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Décision du commissaire no 1482

Commissioner’s Decision #1482

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJET :           O00 (Évidence)

 

TOPIC:           O00 (Obviousness)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Demande no : 2 637 716

Application No. : 2,637,716

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 

 

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets, la demande de brevet numéro 2 637 716 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. La recommandation de la Commission d’appel des brevets et la décision de la commissaire sont de rejeter la demande.

 

 

 

 

 

 

Agent du demandeur :

 

DANIELS IP SERVICES LTD.

Case postale 610

RICHMOND (Ontario)

K0A 2Z0

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

Introduction

[1]          Cette recommandation concerne la révision de la demande de brevet refusée numéro 2 637 716, qui est intitulée « Systèmes et procédés pour utilisation dans le traitement électronique des passagers et des bagages à des points de contrôle de sécurité » et qui appartient à United Parcel Service of America Inc. L’irrégularité qui subsiste et qui doit être corrigée concerne la question de savoir si l’objet des revendications au dossier aurait été évident. La Commission d’appel des brevets (« la Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, nous recommandons que la demande soit rejetée.

Contexte

La demande

[2]          La demande de brevet 2 637 716 a été déposée au Canada le 9 août 2002 et mise à la disponibilité du public le 21 août 2003.

 

[3]          L’objet revendiqué dans la demande concerne des systèmes électroniques qui peuvent être mis en place comme mesures de sécurité dans l’industrie du transport afin de faciliter le traitement des passagers aux points de contrôle de sécurité.

Historique de la demande

[4]          Le 2 juin 2016, une décision finale (DF) a été rédigée conformément au paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets. La DF expliquait que l’objet de l’ensemble des revendications au dossier aurait été évident, ce qui est contraire à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

[5]          Dans une réponse à la DF (« RDF ») datée du 21 novembre 2016, le demandeur a déposé un ensemble de revendications modifiées (l’« ensemble de revendications proposées – 1 ») qui, d’après le demandeur, est conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets. Le demandeur a présenté des arguments expliquant en quoi l’objet de l’ensemble de revendications proposées – 1 était brevetable et ne se prêtait pas à objection pour les motifs exposés dans la DF.

 

[6]          Comme les arguments du demandeur n’ont pas convaincu l’examinateur, la demande et le résumé des motifs (RM) ont été transmis à la Commission aux fins de révision. Dans le RM, il est maintenu que les revendications au dossier auraient été évidentes, ce qui est contraire à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. En outre, il est conclu dans le RM que l’ensemble de revendications proposées – 1 ne corrige pas l’irrégularité maintenue. Dans une lettre en date du 11 janvier 2017, la Commission a transmis une copie du RM au demandeur.

 

[7]          Le présent comité a été constitué dans le but de réviser la demande, conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets et de présenter une recommandation à la commissaire quant à la décision à rendre. Dans une lettre suivant la révision préliminaire datée du 22 novembre 2018 (la lettre de RP), nous avons exposé notre analyse préliminaire et les raisons pour lesquelles, d’après le dossier dont nous disposons, nous considérons que l’objet des revendications au dossier aurait été évident compte tenu d’un nouveau document d’antériorité cité. En outre, nous avons exprimé notre point de vue, selon lequel les revendications comprises dans l’ensemble de revendications proposées – 1 ne constituent pas une modification « nécessaire » aux termes du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets, parce que notre analyse préliminaire à l’égard de l’évidence de l’objet des revendications au dossier n’aurait pas changé si l’ensemble de revendications proposées – 1 avait été adopté. Dans la lettre de RP, le demandeur a également été invité à présenter d’autres observations écrites et à participer à une audience en réponse à la révision préliminaire du comité.

 

[8]          Le 13 décembre 2018, le demandeur a indiqué qu’il ne souhaitait plus la tenue d’une audience et que des observations écrites et d’autres revendications modifiées seraient ultérieurement soumises.

[9]          Le 19 décembre 2018, le demandeur a présenté des observations écrites en réponse à lettre de RP (la lettre de RRP). Dans la même lettre, le demandeur a également présenté un deuxième ensemble de revendications modifiées (l’« ensemble de revendications proposées – 2 »).

Questions

[10]      Compte tenu de ce qui précède, la seule question à trancher dans le cadre de cette révision est celle de savoir si l’objet des revendications au dossier aurait été évident, ce qui est contraire à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Principes juridiques et pratiques du Bureau des brevets

Interprétation téléologique

[11]      Les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications. L’exercice est effectué du point de vue de la personne versée dans l’art en considérant l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins : Free World Trust c Électro Santé Inc, 2000 CSC 66 [Free World]; Whirlpool Corp c Camco Inc, 2000 CSC 67, aux paragraphes 49f) et g) et 52 [Whirlpool]. De même, tel qu’indiqué à la section 13.05 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets [RPBB], la première étape de l’interprétation téléologique des revendications d’une demande de brevet consiste à identifier la personne versée dans l’art (« PVA ») et à déterminer ses connaissances générales courantes (« CGC ») pertinentes. L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution divulguée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être déterminés ; il s’agit de ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée.

 

Évidence

[12]      L’article 28.3 de la Loi sur les brevets établit l’exigence selon laquelle l’objet revendiqué ne doit pas être évident pour la PVA :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard, de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs ;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

 

[13]      Dans Apotex Inc c Sanofi-Synthelabo Canada Inc, 2008 CSC 61 [Sanofi] au par. 67, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, pour évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes suivante :

 

(1)       a)  Identifier la « personne versée dans l’art » ;

b)    Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne ;

 

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation ;

 

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation ;

 

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

 

[14]      De plus, l’arrêt Sanofi indique, au par. 71, que l’on peut considérer la démarche adoptée par les inventeurs [Traduction] :

Par exemple, le fait pour l’inventeur et les membres de son équipe de parvenir à l’invention rapidement, facilement, directement et à relativement peu de frais, compte tenu de l’art antérieur et des connaissances générales courantes, pourrait étayer une conclusion d’évidence, sauf lorsque leurs efforts et leurs connaissances se sont révélés plus grands que ceux attribués à la personne versée dans l’art.

Analyse

Interprétation téléologique

[15]      Dans la lettre de RP, nous avons indiqué être d’avis qu’en l’espèce, il n’est pas nécessaire de distinguer formellement les éléments essentiels des éléments non essentiels au moyen d’une interprétation téléologique, parce que tous les éléments des revendications, en combinaison, sont examinés dans l’analyse de l’évidence. En outre, nous considérons que la terminologie des revendications serait dénuée d’ambiguïté pour la PVA (définie ci-dessous dans la section relative à l’analyse de l’évidence) et que la portée des revendications apparaîtrait d’emblée à la PVA. Le demandeur a reconnu la démarche susmentionnée à la deuxième page de la lettre de RRP et n’a exprimé aucun désaccord à cet égard.

 

Évidence

[16]      Nous considérons que les revendications indépendantes 1 et 2 sont représentatives de l’objet des revendications au dossier et sont formulées comme suit [Traduction] :

 

1.       Un système utilisé pour évaluer les individus avant leur entrée dans une zone sécurisée, le système comprenant une mémoire pour stocker des instructions et un processeur configuré pour exécuter les instructions de sorte que le système est adapté pour :

a) recevoir des dossiers de données associés à une pluralité d’individus qui tentent d’obtenir accès à la zone sécurisée, lesdits dossiers de données contenant des renseignements relatifs à ladite pluralité d’individus ;

b) stocker les dossiers de données en mémoire ;

c) permettre à un utilisateur de définir des critères de recherche qui sont utilisés pour identifier des individus qui satisfont auxdits critères de recherche ;

d) stocker les critères de recherche en mémoire ;

e) utiliser les critères de recherche pour fouiller les dossiers de données afin d’identifier un ensemble de résultats de recherche contenant chaque individu de la pluralité d’individus satisfaisant aux critères de recherche ;

f) afficher l’ensemble de résultats de recherche pour l’utilisateur ; et

g) permettre à l’utilisateur de sélectionner un ou plusieurs individus particuliers identifiés dans l’ensemble des résultats de recherche afin de procéder à une enquête plus approfondie, où le système est également configuré pour :

en réponse à la sélection par l’utilisateur d’un ou de plusieurs individus particuliers à l’étape g), indiquer qu’un ou plusieurs individus particuliers seront dirigés vers un local d’enquête ;

imprimer une liste des individus sélectionnés par l’utilisateur, ladite liste comprenant des renseignements associés à chaque individu sélectionné à partir du dossier de données correspondant à cet individu, afin d’ainsi fournir une liste des individus sélectionnés aux fins d’enquête ;

indiquer que l’accès à la zone sécurisée est autorisé à l’un ou l’autre des individus n’ayant pas été sélectionné par l’utilisateur aux fins d’enquête à l’étape g) ; et

effectuer les étapes a) à g) avant que la pluralité d’individus arrive à l’entrée de la zone sécurisée.

 

 

2.       Un système utilisé pour évaluer des individus avant leur entrée dans une zone sécurisée, ledit système comprenant :

un ordinateur pour le traitement, comprenant :

au moins un processeur configuré, avant l’arrivée d’une pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée située dans une installation, pour :

recevoir les critères de recherche définis par un utilisateur, lesdits critères de recherche seront utilisés pour identifier les individus qui satisfont aux critères de recherche ;

stocker les critères de recherche ;

accéder aux dossiers de données associés à la pluralité d’individus qui tentent d’accéder à la zone sécurité à partir de la mémoire, chacun desdits dossiers de données comprenant des renseignements sur le statut, lesdits renseignements sur le statut indiquant un statut « retenir » ;

fouiller les dossiers de données au moyen des critères de recherche afin d’identifier un ensemble de résultats de recherche comprenant chaque individu de la pluralité d’individus satisfaisant aux critères de recherche ;

afficher l’ensemble de résultats de recherche pour l’utilisateur ; et

recevoir une sélection d’un ou de plusieurs individus particuliers identifiés dans l’ensemble de résultats de recherche par l’utilisateur en vue d’une enquête plus approfondie ; et

modifier le statut d’attente dans chaque dossier de données associé aux individus non sélectionnés par l’utilisateur au statut « libérer » ; et

au moins un processeur configuré, en réponse à l’arrivée de la pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée, pour :

accéder aux dossiers de données associés à la pluralité d’individus à partir de la mémoire ;

demander à un ou plusieurs individus particuliers dont le statut est « retenir » de se diriger au local d’enquête ; et

demander à l’un ou l’autre des individus dont le statut est « libérer » de se diriger à la zone sécurisée.

 

 

[17]      Les revendications dépendantes 3 et 4 précisent que chacun des dossiers de données comprend les renseignements sur le statut associé à chaque individu (c.-à-d. « retenir » ou « libérer »). La revendication dépendante 5 précise que le système est adapté de manière à permettre à l’utilisateur du système de saisir et de stocker des renseignements concernant les individus faisant l’objet d’une enquête par l’utilisateur. La revendication dépendante 6 précise qu’il existe une pluralité d’utilisateurs potentiels pour le système, où chacun est associé à un code d’identification unique, et que le système est adapté pour permettre à chaque utilisateur de définir des critères de recherche individuels et de stocker ceux-ci avec son code d’identification.

 

Identifier la PVA et les CGC pertinentes

[18]      Dans la lettre de RP, nous avons examiné les évaluations de la PVA et des CGC pertinentes faites dans la DF. Nous avons également souligné que, dans la DF, le demandeur n’a exprimé aucun désaccord à l’égard desdites évaluations.

 

[19]      Nous avons exposé notre point de vue, lequel porte que la PVA est une équipe comprenant des technologues et des gestionnaires d’opérations dans des domaines où des voyageurs, des bagages, des colis, etc. sont traités aux fins de sécurité ou d’inspection, et nous avons également estimé, ayant remarqué que l’objet revendiqué se limite au traitement des individus, que la PVA est particulièrement qualifiée et compétente à l’égard des mesures de sécurité visant les individus et leur mise en œuvre dans différents contextes, y compris la sûreté aérienne, mais qu’elle est moins familière avec les domaines liés aux colis.

 

[20]      Dans la lettre de RP, les éléments suivants sont désignés comme étant les CGC [Traduction] :

         connaissance des avantages qui peuvent être retirés de l’utilisation des ordinateurs, des infrastructures de communication modernes, de l’électronique moderne, etc. pour automatiser ou autrement faciliter de nombreuses étapes des procédures administratives ;

 

         connaissance des systèmes informatiques capables de recevoir, de stocker, de rechercher, de saisir et d’extraire des données ;

 

         connaissance du fait que les systèmes informatiques sont utiles pour automatiser et faciliter les étapes du contrôle en fonction d’une base de données et de critères définis par l’utilisateur ;

 

         connaissance de la façon de configurer des systèmes informatiques au moyen des instructions de programmation requises pour l’acceptation d’intrants, la recherche de certaines bases de données, l’extraction d’information de certaines bases de données et l’affichage/identification des résultats du contrôle obtenus à partir des données extraites ; et

 

         connaissance des mesures de sécurité et des procédures administratives à respecter avant d’embarquer à bord d’un avion avec des individus, y compris les procédures générales de profilage/contrôle des passagers en fonction de critères prédéfinis, ainsi que leurs avantages par rapport aux procédures où tous les passagers font l’objet d’une enquête complète (p. ex. efficacité, efficience, convivialité et économie de ressources).

[21]      Étant donné que le demandeur n’a pas exprimé de désaccord, nous adoptons, aux fins de la présente révision, les définitions de la PVA et des CGC pertinentes énoncées ci-dessus.

Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[22]      Dans la lettre de RP, nous avons défini l’idée originale des revendications au dossier comme étant des systèmes qui permettent aux agents de sécurité de procéder à des fouilles électroniques dans des données stockées au sujet des passagers et des personnes présentes, avant leur entrée dans une zone sécurisée, afin de sélectionner des individus qui doivent faire l’objet d’une vérification plus approfondie avant de pouvoir être libérés du point de contrôle de sécurité. Nous avons également réitéré que la combinaison de tous les éléments des revendications serait examinée dans notre analyse de l’évidence.

 

[23]      Encore là, le demandeur n’a pas contesté cette approche ; nous l’adoptons donc aux fins de la présente révision.

Les différences entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation

[24]      Après avoir examiné le contenu des documents d’antériorité cités dans la DF, et après avoir pris en considération l’autre document ci-dessous qui a été porté à notre attention au cours de la révision préliminaire, nous avons exprimé notre opinion dans la lettre de RP, à savoir que cet autre document est celui qui se rapproche le plus de l’art antérieur et qui est le plus pertinent quant à l’objet revendiqué, et qu’il illustre parfaitement l’« état de la technique » à la date de revendication :

         « Security of Checked Baggage on Flights Within the United States; Proposed Rule », Federal Register, Vol. 64, no 74, 19 avril 1999, publié par la U.S. Federal Aviation Administration (FAA) du Department of Transportation [Avis de la FAA].

[25]      L’Avis de la FAA décrit aux pages 19 220 à 19 223 un système de contrôle des passagers assisté par ordinateur (CAPS) utilisé dans les aéroports aux États-Unis. Le CAPS est un système automatisé de profilage des passagers qui, avant l’entrée des individus dans une zone sécurisée, utilise des données électroniques existantes provenant des systèmes de réservation des transporteurs aériens pour séparer les passagers en deux groupes, soit un groupe où la très grande majorité ne présente aucun risque pour la sécurité, et un autre groupe où une faible minorité (appelée les « individus désignés ») doit faire l’objet d’une vérification plus approfondie avant d’embarquer à bord d’un avion. Le système automatisé « note » les passagers selon un ensemble de critères pondérés afin de déterminer lesquels doivent faire l’objet d’une enquête subséquente par le personnel de sécurité, y compris une vérification des bagages des individus désignés. La FAA vérifie périodiquement le CAPS et ses facteurs de profilage afin de s’assurer qu’ils demeurent des prédicteurs raisonnables de menace. Chaque passager doit faire l’objet d’une inspection de sécurité au moyen du CAPS avant d’être libéré. Comme dans le cas du profilage manuel, l’objet du profilage automatique vise à exclure de l’application de mesures de sécurité supplémentaires la grande majorité des passagers qui sont très peu susceptibles de représenter une menace et, inversement, à identifier les passagers qui doivent faire l’objet de mesures de sécurité accrues. Contrairement au profilage manuel, le profilage automatisé au moyen du CAPS offre de nombreux avantages, y compris l’élimination des préjugés humains ainsi qu’une précision, une vitesse, une exactitude (c.-à-d. non susceptible à l’erreur humaine dans le profilage) et une souplesse accrues.

 

[26]      Dans la lettre de RP, nous avons exprimé l’opinion selon laquelle la PVA comprendrait que le CAPS comprend une mémoire pour stocker les instructions et un processeur configuré pour mettre en œuvre les instructions de sorte que le système est adapté pour :

a)      recevoir des dossiers de données associés à une pluralité d’individus qui tentent d’obtenir accès à la zone sécurisée, lesdits dossiers de données contenant des renseignements relatifs à ladite pluralité d’individus et des renseignements sur le statut indiquant un statut « retenir » ;

b)      stocker les dossiers de données en mémoire ;

c)      permettre à un utilisateur de définir des critères de recherche qui sont utilisés pour identifier des individus qui satisfont auxdits critères de recherche ;

d)     stocker les critères de recherche en mémoire ;

e)      utiliser les critères de recherche pour fouiller les dossiers de données afin d’identifier un ensemble de résultats de recherche comprenant chaque individu de la pluralité d’individus satisfaisant aux critères de recherche ;

f)       afficher l’ensemble de résultats de recherche pour l’utilisateur ;

g)      permettre à l’utilisateur de sélectionner un ou plusieurs individus particuliers identifiés dans l’ensemble des résultats de recherche afin de procéder à une enquête plus approfondie, où le système est également configuré pour :

i)        modifier le statut « retenir » dans chaque dossier de données associé à un ou plusieurs individus sélectionnés au statut « individu désigné » et modifier le statut « retenir » dans chaque dossier de données associé à des individus non sélectionnés par l’utilisateur au statut « libérer » ;

ii)      indiquer qu’un ou plusieurs individus sélectionnés doivent se diriger vers un lieu d’enquête ;

iii)    indiquer que l’accès à la zone sécurisée est autorisé à l’un ou l’autre des individus n’ayant pas été sélectionné par l’utilisateur aux fins d’enquête.

 

[27]      À ce titre, nous sommes d’avis que la PVA considérerait que les principales différences entre la divulgation de l’Avis de la FAA et l’objet des revendications indépendantes 1 et 2 sont les suivantes :

         En ce qui concerne la revendication 1, l’Avis de la FAA ne divulgue pas que le CAPS imprime une liste des individus sélectionnés aux fins d’une enquête subséquente et des renseignements sur ces individus ; et

 

         En ce qui concerne la revendication 2, l’Avis de la FAA ne divulgue pas que le CAPS demande directement (c.-à-d. pas par l’intermédiaire du personnel de sécurité) à l’individu de se rendre à l’endroit désigné en fonction d’un statut « retenir » ou « libérer ».

 

[28]      Le demandeur n’a pas contesté notre définition des différences ; nous l’adoptons donc aux fins de la présente révision.

Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité ?

[29]      Dans la lettre de RP, nous avons présenté l’analyse suivante quant à la raison pour laquelle nous étions initialement d’avis que l’objet des revendications 1 à 6 au dossier aurait été évident à la PVA à la date de revendication, au regard de l’Avis de la FAA et à la lumière des CGC, [Traduction] :

En ce qui concerne l’ingéniosité inventive nécessaire à la brevetabilité, la Cour de l’Échiquier du Canada a affirmé dans Canadian Gypsum Co c Gypsum, Lime & Alabastine, Canada Ltd [1931] C de l’Éch 180, au par. 12, que l’ingéniosité inventive nécessaire peut se trouver dans l’idée sous-jacente et/ou dans son mode de réalisation comme suit [Traduction] :

« [L]’ingéniosité nécessaire à la brevetabilité peut se trouver dans l’idée sous-jacente, ou dans la mise en oeuvre de cette idée, ou dans les deux. Il est possible que l’idée ou la conception soit méritoire, mais une fois cela supposé, son application est très simple. Encore une fois, il est possible que l’idée soit évidente, mais que l’ingéniosité soit nécessaire à sa réalisation. Ou, encore, l’idée elle-même peut être méritoire et le mode de réalisation peut également nécessiter une ingéniosité ».

Après avoir examiné la présente demande dans son ensemble, nous sommes d’avis que l’idée générale sous-jacente d’un système qui permet aux agents de sécurité de procéder à des fouilles électroniques dans des données stockées au sujet des passagers et des personnes présentes, avant leur entrée dans une zone sécurisée, afin de sélectionner des individus qui doivent faire l’objet d’une vérification plus approfondie avant de pouvoir être libérés du point de contrôle de sécurité constitue simplement une mise en œuvre par ordinateur évidente des procédures de sécurité applicables et connues, de même qu’une idée qui avait déjà été mise en œuvre à la date de revendication dans les aéroports des États-Unis, c’est-à-dire le CAPS.

En ce qui concerne la mise en pratique d’un système utilisé pour évaluer les individus avant leur entrée dans une zone sécurisée, la présente demande ne divulgue pas de détails sur la mise en œuvre et se fonde entièrement sur les compétences ordinaires et les CGC pertinentes de la PVA. En outre, nous estimons qu’il n’y a aucune indication ou suggestion dans le mémoire descriptif ou les CGC indiquant que la PVA devrait faire preuve d’ingéniosité pour mettre en pratique l’objet revendiqué.

Les avantages et les bénéfices inattendus associés à l’objet revendiqué peuvent également dénoter une ingéniosité, mais nous sommes d’avis que la PVA ne considère pas que l’objet revendiqué comprend un avantage ou un bénéfice associé au système de sécurité automatisé revendiqué au-delà de ceux attendus et communément connus dans les domaines où l’on procède au traitement d’individus à des fins de sécurité.

Dans l’ensemble, les considérations précitées ne peuvent pas être invoquées pour corroborer l’inventivité qui sous-tend le système revendiqué.

Passons maintenant aux différences soulignées entre l’objet cité comme faisant partie de l’« état de la technique » et l’objet revendiqué et à la question de savoir si ces différences constituent des étapes qui auraient été évidentes pour la PVA – la Cour d’appel fédérale a rappelé au par. 65 dans Bristol-Myers Squibb Canada Co c Teva Canada Ltd, 2017 CAF 76 que la présente étape de l’analyse de l’évidence porte sur la question de savoir s’il faut faire preuve d’inventivité pour combler la différence entre l’art antérieur et un deuxième point [Traduction] :

Il pourrait être utile de garder à l’esprit que l’analyse de l’évidence vise à vérifier si la personne versée dans l’art peut rapprocher deux points dans le perfectionnement de la technique en se fondant uniquement sur ses connaissances générales courantes. Si tel est le cas, il y a évidence. Le premier de ces points concerne l’état de la technique à la date pertinente. Dans la jurisprudence, les mentions de l’« idée originale », du « concept inventif », de la « solution enseignée par le brevet », de « ce qui est revendiqué » ou simplement de « l’invention » tentent de définir le second point.

Notre opinion préliminaire est que la différence entre la divulgation de l’Avis de la FAA et les revendications indépendantes 1 et 2 aurait été évidente à la personne versée dans l’art et ne dénoterait aucun degré d’inventivité.

 

En ce qui concerne la première différence relevée à l’égard de la revendication 1, à savoir l’impression d’une liste des individus sélectionnés aux fins d’une enquête subséquente et des renseignements sur ces individus, la PVA comprendrait que le CAPS décrit dans l’Avis de la FAA comprend, bien que ce ne soit pas explicitement énoncé, un moyen d’afficher l’information relative aux individus sélectionnés aux fins d’enquête subséquente. À notre avis, les options de conception évidentes d’une telle fonctionnalité comprennent une liste imprimée ou consultable de manière électronique.

 

En ce qui concerne la deuxième différence relevée à l’égard de la revendication 2, à savoir que le système demande directement à l’individu de se rendre à l’endroit désigné en fonction d’un statut « retenir » ou « libérer », la PVA comprendrait que le CAPS décrit dans l’Avis de la FAA comprend, bien que ce ne soit pas explicitement énoncé, un moyen de demander à l’individu de se rendre à un endroit donné en selon qu’il est un « individu désigné » ou non. À notre avis, une telle différence relève d’une option de conception évidente, et le choix d’une manière de demander à l’individu de se rendre à un endroit donné ne nécessite aucun degré d’inventivité de la part de la PVA.

 

Après avoir examiné les revendications dépendantes 3 à 6, nous estimons que le CAPS contient de l’information sur le statut dans les dossiers de données (revendication 3) et un moyen permettant à l’utilisateur de modifier les données sur le statut de chaque individu à la suite de l’enquête (revendication 4). En outre, nous estimons qu’il s’agirait d’une mise en œuvre évidente à la PVA, si ce n’est pas déjà possible pour le CAPS, de permettre à l’utilisateur du système de saisir et de stocker de l’information concernant les individus faisant l’objet d’une enquête subséquente, notamment les réponses fournies au personnel de sécurité et un dossier de l’enquête (revendication 5). Enfin, nous estimons qu’aucun degré d’inventivité ne serait nécessaire pour adapter le CAPS, comme option de conception évidente, afin de permettre aux utilisateurs de définir des critères de recherche individuels et de stocker ceux-ci avec les codes d’identification des utilisateurs, puisque le CAPS permet déjà l’examen périodique de ses critères de profilage (revendication 6).

 

[30]      En outre, dans la lettre de RP, nous avons exprimé notre point de vue, selon lequel les revendications comprises dans l’ensemble de revendications proposées – 1 ne constituent pas une modification « nécessaire » aux termes du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets, parce que notre analyse préliminaire à l’égard de l’évidence de l’objet des revendications au dossier n’aurait pas changé si les revendications proposées avaient été adoptées [Traduction] :

Avec la RDF, le demandeur a soumis un ensemble de revendications proposées contenant les revendications 1 à 7, où l’étape g) de la revendication indépendante proposée 1 est modifiée et indique ceci [Traduction] : « génération d’une liste électronique des individus sélectionnés par l’utilisateur, ladite liste électronique comprenant de l’information associée à chaque individu sélectionné à partir du dossier de données de cet individu, afin de fournir ensuite une liste des individus sélectionnés aux fins d’enquête, ladite liste électronique étant configurée de manière à associer à chacun de ces individus un champ de notes électroniques » et « saisie de notes électroniques rédigées par l’utilisateur concernant l’enquête subséquente d’un ou de plusieurs individus de la liste électronique, lesdites notes électroniques étant associées à un ou plusieurs individus faisant l’objet d’une enquête et archivées électroniquement dans la mémoire, consultables électroniquement, et accessibles électroniquement pour les besoins de rapports subséquents ».

L’ensemble de revendications proposées comprend également une nouvelle revendication dépendante 3 qui se lit comme suit [Traduction] :

3.             Un système conforme à la revendication 2, où au moins un processeur est configuré, en réponse à l’arrivée de la pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée, pour :

générer une liste électronique comprenant de l’information associée à chaque individu sélectionné à partir du dossier de données de cet individu, afin de fournir ensuite une liste des individus sélectionnée aux fins d’enquête, ladite liste électronique étant configurée de manière à associer à chacun de ces individus un champ de notes électroniques ; et

saisie de notes électroniques rédigées par l’utilisateur concernant l’enquête subséquente d’un ou de plusieurs individus de la liste électronique, lesdites notes électroniques étant associées à un ou plusieurs individus faisant l’objet d’une enquête et archivées électroniquement dans la mémoire, consultable électroniquement et accessible électroniquement pour les besoins de rapports subséquents.

 

Nous soulignons qu’il existe une correspondance entre l’ensemble de revendications proposées et les revendications au dossier, que l’ensemble de revendications proposées n’élargit pas la portée des revendications correspondantes au dossier et qu’aucune autre recherche d’antériorités n’est donc nécessaire. Par conséquent, l’ensemble de revendications proposées pourrait être pris en compte aux fins de modification en vertu du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets, dans la mesure où il est déterminé qu’il permet de corriger les irrégularités mentionnées ci-dessus en ce qui concerne les revendications au dossier, et qu’il n’introduit pas d’autres irrégularités. Pour ces raisons, nous avons soumis nos premières appréciations concernant ces revendications également.

Nous avons présenté notre appréciation préliminaire, à savoir que l’objet des revendications 1 à 6 au dossier, enseigné par l’Avis de FAA, à la lumière des CGC, aurait été évident pour la PVA à la date de revendication.

À notre avis, la seule différence significative entre la revendication 1 au dossier et la revendication proposée 1 est qu’à l’étape g) de la revendication proposée 1, le système est de plus configuré pour générer une liste électronique qui contient un champ de notes électroniques associé à chaque individu, plutôt qu’une version imprimée, et qui permet de saisir des notes électroniques, y compris des notes relatives à une enquête subséquente. La nouvelle revendication dépendante proposée 3 ajoute essentiellement les mêmes caractéristiques à la revendication proposée 2.

Nous réitérons notre première appréciation, à savoir que la génération d’une liste électronique consultable d’individus sélectionnés et la possibilité pour l’utilisateur du système de saisir et de stocker de l’information concernant les individus faisant l’objet d’une enquête subséquente, y compris les réponses fournies au personnel de sécurité et un dossier de l’enquête, ne définissent pas une étape inventive à la lumière du CAPS divulgué dans l’Avis de la FAA et des CGC pertinentes, car il s’agirait d’options de conception évidentes. Nous estimons également qu’il serait évident pour la PVA de mettre en œuvre les caractéristiques susmentionnées pour configurer la liste électronique, de manière à ce que le champ de notes électroniques soit associé à chaque individu, où ledit champ de notes électroniques permet la saisie de notes consultables électroniquement rédigées par l’utilisateur concernant une enquête subséquente d’un ou de plusieurs individus figurant sur la liste électronique, et les notes électroniques sont archivées électroniquement en mémoire, sont consultables électroniquement et sont accessibles électroniquement pour les besoins de rapports subséquents.

 

[31]      Dans la lettre de RRP, il est indiqué que la position du demandeur à l’égard de la brevetabilité des revendications actuellement au dossier a été énoncée en détail dans les réponses antérieurement déposées ; nous avons déjà examiné cette position dans la lettre de RP. Par conséquent, en l’absence d’autres observations à l’égard des revendications au dossier et pour les motifs exposés dans le passage ci-dessus, nous estimons que l’objet des revendications au dossier aurait été évident, ce qui est contraire à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

Analyse de l’ensemble de revendications proposées – 2

[32]      Comme il a été mentionné précédemment, le demandeur a soumis avec la lettre de RRP l’ensemble de revendications proposées – 2, lequel contient les revendications 1 à 4, où la revendication indépendante 1 est modifiée et se lit désormais comme suit [Traduction] :

 

1.            Un ordinateur pour le traitement, comprenant :

au moins un processeur configuré, avant l’arrivée d’une pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée située dans une installation, pour :

a) recevoir, à partir d’un dispositif d’interface associé à un utilisateur, les critères de recherche définis par l’utilisateur, lesdits critères de recherche seront utilisés pour identifier les individus qui satisfont aux critères de recherche ;

b) stocker les critères de recherche ;

c) accéder aux dossiers de données associés à la pluralité d’individus qui tentent d’accéder à la zone sécurité à partir de la mémoire, chacun desdits dossiers de données comprenant des renseignements sur le statut, lesdits renseignements sur le statut indiquant un statut « retenir » ;

d) fouiller les dossiers de données au moyen des critères de recherche afin d’identifier un ensemble de résultats de recherche comprenant chaque individu de la pluralité d’individus satisfaisant aux critères de recherche ;

e) afficher, au moyen du dispositif d’interface associé à l’utilisateur, l’ensemble de résultats de recherche pour l’utilisateur ;

f) recevoir, à partir du dispositif d’interface associé à l’utilisateur, une sélection d’un ou de plusieurs individus particuliers identifiés dans l’ensemble de résultats de recherche par l’utilisateur en vue d’une enquête plus approfondie ; et

g) modifier le statut d’attente dans chaque dossier de données associé aux individus non sélectionnés par l’utilisateur au statut « libérer » ; et

au moins un processeur configuré, en réponse à l’arrivée de la pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée, pour :

a) accéder aux dossiers de données associés à la pluralité d’individus à partir de la mémoire ;

b) demander à un ou plusieurs individus particuliers dont le statut est « retenir » de se diriger au local d’enquête ; et

c) demander à l’un ou l’autre des individus dont le statut est « libérer » de se diriger à la zone sécurisée.

 

[33]      La revendication dépendante proposée 2 précise que le processeur est configuré pour créer une liste des individus sélectionnés et de renseignements associés à chaque individu à partir du dossier de données, c.-à-d. une liste des individus sélectionnés aux fins d’enquête. La revendication dépendante proposée 3 précise que le processeur est configuré pour recevoir des renseignements concernant chaque individu faisant l’objet d’une enquête et pour stocker ces renseignements en mémoire, c.-à-d. dans un dossier d’enquête. La revendication dépendante 4 précise qu’il existe une pluralité d’utilisateurs potentiels pour le système, où chacun est associé à un code d’identification unique, et que le système est adapté pour permettre à chaque utilisateur de définir des critères de recherche individuels et de stocker ceux-ci avec son code d’identification.

 

[34]      Nous soulignons qu’il existe une correspondance manifeste entre l’ensemble de revendications proposées – 2 et les revendications au dossier, que l’ensemble de revendications proposées – 2 n’élargit pas la portée des revendications correspondantes au dossier et qu’aucune autre recherche d’antériorités n’est donc nécessaire. Par conséquent, l’ensemble de revendications proposées – 2 pourrait être pris en compte aux fins de modification dans la mesure où il est déterminé qu’il permet de corriger les irrégularités mentionnées ci-dessus en ce qui concerne les revendications au dossier, et qu’il n’introduit pas d’autres irrégularités.

 

[35]      Dans la lettre de RRP, le demandeur a fait valoir ce qui suit concernant l’inventivité qui sous-tend l’ensemble de revendications proposées – 2 à la lumière de l’Avis de la FAA [Traduction] :

 

Comme il a été souligné précédemment, la nouvelle revendication proposée 1 diffère des antériorités connues (y compris l’Avis de la FAA), du moins à l’égard des points suivants :

 

         la nouvelle revendication proposée 1 définit explicitement le fait que le processeur est configuré pour exécuter un ensemble défini d’opérations « avant l’arrivée d’une pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée située dans une installation », et un autre ensemble d’opérations « en réponse à l’arrivée de la pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée ».

 

         chaque individu est d’abord associé au statut « retenir » [sous-disposition a)] ; ce statut est ensuite modifié par le processeur (c.-à-d. automatiquement) et devient le statut « libérer » pour chaque individu n’étant pas sélectionné aux fins d’une enquête subséquente [sous-disposition g)].

 

Le demandeur fait valoir que ces caractéristiques, de pair avec les autres éléments de la revendication, n’auraient pas été évidentes pour une PVA à la date de revendication, eu égard à l’art antérieur cité et aux CGC.

 

Plus particulièrement, l’Avis de la FAA ne semble pas établir de distinction précise entre les actions qui ont lieu [Traduction] « avant l’arrivée d’une pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée située dans une installation » et celles qui ont lieu après. D’après les CGC pertinentes, la PVA pourrait présumer qu’au moins certaines fonctions d’un système de contrôle des passagers assisté par ordinateur (CAPS) puissent être exécutées avant que des individus arrivent à l’entrée de la zone sécurisée. Cependant, l’Avis de la FAA ne décrit pas le moment auquel sont exécutées les opérations du CAPS, et ni les CGC ni l’Avis de la FAA n’enseignent ou n’évoquent le moment précis défini dans la nouvelle revendication proposée 1. Par exemple, la PVA pourrait raisonnablement conclure que les opérations de contrôle et de sélection du CAPS doivent avoir lieu après qu’un individu arrive à l’entrée de la zone sécurisée, parce que cela empêcherait le contrôle inutile d’individus qui ne s’y rendent pas.

 

En revanche, la nouvelle revendication proposée 1 indique que la pluralité d’individus fait l’objet d’un contrôle, et que le statut de chaque individu non sélectionné est modifié pour devenir le statut « libérer », [Traduction] « avant l’arrivée d’une pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée ». En réponse à la pluralité d’individus qui arrivent à l’entrée de la zone sécurisée, la nouvelle revendication proposée 1 indique que les individus dont le statut est « retenir » doivent [Traduction] « se rendre au local d’enquête », alors que les individus dont le statut est « libérer » peuvent entrer dans la zone sécurisée.

 

De même, l’Avis de la FAA ne semble pas décrire la manière dont les individus sont identifiés comme étant sélectionnés aux fins d’enquête subséquente ou non. D’après les CGC pertinentes, la PVA pourrait raisonnablement présumer que cette identification peut être indiquée dans un champ sélectionné, dans des données associées à un individu. Cependant, l’Avis de la FAA ne fournit pas ces renseignements, et ni les CGC ni l’Avis de la FAA n’enseignent ou n’évoquent les opérations particulières définies dans la nouvelle revendication proposée 1. Plus particulièrement, les CGC et l’Avis de la FAA ne divulguent pas l’assignation d’un statut « retenir » à l’ensemble des individus, puis la modification de ce statut en statut « libérer » pour les individus qui ne sont pas sélectionnés aux fins d’enquête subséquente, ainsi qu’il est défini dans la nouvelle revendication proposée 1.

 

Au moins au titre des motifs qui précèdent, les nouvelles revendications proposées 1 à 4 sont considérées comme étant conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. [italique présent dans l’original]

 

[36]      En ce qui concerne l’observation selon laquelle ni les CGC ni l’Avis de la FAA n’enseigne ou n’évoque que l’étape de contrôle a lieu précisément [Traduction] « avant l’arrivée d’une pluralité d’individus à l’entrée de la zone sécurisée située dans une installation », comme il est indiqué dans la revendication indépendante 1, nous ne sommes pas d’accord. Nous sommes d’avis qu’il n’aurait pas été raisonnable pour la PVA de conclure, d’après l’Avis de la FAA, que les opérations de contrôle et de sélection du CAPS doivent être exécutées après qu’un individu arrive à l’entrée de la zone sécurisée. La PVA connaît les mesures de sécurité et les procédures administratives visant les individus appliquées avant l’embarquement à bord d’un avion, y compris les procédures générales de profilage/contrôle des passagers (voir les CGC décrites ci-dessus) et comprendrait donc que le contrôle de sécurité commence à l’enregistrement, avant l’arrivée dans la zone d’embarquement sécurisée. L’enregistrement auprès des transporteurs aériens constitue généralement la première procédure que suit un passager à son arrivée à l’aéroport ; elle comprend l’enregistrement de l’identité du passager et de ses bagages, ainsi que la remise d’une carte d’embarquement.

 

[37]      L’Avis de la FAA divulgue, à la page 19 222, que [Traduction] « le CAPS s’appuie uniquement sur les renseignements que fournissent actuellement les passagers aux transporteurs aériens pour des raisons non liées à la sécurité ». Il s’ensuit que l’information requise est déjà accessible à l’étape de l’enregistrement, avant qu’une pluralité d’individus arrive à l’entrée de la zone d’embarquement sécurisée. Nous estimons que la PVA comprendrait que le contrôle effectué par le CAPS peut commencer dès que les renseignements sur les passagers sont vérifiés par les employés du transporteur aérien aux comptoirs d’enregistrements ou aux terminaux.

 

[38]      À la même page, l’Avis de la FAA divulgue également que [Traduction] « le CAPS est fondé sur le même concept que le système de contrôle manuel, … Il existe un avantage important, à savoir que le système ne s’appuie pas sur le jugement des employés d’un transporteur aérien donné pour réduire le nombre de personnes qui doivent faire l’objet de mesures de sécurité accrues ». La PVA comprendrait que, à la lumière de l’Avis de la FAA et des CGC, pour que les employés de transporteurs aériens puissent porter un tel jugement pendant le contrôle manuel, un tel contrôle manuel se fait à l’étape de l’enregistrement, avant l’arrivée à la zone d’embarquement sécurisée. La PVA sait, à la lumière de l’Avis de la FAA, que le CAPS est fondé sur le même concept.

 

[39]      L’Avis de la FAA divulgue également à la page 19 220 que [Traduction] « les bagages enregistrés des individus désignés par le CAPS feraient l’objet d’un contrôle au moyen de l’équipement d’EDS [système de détection d’explosifs], lorsque disponible, ou d’une vérification de la correspondance des sacs ». Pour que le CAPS permette la correspondance des bagages et le contrôle subséquent au moyen de l’équipement EDS en fonction des résultats du profilage des passagers, nous estimons que la PVA comprendrait que le contrôle par le CAPS est effectué avant qu’une pluralité d’individus arrive à l’entrée de la zone d’embarquement sécurisée.

 

[40]      Compte tenu des considérations qui précèdent, nous sommes d’avis que la PVA, étant au courant de l’Avis de la FAA, serait directement amenée à utiliser le CAPS d’une manière selon laquelle l’étape de contrôle doit être effectuée au plus tard au moment de l’enregistrement auprès du transporteur aérien (c.-à-d. avant que les individus arrivent à l’entrée de la zone d’embarquement sécurisée), de sorte que : 1) le bagage enregistré est associé à un statut « individu désigné » ou « individu non désigné » avant un éventuel contrôle subséquent par EDS ; et 2) le personnel de sécurité peut efficacement diriger les individus dont le statut est « individu désigné » et leur bagage à main au local d’enquête, dès qu’ils arrivent, mais avant qu’ils entrent dans la zone d’embarquement sécurisée.

 

[41]      En outre, si nous avions été d’avis que la PVA ne comprendrait pas nécessairement, à la lumière de l’Avis de la FAA, à quel moment exactement le CAPS procède au contrôle des individus ; nous estimons que, de toutes les variantes de mise en œuvre du CAPS, il aurait été évident pour la PVA que le moment le plus évident et opportun de séparer (c.-à-d. contrôler) les passagers en deux groupes, un dont la très grande majorité ne présente aucun risque pour la sécurité et l’autre dont une faible minorité nécessite une vérification plus approfondie avant d’embarquer à bord d’un avion, est l’étape d’enregistrement, et ce, pour les mêmes raisons que celles présentées dans les paragraphes [36] à [38] ci-dessus.

 

[42]      En ce qui concerne les observations portant que l’Avis de la FAA ne semble pas décrire en détail la manière dont chaque individu est identifié et sélectionné aux fins d’une enquête subséquente et que l’Avis de la FAA ne divulgue pas l’assignation d’un statut « retenir » à tous les individus ni la modification par la suite de ce statut au statut « libérer » dans le cas des individus qui ne sont pas sélectionnés aux fins d’une enquête subséquente, nous estimons que lesdites observations ont été au moins abordées dans les motifs présentés à l’égard de la revendication 2 au dossier (voir le paragraphe [29] ci-dessus). Quoi qu’il en soit, nous sommes d’avis qu’il relève bel et bien des compétences ordinaires de la PVA d’utiliser des moyens couramment connus pour associer un statut à un dossier de données et le modifier, y compris au moyen d’un champ dans des données associées à un individu. La simple existence de plusieurs options de conception évidentes ne rend aucune de ces options inventives. Autrement dit, nous estimons que la mise en œuvre d’une caractéristique selon laquelle l’attribution de statut sur le fondement des résultats d’un processus de contrôle n’exigerait aucun degré d’inventivité de la part de la PVA.

 

[43]      En outre, nous sommes d’avis que le concept « retenir/libérer », où un statut « retenir » associé à des individus non sélectionnés est modifié au statut « libérer » constitue une solution de rechange évidente au concept « individu désigné/individu non désigné » du CAPS, où le statut associé aux individus sélectionnés par le système est modifié au statut « individu désigné ». L’idée sous-jacente est la même : dans les deux systèmes, les individus ont l’un de deux statuts automatiquement associés à leur dossier de données après le contrôle, soit un statut qui exige une vérification de sécurité accrue et un statut qui ne l’exige pas. L’utilisateur du système à l’entrée de la zone sécurisée peut ensuite diriger les individus vers la zone sécurisée ou vers un local d’enquête, selon le statut qui leur est associé. Bien qu’il s’agisse d’une forme différente sur le plan technique, nous sommes d’avis qu’une telle différence n’a pas d’incidence sur l’orientation des individus visés par une enquête subséquente et ne corrobore pas l’inventivité du système revendiqué. Nous estimons qu’il n’existe aucun avantage inattendu ou étonnant associé au concept « retenir/libérer » et nous sommes également d’avis que rien n’indique ni ne suggère, dans le mémoire descriptif ou les CGC, que la PVA devrait faire preuve d’ingéniosité pour mettre en œuvre ledit concept.

 

[44]      Les autres caractéristiques et limites des revendications dépendantes proposées 2 à 4 (c.-à-d. la création d’une liste d’individus sélectionnés aux fins d’enquête, la production d’un dossier d’enquête, la réception et le stockage de critères de recherche individualisés accompagnant le code d’identification de l’utilisateur) ont été examinées et abordées dans les motifs énoncés dans la lettre de RP à l’égard des revendications dépendantes au dossier (voir le paragraphe [29] ci-dessus) et/ou l’ensemble de revendications proposées – 1 (voir le paragraphe [30] ci-dessus). La lettre de RRP était centrée sur les caractéristiques de la revendication proposée 1 et ne fournit aucune observation précise à l’égard des caractéristiques des revendications dépendantes proposées.

 

[45]      À la lumière de ce qui précède, nous sommes d’avis que l’ensemble de revendications proposées – 2 n’est pas conforme à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. Par conséquent, nous sommes également d’avis que l’ensemble de revendications proposées – 2 ne satisfait pas aux exigences relatives à la modification « nécessaire » aux termes du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets.

Recommandation de la Commission

[46]      Nous recommandons que la demande soit rejetée, au motif que l’objet des revendications 1 à 6 au dossier aurait été évident, ce qui est contraire à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

[47]      Étant donné que l’ensemble de revendications proposées – 2 ne corrige pas l’irrégularité liée à l’évidence des revendications au dossier, nous ne recommandons pas d’aviser le demandeur que lesdites revendications proposées sont nécessaires aux termes du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets, pour assurer la conformité à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets.

 

 

 

 

 

 

 

 

Marcel Brisebois                        Andrew Strong                       Andy Wong

Membre                                     Membre                                   Membre

 


 

Décision

[48]      Je souscris aux conclusions de la Commission d’appel des brevets ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande parce que les revendications au dossier auraient été évidentes, ce qui est contraire à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

[49]      En conséquence, je refuse d’octroyer un brevet relativement à la présente demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

 

 

 

 

 

 

Johanne Bélisle

Commissaire aux brevets

Fait à Gatineau (Québec),

En ce 26e jour d’avril 2019

 

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