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Référence : Johnson Outdoors, Inc (Re), 2022 CACB 24

Décision du commissaire no1631

Commissioner’s Decision #1631

Date : 2022-11-30

SUJET :

O–00

Évidence

 

 

 

TOPIC :

O–00

Obviousness


Demande n2 887 031
Application No. 2887031



Introduction

[1]          La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet refusée numéro 2 887 031, qui est intitulée « Dispositif de mappage pour sonar » et qui appartient à Johnson Outdoors, Inc. L’irrégularité en suspens, indiquée dans la décision finale (DF), est celle de l’évidence. La Commission d’appel des brevets (la Commission) a procédé à une révision de la demande refusée, conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251). Comme il est expliqué ci-dessous, nous recommandons le rejet de la demande.

Contexte

La demande

[2]          La demande de brevet canadien no 2 887 031 a été déposée le 2 avril 2015 et est devenue accessible au public le 3 octobre 2015.

[3]          L’invention concerne un système de cartographie sonar monté sur une embarcation pour les pêcheurs à la ligne.

Historique de la poursuite

[4]          Le 13 octobre 2020, une DF a été rendue conformément au paragraphe 86(5) des Règles sur les brevets. La DF a indiqué que la demande était irrégulière au motif que les revendications 1 à 18 (les revendications au dossier) visent un objet évident, ce qui contrevient à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[5]          Dans sa réponse à la DF (RDF) en date du 11 décembre 2020, le Demandeur a proposé un ensemble modifié de 38 revendications (les premières revendications proposées), consistant en 20 nouvelles revendications en plus de celles figurant dans le dossier, et présenté des arguments en faveur de leur acceptation.

[6]          L’examinateur n’a pas été convaincu par les arguments selon lesquels les revendications au dossier ou les premières revendications proposées étaient conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. Par conséquent, conformément à l’alinéa 86(7)c) des Règles sur les brevets la demande a été transmise à la Commission aux fins de révision au nom du commissaire aux brevets. Le 3 août 2021, la Commission a transmis au Demandeur une copie du résumé des motifs de l’examinateur auquel était jointe une lettre confirmant le refus.

[7]          Un comité a été chargé de réviser la demande refusée et de présenter une recommandation au commissaire quant à la décision à rendre. À la suite d’une révision préliminaire, une lettre a été envoyée le 21 septembre 2022 (la lettre de RP). Cette lettre expliquait pourquoi, en fonction du dossier dont nous sommes saisis, nous avons considéré que les revendications au dossier définissent un objet évident, ce qui contrevient à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. Elle relevait également une erreur typographique probable dans les revendications au dossier et les premières revendications proposées, et expliquait pourquoi nous avons considéré que les premières revendications proposées définissent également un objet évident. La lettre de RP invitait en outre le Demandeur à présenter des observations en réponse à la lettre et à indiquer s’il souhaitait participer à une audience.

[8]          La réponse du Demandeur (RRP) a été reçue le 19 octobre 2022. Elle indiquait qu’il ne souhaitait pas qu’une audience soit tenue, proposait un nouvel ensemble de revendications modifiées (les deuxièmes revendications proposées) et fournissait des arguments en faveur de la brevetabilité des revendications au dossier et des deuxièmes revendications proposées.

la question de l’évidence

[9]          Premièrement, l’examen aborde la question de savoir si les revendications au dossier définissent un objet évident, contrevenant ainsi à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. Ensuite, l’examen aborde l’erreur typographique. Enfin, l’examen aborde la question de savoir si les deuxièmes revendications proposées constituent une modification nécessaire en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

L’invention revendiquée est évidente

[10]       L’article 28.3 de la Loi sur les brevets exige que l’objet revendiqué ne soit pas évident :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication

(a)  qui a été faite, soit plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, soit, si la date de la revendication est antérieure au début de cet an, avant la date de la revendication, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

(b)  qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[11]       Dans Apotex Inc c. Sanofi–Synthelabo Canada Inc, 2008 CSC 61, au para 67, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, lorsqu’il s’agit d’évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes reproduite ci-dessous :

(1) a)   Identifier la « personne versée dans l’art »;

     b)    Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2)       Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3)       Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation;

(4)        Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

[12]       Les documents suivants sont considérés comme pertinents pour la détermination des connaissances générales courantes pertinentes (CGC) ou de l’évidence :

         D1 : « WASSP goes wireless with new remote mapping system, » Press Release from WASSP Ltd. (Auckland, NZ: WASSP Ltd., 14 janvier 2014), en ligne : WASSP Goes Wireless With New Remote Mapping System <https://www.marinelink.com/news/wireless-mapping-remote362959>.

         D2 : Nick Fogarty, « Wassp wireless » (Auckland, NZ: WASSP Ltd., 22 décembre 2013), en ligne : Wassp Wireless – YouTube <https://www.youtube.com/watch?v=J6CTyIHzuFE>

         D3 : Tristan Poulain, « Humminbird 360 imaging » (February 23, 2012), en kigne : Humminbird 360 Imaging – YouTube <https://www.youtube.com/watch?v=bsOGUx7O3nk>.

         D5 : « Humminbird 360 imaging » (6 août 2013), en ligne : humminbird 360 Imaging <https://www.youtube.com/watch?v=xUArwPGww18>.

         D6 : Hans Werner Schenke, « Interpolation and contouring of sparse sounding data, » Presentation to the General Bathymetric Chart of the Oceans Centenary Conference Held April 2003 in Monaco (GEBCO), en ligne : Presentations and Publications <https://www.gebco.net/about_us/presentations_and_publications/documents/cen_conf_schenke.pdf>.

         D7 : « WASSP Multibeam Water Column and Seafloor Sonar Navigator, » WSP-009-003, version 1.4 (Auckland, NZ: WASSP Ltd., 27 juin 2012), archivé en ligne : Download the operational manuals for WASSP and WASSP Navigator <https://web.archive.org/web/20131127064948/http://wassp.com/userfiles/file/WSP-009-003%20V1_4_High_Res.pdf>.

         D8 : US 2013/0215719 A1             22 août 2013                         Betts et al.

[13]       Les documents D1 à D3, D5 et D6 ont été cités dans la DF pour appuyer le raisonnement concernant l’évidence ou les CGC. Le document D7 et le document D8 (lui-même cité en référence dans la présente demande comme un exemple d’art antérieur) sont apparus au cours de notre révision préliminaire et ont été cités dans la lettre de RP.

Identifier la personne versée dans l’art et déterminer les connaissances générales courantes pertinentes

[14]       Dans la lettre de RP, nous avons à titre préliminaire décrit la personne versée dans l’art comme :

une équipe comprenant des technologues expérimentés dans le développement et l’application de systèmes de sonar montés sur des embarcations, en particulier pour les pêcheurs à la ligne.

[15]       Sur la base de cette définition de la personne versée dans l’art, nous avons déterminé de manière préliminaire les CGC pertinentes comme comprenant :

         les ensembles de transducteurs sonar montés sur des embarcations et leurs configurations, fonctionnalités et applications traditionnelles, notamment :

o   la façon d’installer un transducteur de sonar, le monter sur une embarcation et le connecter à tout système de soutien;

o   l’utilisation d’un montage pour la détection de poissons;

o   l’utilisation d’un ensemble pour fournir une imagerie sonar à 360 degrés;

         la conception et la mise en œuvre de systèmes informatiques appuyant traditionnellement l’utilisation de systèmes sonar montés sur des embarcations, notamment :

o   des moyens de stockage, de traitement et d’affichage des données;

o   des moyens et méthodes de connexion d’appareils portatifs;

o   des moyens d’affichage de données topographiques bidimensionnelles ou tridimensionnelles en utilisant des contours et des couleurs;

o   des moyens pour recevoir et utiliser les données GPS;

         l’utilité des cartes topographiques détaillées ou des cartes des plans d’eau pour les pêcheurs;

         l’utilisation de fonctions d’interpolation pour estimer les données topographiques adjacentes manquantes.

[16]       Comme il est indiqué dans la lettre de RP, cette caractérisation était également fondée sur les éléments suivants :

ce que la présente description (paragraphes 3 et 4) et le document D8 (paragraphes 3 à 6) décrivent comme habituellement connu ou traditionnellement accompli sur le terrain. Elle est également soutenue par des exemples communs de fonctions parmi les documents D1, D2, D3, D5 et D7, par les descriptions et dessins du document D8 (lui-même cité en référence par la présente demande comme divulguant un système existant) et par l’exemple du document D6.

[17]       Le Demandeur n’a pas contesté la définition de la personne versée dans l’art ni la définition subséquente de ses CGC. Par conséquent, j’adopte les définitions ci-dessus de ces concepts en l’espèce.

Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[18]       La demande (paragraphes 2 à 7 et 36 à 40) explique qu’il est utile pour les pêcheurs à la ligne de disposer de cartes topographiques détaillées et propose donc d’améliorer les systèmes de transducteurs sonar montés sur les embarcations pour répondre à ce besoin. La demande propose un système de cartographie par sonar capable de générer et de mettre à jour une carte topographique en temps réel, pour affichage ou stockage.

[19]       Les revendications indépendantes 1 et 16 au dossier visent les systèmes de cartographie sonar :

[traduction]

Revendication 1.       Un système de cartographie sonar comprenant :

un ensemble transducteur sonar configuré pour être monté sur une embarcation;

un affichage configuré pour montrer une carte topographique d’un plan d’eau;

un processeur couplé à l’ensemble transducteur sonar et à l’affichage, et configuré pour créer la carte topographique en temps réel, ou pour mettre à jour la carte topographique en temps réel, sur la base des données sonar fournies par l’ensemble transducteur sonar, le processeur étant configuré pour rendre la carte topographique créée ou mise à jour sur l’affichage;

une mémoire accessible par le processeur et configurée pour stocker la carte topographique rendue par le processeur, et pour stocker les données sonar fournies par l’ensemble transducteur sonar.

 

Revendication 16.     Un système de cartographie sonar comprenant :

un ensemble de transducteurs sonar configuré pour être monté sur une embarcation, et configuré pour fournir des données sonar pour une zone panoramique (360 degrés) entourant l’embarcation;

un affichage configuré pour montrer des images sous-marines basées sur des données provenant de l’ensemble transducteur sonar;

un processeur couplé à l’ensemble transducteur sonar et à l’affichage, le processeur étant configuré pour convertir les données sonar provenant de l’ensemble transducteur sonar en images sous-marines rendues sur l’affichage, dans lequel le processeur est également configuré pour superposer les images sous-marines, en temps réel, sur une carte précédemment stockée pour une masse d’eau, ou pour créer une nouvelle carte, en temps réel, qui inclut les images sous-marines [;]

une mémoire accessible par le processeur, dans laquelle le processeur est configuré pour stocker, dans la mémoire, la nouvelle carte avec des images sous-marines ou la carte précédemment stockée avec des images sous-marines superposées.

[20]       Dans la lettre de RP, nous avons considéré le libellé des revendications 1 et 16 comme leurs idées originales. Le Demandeur n’a pas contesté cette approche, et nous l’adoptons aux présentes également.

[21]       La revendication dépendante 2 au dossier décrit en outre l’estimation de données topographiques adjacentes manquantes. Les revendications dépendantes 3 à 7, 9 à 12, 17 et 18 du dossier donnent des détails supplémentaires sur l’aspect et la signification des données affichées. Les revendications dépendantes 8 et 13 à 15 au dossier donnent des détails supplémentaires concernant le fonctionnement et la structure du système sonar en question. Ces détails sont considérés comme faisant partie des idées originales pour leurs revendications respectives.

Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation

[22]       Comme il est indiqué dans la lettre de RP, nous considérons que la référence D7 est la plus pertinente. Le document D7 (pages 4 à 6, 11, 13, 22 à 27 et 33) décrit le fonctionnement du logiciel de navigation multifaisceaux « WASSP Multibeam Navigator ». La description de ce manuel indique que le logiciel fait partie d’un système comprenant un ensemble transducteur sonar monté sur une embarcation, et qui est capable d’utiliser les données sonar générées en temps réel pour fournir des images sous-marines et créer ou mettre à jour des cartes.

[23]       La lettre de RP explique qu’il n’y a pas de différence significative entre la divulgation de D7 et les idées originales des revendications 1, 8 et 14 au dossier. Le document D7 (pages 4, 9, 11, 16, 17, 26, 27 et 29) indique que l’affichage du système peut montrer des cartes topographiques de la zone d’intérêt. Les données sonar générées par le système peuvent être utilisées pour créer ou mettre à jour des cartes topographiques pour l’affichage. La carte et les données sonar peuvent être stockées.

[24]       Le Demandeur n’était pas d’accord, faisant valoir dans la RRP que le système D7 nécessite deux systèmes informatiques distincts, l’un dans un bateau auxiliaire et dédié à la collecte des données sonar, l’autre sur le bateau-mère et dédié à la navigation et au rendu des cartes :

[traduction]

Comme il est indiqué dans la réponse du Demandeur à la décision finale, le système « WASSP » comprend un bateau auxiliaire et un bateau-mère, dans lequel le bateau auxiliaire surveille une route à l’aide de ses transducteurs sonar et renvoie les données sonar (et non une carte) au bateau-mère qui comprend des ordinateurs de navigation. Le bateau-mère reçoit les données sonar du bateau auxiliaire et les fait passer par un système de navigation pour obtenir une carte topographique et naviguer de manière appropriée. Un tel système ne peut pas fonctionner autrement que comme un système divisé, car chaque bateau a une finalité particulière, notamment : le bateau auxiliaire pour effectuer des relevés et envoyer les données sonar au bateau-mère, et le bateau-mère pour traiter ces données sonar par le biais de son système de navigation afin de rendre la carte permettant une navigation appropriée du bateau-mère.

[…]

Le système « WASSP » recueille des données sonar par le biais d’un système sur le bateau auxiliaire et les transmet à un autre système sur le bateau-mère qui utilise un ordinateur pour générer une carte topographique. Ainsi, même si, en théorie, une personne versée dans l’art cherchant à fournir un système de détection de poissons suivait l’enseignement du document D7, cette personne versée dans l’art serait au mieux amenée à fournir un premier processeur à un premier emplacement pour recueillir et transmettre des données sonar, et un second processeur différent à un second emplacement pour générer ou mettre à jour la carte topographique.

En revanche, le système revendiqué utilise une unité principale de détection de poissons à la fois pour contrôler les transducteurs du sonar et pour générer ou mettre à jour la carte topographique en temps réel pendant les manœuvres sur le lac. Il n’est pas nécessaire de disposer d’un ordinateur dédié à la génération de cartes et d’un programme de cartographie distinct.

[25]       Tout d’abord, le document D7 ne suggère pas que le sondeur multifaisceaux « WASSP » comporte un arrangement de type « bateau-mère/bateau-auxiliaire ». Le document D7 (pages 5, 6, 14, 15, 27, 28 et 32) montre que le système ne comporte qu’un seul bateau, comme la présente invention. Le document D7 (pages 26 et 33) ne fait pas référence à la navigation des super yachts, mais il suggère la détection de poissons comme application, comme la présente invention.

[26]       Il convient de noter que l’arrangement bateau-mère/bateau auxiliaire et l’application du système « WASSP » à la navigation des super-yachts, auxquels la RRP fait référence, sont décrits dans le document D1. Le système « WASSP‑Wireless » dans ce dernier a cependant été développé comme une application supplémentaire du sondeur multifaisceaux « WASSP » (et de son logiciel de navigation) déjà disponible sur le marché. Cela ressort clairement de la description et du contexte fournis par le document D1, ainsi que des dates de publication relatives des documents D1 et D7.

[27]       En outre, les idées originales des revendications 1, 8 et 14 au dossier comprennent chacune un processeur couplé au réseau de transducteurs sonar et à l’affichage, comme le fait le système décrit dans le document D7.

[28]       La lettre de RP traite également des revendications restantes au dossier.

[29]       En ce qui concerne la revendication indépendante 16 au dossier, le document D7 (pages 4, 11, 15, 16, 22, 26 et 29) divulgue que les images sous-marines générées à partir des données sonar peuvent se superposer aux données cartographiques. Cependant, le document D7 n’indique pas explicitement que les données sonar sont fournies pour une zone 360 degrés autour de l’embarcation.

[30]       En ce qui concerne la revendication dépendante 2 au dossier, le document D7 ne traite pas de l’estimation des données topographiques manquantes.

[31]       En ce qui concerne les revendications dépendantes 3 à 7, 9 à 12, 17 et 18 au dossier, le document D7 (pages 11, 15, 22 à 26 et 31 à 33) divulgue ces différentes formes de représentation de l’information.

[32]       En ce qui concerne les revendications dépendantes 13 et 15 au dossier, le document D7 ne discute pas explicitement de l’utilisation de dispositifs de mémoire portables ou de l’intégration du processeur dans l’ensemble transducteur sonar.

[33]       Le document D8 (résumé; paragraphes 6 à 11, 14, 20, 23, 68, 69, 72, 77, 79, 131 et 132; figures 2, 12 et 29) divulgue un système sonar comprenant un ensemble transducteur sonar destiné à être monté sur le bateau et fournissant des données sonar pour une zone 360 degrés. Le système utilise les données du sonar pour fournir des images sous-marines en temps réel pour l’affichage; les données du sonar peuvent également être stockées pour un traitement et une utilisation ultérieurs. Le document D8 (paragraphes 28, 113 et 131; figures 12, 29 et 30) divulgue également l’utilisation de couleurs, de lignes de contour et d’autres formes de représentation.

[34]       Bien que le document D8 indique que les images sous-marines peuvent être affichées simultanément avec les données cartographiques précédemment stockées, elles sont affichées côte à côte. Le document D8 ne révèle pas que les images sont superposées aux données des cartes, ou utilisées pour générer ou mettre à jour des cartes.

Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

[35]       Comme il a été mentionné, nous ne sommes pas en mesure de relever des différences significatives entre le document D7 et les idées originales des revendications 1, 3 à 12 et 14 du dossier. Il s’ensuit que ces revendications auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art.

[36]       En ce qui concerne les revendications 16 à 18 du dossier, il aurait été évident que l’approche de la cartographie, ainsi que du traitement et de l’utilisation en temps réel des données du sonar, dans le document D7, fonctionnerait également bien lorsque ces données du sonar couvrent une zone de 360 degrés. Comme il a été noté, il est bien connu de générer des données sonar pour une telle zone. Le document D8 divulgue également un exemple.

[37]       En ce qui concerne la revendication 2 au dossier, la lettre de RP a noté qu’il est bien connu d’utiliser des techniques d’interpolation pour estimer les parties manquantes des données topographiques adjacentes. Cela est également confirmé par le fait que la présente description (par exemple les paragraphes 7 et 43) se réfère simplement à l’estimation ou à l’interpolation, sans suggérer aucune des étapes suivies ou aucun des moyens utilisés.

[38]       Dans la RRP, le Demandeur a fait valoir que le document D7 n’aurait pas mené la personne versée dans l’art à adopter une telle technique :

[traduction]

Plus précisément, et comme il a été mentionné et discuté ci-dessus, le document D7 concerne principalement l’utilisation d’un bateau auxiliaire naviguant à l’avant d’un super yacht, pour générer et transmettre des données sonar à un système sur le super yacht dans le but de générer une carte topographique, afin de permettre une navigation sûre du super yacht. Une personne versée dans l’art suivant l’enseignement de D7 n’aurait pas été amenée à générer des données et à se fier à des données topographiques estimées et interpolées à cette fin, car cela aurait mis en danger le super yacht de plusieurs millions de dollars en remplissant des données topographiques là où le bateau auxiliaire n’avait pas voyagé. L’objectif du système du document D7 est de garantir la sécurité du passage en faisant balayer la route par le bateau-auxiliaire pour détecter tout changement qui aurait pu se produire depuis que la carte de navigation sous-jacente a été établie, ou pour établir une telle carte de navigation lorsqu’elle n’existe pas.

[39]       Comme il a été expliqué ci-dessus, le document D7 ne concerne pas les arrangements bateau-mère/bateau auxiliaire ni la navigation de super yachts. Quoi qu’il en soit, les problèmes inhérents à la modélisation numérique d’une surface continue (telle que le lit d’un plan d’eau) à partir d’un échantillon limité de données sonar ont déjà été rencontrés auparavant. Ces problèmes ont été rencontrés dans différentes applications de la modélisation, y compris la génération de cartes nautiques. Il serait logique pour la personne versée dans l’art tirer parti des techniques généralement connues pour résoudre ces problèmes afin de combler les lacunes des données.

[40]       En ce qui concerne les revendications 13 et 15 au dossier, la lettre de RP fait remarquer qu’il est bien connu d’utiliser des dispositifs de mémoire portables avec des systèmes informatisés et d’intégrer des processeurs dans des ensembles de transducteurs sonar.

[41]       La RRP a souligné que le processeur défini par la revendication 15 comme étant intégré dans l’ensemble transducteur du sonar est configuré pour créer et mettre à jour la carte topographique en temps réel et rendre la carte pour l’affichage. Le Demandeur a fait valoir que l’art antérieur et les CGC n’auraient pas motivé la personne versée dans l’art à faire un tel arrangement.

[42]       Nous considérons que l’emplacement du processeur de commande dans le système d’imagerie sonar est un choix de conception qui s’offre à la personne versée dans l’art, compte tenu de ses CGC. Le système remplit la même fonction globale, à savoir utiliser les données sonar pour produire et mettre à jour des cartes, quelle que soit la méthode utilisée. Aucun résultat inattendu ne semble être obtenu. La description (paragraphe 27) suggère que l’intégration du processeur de commande dans l’ensemble transducteur du sonar permet d’installer facilement l’unité dans différents types d’embarcations, mais il s’agit là du résultat attendu du placement des composants nécessaires dans une unité contenue. Il ne semble pas y avoir de difficulté à placer le processeur de commande ici – le manque de détails relatif à la mise en œuvre dans la description et les dessins suggère que la mise en œuvre est à la portée à la portée de la personne versée dans l’art. L’attribution de fonctions à un microprocesseur dans l’ensemble transducteur du sonar pour réduire les exigences fonctionnelles pour le reste de l’équipement de l’embarcation est également illustrée par un mode de réalisation divulgué dans le document D8 (paragraphe 72).

Conclusion concernant l’évidence

[43]       Nous considérons que l’objet des revendications 1 à 14 au dossier aurait été évident pour la personne versée dans l’art compte tenu du document D7 et des CGC. L’objet des revendications 15 à 18 au dossier aurait été évident pour la personne versée dans l’art compte tenu de la combinaison des documents D7, D8 et des CGC. Par conséquent, les revendications 1 à 18 ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Il y a une erreur typographique dans la revendication 16

[44]       Il manque un point-virgule à la fin de l’avant-dernier paragraphe de la revendication 16 au dossier.

Les revendications proposées ne corrigent pas les irrégularités

[45]       Comme il a été mentionné ci-dessus, le Demandeur a présenté les deuxièmes revendications proposées avec la RRP. Les deuxièmes revendications proposées comprennent 56 revendications. Les revendications indépendantes 1 et 19 concernent des systèmes de cartographie sonar, la revendication indépendante 26 concerne une unité de tête et les revendications indépendantes 39 et 52 concernent des méthodes.

[46]       Les deuxièmes revendications proposées 1 à 15 et 19 à 21 sont les mêmes que les revendications 1 à 18 au dossier, mais avec le texte supplémentaire : [traduction] « dans lequel le processeur est un processeur unique ou de multiples processeurs regroupés ». Les deuxièmes revendications proposées 16 à 18 et 22 à 25 précisent s’il s’agit d’un processeur unique ou encore l’endroit où il se trouve. Les deuxièmes revendications proposées 26 à 56 visent un objet similaire à celui des autres deuxièmes revendications proposées, mais impliquent en outre la réception et l’utilisation d’informations de position provenant d’un récepteur GPS.

[47]       Les modifications proposées corrigeraient l’erreur typographique, mais pas l’irrégularité de l’évidence.

[48]       Le texte ajouté aux deuxièmes revendications proposées 1 à 15 et 19 à 21 ne distingue pas le « processeur » des processeurs des systèmes dans l’art antérieur cité ou les CGC. Ces revendications sont donc évidentes pour les mêmes raisons que les revendications 1 à 18 au dossier.

[49]       Les deuxièmes revendications proposées 16 et 23 exigent que le processeur soit intégré dans une manette de commande. Les deuxièmes revendications proposées 17 et 24 précisent que le processeur est [traduction] « un processeur unique ». Puisque le document D7 (pages 6 à 7) et D8 (paragraphes 72, 77 et 80; figure 2) divulguent des systèmes de cartographie sonar ou d’imagerie sonar comprenant une unité de tête avec un processeur (par exemple un ordinateur personnel pour que l’utilisateur puisse interagir avec le système et le faire fonctionner), ces deuxièmes revendications proposées ne se distinguent pas davantage de l’art antérieur cité. Elles sont donc évidentes pour les mêmes raisons que les revendications au dossier.

[50]       Les deuxièmes revendications proposées 18 et 25 précisent que le processeur est composé de [traduction] « processeurs multiples regroupés ». L’utilisation ou non de processeurs multiples dans un système informatique est un choix de conception qui s’offre à la personne versée dans l’art. La description et les dessins ne suggèrent pas non plus que la mise en œuvre soit au-delà des CGC de la personne versée dans l’art, ni que des résultats inattendus soient obtenus. La demande (paragraphe 27) ne dit pas grand-chose sur l’utilisation de processeurs regroupés.

[51]       La deuxième revendication proposée 22 exige que le processeur soit intégré dans l’ensemble transducteur du sonar. Comme il est expliqué ci-dessus concernant la revendication 15 au dossier, ce détail n’aurait pas nécessité un quelconque degré d’ingéniosité inventive, une fois que le document D8 et les CGC ont également été pris en considération.

[52]       En ce qui concerne les deuxièmes revendications proposées 26 à 56, une telle utilisation de la technologie GPS fait partie des CGC. D7 (page 27) et D8 (par exemple, les paragraphes 14, 20, 27, 29, 30, 101, 131 et 132) divulguent également des exemples.

[53]       Par conséquent, les deuxièmes revendications proposées 1 à 56 auraient été évidentes. En conséquence, les deuxièmes revendications proposées ne sont pas considérées comme une modification nécessaire en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

 

Recommandation de la commission

[54]       Compte tenu de ce qui précède, nous recommandons que la demande soit rejetée au motif que les revendications 1 à 18 au dossier définissent un objet évident, ce qui contrevient à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Leigh Matheson

Liang Ji

Vincent Pellerin

Membre

Membre

Membre


 

Décision du commissaire

[55]       Je suis d’accord avec les conclusions de la Commission et sa recommandation de refuser la demande au motif que les revendications au dossier définissent un objet évident, ce qui contrevient à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[56]       En conséquence, conformément à l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’accorder un brevet relativement à la présente demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le Demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

 

Konstantinos Georgaras

Commissaire aux brevets

Fait à Gatineau (Québec)
ce 30e jour de novembre 2022

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