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Référence : Omega Patents L.L.C. (Re), 2020 CACB 33

Décision du Commissaire #1553

Commissioner's Decision #1553

Date : 2020-12-23

SUJET :

O00

Évidence

TOPIC:

O00

Obviousness

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Demande no : 2 845 954


Application No. : 2,845,954


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets (DORS/96-423) dans sa version antérieure au 30 octobre 2019 (« les anciennes Règles sur les brevets »), la demande de brevet numéro 2 845 954 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251). Conformément à la recommandation de la Commission d’appel des brevets, la commissaire accepte la demande.

Agent du Demandeur :

CPST INTELLECTUAL PROPERTY INC.

Brookfield Place

181, rue Bay, bureau 2425

Toronto (Ontario) M5J 2T3


introduction

[1] La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet canadien refusée numéro 2 845 954 (la « présente demande »), intitulée « SYSTÈME DE COMMANDE DE DÉMARRAGE À DISTANCE POUR UN VÉHICULE POURVU D’UNE BOÎTE DE VITESSES COMMANDÉE PAR BUS ET PROCÉDÉS ASSOCIÉS » et qui appartient à Omega Patents L.L.C. (le « Demandeur »). La Commission d’appel des brevets (la « Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets. Comme il est indiqué plus en détail ci‑dessous, la Commission recommande que la commissaire aux brevets accepte la demande.

CONTEXTE

La demande

[2] La date de dépôt de la présente demande est le 14 mars 2014. Elle est devenue accessible au public le 14 septembre 2014.

[3] La présente demande a généralement trait à des dispositifs et méthodes de démarrage à distance de véhicules. La demande comporte 28 revendications en date de la décision finale (« DF »). Celles-ci ont été reçues au Bureau des brevets le 14 mars 2014.

Historique du traitement de la demande

[4] Le 5 juin 2018, une DF a été rédigée conformément au paragraphe 30(4) des anciennes Règles sur les brevets. La DF indiquait que la demande était irrégulière puisque l’ensemble des revendications au dossier auraient été évidentes et donc, n’étaient pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[5] Dans une réponse à la DF (« R-DF ») en date du 20 septembre 2018, le Demandeur a présenté des arguments à l’appui de la brevetabilité des revendications au dossier.

[6] L’examinateur ayant tout de même jugé la demande non conforme à la Loi sur les brevets, le 29 novembre 2018, la demande a été transmise à la Commission pour révision, conformément à l’alinéa 30(6)c) des anciennes Règles sur les brevets, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs (« RM »). Le RM expose la position selon laquelle le mémoire descriptif au dossier était toujours considéré comme irrégulier.

[7] Dans une lettre en date du 1er février 2019, la Commission a transmis au Demandeur une copie du RM et lui a demandé de confirmer qu’il souhaitait toujours la révision de la demande.

[8] Dans une lettre datée du 26 avril 2019, le Demandeur a confirmé qu’il souhaitait la poursuite de la révision.

[9] Un comité de la Commission (« le Comité ») composé des membres soussignés a examiné la présente demande en vertu de l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets.

Question

[10] L’unique question à trancher dans le cadre de la présente révision est celle de savoir si les revendications au dossier visent un objet qui est non-évident conformément à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Principes juridiques

Interprétation téléologique

[11] Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc, 2000 CSC 66, les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir aussi Whirlpool Corp c. Camco Inc, 2000 CSC 67 aux alinéas 49f) et g) et au paragraphe 52).

Évidence

[12] L’article 28.3 de la Loi sur les brevets exige que l’objet revendiqué ne soit pas évident :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[13] Dans Apotex Inc c. Sanofi-Synthelabo Canada Inc, 2008 CSC 61, au par. 67, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, pour évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes. Nous examinons ci-dessous les revendications selon cette approche.

Analyse

(1)a) Identifier la « personne versée dans l’art »

[14] La DF a défini la personne versée dans l’art comme suit :

[traduction]

La personne versée dans l’art est spécialisée dans les domaines de l’ingénierie informatique et logicielle et des systèmes de commande électronique d’automobile.

[15] Dans la R-DF, le Demandeur n’a pas contesté cette définition et nous l’adoptons.

(1)b) Déterminer les connaissances générales courantes (CGC) pertinentes de cette personne

[16] Les documents d’antériorité suivants sont cités dans la DF :

D1 : US20030214392A1 Le 20 novembre 2003 Flick

D2 : Guide du propriétaire Chevrolet Volt 2012, disponible à l’adresse suivante :

https://my.chevrolet.com/content/dam/gmownercenter/gmna/dynamic/manuals/2012/chevrolet/volt/2012_chevrolet_volt_owners.pdf

D3 : 2012 Honda Civic Remote Engine Start System II User's Information Manual, disponible à l’adresse suivante : https://owners.honda.com/Linked-Content/PDF/RemoteEnginestarter.pdf

D4 : 2012 Honda Civic Sedan Owner's Manual, disponible à l’adresse suivante : http://techinfo.honda.com/rjanisis/pubs/OM/R01212/R01212OM.PDF

[17] À notre avis, les documents D2-D4 indiquent que le démarrage à distance des véhicules se fait à l’aide des CGC et que le besoin de débrancher une transmission de véhicule au démarrage fait partie des CGC.

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[18] Nous examinerons d’abord les revendications indépendantes 1, 13 et 22. Ces revendications visent respectivement un système, un dispositif de commande et une méthode. Tous récitent les mêmes éléments; par conséquent, nous pouvons considérer la revendication 1 comme étant représentative. Nous considérons que la combinaison de tous les éléments de la revendication 1 définit le concept inventif, et le sens des termes est clair. Dans ce cas, une analyse détaillée de l’interprétation téléologique n’est pas requise. La revendication 1 est ainsi formulée :

[traduction]

Un système de commande de démarrage à distance pour un véhicule comprenant un bus de communication de données qui passe dans le véhicule, un moteur, une transmission associée au moteur et ayant une position débrayée sélectionnable en fonction d’une commande de débrayage de la transmission sur le bus de communication de données, et un système de climatisation du véhicule opérable par une commande de climatisation sur le bus de communication de données, le système de commande de démarrage à distance comprenant :

un émetteur de démarrage à distance à l’écart du véhicule et configuré pour générer un signal de démarrage à distance; et

un dispositif de commande de démarrage à distance au véhicule et comprenant

un récepteur configuré pour recevoir le signal de démarrage à distance dudit émetteur de démarrage à distance, et

au moins un processeur coopérant avec ledit récepteur et configuré pour, en réponse au signal de démarrage à distance,

générer la commande de débrayage de la transmission sur le bus de communication de données afin de sélectionner la position débrayée pour la transmission,

produire la commande de climatisation sur le bus de communication de données pour faire fonctionner le climatiseur, et

démarrer le moteur.

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation

[19] À notre avis, le document D1 représente l’état de la technique le plus proche. En ce qui a trait à la revendication 1 ci-dessus, le document D1 divulgue :

  • un système de commande de démarrage à distance pour un véhicule comprenant un bus de communication de données qui passe dans le véhicule, un moteur, une transmission associée au moteur [abrégé];
  • ayant une position débrayée sélectionnable en fonction d’une commande de débrayage de la transmission sur le bus de communication de données [par. 0051];
  • un système de climatisation du véhicule opérable par une commande de climatisation sur le bus de communication de données [par. 0012];
  • un émetteur de démarrage à distance à l’écart du véhicule et configuré pour générer un signal de démarrage à distance [Fig. 1, étiquette 34];
  • un dispositif de commande de démarrage à distance au véhicule [Fig. 1, étiquette 21];
  • un récepteur configuré pour recevoir le signal de démarrage à distance dudit émetteur de démarrage à distance [Fig. 1, étiquette 32];
  • au moins un processeur coopérant avec ledit récepteur et configuré pour, en réponse au signal de démarrage à distance [Fig. 1, étiquette 25];
  • produire la commande de climatisation sur le bus de communication de données pour faire fonctionner le climatiseur [par. 0012]; et
  • démarrer le moteur [par. 0039].

[20] Bien que le document D1 divulgue un dispositif de commande de transmission [Fig. 1, étiquette 45c, par. 0051] et note qu’il est possible d’empêcher le démarrage du moteur si le levier de changement de vitesse est en position autre que P (stationnement) [par. 0039], le document D1 ne divulgue pas l’élément de « générer la commande de débrayage de la transmission sur le bus de communication de données afin de sélectionner la position débrayée pour la transmission ».

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention telle que revendiquée, ces différences constituent‑elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent‑elles quelque inventivité?

[21] La DF a déterminé qu’il existe un dispositif de commande électronique à bord pour la transmission, et qu’il existe des commandes bus internes de véhicule pour qu’un tel dispositif de commande puisse faire fonctionner la transmission. La DF a également indiqué que la personne versée dans l’art saurait que la transmission doit être débrayée pour que le véhicule puisse démarrer, et qu’il serait des CGC de faire en sorte que le démarreur à distance cause la délivrance d’une telle commande de débrayer activement la transmission si elle est embrayée, lorsqu’elle tente de démarrer le véhicule à distance. Nous notons que l’art antérieur ne montre pas l’existence d’une commande à distance pour commander une transmission, mais seulement l’existence d’une commande de bus interne de véhicule. À notre avis, l’existence de nombreuses commandes internes possibles qui pourraient être émises par un système de démarrage à distance ne signifie pas que la personne versée dans l’art utiliserait invariablement une commande à distance pour débrayer la transmission sans l’exercice d’au moins une petite étincelle d’ingéniosité. L’art antérieur au dossier appuie la condition de ne pas être en mesure de démarrer le véhicule à distance si la transmission est embrayée, mais ne divulgue pas la modification active de la situation en débrayant à distance la transmission.

[22] Par conséquent, à notre avis, la revendication 1 n’est pas évidente et est conforme à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. Les revendications indépendantes 13 et 22 ne sont pas non plus évidentes puisqu’elles énoncent le même élément inventif de débrayer activement la transmission par commande à distance.

[23] Les revendications dépendantes ne sont pas non plus évidentes puisqu’elles dépendent des revendications non évidentes 1, 13 et 22.

conclusion et RECOMMANDATION DE la commission

[24] Compte tenu de ce qui précède, nous sommes d’avis que le refus n’est pas justifié en fonction de l’irrégularité indiquée dans l’avis de décision finale et nous avons des motifs raisonnables de croire que la présente demande est conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets. Nous recommandons que le Demandeur soit avisé conformément au paragraphe 86(10) des Règles sur les brevets que le refus de la présente demande est annulé et que la présente demande a été jugée acceptable.

 

 

 

Howard Sandler

Membre

Alison Canteenwalla

Membre

Mara Gravelle

Membre

 

 

 

 

 


 

DÉCISION DE LA COMMISSAIRE

[25] Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission. Conformément au paragraphe 86(10) des Règles sur les brevets, j’avise par la présente le Demandeur que le refus de la présente demande est annulé, que la présente demande est jugée acceptable et que j’ordonnerai qu’un avis d’acceptation soit envoyé en temps opportun.

Virginie Ethier

Sous-commissaire aux brevets

 

 

 

Fait à Gatineau (Québec),

ce 23e jour de/décembre 2020

 

 

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