reformatant un document afin qu’il puisse être visuellement vu sur un écran d’affichage plus petit. Le document de référence D3, au mieux, semble correspondre à la page 1210. Sur cette base, il n’y a aucune divulgation de la bordure de la page 1210 qui est atteinte dans la référence D3. De plus, l’affichage de contenu supplémentaire provenant d’une colonne adjacente dans le même document ne correspond pas à « l’affichage d’une indication que le bord du document a été atteint ».

la référence D3 indique que le contrôle d’alignement vertical (qui fait que la colonne logique 1220 s’imbrique dans la fenêtre d’affichage 1205 lorsque l’utilisateur arrête de défiler) est activé lorsque l’utilisateur lève le stylet 1200 de l’affichage 1205. Cependant, cela ne divulgue pas la caractéristique de la présente invention qui, en réponse à la détection que l’objet n’est plus en contact avec l’écran tactile, cesse d’afficher l’indication que le bord du document a été atteint. Si la colonne 1220 était alignée sur la fenêtre d’affichage 1205, le contenu de la colonne adjacente, que l’examinateur semble avoir assimilée à l’indication, continuerait d’être affiché dans la référence D3. Par conséquent, la référence « ne divulgue pas le fait de cesser d’afficher l’indication ».

[36] Nous sommes d’accord avec la DF que D3 divulgue un dispositif électronique muni d’un écran tactile capable d’afficher une première partie d’un document reformaté et capable de détecter le mouvement d’un objet tel qu’indiqué dans la revendication 1 au dossier. Toutefois, en nous basant sur la compréhension du terme « document » par la personne versée dans l’art, comme nous l’avons vu plus haut, nous convenons avec le Demandeur que D3 ne divulgue pas le fait de faire glisser du document pour afficher une autre partie du document, ou en réponse à un bord du document atteint, affichant une indication que le bord du document a été atteint et cessant d’afficher l’indication lorsque l’objet n’est plus en contact avec l’écran tactile.

[37] Il n’y a pas d’enseignement en D3 sur ce qui devait se passer si l’on devait atteindre le bord d’un document, puisque l’atteinte du bord de la colonne n’est pas perçue comme l’atteinte du bord du document.

[38] En ce qui concerne l’habilitation, la RDF aux pages 26 à 28 indiquait que {accentuation dans l’original} :

[TRADUCTION]

En particulier, il n’est pas possible d’afficher « une indication que le bord du document a été atteint ». Cette fonction n’est tout simplement pas activée, car la référence D3 ne concerne pas le bord du document, mais seulement la position de la partie visible de la page d’information affichée si le mouvement de l’utilisateur ne dépasse pas le seuil. Cela concorde également avec le passage de la page 14 du renvoi D3, dont il a été question plus haut, où le problème que le renvoi D3 vise à résoudre concerne « le défilement vertical par glisser-toucher a un inconvénient dans ce léger mouvement horizontal ou “le vacillement” du stylet 1200 ».

Dans ce cas, la divulgation dans la référence D3 est tout simplement insuffisante pour permettre à une personne versée dans l’art d’exécuter l’invention telle que définie dans la revendication 1. C’est au moins le cas parce que la description figurant dans la référence D3, comme en témoigne la figure 15 de la référence D3 et la description connexe, ne fait aucune référence à la caractéristique « en réponse à un bord du document atteint tout en continuant de détecter le mouvement de l’objet sur l’écran tactile, affichant une indication que le bord du document a été atteint » suffisamment pour qu’une personne dans l’art puisse réaliser l’invention définie par les présentes revendications « sans fardeau indu fardeau indu fardeau ».

De même, il n’y a aucune divulgation dans la référence D3 relativement à la caractéristique « en réponse à la détection que l’objet n’est plus en contact avec l’écran tactile, cessant d’afficher l’indication » que le bord du document a été atteint, comme il est décrit plus en détail dans la présente revendication 1. C’est le cas du moins parce que la référence D3 n’indique pas que le bord d’un document a été atteint, pas plus que la référence D3 n’indique que le bord du document a été atteint. De plus, au mieux, la référence D3 divulgue que le contrôle d’alignement vertical est activé lorsque l’utilisateur lève le stylo 1200 de l’écran 1205, ce qui fait que la colonne logique 1220 s’aligne avec la fenêtre d’affichage 1205 au fur et à mesure que l’utilisateur arrête de défiler, mais cela ne suffirait pas à lui-même pour qu’inventeur caractéristique « sans fardeau indu ».

[39] Une personne versée dans l’art n’assimilerait pas le « document » de la présente demande au « document » au « document » de D3. Nous sommes d’accord avec le Demandeur que D3 divulgue la capacité de manipuler un document pour l’adapter à un petit écran à l’aide de plusieurs colonnes (page 1, lignes 16 à 21), le fait de modifier et de manipuler ces colonnes n’est pas considéré comme étant la même chose que la capacité de visualiser un document complet en déplaçant la page à l’écran dans la présente demande. Dans D3, le bord du document ne peut pas être visualisé, car il a déjà été manipulé pour s’adapter à l’écran.

[40] À ce titre, nous estimons que l’objet de la revendication 1 au dossier n’est pas divulgué ni rendu réalisable par D3 et, par conséquent, est nouveau à la lumière de ce document d’art antérieur.

[41] Étant donné que les revendications indépendantes 5 et 9 contiennent des restrictions semblables à celles de la revendication 1, elles sont aussi nouvelles à la lumière de D3. De même, les revendications dépendantes 2 à 4, 6 à 8 et 10 à 12, qui dépendent directement ou indirectement des revendications indépendantes 1, 5 ou 9, sont également nouvelles à la lumière de D3.

[42] En résumé, les revendications au dossier sont nouvelles et sont conformes à l’alinéa 28.2(1)b) de la Loi sur les brevets.

Évidence

(1) (a) Identifier la « personne versée dans l’art »

[43] La personne versée dans l’art a été définie ci-dessus sous la section Interprétation téléologique. Nous appliquons la même définition ici.

1 (b) Déterminer les CGC pertinentes de cette personne

[44] La CGC pertinente a également été identifiée dans le cadre de l’analyse de la construction téléologique. À notre avis, la même CGC s’applique aux fins de l’évaluation de l’évidence.

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[45] Nous examinerons d’abord les revendications indépendantes 1, 5 et 9, car elles sont déterminantes de notre analyse de l’évidence. Ces revendications comportent toutes les mêmes éléments; par conséquent, nous pouvons considérer la revendication 1 comme étant représentative des revendications indépendantes et telles que présentées ci-dessus.

[46] Nous considérons que tous les éléments de la revendication sont essentiels et constituent le concept inventif.

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation

[47] En ce qui concerne la revendication représentative 1, à notre avis, D3 divulgue ce qui suit :

[TRADUCTION]

à un appareil électronique à écran tactile (page 1, lignes 16 à 21);

afficher une première partie d’un document (page 1, lignes 16 à 21);

détecter le déplacement d’un objet sur l’écran tactile (page 14, lignes 18 à 21 : l’utilisateur peut utiliser un stylet 1200 pour faire défiler une fenêtre d’affichage 1205 verticalement vers le bas d’une page 1210 afin de lire une colonne 1215, 1220 ou 1225 du texte de la page 1205…; Fig. 14B).

[48] À notre avis, D3 ne divulgue pas les caractéristiques suivantes :

  • 1)en réponse à la détection du mouvement, déplacer le document dans une première direction pour afficher une deuxième partie du document;

  • 2)en réponse à un bord du document atteint tout en continuant de détecter le mouvement de l’objet sur l’écran tactile, en affichant une indication que le bord du document a été atteint;

  • 3)en réponse à la détection que l’objet n’est plus en contact avec l’écran tactile, cesser d’afficher l’indication.

[49] Dans la RDF, le Demandeur a soutenu que l’art antérieur ne divulguait pas ces différences.

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituentelles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotentelles quelque inventivité?

[50] Le RM soutient que D3 divulgue les différences et que les colonnes de D3 sont équivalentes par rapport au document de la présente demande.

[51] La différence 1 décrit la capacité d’afficher une deuxième partie du document, déterminée par une étape de translation du document. D3 comprend un défilement dans les colonnes prédéterminées d’un document (page 14, ligne 31 : [TRADUCTION] « … l’utilisateur fait défiler la page vers le haut ou vers le bas avec le stylet 1200… »; Fig. 14B). La caractéristique des revendications permet de déplacer les vues d’un document complet à l’écran à travers la translation au lieu d’une action de défilement limitée d’une colonne dans le cadre d’un document tel qu’il est présenté dans D3. À notre avis, la personne versée dans l’art ne considérerait pas la translation du document dans la présente demande comme évidente en vue du défilement des colonnes de D3.

[52] En ce qui concerne les différences 2 et 3, D3 divulgue une fonction d’alignement vertical qui fait aligner la colonne avec la fenêtre d’affichage et qui présente (page 15, lignes 18 à 21). Les différences 2 et 3 divulguent l’affichage d’une indication que le bord d’un document a été atteint lorsque le mouvement d’un objet est détecté sur l’écran tactile et que cette indication est supprimée lorsque l’objet n’est plus en contact avec l’écran tactile. La DF a présenté la figure 14B comme illustrant cette caractéristique. À notre avis, la figure montre une barre de défilement et le mouvement de recul de l’alignement vertical. La personne versée dans l’art ne considérerait pas l’indication du bord du document comme évidente à la lumière de la caractéristique d’alignement vertical de D3. D3 ne divulgue pas le bord d’un document atteint; il divulgue le bord d’une colonne en cours de défilement et une fonction permettant d’aligner correctement la colonne à l’écran.

[53] De l’avis du Comité, les caractéristiques revendiquées de la translation d’un document pour afficher une autre partie dudit document, l’affichage d’une indication que le bord d’un document a été atteint et la cessation de l’indication d’affichage ne sont pas considérées comme évidentes compte tenu des caractéristiques d’affichage et de défilement des colonnes présentées dans la DF. Dans l’invention revendiquée, l’utilisateur voit une partie d’un document complet et est en mesure de voir différentes parties du document et le bord du document, ce qui n’est pas divulgué dans D3. Par conséquent, selon nous, D3 ne divulgue pas ces différences et celles-ci n’auraient pas été évidentes pour la personne versée dans l’art.

Conclusions sur l’évidence

[54] À la lumière de notre analyse de l’évidence ci-dessus, nous estimons que la revendication représentative 1 n’aurait pas été évidente et qu’elle est conforme à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[55] Les revendications indépendantes 5 et 9 n’auraient pas non plus été évidentes puisqu’elles énoncent les mêmes éléments inventifs de la revendication 1. Par conséquent, à notre avis, les revendications indépendantes 5 et 9 sont également conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[56] Les revendications dépendantes n’auraient pas non plus été évidentes puisqu’elles dépendent des revendications non évidentes 1, 5 et 9. Par conséquent, nous estimons que toutes les revendications dépendantes sont également conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

CONCLUSION ET RECOMMANDATION DE LA COMMISSION

[57] Pour les motifs qui précèdent, nous estimons que le refus n’est pas justifié pour le motif d’irrégularité indiqué dans la DF et nous avons des motifs raisonnables de croire que la demande en instance est conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets. Nous recommandons que le Demandeur soit avisé, conformément au paragraphe 86(10) des Règles sur les brevets, que le refus de la demande en instance est annulé et que la demande en instance a été jugée acceptable.

 

 

 

 

Mara Gravelle

Membre

Lewis Robart

Membre

Sean Wilkinson

Membre

 

 

 

 

 

Décision du commissaire

[58] Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission. Conformément au paragraphe 86(10) des Règles sur les brevets, j’avise le Demandeur par la présente que le refus de la demande en instance est annulé, que la demande en instance est jugée acceptable et que j’ordonnerai qu’un avis d’acceptation soit envoyé en temps voulu.

Konstantinos Georgaras

Commissaire aux brevets

Fait à Gatineau (Québec)

en ce 6e jour d’avril 2023

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