Brevets

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Décision du commissaire no 1471

Commissioner’s Decision No. 1471

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJETS :      J–00 Signification de la technique
J–50 Simple plan
J–60 Imprimés

 

TOPICS:       J–00 Meaning of Art
J–50 Mere Plan
J–60 Printed Matter

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Demande no 2 487 991

Application No. 2,487,991


 


 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 


Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets, la demande de brevet numéro 2 487 991 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. La recommandation de la Commission d’appel des brevets et la décision de la commissaire sont de rejeter la demande.

 

 

 

 

 

 

Agent du demandeur :

 

GOWLING WLG (CANADA) LLP

Bentall 5

550, rue Burrard, bureau 2300

Case postale 30

Vancouver (Colombie-Britannique) V6C 2B5


 



 

Introduction

[1]               La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet refusée numéro 2 487 991, qui est intitulée « Méthode informatique de représentation d’un projet et programme informatique de mise en œuvre ». La demande de brevet est inscrite au nom de SAP SE. L’irrégularité qui subsiste indiquée dans la décision finale (DF) tient au fait que les revendications ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets. La Commission d’appel des brevets (la Commission) a procédé à une révision de la demande refusée, conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. Ainsi qu’il est expliqué ci-dessous, nous recommandons que la demande soit rejetée.

Contexte

La demande

[2]               La demande de brevet canadien no 2 487 991, qui est fondée sur une demande déposée antérieurement en vertu du Traité de coopération en matière de brevet (PCT), est réputée avoir la date de dépôt du 30 mai 2003 et a été mise à la disponibilité du public le 11 décembre 2003.

[3]               La demande concerne un système d’élaboration de projets permettant d’établir une représentation graphique de l’état et de l’avancement d’un projet.

Historique du traitement de la demande

[4]               Le 27 avril 2016, une DF a été rédigée conformément au paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets. La DF relevait l’irrégularité suivante dans la demande : les revendications 1 à 35 (les revendications au dossier) ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[5]               Dans sa réponse à la DF (RDF) datée du 27 septembre 2016, le demandeur a présenté des arguments en faveur de l’acceptation de la demande, mais ces arguments n’ont pas convaincu l’examinateur d’annuler le refus.

[6]               Par conséquent, en vertu du paragraphe 30(6) des Règles sur les brevets, la demande a été transmise à la Commission aux fins de révision, accompagnée du résumé des motifs de l’examinateur. Le 23 décembre 2016, la Commission a transmis au demandeur une copie du résumé des motifs, accompagnée d’une lettre confirmant le refus. Le demandeur n’a pas répondu.

[7]               Conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets, un comité a été constitué dans le but de réviser la demande refusée et de présenter une recommandation au commissaire quant à la décision à rendre. À la suite de notre révision préliminaire, le 17 juillet 2018, nous avons envoyé une lettre (la lettre de RP) dans laquelle nous avons présenté notre analyse et les raisons pour lesquelles, d’après le dossier dont nous disposons, nous estimons que l’objet des revendications n’est pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[8]               Le demandeur a répondu à la lettre de RP le 1er août 2018, indiquant qu’il était toujours intéressé à ce que la demande soit révisée, mais expliquant qu’il ne sollicitait pas la tenue d’une audience et qu’il n’entendait pas non plus présenter des observations écrites supplémentaires.

[9]               Étant donné que rien n’a changé dans le dossier écrit depuis la révision préliminaire, nous avons maintenu ses raisons et conclusions.

Question

[10]           La question à trancher dans le cadre de la présente révision est celle de savoir si les revendications 1 à 35 définissent un objet prévu par la Loi et sont donc conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Principes juridiques et pratique du Bureau des brevets

Interprétation téléologique

[11]           Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc., 2000 CSC 66 [Free World Trust], les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir aussi Whirlpool Corp c. Camco Inc., 2000 CSC 67 aux alinéas 49f) et g) et au paragraphe 52 [Whirlpool]). Tel qu’il est indiqué à la section 13.05 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets [RPBB] (OPIC) (révisé en avril 2018), la première étape de l’interprétation téléologique des revendications consiste à identifier la personne versée dans l’art et ses connaissances générales courantes (CGC) pertinentes. L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution divulguée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être déterminés; il s’agit de ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée, telle qu’elle est revendiquée.

[12]           Le demandeur a contesté cette démarche dans la RDF, soutenant que, plutôt que de se concentrer sur le problème et la solution, et de déterminer si le problème pourrait être résolu en l’absence d’un élément, il faut s’attarder à chaque élément, le comparer à d’autres éléments possibles et déterminer si les autres éléments possibles peuvent remplir la même fonction de la même manière et produire le même résultat que l’élément en question. Le demandeur a également soutenu qu’aucune source de droit n’a été citée à l’appui de la démarche susmentionnée à l’égard de l’interprétation téléologique, seulement des énoncés de pratique, lesquels n’ont pas force de loi.

[13]           Tel que nous l’avons expliqué dans la lettre de RP [Traduction] :

La démarche décrite dans le RPBB (initialement dans les énoncés de pratique) a été établie d’après la décision Canada (PG) c. Amazon.com Inc., 2011 CAF 328 [Amazon.com] et cherche ainsi à tenir compte des principes de cette affaire, ainsi que des principes énoncés dans les décisions antérieures Free World Trust et Whirlpool. Le RPBB n’est pas présenté comme une autorité de justice ou une source de droit. Il donne plutôt des directives d’après l’interprétation que fait le Bureau de ces autorités et sources de droit.

À titre d’exemple, la décision Amazon.com (aux paragraphes 43, 44, 47, 61 à 63, 69, 71) nous rappelle que l’interprétation téléologique « ne peut reposer seulement sur l’interprétation littérale des revendications du brevet », que les revendications peuvent être exprimées dans un langage qui est « trompeur, de manière délibérée ou par inadvertance » et qu’une réalisation ou une application concrète revendiquée peut, malgré tout, ne pas faire partie des éléments essentiels d’une invention revendiquée.

Les directives fournies à la section 13.05.02b du RBPP sont fondées sur ces principes : une interprétation téléologique bien éclairée doit tenir compte de la demande dans son ensemble, y compris le problème abordé dans la demande et la solution proposée. La simple présence d’un élément dans le libellé des revendications ne peut l’emporter sur la prise en compte de cette solution dans l’interprétation téléologique.

Objet prévu par la Loi

[14]           La définition d’« invention » est énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets :

invention Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[15]           L’énoncé de pratique PN2013-03, intitulé « Pratique d’examen au sujet des inventions mises en œuvre par ordinateur » (OPIC, mars 2013) [PN2013-03] apporte des précisions quant à l’approche utilisée par le Bureau des brevets pour déterminer si une invention liée à l’ordinateur constitue un objet prévu par la Loi.

[16]           Tel qu’il est expliqué dans l’énoncé de pratique PN2013-03, lorsqu’il est déterminé qu’un ordinateur constitue un élément essentiel d’une revendication interprétée, l’objet revendiqué n’est pas une invention désincarnée (p. ex., une simple idée, un schéma, un plan ou un ensemble de règles, etc.), qui serait non prévue par la Loi.

[17]           Également concernant la présente espèce, les sections 12.03.05 et 06 du RPBB expliquent que, lorsqu’une revendication vise un objet présentant un intérêt exclusivement intellectuel ou esthétique, la revendication n’est pas conforme à l’article 2 de la Loi sur les brevets. À titre d’exemple d’un tel objet, le terme « imprimé », de ce point de vue, ne devrait pas être restreint au procédé classique d’imprimerie « encre sur papier », mais devrait également comprendre tout moyen d’affichage d’information.

[18]           Pour qu’un imprimé soit prévu par la Loi, son support ou ses moyens d’affichage doivent apporter une solution au-delà du contenu intellectuel ou esthétique de l’imprimé lui-même : la solution doit conférer une nouvelle fonctionnalité.

Analyse

Interprétation téléologique

La personne versée dans l’art

[19]           Dans la lettre de RP, nous avons accepté la définition présentée dans la DF de la personne versée dans l’art comme étant une personne ou une équipe dans les domaines de la gestion de projets, de l’élaboration de processus logiciels axés sur les projets, des ordinateurs, des bases de données et des systèmes fondés sur Internet. Le demandeur n’a pas contesté cette définition; nous l’adoptons donc aux fins de la présente révision.

Les CGC

[20]           D’après la description générale de l’état de la technique présentée dans la demande (page 1) et la définition susmentionnée de la personne versée dans l’art, nous avons défini les concepts suivants comme faisant partie des CGC dans la lettre de RP :

         le matériel informatique en général et les techniques de programmation;

         la documentation et l’affichage de projets, y compris leur état;

         l’élaboration et la gestion de projets;

         les systèmes informatisés d’élaboration de projets facilitant l’élaboration et la gestion de projets;

         les interfaces utilisateurs graphiques (IUG);

         les graphiques, diagrammes et autres représentations visuelles traditionnellement utilisées pour communiquer de l’information sur les projets, leur état et leur avancement.

[21]           Le demandeur n’a pas contesté cette définition; nous l’adoptons donc aux fins de la présente révision.

Le problème et la solution

[22]           Le demandeur n’a pas contesté notre définition présentée dans la lettre de RP du problème et de la solution; nous adoptons donc cette définition et le raisonnement sous-jacent aux fins de la présente révision [Traduction] :

Tel qu’il est observé dans la DF (pages 3 et 4), la demande présente l’invention comme étant destinée à représenter graphiquement et de façon dynamique un projet ou un processus. La demande indique (page 3) que les projets sont nombreux à être complexes et qu’ils peuvent faire intervenir différents participants au sein de différents services utilisant différentes technologies. Un gestionnaire de projet peut nécessiter l’expertise, l’information ou le temps nécessaire au tri des rapports d’étape, de la documentation et de l’information relative à la réalisation des jalons pour les différents aspects du projet.

En conséquence, la DF définissait le problème comme étant la façon de présenter efficacement l’information relative à l’état d’un projet. La DF définissait la solution proposée comme étant un schéma amélioré permettant de présenter une représentation graphique personnalisée du projet, en soulignant les changements apportés, comme l’achèvement des tâches et la réalisation des jalons, au gestionnaire. Des représentations perspectives sont utilisées pour communiquer facilement l’information relative au projet.

Le demandeur n’a pas contesté ces définitions du problème et de la solution et, compte tenu du contexte fourni dans la demande et des CGC, nous les adoptons de manière préliminaire aux fins de la présente révision.

Les éléments essentiels

[23]           Les revendications indépendantes 1 et 21 visent des méthodes, la revendication indépendante 34 vise un logiciel et la revendication indépendante 35 vise un système. Toutes les revendications se rapportent à la représentation perspective personnalisée d’un projet. Le système de la revendication 35 correspond à la méthode de la revendication 1 et le logiciel de la revendication 34 est défini comme étant destiné à la mise en œuvre de la méthode de l’une quelconque des revendications 1, 21 ou de leurs revendications dépendantes.

[24]           Par souci de commodité, les revendications indépendantes 1 et 21, qui sont représentatives de différents aspects de l’invention, sont reproduites ci-dessous [Traduction] :

Revendication 1.       Une méthode informatique permettant de représenter un projet, comprenant :

l’accès à une description du projet;

le traitement de la description au moyen d’instructions de programme exécutées par un processeur et, au moins en partie d’après les résultats obtenus dans le traitement de la description, l’affichage d’un premier élément et d’un second élément du projet dans une représentation perspective se présentant sous la forme d’un chemin, la représentation perspective étant affichée sur un dispositif d’affichage;

la réception d’un identificateur d’utilisateur identifiant l’utilisateur à qui la représentation perspective sera affichée sur le dispositif d’affichage;

le traitement de l’identificateur d’utilisateur reçu au moyen d’un logiciel exécuté par un processeur et, au moins en partie d’après un résultat obtenu dans le traitement de l’identificateur d’utilisateur reçu :

le marquage du premier élément dans l’affichage de la représentation perspective sur le dispositif d’affichage, le marquage du premier élément indiquant une participation de l’utilisateur identifié à l’égard du premier élément;

le marquage du second élément dans l’affichage de la représentation perspective sur le dispositif d’affichage, le marquage du second élément indiquant que l’utilisateur identifié ne participe pas à l’égard du second élément;

l’indication graphique de l’avancement du projet dans l’affichage de la représentation perspective sur le dispositif d’affichage.

 

Revendication 21.     Une méthode informatique permettant de représenter un projet, la méthode comprenant :

la réception d’une identification de projet définissant le projet;

le traitement de l’identification de projet pour accéder à une description du projet défini au moyen de l’identification de projet;

le traitement de la description du projet et, au moins en partie d’après les résultats obtenus dans le traitement de la description, l’identification d’une première tâche et d’une seconde tâche dans le projet;

l’affichage d’une représentation perspective d’au moins une partie du projet sur un dispositif d’affichage, la première tâche du projet étant représentée comme un premier élément dans la représentation perspective et la seconde tâche étant représentée comme un second élément;

la réception d’un identificateur d’utilisateur identifiant l’utilisateur à qui la représentation perspective sera affichée sur le dispositif d’affichage;

le traitement de l’identificateur d’utilisateur reçu et, au moins en partie d’après un résultat obtenu dans le traitement de l’identificateur d’utilisateur reçu :

l’affichage d’information dans la représentation perspective pour indiquer une participation de l’utilisateur identifié dans la réalisation de la première tâche;

l’affichage d’information dans la représentation perspective pour indiquer que l’utilisateur identifié ne participe pas à la seconde tâche.

[25]           D’après le problème et la solution, nous avons accepté de manière préliminaire la définition présentée dans la DF des éléments essentiels comme étant une série d’étapes permettant de représenter l’information relative à l’état d’un projet. Nous avons considéré que les différences observées dans le libellé des revendications indépendantes, et entre ces revendications et les revendications qui en dépendent, témoignent simplement de différents modes de réalisation du même ensemble d’éléments essentiels. Selon cette définition, les éléments essentiels ne comprenaient pas le processeur ni les éléments matériels qui lui étaient liés.

[26]           Le demandeur n’était pas d’accord avec cette définition dans la RDF. Le demandeur a reconnu que la démarche adoptée dans la DF pour déterminer les éléments essentiels est conforme aux directives publiées par le Bureau sur l’interprétation téléologique, mais il a contesté ces directives, comme indiqué ci-dessus. Le demandeur a soutenu dans la RDF que le processeur et les éléments matériels sont essentiels.

[27]           Tel que nous l’avons expliqué dans la lettre de RP, les directives publiées par le Bureau reposent sur les principes formulés dans Free World Trust, Whirlpool et Amazon.com, et énoncent le cadre régissant l’interprétation téléologique dans le contexte de l’examen des demandes de brevet. Selon ce cadre, les éléments essentiels sont ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée, telle qu’elle est revendiquée.

[28]           La lettre de RP indiquait ensuite ce qui suit [Traduction] :

Notre opinion préliminaire est que le processeur et le dispositif d’affichage dans le cas qui nous occupe ne sont pas des éléments essentiels, mais constituent simplement le contexte ou l’environnement de fonctionnement dans lequel l’information relative au projet est représentée graphiquement.

Comme l’explique la section 13.05.02c du RPBB, tout élément qui affecte le fonctionnement d’un mode de réalisation donné n’est pas nécessairement essentiel à la solution; certains éléments énoncés définissent le contexte ou l’environnement du mode de réalisation, mais ne changent pas véritablement la nature de la solution.

Dans le cas qui nous occupe, le processeur, le dispositif d’affichage, le support lisible par ordinateur et les autres éléments matériels connexes ne servent pas à résoudre le problème qui consiste à présenter efficacement de l’information personnalisée relative à l’état d’un projet; ils fournissent simplement le contexte de fonctionnement. C’est plutôt la représentation graphique d’information ayant une signification précise qui résout le problème à résoudre. Ainsi, notre opinion préliminaire est que les éléments matériels ne sont pas des éléments essentiels et que les éléments essentiels sont les éléments visant un schéma permettant de représenter graphiquement l’information relative au projet.

[29]           Étant donné que le demandeur n’a présenté aucune autre observation suivant la lettre de RP, nous adoptons notre définition préliminaire des éléments essentiels aux fins de la présente révision.

[30]           Par conséquent, les revendications 1 à 20, 34 (dans l’un de ses deux modes de réalisation) et 35 partagent le même ensemble d’éléments essentiels, soit une série d’étapes permettant de représenter l’information relative à l’état d’un projet :

         l’accès à une description du projet;

         d’après les détails de la description, la présentation d’un premier élément et d’un second élément du projet dans une représentation perspective se présentant sous la forme d’un chemin;

         d’après un identificateur d’utilisateur reçu :

o   le marquage du premier élément dans la représentation perspective présentée de sorte que le marquage du premier élément indique une participation de l’utilisateur identifié à l’égard du premier élément;

o   le marquage du second élément dans la représentation perspective présentée, le marquage du second élément indiquant que l’utilisateur identifié ne participe pas à l’égard du second élément;

         l’indication graphique de l’avancement du projet avec la présentation de la représentation perspective.

[31]           Les revendications 21 à 33 et 34 (dans le deuxième de ses deux modes de réalisation) partagent également le même ensemble d’éléments essentiels, qui est aussi une série d’étapes permettant de représenter l’information relative à l’état d’un projet :

         la réception d’une identification de projet définissant le projet;

         l’évaluation d’une description du projet défini;

         d’après les détails de la description, l’identification d’une première tâche et d’une seconde tâche du projet;

         la présentation d’une représentation perspective d’au moins une partie du projet, la première tâche étant représentée comme un premier élément et la seconde tâche étant représentée comme un second élément;

         d’après un identificateur d’utilisateur reçu :

o   l’affichage d’information dans la représentation perspective présentée de sorte qu’elle indique une participation de l’utilisateur identifié à la première tâche;

o   l’affichage d’information dans la représentation perspective présentée de sorte qu’elle indique que l’utilisateur identifié ne participe pas à l’égard du second élément.

Objet prévu par la Loi

[32]           Tels qu’ils sont interprétés ci-dessus, les éléments essentiels sont les étapes nécessaires pour représenter graphiquement l’information relative à l’état d’un projet selon un certain schéma. Les étapes nécessaires pour représenter graphiquement l’information relative à un projet ne mettent pas en jeu une nouvelle fonctionnalité; elles se caractérisent plutôt par la signification intellectuelle et la présentation de l’information.

[33]           Le demandeur a fait valoir dans la RDF que l’invention est prévue par la Loi, citant à l’appui la décision Re Fair Isaac Corp. demande de brevet 2144068 (2013), 115 CPR (4th) 39, DC 1339 (Pat App Bd & Pat Commr) [Fair Isaac]. Plus précisément, le demandeur a soutenu que les éléments essentiels touchant la présentation de l’information affichée constituent [Traduction] « quelque chose qui présente un effet ou un changement perceptible », contrairement au signal de sortie en jeu dans l’affaire Fair Isaac (au paragraphe 40).

[34]           Comme nous l’avons souligné dans la lettre de RP [Traduction] :

Notre opinion préliminaire est que l’information affichée de la présente invention est, en elle-même, abstraite et n’a qu’une signification intellectuelle, comme le signal de sortie de l’affaire Fair Isaac (aux paragraphes 40, 46, 57). Ainsi, ni l’un ni l’autre des résultats de sortie n’a d’existence matérielle ni n’entraîne un changement ou un effet matériel, et ni l’une ni l’autre des inventions ne comporte un objet prévu par la Loi.

[35]           Nous avons également souligné ce qui suit dans la lettre de RP [Traduction] :

En outre, on peut reconnaître que la présente invention comporte un objet non prévu par la Loi en se référant à Schlumberger Canada Ltd c. Canada (Commissaire aux brevets), [1982] 1 CF 845 (CA) [Schlumberger]. De manière analogue à la méthode dans l’affaire Schlumberger, et comme indiqué dans Amazon.com (au paragraphe 62), les présentes revendications visent en réalité à faire breveter une méthode permettant de recueillir, d’enregistrer et d’analyser des données, au moyen d’un ordinateur programmé selon une formule mathématique. La formule dans le cas qui nous occupe est l’ensemble des règles demandant à l’ordinateur de déterminer, d’afficher et de mettre à jour les taux d’avancement. Comme dans l’affaire Schlumberger, la simple présence d’un ordinateur ou autre outil matériel ne rend pas brevetable la formule ou l’ensemble des règles autrement abstrait. Nous ne pouvons distinguer de manière préliminaire les présentes revendications de la situation qui prévalait dans Schlumberger, tel que décrit dans Amazon.com (aux paragraphes 62 et 63, 69).

[36]           Étant donné que nous n’avons reçu aucune autre observation relativement à cette question, notre examen de cette question demeure tel qu’énoncé dans la lettre de RP : les revendications 1 à 35 ne définissent pas un objet prévu par la Loi et sont donc non conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Recommandation de la Commission

[37]           Compte tenu de ce qui précède, le comité recommande que la demande soit rejetée au motif que les revendications 1 à 35 définissent un objet non prévu par la Loi et ne sont donc pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

Leigh Matheson                                  Paul Fitzner                             Andrew Strong
Membre                                               Membre                                   Membre

Décision de la commissaire

[38]           Je souscris aux conclusions de la Commission ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande. Les revendications au dossier ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

[39]           En conséquence, je refuse d’accorder un brevet relativement à la présente demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

Johanne Bélisle
Commissaire aux brevets
Fait à Gatineau (Québec),
en ce 28e jour de décembre 2018

 

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