Brevets

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Contenu de la décision

 

Décision du commissaire no 1520

Commissioner’s Decision No. 1520

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJETS :       J-00 Signification de la technique

                       B-22 Non appuyée par la divulgation

 

TOPICS:        J-00 Meaning of Art

                       B-22 Not Supported by Disclosure

                                                                                              

 

                                                                                              

 

 

 

 

 

 

 

 

                   Demande no 2 307 484

Application No. 2,307,484


 

 

 

 

 

 

 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 

 

 

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets [DORS/96-423], dans leur version immédiatement antérieure au 30 octobre 2019, la demande de brevet numéro 2 307 484 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets [DORS/2019-251]. La recommandation de la Commission et la décision de la commissaire sont de rejeter la demande.

 

 

 

 

Agent du demandeur

 

BORDEN LADNER GERVAIS LLP

100, rue Queen, bureau 1300

Ottawa (Ontario)  K1P 1J9


 

 


Introduction

[1]          La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet canadienne refusée no 2 307 484 qui est intitulée « Modélisation prédictive du comportement financier des consommateurs » et inscrite au nom de KUHURO INVESTMENTS AG, L.L.C. (« le Demandeur »). La Commission d’appel des brevets (« la Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets [DORS/2019-251]. Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, nous recommandons à la commissaire aux brevets de rejeter la demande.

Contexte

La demande

[2]          La demande, ayant une date de priorité revendiquée du 6 mai 1999, a été déposée le 4 mai 2000, et est devenue accessible au public le 6 novembre 2000.

[3]          La demande porte sur l’analyse du comportement financier des consommateurs. Plus précisément, la demande vise une méthode de prévision du comportement financier des consommateurs en fournissant des données sur les transactions à des modèles prédictifs afin de produire des montants de dépenses prévus dans différents segments de marchands.

Historique de la demande

[4]          Le 11 mai 2017, une décision finale (« DF ») a été rendue conformément aux dispositions du paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets [DORS/96-423] dans leur version immédiatement antérieure au 30 octobre 2019 (« les anciennes règles »), dans laquelle la demande a été rejetée en raison d’insuffisance de fondement et parce qu’elle visait un objet non prévu par la Loi. La DF indiquait que les revendications 1 à 21, datées du 21 octobre 2016 (« les revendications au dossier »), n’étaient pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets, et que les revendications 19 et 20 ne se fondent pas entièrement sur la description et qu’elles n’étaient pas conformes à l’article 84 des anciennes règles (maintenant l’article 60 des Règles sur les brevets).

[5]          Le 8 novembre 2017, le Demandeur a présenté une réponse à la DF (« R-DF »). Dans la R‑DF, le Demandeur a soutenu que les revendications au dossier constituaient une invention au sens de l’article 2 de la Loi sur les brevets. De plus, une série de revendications modifiées (« les revendications proposées ») a été présentée dans la R-DF dans le but de corriger l’insuffisance de fondement de l’irrégularité signalée dans la DF.

[6]          Puisque l’Examinateur a maintenu la position que la demande n’était pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets après avoir étudié la R-DF, la demande a été transférée à la Commission pour révision le 2 février 2018, accompagnée d’un résumé des motifs (« RM »). Dans le RM, l’Examinateur a déclaré que les revendications proposées visent toujours un objet non prévu par la Loi et qu’elles n’étaient pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[7]          Le RM a été acheminé au Demandeur le 9 février 2018. Le 5 avril 2018, le Demandeur a indiqué qu’il souhaitait toujours que la Commission procède à la révision de la demande.

[8]          Le présent comité (« le Comité ») a été constitué dans le but de procéder à la révision de la présente demande en vertu de l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets.

[9]          Dans une lettre de révision préliminaire datée du 24 octobre 2019 (« la lettre de RP »), le Comité a présenté son analyse préliminaire et les raisons pour lesquelles nous considérons que l’objet des revendications au dossier n’est pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets. La première appréciation du Comité était que les revendications proposées ne remédieraient pas à l’irrégularité liée à l’objet non prévu par la Loi dans les revendications au dossier. Dans la lettre de RP, le Comité a également considéré que les revendications 19 et 20 des revendications au dossier et que les revendications 19 et 20 des revendications proposées se fondaient entièrement sur le mémoire descriptif de la présente demande et qu’elles étaient donc conformes à l’article 84 des anciennes règles (maintenant l’article 60 des Règles sur les brevets).

[10]      Dans une lettre en date du 14 novembre 2019, le Demandeur a sollicité la tenue d’une audience. Le Demandeur n’a présenté aucune observation écrite en réponse à la lettre de RP.

[11]      Une audience a été tenue devant le Comité le 29 novembre 2019 (« l’audience »).

Question

[12]      Il y a deux questions à trancher dans le cadre de la présente révision :

         La question de savoir si les revendications au dossier définissent un objet prévu par la Loi qui entre dans la définition d’invention à l’article 2 de la Loi sur les brevets;

         La question de savoir si les revendications 19 et 20 au dossier se fondent sur le mémoire descriptif et sont conformes à l’article 60 des Règles sur les brevets.

[13]      Dans le cadre de cet examen, nous aborderons en premier la question de l’objet. Deuxièmement, nous examinerons la question de l’insuffisance de fondement. Enfin, nous examinerons les revendications proposées.

Principes juridiques et pratique du bureau

Interprétation téléologique

[14]      Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc., 2000 CSC 66 [Free World Trust], les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir également Whirlpool c. Camco, 2000 CSC 67 [Whirlpool], aux alinéas 49f) et g) et au paragraphe 52). Tel qu’il est indiqué à la section 12.02 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets (OPIC) révisée en juin 2015 [RPBB], la première étape de l’interprétation téléologique des revendications consiste à identifier la personne versée dans l’art et ses connaissances générales courantes (CGC) pertinentes. L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution proposée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être déterminés; il s’agit de ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée, tel qu’elle est revendiquée.

[15]      Dans la R-DF (aux pages 10 à 13) et pendant l’audience, le Demandeur a soutenu que l’approche du Bureau à l’égard de l’interprétation téléologique n’était pas conforme au droit canadien. Tel qu’indiqué ci-dessus, l’approche du Bureau, décrite dans le RPBB (qui incorporait le contenu de PN2013-02, un énoncé de pratique décrivant l’approche du Bureau en matière d’interprétation téléologique) et de PN2013-03, un énoncé de pratique décrivant l’approche du Bureau à l’égard des inventions mises en œuvre par ordinateur, a été élaboré en réponse à Canada (Procureur général) c. Amazon.com, inc., 11 CAF 328 [Amazon] et à la lumière de la jurisprudence canadienne pertinente. Il fait état de l’interprétation que fait le Bureau du droit en matière de brevets au Canada relativement à l’interprétation téléologique telle qu’appliquée à l’examen d’une demande de brevet. La pratique du Bureau précise qu’une interprétation téléologique dûment éclairée doit tenir compte de la demande dans son ensemble telle que le concevrait la personne versée dans l’art, à la lumière des CGC dans le ou les domaines dont relève l’invention, de manière à définir le problème abordé et la solution proposée dans la demande. La solution à ce problème fournit des indications qui permettent de déterminer les éléments essentiels, sachant cependant que les éléments qui ont un effet substantiel sur le fonctionnement d’une réalisation donnée ne sont pas nécessairement tous des éléments essentiels de la solution.

[16]      Dans la R-DF (aux pages 14 à 17) et pendant l’audience, le Demandeur a également soutenu que le principe fondamental de l’interprétation des revendications repose sur l’intention de l’inventeur quant au caractère essentiel des éléments de la revendication et la portée de la protection qui en découle. Nous convenons que tous les éléments revendiqués doivent être pris en considération lors de l’interprétation téléologique des revendications. Toutefois, la simple présence d’une caractéristique dans les revendications ne rendrait pas automatiquement la caractéristique essentielle à l’objet revendiqué. Comme expliqué dans Amazon aux paragraphes 43 et 44 :

Cependant, il me semble que la jurisprudence de la Cour suprême du Canada, en particulier dans Free World Trust et Whirlpool, requiert que l’identification de l’invention réelle par le commissaire soit fondée sur une interprétation téléologique des revendications du brevet. Cette identification ne peut reposer seulement sur l’interprétation littérale des revendications du brevet ou sur la détermination de « l’essentiel de l’invention » au sens où le juge Binnie utilise ces termes dans les motifs qu’il a rédigés pour la Cour suprême du Canada dans Free World Trust, au paragraphe 46.

Une interprétation téléologique nécessite que le commissaire soit attentif à la possibilité qu’une revendication du brevet puisse être exprimée dans un langage qui soit trompeur, de manière délibérée ou par inadvertance. Par exemple, ce qui à première vue semble être la revendication d’une « réalisation » ou d’un « procédé » peut, dans le cadre d’une interprétation appropriée, constituer la revendication d’une formule mathématique et, par conséquent, ne pas constituer un objet brevetable. C’était le cas dans Schlumberger Canada Ltd. c. Commissaire des brevets [1982] 1 CF 845 (CA). [soulignement ajouté]

[17]      Par conséquent, comme l’énonce le RPBB, même si l’interprétation de la revendication lors de l’examen doit rester ancrée dans le texte des revendications, elle « ne peut reposer seulement sur l’interprétation littérale » des revendications. Une interprétation téléologique bien éclairée doit tenir compte de la demande dans son ensemble, et le libellé des revendications choisi par l’inventeur ne peut l’emporter sur l’ensemble des autres considérations lors de l’interprétation téléologique des revendications.

Objet prévu par la Loi

[18]      La définition d’invention est énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets :

« [I]nvention » Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[19]      Tel qu’il est indiqué dans PN2013-03, l’article 2 de la Loi sur les brevets prévoit la définition d’invention et doit être lu conjointement au paragraphe 27(8) de la Loi sur les brevets, qui exclut les principes scientifiques simples et les théorèmes abstraits. Les inventions désincarnées (p. ex., de simples idées, schémas, plans ou ensembles de règles, etc.) ne sont pas incluses au sens de l’article 2 de la Loi sur les brevets. Lorsqu’il appert qu’un ordinateur constitue un élément essentiel d’une revendication interprétée, ou que la revendication est dirigée à une solution technique à un problème technique, l’objet revendiqué sera généralement prévu par la Loi. En revanche, s’il est déterminé que les éléments essentiels d’une revendication interprétée se limitent seulement à de la matière exclue de la définition d’invention, et qu’ils ne définissent pas « une chose dotée d’une existence physique ou une chose qui manifeste un effet ou changement discernable » (Amazon, paragraphe 66), la revendication n’est pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets, et, par conséquent, n’est pas brevetable.

Insuffisance de fondement

[20]      L’article 60 des Règles sur les brevets exige que les revendications soient claires et concises et se fondent entièrement sur la description. Elle est ainsi formulée :

Les revendications sont claires et concises et se fondent entièrement sur la description, indépendamment des documents mentionnés dans celle-ci.

Analyse

Interprétation téléologique

La personne versée dans l’art

[21]      Dans la lettre de communication, on indiquait que la personne versée dans l’art (PVA), à la page 5, était [traduction] « [une] équipe composée d’un professionnel de la technologie de l’information spécialisé dans les technologies informatiques d’usage général, d’un analyste de données qui est qualifié pour l’analyse prédictive des données commerciales et des modèles prédictifs connexes, et d’un professionnel de la publicité et du marketing qui est qualifié pour l’analyse du comportement financier du consommateur ».

[22]      Le demandeur n’a pas contesté cette caractérisation et nous l’adoptons aux fins de la présente révision.

Les connaissances générales courantes

[23]      Lettre de RP indique les CGC de la PVA à la page 5. Puisque le Demandeur n’a pas contesté l’identification, nous adoptons les CGC suivantes de la lettre de RP aux fins de la présente révision.

         Connaissance de la modélisation mathématique et des statistiques;

         Connaissance du traitement de l’information, en particulier l’extraction de texte;

         Connaissance des systèmes de gestion de bases de données et des outils logiciels de base de données, ainsi que de la conception d’applications logicielles connexes;

         Connaissance de la conception, de la formation et de la mise en œuvre de méthodes conventionnelles d’exploration de données à des fins prédictives, y compris différents types de modèles de régression et de modèles de réseau neutres;

         Connaissance des opérations vectorielles, de l’analyse vectorielle et des représentations vectorielles de documents textuels, ainsi que de leurs mises en œuvre à l’aide d’ordinateurs.

Problème et solution

[24]      À la suite d’un examen des déclarations dans la DF, des observations du Demandeur dans la R-DF, du contexte du mémoire descriptif en entier et en se basant sur les CGC de la personne versée dans l’art, la lettre de RP indiquait ce que la personne versée dans l’art considérerait le problème et la solution suivants comme étant adressés par la présente demande (aux pages 5 à 6)  :

[traduction]

[L]e problème à résoudre tel que le perçoit la PVA avec ses CGC est la nécessité de modéliser le comportement financier des consommateurs en fonction des tendances historiques réelles des dépenses qui reflètent la nature temporelle de l’historique d’achat de chaque consommateur (voir la page 3 de la description). La solution proposée est une méthode de prédiction du comportement financier des consommateurs, qui comprend les étapes de génération d’une séquence chronologique de données sur les transactions de consommation, et d’application de modèles prédictifs connus aux ensembles de données sur les transactions de consommation sélectionnés à partir de la séquence chronologique pour différents segments de commerçants afin de produire des montants de dépenses prévus dans chacun des segments de commerçants.

[25]      Au cours de l’audience, le Demandeur a exprimé son désaccord avec l’identification ci‑dessus et a réitéré sa propre identification du problème et de la solution, comme il a été indiqué précédemment dans la R-DF (page 9) :

[traduction]

 

[U]n problème auquel étaient confrontés les inventeurs était le suivant : Compte tenu de la complexité du problème de calcul et du fait que l’utilisation de la technologie informatique est essentielle, comment l’ordinateur peut-il être configuré pour exécuter une nouvelle fonction, à savoir : traiter les données historiques sur les transactions pour une population de particuliers d’une population de commerçants différents afin de déterminer les préférences de chaque individu en fonction du temps associé à des transactions liées particulières. On soutient respectueusement qu’il s’agit d’un « problème informatique ».

La solution enseignée et revendiquée par les inventeurs implique une configuration spécifique de l’ordinateur par laquelle l’ordinateur : transforme des concepts de données spécifiques, y compris des données de transaction pour une pluralité de consommateurs dans un fichier maître, en d’autres concepts de données, à savoir une séquence de transactions ordonnées par date pour chaque consommateur; pour transformer ces éléments en concepts de données supplémentaires, à savoir des groupes de transactions d’entrée pour chaque consommateur en fonction de la sélection dans une cooccurrence; et de les transformer en d’autres concepts de données, à savoir les montants prévus des dépenses dans chaque segment de commerçant dans un intervalle de temps subséquent. C’est sans aucun doute un résultat pratique et souhaitable.

[26]      Au cours de l’audience, le Demandeur a ajouté que [traduction] « le principal problème pratique auquel l’inventeur est confronté n’était pas la façon de comparer ou de traiter les données en tant que telles. Il était plutôt dirigé vers la façon dont l’ordinateur était configuré pour exécuter une nouvelle fonction », et que le problème est à la fois un [traduction] « problème de calcul colossal » et un [traduction] « problème informatique ».

[27]      Comme il est expliqué dans la lettre de RP, les [traduction] « problèmes de calcul » ne sont pas nécessairement des [traduction] « problèmes informatiques », dont beaucoup ne nécessitent que des améliorations ou une optimisation d’algorithmes abstraits pour réduire les charges de calcul requises pour obtenir des solutions. Lorsqu’il n’est pas nécessaire de disposer d’un matériel informatique spécifique et que l’amélioration du calcul n’est pas propre à du matériel informatique ou à un logiciel, la résolution d’un [traduction] « problème informatique » n’est généralement pas impliquée dans la solution d’un problème d’inefficacité de calcul.

[28]      De plus, il n’y a aucune indication dans le mémoire descriptif de la présente demande quant à la façon dont un ordinateur est configuré spécifiquement en matériel ou en logiciel pour résoudre un problème de « complexité » en ce qui concerne l’efficience du calcul. Dans tous les cas, le niveau de complexité des calculs n’est pas déterminant de la présence d’un « problème informatique ». Par conséquent, à notre avis, la présente demande ne porte pas sur un problème informatique. Il s’agit plutôt d’un problème d’optimisation de la modélisation, c’est-à-dire, un problème concernant la façon de modéliser le comportement financier des consommateurs en fonction des tendances historiques réelles des dépenses qui reflètent la nature temporelle de l’historique d’achat de chaque consommateur.

[29]      Étant donné que nous sommes d’avis que la présente demande ne vise pas un problème informatique, nous sommes d’avis que l’ordinateur ne fait pas partie de la solution de cette demande. Nous concluons que le problème et que la solution sont tels qu’ils sont énoncés dans la lettre de RP.

Les éléments essentiels

[30]      Les revendications 1, 18, 19 et 21 sont les revendications indépendantes au dossier. Pour des raisons de commodité, ces déclarations sont reproduites ici  :

[traduction]

 

1. Une méthode mise en œuvre par ordinateur pour prédire les comportements financiers des consommateurs, comprenant ce qui suit :

    produire, dans un système de prévision du comportement financier des consommateurs ayant un processeur ou plus, à partir des données de transaction pour une pluralité de consommateurs dans un fichier maître en communication avec un processeur ou plus, une séquence de transactions classées par date pour chaque consommateur;

    en sélectionnant pour chaque consommateur un ensemble de transactions classées par date à partir du fichier maître dans une fenêtre de cooccurrence pour former un groupe de transactions d’entrée pour le consommateur;

    pour chaque consommateur, en appliquant les transactions d’entrée du consommateur à chacun des modèles prédictifs d’une pluralité de segments de marchands, chaque modèle prédictif de segment de marchand définissant pour un segment de marchand, une fonction de prédiction entre les transactions d’entrée dans un intervalle de temps passé et les dépenses prévues dans un intervalle de temps subséquent, afin de produire pour chaque consommateur un montant de dépenses prédit dans chaque segment de marchand dans l’intervalle de temps subséquent;

    dans lequel la méthode est exécutée par un processeur ou plus.

 

18. Un support lisible par ordinateur contenant des instructions qui y sont stockées pour être exécutées par un ordinateur pour effectuer la méthode de l’une quelconque des revendications 1 à 17.

 

19. Un système d’analyse des données sur les transactions de consommation comprenant :

      un processeur ou plus;

      une première mémoire stockant des déclarations et des instructions d’exécution par un processeur ou plus afin de fournir un module de prétraitement de données configuré pour générer une pluralité de fichiers maîtres en fonction des transactions pour une pluralité de consommateurs, les fichiers maîtres incluant une séquence de transactions classées par date pour chaque consommateur;

      une deuxième mémoire configurée pour stocker la pluralité de fichiers maîtres;

      une troisième mémoire stockant les déclarations et les instructions d’exécution par un processeur ou plus pour fournir un module de données post-traitement configuré pour sélectionner, à partir de la pluralité de fichiers maîtres stockés dans la deuxième mémoire et pour chaque consommateur, un ensemble de transactions classées par dates pour les transactions dans une fenêtre de cooccurrence afin de créer un groupe de transactions d’entrée pour le consommateur;

    une quatrième mémoire configurée pour stocker une pluralité de modèles prédictifs du segment de marchand;

    une cinquième mémoire stockant les déclarations et les instructions d’exécution par un processeur ou plus pour fournir un moteur de profilage configuré qui, pour chaque consommateur, applique les transactions d’entrée du consommateur à chacun des modèles prédictifs de la pluralité de segments de marchands, chaque modèle prédictif de segment de marchand définissant, pour un segment de marchand, une fonction de prédiction entre les transactions d’entrée dans un intervalle de temps passé et les dépenses prévues dans un intervalle de temps ultérieur, afin de produire, pour chaque consommateur, un montant de dépenses prédit d’intervalle de temps subséquent;

    une sixième mémoire configurée pour stocker les montants de dépenses prédits produits par le moteur de profilage[.]

 

21. Un système d’analyse des données sur les transactions pour prédire le comportement financier des consommateurs comprenant :

      un processeur ou plus;

      une mémoire stockant des déclarations et des instructions d’exécution par un processeur ou plus afin de :

          produire, dans le système, à partir des données de transaction pour une pluralité de consommateurs dans un fichier maître en communication avec un processeur ou plus, une séquence de transactions classée par date pour chaque consommateur;

          sélectionner pour chaque consommateur un ensemble de transactions classées chronologiquement à partir du fichier maître dans une fenêtre de cooccurrence pour former un groupe de transactions d’entrée pour le consommateur;

          pour chaque consommateur, appliquer les transactions d’entrée du consommateur à chacun des modèles prédictifs d’une pluralité de segments de marchands, chaque modèle prédictif de segment de marchand définissant pour un segment de marchand, une fonction de prédiction entre les transactions d’entrée dans un intervalle de temps passé et les dépenses prévues dans un intervalle de temps subséquent, afin de produire pour chaque consommateur un montant de dépenses prédit dans chaque segment de marchand dans l’intervalle de temps subséquent;

          dans lesquels les mesures pour générer, sélectionner et appliquer sont effectuées par un processeur ou plus.

 

[31]      Dans la lettre de RP, le Comité a convenu de l’identification dans la DF des éléments essentiels des revendications indépendantes 1, 18, 19 et 21 comme :

[traduction]

– la production à partir des données de transaction pour une pluralité de consommateurs dans un fichier maître, d’une séquence de transactions classées par date;

– la sélection, pour chaque consommateur, d’un ensemble de transactions classées par date à partir du fichier maître dans une fenêtre de cooccurrence pour former un groupe de transactions d’entrée pour le consommateur;

– pour chaque consommateur, en appliquant les transactions d’entrée du consommateur à chacun des modèles prédictifs d’une pluralité de segments de marchands, chaque modèle prédictif de segment de marchand définissant pour un segment de marchand, une fonction de prédiction entre les transactions d’entrée dans un intervalle de temps passé et les dépenses prévues dans un intervalle de temps subséquent, afin de produire pour chaque consommateur un montant de dépenses prédit dans chaque segment de marchand dans l’intervalle de temps subséquent;

[32]      Dans la R-DF (page 20) et pendant l’audience, le Demandeur n’était pas d’accord avec cette identification et a soutenu que les éléments informatiques revendiqués sont essentiels. Le Demandeur a soutenu que la [traduction] « complexité du problème de calcul » et que l’utilisation d’un [traduction] « type spécial de construction de données, nommément les vecteurs, et les opérations vectorielles connexes » rendent l’utilisation de la technologie informatique essentielle, et que la solution enseignée par l’inventeur implique une configuration spécifique de l’ordinateur pour exécuter [traduction] « une nouvelle fonction » comprenant les étapes de la méthode revendiquée.

[33]      De plus, au cours de l’audience, le Demandeur a réitéré que [traduction] « toute solution pratique au problème doit utiliser la technologie informatique en raison de l’énorme complexité de traitement des données requise », ce qui a souligné l’importance essentielle des éléments informatiques.

[34]      À notre avis, la présente demande n’a pas pour but de résoudre un problème d’inefficacité de calcul à l’aide d’ordinateurs, ce qui est mis en évidence par le manque de divulgation dans le mémoire descriptif concernant les exigences de la technologie informatique en raison de l’inefficacité de calcul. De plus, comme nous l’avons expliqué précédemment, nous sommes d’avis que la présente demande ne vise pas à résoudre les problèmes liés à la mise en œuvre ou au fonctionnement du matériel informatique ou des logiciels. 

[35]      En ce qui concerne la [traduction] « nouvelle fonction », telle que représentée par les étapes de la méthode revendiquée, nous sommes d’avis qu’elle ne correspond pas à plus qu’un nouvel algorithme de modélisation des données, qui peut être transmis à un ordinateur classique pour obtenir des résultats de calcul. Pour cet algorithme, l’utilisation d’un ordinateur pour la mise en œuvre peut être préférable, mais elle n’est pas requise. Dans ce cas, l’ordinateur ne fait rien de plus que des calculs et un traitement de données, de façon accélérée comme prévu. Comme l’explique Schlumberger Canada Ltd c. Canada (Commissaire aux brevets) [1982] 1 CF 845 (CA) [traduction] « c’est précisément pour faire ce genre de calculs que les ordinateurs ont été inventés ». Par conséquent, nous sommes d’avis qu’il n’y a pas de [traduction] « nouvelle fonction » divulguée dans le mémoire descriptif qui rendrait les éléments informatiques essentiels.

[36]      En ce qui concerne les vecteurs et les opérations vectorielles, comme nous l’avons expliqué dans la lettre de RP, le concept de vecteurs et des opérations vectorielles, comme les produits scalaires, existait dans le domaine des mathématiques bien avant l’invention des ordinateurs. L’utilisation de structures de données abstraites, telles que les vecteurs dans un algorithme de modélisation, ne nécessite pas nécessairement l’utilisation de matériel informatique ou de logiciels. Étant donné que la présente demande ne vise pas à résoudre un problème lié à la mise en œuvre par ordinateur de vecteurs ou d’opérations vectorielles, la simple présence de vecteurs et d’opérations vectorielles dans l’algorithme revendiqué ne rendrait pas automatiquement l’ordinateur essentiel à l’objet revendiqué.

[37]      En résumé, nous considérons que les composantes informatiques des revendications, y compris le support de stockage informatique, ne sont pas essentielles à l’objet revendiqué.

[38]      Les revendications dépendantes 2 à 17, et 20 indiquent une manipulation de données supplémentaire qui reflète des réalisations différentes du même ensemble d’éléments essentiels qu’indiqué ci-dessus. Ces déclarations comportent des caractéristiques telles que les déterminations des statistiques de transaction et les manipulations de données vectorielles, y compris le calcul des forces de relation entre des paires de commerçants. À notre avis, toutes les caractéristiques de ces revendications visent les manipulations de données et les calculs.

Objet

[39]      Les éléments essentiels des revendications au dossier visent des étapes abstraites de manipulation de données et des calculs d’une méthode de prédiction du comportement financier des consommateurs. Un tel objet vise un algorithme abstrait, qui ne comprend pas de matière qui manifeste un effet ou un changement discernable, et qui ne correspond pas à la définition d’invention à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[40]      Par conséquent, les revendications 1 à 21 au dossier ne définissent pas un objet prévu par la Loi et conséquemment ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Insuffisance de fondement

[41]   Dans la lettre de RP, le Comité a présenté son opinion préliminaire avec la justification suivante :

[traduction]

Bien que le mémoire descriptif ne mentionne pas explicitement sept unités de mémoire distinctes, il indique que les composantes revendiquées peuvent être stockées dans différentes des unités de mémoire ou être connectés à ces dernières (voir la fig. 4a et la fig. 4b, et les pages 15 à 23 du mémoire descriptif). Dans ce cas, les unités de mémoire qui stockent ces composantes et les instructions de l’ordinateur sont logiquement, ou physiquement, connectées. Les fig. 4a et fig. 4b représentent une des réalisations possibles de la présente demande. Que les unités de mémoire qui stockent les composants du système et les instructions de l’ordinateur soient des parties logiques différentes d’une seule mémoire physique ou des unités de mémoire physiques distinctes, mais reliées, ne change pas la façon dont fonctionne l’invention. Il s’agit simplement de représentations différentes de ce qui est divulgué dans la présente demande. Par conséquent, les déclarations et les instructions revendiquées, les fichiers maîtres, les modèles prédictifs du segment de marchands et les montants de dépenses prédits générés qui sont stockés dans différentes unités de mémoire logiquement ou physiquement reliées se fondent entièrement sur le mémoire descriptif, et une « description exacte et complète » est fournie par le mémoire descriptif à cet égard. Par conséquent, nous sommes d’avis, à titre préliminaire, que les revendications 19 et 20 au dossier sont conforme à l’article 48 des Règles sur les brevets.

[42]      Le Demandeur n’a pas contesté cette opinion. Par conséquent, nous sommes d’avis, à titre préliminaire, que les revendications 19 et 20 au dossier sont conforme à l’article 60 des Règles sur les brevets.

Revendications proposées

[43]      Dans les revendications proposées, seules les revendications 19 et 20 ont été modifiées dans le but de corriger l’insuffisance de fondement de l’irrégularité signalée dans la DF. Dans la modification, les sept unités distinctes de « mémoire » ont été remplacées par une seule unité de mémoire.

[44]      Comme nous l’avons expliqué dans la lettre de RP, nous sommes d’avis que les revendications proposées ne modifient pas notre identité de la PVA, des CGC, du problème ou de la solution et des éléments essentiels. Par conséquent, les revendications proposées 1 à 21 ne seraient pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus dans notre analyse.

[45]      En ce qui concerne la question de l’insuffisance de fondement, comme l’explique la lettre de RP, les revendications proposées 19 et 20 relatent l’utilisation d’une unité de mémoire générique pour exécuter essentiellement les mêmes étapes de la méthode de la revendication 1. Ces revendications indiquent que l’unité de mémoire unique stocke les composantes du système tel que les fichiers maîtres et les instructions d’exécution par les processeurs. Comme il est indiqué dans la lettre de RP, la façon dont les unités de mémoire sont mises en œuvre, logiquement ou physiquement, ne change pas la nature de l’invention ni le fonctionnement de l’invention. Par conséquent, nous sommes d’avis que les revendications proposées 19 et 20 visent une autre représentation de l’invention, qui se fonde entièrement sur le mémoire descriptif tel que déposé à l’origine, et qui est donc conforme à l’article 60 des Règles sur les brevets.

[46]      Les revendications proposées ne peuvent pas être considérées comme des modifications « nécessaires » en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets, parce qu’elles ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.


 

Recommandation de la commission

[47]      Compte tenu de ce qui précède, le Comité recommande de rejeter la demande aux motifs que les revendications au dossier visent un objet non prévu par la Loi et sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[48]      De plus, les revendications proposées ne corrigent pas l’irrégularité liée à l’objet non prévu par la Loi et, par conséquent, l’introduction de ces revendications ne constitue pas des modifications « nécessaires » en vertu du paragraphe 86(11) des Règles sur les brevets.

 

 

 

 

Liang Ji                                       Stephen MacNeil                          Leigh Matheson

Membre                                       Membre                                         Membre


 

Décision du commissaire

[49]      Je souscris aux conclusions de la Commission ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande. Les revendications au dossier ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[50]      En conséquence, je refuse d’accorder un brevet relativement à la présente demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

 

 

 

Johanne Bélisle

Commissaire aux brevets

 

Fait à Gatineau (Québec),

en ce 12e jour de février 2020

 

 

 

 

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