Brevets

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Référence : The Strategic Coach (Re), 2020 CACB 30

Commissioner’s Decision #1550

Décision du commissaire no 1550

Date : 2020-08-06

SUJET :

J10

Programmes d’ordinateur

 

J40

Processus psychologique

 

O00

Évidence

 

B00

Caractère ambigu ou indéfini

 

C00

Caractère Adéquat ou Inadéquat de la Description

 

A11

Nouvelle matière

TOPIC :

J10

Computer Programs

 

J40

Mental Steps

 

O00

Obviousness

 

B00

Ambiguity or Indefiniteness

 

C00

Adequacy or Deficiency of Description

 

A11

New Matter


Application No. : 2,711,875

Demande no 2 711 875


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets (DORS/96-423), dans leur version antérieure au 30 octobre 2019 (les « anciennes règles »), la demande de brevet numéro 2 711 875 a subséquemment fait l’objet d’une révision conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251) (« Règles sur les brevets »). La recommandation de la Commission et la décision de la commissaire sont de rejeter la demande.

Agent du Demandeur

MARKS & CLERK

100 rue Simcoe, bureau 200

TORONTO (Ontario) M5H 3G2


INTRODUCTION

[1] La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet canadien refusée numéro 2 711 875 (la « présente demande »), intitulée « GESTION DU PERFECTIONNEMENT PROFESSIONNEL » et inscrite au nom de THE STRATEGIC COACH (le « Demandeur »). La Commission d’appel des brevets (la « Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets. Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, nous recommandons à la commissaire aux brevets de rejeter la demande.

CONTEXTE

La demande

[2] La présente demande a été déposée au Canada le 2 août 2010. Elle est devenue accessible au public le 3 février 2011.

[3] La présente demande porte sur une méthode de gestion du perfectionnement professionnel, dans laquelle les objectifs professionnels sont définis, les progrès d’un client en vue des objectifs sont évalués et un calendrier d’atteinte des objectifs déterminés est fourni au client.

Historique de la poursuite

[4] Le 16 mai 2017, une décision finale (« DF ») a été rédigée conformément au paragraphe 30(4) des anciennes règles. La DF énonçait que la présente demande est irrégulière au motif que toutes les revendications 1 à 20 au dossier au moment de la DF (les « revendications au dossier ») visent un objet non prévu par la Loi et ne sont donc pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets, et que les revendications 1 à 20 au dossier auraient été évidentes et sont donc non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. La DF indiquait également que la revendication 11 au dossier est indéfinie et n’est donc pas conforme au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

[5] Dans une réponse du 16 novembre 2017 à la DF (« R‑DF »), le Demandeur a présenté les revendications proposées 1 à 19 (« revendications proposées‑1 »), qui comprenaient des révisions rédactionnelles de la revendication 9 au dossier et la suppression de la revendication 11. Des révisions rédactionnelles ont également été proposées pour la description. La R‑DF comprenait des arguments en faveur de la brevetabilité des revendications, ainsi que des observations à l’égard de la pratique actuelle du Bureau en ce qui concerne l’interprétation des revendications.

[6] L’examinateur ayant jugé que la demande n’était pas conforme à la Loi sur les brevets conformément à l’alinéa 30(6)c) des anciennes règles, la demande a été transmise à la Commission pour révision le 2 mai 2018, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs (« RM »). Le RM expose la position selon laquelle les revendications au dossier étaient toujours considérées comme irrégulières en raison de l’absence d’objet prévu par la Loi et d’évidence. Le RM ne mentionnait pas l’irrégularité relative au caractère indéfini de la revendication 11 au dossier; or compte tenu de la suppression proposée de la revendication 11, cette question aurait été théorique.

[7] Dans une lettre en date du 4 mai 2018, la Commission a transmis au Demandeur une copie du RM et lui a demandé de confirmer qu’il souhaitait toujours la révision de la demande.

[8] Dans une réponse en date du 2 août 2018, le Demandeur a indiqué qu’il souhaitait toujours que la Commission procède à la révision de sa demande. Le 24 août 2018, le Demandeur a présenté volontairement une antériorité qui avait été versée au dossier pendant la poursuite de la demande correspondante aux États-Unis.

[9] Le présent Comité (le « Comité ») de la Commission a été formé pour examiner la présente demande en vertu de l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets.

[10] Dans une lettre de révision préliminaire (« lettre de RP ») en date du 6 février 2020, le Comité a exposé son analyse préliminaire des questions de l’absence d’objet prévu par la Loi et de l’évidence des revendications au dossier. Nous avons également abordé la question du caractère indéfini de la revendication 11 au dossier et avons remarqué une irrégularité similaire à l’égard de la revendication 9. Le Comité a relevé une nouvelle irrégularité à l’égard du caractère suffisant du mémoire descriptif en vertu du paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets. Le Demandeur a été avisé de cette nouvelle irrégularité et a eu la possibilité de répondre aux nouvelles irrégularités et à celles en suspens. La lettre de RP présente une analyse préliminaire des revendications proposées‑1, indiquant que cet ensemble de revendications proposées ne résoudrait pas l’irrégularité de l’objet prévu par la Loi. La lettre de RP énonçait une date d’audience proposée et la date d’échéance des observations écrites.

[11] L’audience orale pour cette affaire avait à l’origine pour date confirmée le 23 mars 2020, mais en raison des circonstances de la pandémie de COVID-19, l’audience a été reportée. Elle a eu lieu le 22 mai 2020 par vidéoconférence.

[12] Avec la réponse à la lettre de RP (« R‑RP ») datée du 6 mars 2020, le Demandeur a présenté les revendications proposées 1 à 19 (« revendications proposées‑2 »), qui incluaient les modifications proposées dans les revendications proposées‑1, ainsi que d’autres modifications proposées aux revendications indépendantes pour inclure une caractéristique supplémentaire.

[13] Lors de l’audience du 22 mai 2020, le Comité a relevé une nouvelle question à l’égard des revendications proposées-2, à savoir l’introduction possible d’un nouvel élément inadmissible aux revendications, en violation de l’article 38.2 de la Loi sur les brevets. La nouvelle question relative à l’élément est soulevée à la suite de la caractéristique supplémentaire ajoutée aux revendications indépendantes dans les revendications proposées-2. Le Comité a également indiqué lors de l’audience que l’introduction de la caractéristique supplémentaire et son incidence sur la compréhension par le Comité de la portée des revendications au dossier pourraient avoir une incidence sur l’opinion préliminaire du Comité quant à la non-évidence des revendications. À l’audience, il a été convenu que le Demandeur aurait une autre occasion de présenter des observations sur la question du nouvel élément et ses effets sur les autres questions en suspens.

[14] D’autres observations ont été reçues le 2 juin 2020. Avec ces observations écrites supplémentaires (« RS-RP »), le Demandeur a présenté un nouvel ensemble de revendications proposées 1 à 19 (« revendications proposées-3 »), qui comprenait toutes les modifications de revendications précédemment proposées, plus des modifications supplémentaires proposées aux revendications indépendantes pour ajouter des caractéristiques supplémentaires. Comme il a déjà été confirmé auprès du Demandeur à l’audience orale, seules les revendications proposées‑3 seront prises en considération dans le cadre de cette recommandation.

Questions

[15] Les questions à aborder en ce qui concerne le mémoire descriptif et les revendications au dossier sont les suivantes :

  • les revendications 1 à 20 au dossier visent un objet prévu par la Loi;
  • les revendications 1 à 20 au dossier auraient été évidentes;
  • les revendications 9 et 11 sont imprécises;

· le mémoire descriptif est suffisant.

[16] Après avoir examiné les revendications au dossier et à la lumière de nos conclusions à leur sujet, nous nous penchons sur les revendications proposées (revendications proposées‑3) et déterminons si elles constituent des modifications nécessaires pour rendre la demande conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, conformément au paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.


 

PRINCIPES JURIDIQUES ET PRATIQUE DU BUREAU

Interprétation des revendications

[17] Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc., 2000 CSC 66 [FreeWorldTrust], les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir aussi Whirlpool Corp. c Camco Inc., 2000 CSC 67 aux alinéas 49f) et g) et au paragraphe 52 [Whirlpool]). Tel qu’il est indiqué à la section 12.02 (révisé en juin 2015) du Recueil des pratiques du Bureau des brevets [RPBB], la première étape de l’interprétation téléologique consiste à identifier la personne versée dans l’art, ainsi que de définir ses connaissances générales courantes (les « CGC »). L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution proposée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être identifiés; il s’agit de ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée, tel qu’elle est revendiquée.

Caractère indéfini

[18] Le paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets exige que les revendications définissent distinctement et en des termes explicites l’objet :

Le mémoire descriptif se termine par une ou plusieurs revendications définissant distinctement et en des termes explicites l’objet de l’invention dont le demandeur revendique la propriété ou le privilège exclusif.

[19] Dans Minerals Separation North American Corp c. Noranda Mines Ltd, [1947] C de l’Éch. 306, 12 CPR 99, à la page 146, la Cour a insisté sur l’obligation qui incombe au Demandeur d’exposer clairement dans ses revendications l’étendue du monopole qu’il cherche à obtenir et d’employer dans ses revendications des termes clairs et précis :

En formulant ses revendications, l’inventeur érige une clôture autour des champs de son monopole et met le public en garde contre toute violation de sa propriété. La délimitation doit être claire afin de donner l’avertissement nécessaire, et seule la propriété de l’inventeur doit être clôturée. La teneur d’une revendication doit être exempte de toute ambiguïté ou obscurité pouvant être évitée, et sa portée ne doit pas être flexible; elle doit être claire et précise de façon que le public puisse savoir non seulement où il lui est interdit de passer, mais aussi où il peut passer sans risque.

Objet prévu par la Loi

[20] La définition d’invention est indiquée à l’article 2 de la Loi sur les brevets :

« invention » Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[21] La note concernant l’examen PN 2013-03 du Bureau intitulée « Pratique d’examen au sujet des inventions mises en œuvre par ordinateur »PN 2013-03 ») clarifie la pratique d’examen en ce qui concerne l’approche du Bureau à l’égard des inventions mises en œuvre par ordinateur.

[22] Tel qu’énoncé dans PN 2013-03, la pratique du Bureau considère que lorsqu’un ordinateur est jugé comme un élément essentiel d’une revendication interprétée, l’objet revendiqué sera généralement brevetable. Lorsque, en contrepartie, il est déterminé que les éléments essentiels d’une revendication interprétée se limitent à un objet exclu de la définition du terme « invention » (par exemple, les beaux-arts, les méthodes de traitement médical, les inventions sans présence physique, ou les inventions où l’objet revendiqué est simplement un concept, un schéma, un plan ou un ensemble de règles), la revendication ne sera pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Évidence

[23] La Loi sur les brevets exige que l’objet d’une revendication ne soit pas évident pour la personne versée dans l’art. L’article 28.3 de la Loi sur les brevets prévoit ce qui suit :

28.3 L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[24] Dans Apotex Inc. c. Sanofi-Synthelabo Canada Inc., 2008 CSC 61 [Sanofi], au paragraphe 67, la Cour suprême du Canada a déclaré que lors de l’examen relatif à l’évidence, il y a lieu de suivre la démarche à quatre volets suivante :

(1) a) Identifier la « personne versée dans l’art »;

b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation;

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention telle que revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

Caractère suffisant

[25] Les alinéas 27(3)a) et b) de la Loi sur les brevets exigent, respectivement, que le mémoire descriptif d’un brevet (1) décrive l’invention et (2) précise les étapes de sa production et de son emploi :

Le mémoire descriptif doit :

a) décrire d’une façon exacte et complète l’invention et son application ou exploitation, telles que les a conçues son inventeur;

b) exposer clairement les diverses phases d’un procédé, ou le mode de construction, de confection, de composition ou d’utilisation d’une machine, d’un objet manufacturé ou d’un composé de matières, dans des termes complets, clairs, concis et exacts qui permettent à toute personne versée dans l’art ou la science dont relève l’invention, ou dans l’art ou la science qui s’en rapproche le plus, de confectionner, construire, composer ou utiliser l’invention.

[26] La jurisprudence pertinente révèle qu’une décision visant à déterminer si le mémoire descriptif est conforme aux alinéas 27(3)a) et 27(3)b) de la Loi sur les brevets exige que l’on réponde à trois questions : Quelle est l’invention? Comment fonctionne-t-elle? Compte tenu seulement du mémoire descriptif, la personne versée dans l’art peut‑elle produire l’invention en utilisant uniquement les instructions contenues dans la divulgation? Voir : Teva Canada Ltd c Novartis AG, 2013 CF 141, citant Teva Canada Ltd c Pfizer Canada Inc, 2012 CSC 60 [Teva] et Consolboard v MacMillan Bloedel (1981), 56 CPR (2d) 145 (CSC) [Consolboard]. Bien que les connaissances générales courantes puissent être invoquées, pour que l’on puisse répondre par l’affirmative à la troisième question, la personne versée dans l’art ne doit pas avoir à faire preuve d’inventivité ni à se lancer dans une expérimentation excessive : Aventis Pharma Inc c Apotex Inc, 2005 CF 1283; Mobil Oil Corp c Hercules Canada Inc, [1995] ACF. No. 1243; Merck & Co c Apotex Inc, [1995] 2 CF 723.

[27] Dans Consolboard, aux pages 154 et 155, la Cour suprême a cité le livre Canadian Law and Practice Relating to Letters Patent for Inventions (1969, 4e éd.), dont il tire cette citation de H.G. Fox : [traduction] « l’inventeur doit, en échange de l’octroi d’un brevet, donner au public une description adéquate de l’invention avec des détails suffisamment complets et précis qui permettront à un ouvrier, versé dans l’art auquel se rapporte l’invention, de fabriquer ou d’utiliser cette invention lorsque la période du monopole est écoulée ».

[28] La date pertinente pour déterminer la conformité avec le paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets est la date de dépôt (Teva, par. 90).


Nouvel élément

[29] L’article 38.2 de la Loi sur les brevets énonce les conditions dans lesquelles des modifications peuvent être apportées au mémoire descriptif ou aux dessins d’une demande de brevet :

38.2 (1) (Sous réserve des paragraphes (2) et (3) et des règlements, le mémoire descriptif et les dessins faisant partie de la demande de brevet peuvent être modifiés avant la délivrance du brevet.

Limite

(2) Le mémoire descriptif ne peut être modifié pour décrire des éléments qui ne peuvent raisonnablement s’inférer de celui-ci ou des dessins faisant partie de la demande, sauf dans la mesure où il est mentionné dans le mémoire qu’il s’agit d’une invention ou découverte antérieure.

Idem

(3) Les dessins ne peuvent être modifiés pour y ajouter des éléments qui ne peuvent raisonnablement s’inférer de ceux-ci ou du mémoire descriptif faisant partie de la demande, sauf dans la mesure où il est mentionné dans le mémoire qu’il s’agit d’une invention ou découverte antérieure.

[30] La question de savoir si l’élément ajouté au mémoire descriptif ou aux dessins par voie de modification est conforme à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets est examinée du point de vue de la personne versée dans l’art.

[31] L’évaluation de la présence d’un nouvel élément exige donc de comparer le mémoire descriptif en instance avec le mémoire descriptif et les dessins initialement déposés et de déterminer si l’objet des modifications est celui qui aurait été raisonnablement déduit du mémoire descriptif initial ou des dessins initiaux par la personne versée dans l’art.

Analyse

Caractère indéfini

[32] Dans la lettre RP à la page 5, nous avons exprimé notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications 9 et 11 au dossier sont imprécises et ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Toutefois, le Demandeur avait déjà proposé de supprimer la revendication 11 et de modifier la revendication 9 dans la R-DF pour corriger cette irrégularité :

[traduction]

À la page 6 de la DF, on soutient que la revendication 11 au dossier est imprécise puisqu’il n’y a pas d’antécédent pour « l’étape suivante » et que « base de revenu minimum » est mentionnée à l’aide d’un article indéfini, ce qui crée de la confusion quant à la présence d’une « base de revenu minimum » supplémentaire outre celle énoncée à la revendication 1.

À notre avis préliminaire, comme il n’y a aucune référence dans la revendication 10, dont dépend la revendication 11, ou dans toute revendication antérieure à ce que la revendication 10 appelle une « prochaine étape », la personne versée dans l’art se retrouverait dans l’incertitude quant à la portée de cette revendication. De même, l’introduction d’une « base de revenu minimum » supplémentaire indéfinie ferait aussi en sorte que la personne versée dans l’art se retrouve dans l’incertitude quant à la portée de la revendication.

Dans le R-DF, le Demandeur a proposé de supprimer la revendication 11 au dossier, ce qui rendrait cette irrégularité théorique. Le Demandeur a également proposé de modifier la revendication 9 au dossier afin d’éliminer aussi le libellé problématique de « la prochaine étape », présent lui aussi dans cette revendication.

À notre avis préliminaire, à la lumière de ce qui précède, la revendication 11 au dossier est imprécise et n’est donc pas conforme au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

Toutefois, nous sommes également d’avis préliminaire que la revendication 9 au dossier est également imprécise et non conforme au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets, et, par conséquent, nous avisons le Demandeur de cette nouvelle irrégularité en vertu du paragraphe 86(9) des Règles sur les brevets.

[33] Comme nous l’avons indiqué dans la lettre de RP, ce qui précède n’a pas d’incidence sur notre capacité d’évaluer les autres questions touchant les revendications au dossier.

[34] Dans la R‑PR, le Demandeur a soutenu que les revendications proposées‑2 aborderaient la question susmentionnée, où les mêmes modifications ont été proposées que celles de la R‑DF. Cette question n’a pas été abordée plus en détail dans la RS‑RP.

[35] À la lumière de ce qui précède, nous concluons que les revendications 9 et 11 au dossier sont imprécises et qu’elles ne sont donc pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

Interprétation des revendications

[36] Comme nous l’avons fait dans la lettre de RP, nous présentons les revendications indépendantes 1 et 13 ci-dessous. La revendication indépendante 19 est une revendication de support lisible par ordinateur, où le support stocke des instructions comportant les étapes énoncées dans la revendication indépendante 13 sur le système :

[traduction]

1. Une méthode pour gérer le perfectionnement professionnel, la méthode comprenant :

la réception d’information sur un client indiquant un statut actuel du client, le statut actuel concernant :

une pluralité de tâches professionnelles rentables accomplies par le client, et

un montant de bénéfice pour chacune des tâches professionnelles effectuées par le client;

l’exécution d’instructions lisibles par ordinateur stockées en mémoire pour définir un objectif pour le client, où l’exécution des instructions par un processeur :

identifie un objectif professionnel associé au client en fonction du statut actuel reçu concernant une tâche professionnelle exécutée par le client,

calcule des progrès du client en vue de l’objectif professionnel identifié en fonction du statut actuel reçu concernant la tâche professionnelle exécutée par le client,

calcule un nombre de jours dédiés requis pour atteindre l’objectif professionnel, le calcul étant fondé sur les progrès calculés du client,

calcule une base de revenu minimum pour les tâches professionnelles en fonction du montant de bénéfice pour les tâches professionnelles, et

génère un objectif professionnel intermédiaire entre la base et l’objectif professionnel déterminé, l’objectif intermédiaire comprenant un objectif de revenu fondé sur la base de revenu minimum, le montant du bénéfice pour chacune des tâches professionnelles, les progrès calculés du client et le nombre calculé de jours dédiés; et

la communication au client d’une recommandation pour atteindre l’objectif professionnel intermédiaire généré, la recommandation indiquant le nombre calculé de jours dédiés requis pour atteindre l’objectif professionnel intermédiaire, la base de revenu minimum et une pluralité de tâches sur lesquelles se concentrer.

13. Un système de gestion du perfectionnement professionnel comprenant :

une mémoire configurée pour stocker l’information sur un client indiquant un statut du client, le statut concernant une tâche professionnelle exécutée par le client;

un processeur configuré pour exécuter des instructions lisibles par ordinateur stockées en mémoire pour :

identifier un objectif professionnel associé au client en fonction de l’information sur le client,

calculer des progrès du client en vue de l’objectif professionnel identifié en fonction de l’information sur le client, et

déterminer un nombre de jours dédiés requis pour atteindre l’objectif professionnel, la détermination étant fondée sur les progrès calculés de l’utilisateur; et

une interface configurée pour communiquer au client une recommandation pour atteindre l’objectif professionnel, la recommandation indiquant le nombre de jours dédiés requis pour atteindre l’objectif professionnel.

Observations concernant les pratiques du Bureau

[37] Dans la lettre de RP à la page 7, nous avons abordé les observations générales du Demandeur qui figuraient dans la R‑DF en ce qui concerne la pratique du Bureau concernant l’interprétation des revendications. Le Demandeur a soutenu que l’approche du Bureau en matière d’interprétation téléologique n’était pas appuyée par la jurisprudence canadienne, invoquant les décisions de la Cour suprême du Canada dans FreeWorldTrust et soulignant les critères qui y sont énoncés pour l’identification des éléments comme étant essentiels ou non essentiels :

[traduction]

L’approche de l’interprétation téléologique au cours de l’examen énoncée dans la section 12.02 du RPBB représente l’interprétation par le Bureau des brevets de la jurisprudence énoncée ci-dessus par le Demandeur. L’application de la jurisprudence y est analysée comme suit :

Dans Canada (Procureur général) c. Amazon.com, inc., la Cour d’appel fédérale a fait observer que, lors de l’examen, la jurisprudence de la Cour suprême « requiert que l’identification de l’invention réelle par le commissaire soit fondée sur une interprétation téléologique des revendications du brevet ».

L’application des principes d’interprétation téléologique à l’examen d’une demande de brevet doit tenir compte du rôle de l’examinateur de brevet et du but ainsi que du contexte de l’examen.

Dans Free World Trust et Whirlpool, la Cour suprême a souligné que l’interprétation téléologique est réalisée par la cour pour déterminer objectivement ce que la personne versée dans l’art, à la date de publication de la demande de brevet et sur le fondement des mots ou expressions particuliers utilisés dans la revendication, aurait compris de ce que le demandeur avait l’intention de protéger pour l’invention divulguée.

La section 12.02.01 du RPBB énonce ensuite les étapes à suivre pour interpréter une revendication de façon téléologique :

Lors de l’examen d’une revendication, l’examinateur doit l’interpréter de façon éclairée et en fonction de l’objet. Avant d’interpréter une revendication, l’examinateur doit :

1. Identifier la personne versée dans l’art [voir la section 12.02.02b];

2. Définir les connaissances générales courantes pertinentes de la personne versée dans l’art au moment de la publication [voir la section 12.02.02c].

Les étapes ci-dessus fournissent le contexte dans lequel la revendication doit être lue. Après avoir déterminé le contexte, l’examinateur doit :

3. Déterminer le problème abordé dans la demande et sa solution telle qu’elle est envisagée par l’inventeur [voir la section 12.02.02d];

4. Déterminer la signification des termes employés dans la revendication ainsi que les éléments de la revendication qui sont essentiels à la résolution du problème identifié [voir la section 12.02.02e].

L’analyse de l’interprétation des revendications ci-dessous a également été effectuée conformément aux étapes énoncées dans la section 12.02.01 du RPBB.

[38] Dans la R‑RP aux pages 2 et 3, le Demandeur a fait remarquer que le Comité avait rejeté l’interprétation de la décision FreeWorldTrust par le Demandeur, mais n’a pas présenté d’autres observations générales. Sans acquiescer aux observations préliminaires du Comité, les observations du Demandeur visaient principalement à aborder les étapes de l’approche du Bureau en matière d’interprétation des revendications, énoncée dans la section 12.02 du RPBB. Aucune observation à ce sujet n’a été faite dans la RS‑RP.

[39] Nous procédons à l’interprétation des revendications à la lumière de l’approche du Bureau pour l’interprétation des revendications.

La personne versée dans l’art

[40] Dans la lettre RP à la page 8, nous avons appliqué la définition de la personne versée dans l’art employée dans l’art qui est utilisée dans la DF, que le Demandeur n’avait pas contestée dans la R‑DF. La personne versée dans l’art a été définie comme suit :

[traduction]

une équipe de conseillers/consultants en perfectionnement professionnel et d’ingénieurs en logiciels ayant une connaissance générale de la conception de programmes et de réseaux informatiques, y compris des serveurs de bases de données.

[41] Ce qui précède n’a pas été contesté dans la R‑RP ou dans la RS‑RP. Nous adoptons cette définition.

Les connaissances générales courantes pertinentes

[42] Dans la lettre de RP à la page 8, nous avons examiné les CGC pertinentes telles qu’identifiées dans la DF, que le Demandeur n’avait pas contestées. Nous avons relevé d’autres aspects des CGC tirés de la section de la présente demande qui porte sur la description de l’art antérieur connexe : [non souligné dans l’original]

[traduction]

Dans la DF à la page 2, les CGC pertinentes de la personne versée dans l’art étaient énoncées :

La personne versée dans l’art posséderait des connaissances techniques sur la façon de programmer des logiciels, d’utiliser des bases de données et des réseaux informatiques afin de permettre la communication des clients avec les serveurs par l’entremise du réseau. De plus, la personne versée dans l’art saura également comment définir divers objectifs en matière de perfectionnement professionnel et comment évaluer les progrès réalisés en vue de l’atteinte des objectifs en utilisant une mesure mesurable connue (par exemple, en termes de temps estimé nécessaire pour atteindre les objectifs, de jours dédiés, etc.) et comment comparer les résultats à une certaine base.

Encore une fois, le Demandeur n’a pas contesté cette définition figurant dans la DF.

Bien que nous adoptions la description des CGC pertinentes telle qu’elle est énoncée dans la DF, nous identifions également les aspects généraux suivants tirés de la section de la présente demande qui porte sur la description de l’art antérieur connexe :

connaissance de diverses applications en ligne qui sont utilisées pour aider les personnes à gérer divers aspects de leur vie (p. ex. cesser de fumer, perdre du poids, obtenir un certificat professionnel) et qui peuvent être associées à des communautés en ligne qui offrent du soutien et des conseils;

connaissance que le perfectionnement professionnel est typiquement difficile à mesurer;

connaissance que les objectifs de perfectionnement professionnel peuvent être propres à une personne;

connaissance que l’analyse des facteurs liés au perfectionnement professionnel est complexe;

connaissance que la plupart des programmes de perfectionnement professionnel sont adaptés aux personnes et sont donc coûteux;

connaissance qu’il a été difficile d’étendre ce service de perfectionnement professionnel à de nombreux clients et de coordonner le soutien de groupe; et

connaissance de la nécessité d’améliorer les systèmes et les méthodes de gestion du perfectionnement professionnel.

[43] Dans la R-RP, aux pages 3 et 4, le Demandeur n’était pas d’accord avec la partie soulignée ci-dessus concernant les CGC pertinentes, tirée de la DF. Le Demandeur a soutenu que les points sont vagues, indéfinis et ambigus et qu’ils sont incompatibles avec le problème défini dans la présente demande au paragraphe [0004]. Le Demandeur a également soutenu que ces points sont incompatibles avec les points généraux des CGC énoncés dans la lettre PR et tirés de la présente demande elle-même, qui indiquent [traduction] « que l’analyse des facteurs visés par le perfectionnement professionnel est complexe » et « qu’il a été difficile d’étendre ce service de perfectionnement professionnel à de nombreux clients et de coordonner le soutien de groupe ».

[44] Nous reconnaissons qu’il serait difficile de clarifier des détails en particulier sur ces points.

[45] Comme le Demandeur n’a contesté aucun des autres points des CGC, nous procéderons en nous fondant sur les CGC pertinentes énoncées dans la lettre de RP, moins la partie soulignée de la DF énoncée ci‑dessus. Cependant, nous notons que l’absence de telles connaissances dans les CGC pertinentes renforce nos conclusions ultérieures concernant le caractère suffisant du mémoire descriptif en vertu du paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets.

Le problème à résoudre

[46] Dans la lettre de RP à la page 9, après avoir examiné la présente demande, la DF et les observations du Demandeur dans la R‑DF, nous avons accepté à titre préliminaire le problème tel qu’il est énoncé dans la DF, en ajoutant d’autres aspects (dont les deux sont soulignés ci-dessous) :

[traduction]

Dans la DF à la page 2, le problème à résoudre était le suivant :

Comme l’a indiqué le Demandeur dans le contexte de la demande, les méthodes actuelles de gestion du perfectionnement professionnel ont de la difficulté à mesurer les progrès réalisés en vue d’atteindre les objectifs professionnels par rapport aux méthodes de suivi du poids, du nombre de cigarettes fumées ou du nombre de crédits obtenus pour un certificat.

Bien que le Demandeur n’ait présenté aucune observation précise concernant le problème dans la R-DF, il a soutenu ceci : l’invention revendiquée concerne l’établissement d’objectifs professionnels [traduction] « en temps réel »; que les revendications résolvent des problèmes techniques; et qu’elles apportent des améliorations au domaine technique de la gestion du perfectionnement professionnel (R-DF, page 3).

En ce qui concerne l’établissement d’objectifs professionnels en temps réel, nous ne trouvons dans la présente demande aucune suggestion selon laquelle le processus d’analyse des progrès d’un client et de détermination d’un objectif professionnel approprié nécessite une analyse « en temps réel » et dépend en quelque sorte des calculs effectués par un ordinateur afin de fournir des résultats utiles. La présente demande ne laisse pas entendre que les recommandations à fournir à un client à la suite de la méthode divulguée sont à ce point sensibles au temps que la personne versée dans l’art comprendrait qu’il est nécessaire d’effectuer une analyse « en temps réel » informatisée.

Les problèmes allégués par le Demandeur relativement à la normalisation de la gestion du perfectionnement professionnel dans diverses circonstances individuelles ne semblent pas, à notre avis préliminaire, être « techniques » de quelque façon que ce soit. La présente demande porte sur divers calculs qui sont utilisés dans l’analyse des circonstances d’une personne, ainsi que des progrès et, plus tard, de l’élaboration d’objectifs professionnels pour cette personne, mais il n’y a pas de problèmes techniques évidents qui ont été abordés.

Les composants informatiques décrits dans la présente demande aux paragraphes [0018] à [0023] et [0039] à [0045] sont de nature générique, comprenant des dispositifs informatiques et de stockage bien connus utilisés pour effectuer les calculs requis et stocker les données. Le manque de détails techniques concernant la mise en œuvre des modules de calcul divulgués dans un système informatisé indique qu’il n’y a pas eu de problèmes associés à la mise en œuvre par ordinateur des calculs et qu’il n’y a pas eu de problème informatique à surmonter.

En ce qui concerne l’affirmation selon laquelle l’invention revendiquée se rapporte au domaine technique de la gestion du perfectionnement professionnel, le Demandeur affirme à l’appui d’une telle définition que les revendications visent un outil interactif. Toutefois, comme nous l’avons vu plus haut, nous sommes d’avis préliminaire qu’il n’y a pas eu de problèmes à résoudre associés à une telle mise en œuvre par ordinateur.

À la lumière de ce qui précède, nous sommes d’accord avec le problème relevé dans la DF; or à notre avis préliminaire, conformément à l’information fournie dans la description de l’art connexe au paragraphe [0004], le problème à résoudre tient aussi au fait que la gestion du perfectionnement professionnel est plus difficile à étendre et à appliquer en général à un plus grand groupe, puisque les objectifs peuvent être fondés sur des questions propres à un professionnel individuel.

[47] Dans la R-RP à la page 4, le Demandeur a soutenu que le problème à résoudre tel qu’il est identifié ci-dessus est de nature technique. Plus précisément, le Demandeur a soutenu que [traduction] « le problème à résoudre est la façon de programmer un ordinateur pour mesurer et suivre le développement d’une entreprise d’une manière qui peut être échelonnée afin d’être appliquée à un plus grand groupe ». Le Demandeur soutient que le processus manuel de suivi du développement d’une entreprise ne peut pas être facilement mis en œuvre sur un ordinateur et que le problème est de savoir comment fournir une méthode mise en œuvre par ordinateur.

[48] Lors de l’audience, le Demandeur a présenté des observations cohérentes, soutenant que le problème consistait à trouver un système permettant à un ordinateur d’exécuter les étapes manuelles de l’art antérieur qui ne pouvaient pas être exécutées par ordinateur. De l’avis du Demandeur, la programmation ou le code en soi ne faisait pas partie du problème à résoudre.

[49] Comme il est indiqué dans la lettre de RP, nous avons déjà examiné si le problème à résoudre est de nature technique. Le manque de détails techniques concernant la mise en œuvre des modules de calcul divulgués dans un système informatisé indique qu’il n’y a pas eu de problèmes associés à la mise en œuvre par ordinateur des calculs. La mise en œuvre par ordinateur décrite dans la présente demande est présentée à un niveau élevé comprenant la spécification des modules, en mettant l’accent sur les calculs de haut niveau qui doivent être effectués par de tels modules. Aucun détail n’est fourni sur la façon dont un ordinateur serait programmé pour effectuer de tels calculs, ce qui pourrait indiquer un problème lié à la mise en œuvre par ordinateur.

[50] De plus, bien que le système proposé par le Demandeur puisse permettre à la méthode de perfectionnement professionnel d’être échelonnée et exécutée par ordinateur, cela ne signifie pas qu’un problème informatique était présent. La nécessité d’étendre et d’appliquer une méthode de gestion du perfectionnement professionnel à un plus grand groupe n’est pas un problème propre à une mise en œuvre par ordinateur.

[51] La RS‑RP ne renfermait pas d’autres observations concernant le problème à résoudre.

[52] À la lumière de ce qui précède, nous concluons que le problème à résoudre est tel qu’il est énoncé dans la lettre de RP, à savoir :

[traduction]

Comme l’a indiqué le Demandeur dans le contexte de la demande, les méthodes actuelles de gestion du perfectionnement professionnel ont de la difficulté à mesurer les progrès réalisés en vue d’atteindre les objectifs professionnels par rapport aux méthodes de suivi du poids, du nombre de cigarettes fumées ou du nombre de crédits obtenus pour un certificat.

[…]

le problème à résoudre tient aussi au fait que la gestion du perfectionnement professionnel est plus difficile à étendre et à appliquer en général à un plus grand groupe, puisque les objectifs peuvent être fondés sur des questions propres à un professionnel individuel.

La solution

[53] Dans la lettre de RP à la page 10, après avoir examiné la DF et les observations du Demandeur dans la R‑DF, nous avons accepté à titre préliminaire la solution énoncée dans la DF :

[traduction]

Dans la DF à la page 2, la solution a été définie comme suit :

une méthode pour gérer le perfectionnement professionnel, où les objectifs professionnels sont identifiés, les progrès du client en vue de l’atteinte des objectifs sont évalués et le temps requis pour atteindre les objectifs est communiqué au client.

Le Demandeur n’a présenté aucune observation concernant en particulier la solution divulguée, outre l’affirmation générale selon laquelle les éléments informatiques étaient essentiels à l’invention revendiquée. Comme nous l’avons vu plus haut en ce qui concerne le problème à résoudre, nous sommes d’avis préliminaire qu’il n’y a pas eu de problème informatique à résoudre dans la mise en œuvre des calculs analysés dans la présente demande et, par conséquent, que les éléments informatiques ne font pas partie de la solution. Le Demandeur soutient, à la page 4 de la R-DF, que des ordinateurs génériques sont incapables d’exécuter les étapes de l’invention revendiquée. Cependant, c’est la mise en œuvre des calculs qui est la question au moment de déterminer le problème à résoudre, la solution et les éléments essentiels connexes. L’utilisation d’ordinateurs génériques pour incarner une série de calculs, sans qu’il soit question de difficultés techniques à le faire, indique, comme il a été mentionné ci-dessus, qu’aucun problème informatique n’a été réglé pour en arriver à l’invention divulguée.

À la lumière de ce qui précède, nous sommes d’accord à titre préliminaire avec la solution énoncée dans la DF.

[54] Dans la R‑RP à la page 5, le Demandeur soutient que la solution énoncée ci-dessus banalise les problèmes auxquels font face les inventeurs. Le Demandeur soutient que la solution prévoit des étapes précises à suivre pour fournir une méthode évolutive mise en œuvre par ordinateur qui peut être appliquée à de plus grands groupes, à savoir les étapes identifiées comme des éléments essentiels des revendications indépendantes 1, 12 et 18 au dossier dans la lettre de RP.

[55] Cependant, l’identification de la solution n’est pas synonyme de l’identification des éléments essentiels d’une revendication. Selon la section 12.02 du RPBB, il faut trouver une solution au problème à résoudre avant de déterminer les éléments des revendications qui sont essentiels.

[56] Le Demandeur soutient également que les revendications décrivent :

[traduction]

ce qui équivaut à un outil interactif utilisé par le client pour mettre à jour son état d’avancement afin de suivre ses progrès en vue d’un objectif professionnel. Cet outil interactif est ensuite utilisé pour calculer les progrès du client et faire des projections en fonction de ces progrès. L’outil interactif est également utilisé par le client pour déterminer un objectif professionnel à partir de plusieurs objectifs professionnels potentiels, puis pour générer un objectif intermédiaire qui rapprochera le client de cet objectif professionnel. De plus, l’outil interactif produit ensuite des recommandations à l’intention du client en vue de l’atteinte de l’objectif intermédiaire.

[57] L’affirmation selon laquelle les revendications portent sur un outil interactif a déjà été faite dans la position du Demandeur figurant dans la R‑DF, selon laquelle l’invention relève du domaine technique de la gestion du perfectionnement professionnel. Cet argument été abordé dans la lettre de RP dans l’analyse du problème à résoudre. Conformément à notre point de vue préliminaire énoncé dans la lettre de RP, nous sommes d’avis qu’il n’y a pas eu de problèmes à résoudre associés à la mise en œuvre par ordinateur, y compris la création d’un outil interactif. En outre, en ce qui concerne la nature interactive présumée de l’invention divulguée, les étapes de la méthode comprennent la fourniture de données de sortie selon les données d’entrée venant du client, ce qui, à notre avis, ne rend pas la méthode « interactive ». Les données d’entrée sont traitées selon certains calculs et des données de sortie sont fournies sous forme de recommandation au client.

[58] Aucune autre observation concernant la solution n’a été formulée dans la RS‑RP.

[59] À la lumière de ce qui précède, nous sommes d’avis que la solution est telle qu’elle est énoncée dans la lettre de RP, à savoir :

[traduction]

une méthode pour gérer le perfectionnement professionnel, où les objectifs professionnels sont identifiés, les progrès du client en vue de l’atteinte des objectifs sont évalués et le temps requis pour atteindre les objectifs est communiqué au client.

Les éléments essentiels des revendications

[60] Dans la lettre de RP aux pages 10 et 11, nous présentons les deux listes des éléments essentiels des revendications au dossier tels qu’ils sont identifiés dans la DF. Nous avons convenu à titre préliminaire que les listes des éléments essentiels reflétaient l’objet interprété des revendications indépendantes 1 et 13/19, respectivement, après avoir examiné les observations du Demandeur dans la R‑DF. Compte tenu de notre opinion préliminaire figurant dans la lettre de RP, les éléments essentiels des revendications 1 et 13/19 au dossier étaient les suivants :

Revendication 1

  • réception d’information sur un client indiquant un statut actuel du client, le statut actuel concernant des tâches professionnelles exécutées par le client, et un montant de bénéfice pour chaque tâche exécutée par le client;

  • identification d’objectifs professionnels associés au client en fonction du statut reçu du client;

  • calcul des progrès du client en vue des objectifs professionnels identifiés en fonction du statut actuel reçu concernant les tâches professionnelles exécutées par le client,

  • calcul d’un nombre de jours dédiés requis pour atteindre les objectifs professionnels, la détermination étant fondée sur les progrès calculés de l’utilisateur; et

  • calcul d’une base de revenu minimum pour les tâches professionnelles en fonction du montant de bénéfices;

  • génération d’un objectif professionnel intermédiaire entre la base et l’objectif professionnel déterminé, l’objectif intermédiaire comprenant un objectif de revenu fondé sur la base de revenu minimum, le montant du bénéfice pour chacune des tâches professionnelles, les progrès calculés du client et le nombre calculé de jours dédiés; et

  • communication au client d’une recommandation pour atteindre les objectifs professionnels, la recommandation indiquant le nombre calculé de jours dédiés requis pour atteindre les objectifs professionnels, la base de revenu minimum et une pluralité de tâches sur lesquelles se concentrer.

Revendications 13/19

  • réception et stockage d’information sur un client indiquant un statut actuel du client, le statut actuel concernant des tâches professionnelles exécutées par le client;

  • identification d’objectifs professionnels associés au client en fonction de l’information sur le client reçue;

  • calcul des progrès du client en vue des objectifs professionnels identifiés en fonction du statut actuel concernant les tâches professionnelles exécutées par le client;

  • détermination d’un nombre de jours dédiés requis pour atteindre les objectifs professionnels, la détermination étant fondée sur les progrès calculés de l’utilisateur; et

  • communication au client d’une recommandation pour atteindre les objectifs professionnels, la recommandation indiquant le nombre calculé de jours dédiés requis pour atteindre les objectifs professionnels.

[61] Examinant les observations du Demandeur dans la R‑DF, nous avons affirmé :

[traduction]

Dans la R‑DF à la page 5, le Demandeur a soutenu que la DF avait omis les éléments informatiques des revendications, soulignant les critères énoncés dans FreeWorldTrust à l’appui de leur inclusion.

Comme nous l’avons déjà indiqué, conformément à l’approche du problème et de la solution énoncée dans la section 12.02.01 du RPBB, nous estimons à titre préliminaire que les éléments informatiques des revendications au dossier ne sont pas essentiels. Étant donné que les étapes essentielles énoncées dans la DF reflètent les étapes des revendications indépendantes 1 et 13 (et donc 19), nous sommes d’accord à titre préliminaire avec les éléments essentiels énoncés dans la DF.

[62] Le Demandeur n’a présenté aucune observation précise concernant les éléments essentiels des revendications, sauf dans le cadre des observations relatives au problème et à la solution, dont il a été question ci‑dessus. En particulier, les arguments du Demandeur selon lesquels la mise en œuvre par ordinateur fait partie du problème à résoudre et la solution se rapporte à un outil interactif, implicitement, signifieraient que les éléments informatiques des revendications sont essentiels. Nous avons expliqué ci-dessus et dans la lettre de RP pourquoi nous ne sommes pas d’accord avec une telle position.

[63] Aucune autre observation concernant les éléments essentiels des revendications au dossier n’a été formulée dans la RS‑RP.

[64] À la lumière de ce qui précède, nous concluons que les éléments essentiels des revendications indépendantes 1, 13 et 19 sont tels qu’ils sont énoncés ci‑dessus et dans la lettre de RP.

[65] Comme nous l’avons fait dans la lettre de RP, nous aborderons les éléments supplémentaires des revendications dépendantes ci-dessous dans notre évaluation de l’objet prévu par la Loi, au besoin.

Portée de l’identification d’une étape d’objectif professionnel

[66] Dans l’analyse de l’histoire de la poursuite de la présente demande ci-dessus, nous avons noté qu’en raison de l’ajout d’une certaine caractéristique aux revendications proposées-2, lors de l’audience, nous avons soulevé une question concernant l’introduction possible d’un nouvel élément inadmissible dans les revendications indépendantes, contrairement à l’article 38.2 de la Loi sur les brevets. En particulier, dans la R‑RP, le Demandeur a proposé d’ajouter une caractéristique aux réclamations indépendantes dans le cadre de l’étape de l’identification d’un objectif professionnel pour un client, à savoir [traduction] « l’objectif professionnel comprenant l’atteinte de l’objectif de revenu du client ». L’introduction proposée de cette caractéristique laisse entendre que l’identification d’un objectif professionnel dans les revendications pourrait être fondée sur l’apport à la méthode, par le client, du propre objectif auto‑déterminé par ce dernier, plutôt que l’idée que l’objectif professionnel soit identifié en fonction d’une analyse de l’information fournie par le client.

[67] À la suite de la discussion tenue à l’audience sur la question de savoir si une telle caractéristique se fonderait sur le mémoire descriptif et les dessins ou si elle constituerait un nouvel élément inadmissible, et sur l’effet subséquent possible sur notre interprétation de la portée des revendications au dossier et du reste du mémoire descriptif, à ce stade-ci, nous estimons nécessaire d’énoncer explicitement notre interprétation de la portée de l’étape des revendications où un objectif professionnel associé à un client est identifié.

[68] Dans la lettre de RP aux pages 13 à 14 sous l’évaluation de l’évidence à l’étape 3 de Sanofi, nous avons discuté des différences entre les revendications indépendantes au dossier et l’état de la technique, en faisant remarquer ceci :

[traduction]

la méthode et le système divulgués dans D1 ne permettent pas d’identifier ni d’établir d’objectifs, qu’ils soient à long terme ou intermédiaires, en fonction de l’information reçue d’un client. La méthode et le système de D1 reposent sur des [traduction] « objectifs autodéterminés » définis par l’utilisateur. Tel qu’analysé à la col. 5, lignes 36 à 40 de D1, le client doit répondre à des questions concernant les objectifs à long terme et à court terme qu’il souhaite atteindre et qui sont utilisés par la méthode et le système pour déterminer les progrès réalisés en vue d’atteindre des objectifs et pour fournir une rétroaction :

[q]uestions de l’étape 100 du processus interrogent sur les objectifs à long terme et à court terme, y compris, mais sans s’y limiter, les objectifs annuels et mensuels en dollars. L’utilisateur répond également à des questions sur les objectifs financiers pour divers comptes ouverts au moyen du clavier téléphonique.

Il n’y a dans D1 ni divulgation ni suggestion de l’établissement ou de l’identification d’objectifs pour un client à la suite de l’analyse de l’information reçue du client. Bien que la DF fasse référence à la col. 5, lignes 24 à 50 à l’appui de la divulgation par D1 de l’identification des objectifs en fonction de l’information reçue sur les clients, nous ne trouvons dans D1 rien qui appuie une telle position.

[69] Comme il ressort clairement des passages ci-dessus, notre interprétation des étapes d’identification des objectifs des revendications était que ces objectifs n’étaient pas identifiés par le client lui-même (c.-à-d., les objectifs autodéterminés, tels qu’ils sont décrits ci-dessus). Les objectifs étaient déterminés en fonction d’une analyse de l’information saisie par un client. Si nous avions eu pour interprétation que cette étape des revendications comprenait des objectifs autodéterminés, cette étape aurait fait partie de l’état de la technique.

[70] Nous comprenons que l’interprétation des revendications ne doit pas être effectuée en fonction de l’art antérieur. En l’espèce, cette analyse est nécessaire afin de clarifier l’interprétation de la revendication qui a été utilisée dans l’analyse de l’évidence et de l’art antérieur dans la lettre de RP et qui doit être utilisée dans cette recommandation. L’étape de l’identification de l’objectif est « là où le bât blesse » (Shire Biochem inc. c. Canada (Santé), 2008 CF 538, au paragraphe 22).

[71] Notre interprétation de l’étape de l’identification de l’objectif était appuyée par les observations faites par le Demandeur lui-même dans la R-DF dans le contexte de l’évidence. Dans le R-DF aux pages 8 et 9, le Demandeur décrit explicitement qu’une différence entre l’état de la technique et les revendications est que l’état de la technique enseigne des [traduction] « objectifs auto‑déterminés », tandis que la présente demande enseigne l’identification d’objectifs à partir de l’information sur les tâches accomplies par l’utilisateur [nous soulignons en italique] :

[traduction]

Rien n’enseigne que D1 « identifie un objectif professionnel associé au client en fonction du statut actuel reçu concernant une tâche professionnelle exécutée par le client, l’objectif professionnel comprenant l’atteinte de l’objectif de revenu du client, », tel qu’il est récité dans la revendication indépendante 1. Au lieu de définir un objectif professionnel, D1 enseigne des « objectifs autodéterminés » :

La présente invention porte sur une... méthode qui améliore la capacité d’une personne d’atteindre des objectifs mesurables et autodéterminés... (voir D1, colonne 1, lignes 6 à 10, soulignement ajouté).

De plus, les objectifs autodéterminés dans D1 sont des objectifs qui ont été saisis par l’utilisateur, plutôt que des objectifs qui ont été identifiés à partir de l’information sur les tâches exécutées par l’utilisateur comme l’exige la revendication indépendante 1. Par exemple, D1 indique que l’objectif est déjà connu lorsque les données sont recueillies, en tant que « collecte de données liées aux objectifs » (voir 01, colonne 5, lignes 25 et 26) et qu’« avoir recueilli des données liées aux objectifs » (D1, colonne 5, ligne 66).

En effet, D1 enseigne explicitement que les objectifs sont saisis par l’utilisateur, plutôt que d’être identifiés à partir de données sur les tâches. Par exemple, D1 divulgue :

Dans la FIG. 1A, après avoir recueilli des données liées aux objectifs à l’étape 100 du processus, l’étape 102 du processus calcule les progrès de l’utilisateur en vue des objectifs saisis par l’utilisateur (voir D1, colonne 5, ligne 65 de la colonne 6, ligne 1, soulignement ajouté)

Le serveur d’entrée 402 lit ensuite un autre message préenregistré demandant à l’utilisateur de saisir l’objectif en dollars pour ce compte, suivi du symbole « # » à l’étape 588. L’utilisateur saisit ce montant [objectif en dollars] et le serveur d’entrée 402 enregistre cette information ainsi que le nouveau numéro de compte et l’enregistrement vocal de l’utilisateur associé au numéro de compte (voir D1, colonne 14, lignes 1 à 6, soulignement ajouté).

Par conséquent, D1 n’identifie pas d’objectifs ni ne génère d’objectifs intermédiaires.

[72] Selon les propres observations du Demandeur dans la R‑DF, les revendications exigent que les objectifs professionnels soient déterminés en fonction d’une certaine analyse des données, comme les tâches, et ne soient pas ceux que saisit l’utilisateur (c.-à-d., les objectifs autodéterminés).

[73] Telle était aussi notre interprétation de la portée de cette étape dans la lettre de RP, et qui se fonde par ailleurs sur la description de l’invention dans la présente demande.

[74] Par exemple, aux paragraphes [0030] et [0031], l’information concernant le statut du client est reçue, ce qui peut comprendre de l’information concernant le statut professionnel, comme le titre de l’emploi, l’industrie, le revenu actuel, les heures de travail, le type de tâche exécutée dans l’emploi, etc. Une telle information peut également être fournie ultérieurement à titre de mise à jour après l’identification initiale d’un objectif professionnel. Avec l’information reçue, à l’étape 320, illustrée à la figure 3, un objectif professionnel est identifié en fonction de l’information du client qui est fournie. Comme il est indiqué au paragraphe [0031], [traduction] « [p]our les nouveaux clients, un ou plusieurs objectifs professionnels peuvent être générés en fonction de l’information fournie par le client ». Ce paragraphe précise également qu’un client [traduction] « peut être interrogé pour cibler un objectif professionnel ». Toutefois, à notre avis, la personne versée dans l’art n’en déduirait pas que l’objectif professionnel est identifié par le client, mais simplement que le client est invité à peaufiner un objectif précédemment identifié en fonction de l’information fournie.

[75] À l’appui de l’ajout proposé aux revendications dans les revendications proposées-2, ainsi que de l’ajout proposé dans les revendications proposées-3, le Demandeur, dans la RS‑RP, a mentionné le passage du paragraphe [0006] (identifié comme [008] dans la RS‑RP) où il est dit que [traduction] « [les] objectifs professionnels peuvent inclure un niveau de revenu, l’efficacité, le type de tâche exécutée, etc. » Toutefois, bien que cet énoncé évoque ce qu’un objectif professionnel déterminé peut être, il ne traite pas de la façon dont l’objectif est identifié.

[76] Nous notons également que même dans les revendications 13 et 19 au dossier, qui utilisent un langage plus général à l’étape de l’identification de l’objectif, à savoir [traduction] « identifier un objectif professionnel associé au client en fonction de l’information du client », l’information du client stockée est précédemment définie comme [traduction] « indiquant le statut d’un client, le statut d’une tâche professionnelle exécutée par le client », comme il est indiqué dans la revendication 1 au dossier.

[77] La RS‑RP a également fait référence au paragraphe [0011] et au passage suivant : [traduction] « [l]’objectif professionnel peut inclure la réalisation d’un certain objectif de revenu, et l’identification de tâches rentables permet aux personnes de concentrer leurs efforts sur ces tâches » [Soulignement dans l’original]. Nous ne sommes pas en mesure de trouver le passage cité en référence dans la description. Cependant, quoi qu’il en soit, ce passage ne précise pas qui ou quoi identifie l’objectif professionnel. D’autres références ont été faites à la description aux paragraphes [0020], [0030] et [0031] à l’appui d’un objectif professionnel identifié par le client qui relève de la portée des revendications; toutefois, à notre avis, aucune de ces références n’appuie une telle position.

[78] À la lumière de ce qui précède, nous sommes d’avis que l’étape des revendications au dossier où un objectif professionnel est identifié serait interprétée par la personne versée dans l’art comme précisant qu’un tel objectif professionnel est identifié en fonction d’une analyse de l’information fournie par le client (p. ex., en fonction du statut actuel reçu concernant une tâche professionnelle), plutôt que d’être tiré directement de l’information fournie par le client (c.‑à‑d., un objectif autodéterminé).

[79] Cette interprétation de la portée des revendications au dossier est importante lorsqu’on examine la question du caractère suffisant, ainsi que l’on détermine si un nouvel élément inadmissible a été ajouté aux revendications proposées-3, deux aspects qui sont abordés ultérieurement dans la présente recommandation.

Objet prévu par la Loi

[80] Dans la lettre de RP aux pages 11 et 12, nous exprimions notre opinion préliminaire sur la question de l’objet prévu par la Loi :

[traduction]

Dans la DF à la page 4, il était indiqué que les éléments essentiels des revendications ne visent pas une catégorie d’invention brevetable et ne sont donc pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets. Dans la partie de la DF portant sur les éléments essentiels, il a été déclaré que ceux‑ci [traduction] « visent un schéma abstrait d’organisation des activités humaines et échappent donc à la définition de l’invention ».

À notre avis préliminaire, compte tenu des éléments essentiels des revendications indépendantes énoncées ci-dessus, qui se rapportent à une série de règles et de calculs et à l’entrée et à la sortie associées d’information, l’objet de ces revendications est semblable à des étapes mentales et à des principes scientifiques ou des théorèmes abstraits. Il ne vise pas « une chose dotée d’une existence physique ou une chose qui manifeste un effet ou changement discernable » (Canada (Procureur général) c Amazon.com, inc., 2011 CAF 328 au paragraphe [66] [Amazon]).

Nous notons également que l’invention dans Schlumberger Canada Ltd c Commissaire aux brevets (1981), 56 CPR (2d) 204 (CAF), mentionnée dans Amazon, et les éléments essentiels des revendications au dossier dans la présente demande sont très semblables. Dans les deux cas, un ordinateur peut être utilisé pour effectuer les calculs qui composent les méthodes, mais il n’est pas essentiel que les méthodes soient mises en œuvre de cette manière. Les deux cas concernent l’analyse des données d’entrée par divers calculs. L’utilisation d’un ordinateur, bien qu’elle soit pratique, n’est pas essentielle pour effectuer l’analyse.

À la lumière de ce qui précède, nous sommes d’avis préliminaire que les revendications indépendantes 1, 13 et 19 visent un objet non prévu par la Loi et sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

En ce qui concerne les revendications dépendantes 2 à 12, 14 à 18 et 20, à notre avis préliminaire, les éléments supplémentaires de ces revendications représentent un peaufinement supplémentaire des données d’entrée, des données de sortie, des règles et des calculs utilisés dans les étapes essentielles des revendications indépendantes, et ils visent également des objets non prévus par la Loi et sont donc non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

  • [81] Dans la R-RP à la page 5, le Demandeur a soutenu ce qui suit :

[traduction]

la réception d’information, l’identification d’un objectif professionnel en fonction de l’information reçue, le calcul des progrès en vue de l’objectif professionnel déterminé, le calcul d’une base de revenu minimum, la génération d’un objectif professionnel intermédiaire et la communication d’une recommandation pour atteindre l’objectif professionnel intermédiaire généré, lorsqu’ils sont examinés dans leur ensemble, sont individuellement et en combinaison ordonnée davantage qu’une idée abstraite d’organisation d’activités humaines. Comme il est mentionné ci-dessus, l’invention telle que revendiquée se veut plutôt une invention mise en œuvre par ordinateur qui surmonte les problèmes techniques de l’art antérieur. Ainsi, l’invention revendiquée dans son ensemble vise une solution technique à un problème technique et est conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[82] Même si nous étions d’avis préliminaire que les revendications au dossier visaient un objet abstrait, nous ne les avons pas définies comme une organisation d’activités humaines. Les revendications au dossier portaient plutôt sur une série de règles et de calculs ainsi que sur l’entrée et la sortie d’information connexe, l’objet des revendications au dossier étant semblable à des étapes mentales et à des principes scientifiques ou des théorèmes abstraits.

  • [83] Nous avons expliqué ci-dessus, dans la section consacrée à l’interprétation des revendications, pourquoi les éléments essentiels des revendications au dossier ne comprennent pas la mise en œuvre par ordinateur des étapes de la méthode revendiquée et pourquoi le problème et la solution ne sont pas de nature technique.

[84] Lors de l’audience, le Demandeur a soutenu que la liste des éléments essentiels identifiés par le Comité et énoncés ci-dessus constitue un cadre de mise en œuvre d’une méthode de gestion du perfectionnement professionnel sur un ordinateur, que les étapes sont requises pour fournir une mise en œuvre par ordinateur qui pourrait être rapidement mise à l’échelle, et qu’on visait donc un objet prévu par la Loi.

[85] Cependant, à notre avis, rien dans les étapes qui constituent les éléments essentiels des revendications ne nécessite un ordinateur pour être exécuté. Les étapes seraient applicables qu’un ordinateur ait ou non été utilisé pour les mettre en œuvre. Par conséquent, à notre avis, les étapes ne représentent pas un cadre qui est davantage qu’une série de règles et de calculs, ainsi que l’entrée et la sortie connexes d’information.

  • [86] À la lumière de ce qui précède, nous concluons que les revendications 1 à 20 au dossier visent un objet non prévu par la Loi et sont donc non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.


Évidence

(1)a) Identifier la « personne versée dans l’art »

[87] Nous avons identifié la personne versée dans l’art ci‑dessus dans la section consacrée à l’interprétation des revendications.

(1)b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne

[88] Les connaissances générales courantes pertinentes de la personne versée dans l’art ont également été identifiées dans la section consacrée à l’interprétation des revendications.

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[89] Comme nous l’avons fait dans la lettre de RP, nous utilisons ci-dessous les éléments essentiels identifiés des revendications au dossier dans notre analyse aux étapes (3) et (4) de Sanofi. De plus, notre interprétation de l’étape de l’identification des objectifs des revendications s’appliquera également.

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de l’« état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation

[90] Dans la lettre de RP aux pages 12 à 14, nous avons comparé le document d’art antérieur appliqué dans la DF et les revendications au dossier, en confirmant les différences identifiées dans la DF et en identifiant d’autres différences :

[traduction]

Dans la DF, le document d’art antérieur suivant a été appliqué pour affirmer l’évidence des revendications au dossier :

D1 : US 5 954 510 Merrill et coll. Pub. : 21 septembre 1999

D1 divulgue un système et une méthode interactifs de rechange d’atteinte des objectifs et d’apprentissage qui sont conçus pour améliorer [traduction] « la capacité d’une personne d’atteindre des objectifs mesurables et autodéterminés au fil du temps au moyen d’échange d’information, de rétroaction et de renforcement interactifs » (D1 à la col. 1, lignes 7 à 12).

Dans la DF à la page 5, après avoir comparé les éléments essentiels de la revendication 1 au dossier avec ceux de D1, on a déclaré que D1 ne divulgue pas :

l’utilisation de journées dédiées comme mesure de l’atteinte des objectifs professionnels et

le calcul d’une base de revenu minimum pour les tâches professionnelles en fonction du montant de bénéfice pour les tâches professionnelles.

Dans la R‑DF aux pages 7 à 14, et comme il est indiqué dans le RM, le Demandeur a soutenu que plusieurs éléments de la revendication 1 au dossier n’ont pas été divulgués par D1, en plus de ceux qui sont indiqués dans la DF, à savoir :

la réception d’information concernant un montant de bénéfice pour chacune des tâches professionnelles exécutées par un client;

l’identification d’un objectif professionnel associé à un client en fonction du statut actuel d’une tâche professionnelle;

la génération d’un objectif professionnel intermédiaire entre la base et l’objectif professionnel déterminé, l’objectif intermédiaire comprenant un objectif de revenu fondé sur la base de revenu minimum, un montant de bénéfice pour chaque tâche professionnelle, les progrès calculés du client et le nombre calculé de jours dédiés;

la communication d’une recommandation pour atteindre l’objectif professionnel intermédiaire généré, la recommandation indiquant le nombre calculé de jours dédiés requis pour atteindre l’objectif professionnel intermédiaire, la base de revenu minimum et une pluralité de tâches sur lesquelles se concentrer; et

l’établissement d’objectifs pour un client en fonction de l’information reçue du client.

Nous notons que le dernier point énuméré par le Demandeur semble être le même que le deuxième.

Après avoir examiné D1, nous sommes d’accord avec le Demandeur pour dire qu’il y a plus de différences entre la revendication 1 au dossier et D1 que celles énoncées dans la DF.

Comme il est admis dans la DF, il n’y a aucune divulgation dans D1 du calcul d’un nombre de jours requis pour atteindre un objectif professionnel, que ce soit déterminé par le client ou par la méthode et le système eux‑mêmes. En ce qui concerne les objectifs de vente, D1 envisage le calcul des progrès en vue de l’atteinte d’un objectif déterminé par le client, mais ne fait aucune prédiction quant au délai qu’il faudra pour l’atteindre. Le délai au cours duquel il faut atteindre un objectif identifié par le client est en fait saisi par le client (D1 à la col. 5, lignes 63 à 65). De même, pour les réalisations divulguées relatives à la perte de poids et à l’investissement, D1 divulgue le calcul des progrès réalisés en vue de l’objectif identifié par le client, mais ne fournit aucune estimation du temps qu’il faudra pour l’atteindre (D1 à la col. 6, lignes 14 à 27). Étant donné que D1 ne divulgue pas le calcul d’un certain nombre de jours pour atteindre l’objectif professionnel, il n’y a pas non plus de divulgation d’une recommandation au client qui inclut cette valeur calculée.

De plus, la méthode et le système divulgués dans D1 ne permettent pas d’identifier ni d’établir d’objectifs, qu’ils soient à long terme ou intermédiaires, en fonction de l’information reçue d’un client. La méthode et le système de D1 reposent sur des [traduction] « objectifs autodéterminés » définis par l’utilisateur. Tel qu’analysé à la col. 5, lignes 36 à 40 de D1, le client doit répondre à des questions concernant les objectifs à long terme et à court terme qu’il souhaite atteindre et qui sont utilisés par la méthode et le système pour déterminer les progrès réalisés en vue d’atteindre des objectifs et pour fournir une rétroaction :

[d]es questions de l’étape 100 du processus interrogent sur les objectifs à long terme et à court terme, y compris, mais sans s’y limiter, les objectifs annuels et mensuels en dollars. L’utilisateur répond également à des questions sur les objectifs financiers pour divers comptes ouverts au moyen du clavier téléphonique.

Il n’y a dans D1 ni divulgation ni suggestion de l’établissement ou de l’identification d’objectifs pour un client à la suite de l’analyse de l’information reçue du client. Bien que la DF fasse référence à la col. 5, lignes 24 à 50 à l’appui de la divulgation par D1 de l’identification des objectifs en fonction de l’information reçue sur les clients, nous ne trouvons dans D1 rien qui appuie une telle position.

D1 ne divulgue pas non plus le calcul d’une base de revenu minimum pour les tâches professionnelles du client en fonction du montant du bénéfice pour les tâches, comme il est indiqué dans la DF. Bien que D1 divulgue le classement des comptes de ventes en fonction de la probabilité et de la taille de la vente (D1 à la col. 16, lignes 40 et 41), il n’y a aucune divulgation ou suggestion de détermination d’une base de revenu minimum fondée sur les tâches professionnelles du client, détermination qui serait ensuite utilisée pour faire une recommandation au client quant aux tâches sur lesquelles se concentrer afin d’atteindre l’objectif professionnel prédéterminé, conformément à l’avant-dernière différence identifiée par le Demandeur dans la R‑DF, et énoncée ci-dessus.

Nous notons qu’en ce qui concerne les autres revendications indépendantes 13 et 19 au dossier, à l’exception du calcul et de l’application d’une base de revenu minimum pour les tâches professionnelles des clients, les différences restantes s’appliquent également à ces revendications indépendantes.

[91] Compte tenu de notre opinion préliminaire ultime dans la lettre de RP selon laquelle les revendications 1 à 20 au dossier n’auraient pas été évidentes, le Demandeur a simplement reconnu cette position dans la R‑RP. Dans la RS‑RP, le Demandeur a présenté d’autres observations sur l’évidence, mais celles-ci portaient sur la non-évidence des revendications au dossier même si les revendications étaient interprétées de manière à englober l’auto-identification des objectifs par le client. Nous avons déjà examiné cette question ci-dessus dans la section consacrée à l’interprétation des revendications, et, compte tenu de notre conclusion à cet égard, notre analyse de l’évidence dans la lettre de RP n’est pas touchée.

[92] À la lumière de ce qui précède, les différences entre l’art antérieur et les revendications indépendantes au dossier sont celles qui sont énoncées dans la lettre de RP.

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention telle que revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

[93] Après avoir examiné les CGC pertinentes et les documents de l’art antérieur soumis par le Demandeur dans le cadre d’un dépôt volontaire daté du 24 août 2018, nous étions d’avis préliminaire que les revendications 1 à 20 au dossier n’auraient pas été évidentes et étaient donc conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets :

[traduction]

À notre avis préliminaire, selon notre analyse à l’étape (3) ci-dessus, il n’y a aucune divulgation ni suggestion dans le document d’art antérieur D1 de l’identification des objectifs professionnels en fonction de l’information reçue d’un client, ni aucune divulgation ni suggestion de la détermination d’un certain nombre de jours consacrés à l’atteinte de ces objectifs en fonction des progrès du client.

Bien que les CGC pertinentes comprennent la connaissance de l’évaluation des progrès réalisés en vue de l’atteinte d’un objectif, elles ne comprennent aucune suggestion de méthode pour déterminer l’objectif lui-même en fonction de l’information fournie par le client. De plus, les CGC pertinentes ne suggèrent pas la détermination d’un délai pour atteindre l’objectif, que l’objectif soit déterminé par le client ou déterminé en fonction de l’information sur les tâches professionnelles fournie par le client.

À notre avis préliminaire, les différences susmentionnées, qui s’appliquent à toutes les revendications indépendantes 1, 13 et 19 au dossier, n’auraient pas été évidentes à la lumière de D1 et des CGC pertinentes. De même, les revendications dépendantes 2 à 12, 14 à 18 et 20, qui comprennent les caractéristiques des revendications indépendantes 1, 13 et 19, respectivement, n’auraient pas non plus été évidentes.

Nous avons examiné les documents de l’art antérieur identifiés par le Demandeur dans le cadre d’une soumission volontaire d’un dossier d’antériorité daté du 24 août 2018. À notre avis préliminaire, ces documents ne divulguent pas non plus les caractéristiques des revendications indépendantes au dossier, ni ne suggèrent la combinaison de ces caractéristiques.

Selon ce qui précède, nous sommes d’avis préliminaire que les revendications 1 à 20 au dossier n’auraient pas été évidentes et qu’elles sont donc conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[94] Comme il a été mentionné au sujet des observations relatives à l’étape (3), le Demandeur, dans la R‑RP, a simplement reconnu notre point de vue préliminaire ci-dessus.

[95] Selon ce qui précède, nous concluons que les revendications 1 à 20 au dossier n’auraient pas été évidentes et qu’elles sont donc conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Caractère suffisant

[96] Dans la lettre de RP à la page 15, nous avons informé le Demandeur d’une nouvelle irrégularité à l’égard du caractère suffisant du mémoire descriptif et exprimé notre opinion préliminaire :

[traduction]

En particulier, à notre avis préliminaire, le mémoire descriptif ne fournit pas une divulgation suffisante des étapes de la méthode énoncée dans les revendications au dossier de façon à ce qu’une personne versée dans l’art puisse réaliser l’invention revendiquée sans l’exercice d’une ingéniosité inventive, tel qu’il est exigé pour se conformer à l’alinéa 27(3)b) de la Loi sur les brevets.

Dans la revendication 1 au dossier, un objectif professionnel est défini pour un client en fonction du statut actuel de la tâche professionnelle du client. Toutefois, la description ne traite que de cette détermination en termes généraux au paragraphe [0031], où il est indiqué qu’[traduction] « un objectif professionnel est défini en fonction de l’information du client fournie ». L’information fournie, selon le paragraphe [0030], peut comprendre le statut professionnel, le revenu actuel, les heures de travail, entre autres, mais il n’y a aucun critère ni lien de divulgué entre l’information du client et l’objectif identifié.

De plus, l’absence de relation divulguée entre l’information du client fournie et un objectif déterminé, qui serait préoccupante même pour un domaine professionnel particulier, soulève encore plus de préoccupations au sujet du niveau de divulgation, étant donné que la revendication 1 au dossier et les autres revendications indépendantes 13 et 19 englobent la gestion du perfectionnement professionnel dans une myriade de domaines. La même difficulté s’applique aux revendications dépendantes au dossier. De même, la figure 3 ne fait également que décrire l’étape générale de la détermination d’un objectif professionnel en utilisant l’information du client fournie.

Par conséquent, une personne versée dans l’art ne serait pas en mesure de réaliser l’invention des revendications au dossier avec seulement le mémoire descriptif de la présente demande.

[97] Dans la R‑RP aux pages 6 et 7, le Demandeur soutient que le mémoire descriptif est suffisant, que la demande [traduction] « définit clairement les objectifs professionnels et la façon dont ils sont identifiés ». À titre d’exemple, le Demandeur indique les objectifs professionnels possibles tels qu’ils sont énoncés au paragraphe [0006] de la présente demande. Cependant, ce passage ne traite que d’objectifs professionnels qui peuvent être identifiés, et non de la façon dont ils sont identifiés.

[98] Le Demandeur signale également la limitation des revendications où un objectif professionnel est identifié en fonction du statut actuel d’un client. Toutefois, nous avons déjà analysé le caractère insuffisant de cette limitation dans la lettre de RP. Le Demandeur signale que le système demande à un client de se concentrer sur un objectif professionnel, tel qu’il est décrit au paragraphe [0031] de la présente demande. Toutefois, cela ne précise pas comment l’objectif initial suggéré a été déterminé comme étant plus clairement défini par les requêtes du système et les réponses du client. Si le Demandeur laisse entendre que c’est le client qui fournit un objectif en réponse aux requêtes du système, à notre avis, cela n’est pas suggéré par le mémoire descriptif ou les dessins, comme il en est question ci‑dessus dans la section consacrée à l’interprétation des revendications et plus loin en liaison avec la nouvelle question soulevée à l’égard des revendications proposées-2 (et, en fin de compte, des revendications proposées-3).

[99] Le Demandeur renvoie au paragraphe [0009] de la présente demande pour son argument selon lequel le statut actuel d’un client peut indiquer une partie du revenu du client tiré d’une tâche professionnelle. Cela peut servir à générer un revenu projeté pour une journée à partir de la tâche, après quoi l’on peut déterminer un certain nombre de jours dédiés qui sont nécessaires pour atteindre un objectif professionnel. Bien que le libellé du paragraphe [0009] ne corresponde pas au passage cité par le Demandeur dans la R‑RP, dans tous les cas, cela ne traite pas de la question de savoir comment l’objectif professionnel est initialement identifié. Cela ne fait qu’illustrer comment un indicateur de délai pour atteindre un objectif professionnel peut être généré.

[100] Le Demandeur attire aussi l’attention sur le paragraphe [0020], qui fait référence à un client qui fournit de l’information sur le statut et détermine les progrès du client en vue d’un objectif professionnel. Cela ne fournit pas d’autres indices sur la façon dont l’objectif par rapport auquel les progrès sont déterminés a été initialement identifié.

[101] Aucune des observations de la R‑RP ou de la RS‑RP ne précise comment l’objectif professionnel initial doit être identifié à l’étape associée des revendications au dossier.

[102] Comme nous l’avons déjà mentionné, avec la R‑RP, le Demandeur a proposé de modifier les revendications indépendantes afin de préciser [traduction] « l’objectif professionnel comprenant l’atteinte de l’objectif de revenu du client » (dans le cadre des revendications proposées‑2). Cette modification proposée a également été incluse dans les revendications proposées‑3 soumises avec la RS‑RP. Si une telle caractéristique était étayée par le mémoire descriptif et les dessins originaux, elle résoudrait bien sûr la question du caractère suffisant, comme le soutient le Demandeur dans la RS‑RP, puisque l’objectif professionnel pourrait être autodéterminé par un client. Toutefois, comme il est indiqué ci-dessous en ce qui concerne les revendications proposées et la question du nouvel élément, cela n’est pas justifié ou ne peut pas raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif et des dessins originaux.

[103] Compte tenu du retrait des CGC pertinentes de certains aspects relatifs à la façon de définir les divers objectifs en matière de perfectionnement professionnel et puisque le Demandeur estime qu’il est pratiquement impossible pour une personne versée dans l’art, au moment du dépôt de la présente demande, de savoir [traduction] « comment définir les objectifs en matière de perfectionnement professionnel […] » (R-DF à la page 3), l’irrégularité du mémoire descriptif ne peut être comblée par les CGC pertinentes de la personne versée dans l’art.

[104] À la lumière de ce qui précède, nous concluons que le mémoire descriptif est insuffisant, car il ne permet pas à une personne versée dans l’art de réaliser l’invention revendiquée dans toute sa portée, contrairement aux exigences énoncées à l’alinéa 27(3)b) de la Loi sur les brevets.

Revendications proposées

[105] Dans la lettre de RP à la page 16, nous présentons notre point de vue préliminaire selon lequel les revendications proposées‑1 soumises avec la R‑DF ne modifieraient pas le résultat de l’évaluation de l’objet prévu par la Loi. Nous exprimons également notre point de vue préliminaire selon lequel les modifications proposées à la description ne seraient pas « nécessaires » :

[traduction]

Le Demandeur a présenté les revendications proposées 1 à 19 avec la R‑DF, avec des révisions rédactionnelles proposées pour la revendication 9 au dossier et ayant supprimé la revendication 11. De plus, des révisions rédactionnelles ont été proposées pour la divulgation.

À notre avis préliminaire, bien que les modifications proposées au dossier permettraient de corriger l’irrégularité relative au caractère indéfini énoncée ci-dessus, les modifications proposées à la divulgation ne sont pas considérées comme « nécessaires » pour assurer la conformité avec la Loi sur les brevets et les Règles sur les brevets, comme l’exige le paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets, et nous ne recommandons donc pas qu’elles soient requises dans une décision de la commissaire.

De plus, les modifications proposées aux revendications au dossier ne modifieraient pas notre opinion préliminaire selon laquelle les revendications visent un objet non prévu par la Loi. Elles ne sont donc pas considérées comme « nécessaires » pour se conformer à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, comme l’exige le paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

[106] Le Demandeur a présenté des observations et proposé des modifications aux revendications tant dans a R‑RP que dans la RS‑RP. Comme nous l’avons indiqué à l’audience, nous examinerons le dernier ensemble de revendications proposées (revendications proposées‑3) afin de déterminer si celles‑ci surmonteraient les irrégularités susmentionnées.

[107] Comme il en a été question à l’audience et comme le Demandeur l’a abordé dans la RS‑RP, le Comité a relevé une irrégularité potentielle de nouvel élément inadmissible introduite dans les revendications proposées‑2. La modification proposée pertinente a été transférée aux revendications proposées‑3. Nous abordons cette question ci-dessous.

[108] Pour faciliter la consultation, nous présentons la revendication proposée 1 telle qu’elle apparaissait dans les observations de la RS‑RP, en soulignant les caractéristiques nouvellement ajoutées fournies par le Demandeur. Des modifications semblables ont été proposées pour les autres revendications indépendantes :

1. Une méthode pour gérer le perfectionnement professionnel, la méthode comprenant :

la réception d’information sur un client indiquant un statut actuel du client, le statut actuel concernant :

une pluralité de tâches professionnelles rentables accomplies par le client; et

un montant de bénéfice pour chacune des tâches professionnelles effectuées par le client;

l’exécution d’instructions lisibles par ordinateur stockées en mémoire pour définir un objectif pour le client, où l’exécution des instructions par un processeur :

identifie un objectif professionnel associé au client en fonction du statut actuel reçu concernant une tâche professionnelle exécutée par le client, l’objectif professionnel comprenant l’atteinte de l’objectif de revenu du client;

calcule des progrès du client en vue de l’objectif professionnel identifié en fonction du statut actuel reçu concernant la tâche professionnelle exécutée par le client;

calcule un nombre de jours dédiés requis pour atteindre l’objectif professionnel, le calcul étant fondé sur les progrès calculés du client;

calcule une base de revenu minimum pour les tâches professionnelles en fonction du montant de bénéfice pour les tâches professionnelles; et

génère un objectif professionnel intermédiaire entre la base et l’objectif professionnel déterminé, l’objectif intermédiaire comprenant un objectif de revenu fondé sur la base de revenu minimum, le montant du bénéfice pour chacune des tâches professionnelles, les progrès calculés du client et le nombre calculé de jours dédiés;

la communication au client d’une recommandation pour atteindre l’objectif professionnel intermédiaire généré, la recommandation indiquant le nombre calculé de jours dédiés requis pour atteindre l’objectif professionnel intermédiaire, la base de revenu minimum et une pluralité de tâches sur lesquelles se concentrer, la recommandation comprenant un calendrier planifiant les jours dédiés;

la réception d’information sur le client mise à jour et indiquant le statut à jour du client; et

la mise à jour du calendrier par la modification de la planification des jours dédiés en fonction du statut à jour du client.

Nouvel élément

[109] Avant d’aborder les autres questions liées aux revendications proposées-3, nous estimons qu’il est d’abord nécessaire de régler la question du nouvel élément afin de déterminer si une telle caractéristique devrait même être considérée comme faisant partie des revendications proposées-3. Nous notons dès le départ que nous ne nous opposons pas aux caractéristiques supplémentaires proposées relatives aux données de sortie d’un calendrier ou à sa mise à jour en fonction du statut à jour du client.

[110] Nous avons déjà analysé, en ce qui concerne l’interprétation des revendications au dossier, la raison pour laquelle nous estimons qu’il n’y a pas dans la présente demande d’appui à une interprétation de l’étape d’identification de l’objectif professionnel où l’objectif est un objectif déterminé par le client lui-même. C’est l’ajout proposé d’une telle caractéristique aux revendications qui a soulevé la question du nouvel élément inadmissible.

[111] Outre les modifications visant à introduire des clauses uniformes qui coïncident avec les ensembles de revendications alors en instance et une modification rédactionnelle de la dernière page, la partie de la description de la présente demande n’a pas été modifiée de façon importante au cours de la poursuite et, par conséquent, son contenu actuel est conforme à celui initialement déposé. Les dessins n’ont pas changé pendant la poursuite.

[112] Les revendications indépendantes originales 1 et 13, bien qu’ayant une portée plus vaste que les revendications au dossier et les revendications proposées-3, définissaient encore l’identification d’un objectif professionnel en fonction de l’information reçue concernant le statut actuel d’une tâche professionnelle exécutée par un client.

[113] Comme dans la version actuelle du mémoire descriptif, aucune information n’est fournie sur la façon dont un objectif professionnel doit être déterminé en fonction de l’information sur le statut saisie par le client. Le paragraphe [0006] de la description originale datée du 2 août 2010 fait référence à la communication d’information sur le statut par un client, [traduction] « qui peut comprendre de l’information sur une tâche professionnelle exécutée par le client et une partie du revenu associé à la tâche ». Les progrès accomplis par le client en vue d’un objectif professionnel peuvent alors être déterminés. Des exemples d’objectifs professionnels sont énumérés, comme le niveau de revenu, l’efficacité, le type de tâches exécutées, entre autres, tels qu’ils figurent dans la version actuelle de la description. Toutefois, aucune information n’est fournie sur la façon dont l’objectif professionnel de référence est déterminé en premier.

[114] Le paragraphe [0025] fait référence à l’utilisation d’une calculatrice de journée de concentration 220 qui peut déterminer le nombre de jours de concentration requis pour atteindre un objectif professionnel, mais, encore une fois, aucune information n’est fournie sur la façon dont l’objectif professionnel est déterminé.

[115] La figure 3 du mémoire descriptif initial, qui est la même que celle de la présente version, décrit les étapes de base de la méthode exemplaire de l’invention. L’information concernant le statut du client est reçue et un objectif professionnel est ensuite identifié en fonction du statut du client. Le paragraphe [0031] déclare ceci :

[traduction]

Pour les clients qui sont maintenus, un objectif professionnel peut avoir déjà été défini. Pour les nouveaux clients, un ou plusieurs objectifs professionnels peuvent être générés en fonction de l’information fournie par le client. [Soulignement ajouté]

[116] À notre avis, le mémoire descriptif et les dessins originaux ne suggèrent pas, et il n’est pas raisonnable de le déduire, que l’objectif professionnel d’un client est celui qui est saisi par le client lui-même (c.-à-d., un objectif autodéterminé tel qu’il est revendiqué dans les revendications proposées‑3). L’objectif professionnel est plutôt défini à la suite d’une analyse de l’information fournie par un client, analyse qui ne serait pas nécessaire si l’objectif professionnel était simplement saisi par un client.

[117] Dans la RS‑RP, le Demandeur a présenté des observations faisant valoir que l’objectif professionnel est celui que le client s’est fixé lui-même, en mentionnant diverses parties du mémoire descriptif qui correspondent à des parties du mémoire descriptif initial. Nous avons déjà analysé ces références en ce qui concerne l’interprétation des revendications pour déterminer si le libellé de la revendication pourrait être interprété de manière à inclure les objectifs autodéterminés des clients. Nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il ne le pouvait pas. De même, ces parties du mémoire descriptif n’appuient pas l’ajout explicite d’une telle caractéristique.

[118] À la lumière de ce qui précède, nous concluons que l’ajout proposé aux revendications au dossier de la caractéristique [traduction] « l’objectif professionnel consistant à atteindre l’objectif de revenu du client » constituerait l’ajout d’un nouvel élément inadmissible, contrairement aux exigences de l’article 38.2 de la Loi sur les brevets. Par conséquent, l’analyse restante des revendications proposées‑3 ne tiendra pas compte de cette caractéristique.

Caractère indéfini

[119] Les revendications proposées-3 comprennent les modifications proposées précédemment pour supprimer la revendication 11 au dossier et pour modifier la revendication 9 de façon à supprimer la référence à [traduction] « l’étape suivante ». Nous sommes d’accord pour dire que ces modifications proposées permettraient de surmonter l’irrégularité du caractère indéfinie relevée et rendraient les revendications conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets. Toutefois, compte tenu de nos conclusions ci-dessous en ce qui concerne l’objet prévu par la Loi et le nouvel élément inadmissible, les revendications proposées-3 dans leur ensemble ne sont pas conformes à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets.


 

Objet prévu par la Loi

[120] Comme il est indiqué dans la lettre de RP, les modifications proposées concernant les revendications 9 et 11 au dossier ne modifieraient pas la nature de l’invention revendiquée et, par conséquent, ne modifieraient pas notre conclusion ci-dessus quant à la nature non prévue par la Loi des revendications.

[121] À la suite des propositions examinées lors de l’audience, le Demandeur a présenté d’autres modifications aux revendications au dossier afin de préciser que la recommandation qui pourrait résulter des règles et calculs qui composent les revendications au dossier comprend un calendrier établissant le calendrier des jours dédiés qui seraient nécessaires pour atteindre un objectif professionnel identifié. Ces modifications proposées précisent également qu’en raison de l’information à jour reçue sur le statut des clients, les données de sortie du calendrier peuvent être mises à jour.

[122] À notre avis, l’ajout de telles caractéristiques aux revendications au dossier ne modifierait pas nos conclusions à l’égard de l’objet non prévu par la Loi. Les caractéristiques supplémentaires ne font que décrire un autre type de données de sortie (c.‑à‑d., le calendrier des jours dédiés), ainsi qu’une autre donnée d’entrée (c.-à-d., la mise à jour du statut du client) et une autre donnée de sortie (c.-à-d., un calendrier mis à jour). Les revendications proposées représenteraient toujours une série de règles et de calculs ainsi que l’entrée et la sortie associées d’information, comme c’était le cas pour les revendications au dossier. Un tel objet est semblable aux étapes mentales et aux principes scientifiques ou théorèmes abstraits. Il ne vise pas « une chose dotée d’une existence physique ou une chose qui manifeste un effet ou changement discernable » (Amazon, au paragraphe 66).

Évidence

[123] Étant donné que l’objet des revendications proposées-3 aurait une portée plus étroite que celle des revendications au dossier, ce qui, selon nous, n’aurait pas été évident, les revendications proposées-3 n’auraient pas non plus été évidentes.

Caractère suffisant

[124] Comme les revendications proposées-3 ne divulguent pas davantage la façon dont la personne versée dans l’art doit réaliser l’étape de l’identification d’un objectif professionnel, ni ne limitent la portée des revendications au dossier à un point tel qu’elles présenteraient un caractère réalisable dans leur portée, la description serait quand même insuffisante, contrairement à l’alinéa 27(3)b) de la Loi sur les brevets.


 

Conclusions

[125] Nous avons déterminé que :

  • les revendications 1 à 20 au dossier visent un objet non prévu par la Loi et sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 9 et 11 au dossier sont imprécises et ne sont donc pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets;
  • le mémoire descriptif est insuffisant et ne permet pas de pratiquer l’invention revendiquée dans toute sa portée, contrairement à l’alinéa 27(3)b) de la Loi sur les brevets.

[126] Nous avons en outre déterminé que les revendications proposées 1 à 19 soumises avec la RS‑PR (revendications proposées‑3) ne permettent pas de surmonter les irrégularités de l’objet non prévu par la Loi et du caractère insuffisant, en plus d’introduire une irrégularité de nouvel élément inadmissible. Elles ne sont donc pas « nécessaires » pour se conformer à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, comme l’exige le paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

Recommandation de la commission

[127] À la lumière de ce qui précède, le Comité recommande que la demande soit rejetée pour les motifs suivants :

  • les revendications 1 à 20 au dossier visent un objet non prévu par la Loi et sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets;
  • les revendications 9 et 11 au dossier sont imprécises et ne sont donc pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets;
  • le mémoire descriptif est insuffisant et ne permet pas de pratiquer l’invention revendiquée dans toute sa portée, contrairement à l’alinéa 27(3)b) de la Loi sur les brevets.

 

 

 

Stephen MacNeil

Alison Canteenwalla

Mara Gravelle

Membre

Membre

Membre

DÉCISION DE LA COMMISSAIRE

[128] Je souscris aux conclusions de la Commission ainsi qu’à sa recommandation que la demande soit rejetée pour les motifs que :

  • les revendications 1 à 20 au dossier visent un objet non prévu par la Loi et sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets;

  • les revendications 9 et 11 au dossier sont imprécises et ne sont donc pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets;

  • le mémoire descriptif est insuffisant et ne permet pas de pratiquer l’invention revendiquée dans toute sa portée, contrairement à l’alinéa 27(3)b) de la Loi sur les brevets.

[129] En conséquence, conformément à l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’accorder un brevet relativement à cette demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le Demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

Johanne Bélisle

Commissaire aux brevets

 

 

 

Fait à Gatineau (Québec),

ce 6e jour d’août 2020

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