Brevets

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Référence : F. Hoffmann-La Roche AG (Re), 2020 CACB 12

Décision du commissaire no 1532

Commissioner's Decision #1532

Date 06-05-2020

SUJET :

J00

(Signification de la technique)

 

J50

(Simple plan)

TOPIC:

J00

(Meaning of Art)

 

J50

(Mere Plan)


Demande no 2 572 440

Application No. 2,572,440


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets (DORS/96-423), dans leur version antérieure au 30 octobre 2019, la demande de brevet numéro 2 572 440 a fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251). La recommandation de la Commission d’appel des brevets et la décision de la commissaire sont de rejeter la demande.

Agent du demandeur :

BORDEN LADNER GERVAIS LLP

World Exchange Plaza

100, rue Queen, bureau 1300

OTTAWA (Ontario)

K1P 1J9


Introduction

[1] La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet refusée numéro 2 572 440, intitulée « DETERMINATION DE COUDE PCR AU MOYEN D’ANALYSE DE COURBURE D’UNE COURBE SIGMOIDE DOUBLE », et qui appartient à F. Hoffmann-La Roche AG. L’irrégularité qui subsiste est liée à la question de savoir si l’objet des revendications au dossier est exclu de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets. La Commission d’appel des brevets (la Commission) a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019-251). Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-après, la recommandation de la Commission est de rejeter la demande.

Contexte

La demande

[2] La demande de brevet 2 572 440 (la présente demande) a été déposée le 20 décembre 2006 et est devenue accessible au public le 20 juin 2007.

[3] L’objet revendiqué de la demande concerne des méthodes et des systèmes servant à déterminer une valeur de transition dans une courbe sigmoïde ou de croissance, comme la valeur du cycle seuil (Ct) d’une courbe d’amplification de la réaction en chaîne de la polymérase (PCR) ou les valeurs du coude dans d’autres courbes de croissance.

Historique de la demande

[4] Le 19 février 2019, une décision finale (la DF) a été rédigée conformément au paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets (DORS/96-423) dans sa version antérieure au 30 octobre 2019 (les anciennes Règles). Dans la DF, il est expliqué que les éléments essentiels des revendications au dossier équivalent à une idée abstraite et désincarnée, et donc, visent un objet qui est exclu de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[5] Dans une réponse à la DF (la RDF) en date du 1er août 2019, le demandeur a présenté des arguments expliquant en quoi l’objet des revendications au dossier ne se prêtait pas à objection pour les motifs exposés dans la DF.

[6] Comme les arguments du demandeur n’ont pas convaincu l’examinateur, la demande et le résumé des motifs (le RM) ont été transmis à la Commission aux fins de révision. Le RM soutenait que les revendications au dossier visent un objet qui est exclu de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets. Dans une lettre en date du 1er octobre 2019, la Commission a envoyé une copie du RM au demandeur.

[7] Le présent Comité a été constitué dans le but de réviser la demande, conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets, et de présenter une recommandation à la commissaire quant à la décision à rendre. Dans une lettre de révision préliminaire en date du 10 janvier 2020 (la lettre de RP), nous avons donné l’opinion préliminaire que les revendications au dossier visent un objet exclu de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[8] Dans la lettre de RP, le demandeur a également été invité à présenter des observations écrites supplémentaires et à participer à une audience en réponse à la révision préliminaire du Comité, s’il le souhaite.

[9] Dans une lettre de réponse en date du 24 janvier 2020, le demandeur a indiqué qu’il ne souhaitait pas participer à une audience et qu’aucune observation écrite ne serait fournie.

Questions

[10] À la lumière de ce qui précède, la question suivante doit être examinée dans le cadre de la présente révision :

  • si les revendications 1 à 17 au dossier en date du 19 septembre 2018 visent un objet qui est exclu de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Principes juridiques et pratique du bureau

Interprétation téléologique

[11] Les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications. L’exercice est effectué du point de vue de la personne versée dans l’art (PVA) en considérant l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins : Free World Trust c. Électro Santé Inc, 2000 CSC 66 [Free World]; Whirlpool Corp c. Camco Inc, 2000 CSC 67, aux par. 49f) et g) et 52 [Whirlpool]. Tel qu’il est indiqué à la section 12.02 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets [RPBB], la première étape de l’interprétation téléologique des revendications d’une demande de brevet consiste à définir la PVA et ses connaissances générales courantes (CGC) pertinentes. L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution divulguée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être déterminés; il s’agit de ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée.

Objet prévu par la Loi

[12] La définition d’« invention » est énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets :

[I]nvention Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[13] Suite à l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Canada (Procureur général) c. Amazon.com inc, 2011 CAF 328 [Amazon.com], le Bureau des brevets a publié un énoncé de pratique, Pratique d’examen au sujet des inventions mises en œuvre par ordinateur – PN 2013-03 (OPIC, mars 2013) [PN 2013-03], qui clarifie la pratique du Bureau des brevets en ce qui a trait à la détermination à savoir si une invention mise en œuvre par ordinateur est un objet prévu par la Loi.

[14] Conformément à la pratique du Bureau des brevets, l’énoncé PN 2013-03 indique que, lorsqu’un ordinateur est jugé comme un élément essentiel d’une revendication interprétée, l’objet revendiqué sera généralement brevetable. En revanche, lorsqu’il est déterminé que les éléments essentiels d’une revendication interprétée se limitent à des éléments exclus de la définition d’invention (par exemple, une simple idée, un schéma, une série de règles), l’objet revendiqué ne sera pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Observations du demandeur sur la pratique du Bureau des brevets en matière d’interprétation téléologique et d’objet non prévu par la Loi

[15] Le demandeur a fait valoir dans la RDF que l’interprétation téléologique des revendications effectuée conformément à la pratique du Bureau des brevets n’est pas conforme à la jurisprudence canadienne. En résumé, le demandeur a présenté ce qui suit :

  • le principe fondamental de l’interprétation des revendications selon Free World et Whirlpool repose sur l’intention de l’inventeur quant au caractère essentiel des éléments de la revendication et la portée de la protection qui en découle;
  • l’analyse des éléments essentiels présentée dans la DF détermine l’admissibilité au brevet en fonction de ce qui a été apporté aux CGC, ce qui équivaut à une « analyse de contribution » interdite;

  • la décision dans Schlumberger Canada Ltd c. Canada (Commissaire aux brevets) [1981] CF 845, 38 NR 299, 56 CPR (2e) 204 (CAF) [1982] [Schlumberger] précède les décisions de la Cour suprême dans Free World et Whirlpool de près de 20 ans, et dans la mesure où les principes appliqués dans Schlumberger sont incompatibles aux principes énoncés dans Free World et Whirlpool, ils doivent maintenant être considérés comme renversés;

  • la proposition selon laquelle les principes d’interprétation des revendications que le Bureau des brevets doit appliquer au cours de la poursuite sont en quelque sorte différents de ceux qu’un tribunal pourrait appliquer serait certainement erronée;

  • le RPBB n’a, en droit, aucun effet et ni l’examinateur ni le commissaire ne sont liés par le RPBB ou les lignes directrices figurant dans PN 2013-03 parce qu’ils ne sont pas compatibles avec la jurisprudence pertinente ou qu’ils ne l’appliquent pas.

[16] L’orientation dans le RPBB à la section 12.02 décrit l’interprétation que fait le Bureau des brevets du droit en matière de brevets au Canada relativement à l’interprétation téléologique des revendications telle qu’appliquée à l’examen d’une demande de brevet. La pratique du Bureau des brevets précise qu’une interprétation téléologique bien éclairée d’une revendication doit tenir compte du mémoire descriptif dans son ensemble tel que le concevrait la PVA, à la lumière des CGC dans le ou les domaines dont relève l’invention, de manière à définir le problème abordé et la solution proposée dans la demande. L’identification du problème est guidée par la compréhension par l’examinateur des CGC dans l’art et par les enseignements de la description. La solution à ce problème fournit des indications qui permettent de déterminer les éléments essentiels.

[17] Tel qu’il est expliqué à la section 12.02.02e du RPBB, les éléments ayant un effet substantiel sur le fonctionnement d’une réalisation pratique donnée ne sont pas nécessairement tous essentiels à la solution; certains des éléments mentionnés définissent le contexte ou l’environnement de la réalisation, mais dans les faits ne modifient pas la nature de la solution.

[18] Le respect rigoureux d’une interprétation littérale du libellé de la revendication tel qu’utilisé par l’inventeur ne peut constituer un facteur prépondérant dans l’évaluation de la revendication d’un objet brevetable. Dans Amazon.com, aux par. 43, 44, 62 et 63, la Cour d’appel fédérale a indiqué que l’objet brevetable devait être évalué sur le fondement de l’interprétation téléologique, laquelle « nécessite que le commissaire soit attentif à la possibilité qu’une revendication du brevet puisse être exprimée dans un langage qui soit trompeur, de manière délibérée ou par inadvertance ». À titre d’exemple, la Cour a cité la situation dans Schlumberger indiquant que dans le cadre d’une interprétation appropriée, l’invention revendiquée était pour « ce qui, à première vue, semble être la revendication d’une “réalisation” ou d’un “procédé” peut, dans le cadre d’une interprétation appropriée, constituer la revendication d’une formule mathématique et, par conséquent, ne pas constituer un objet brevetable » et mentionnant le fait que la formule mathématique avait été programmée dans un ordinateur.

Analyse

Interprétation téléologique

La PVA et les CGC pertinentes

[19] La DF a défini la PVA et les CGC pertinentes comme suit :

[traduction]

La personne versée dans l’art qui est visée par la demande peut être définie comme étant une équipe composée de biologistes moléculaires familiers avec les réactions en chaîne de la polymérase en temps réel et de programmeurs informatiques ayant des capacités de développement de logiciels.

La personne versée dans l’art posséderait les CGC suivantes :

- programmation d’ordinateur;

- la connaissance de la façon d’exécuter des processus de réaction en chaîne de la polymérase (PCR), particulièrement l’utilisation des thermocycleurs PCR cinétiques pour effectuer des processus de croissance PCR en synthétisant par enzymes ou en amplifiant les séquences d’acides nucléiques afin de générer des ensembles de données PCR représentant des courbes de croissance (description : page 1, lignes 17-24).

[20] Dans la lettre de RP, nous avons adopté ces caractéristiques aux fins de notre révision préliminaire. Puisqu’aucune autre observation n’a été fournie par le demandeur, nous les adoptons aux fins de la présente révision finale.

Le problème à résoudre et la solution proposée

[21] La DF a cerné le problème à résoudre et la solution proposée comme suit :

[traduction]

La personne versée dans l’art, après avoir lu le mémoire descriptif et à la lumière de ses CGC, considérerait que le problème résolu par l’invention revendiquée est la façon d’interpréter les données produites au cours d’une réaction en chaîne de la polymérase (PCR) afin de déterminer la valeur du cycle seuil dans les courbes de croissance. Les méthodes actuelles pour déterminer la valeur du coude dans une courbe de PCR ont des inconvénients. Par exemple, certaines méthodes sont très sensibles aux données aberrantes (bruit) et une approche de la valeur de la fluorescence arbitraire (AFL) ne fonctionne pas bien pour les ensembles de données avec des niveaux de référence élevés. Les méthodes traditionnelles pour déterminer le seuil des niveaux de référence (ou la fin du niveau référence) pour certaines courbes de croissance pourraient ne pas fonctionner de manière satisfaisante, particulièrement dans une situation de titre élevé. De plus, les algorithmes existants ont habituellement de nombreux paramètres (par exemple, 50 ou plus) qui sont mal définis, linéairement dépendants et souvent très difficiles, même impossibles, à optimiser [Description : page 2, lignes 3 à 12].

La personne versée dans l’art, après avoir lu le mémoire descriptif, considérerait que la description offre la solution suivante : un algorithme pour déterminer la valeur de coude dans les courbes de PCR au moyen d’étapes mathématiques et numériques améliorées [Description : page 2, lignes 17 à 28].

[22] Dans la RDF à la page 2, le demandeur mentionne les raisons présentées dans ses observations en date du 29 avril 2016, du 6 avril 2017 et du 19 septembre 2018. Dans les observations en date du 6 avril 2017, aux pages 12 et 13, le demandeur observe que le problème résolu par les inventeurs [traduction] « concernait la façon d’effectuer la détermination en temps réel du cycle de seuil de la valeur de coude dans les courbes de croissance de la PCR, ce qui permet d’avoir une détermination plus précise de l’efficacité de la PCR ou une détermination plus précise de la quantité absolue ou relative d’un acide nucléique cible dans la PCR ». La solution correspondante repose nécessairement sur l’utilisation de l’ordinateur physique défini, puisque les résultats pratiques définis ne seraient pas réalisables autrement.

[23] Dans la lettre de RP, nous avons énoncé ce qui suit en ce qui a trait aux observations du demandeur et notre opinion préliminaire sur le problème à résoudre et la solution proposée :

[traduction]

Avec égards, nous ne sommes pas d’accord. Après avoir examiné le mémoire descriptif dans son ensemble, notamment les pages 1 à 8 de la description, notre opinion préliminaire est que le problème à résoudre est le besoin d’une méthode pour déterminer la valeur de transition dans les courbes de type sigmoïde ou de croissance, comme les valeurs Ct dans les courbes d’amplification de la PCR, qui surmonte les inconvénients des méthodes connues (voir la page 2, lignes 3 à 12).

En ce qui concerne l’aspect « en temps réel » des méthodes et systèmes divulgués, nous sommes d’opinion préliminaire que l’expression « en temps réel » a uniquement trait à l’étape d’acquisition de l’ensemble de données au moyen d’un appareil de la PCR en temps réel plutôt qu’au traitement de l’ensemble de données pour déterminer la valeur Ct dans le contexte d’un processus de la PCR. Dans le contexte d’un processus de la PCR, le mémoire descriptif divulgue que les étapes de manipulation des données doivent être effectuées sur un ensemble de données représentant une courbe d’amplification de la PCR, c’est-à-dire, qu’elles doivent être effectuées après que l’ensemble de données représentant la courbe de croissance a été obtenu plutôt que calculé pendant l’étape d’acquisition de l’ensemble de données (voir les pages 6 à 8, figure 2 et figure 9). Par conséquent, nous sommes d’opinion, à titre préliminaire, qu’un tel problème n’en soit pas un où la façon dont un ensemble de données représentant une courbe d’amplification de la PCR a été acquis (c’est-à-dire, en temps réel ou non) ou selon lequel les moyens d’effectuer avec précision des calculs complexes en temps réel seraient pertinents pour résoudre le problème.

Nous penchant maintenant sur la solution correspondante, notre opinion préliminaire est que la solution proposée représentée par l’objet prévu par la revendication est d’utiliser une méthode pour déterminer la valeur Ct dans des courbes d’amplification de la PCR. Une telle méthode signifie utiliser un système particulier d’étapes de manipulation mathématique (c’est-à-dire, un circuit de travail algorithmique) qui est récité dans les revendications (voir la page 2, lignes 21 à 28).

[24] Puisqu’aucune autre observation n’a été fournie par le demandeur, nous maintenons par conséquent nos opinions préliminaires au sujet du problème à résoudre et de la solution correspondance aux fins de la présente révision finale.

Les éléments essentiels permettant de résoudre le problème défini

[25] Il y a 17 revendications au dossier. La revendication 1, visant une méthode, la revendication 12, visant un support de stockage lisible par ordinateur, et la revendication 13, visant un système, sont les revendications indépendantes. Il est de notre opinion préliminaire que la revendication indépendante 1 est représentative de l’objet de l’ensemble des revendications indépendantes au dossier, car ces dernières définissent toutes un objet semblable à l’objet défini dans la revendication 1. La revendication 1 est formulée comme suit :

[traduction]

1. Une méthode d’exécution d’un processus cinétique de réaction en chaîne de la polymérase (PCR) en temps réel comprenant :

l’utilisation d’un dispositif thermocycleur de PCR cinétique :

pour exécuter un processus de croissance de la PCR en synthétisant par enzymes ou en amplifiant au moins une séquence d’acide nucléique définie;

pour détecter les valeurs d’intensité des signaux générés au moyen d’au moins une séquence d’acide nucléique définie subissant un processus de croissance de la PCR à une pluralité de cycles de croissance du processus de croissance de la PCR;

pour générer un ensemble de données de la PCR représentant une courbe de croissance de la synthèse ou de l’amplification d’au moins une séquence d’acide nucléique définie, l’ensemble de données comprenant une pluralité de points de données, chaque point de données ayant une paire de valeurs de coordonnées, chaque paire de valeurs de coordonnées correspondant à l’un des numéros de cycle différents du processus de croissance de la PCR et la valeur d’intensité du signal généré au moyen d’au moins une séquence d’acide nucléique définie subissant le processus de croissance de la PCR après un cycle de croissance correspondant au numéro de cycle;

la réception de l’ensemble de données dans un système informatique du dispositif thermocycleur de PCR cinétique;

l’utilisation du système informatique comprenant un processeur :

pour déterminer une valeur de seuil de signal défini et un nombre de cycles requis pour atteindre la valeur du seuil pour une réaction à analyser, dans laquelle la valeur du cycle seuil (Ct) est déterminée par des étapes de manipulation de données;

pour déterminer l’efficacité de l’amplification de la réaction en chaîne de la polymérase,

pour déterminer le nombre de copies absolu ou relatif de la molécule cible sur la base de la valeur de cycle seuil obtenue à partir de l’acide nucléique cible ou sur la base des valeurs de cycle seuil obtenues à partir de l’acide nucléique cible et d’un acide nucléique de référence;

lesdites étapes de manipulation des données comprenant :

la détermination d’un point à la fin d’une région de référence de la courbe de croissance, comprenant les étapes exécutées par le processeur de :

- recevoir l’ensemble de données représentant la courbe de croissance;

- calculer une approximation d’une courbe qui correspond à l’ensemble de données en appliquant un processus de régression de Levenberg-Marquardt (LM) à une double fonction sigmoïde pour déterminer les paramètres de la fonction;

- normaliser la courbe au moyen des paramètres déterminés pour produire une courbe normalisée;

- traiter la courbe normalisée pour déterminer un point de courbure maximum, où le point maximum de courbure représente la fin de la région de référence de la courbe de croissance;

dans lequel le point à la fin de la région de référence représente le coude ou la valeur du cycle seuil (Ct) de la courbe de croissance.

[26] Aux pages 2 à 3 de la DF, les éléments essentiels ont été identifiés comme des étapes précises d’analyse de données, sans les éléments physiques de l’ordinateur.

[27] Dans les observations en date du 6 avril 2017, aux pages 12 et 13, le demandeur a soutenu que les éléments physiques de l’ordinateur mentionnés dans les revendications sont essentiels parce que les résultats pratiques définis dans les applications en temps réel ne seraient pas réalisables autrement. Ces méthodes sont trop complexes sur le plan du calcul pour se passer de la technologie informatique et tout moyen de substitution aurait un effet matériel sur l’invention revendiquée et ne produirait pas une solution qui exécute essentiellement la même fonction, de la même façon, pour produire essentiellement le même résultat, de sorte que la technologie de calcul revendiquée est essentielle selon Free World.

[28] Dans la lettre de RP, nous n’étions pas d’accord avec les observations du demandeur et nous avons exprimé ce qui suit en ce qui a trait aux éléments essentiels des revendications au dossier :

Comme nous l’avons exprimé précédemment, notre opinion préliminaire est que le problème défini est le besoin d’une méthode pour déterminer la valeur de transition dans les courbes de type sigmoïde ou de croissance, comme les valeurs Ct dans les courbes d’amplification de la PCR, qui surmonte les inconvénients des méthodes connues. Dans la demande, il n’est pas proposé de résoudre un problème lié au traitement et au calcul rapides de données de façon exacte. Il ne s’agit pas d’un problème qui devait être réglé pour mettre en œuvre et mettre en pratique l’objet revendiqué, puisque tout système informatique conventionnel ou tout dispositif de traitement de données peut être utilisé (voir les pages 6, 7 et 22 de la description ainsi que la figure 21). Par conséquent, l’utilisation des éléments informatiques mentionnés peut faire partie du contexte ou de l’environnement de fonctionnement de l’invention, comme c’est le cas pour le dispositif thermocycleur cinétique utilisé afin de produire l’ensemble de données, mais ils ne constituent pas des éléments essentiels de l’invention revendiquée en soi. Tel qu’il est énoncé à la section 12.02.02e du RPBB, les éléments qui ont un effet substantiel sur le fonctionnement d’une réalisation donnée ne sont pas nécessairement tous essentiels à la solution fournie par l’invention revendiquée.

Compte tenu de la solution indiquée ci-dessus, notre opinion préliminaire est que la PVA comprendrait que les éléments informatiques qui sont mentionnés dans la revendication représentative 1 ne sont pas des éléments essentiels à la solution définie, puisqu’ils ne sont pas nécessaires pour la résolution réussie du problème défini.

Bien que les revendications dépendantes contiennent des caractéristiques supplémentaires, notre opinion préliminaire concernant la revendication représentative 1 s’applique également aux revendications dépendantes : les éléments informatiques ne sont pas considérés comme essentiels pour les revendications dépendantes, puisqu’ils ne font pas partie de la solution identifiée au problème identifié.

Par conséquent, notre opinion préliminaire est que les éléments essentiels des revendications au dossier, tel qu’il a été interprété de manière téléologique, sont les étapes de manipulation des données pour déterminer si les données pour une courbe d’amplification de la PCR représentent ou démontrent une croissance valide ou significative et, le cas échéant, déterminer la valeur Ct de la courbe d’amplification de la PCR :

• recevoir l’ensemble de données représentant la courbe de croissance;

• calculer une approximation d’une courbe qui correspond à l’ensemble de données en appliquant un processus de régression de Levenberg-Marquardt (LM) à une double fonction sigmoïde pour déterminer les paramètres de la fonction;

• normaliser la courbe au moyen des paramètres déterminés pour produire une courbe normalisée;

• traiter la courbe normalisée pour déterminer un point de courbure maximum, où le point maximum de courbure représente la fin de la région de référence de la courbe de croissance, dans lequel le point à la fin de la région de référence représente le coude ou la valeur du cycle seuil (Ct) de la courbe de croissance.

[29] Puisqu’aucune autre observation n’a été fournie par le demandeur, nous maintenons par conséquent nos opinions préliminaires au sujet des éléments essentiels des revendications au dossier aux fins de la présente révision finale.

Objet prévu par la Loi

[30] La position du demandeur selon laquelle les revendications visent un objet prévu par la Loi est fondée sur les observations que l’utilisation d’éléments d’ordinateur physique et la production d’effets physiques par l’utilisation d’un dispositif thermocycleur cinétique sont des éléments essentiels revendiqués pour résoudre le problème avec lesquels sont aux prises les inventeurs (voir les observations en date du 6 avril 2017 aux pages 13 et 14).

[31] Comme nous l’avons déjà mentionné, aucune autre observation n’a été présentée par le demandeur et nous maintenons l’opinion exprimée dans la lettre de RP selon laquelle les éléments informatiques et le dispositif thermocycleur cinétique ne sont pas essentiels; ce qui est essentiel est l’utilisation d’un schéma particulier impliquant des étapes de manipulation mathématique (c’est-à-dire, un flux de travail algorithmique) pour déterminer la valeur Ct de la courbe d’amplification de la PCR.

[32] Par conséquent, nous croyons que les revendications au dossier visent un objet qui est exclu de la définition d’une « invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets.


 

Recommandation de la Commission

[33] Pour les motifs exposés ci-dessus, le Comité recommande que la demande soit rejetée au motif que les revendications au dossier définissent un objet non prévu par la Loi et qui, par conséquent, n’est pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Marcel Brisebois

Leigh Matheson

Lewis Robart

Membre

Membre

Membre

Décision de la commissaire

[34] Je souscris aux conclusions de la Commission ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande au motif que les revendications au dossier ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[35] En conséquence, je refuse d’accorder un brevet relativement à la présente demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

Johanne Bélisle

Commissaire aux brevets

Fait à Gatineau (Québec),

ce 6e jour de mai 2020

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