Brevets

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Décision du commissaire no 1433

Commissioner’s Decision #1433

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJETS :         O00 Évidence

                                                                                                                             

TOPICS:          O00 Obviousness

                                                                                                                             

 

 

 

 

 

 

 

 

               

 

Demande no 2 440 661

Application No: 2,440,661


 

 

 

 

 

 

 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 

 

 

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets (DORS/96-423), la demande de brevet numéro 2 440 661 a subséquemment fait l’objet d’une révision conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. Conformément à la recommandation de la Commission, la commissaire rejette la demande.

 

 

 

 

Agent du demandeur

 

FINLAYSON & SINGLEHURST

225, rue Metcalfe, bureau 700

OTTAWA (Ontario)

K2P 1P9

 


INTRODUCTION

 

[1]          La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet canadien refusée no 2 440 661, qui est intitulée « SYSTÈMES ET PROCÉDÉS PERMETTANT DE RETOURNER DES PRODUITS VIA UN RÉSEAU ». La demande appartient à United Parcel Service of America Inc. (« le demandeur »). La Commission d’appel des brevets (« la Commission ») a procédé à une révision de la demande refusée conformément à l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets.

 

[2]          Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, nous recommandons à la commissaire de rejeter la demande

 

CONTEXTE

 

La demande

 

[3]          La demande de brevet 2 440 661 (« la présente demande ») a été déposée au Canada le 13 mars 2002 en vertu des dispositions du Traité de coopération en matière de brevets et a été rendue accessible au public le 19 septembre 2002.

 

[4]          La présente demande a trait à une méthode et à un système permettant de fournir des étiquettes d’expédition à des clients qui souhaitent retourner un article qu’ils ont acheté à un marchand, en particulier dans le contexte d’un système de demandes de retour en ligne. Dans le cas présent, lorsqu’une demande de retour d’un article est reçue d’un client, une application de retour hébergée sur un serveur informatique extrait les renseignements d’expédition contenus dans la demande de retour et utilise ces renseignements pour créer un hyperlien activable de transmission d’étiquette, qui est envoyé au client. Par suite de l’activation du lien, l’application génère dynamiquement une étiquette d’expédition appropriée que le client peut alors utiliser pour retourner l’article.

 

 

Historique du traitement

 

[5]          Le 12 décembre 2014, une décision finale (« DF ») a été rédigée conformément au paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets. La DF indiquait que la demande est irrégulière au motif que les revendications au dossier au moment de la rédaction de la DF (« les revendications au dossier ») auraient été évidentes et, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

[6]          Dans une réponse à la DF (« R-DF ») en date du 3 juin 2015, le demandeur a soumis les revendications proposées 1 à 43 (« les revendications proposées ») et a présenté des arguments à l’appui de leur non-évidence.

 

[7]          L’examinateur ayant jugé la demande non conforme à la Loi sur les brevets, le 4 novembre 2015, la demande a été transmise à la Commission pour révision, accompagnée d’une explication présentée dans un résumé des motifs (« RM »), conformément au paragraphe 30(6) des Règles sur les brevets. Le RM indiquait que tant les revendications au dossier que les revendications proposées étaient irrégulières parce qu’elles auraient été évidentes.

 

[8]          Dans une lettre en date du 5 novembre 2015, la Commission a transmis une copie du RM au demandeur et a offert à ce dernier la possibilité de présenter des observations supplémentaires et/ou de participer à une audience.

 

[9]          Dans une communication écrite en date du 29 janvier 2016 (« R-RM »), le demandeur a indiqué qu’il ne souhaitait pas participer à une audience, mais a soumis à l’attention du comité des observations écrites supplémentaires.

 

[10]      Dans une lettre de révision préliminaire (« lettre de RP ») datée du 11 mai 2017, le comité a présenté son analyse préliminaire de la question de l’évidence des revendications au dossier ainsi que de celles proposées. Dans la lettre de RP, le comité a également offert au demandeur la possibilité de soumettre des observations supplémentaires.

 

[11]      Dans une réponse à la lettre de RP, datée du 12 juin 2017 (« R-RP »), le demandeur a accusé réception de la lettre de RP et a indiqué qu’il ne souhaitait pas soumettre d’observations supplémentaires.

 

QUESTIONS

 

[12]      La question à trancher d’après la DF est celle de savoir si les revendications 1 à 45 au dossier auraient été évidentes.

 

[13]      S’il appert que les revendications au dossier auraient été évidentes, nous pourrons examiner les revendications proposées 1 à 43 afin de déterminer si elles constituent des modifications nécessaires pour rendre la demande conforme à la Loi et aux Règles.

 

PRINCIPES JURIDIQUES ET PRATIQUE DU BUREAU

 

Interprétation des revendications

 

[14]                      Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc., 2000 CSC 66, les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir également Whirlpool Corp. c. Camco Inc., 2000 CSC 67, aux alinéas 49f) et g) et au paragraphe 52). Tel qu’il est indiqué à la section 13.05 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets [RPBB], révisé en juin 2015 (OPIC), la première étape de l’interprétation téléologique d’une revendication consiste à identifier la personne versée dans l’art et ses connaissances générales courantes (« CGC ») pertinentes. L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution présentée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être déterminés; il s’agit de ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée, telle qu’elle est revendiquée.

 

Évidence

 

[15]                      La Loi sur les brevets exige que l’objet d’une revendication ne soit pas évident pour la personne versée dans l’art. L’article 28.3 de la Loi sur les brevets prévoit ce qui suit :

 

28.3 L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) i qui a été faite, plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

 

[16]                      Dans Apotex Inc. c. Sanofi-Synthelabo Canada Inc., 2008 CSC 61 au paragraphe 67, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il est utile, pour évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes suivante :

 

       (1) a) Identifier la « personne versée dans l’art »;

b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation;

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

 

ANALYSE

 

Interprétation des revendications

 

[17]      Dans la lettre de RP, nous avons expliqué pourquoi, dans le cas présent, nous n’avions pas procédé à une interprétation des revendications [Traduction] :

            [d]ans le cas présent, nous n’avons pas déterminé quels éléments des revendications sont essentiels et quels éléments ne le sont pas, car l’omission d’un quelconque élément non essentiel n’aurait aucune incidence sur notre analyse de l’évidence. Même lorsque nous tenons compte de tous les éléments des revendications, notre opinion préliminaire (ci-dessous) est que les revendications 1 à 45 au dossier auraient été évidentes. En outre, comme aucune question n’a été soulevée relativement à la signification des termes utilisés dans les revendications au dossier, et que nous ne n’en avons recensée aucune, nous n’avons pas entrepris d’interpréter les termes et expressions utilisés dans le but d’en clarifier la portée.

 

Évidence

 

(1)a) Identifier la « personne versée dans l’art »

 

[18]      Dans la lettre de RP, nous avons adopté la définition de la personne versée dans l’art établie dans la DF, laquelle n’a pas été contestée par le demandeur, ni dans la R-DF ni dans la R-RM [Traduction] :

            [d]ans la décision finale (DF), à la page 2, l’examinateur a indiqué que la personne versée dans l’art « qui peut être une équipe, est qualifiée dans le domaine du commerce électronique, y compris les fonctionnalités liées aux expéditions et aux retours. La personne versée dans l’art est également qualifiée dans le domaine des technologies informatiques à usage général. »

                      

[19]      Comme aucune observation n’a été formulée sur ce point dans la R-RP, nous adoptons, aux fins de la présente révision, la définition de la personne versée dans l’art qui est reproduite ci-dessus.

 

(1)b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne

 

[20]      Dans la lettre de RP, nous avons dressé une liste des points de CGC pertinents :

 

     Connaissance des pratiques d’achat en ligne bien connues et de leurs avantages et inconvénients, y compris la probabilité accrue que des articles achetés soient retournés en raison de l’impossibilité d’inspecter les articles avant l’achat (présente demande, page 1);

     Connaissance du processus habituel des transactions de retour qui s’applique lorsqu’un client communique avec un marchand par courriel ou par téléphone pour l’informer du retour. Le marchand produit alors une étiquette d’expédition qui est envoyée au client, accompagnée d’instructions d’emballage pour le retour. Le colis peut ensuite être déposé chez un transporteur (présente demande, page 1);

     Connaissance du fait que le processus susmentionné est chronophage et coûteux en termes de personnel et de délais de traitement et que des délais supplémentaires attribuables à la perte des étiquettes sont également possibles (présente demande, pages 1 et 2);

     Connaissance de l’existence d’un autre processus qui s’applique aux transactions de retour effectuées dans un contexte de magasinage en ligne et dans le cadre duquel les marchands génèrent des étiquettes pour chacun des articles vendus et les joignent à ces derniers (présente demande, page 2);

     Connaissance du fait que, même si cet autre processus élimine bon nombre des délais associés aux retours, il fait en sorte qu’il est difficile pour les marchands de contrôler le processus de retour, ce qui peut donner lieu à divers problèmes, notamment de gestion des stocks (présente demande, page 2);

     Connaissance du fait qu’il est souhaitable d’éliminer les délais dans le cadre de tels processus tout en permettant aux marchands d’exercer un contrôle (présente demande, page 2);

     Connaissance des systèmes informatiques d’usage général, y compris les systèmes client/serveur et les techniques de programmation informatique appropriées (DF, page 2);

     Connaissance des protocoles de communication généralement connus, y compris HTTP et HTTPS, ainsi que de l’utilisation des navigateurs, des hyperliens et des adresses URL (présente demande, page 10);

     Connaissance des types de fichiers électroniques généralement connus, tels que les fichiers GIF (graphical interchange format), EPL2 (Eltron programming language) et PDF (portable document format) (présente demande, page 11);

     Connaissance de l’utilisation des servlets Java associés à une adresse URL pour le traitement côté serveur (présente demande, page 21);

     Connaissance de la marche à suivre pour générer électroniquement une étiquette d’expédition (présente demande, page 16).

 

[21]      Nous avons également répondu à l’affirmation formulée par le demandeur dans la R-DF et dans la R-RM selon laquelle il était inapproprié d’incorporer aux CGC pertinentes de la matière contenue dans la divulgation faite par le demandeur, particulièrement en ce qui concerne les deux derniers points de CGC énoncés ci-dessus [Traduction] :

 

[à] notre avis, il est juste de considérer que les deux derniers points faisaient partie des CGC, car ils sont décrits comme étant « bien connus » dans la présente demande. Le demandeur est lié par de tels aveux (Astra Zeneca Canada Inc. c. Apotex Inc., 2014 CF 638, paragraphe 227). Nous soulignons cependant que ces points diffèrent légèrement de la définition établie dans la DF en ce qu’ils n’indiquent pas que la génération d’une étiquette d’expédition à l’aide d’une adresse URL liée à des servlets fait partie des CGC, ce qui concorde avec la position adoptée par le demandeur dans la R-DF et la R-RM.

 

[22]      Rien de ce qui précède n’a été contesté par le demandeur dans la R-RP. Par conséquent, nous adoptons ce qui précède aux fins de la présente révision.

 

(2) Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

 

[23]      Dans la lettre de RP, nous avons indiqué, ainsi qu’il est énoncé dans la DF, que le concept inventif de la revendication 1 au dossier, que nous considérons comme étant représentative des revendications indépendantes, correspond essentiellement à la revendication elle-même. Nous avons également indiqué que notre opinion préliminaire, c’est-à-dire que la revendication 1 aurait été évidente, serait demeurée la même indépendamment de la question de savoir si le concept inventif a ou non une portée plus restreinte que la revendication. Le concept inventif a été défini comme suit :

 

- une application de retour en ligne en communication électronique avec une application d’un marchand configurée pour générer une demande de service de retour en réponse à une demande d’un client pour retourner un produit antérieurement acheté auprès d’un marchand;

- ladite application de retour en ligne est configurée pour recevoir ladite demande de service de retour et pour exécuter les tâches suivantes en réponse à la réception de ladite demande de service de retour :

- extraire lesdits renseignements d’expédition de ladite demande de service de retour;

- stocker en mémoire lesdits renseignements d’expédition;

- créer un lien activable de transmission d’étiquette associé à ladite demande de service de retour et configuré pour permettre la génération d’une étiquette d’expédition lors de son activation;

- attribuer un numéro de suivi de colis audit lien de transmission d’étiquette;

- envoyer un courriel audit client, ledit courriel contenant ledit lien de transmission d’étiquette sous une forme non activée;

- ladite application de retour en ligne étant en outre configurée pour exécuter les tâches suivantes lors de l’activation dudit lien de transmission d’étiquette :

- récupérer ledit numéro de suivi de colis;

- récupérer lesdits renseignements d’expédition stockés dans ladite mémoire d’après ledit numéro de suivi de colis;

- générer une étiquette d’expédition fondée en partie au moins sur lesdits renseignements d’expédition;

- transmettre électroniquement ladite étiquette d’expédition audit client.

 

[24]      Rien de ce qui précède n’a été contesté par le demandeur dans la R-RP; nous considérons donc que le concept inventif de la revendication 1 au dossier est celui qui est énoncé ci-dessus et qu’il est représentatif des autres revendications indépendantes. Nous examinerons ci-dessous les caractéristiques des revendications dépendantes, au besoin.

 

(3) Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation

 

[25]      Dans la lettre de RP, les antériorités suivantes ont été appliquées à l’évaluation de l’évidence :

 

D1 : « UPS Unveils Advanced Online Returns Solution », Business Wire, 20 septembre 2000.

 

D2 : EP 0 969 389           Publié : 5 janvier 2000 Kitayama et al.

 

[26]      Dans la lettre de RP, nous avons indiqué notre opinion préliminaire selon laquelle nous étions en accord avec les différences entre l’état de la technique (dont le document D1 constitue la meilleure représentation) et le concept inventif de la revendication 1 au dossier, telles qu’elles sont énoncées dans la DF [Traduction] :

 

[à] la page 5 de la DF, il est indiqué que la différence entre l’« état de la technique », dont le document D1 constitue la meilleure représentation, et le concept inventif énoncé ci-dessus, est le fait que le lien de transmission d’étiquette n’est pas « activable », qu’il est envoyé au client sous une « forme non activée ». Selon la DF, on ne pouvait pas dire avec certitude si l’étiquette d’expédition décrite dans le document D1 est générée lors de l’activation du lien décrit dans le document ou si le lien dirige l’utilisateur vers un emplacement où est stockée une étiquette d’expédition déjà générée. Le concept inventif de la revendication 1 énoncé ci-dessous exige que l’étiquette soit générée « dynamiquement » au moment où le lien de transmission d’étiquette est activé par un client.

 

Le demandeur n’a pas contesté les différences énoncées dans la DF, ni dans la R-DF ni dans la R-RM, et nous convenons que, puisque le document D1 ne permet pas de dire avec certitude si l’activation du lien vers l’étiquette d’expédition entraîne la génération de l’étiquette ou sa simple récupération, la différence susmentionnée s’applique et sera évaluée dans le cadre de l’étape (4). Les caractéristiques des revendications dépendantes seront examinées au besoin ci-dessous.

 

[27]      Rien de ce qui précède n’a été contesté par le demandeur dans la R-RP. Par conséquent, nous évaluerons la différence susmentionnée dans le cadre de l’étape (4) ci-dessous, ainsi que toute caractéristique supplémentaire des autres revendications, au besoin.

 

(4) Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

 

[28]      Dans la lettre de RP, nous avons exprimé l’opinion préliminaire qu’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art, à la lumière des CGC et du document de l’art antérieur D2, de modifier un système de retours tel que celui exposé dans le document D1 de manière à ce qu’un client reçoive un lien de transmission d’étiquette qui, lorsqu’il est activé, entraîne la génération dynamique d’une étiquette d’expédition [Traduction] :

 

[l]e document de l’art antérieur D1 divulgue un système de retour en ligne mis au point par UPS, dans le cadre duquel un client peut présenter une demande de retour sur le site Web d’un marchand. Une fois que la demande a été traitée par le marchand conformément à ses règles commerciales, le système envoie au système d’UPS une demande pour une étiquette appropriée qui sera utilisée pour retourner l’article acheté. Ainsi qu’il est divulgué au paragraphe 11 de ce document, l’étiquette peut être mise instantanément à disposition du client à l’écran de son ordinateur ou un représentant du service à la clientèle peut envoyer par courriel une adresse URL au client, laquelle adresse URL amène le client à l’emplacement de l’étiquette. Le système comporte également une fonctionnalité de suivi qui permet au client de suivre en temps réel le cheminement d’un article retourné, les renseignements de suivi étant liés aux renseignements figurant sur l’étiquette.

 

Il est clair qu’il existe un lien entre l’application en ligne du marchand et celle d’UPS, car des renseignements doivent être échangés entre ces applications pour qu’une étiquette puisse être produite (p. ex. nom et adresse du client, etc.), ainsi qu’il est spécifié dans la revendication 1.

 

Le document D1, aux paragraphes 9 et 11, divulgue également un acheminement à destinations multiples qui permet de diriger l’article retourné vers différents emplacements selon la raison du retour (p. ex. si l’article est défectueux, il est retourné au fabricant ou, s’il n’est pas défectueux, il est retourné au marchand en vue d’être réintégré aux stocks).

 

L’autre document cité dans la DF, le document D2, divulgue une méthode pour générer dynamiquement des documents électroniques en fonction d’un ensemble d’objets de données, les attributs d’un dispositif d’affichage étant utilisés pour formater l’affichage des objets de données d’une manière qui convient au dispositif d’affichage en question (voir p. ex. document D1, paragraphe [0020]). Les documents (p. ex. des documents HTML) sont générés en réponse à une requête d’affichage à l’aide d’un mécanisme appelé « interface de passerelle commune » (CGI) ou au moyen d’un servlet (document D2, paragraphe [0076]). La requête d’affichage est lancée au moyen d’une adresse URL ou d’un lien (document D2, paragraphe [0077]). Cette méthode est proposée pour remédier aux problèmes associés aux méthodes antérieures, tels que la capacité de stockage que doit posséder le système lorsque de nombreux documents électroniques sont prégénérés afin de répondre aux exigences de multiples types de dispositifs d’affichage (document D2, paragraphe [0006]). Le document D2 énonce également les avantages de la méthode divulguée, tels qu’un traitement côté serveur accru, qui permet de réduire les capacités de traitement que doit posséder un terminal client, et la possibilité d’adapter les renseignements demandés à tout type de terminal client.

 

Notre opinion préliminaire est qu’il aurait été évident pour la personne versée dans l’art, à la lumière des CGC et des documents D1 et D2, de modifier un système tel que celui divulgué dans le document D1 afin que ce dernier envoie à un client un lien de transmission d’étiquette qui, une fois activé, génère dynamiquement l’étiquette d’expédition appropriée, au lieu de récupérer une étiquette déjà générée. À notre avis, la personne versée dans l’art aurait considéré cette modification comme une option connue pour la mise en œuvre de la méthode du document D1, une option présentant des avantages connus, tels que ceux décrits ci-dessus en rapport avec le document D2.

 

Bien que le document D2 ne soit pas spécifiquement axé sur la génération d’étiquettes d’expédition, de telles étiquettes créées au moyen d’une application en ligne équivalent à des documents électroniques créés en réponse à une demande d’utilisateur, comme ceux généralement décrits dans le document D2. Ayant connaissance des documents D1 et D2, la personne versée dans l’art aurait, à notre avis, immédiatement su qu’il était possible de générer dynamiquement les étiquettes d’expédition demandées, plutôt que de stocker ces dernières en vue d’une récupération ultérieure, et aurait eu conscience de l’avantage concomitant que présente cette option, soit celui d’exiger une capacité de stockage système moindre, ainsi qu’il est souligné dans le document D2. Tel qu’il est indiqué au paragraphe 69 de Sanofi, le fait de choisir cette option parmi un nombre déterminé de solutions prévisibles ne dénote aucune inventivité.

 

[29]      En ce qui concerne les autres revendications indépendantes 16, 38 et 39 au dossier, nous avons exprimé dans la lettre de RP l’opinion préliminaire que ces revendications auraient également été évidentes [Traduction] :

 

[e]n ce qui concerne les revendications indépendantes 16 et 38 au dossier, étant donné que notre opinion préliminaire est que la revendication représentative 1 aurait été évidente, nous sommes également d’avis que ces revendications auraient été évidentes pour la personne versée dans l’art, car, hormis quelques variantes mineures (p. ex., emploi du terme « destinataire » en remplacement du terme « marchand » et transmission de l’étiquette à un navigateur en tant que forme spécifique de transmission électronique), elles sont très semblables à la revendication 1. Le demandeur n’a pas attiré notre attention sur une quelconque caractéristique particulière qui rendrait ces revendications considérablement différentes de la revendication 1.

 

En ce qui concerne la revendication 39 au dossier, dans la DF, cette revendication a été jugée différente des autres revendications, car dans cette réalisation de la méthode de retour, lorsque le client active le lien de transmission d’étiquette qui lui a été envoyé, l’étiquette d’expédition est imprimée dans les locaux d’un transporteur plutôt que transmise électroniquement au client pour impression. Par la suite, l’étiquette est remise au client à un endroit où elle peut être apposée sur un colis qui sera livré par le transporteur.

 

Nous sommes d’avis que cette variante de la méthode aurait également été évidente pour la personne versée dans l’art. Étant donné que notre opinion préliminaire est que la génération dynamique de l’étiquette d’expédition aurait été évidente dans le cadre d’une réalisation qui prévoit de transmettre électroniquement l’étiquette au client, le fait d’imprimer l’étiquette dans les locaux d’un transporteur et de la transmettre ensuite à un client aurait également été évident. Il en est ainsi, parce qu’une option antérieure pour fournir des étiquettes d’expédition de retour, qui faisait partie des CGC, consistait à fournir les étiquettes aux clients qui en faisaient la demande; les étiquettes étaient alors transmises à un marchand par un transporteur. À notre avis, la méthode de la revendication 39 ne fait que substituer une option de transmission d’étiquette d’expédition généralement connue à la méthode plus directe de la transmission électronique, sur laquelle la plupart des revendications au dossier sont axées.

 

[30]      En ce qui concerne les revendications dépendantes, nous avons indiqué dans la lettre de RP que nous étions d’avis, à titre préliminaire, que ces revendications auraient également été évidentes, car elles représentent des variantes correspondant à des éléments généralement connus d’une méthode de transmission d’étiquette. Nous nous sommes exprimés en ces termes [Traduction] :

 

ces revendications spécifient des variantes couramment observées dans les formats de fichiers d’images, la spécification de caractéristiques généralement connues telles que l’utilisation d’un navigateur ou d’un lien URL, ainsi que l’inclusion de renseignements connus sur une étiquette d’expédition tels qu’un numéro de suivi, l’identifiant du marchand et la date de création de l’étiquette. Nous soulignons également que le demandeur n’a pas fait valoir qu’une ou plusieurs des caractéristiques des revendications dépendantes étaient inventives.

 

[31]      Là encore, nous soulignons qu’aucune observation n’a été formulée dans la R-RP relativement à l’un quelconque des points susmentionnés.

 

[32]      En l’absence d’observations de la part du demandeur et pour les raisons exposées ci-dessus, nous concluons que les revendications 1 à 45 au dossier auraient été évidentes et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

Revendications proposées 1 à 43

 

[33]      Dans la lettre de RP, nous avons exprimé l’opinion préliminaire que les revendications proposées 1 à 43 auraient également été évidentes malgré le fait qu’elles prévoient d’héberger le logiciel de l’application de retour en ligne sur le « serveur d’un transporteur » plutôt que sur le « serveur d’un marchand », et qu’elles spécifient que les renseignements d’expédition requis pour la demande comprennent à la fois l’adresse du client et celle du marchand.

 

[34]      Dans la lettre de RP, nous avons expliqué que, en spécifiant un serveur d’un transporteur, le demandeur a simplement restreint les revendications à un exemple de tiers pouvant héberger l’application de retour, et un tel hébergement par un tiers est déjà envisagé dans la revendication 1 au dossier. Nous avons expliqué que, du point de vue de toute application dans un serveur appartenant à des tiers, les renseignements d’expédition doivent obligatoirement inclure à la fois l’adresse du client et celle du marchand, peu importe que cela soit ou non explicitement mentionné dans les revendications, car un article retourné sera nécessairement expédié en provenance de personnes ou d’entités autres que le tiers (p. ex., le transporteur) lui-même et à destination de celui-ci :

 

[Traduction] :

 

Les revendications indépendantes 1, 16, 38 et 39 au dossier spécifient déjà que l’application de retour en ligne est distincte de l’application du marchand et que, à la suite d’une demande de retour présentée par un client, des renseignements d’expédition sont inclus dans une demande de service de retour envoyée par l’application du marchand à l’application de retour en ligne. Du point de vue de l’application de retour en ligne, qui reçoit des renseignements de l’application du marchand, les renseignements d’expédition doivent comprendre aussi bien l’adresse du client que celle du marchand puisque le colis sera en fin de compte retourné au marchand ou à une autre adresse quelconque, plutôt qu’à un tiers tel qu’un transporteur.

 

En proposant de modifier les revendications indépendantes de manière à ce qu’elles spécifient que l’application de retour en ligne est hébergée sur le serveur d’un transporteur, le demandeur ne fait que restreindre les revendications à un seul exemple d’un tel tiers. Le libellé modifié proposé, c’est-à-dire [Traduction] « ladite application de retour en ligne [hébergée sur le serveur d’un transporteur] étant configurée pour recevoir une demande de service de retour comprenant des renseignements d’expédition en réponse à une demande d’un client pour retourner un produit antérieurement acheté auprès d’un marchand » n’exclut pas le scénario où un client présente une demande de retour sur le site Web d’un marchand et où le serveur du marchand envoie ensuite les renseignements d’expédition à l’application de retour en ligne hébergée sur le serveur d’un transporteur. Les modifications proposées ne sont donc pas différentes des revendications contenues dans le document D1, selon lesquelles l’application de retour en ligne hébergée sur le serveur d’UPS reçoit des renseignements d’expédition d’un marchand, qui reçoit une demande de retour d’un client. Dans chacun de ces scénarios, le tiers qui génère l’étiquette doit nécessairement connaître aussi bien l’adresse du client que celle du marchand pour être en mesure de produire une étiquette appropriée.

 

[35]      Là encore, aucune observation n’a été présentée relativement à notre opinion préliminaire concernant l’évidence des revendications proposées.

 

[36]      Ainsi, pour les raisons exposées ci-dessus, nous concluons que les revendications proposées 1 à 43 auraient été évidentes et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. Elles ne remédient pas à l’irrégularité liée à l’évidence des revendications au dossier et, par conséquent, ne constituent pas des modifications « nécessaires » pour rendre la demande conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, conformément aux dispositions du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets.

 

CONCLUSIONS

 

[37]      Nous avons déterminé que les revendications 1 à 45 au dossier auraient été évidentes et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets. Nous avons également déterminé que les revendications proposées 1 à 43 ne remédient pas à l’irrégularité liée à l’évidence et que l’introduction de ces revendications ne constitue pas une modification déterminée qui est « nécessaire » aux termes du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets.

 

 

 


 

RECOMMANDATION DE LA COMMISSION

 

[38]      Compte tenu de ce qui précède, la Commission recommande que la demande soit rejetée au motif que les revendications au dossier, à savoir les revendications 1 à 45, auraient été évidentes et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

[39]      En outre, les revendications proposées 1 à 43 ne remédient pas à l’irrégularité liée à l’évidence et, par conséquent, le comité refuse de recommander l’introduction de ces revendications, car elles ne constituent pas une modification déterminée « nécessaire » aux termes du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets.

 

 

 

Stephen MacNeil                              Ed MacLaurin                                 Leigh Matheson

Membre                                                  Membre                                              Membre


 

DÉCISION

 

[40]      Je souscris aux conclusions de la Commission ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande au motif que les revendications 1 à 45 au dossier auraient été évidentes et qu’elles sont, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

[41]      Par conséquent, en application des dispositions de l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’octroyer un brevet relativement à cette demande. Conformément aux dispositions de l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

 

 

 

Johanne Bélisle

Commissaire aux brevets

 

Fait à Gatineau (Québec),

En ce 29e jour de novembre 2017

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.