Brevets

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Décision du commissaire no 1505

Commissioner’s Decision No. 1505

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJETS :      J‑00 Signification de la technique
J‑50 Simple plan

TOPICS:       J‑00 Meaning of Art
J‑ 50 Mere Plan

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Demande no 2 799 873

Application No. 2,799,873



 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 


Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets, dans leur version antérieure au 30 octobre 2019 [anciennes Règles sur les brevets], la demande de brevet numéro 2 799 873 a subséquemment fait l’objet d’une révision conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets (DORS/2019‑251). Conformément à la recommandation de la Commission d’appel des brevets, la commissaire rejette la demande.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Agent du demandeur :

 

BORDEN LADNER GERVAIS LLP

ipcipomail@blg.com



 



 

Introduction

[1]               La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet refusée numéro 2 799 873, intitulée « Système et procédé pour éliminer les risques inhérents à un fonds de pension » et qui appartient à Gestion de placements Manuvie Limitée. La Commission d’appel des brevets (la « Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 199(3)c) des Règles sur les brevets. L’irrégularité en suspens à régler dans la présente révision consiste à savoir si les revendications définissent un objet prévu par la Loi. Ainsi qu’il est expliqué ci‑dessous, nous recommandons de rejeter la demande.

Contexte

La demande

[2]               La demande de brevet canadien numéro 2 799 873 a été déposée le 20 décembre 2012 et elle a été mise à la disponibilité du public le 9 mai 2014.

[3]               La demande porte sur les procédés et les systèmes pour éliminer les risques inhérents à un fonds de pension fondés sur la capitalisation d’un portefeuille. Un algorithme de modélisation est utilisé pour prévoir les données d’un cadre d’élimination des risques inhérents pour déterminer la composition de l’actif à l’aide d’une mesure de la volatilité de la capitalisation.

Historique du traitement de la demande

[4]               Le 11 juillet 2016, une décision finale (« DF ») a été rédigée en vertu du paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets dans leur version antérieure au 30 octobre 2019 [anciennes Règles sur les brevets]. La DF a expliqué que la demande est irrégulière pour les motifs suivants : les revendications 1 à 22 (« revendications au dossier ») visent un objet non prévu par la Loi et, par conséquent, sont non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[5]               Dans une réponse à la DF (« R‑DF ») en date du 9 janvier 2014, le demandeur a présenté des arguments en faveur de l’acceptation des revendications au dossier. L’examinateur ayant jugé la demande non conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, la demande a été transmise à la Commission pour révision en vertu du paragraphe 30(6) des Règles sur les brevets, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs (« RM ») qui confirmait le refus de la demande.

[6]               Dans une lettre en date du 21 mars 2017, la Commission a transmis une copie du RM au demandeur. Dans sa réponse au RM (« R‑RM ») du 19 avril 2017, le demandeur a indiqué qu’il souhaitait toujours que la Commission révise la demande et il a présenté d’autres commentaires aux fins de considération par la Commission.

[7]               Le présent Comité a été constitué dans le but de procéder à une révision de la demande en vertu de l’alinéa 30(6)c) des anciennes Règles sur les brevets et de formuler des recommandations à l’intention de la commissaire quant à sa disposition. Dans une lettre de révision préliminaire (« lettre de RP ») en date du 15 août 2019, le Comité a exposé son analyse préliminaire et sa justification quant aux raisons pour lesquelles, selon le dossier écrit, l’objet des revendications au dossier n’était pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets. La lettre de RP offrait au demandeur la possibilité d’assister à une audience et de présenter d’autres observations.

[8]               Dans une réponse en date du 12 septembre 2012, le demandeur a indiqué qu’il ne souhaitait pas la tenue d’une audience, mais qu’il avait l’intention de donner une réponse à la lettre de RP du Comité. La lettre de réponse (« R‑RP ») du demandeur a été reçue le 18 septembre 2019 et fournissait d’autres arguments expliquant les raisons pour lesquelles la demande est conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets.

QUESTION

[9]               La seule question à trancher dans le cadre de la présente révision consiste à déterminer si les revendications au dossier définissent un objet qui relève de la définition d’invention prévue à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Principes juridiques et pratique du Bureau des brevets

Interprétation téléologique

[10]           Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc., 2000 CSC 66, les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir également Whirlpool Corp c. Camco Inc., 2000 CSC 67, aux paragraphes 49f) et g) et 52). Tel qu’il est indiqué à la section 13.05 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets, révisé en juin 2015 (OPIC) [RPBB], la première étape de l’interprétation téléologique des revendications consiste à identifier la personne versée dans l’art (la PVA) et ses connaissances générales courantes (CGC) pertinentes. L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution proposée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être déterminés comme étant ceux indispensables à l’obtention de la solution divulguée, telle que revendiquée.

[11]           Tel qu’il est expliqué à la section 13.05.02c du RPBB, les éléments ayant un effet matériel sur le fonctionnement d’une mode de réalisation donné ne sont pas nécessairement tous essentiels à la solution; certains des éléments mentionnés définissent le contexte ou l’environnement d’un mode de réalisation, mais dans les faits ne modifient pas la nature de la solution. L’interprétation téléologique doit donc avoir pour but de déterminer les éléments qui doivent obligatoirement être présents pour que la solution – qui est présentée dans le mémoire descriptif et sous‑tend la réalisation proposée – puisse avoir l’effet escompté.

Objet prévu par la Loi

[12]           La définition d’invention est énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets :

« invention » Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[13]           Dans la foulée de la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans Canada (P.G.) c. Amazon.com, 2011 CAF 328, le Bureau a publié un énoncé de pratique (PN2013‑03 intitulé « Pratique d’examen au sujet des inventions mises en œuvre par ordinateur », (OPIC, mars 2013) [PN2013‑03]) qui clarifie la pratique d’examen relative à l’approche du Bureau en ce qui concerne les inventions mises en œuvre par ordinateur.

[14]           Comme il est indiqué dans l’énoncé PN2013‑03, lorsqu’un ordinateur est jugé comme un élément essentiel d’une revendication interprétée, l’objet revendiqué sera généralement prévu par la Loi. Par ailleurs, s’il est déterminé que les éléments essentiels d’une revendication interprétée se limitent aux objets exclus de la définition d’invention (par exemple, une simple idée, un projet, un plan ou une série de règles), la revendication ne sera pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Analyse

Interprétation des revendications

La personne versée dans l’art et les CGC pertinentes

[15]           La lettre de RP a indiqué que la PVA était une équipe comprenant [traduction] « […] un ou plusieurs professionnels dans l’industrie de la planification financière et de la gestion des risques ayant une expérience dans le domaine de la gestion du portefeuille de pensions. L’équipe comprend également les programmeurs et d’autres technologues ayant de l’expérience dans le développement et la fourniture de logiciels, d’outils et d’infrastructures utilisés de façon conventionnelle pour appuyer ces professionnels. »

[16]           Dans la lettre de RP, les CGC de la PVA ont été indiquées comme suit :

[traduction

         les connaissances en matière de détermination des risques inhérents aux fonds de pension;

         les connaissances en matière d’atténuation des risques inhérents aux fonds de pension;

         les connaissances en matière de gestion conventionnelle du portefeuille de pensions et leurs lacunes connexes;

         les ordinateurs polyvalents, les dispositifs informatiques, les processeurs, les appareils d’entrée et de sortie, les interfaces de réseaux et les interfaces d’utilisateurs;

         le matériel informatique et les techniques de programmation informatique;

         l’utilisation des bases de données et les systèmes de gestion des bases de données;

         l’utilisation de ces ordinateurs et dispositifs informatiques dans l’industrie de la planification financière afin de faciliter et automatiser les services de planification financière.

[17]           Dans la R‑RP, le demandeur a contesté la définition de la PVA, même s’il n’a pas indiqué ce à quoi il était en désaccord ou n’a offert aucune solution de rechange.

[18]           Dans la lettre de R‑RP, le demandeur a souscrit aux quatre premiers points que le Comité a présentés en tant que CGC, mais il [traduction] « n’était pas d’accord avec les compétences et les connaissances particulières indiquées en tant que CGC », que le Comité a supposé faire référence aux trois dernières puces, avec la justification que [traduction] « en l’absence de détails ou en présence d’un nombre faible de détails, il ne s’agit pas d’une indication que la PVA possède les CGC correspondantes aux connaissances détaillées omises ou faibles. » Le demandeur a demandé que des documents soient fournis à l’appui des CGC indiquées.

[19]           Le Comité soutient que le matériel informatique, la programmation informatique, les bases de données et l’utilisation d’appareils informatiques dans l’industrie de la planification financière au moment du dépôt de la présente demande ne dépassent pas ce que l’on pourrait présumer être connu par la PVA.

[20]           Même si le Comité estime que les CGC concernant les appareils informatiques représentés dans les trois dernières puces étaient bien connues, les documents suivants ont été ajoutés à titre d’appui :

D1 : US 7 895 102                              Wilks et al.                  22 février 2011

D2 : US 2012/0215719                       Verlander                     23 août 2012

[21]           Le document D1 divulgue un outil de planification financière à la disposition des utilisateurs pour suivre les progrès et les objectifs, ainsi que pour recueillir des données provenant de diverses sources financières utilisées dans l’analyse. Le document D1 décrit les outils informatiques qui ont été utilisés et qui étaient bien connus à l’époque par les personnes versées dans l’art, y compris le matériel informatique, la programmation et la gestion des données (de la colonne 11, ligne 37 à la colonne 13, ligne 42).

[22]           Le document D2 divulgue les procédés et les systèmes de modélisation des indices de placements à l’aide de diverses données. Il décrit également les outils informatiques qui étaient bien connus par les personnes versées dans l’art à l’époque, y compris le matériel informatique, la programmation, la gestion des données et l’utilisation de modules programmés (paragraphes [0020] à [0032]).

[23]           En outre, la mise en œuvre par ordinateur des règles divulguées n’est pas habilitée par la présente description, mais par les CGC. Tel que l’indiquent les documents D1 et D2, les systèmes informatiques polyvalents et les techniques de programmation appropriées pour l’industrie de la planification financière font partie des CGC. La demande ne prétend pas enseigner une invention dont la mise en œuvre par ordinateur nécessiterait plus de la part de la personne versée dans l’art que leurs CGC. Si tel était le cas, la demande serait insuffisante pour permettre l’invention revendiquée.

[24]           Par conséquent, le Comité considère que la PVA et les CGC sont celles qui ont été présentées dans la lettre de RP dont il a été question plus haut.

Le problème et la solution

[25]           À la lumière des CGC de la PVA et une lecture objective de la demande et, après avoir tenu compte des arguments du demandeur présentés dans la R‑DF et la R‑RM, la lettre de RP énonce ce que la PVA aurait considéré comme le problème et la solution abordés dans la demande :

[traduction]

[] nous sommes d’avis, à titre préliminaire, que le problème à résoudre, du point de vue de la PVA en raison de ses CGC, tient au besoin de déterminer des portefeuilles de fonds de pension qui comblent les lacunes des méthodes conventionnelles.

Nous sommes d’avis, à titre préliminaire, que la solution proposée par les revendications consiste à modéliser des portefeuilles de pensions afin de déterminer un cadre d’élimination des risques, fondé sur la détermination de la volatilité de la capitalisation.

[26]           Dans la lettre de R‑RP, le demandeur suggère encore une fois que les CGC sont trop précises pour inclure les connaissances approfondies en informatique, ce qui entraîne un problème et une solution qui ne nécessitent pas les composantes informatiques revendiquées. Le demandeur suggère qu’il est pertinent de tenir compte [traduction] « du nombre, de la complexité et de la volatilité considérables des données à traiter par un système ou un procédé conformément aux revendications en instance ».

[27]           Le Comité n’est pas du même avis. Comme il est expliqué à la section 13.05.02b du RPBB, la portée des CGC guide l’identification du problème et de la solution. La personne versée dans l’art lit le mémoire descriptif dans l’attente qu’il énonce quelque chose au‑delà des solutions généralement connues à des problèmes généralement connus. Le fait d’avoir besoin d’un ordinateur pour des raisons pratiques (calculs complexes ou grandes quantités de données) ne rend pas l’ordinateur une partie de la solution pour le fonctionnement d’une invention. Lorsqu’une revendication ne définit pas une solution à un problème informatique ou ne surmonte pas de problème technique pour le fonctionnement d’un système informatique, cela indique que l’utilisation de l’ordinateur est un élément pratique pour la réalisation de calculs. Le traitement de données et la réalisation de calculs sont des fonctions reconnues d’un ordinateur tout comme la manipulation et l’analyse de données, y compris un résultat représentatif de cette analyse. Il est avantageux d’utiliser un logiciel pour l’exécution de la méthode, mais ces avantages découlent des capacités connues des ordinateurs à effectuer des calculs, et donc, la PVA éprouverait des difficultés à les considérer comme faisant partie de la solution offerte par la présente invention proposée.

[28]           De plus, le demandeur a déclaré que le problème pratique doit inclure la nécessité de surveiller continuellement les portefeuilles de pensions qui nécessitent l’utilisation de modules et de processeurs informatiques.

[29]           Le Comité fait valoir que le problème et la solution mentionnés ci‑dessus ne sont pas liés à une surveillance continue. Les données sont stockées et ensuite acquises pour modéliser les portefeuilles qui déterminent un cadre d’élimination des risques inhérents, ce qui donne lieu à la composition de l’actif; la composition de l’actif est ensuite évaluée et comparée à des points de repère. La méthode peut être exécutée plus d’une fois, mais une fois que les données sont acquises, un résultat peut être donné, les résultats ne sont ni fournis ni évalués continuellement et ils ne sont pas non plus requis par le mémoire descriptif original. Le Comité est d’avis que l’évaluation continue des données déjà requises est sans importance, car le résultat des données stockées n’a pas changé.

[30]           Dans la lettre de R‑RP, le demandeur a également présenté des arguments concernant le problème et la solution susmentionnés en ce qui concerne les éléments essentiels indiqués par le Comité dans la lettre de RP; nous abordons ces arguments ci‑dessous sous la rubrique « Les éléments essentiels ».

[31]           Par conséquent, comme cela a été indiqué dans la lettre de RP, le Comité estime que le problème que la personne versée dans l’art aurait compris avoir été résolu par la demande est le besoin d’un moyen de déterminer les portefeuilles de fonds de pension qui permettent de combler les lacunes des méthodes conventionnelles.

[32]           La solution au problème ci‑dessus, tel qu’il est examiné dans la lettre de RP, est la méthode de modélisation des portefeuilles de pensions afin de déterminer un cadre d’élimination des risques, fondé sur la détermination de la volatilité de la capitalisation.

Les éléments essentiels

[33]           Les revendications indépendantes 3 et 14 sont considérées comme représentatives de l’invention; les autres revendications indépendantes, qui sont de portées plus vastes, ne peuvent pas comporter plus d’éléments essentiels que ceux des revendications 3 et 14. Les revendications 3 et 14 visent, respectivement, un procédé et un système informatisé qui énumèrent les étapes à suivre pour établir les règles de modélisation d’un fonds de pension qui comprend la détermination de la volatilité de la capitalisation. Les revendications dépendantes précisent d’autres détails concernant les exigences en matière de données liées aux options de portefeuille.

[34]           La revendication 3 est reproduite ci‑dessous :

[traduction]

Un procédé pour gérer un fonds de pension, le procédé comprenant les éléments suivants :

recevoir des données sur la prévision de la classe d’actifs à partir d’un module d’entrée et l’entreposage des données sur la prévision de la classe d’actifs dans une base de données;

modéliser la pluralité de portefeuilles, à l’aide d’un processeur et d’un module de modélisation, fondé sur les données de prévision de la classe d’actifs dans la base de données, la pluralité des portefeuilles comprenant un premier portefeuille modèle pour un fonds de pension sous‑financé ayant un niveau de capitalisation moins élevé que le pourcentage sélectionné, un deuxième portefeuille modèle pour un fonds de pension sous‑financé ayant un niveau de capitalisation égal ou supérieur au pourcentage sélectionné, et un troisième portefeuille modèle pour un fonds de pension surfinancé, dont chacune des pluralités des portefeuilles comporte une composition d’actifs;

recevoir d’un ordinateur client, au moyen d’une connexion de réseau, un portefeuille modèle sélectionné de la pluralité des portefeuilles fondés sur le niveau de capitalisation actuel du fonds de pension;

surveiller continuellement le rendement de chacune des pluralités des portefeuilles à l’aide d’un processeur en faisant en sorte qu’un module de volatilité effectue ce qui suit :

calculer un indicateur de la volatilité de la capitalisation pour chaque pluralité de portefeuilles,

comparer l’indicateur de la volatilité de la capitalisation à un point de référence d’une volatilité de la capitalisation déterminée au préalable afin de déterminer si chacun des portefeuilles réalise son objectif,

attribuer, à l’aide du processeur, la composition d’actifs dans laquelle le fonds de pension doit être investi en fonction de ce qui suit : le portefeuille modèle sélectionné par l’ordinateur client et est modifié en réponse à la détermination que le portefeuille sélectionné ne réalise pas son objectif.

[35]           Dans la lettre de RP, le Comité énonce son analyse préliminaire pour déterminer les éléments essentiels des revendications qui fournissent la solution au problème. Il a été déterminé que les éléments matériels des revendications, principalement les fonctions informatiques, n’étaient pas essentiels :

[traduction]

Tel qu’il est expliqué à la section 13.05.02c du RPBB, les éléments ayant un effet matériel sur le fonctionnement d’un mode de réalisation donné ne sont pas nécessairement tous essentiels à la solution; certains des éléments mentionnés définissent le contexte ou l’environnement du mode de réalisation, mais dans les faits ne modifient pas la nature de la solution. L’interprétation téléologique doit donc avoir pour but de déterminer les éléments qui doivent obligatoirement être présents pour que la solution – qui est présentée dans le mémoire descriptif et sous‑tend la réalisation proposée – puisse avoir l’effet escompté. Dans les revendications 3 et 14, même si des appareils informatiques sont énoncés, ils font partie de l’environnement ou du contexte dans lesquels l’invention fonctionne, mais ils ne sont pas essentiels à la solution au problème quant à la façon de modéliser une pluralité de portefeuilles de pensions fondée sur la détermination de la volatilité de la capitalisation.

[36]           Dans la lettre de RP, le demandeur a déclaré que les caractéristiques du fonctionnement de la surveillance ont été jugé constituer une caractéristique essentielle qui ne peut être omise du problème et de la solution, comme il en est ainsi dans le cas de la DC 1336, soit la demande de brevet 2 344 781, le 22 mars 2013.

[37]           Le Comité fait remarquer que chaque révision d’une demande refusée devant la Commission est tranchée en fonction de ses propres mérites et faits et que l’application de la décision de la commissaire citée dans la R‑RP ne portait pas sur le même problème et la même solution que ceux de la présente demande. En conséquence, cette affaire ne nous guide pas quant au caractère essentiel des composantes informatiques en l’espèce.

[38]           En conséquence, le Comité considère que les revendications au dossier partagent le même ensemble d’éléments essentiels aux fins de la solution déterminée que celui énoncé dans la lettre de RP, notamment :

[traduction]

         recevoir des données sur la prévision de la classe d’actifs;

         modéliser une pluralité de portefeuilles fondée sur les données de prévision de la classe d’actifs afin de déterminer un cadre d’élimination des risques inhérents;

         déterminer une composition d’actifs pour chacun des portefeuilles modèles fondée sur le cadre d’élimination des risques inhérents;

         évaluer le rendement des portefeuilles modèles au sein du cadre d’élimination des risques inhérents en effectuant ce qui suit :

         déterminer un indicateur de la volatilité de la capitalisation pour chaque portefeuille modèle,

         comparer l’indicateur de la volatilité de la capitalisation de chaque portefeuille modèle à un point de référence d’une volatilité de la capitalisation déterminée au préalable afin de déterminer si chacun des portefeuilles réalise son objectif,

         rendre compte des résultats de la comparaison.

Objet prévu par la Loi

[39]           Le demandeur a soutenu dans la R‑DF que puisque les éléments informatiques faisaient partie des éléments essentiels, l’invention revendiquée devrait être acceptable.

[40]           Tel que cela a été interprété ci‑dessus, les éléments essentiels constituent les étapes à suivre pour modéliser les portefeuilles de pensions afin de déterminer un cadre d’élimination des risques inhérents, fondé sur la détermination de la volatilité de la capitalisation; un ordinateur ne fait pas partie des éléments essentiels. Une telle question ne manifeste pas un effet ou un changement discernable au caractère ou à la condition d’un objet matériel. Elle concerne simplement l’établissement d’un plan ou d’une théorie d’action sans la production de résultats matériels découlant directement de l’exécution de la théorie ou du plan même. Une telle question ne relève pas des catégories d’invention prévues à l’article 2.

[41]           En conséquence, nous sommes d’avis que les revendications 1 à 22 ne définissent pas un objet prévu par la Loi et, par conséquent, sont non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.


 

RECOMMANDATION DE LA COMMISSION

[42]           À la lumière de ce qui précède, la Commission recommande que la demande soit rejetée au motif que les revendications au dossier définissent un objet non prévu par la Loi et, par conséquent, sont non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 

 

 

Mara Gravelle                      Leigh Matheson                         Marcel Brisebois
Membre                                Membre                                      Membre

Décision de la Commissaire

[43]           Je souscris aux conclusions de la Commission et à sa recommandation de rejeter la demande au motif que les revendications au dossier définissent un objet non prévu par la Loi et, par conséquent, sont non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[44]           Par conséquent, je refuse d’accorder un brevet pour cette demande. Aux termes de l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

 

Johanne Bélisle
Commissaire aux brevets
Fait à Gatineau (Québec),
ce 9e jour de décembre 2019

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