Brevets

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Décision du commissaire no 1492

Commissioner’s Decision No. 1492

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJETS :       J00 Signification de la technique

                       J50 Simple plan

O00 Évidence

                      

                                                                                              

TOPICS:        J00 Meaning of Art

                       J50 Mere plan

                       O00 Obviousness

                                              

 

                                  

 

 

 

 

           

Demande no 2 612 654

    Application No.  2,612,654

 


 

 

 

 

 

 

 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 

 

 

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets [DORS/96-423], la demande de brevet numéro 2 612 654 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément aux dispositions de l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. Conformément à la recommandation de la Commission d’appel des brevets, la commissaire rejette la demande.

 

 

 

Agent du Demandeur

 

GOWLING WLG (CANADA) LLP

160, rue Elgin, bureau 2600

OTTAWA (Ontario)

K1P 1C3

 

 

 

                                                                                                                                        

 

                                                                                                  

 


INTRODUCTION

[1]          La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet canadienne refusée no 2 612 654, qui est intitulée « Systèmes de gestion de programmes de réparation directe et méthodes connexes » et inscrite au nom de Mitchell International Inc. (le Demandeur). La Commission d’appel des brevets (« la Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée, conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets.

[2]          Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, nous recommandons à la commissaire aux brevets de rejeter la demande.

CONTEXTE

La demande

[3]          La demande a été déposée au Canada le 10 avril 2007 et mise à la disponibilité du public le 17 février 2008.

[4]          De façon générale, la demande relève du domaine de l’assurance automobile et a trait à l’obtention de devis de réparation conformes à des critères de sélection, et à la sélection consécutive d’un atelier de réparation.

Historique du traitement

[5]          Le 6 juin 2016, une décision finale (DF) a été délivrée conformément au paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets. La DF indiquait que la présente demande était irrégulière au motif que toutes les revendications qui figuraient au dossier au moment de la rédaction de la DF (les revendications au dossier) visaient un objet évident et étaient, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[6]          Dans une réponse à la DF (RDF) en date du 6 décembre 2016, le Demandeur a soumis un ensemble de 21 revendications proposées (l’ensemble de revendications proposées) ainsi que des arguments à l’appui de sa position selon laquelle l’ensemble de revendications proposées est conforme à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[7]          L’examinateur a jugé que la demande n’était pas conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets en dépit des arguments présentés dans la RDF et de l’ensemble de revendications proposées. La demande a donc été transmise à la Commission pour révision, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs (RM), conformément au paragraphe 30(6)c) des Règles sur les brevets. Le RM indiquait que les revendications au dossier, tout comme l’ensemble de revendications proposées, étaient considérées comme irrégulières parce qu’elles visent un objet évident.

[8]          Dans une lettre en date du 3 avril 2017, la Commission a transmis une copie du RM au Demandeur. Dans une lettre en date du 30 juin 2017, le Demandeur a indiqué qu’il souhaitait toujours que la Commission procède à la révision de la demande.

[9]          Le présent comité (le Comité) a été constitué dans le but de procéder à la révision de la présente demande, conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. Le 6 mars 2019, le Comité a envoyé une lettre de révision préliminaire (Lettre de RP) au Demandeur. En plus de présenter son opinion préliminaire quant à la question de l’évidence, le Comité a exprimé l’opinion préliminaire que les revendications 1 à 24 au dossier ne définissent pas un objet prévu par la Loi et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[10]      Dans une pièce de correspondance reçue le 4 avril 2019, le Demandeur a indiqué qu’il ne souhaitait pas qu’une audience soit tenue. Aucune observation écrite n’a été présentée en réponse à la Lettre de RP. Le Comité a donc préparé la présente recommandation sur la base du dossier écrit dans sa version actuelle, y compris la Lettre de RP.

QUESTIONS

[11]      L’une des questions à trancher dans le cadre de la présente révision est celle de savoir si les revendications 1 à 24 au dossier visent un objet évident selon l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. Une autre question est également apparue au cours de la révision préliminaire, soit celle de savoir si l’objet des revendications 1 à 24 au dossier est exclu de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets et, par conséquent, non prévu par la Loi. Si les revendications au dossier sont jugées irrégulières, nous examinerons l’ensemble de revendications proposées.

PRINCIPES JURIDIQUES ET PRATIQUE DU BUREAU

Interprétation téléologique

[12]      Conformément à Free World Trust c Électro Santé Inc, 2000 CSC 66, les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir également Whirlpool Corp c Camco Inc, 2000 CSC 67, aux alinéas 49f) et g) et au paragraphe 52). Tel qu’il est indiqué à la section 13.05 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets [RPBB] révisée en juin 2015, la première étape de l’interprétation téléologique des revendications consiste à identifier la personne versée dans l’art (PVA) et ses connaissances générales courantes (CGC) pertinentes. L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution présentée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être déterminés; il s’agit de ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée, tel qu’elle est revendiquée.

[13]      Ainsi qu’il est expliqué à la section 13.05.02c du RPBB, les éléments ayant un effet substantiel sur le fonctionnement d’une réalisation pratique donnée ne sont pas nécessairement tous essentiels à la solution; certains des éléments mentionnés définissent le contexte ou l’environnement de la réalisation, mais dans les faits ne modifient pas la nature de la solution. L’interprétation téléologique doit donc avoir pour but de déterminer les éléments qui doivent obligatoirement être présents pour que la solution — qui est présentée dans le mémoire descriptif et sous-tend la réalisation revendiquée — puisse avoir l’effet escompté.

Objet prévu par la Loi

[14]      La définition d’« invention » est énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets :

« invention » Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[15]      L’énoncé de pratique PN2013–03, intitulé « Pratique d’examen au sujet des inventions mises en œuvre par ordinateur » [PN2013–03] apporte des précisions quant à l’approche utilisée par le Bureau des brevets pour déterminer si une invention mise en œuvre par ordinateur constitue un objet prévu par la Loi.

[16]      Comme l’indique l’énoncé de pratique PN2013–03, lorsqu’il appert qu’un ordinateur constitue un élément essentiel d’une revendication interprétée, l’objet revendiqué sera généralement prévu par la Loi. En revanche, s’il appert que les éléments essentiels d’une revendication interprétée se limitent à de la matière exclue de la définition d’« invention » (p. ex., les beaux-arts, une simple idée, un schéma, une série de règles, etc.), l’objet revendiqué ne sera pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Évidence

[17]      L’article 28.3 de la Loi sur les brevets exige que l’objet revendiqué ne soit pas évident :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[18]      Dans Apotex Inc c Sanofi-Synthelabo Canada Inc, 2008 CSC 61 au para 67, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, pour évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes présentée ci-dessous :

(1)a)      Identifier la « personne versée dans l’art »;

b)      Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2)          Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3)          Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation;

(4)          Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

Caractère indéfini

[19]      La révision préliminaire ayant révélé l’existence d’un problème lié au caractère indéfini de certaines des revendications proposées, nous soulignons que le paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets exige que les revendications définissent distinctement et en des termes explicites l’objet de l’invention :

Le mémoire descriptif se termine par une ou plusieurs revendications définissant distinctement et en des termes explicites l’objet de l’invention dont le demandeur revendique la propriété ou le privilège exclusif.

ANALYSE

Interprétation des revendications

La PVA et les CGC pertinentes

[20]      Dans la DF, l’examinateur a défini la PVA comme étant une équipe composée de propriétaires d’ateliers de réparation, d’un expert en sinistres et d’un concepteur de réseau.

[21]      Le Demandeur n’a pas contesté cette définition dans la RDF et, conformément à la Lettre de RP, nous l’adoptons aux fins de la présente révision.

[22]      Les antériorités suivantes ont été citées dans la DF :

D1 :            US20020188479        Renwick et al 12 décembre 2002

D2 :            US20020007289        Malin et al      17 janvier 2002

D3 :            US20020035488        Aquila et al     21 mars 2002

D4 :            WO02071281            Uren et al       12 septembre 2002

Le document D1 divulgue une méthode de traitement des réclamations pour dommages à un véhicule et de sélection d’un atelier de réparation.

Le document D2 divulgue la compilation de statistiques sur des ateliers de réparation et la sélection d’un atelier de réparation pour le traitement de la réclamation.

Le document D3 divulgue l’administration et le suivi de réclamations d’assurance.

Le document D4 divulgue l’échange de données entre un assureur et un atelier de réparation.

[23]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, d’après le contexte des inventions divulguées dans les antériorités susmentionnées, nous sommes d’avis que les CGC de la PVA comprendraient ce qui suit :

      les étapes habituelles du traitement des réclamations d’assurance, telles que la présentation d’une réclamation à l’assureur, l’évaluation des dommages, l’obtention de devis estimatifs auprès d’ateliers de réparation pour les réparations à effectuer, la sélection d’un atelier de réparation et la gestion du résultat des réparations (D1, para 0004 et figure 1; D3, para 0005 à 0007);

      l’utilisation de systèmes informatiques aux fins des communications et de la transmission de devis estimatifs et d’images entre les compagnies d’assurances et les ateliers de réparation (D2, para 0002; D3, para 0008; D4, page 1, lignes 5 à 9); et

      l’établissement d’un délai pour effectuer les réparations (D2, para 0010).

Problème et solution

[24]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, d’après le mémoire descriptif et en particulier le contexte de l’invention, nous sommes d’avis que le problème que l’invention alléguée vise à résoudre semble lié au besoin de concilier les motivations et les intérêts divergents des compagnies d’assurance et des ateliers de réparation d’une façon à la fois économique et favorable aux consommateurs (description au dossier, para 0003 et 0004).

[25]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, nous sommes d’avis que la solution revendiquée consiste à permettre à l’expert en sinistres de la compagnie d’assurance de fournir un devis de réparation relativement à une réclamation à un ou plusieurs ateliers de réparation, d’évaluer leur conformité par rapport aux objectifs en matière de coûts et de délais afin de dresser une liste d’ateliers préqualifiés pour effectuer les réparations associées à cette réclamation spécifique, puis de fournir cette liste, ainsi que des commentaires au sujet des ateliers compris dans la liste, au réclamant afin qu’il puisse choisir un des ateliers pour effectuer les réparations.

Éléments essentiels

[26]      Les revendications indépendantes 1, 9 et 17 visent respectivement une méthode, un support lisible par ordinateur et un dispositif informatique, mais énoncent les mêmes éléments.

[27]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, nous sommes d’avis que les éléments des revendications 1, 9 et 17 qui sont essentiels à la mise en œuvre de la solution mentionnée ci-dessus sont les suivants :

      recevoir d’un ou plusieurs ateliers une ou plusieurs estimations des coûts de réparation des dommages déclarés dans une réclamation;

      déterminer quelle(s) estimations parmi la ou les estimations reçues sont conformes à une ou plusieurs exigences comprenant l’acceptation d’un montant estimé pour la réparation des dommages et l’achèvement des travaux à l’intérieur d’un délai précis;

      fournir à l’entité à l’origine de la réclamation la ou les estimations conformes ainsi que les commentaires consignés sur le ou les ateliers ayant présenté une estimation conforme;

      recevoir une indication quant à l’estimation sélectionnée sur la base des estimations conformes et des commentaires consignés; et

      attribuer le mandat de réparation associé à la réclamation à l’atelier sélectionné.

[28]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, notre liste d’éléments essentiels correspond étroitement aux étapes énoncées dans les revendications; cependant, la mise en œuvre par ordinateur n’est pas considérée comme essentielle. Étant donné que l’informatisation était déjà bien connue dans le domaine du traitement des réclamations d’assurance, il n’existait pas de problème quant à la façon de relier entre eux l’expert en sinistre, les ateliers de réparation et le réclamant, ou quant à la façon de transmettre de l’information. Le mémoire descriptif indique que le système pourrait être mis en œuvre au moyen de tout ordinateur universel convenable (description au dossier, para 0019 et 0020). Le problème mentionné dans le mémoire descriptif concerne l’insatisfaction des parties découlant de leurs intérêts divergents et la façon d’y remédier d’une manière à la fois économique et favorable aux consommateurs. La solution réside dans une procédure consistant à procéder à la préqualification d’ateliers (pour une réclamation spécifique) qui seraient acceptables pour l’assureur en termes de coûts et de délais, puis à permettre au réclamant de choisir un des ateliers préqualifiés, en lui fournissant des commentaires sur chacun de ses ateliers pour l’aider à faire un choix, et, ce faisant, à lui conférer davantage de pouvoir. Bien que le système informatisé constitue l’environnement prévu pour la mise en œuvre de la procédure, il n’est pas essentiel à son fonctionnement.

Objet prévu par la Loi

[29]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, une fois que les éléments informatiques ont été exclus en raison de leur caractère non essentiel, il ne reste que les étapes d’une méthode permettant de fournir certaines données et de faire des évaluations et des choix en fonction de ces données. Pour reprendre la formulation employée dans Canada (Procureur général) c Amazon.com Inc, 2011 CAF 328 au para 66, les éléments essentiels ne sont pas une chose dotée d’une existence physique ou manifestant un effet ou un changement discernable. Ces éléments n’entrent dans aucune des catégories d’invention prévues à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[30]      En ce qui concerne les revendications dépendantes 2 à 8, 10 à 16 et 18 à 24, les éléments supplémentaires qu’elles contiennent fournissent d’autres détails sur l’information qui est transmise et sur la façon dont cette information est utilisée à des fins d’évaluation. Aucun de ces éléments supplémentaires ne constitue un objet prévu par la Loi.

[31]      Par conséquent, nous sommes d’avis que les revendications 1 à 24 au dossier ne définissent pas un objet prévu par la Loi et, par conséquent, ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Évidence

[32]      Nous estimons que les revendications indépendantes 1, 9 et 17 sont représentatives.

(1)a) Identifier la « personne versée dans l’art »

(1)b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne

[33]      Ces étapes ont été exécutées dans le cadre de l’interprétation des revendications ci-dessus.

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[34]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, nous considérons que le concept inventif correspond à l’ensemble des éléments essentiels énumérés ci-dessus.

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation;

[35]      Comme nous l’avons fait dans la Lettre de RP, nous comparons ici chacun des éléments essentiels des revendications 1, 9 et 17 avec les antériorités et relevons les différences. Le document D2 semble constituer l’antériorité la plus proche. Comparaison des éléments essentiels avec le document D2 :

                recevoir d’un ou plusieurs ateliers une ou plusieurs estimations des coûts de réparation des dommages déclarés dans une réclamation (D2, au para 0082);

                déterminer quelle(s) estimations parmi la ou les estimations reçues sont conformes à une ou plusieurs exigences comprenant l’acceptation d’un montant estimé pour la réparation des dommages et l’achèvement des travaux à l’intérieur d’un délai précis (D2, aux para 0010 et 0086, qui divulguent que l’assureur dresse une liste d’ateliers qui satisfont à ses exigences, l’une d’entre elles étant de respecter un temps de cycle donné. Cependant, le document D2 ne divulgue pas l’obligation de respecter un montant estimé spécifique à la réclamation d’assurance);

                fournir à l’entité à l’origine de la réclamation la ou les estimations conformes ainsi que les commentaires consignés sur le ou les ateliers ayant présenté une estimation conforme (D2, au para 0086, qui divulgue de transmettre une courte liste d’ateliers préqualifiés au propriétaire de la voiture; D2, aux para 0015 et 0016, qui divulguent également l’utilisation de commentaires consignés). Le document D2 ne divulgue pas de fournir la ou les estimations conformes à l’entité à l’origine de la réclamation;

                recevoir une indication quant à l’estimation sélectionnée sur la base des estimations conformes et des commentaires consignés (D2, au para 0086, qui divulgue la réception d’une indication quant à l’atelier conforme sélectionné parmi la courte liste d’ateliers préqualifiés); et

                attribuer le mandat de réparation associé à la réclamation à l’atelier sélectionné (D2, au para 0085).

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

[36]      Les seuls éléments essentiels des revendications indépendantes 1, 9 et 17 qui sont absents du document D2 sont ceux consistant à déterminer laquelle ou lesquelles de la ou des estimations satisfont au montant estimé spécifique à la réclamation, et à fournir la ou les estimations conformes à l’entité à l’origine de la réclamation.

[37]      Le document D1, qui relève du même domaine, divulgue les aspects consistant à déterminer laquelle ou lesquelles de la ou des estimations satisfont au montant estimé ainsi qu’au délai fixé (para 0026), et à fournir les estimations à l’assureur. Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, nous sommes d’avis que la PVA aurait eu un motif de tenir compte du critère des coûts de réparation spécifiques à la réclamation qui est mentionné dans le document D1, car ainsi, elle aurait pu dresser une courte liste plus satisfaisante d’ateliers de réparation à partir de laquelle choisir un atelier dans le cadre d’un système comme celui du document D2. Les critères de conformité mentionnés dans le document D2 ne sont pas spécifiques à la réclamation en cause, mais représentent la conformité aux critères généraux de l’assureur.

[38]      Nous considérons que l’aspect consistant à fournir la ou les estimations conformes à l’entité à l’origine de la réclamation, laquelle peut être la partie assurée plutôt que l’assureur, fait partie des CGC, car il s’agirait d’une procédure normale dans le cadre du traitement d’une réclamation d’assurance dans l’éventualité où une entité à l’origine de la réclamation autre que l’assureur devait prendre une décision quant à l’atelier auquel confier le mandat de réparation.

[39]      En ce qui a trait aux revendications dépendantes, nous maintenons les opinions que nous avons exprimées dans la Lettre de RP. Ces dernières n’ont pas été contestées par le Demandeur.

[40]      En ce qui concerne les revendications 2, 10 et 18, il est implicite que, au moment de l’attribution du mandat de réparation associé à la réclamation, le système informerait au moins l’atelier retenu que l’estimation qu’il a présentée est conforme.

[41]      En ce qui concerne les revendications 3, 11 et 19, le document D2, aux para 0082 et 0090, divulgue en outre la fourniture de données-images.

[42]      En ce qui concerne les revendications 4, 12 et 20, le document D2 divulgue que le client (c.-à-d. l’entité à l’origine de la réclamation) doit recevoir de l’information destinée à l’aider à choisir un atelier de réparation.

[43]      En ce qui concerne les revendications 5, 13 et 21, le document D2, au para 0098, divulgue en outre des modalités de facturation. L’étape consistant à exiger qu’une première indemnité soit versée par un atelier auquel a été attribué un mandat de réparation associé à une réclamation semble faire partie des CGC, car les CGC comprennent le traitement habituel des réclamations d’assurance.

[44]      En ce qui concerne les revendications 6, 14 et 22, le document D2, au para 0016, divulgue en outre l’utilisation de commentaires, ce qui inclurait implicitement de compiler de nouveaux commentaires de façon continue.

[45]      En ce qui concerne les revendications 7, 15 et 23, le document D1, au para 0008, divulgue l’utilisation de compléments d’information en plus des estimations.

[46]      En ce qui concerne les revendications 8, 16 et 24, le document D2, aux para 0091 et 0098, divulgue en outre l’envoi d’une notification lorsque que les réparations sont terminées et d’une facture.

[47]      Par conséquent, nous sommes d’avis que les revendications 1 à 24 au dossier visent un objet évident et ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets, compte tenu du document D2 à la lumière du document D1 et des CGC.

ENSEMBLE DE REVENDICATIONS PROPOSÉES

[48]      Dans la RDF, le Demandeur a présenté les revendications proposées 1 à 21. Dans l’ensemble de revendications proposées, la caractéristique mentionnée dans les revendications dépendantes 3, 11 et 19 au dossier consistant à fournir des données-images conjointement avec les données sur les dommages, a été ajoutée aux revendications indépendantes. D’autres caractéristiques ont également été ajoutées aux revendications indépendantes de l’ensemble de revendications proposées, soit l’utilisation de données-images pour déterminer un montant estimé pour la réparation des dommages et l’utilisation de données-images pour attribuer une cote de gravité qui, à la fois, ne correspond pas à une perte totale et ne se situe pas en deçà d’un seuil inférieur de valeur de réclamation. Aucun changement de fond n’a été apporté aux revendications dépendantes, hormis la suppression de quelques éléments. La Demandeur a fait valoir que, même si le document D2 divulgue l’utilisation de données-images, aucune des antériorités appliquées ne divulgue la limitation consistant à déterminer qu’une réclamation, à la fois, ne correspond pas à une perte totale et ne se situe pas en deçà d’un seuil inférieur de valeur de réclamation.

[49]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, nous sommes d’avis que l’ensemble de revendications proposées ne remédie pas à l’irrégularité liée à l’objet non prévu par la Loi examinée ci-dessus. L’élément supplémentaire que sont les données-images indique simplement quel type d’information doit être utilisé dans le cadre des opérations mentales consistant à déterminer le coût estimé des réparations et à déterminer une cote de gravité.

[50]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, nous sommes d’avis, en ce qui concerne l’évidence, que l’utilisation de données-images aux fins de la détermination du coût estimé des réparations, comme le prévoient les revendications indépendantes proposées, est divulguée dans le document D2 (para 0082 et 0090). Le fait d’utiliser une limite supérieure pour déterminer si un montant correspond à une perte totale et une limite inférieure comme seuil à partir duquel une réclamation peut être présentée semble faire partie des CGC. Nous soulignons également que le document D3, qui relève du même domaine que le document D2, divulgue la détermination d’une cote de gravité se situant entre les limites inférieure et supérieure (D3, para 0173 à 0214). Par conséquent, nous sommes d’avis que les revendications proposées ne remédient pas à l’irrégularité liée à l’évidence, compte tenu du document D2 à la lumière du document D1 et des CGC.

[51]      Comme nous l’avons indiqué dans la Lettre de RP, nous sommes d’avis que les revendications indépendantes proposées 1, 8 et 15 introduisent des irrégularités liées au caractère indéfini. Dans chacune de ces revendications, les expressions [Traduction] « la ou les estimations reçues » et « le ou les ateliers » ne revoient à aucune revendication précédente et, par conséquent, ne sont pas conformes au paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

CONCLUSIONS

[52]      Nous avons déterminé que les revendications 1 à 24 au dossier visent un objet non prévu par la Loi et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[53]      Nous avons également déterminé que les revendications 1 à 24 au dossier visent un objet évident et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[54]      Nous ne considérons pas que l’ensemble de revendications proposées constitue une modification déterminée nécessaire pour rendre la demande conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets. En conséquence, nous ne recommandons pas d’aviser le Demandeur que ledit ensemble de revendications proposées est nécessaire pour rendre la demande conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, aux termes du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets.

RECOMMANDATION DE LA COMMISSION

[55]      Nous recommandons à la commissaire aux brevets de rejeter la présente demande aux motifs que les revendications au dossier visent un objet non prévu par la Loi et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets et que les revendications au dossier visent un objet évident et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

 

Howard Sandler                              Leigh Matheson                               Reid Mulligan

Member                                            Member                                            Member


 

DÉCISION

[56]      Je souscris aux conclusions de la Commission d’appel des brevets ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande aux motifs que les revendications au dossier visent un objet non prévu par la Loi et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets et que les revendications au dossier visent un objet évident et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

[57]      En conséquence, conformément à l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’accorder un brevet relativement à la présente demande. Conformément aux dispositions de l’article 41 de la Loi sur les brevets, le Demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

 

 

 

Johanne Bélisle

Commissaire aux brevets

 

Fait à Gatineau (Québec),

en ce 13e jour d’août 2019

 

 

 

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