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 Décision du commissaire no 1416

Commissioner’s Decision #1416

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJETS : O00 (Évidence); G00 (Utilité)

 

TOPICS: O00 (Obviousness); G00 (Utility)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Demande no : 2 742 621

Application No.: 2,742,621

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 

 

Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets, la demande de brevet numéro 2 742 621 a subséquemment fait l’objet d’une révision, conformément aux dispositions de l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. Conformément à la recommandation de la Commission d’appel des brevets, le commissaire rejette la demande.

 

 

 

 

 

 

Agent du demandeur :

 

GOWLING WLG (CANADA) LLP.

550, rue Burrard, bureau 2300, Bentall 5

Vancouver (Colombie-Britannique)

V6C 2B5

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

Introduction

 

[1]          La présente recommandation concerne la révision de la demande de brevet refusée no 2 742 621, qui est intitulée « Compositions d’extraits de plantes destinées à affecter le sommeil » et inscrite au nom de Viva Pharmaceutical Inc. Les irrégularités qui subsistent sont liées aux questions de savoir si l’objet des revendications au dossier est évident, si l’objet des revendications au dossier est dépourvu d’utilité, si l’objet des revendications au dossier est insuffisamment fondé et si l’objet de la revendication 22 a un caractère indéfini. La Commission d’appel des brevets a procédé à la révision de la demande refusée conformément aux dispositions de l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets. Ainsi qu’il est expliqué plus en détail ci-dessous, nous recommandons que la demande soit rejetée.

 

Contexte

 

La demande

 

[2]          La demande de brevet 2 742 621 a été déposée au Canada le 3 novembre 2009 et publiée le 3 juin 2010.

 

[3]          La demande porte sur des compositions d’extraits végétaux destinées à moduler les troubles du sommeil (p. ex., l’insomnie) ainsi que sur les méthodes de production desdites compositions. Plus précisément, la description divulgue l’utilisation de compositions contenant uniquement des extraits de Baiziren (Platycladus orientalis), et de compositions contenant des extraits de Baiziren combinés à des extraits de Yuanzhi (Polygala spp.) et/ou des extraits de Suanzaoren (Zizyphus jujube) pour la modulation des troubles du sommeil.

 

[4]          La description donne comme exemple la préparation d’un extrait de graines de Platycladus orientalis, d’un extrait de racines de Polygala spp. et d’un extrait de graines de Zizyphus jujube. Les différents extraits végétaux ont été mélangés pour former deux combinaisons différentes : une composition constituée d’un extrait de graines de Platycladus orientalis et d’un extrait de graines de Zizyphus jujube (combinaison BS); et une composition constituée d’un extrait de graines de Platycladus orientalis et d’un extrait de racines de Polygala spp. (combinaison BY).

 

[5]          La description divulgue également les résultats d’études réalisées sur des souris démontrant que les combinaisons BS et BY ont permis de prolonger de façon significative le temps de sommeil chez les souris auxquelles elles avaient été administrées comparativement aux souris témoins. Qui plus est, la description divulgue que les combinaisons n’affectent pas le système de coordination musculaire et les fonctions motrices chez les souris.

 

 

Historique

 

[6]          Le 11 septembre 2014, une décision finale (« DF ») a été rédigée conformément au paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets. La DF indique que les revendications au dossier sont évidentes, en contravention de l’article 28.3 de la Loi sur les brevets, que les revendications au dossier sont insuffisamment fondées, en contravention de l’article 84 des Règles sur les brevets et que la revendication 22 a un caractère indéfini, en contravention du paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets.

 

[7]          Dans une réponse à la DF (« R-DF ») en date du 11 mars 2015, le demandeur a présenté un ensemble de revendications modifiées (l’« Ensemble de revendications proposées-1 ») visant à remédier au problème du caractère indéfini de la revendication 22, ainsi que des arguments à savoir pourquoi, selon lui, l’objet des revendications au dossier n’était pas évident et était entièrement fondé sur la description.

 

[8]          L’examinateur ayant jugé que la demande n’était toujours pas conforme à la Loi sur les brevets et que l’Ensemble de revendications proposées-1 présenté par le demandeur dans la R-DF ne rendrait pas la demande acceptable, la demande a été transmise à la Commission d’appel des brevets (« la Commission ») pour révision, accompagnée d’un Résumé des motifs (« RM ») dans lequel l’examinateur a maintenu que les irrégularités concernant les revendications qui figuraient au dossier au moment de la DF existaient toujours. En ce qui concerne les modifications proposées présentées dans la R-DF, l’examinateur explique dans le RM que l’objection liée au caractère indéfini de la revendication 22 aurait été retirée à la lumière des modifications proposées si l’Ensemble de revendications proposées-1 avait été jugé non évident au regard de l’art antérieur cité et, par ailleurs, conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets. Or, dans le RM, l’examinateur maintient que l’objet des revendications au dossier et de l’Ensemble de revendications proposées-1 est évident à la lumière de l’art antérieur cité et qu’il est insuffisamment fondé sur la description. L’examinateur signale en outre une nouvelle irrégularité présumée liée à l’absence d’utilité de l’objet des revendications au dossier et de l’Ensemble de revendications proposées-1.

 

[9]          Dans une lettre en date du 27 juillet 2015 (la « Lettre d’accusé de réception »), la Commission a transmis une copie du RM au demandeur et a offert à ce dernier la possibilité de présenter des observations écrites supplémentaires et/ou de participer à une audience. Le 26 octobre 2015, le demandeur a fait connaître sa volonté de présenter des observations écrites en réponse au RM et de participer à une audience.

 

[10]      Dans une réponse au RM (« R-RM ») en date du 25 février 2016, le demandeur a présenté des arguments à savoir pourquoi, selon lui, l’objet des revendications au dossier n’est pas évident, est utile et est entièrement fondé sur la description. En réponse au RM, le demandeur a également présenté un ensemble de revendications subsidiaire (l’« Ensemble de revendications proposées-2 »). L’Ensemble de revendications proposées-2 est constitué des revendications au dossier 1 à 21 et 23 à 26, de la revendication 22 de l’Ensemble de revendications proposées-1 et des nouvelles revendications 27 à 39.

 

[11]      Le présent comité a été formé dans le but de réviser la demande conformément aux dispositions de l’alinéa 30(6)c) des Règles sur les brevets et de présenter une recommandation au commissaire quant à la décision à rendre. Dans une lettre en date du 26 septembre 2016 (la « Lettre du comité »), nous avons exposé notre analyse préliminaire et les raisons pour lesquelles, d’après le dossier dont nous disposons, nous estimons que l’objet des revendications qui figuraient au dossier au moment de la rédaction de la DF n’est pas conforme à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets, ni à l’article 2 de la Loi sur les brevets. Dans la même lettre, nous avons également exprimé l’opinion qu’il n’était pas nécessaire, aux fins de la présente révision, que nous nous penchions sur l’irrégularité alléguée au titre de l’article 84 des Règles sur les brevets puisque le problème était déjà pris en compte en tant que non-conformité à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 

[12]      Le 10 novembre 2016, le demandeur a répondu à la Lettre du comité (sa « Réponse à la Lettre du comité ») et a présenté des observations supplémentaires à l’appui de sa thèse selon laquelle l’objet des revendications au dossier n’est pas évident, est utile et est fondé sur la description. En réponse à la Lettre du comité, le demandeur a également présenté un autre ensemble de revendications subsidiaire (l’« Ensemble de revendications proposées-3 »). L’Ensemble de revendications proposées-3 est constitué des revendications au dossier 1 à 21 et 23 à 26, de la revendication 22 de l’Ensemble de revendications proposées-1 et des revendications 27 à 39 de l’Ensemble de revendications proposées-2 et des nouvelles revendications 40 à 55.

 

[13]      Une audience a été tenue par vidéoconférence le 12 décembre 2016. Pendant l’audience, le demandeur a présenté des arguments s’ajoutant à ceux déjà présentés dans sa Réponse à la Lettre du comité. La Dre Xueju Xie, l’une des coinventeurs, a également participé à l’audience. Elle a fait valoir que l’objet revendiqué est inventif et a fourni des renseignements contextuels en ce qui concerne le contenu des déclarations présentées pendant le traitement de la demande.

 

 

Questions

 

[14]      Comme nous l’avons mentionné à la page 2 de la Lettre du comité et expliqué aux pages 28 et 29 de cette même lettre, nous considérons qu’il n’est pas nécessaire, aux fins de la présente révision, que nous examinions l’irrégularité liée au fondement insuffisant au titre de l’article 84 des Règles sur les brevets qui a été signalée dans la DF, car cette question fait partie intégrante de notre analyse de la question de l’absence d’utilité.

 

[15]      En ce qui concerne la revendication 22 et l’irrégularité liée au caractère indéfini signalée dans la DF, nous considérons qu’il n’est pertinent d’examiner cette question que si les revendications au dossier sont par ailleurs conformes à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets. Puisque ce n’est pas le cas, il n’y a pas lieu que nous examinions cette question.

 

[16]      Par conséquent, pour disposer de la présente affaire, nous n’avons à examiner que deux des quatre questions mentionnées dans la DF et/ou le RM, soit les suivantes :

 

1.      L’objet défini par les revendications au dossier est-il évident, en contravention de l’article 28.3 de la Loi sur les brevets?

 

2.      L’objet défini par les revendications au dossier est-il dépourvu d’utilité, en contravention de l’article 2 de la Loi sur les brevets?

 

 

Législation et principes juridiques

 

Interprétation téléologique

 

[17]      Conformément à Free World Trust c. Électro Santé Inc., 2000 CSC 66, les éléments essentiels sont déterminés au moyen d’une interprétation téléologique des revendications faite à la lumière de l’ensemble de la divulgation, y compris le mémoire descriptif et les dessins (voir également Whirlpool Corp c. Camco Inc., 2000 CSC 67, aux al. 49f) et g) et au par. 52). Tel qu’il est indiqué à la section 13.05 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets [RPBB; révisé en juin 2015], la première étape de l’interprétation téléologique des revendications consiste à identifier la personne versée dans l’art (« PVA ») et ses connaissances générales courantes (« CGC ») pertinentes. L’étape suivante consiste à définir le problème abordé par les inventeurs et la solution divulguée dans la demande. Les éléments essentiels peuvent ensuite être déterminés; il s’agit de ceux qui sont indispensables à l’obtention de la solution divulguée.

 

 

Évidence

 

[18]      L’article 28.3 de la Loi sur les brevets établit l’exigence selon laquelle l’objet revendiqué ne doit pas être évident pour la PVA :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

 

[19]      Dans Apotex Inc. c. Sanofi-Synthelabo Canada Inc., 2008 CSC 61 (« Sanofi »), au par. 67, la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il était utile, pour évaluer l’évidence, de suivre la démarche en quatre étapes suivante :

 

(1)          a) Identifier la « personne versée dans l’art »;

b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

 

(2)      Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

 

(3)       Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation;

 

(4)       Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

 

[20]      En ce qui concerne la deuxième étape de ce cadre d’analyse de l’évidence, la Cour a reconnu dans Sanofi que i) le concept inventif d’un brevet peut différer de l’interprétation de ses revendications (par. 76 et 78) et ii) lorsque le concept inventif d’un brevet n’est pas d’emblée discernable à la lecture des revendications (comme ce peut être le cas pour une formule chimique brute), il est acceptable de lire également le mémoire descriptif dans la demande de brevet pour déterminer le concept inventif qui sous-tend les revendications (par. 77) [Traduction] :

 

[76] L’interprétation des revendications du brevet 777 n’est pas en cause. Il est entendu que celles-ci visent l’isomère dextrogyre du racémate, ses sels pharmaceutiquement acceptables et leurs procédés d’obtention.

 

[77] Il n’est pas facile de saisir l’idée originale à partir des seules revendications. La seule présence d’une formule chimique ne permet pas de déterminer l’inventivité de la revendication. J’estime donc que l’on doit pouvoir se fonder sur le mémoire descriptif pour définir l’idée originale qui sous-tend les revendications. On ne saurait cependant s’appuyer sur le mémoire descriptif pour interpréter le texte des revendications de façon plus restrictive ou plus extensive.

 

[78] En l’espèce, il est clair que l’idée originale à la base des revendications du brevet 777 est un antiplaquettaire à l’effet thérapeutique supérieur et à la toxicité moindre comparativement aux autres composés couverts par le brevet 875, et les méthodes permettant de l’obtenir.

 

[21]      D’après le passage précité, lorsque le concept inventif n’est pas d’emblée discernable à la lecture de la revendication elle-même, une interprétation téléologique du mémoire descriptif permet de déterminer si le concept inventif d’une revendication inclut des propriétés avantageuses, tel que l’effet de synergie découlant de la combinaison de deux ou de plus de deux ingrédients actifs.

 

[22]      Dans le contexte de la quatrième étape, la Cour a également indiqué dans Sanofi qu’il pouvait être approprié dans certains cas d’effectuer une analyse fondée sur le critère de l’« essai allant de soi ».

 

[23]      Dans Sanofi, la Cour a énuméré les facteurs à considérer dans le cadre d’une analyse fondée sur le critère de l’« essai allant de soi » [Traduction] :

 

(1)   Est-il plus ou moins évident que l’essai sera fructueux? Existe-t-il un nombre déterminé de solutions prévisibles connues des personnes versées dans l’art?

 

(2)   Quels efforts — leur nature et leur ampleur — sont requis pour réaliser l’invention? Les essais sont-ils courants ou l’expérimentation est-elle longue et ardue de telle sorte que les essais ne peuvent être qualifiés de courants?

 

(3)   L’art antérieur fournit-il un motif de rechercher la solution au problème qui sous-tend le brevet?

 

 

Utilité

 

[24]      L’utilité fait partie intégrante de la définition d’« invention » énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets, qui indique que l’objet revendiqué doit présenter le « caractère de l’utilité ».

 

invention Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

 

[25]      L’exigence de l’utilité a été décrite comme suit par la Cour suprême du Canada dans Consolboard Inc. c. MacMillan Bloedel (Saskatchewan) Ltd., [1981] RCS 504, à la p. 525 [Traduction] :

 

Il y a un exposé utile dans Halsbury’s Laws of England, (3e éd.), vol. 29, à la p. 59 sur le sens de « inutile » en droit des brevets. Le terme signifie [Traduction] « que l’invention ne fonctionnera pas, dans le sens qu’elle ne produira rien du tout ou, dans un sens plus général, qu’elle ne fera pas ce que le mémoire descriptif prédit qu’elle fera ». [soulignement ajouté]

 

[26]      L’utilité alléguée est fondamentale dans le contexte de l’analyse de l’utilité et doit être vérifiée dès le départ. Dans Pfizer Canada Inc. c. Canada (ministre de la Santé) 2011 CAF 236, au par. 17, la Cour d’appel fédérale a déclaré que la détermination de l’utilité alléguée d’un brevet est l’un des aspects de l’interprétation des brevets [Traduction] :

 

Comme l’interprétation de revendications, la promesse du brevet est également une question de droit (Eli Lilly Canada Inc. c. Novopharm Ltd., 2010 CAF 197 [Eli Lilly]). En l’espèce, la juge des requêtes devait vérifier, avec l’aide de témoignages d’experts, la promesse du brevet en fonction de son objet « dans le contexte du brevet dans son ensemble, du point de vue de la personne versée dans l’art, par rapport à l’état d’avancement de la science et aux données disponibles au moment du dépôt du brevet » (Eli Lilly, au paragraphe 80).

 

[27]      L’utilité à la date du dépôt au Canada doit être établie au moyen soit d’une démonstration soit d’une prédiction valable. L’utilité ne peut pas être corroborée par des éléments de preuve ou des connaissances qui ne sont devenues accessibles qu’après la date de dépôt [voir Apotex Inc. c. Wellcome Foundation Ltd., 2002 CSC 77, au par. 56 (« AZT »)].

 

[28]      La règle de la prédiction valable permet d’établir l’utilité alléguée même lorsque cette utilité n’a pas été entièrement vérifiée à la date de dépôt. Une demande de brevet doit, cependant, fournir un [Traduction] « solide enseignement » quant au fonctionnement de l’invention revendiquée, par opposition à de [Traduction] « simples spéculations » (AZT, au par. 69).

 

[29]      La question de savoir si la prédiction est valable est une question de fait (AZT, au par. 71). La règle de la prédiction valable comporte trois éléments (AZT, au par. 70) :

 

1)      la prédiction doit avoir un fondement factuel;

 

2)      à la date de dépôt de la demande de brevet, l’inventeur doit avoir un raisonnement clair et « valable » qui permet d’inférer du fondement factuel le résultat souhaité;

 

3)      il doit y avoir divulgation suffisante du fondement factuel et du raisonnement.

 

 

[30]      Ces éléments sont évalués du point de vue de la PVA à qui s’adresse la demande de brevet, à la lumière des CGC que la PVA possèderait. En outre, à l’exception des questions relatives aux CGC, le fondement factuel et le raisonnement doivent être inclus dans la demande de brevet (voir Bell Helicopter Textron Canada Limitée c. Eurocopter, société par actions simplifiée, 2013 CAF 219, aux par. 152 et 153; (« Eurocopter »)).

 

[31]      Bien qu’une prédiction n’ait pas à équivaloir à une certitude pour être valable; il doit exister une [Traduction] « inférence prima facie raisonnable d’utilité » (Mylan Pharmaceuticals ULC c. Eli Lilly Canada Inc., 2016 CAF 119, au par. 55, Gilead Sciences, Inc. c. Idenix Pharmaceuticals Inc., 2015 CF 1156, au par. 251).

 

 

 

Analyse

 

1.      Interprétation des revendications

 

La PVA et les CGC pertinentes

[32]      Dans la Lettre du comité, nous avons défini la PVA comme une personne possédant l’expertise mixte d’un spécialiste de la médecine du sommeil, d’un praticien de la médecine traditionnelle chinoise (MTC) et d’une personne spécialisée dans le domaine de la phytochimie.

 

[33]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur se dit partiellement en désaccord avec notre définition de la PVA et fait valoir que la PVA est [Traduction] :

 

un praticien de la MTC qui possède une connaissance considérable et approfondie des plantes chinoises et de leurs applications dans le traitement de troubles spécifiques, y compris les troubles du sommeil, qui est qualifié pour traiter les troubles du sommeil dans le contexte de la MTC, et qui connaît également les techniques générales d’extraction chimique. [souligné dans l’original]

 

[34]      Nous acceptons la définition de la PVA proposée par le demandeur et soulignons que, de façon générale, elle concorde avec la nôtre.

 

[35]      En ce qui concerne les CGC pertinentes de la PVA, nous avons énuméré les connaissances suivantes dans la Lettre du comité [Traduction] :

 

         Les symptômes des troubles du sommeil, les facteurs qui influent sur le sommeil et les médicaments couramment utilisés dans la gestion du sommeil, y compris leurs avantages, leurs inconvénients et leurs effets secondaires.

 

         Les plantes chinoises et leurs applications thérapeutiques, les méthodes traditionnelles générales utilisées pour produire différentes formes d’extraits végétaux (p. ex., granules, poudres, etc.) à partir de différents constituants végétaux (p. ex., fruits, graines, écorce, feuilles, racines, etc.) et les techniques courantes d’extraction, de séparation et de purification utilisées dans les domaines de la médecine traditionnelle chinoise et de la phytochimie pour produire des extraits végétaux.

 

         Le fait que les plantes utilisées en médecine traditionnelle sont rarement utilisées seules, mais plutôt dans le cadre de formules combinant plusieurs extraits.

 

         Le fait qu’un effet thérapeutique donné n’est pas nécessairement associé à chacune des parties de la plante et qu’une application thérapeutique donnée requiert habituellement d’utiliser une partie spécifique de la plante.

 

[36]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur convient de manière générale que la PVA possède les CGC énumérées ci-dessus, excepté en ce qui concerne la discipline de la phytochimie. Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, nous acceptons la définition de la PVA proposée par le demandeur, de même que l’observation du demandeur selon laquelle, bien qu’elle n’exerce pas nécessairement ses activités dans le domaine de la phytochimie, la PVA connaît les techniques générales d’extraction chimique. Dans la même lettre, aux pages 6 à 8, le demandeur a fait valoir que les CGC pertinentes supplémentaires suivantes devaient également être prises en considération [Traduction] :

 

         le fait que, lorsqu’un ingrédient végétal est remplacé, modifié ou retiré, la fonction de la composition peut être totalement différente;

 

         la formulation d’une composition de MTC n’implique pas simplement d’assembler ou de combiner différentes plantes aux fonctions similaires;

 

         les plantes sélectionnées pour entrer dans la composition exerceraient des rôles différents selon le diagnostic posé.

 

 

[37]      De manière générale, nous convenons que les connaissances supplémentaires énumérées ci-dessus constituent des CGC pertinentes de la PVA, mais nous ajouterons que la formulation d’une composition de MTC n’exclut pas de combiner différentes plantes ayant des fonctions similaires.

 

[38]      Dans le même passage de sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur soutient également qu’un passage précis de l’une des antériorités citées fournit des renseignements quant aux CGC de la PVA [Traduction] :

 

Le passage suivant, extrait de la page 400 du document D1, nous renseigne également sur les connaissances générales courantes de la PVA :

L’importance des traitements de MTC/à base de plantes dans la gestion des maladies est de plus en plus reconnue. Des ingrédients d’origine végétale, fongique, animale et minérale sont depuis longtemps utilisés en MTC pour traiter l’insomnie, le plus souvent sous forme de formules mixtes. Bien que les traitements à base de plantes, tant occidentaux qu’orientaux, n’aient pas fait l’objet d’études rigoureuses, il est évident que la MTC dispose d’une plus grande variété de plantes et de formulations pour le traitement de l’insomnie. Davantage d’études fondamentales et cliniques sont cependant nécessaires pour démontrer leur innocuité et leur efficacité. [soulignement ajouté]

 

[39]      Nous comprenons, comme le souligne le demandeur, que le document D1 indique qu’il est nécessaire que des études cliniques soient réalisées pour démontrer l’innocuité et l’efficacité des remèdes à base de plantes. Bien que de telles considérations fassent sans doute partie des CGC de la PVA, nous sommes d’avis qu’elles ne sont pas nécessairement pertinentes du point de vue des questions de brevetabilité. Dans le cas présent, notre tâche consiste à évaluer une demande de brevet afin de déterminer si l’invention visée est non évidente et utile, et donc conforme à la Loi sur les brevets. Il ne s’agit pas d’évaluer une présentation de nouveau médicament afin de déterminer si elle est conforme à la Loi sur les aliments et drogues. Dans AZT, au par. 77, la Cour suprême a reconnu qu’il convient de faire une distinction entre ces deux contextes réglementaires [Traduction] :

 

Les appelantes . . . allèguent que l’utilité doit être démontrée au moyen d’essais cliniques préalables sur des êtres humains, établissant la toxicité, les caractéristiques métaboliques, la biodisponibilité et d’autres éléments. Ces facteurs sont conformes à ce que la présentation d’une drogue nouvelle doit comporter pour que le ministre de la Santé puisse en évaluer l’« innocuité » et l’« efficacité ».

 …

 

Les conditions préalables en matière de preuve que doit remplir le fabricant qui souhaite commercialiser une drogue nouvelle visent un objectif différent de celui visé par le droit des brevets. Dans le premier cas, on parle d’innocuité et d’efficacité alors que, dans le deuxième cas, il est question d’utilité, mais dans le contexte de l’inventivité.

 

 

Le problème à résoudre et la solution proposée

[40]      Dans la Lettre du comité, nous avons exprimé l’opinion que le problème à résoudre est la nécessité de disposer d’un nouveau traitement des troubles physiologiques du sommeil et que la solution proposée dans la demande consiste à produire une composition constituée d’un extrait de Platycladus orientalis et d’un extrait de Polygala spp. ou une composition constituée d’un extrait de Platycladus orientalis, d’un extrait de Polygala spp. et d’un extrait de Zizyphus jujube, et à utiliser ces compositions pour moduler les troubles physiologiques du sommeil.

 

[41]      Le demandeur n’a exprimé aucun désaccord avec cette évaluation, ni dans sa Réponse à la Lettre du comité, ni dans les observations qu’il a présentées à l’audience.

 

Les éléments essentiels des revendications permettant de résoudre le problème défini

[42]      Dans la Lettre du comité, nous exprimons l’opinion que la PVA considérerait que chacun des extraits végétaux mentionnés dans les revendications indépendantes est un élément essentiel, comme l’est la modulation des troubles physiologiques du sommeil.

 

[43]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur n’a exprimé aucun désaccord avec cette évaluation.

 

 

Signification de certaines expressions

[44]      Dans la Lettre du comité, aux pages 9 et 10, en ce qui concerne l’expression « modulation des troubles physiologiques du sommeil » et le terme « extrait », nous exprimé l’opinion que : i) l’expression « pour la modulation » inclut au moins l’atténuation d’un trouble physiologique du sommeil; ii) l’expression « troubles physiologiques du sommeil » inclut au moins les dyssomnies, l’insomnie, les troubles du sommeil liés au rythme circadien, l’hypersomnie et les parasomnies, et iii) le terme « extrait » n’est pas limité à un constituant végétal spécifique dans les revendications indépendantes 1, 2 et 16 ni à une méthode d’extraction spécifique ou à un solvant d’extraction spécifique dans les revendications indépendantes 1 et 2.

 

[45]      Le demandeur n’a exprimé aucun désaccord avec notre interprétation de l’expression « pour la modulation » et du terme « extrait », ni dans sa Réponse à la Lettre du comité ni dans les observations qu’il a présentées à l’audience.

 

[46]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité, à la page 14, le demandeur se dit en désaccord avec notre interprétation du terme « troubles du sommeil » et soutient que [Traduction] « la PVA donnerait au terme « troubles du sommeil » la même interprétation que celle donnée dans la présente demande, c’est-à-dire que les troubles du sommeil peuvent inclure (et non incluent au moins) la dyssomnie, l’insomnie, les troubles du sommeil liés au rythme circadien, l’hypersomnie et la parasomnie », car dans la partie pertinente de la description, c’est la formulation à caractère facultatif « peuvent inclure » qui est utilisée, et non « incluent au moins ». Le demandeur soutient, en outre, en ce qui concerne la promesse d’utilité, que [Traduction] « la présente demande peut, au mieux, être interprétée uniquement comme promettant un traitement de l’insomnie ».

 

[47]      Nous convenons que la formulation « peuvent inclure » a un caractère facultatif, mais nous demeurons d’avis que l’expression « troubles du sommeil » employée au pluriel dans le contexte des revendications au dossier englobe davantage de troubles que la seule insomnie. Notre interprétation concorde d’ailleurs avec la limitation que contiennent les revendications dépendantes 6 et 15. Selon le principe de la différenciation des revendications[1], les revendications indépendantes 1 et 2 ne peuvent pas être interprétées comme comprenant la limitation contenue dans ces revendications dépendantes. De plus, la formulation de type Markush utilisée dans les revendications 6 et 15 définit explicitement les « troubles du sommeil » comme l’insomnie ou la parasomnie.

 

[48]      Quoi qu’il en soit, la signification exacte de « troubles du sommeil » n’est au centre d’aucune des questions à trancher; en effet, les opinions préliminaires que nous avons présentées dans la Lettre du comité en ce qui concerne l’évidence et l’absence d’utilité des revendications au dossier s’appliquaient au traitement spécifique de l’insomnie.

 

 

2.      Évidence des revendications au dossier (article 28.3 de la Loi sur les brevets)

 

Identifier la PVA et ses CGC pertinentes

[49]      La PVA et les CGC ont été définies ci-dessus dans le cadre de notre interprétation téléologique des revendications.

 

Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[50]      Dans la Lettre du comité, nous avons exprimé l’opinion que le concept inventif des revendications indépendantes consiste en une composition constituée de deux extraits végétaux (Platycladus orientalis et Polygala spp.) et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables (revendications 1 et 16), ou de trois extraits végétaux (Platycladus orientalis, Polygala spp. et Zizyphus jujube) et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables (revendication 2), pour la modulation des troubles physiologiques du sommeil.

 

[51]      Nous avons également pris acte de l’affirmation du demandeur dans la R-DF selon laquelle il faudrait considérer que le concept inventif de l’invention revendiquée inclut également l’effet synergique produit par les extraits combinés, et non simplement la sommation des effets individuels des extraits considérés séparément.

 

[52]      Après examen des revendications, de la description, des trois déclarations de la Dre Xueju Xie et de la jurisprudence relative à l’interprétation des revendications et à l’identification du concept inventif, nous avons exprimé l’opinion, à la page 17 de la Lettre du comité, que le concept inventif des revendications au dossier n’inclut pas un effet synergique pour les raisons qui suivent.

 

[53]      Nous avons, en premier lieu, indiqué qu’il n’est nul besoin de se reporter au reste du mémoire descriptif, puisqu’un concept inventif est d’emblée discernable à la lecture des revendications elles-mêmes. Nous avons souligné que les revendications au dossier ne définissent pas les compositions mentionnées comme agissant en synergie. Le demandeur n’a exprimé aucun désaccord avec cette évaluation, ni dans sa Réponse à la Lettre du comité, ni dans les observations qu’il a présentées à l’audience.

 

[54]      En deuxième temps, nous avons souligné qu’une lecture téléologique du mémoire descriptif dans son ensemble, y compris des exemples fournis dans la description, ne donnait pas à penser qu’un effet synergique est associé aux compositions revendiquées. Le demandeur n’a exprimé aucun désaccord avec l’avis du comité à cet égard, ni dans sa Réponse à la Lettre du comité ni dans les observations qu’il a présentées à l’audience. Le demandeur maintient cependant que le droit canadien des brevets ou la pratique en matière de brevets au Canada n’exigent pas qu’un effet synergique soit divulgué dans le mémoire descriptif.

 

[55]      En troisième lieu, nous avons exprimé l’opinion que la jurisprudence n’indique pas que des renseignements absents du mémoire descriptif peuvent être inclus dans le concept inventif.

 

[56]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité ainsi qu’à l’audience, le demandeur s’est dit en désaccord avec ce troisième point et a fait valoir que, bien que les renseignements permettant de comprendre le mémoire descriptif soient disséminés dans l’ensemble de la demande de brevet, certaines décisions jurisprudentielles donnent à penser que le concept inventif peut être déterminé à la lumière d’éléments de preuve extérieurs à la divulgation faite dans la demande de brevet. À l’appui de cet argument, le demandeur a cité les décisions rendues dans Re Application for Patent of Lilly Industries Ltd. 1982, 69 CPR (2d) 183 (« Lilly Industries ») et Bristol-Myers Squibb Canada Co c. Teva Canada Limited, 2016 CF 580 (« BMS »).

 

[57]      Nous avons passé en revue les deux affaires citées par le demandeur ainsi que d’autres décisions rendues par les tribunaux fédéraux (que nous présentons et examinons ci-dessous), et nous ne sommes pas convaincus que le concept inventif d’une revendication peut être considéré comme incluant une propriété constituant un avantage, tel un effet synergique, dans les cas où la propriété ou l’effet en question ne sont mentionnés ni dans la revendication ni dans le reste du mémoire descriptif. À notre avis, la jurisprudence ne va pas dans ce sens.

 

[58]      Lilly Industries est une décision du commissaire qui a été rendue antérieurement aux décisions phares de la Cour suprême que sont Whirpool et Sanofi. Cette affaire se distingue de la présente demande en ce que la Commission dans Lilly Industries était d’avis que l’invention revendiquée incluait un effet synergique qui était mentionné dans la description. La Commission était également d’avis que l’information démontrant l’existence d’un effet synergique présentée par voie d’affidavit après le dépôt de la demande tenait d’un [Traduction] « effort fait de bonne foi pour faire avancer le traitement de la demande, et non d’une tentative tardive du demandeur d’introduire une divulgation supplémentaire » (voir les par. 8 à 10 de Lilly Industries).

 

[59]      En revanche, comme nous l’expliquons à la page 14 de la Lettre du Comité, aucun effet synergique n’est mentionné dans le mémoire descriptif de la présente demande. Bien qu’il soit fait mention, aux lignes 1 à 3 de la page 3, d’un effet [Traduction] « surprenant » de l’invention, il est évident que cet effet s’applique aussi bien aux compositions constituées uniquement d’un extrait de graines de Platycladus orientalis qu’aux compositions comprenant cet extrait.

 

[60]      Là encore, à la différence de la situation qui prévalait dans Lilly Industries, nous sommes d’avis que la déclaration présentée après le dépôt de la demande dans la présente affaire constitue la toute première indication à l’effet qu’il y aurait lieu de considérer que le concept inventif du demandeur inclut un effet synergique. Nous insistons sur le fait que le demandeur n’a exprimé aucun désaccord avec les conclusions du comité à cet égard, ni dans sa Réponse à la Lettre du comité ni dans les observations qu’il a présentées à l’audience.

 

[61]      BMS a été citée dans la Lettre du comité en tant qu’affaire donnant à penser que des propriétés qui ne sont mentionnées ni dans les revendications ni dans la description ne peuvent pas faire partie du concept inventif. Dans BMS, les concepts inventifs des brevets en cause n’étaient pas d’emblée discernables à la lecture des revendications elles-mêmes et une lecture du brevet a mené à la conclusion que les propriétés avantageuses alléguées faisaient effectivement partie de l’invention revendiquée (voir les par. 104 à 146 et 413 à 446 de BMS).

 

[62]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité, à la page 24, le demandeur a fait valoir que l’affaire BMS ne permet pas d’affirmer que [Traduction] « il n’est pas acceptable de se reporter à une preuve par affidavit établissant les "effets synergiques" de compositions revendiquées, tels que déterminés avant la date de dépôt de la demande de brevet, pour corroborer l’existence d’une invention », car la décision rendue dans BMS est muette sur cette question précise. Le demandeur a, en outre, fait valoir aux pages 24 et 25 de cette même lettre ainsi qu’à l’audience que BMS donne à penser que le concept inventif peut être déterminé à la lumière d’une preuve extérieure à la divulgation faite dans une demande de brevet puisqu’une preuve d’expert, qui ne faisait pas partie du mémoire descriptif déposé à l’origine, a été présentée et prise en considération dans BMS ainsi que dans une affaire citée dans BMS (Alcon Canada Inc. c. Apotex Inc., 2014 CF 699, au par. 167 (« Alcon »)).

 

[63]      À notre avis, BMS est un exemple récent d’une affaire dans laquelle le concept inventif a été déterminé à la lumière de la description (voir également Sanofi, Eurocopter et Apotex Inc. c. Allergan Inc. et le ministre de la Santé, 2015 CAF 137). Bien qu’il soit fait mention dans BMS de plusieurs affaires dans lesquelles des juges ont refusé de tenir compte de la partie descriptive d’une demande de brevet pour déterminer le concept inventif, y compris l’affaire Alcon susmentionnée, la Cour dans BMS précise au par. 114 que [Traduction] « ces décisions sont d’une utilité limitée, car chacune doit être envisagée à la lumière du libellé spécifique des demandes de brevet en cause » [soulignement ajouté]. Aucune de ces affaires ne permet d’affirmer que le concept inventif peut être défini comme incluant un avantage inattendu sur la base de la divulgation de cet avantage uniquement dans une preuve par déclaration solennelle présentée après la date de dépôt.

 

[64]      Le demandeur soutient que BMS [Traduction] « constitue un exemple d’une affaire dans laquelle la Cour est allée au-delà du mémoire descriptif pour déterminer le "concept inventif" », qu’il est fréquent qu’une preuve d’expert soit admise pour déterminer le concept inventif et que la preuve d’expert devrait être considérée comme analogue à une preuve extrinsèque de l’existence d’une propriété. En toute déférence, nous ne sommes pas d’accord.

 

[65]      À notre avis, la jurisprudence indique que la preuve d’expert peut être utile pour éclairer la Cour sur le contexte prévalant dans le domaine technique pertinent et sur ce que la PVA comprendrait à la lecture de l’information contenue dans le mémoire descriptif. À ce titre, il y aurait matière à considérer que la preuve d’expert dans le mémoire descriptif constitue de l’information fournie dans le but de faire avancer le traitement de la demande, et non une tentative tardive d’introduire une divulgation supplémentaire. Les trois déclarations de la Dre Xueju Xie sont envisagées dans cette optique.

 

[66]      Après examen des trois déclarations de la Dre Xueju Xie, et comme nous l’expliquons dans la Lettre du comité, nous considérons que :

 

         Le contenu de la Déclaration-1 consiste essentiellement en une description de la préparation de combinaisons supplémentaires d’extraits végétaux et en une présentation des résultats d’études réalisées sur des souris démontrant que les combinaisons BS (extraits de Platycladus orientalis et de Zizyphus jujube), BY (extraits de Platycladus orientalis et de Polygala spp.), SY (extraits de Zizyphus jujube et de Polygala spp.) et BSY (extraits de Platycladus orientalis, de Zizyphus jujube et de Polygala spp.) ont permis de prolonger de manière significative le temps de sommeil induit par le barbital sodique chez les souris auxquelles elles avaient été administrées comparativement aux souris témoins.

 

         La conclusion présentée dans la Déclaration-2 en ce qui concerne l’existence d’un effet synergique découlant de la combinaison de deux ou de plus deux extraits parmi un extrait de Platycladus orientalis, un extrait de Polygala spp. et un extrait de Zizyphus jujube dans une même composition destinée au traitement de l’insomnie est essentiellement fondée sur des inférences tirées de l’information reçue du professeur Zhang concernant le manque d’efficacité des compositions ne contenant qu’un seul extrait et des résultats présentés dans la Déclaration-1.

 

         La Déclaration-3 divulgue des résultats d’études qui semblent démontrer que les extraits utilisés seuls ont une efficacité moindre vis-à-vis de l’insomnie comparativement à n’importe laquelle des trois combinaisons testées. Nous avons pris acte de la taille de la population (8 à 10 volontaires) sur laquelle chaque extrait et chaque combinaison d’extraits ont été testés, de la durée de l’essai (7 jours) et du degré de subjectivité caractérisant les essais réalisés (« n’a constaté aucune amélioration », « a constaté une légère amélioration » et « a constaté une amélioration significative de la qualité de son sommeil, notamment un endormissement plus rapide et l’absence de réveils »).

 

[67]      Nous estimons que, considérée dans son ensemble, la preuve contenue dans les déclarations ne fournit pas d’indications pertinentes quant à ce que la PVA considérerait comme étant le concept inventif d’après l’information présentée dans le mémoire descriptif. Cette preuve n’est donc pas suffisamment convaincante pour établir que le concept inventif inclut un effet synergique inattendu associé aux compositions revendiquées.

 

[68]      Une des affaires pertinentes sur lesquelles nous fondons notre opinion selon laquelle le concept inventif des revendications au dossier n’inclut pas un effet synergique inattendu associé aux compositions revendiquées est Lundbeck Canada Inc. c. Ratiopharm Inc., 2009 CF 1102, dans laquelle la Cour, au paragraphe 229, s’est exprimée en ces termes [Traduction] :

 

Pour revendiquer un effet synergique, il faut qu’une composition offre un avantage imprévu : plus particulièrement, un avantage attribuable à une coopération imprévisible entre les éléments de l’association. Pour être fiable [sic; pour pouvoir être invoqué], un effet synergique doit être exercé par tout ce qui est visé par le brevet [sic; la revendication] et il doit être décrit dans le mémoire descriptif : voir Cipla Ltd. et al. c. Glaxo Group Ltd., [2004] EWHC 477 (Ch), aux paragraphes 16 et 17, 103, 113 et 114. [soulignement ajouté]

 

[69]      En l’espèce, nous considérons que l’effet synergique que le demandeur souhaite inclure dans le concept inventif n’est pas décrit dans le mémoire descriptif (voir le paragraphe [54] ci-dessus) et qu’il pourrait ne pas être exercé par tout ce qui est visé par les revendications. Les compositions visées par les revendications ne se limitent pas aux compositions spécifiques d’extraits végétaux qui se sont se avérées exercer un effet synergique selon les résultats d’études présentés dans la Déclaration-3. Les revendications au dossier visent également des compositions qui contiennent des extraits de constituants végétaux qui ne sont pas des graines de Platycladus orientalis, des racines de Polygala spp. et des graines de Zizyphus jujube (revendications 1 à 26) et à l’égard desquelles la Déclaration-3 ne fait mention d’aucun effet synergique.

 

[70]      Compte tenu de ce qui précède, nous maintenons l’opinion que nous avons exprimée dans la Lettre du comité, à savoir que le concept inventif des revendications indépendantes consiste en une composition constituée de deux extraits végétaux (Platycladus orientalis et Polygala spp.) et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables (revendications 1 et 16), ou de trois extraits végétaux (Platycladus orientalis, Polygala spp. et Zizyphus jujube) et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables (revendication 2), pour la modulation des troubles physiologiques du sommeil.

 

 

Recenser les différences, s’il en est, entre la matière citée comme faisant partie de l’« état de la technique » et le concept inventif de la revendication ou la revendication telle qu’elle est interprétée

 

[71]      Trois antériorités sont citées dans la DF en ce qui a trait à l’évidence :

 

         Wing, Hong Kong Medical Journal, 7(4), pages 392 à 402, décembre 2001 (D1)

 

         Chen et Chen, Chinese Medical Herbology and Pharmacology, éd. L. Crampton, pages 11 à 14 et 754 à 776, 2004 (D2)

 

         Kimura et al. International Collation of Traditional and Folk Medicine: Northeast Asia I, World Scientific Publishing Company, 1998 (D3)

 

[72]      Aux pages 19 et 20 de la Lettre du comité, nous résumons ce que nous considérons comme la matière formant l’« état de la technique » et exposons les différences entre l’« état de la technique » et le concept inventif des revendications au dossier [Traduction] :

 

Compte tenu de ce qui précède, notre opinion préliminaire quant à ce qui constitue la différence entre l’« état de la technique » et le concept inventif des revendications est que, même si traditionnellement, l’utilisation individuelle de chacun des extraits de graines de Platycladus orientalis, de graines de Zizyphus jujube et de racines de Polygala spp. pour traiter l’insomnie était connue et qu’une formule destinée au traitement de l’insomnie comprenant, entre autres ingrédients, ces trois extraits était également connue, l’« état de la technique » ne divulgue pas spécifiquement une composition constituée d’extraits de Platycladus orientalis et de Polygala spp. et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables ou une composition constituée d’extraits végétaux de Platycladus orientalis, de Polygala spp et de Zizyphus jujube et d’un ou plusieurs supports pharmaceutiquement acceptables pour la modulation des troubles physiologiques du sommeil.

 

[73]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité, aux pages 25 et 26, le demandeur affirme ce qui suit [Traduction] :

 

De manière générale, le demandeur souscrit aux conclusions présentées aux pages 19 et 20 de la Correspondance, à savoir que l’état de la technique ne divulgue pas de compositions constituées des extraits végétaux mentionnés dans les revendications de la présente demande.

 

 

Les antériorités citées ne contiennent ni divulgation ni exposé concernant la combinaison formée de polygala spp. (yuanzhi) et de platycladus orientalis (baiziren) et zizyphus jujube, ou la combinaison formée de polygala spp. (yuanzhi) et de platycladus orientalis (baiziren).

 

Les antériorités citées ne contiennent ni divulgation ni exposé concernant l’effet synergique obtenu lorsque polygala spp. (yuanzhi) est combiné avec platycladus orientalis (baiziren) et zizyphus jujube, ou lorsque polygala spp. (yuanzhi) est combiné avec platycladus orientalis (baiziren), dans le traitement des troubles du sommeil (p. ex., l’insomnie) par rapport une utilisation individuelle de platycladus orientalis (baiziren), de zizyphus jujube et de polygala spp. (yuanzhi).

 

[74]      Nous convenons avec le demandeur qu’aucune des antériorités citées ne divulgue ou n’enseigne l’existence d’un effet synergique associé à la combinaison formée d’extraits de Platycladus orientalis et de Polygala spp. ou à la combinaison formée d’extraits végétaux de Platycladus orientalis, de Polygala spp. et de Zizyphus jujube. Cependant, comme nous l’avons indiqué ci-dessus, nous sommes d’avis que le concept inventif des revendications n’inclut pas d’effet synergique, si bien que l’absence d’une divulgation concernant un effet synergique n’a aucune importance dans le contexte de la présente analyse des différences entre l’« état de la technique » et le concept inventif des revendications au dossier.

 

[75]      En ce qui concerne la divulgation relative aux combinaisons spécifiques d’extraits végétaux mentionnées dans les revendications au dossier, nous avons indiqué dans la Lettre du comité que l’« état de la technique » ne fournit pas explicitement de motif de produire les combinaisons spécifiques d’ingrédients mentionnées dans les revendications. Nous avons cependant souligné, à la page 21 de la même lettre, que le document D2 indique que les graines de Platycladus orientalis et de Zizyphus jujube sont les deux plantes les plus fréquemment utilisées parmi les neuf [Traduction] « plantes nourrissantes qui apaisent le shen (esprit) » (voir la page 776 de D2) et enseigne que les racines de Polygala spp. accentue l’effet d’autres plantes en prolongeant le temps de sommeil (voir la page 754 de D2).

 

 

Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

 

[76]      Dans la Lettre du comité, aux pages 20 à 22, nous avons exprimé l’opinion suivante :

 

         il était évident que toute composition constituée de deux ou de plus de deux extraits végétaux traditionnellement utilisés pour traiter l’insomnie devait forcément fonctionner comme traitement de l’insomnie, y compris l’une des compositions mentionnées dans les revendications;

 

         la PVA était à même de produire une composition constituée d’extraits de graines de Platycladus orientalis, d’extraits de racines de Polygala spp. et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables, ou une composition constituée d’extraits de graines de Platycladus orientalis, d’extraits de racines de Polygala spp., d’extraits de graines de Zizyphus jujube et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables, et d’utiliser ces compositions pour traiter l’insomnie sans avoir à mener d’essais longs et ardus;

 

         la PVA n’aurait pas eu à faire preuve d’inventivité pour combiner des extraits végétaux connus ayant des effets thérapeutiques bien connus contre l’insomnie afin d’obtenir une composition destinée à ce même usage thérapeutique.

 

[77]      En conséquence, nous avons exprimé l’opinion que les revendications indépendantes 1, 2 et 16 des revendications au dossier auraient été évidentes pour la PVA à la date de revendication compte tenu de l’état de la technique.

 

[78]      D’après les observations que le demandeur a présentées dans sa Réponse à la Lettre du comité ainsi qu’à l’audience, les arguments du demandeur à l’appui de la non-évidence des revendications au dossier peuvent être résumés comme suit :

 

         Étant donné qu’aucun des documents cités ne contient de divulgation ou d’exposé concernant la combinaison spécifique de plantes mentionnée dans les revendications au dossier, le fait de combiner les plantes spécifiques mentionnées dans les revendications au dossier est une étape qui nécessite de faire preuve d’inventivité.

 

         Les extraits végétaux agissent de concert à l’intérieur d’une composition pour produire un résultat combiné, le résultat combiné étant une amélioration par rapport au résultat produit par les extraits végétaux utilisés seuls, et même si les extraits végétaux [Traduction] « sont anciens et étaient déjà connus dans l’art en tant qu’éléments distincts », les combinaisons mentionnées sont nouvelles, tout comme les avantages qui en découlent et, par conséquent satisfont aux exigences du droit canadien des brevets quant à ce qui constitue une invention (citant la Cour suprême du Canada dans Canada c. Uhlemann Optical Co., [1952] 1 RCS 143 (« Uhlemann »).

 

         La PVA n’aurait pas considéré les compositions revendiquées comme étant [Traduction] « plus ou moins évidentes » à réaliser, car le document D1 enseigne la préparation d’une formule constituée de 12 ingrédients essentiels pour le traitement de l’insomnie, plus de 300 000 combinaisons d’ingrédients peuvent être réalisées à partir des 19 ingrédients distincts divulgués dans le document D1, et le document D1 ne contient ni enseignement ni indication voulant qu’une composition constituée des deux ou des trois ingrédients spécifiques revendiqués dans la présente demande permette de moduler les troubles du sommeil (p. ex., l’insomnie).

 

         Les documents cités D1, D2 et D3 n’enseignent pas, pas plus qu’ils n’évoquent, l’absence de potentielles interactions entre les extraits végétaux mentionnés dans les revendications au dossier, ne divulguent pas de résultats d’études cliniques confirmant l’efficacité des extraits végétaux individuels dans le traitement de l’insomnie et ne divulguent aucun effet indésirable potentiel.

 

         Les essais menés dans le cadre de la présente demande n’auraient pas été considérés comme des essais courants par la PVA, car le nombre de combinaisons pouvant être réalisées à partir de la formule traditionnelle Tian Wang Bu Xin Dan divulguée dans le document D1 donne à penser que pour en arriver aux compositions spécifiquement revendiquées dans la présente demande, la PVA aurait eu à accomplir bien plus que des tâches d’expérimentation négligeables, à la lumière de la divulgation faite dans le document D1.

 

         Les antériorités citées doivent fournir un motif de vouloir en arriver aux compositions présentement revendiquées; or, les antériorités citées ne fournissent à la PVA ni raison ni motif de vouloir en arriver aux compositions présentement revendiquées.

 

[79]      Nous avons tenu compte des arguments du demandeur, mais nous ne sommes pas convaincus que l’objet revendiqué dans les revendications indépendantes 1, 12 et 16 n’aurait pas été évident pour la PVA.

 

[80]      D’abord et avant tout, nous maintenons l’opinion préliminaire que nous avons exprimée à la page 21 de la Lettre du comité, à savoir que le fait de combiner des extraits végétaux connus ayant des effets thérapeutiques anti-insomnie bien connus (divulgués de façon indépendante dans D2 et D3) afin d’obtenir une composition destinée à ce même usage thérapeutique ne constitue pas une étape qui exige de l’inventivité de la part de la PVA.

 

[81]      Compte tenu de la nature de l’invention revendiquée et du fait que, dans ses observations, le demandeur insiste sur les facteurs énoncés dans Sanofi qu’il convient de considérer dans le cadre d’une analyse relative à l’« essai allant de soi », nous avons tenu compte de ces facteurs à la quatrième étape de l’évaluation de l’évidence.

 

[82]      Nous maintenons l’opinion préliminaire que nous avons exprimée à la page 21 de la Lettre du comité, à savoir qu’il était évident que toute composition constituée de deux ou de plus de deux extraits végétaux traditionnellement utilisés pour traiter l’insomnie devait forcément fonctionner comme traitement de l’insomnie, y compris une composition constituée d’extraits de graines de Platycladus orientalis, d’extraits de racines de Polygala spp. et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables, ou une composition constituée d’extraits de graines de Platycladus orientalis, d’extraits de racines de Polygala spp., d’extraits de graines de Zizyphus jujube et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables. Nous considérons que ce facteur est largement déterminant quant au fait que l’objet des revendications au dossier résulte d’un essai allant de soi.

 

[83]      Nous soulignons que le demandeur, dans ses observations sur ce point et plus généralement dans ses observations concernant la non-évidence des compositions revendiquées, insiste sur la formule Tian Wang Bu Xin Dan divulguée dans le document D1 qui est traditionnellement utilisée pour traiter l’insomnie et sur le fait que la PVA n’aurait sans doute pas déduit de cette formule les compositions spécifiquement revendiquées. À notre avis, le facteur « Est-il plus ou moins évident que l’essai sera fructueux? » énoncé dans Sanofi et l’inventivité de l’invention revendiquée en général devraient être évalués dans le contexte de l’« état de la technique » dans son ensemble plutôt qu’à la seule lumière d’une connaissance spécifique.

 

[84]      Le demandeur a expressément reconnu à la page 6 de sa Réponse à la Lettre du comité que les CGC comprennent [Traduction] « les plantes chinoises et leurs applications thérapeutiques ». Nous sommes d’avis que les documents D2 et D3 sont des ouvrages de référence de la MTC représentatifs des CGC concernant l’extrait de graines de Platycladus orientalis, l’extrait de racines de Polygala spp. et l’extrait de graines de Zizyphus jujube et leur application thérapeutique, y compris le traitement de l’insomnie. Les documents D2 et D3 indiquent tous deux que les graines de Platycladus orientalis, les graines de Zizyphus jujube et les racines de Polygala spp. sont toutes utiles pour traiter l’insomnie. De plus, le document D2 indique que les graines de Platycladus orientalis et de Zizyphus jujube sont les deux plantes les plus fréquemment utilisées parmi les neuf [Traduction] « plantes nourrissantes qui apaisent le shen (esprit) » et enseigne que les racines de Polygala spp. accentue l’effet d’autres plantes en prolongeant le temps de sommeil. L’utilisation d’extraits de graines de Platycladus orientalis, d’extraits de racines de Polygala spp. et d’extraits de graines de Zizyphus jujube dans la formule Tian Wang Bu Xin Dan divulguée dans le document D1 concorde avec les divulgations faites dans les documents D2 et D3 (c.-à-d. que des extraits végétaux connus pour leur utilité dans le traitement de l’insomnie font partie intégrante d’une formule traditionnelle destinée à cette même application thérapeutique).

 

[85]      En ce qui concerne l’absence, dans les documents D1, D2 et D3, d’enseignements se rapportant aux potentielles interactions entre les extraits végétaux mentionnés dans les revendications au dossier, nous considérons que la PVA aurait eu connaissance et aurait tenu compte de toute interaction entre extraits et de tout effet indésirable important déjà signalés au moment où elle aurait combiné les ingrédients afin d’obtenir une composition, et que, compte tenu de l’« état de la technique », la PVA ne se serait pas attendu à ce qu’une interaction néfaste se produise entre les graines de Platycladus orientalis, les graines de Zizyphus jujube et les racines de Polygala spp. ni à ce que des effets indésirables se manifestent.

 

[86]      Nous reconnaissons que les documents D1, D2 et D3 ne divulguent pas de résultats d’études cliniques confirmant l’efficacité des extraits végétaux individuels dans le traitement de l’insomnie ou la possibilité d’effets indésirables potentiels. Comme nous l’avons indiqué au paragraphe [39] ci-dessus, nous sommes d’avis que des résultats d’études cliniques démontrant l’innocuité et l’efficacité d’un remède à base de plantes peuvent être pertinents aux fins du processus réglementaire d’approbation d’un médicament, mais ne sont pas nécessairement pertinents dans le contexte de l’analyse de l’évidence. En outre, nous estimons que, de façon générale, l’absence d’études cliniques ne serait pas une préoccupation pour un praticien de la MTC; la MTC étant un art qui se pratique depuis l’Antiquité selon l’information fournie à la page 5 de la Réponse à la Lettre du comité.

 

[87]      En ce qui concerne la nature et l’ampleur des efforts requis pour réaliser l’invention, le demandeur soutient aux pages 29 et 30 de sa Réponse à la Lettre du comité que [Traduction] « les essais menés dans le cadre de la présente demande n’auraient pas été considérés comme des essais courants par la PVA » et que [Traduction] « pour en arriver aux compositions spécifiquement revendiquées dans la présente demande, la PVA aurait eu à accomplir bien plus que des tâches d’expérimentation négligeables, à la lumière de la divulgation faire dans le document D1 ».

 

[88]      Après examen de la description, donnée à la page 6, de la préparation et de la combinaison de l’extrait de graines de Platycladus orientalis, de l’extrait de racines de Polygala spp. et de l’extrait de graines de Zizyphus jujube et de la méthode utilisée pour produire une composition pour la modulation des troubles physiologiques du sommeil définie dans la revendication 16, nous sommes d’avis que des méthodes traditionnelles générales utilisées pour produire différentes formes d’extraits végétaux à partir de différents constituants végétaux (p. ex., fruits, graines, écorce, feuilles, racines, etc.) et des techniques courantes d’extraction, de séparation et de purification du genre de celles recensées ci-dessus comme faisant partie des CGC ont été utilisées dans le cadre de la présente demande pour arriver aux compositions visées par les revendications au dossier. Nous considérons que la PVA aurait utilisé essentiellement les mêmes méthodes et techniques que celles faisant partie des CGC exposées dans la présente description pour produire une composition constituée d’un extrait de graines de Platycladus orientalis, d’un extrait de racines de Polygala spp. et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables, ou une composition constituée d’un extrait de graines de Platycladus orientalis, d’un extrait de racines de Polygala spp., d’un extrait de graines de Zizyphus jujube et d’un ou plusieurs supports ou excipients pharmaceutiquement acceptables et aurait utilisé ces compositions pour traiter l’insomnie.

 

[89]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur soutient que [Traduction] « les antériorités citées, considérées conjointement avec les CGC, ne fournissent aucun motif de vouloir en arriver à la solution proposée dans la présente demande ». Nous maintenons l’opinion préliminaire que nous avons exprimée dans la Lettre du comité, à savoir que, même si l’« état de la technique » ne fournit pas explicitement de motif de produire les combinaisons spécifiques d’ingrédients mentionnées dans les revendications, la motivation à combiner des ingrédients en MTC est généralement élevée. Nous ajouterons que le document D2 fournit un motif de combiner un extrait de racines de Polygala spp., qui prolonge le temps de sommeil (voir la page 754), avec une ou deux des [Traduction] « plantes nourrissantes qui apaisent le shen (esprit) » les plus fréquemment utilisées (voir page 776). De plus, nous ne considérons pas que l’expression « art antérieur » comprise dans la formulation du troisième facteur lié à l’« essai allant de soi » énoncé dans Sanofi renvoie exclusivement aux antériorités citées, comme le laisse entendre le demandeur aux pages 30 et 31 de sa Réponse à la Lettre du comité. À notre avis, Sanofi ne permet pas d’affirmer que le motif ne peut trouver son origine que dans les antériorités citées. Dans Sanofi, au paragraphe 90, la Cour suprême a explicitement inclus les CGC dans l’« art antérieur » à considérer dans le contexte du troisième facteur lié à l’« essai allant de soi » [Traduction] :

 

Le secteur pharmaceutique est sans conteste extrêmement concurrentiel. Les entreprises sont toujours à l’affût de médicaments nouveaux et améliorés qu’elles veulent commercialiser dès que possible. La demande d’un antiplaquettaire efficace et non toxique peut donc être présumée. Toutefois, ni le brevet 875 ni ses connaissances générales courantes ne donnaient à la personne versée dans l’art un motif de rechercher l’objet du brevet 777. Le brevet antérieur était un brevet de genre, de sorte qu’une sélection était prévisible. Il n’établissait cependant pas de distinction entre les composés quant à leur efficacité et à leur toxicité, ce qui donne à penser que ce qu’il y avait lieu de retenir ou d’omettre n’était alors pas évident pour la personne versée dans l’art. [soulignement ajouté]

 

[90]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité, aux pages 26 et 27, le demandeur a avancé un autre argument en lien avec l’inventivité de l’objet revendiqué. En effet, le demandeur laisse entendre que Uhlemann établit que tout objet satisfaisant à la définition d’une combinaison satisfait aussi nécessairement à toutes les exigences du droit canadien des brevets quant à ce qui constitue une invention. En toute déférence, nous ne sommes pas d’accord. La question de savoir si les compositions mentionnées dans les revendications au dossier satisfont à la définition d’une « combinaison » ne constitue pas, à notre avis, un argument à l’appui de la non-évidence de l’objet revendiqué, car la question la plus pertinente est celle de savoir si la « combinaison » est évidente ou non. En ce qui concerne les « avantages » découlant de la combinaison des extraits mentionnés, nous avons déjà exprimé l’opinion que le concept inventif des revendications au dossier n’inclut pas un effet synergique. Nous soulignons, en outre, que chacun des [Traduction] « anciens » éléments de montage individuels en cause dans Uhlemann remplit une fonction différente dans l’atteinte d’un résultat combiné consistant en une configuration qui empêche la lentille de se briser. En l’espèce, les extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube ont tous en commun une fonction thérapeutique connue liée au traitement de l’insomnie.

 

[91]      Nous avons également tenu compte des observations présentées par la Dre Xueju Xie à l’audience. La Dre Xueju Xie a fourni des renseignements et formulé des commentaires quant au contexte dans lequel s’inscrivait le contenu des déclarations présentées pendant le traitement de la demande, renseignements qu’elle estimait pertinents du point de vue de l’inventivité de l’invention revendiquée. S’agissant du contenu de la Déclaration-1, la Dre Xueju Xie a commenté les résultats présentés dans un tableau résumant les temps de sommeil observés chez différents groupes de souris ayant reçu de l’eau distillée, un tranquillisant et relaxant musculaire ou différentes combinaisons d’extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube. La Dre Xueju Xie a insisté sur la valeur P plus faible qui est présentée dans le tableau pour une dose spécifique de la combinaison d’extraits de graines de Platycladus orientalis et de racines de Polygala spp. et a laissé entendre qu’il était surprenant que seule cette dose spécifique de cette combinaison spécifique d’extraits végétaux soit associée à une faible valeur P (P<0,001 contre P<0,05 pour certaines doses des autres combinaisons d’extraits végétaux). Selon notre compréhension, la valeur P indique la probabilité de constater une différence entre le temps de sommeil du groupe témoin et le temps de sommeil de chacun des groupes ayant reçu les combinaisons d’extraits végétaux, qui soit plus importante que la différence attribuable au pur hasard que l’on s’attendrait à observer. Cependant, nous sommes d’avis que la valeur P n’indique pas la magnitude de la différence entre les temps de sommeil. À titre d’exemple, selon la taille de l’échantillon et les variations du temps de sommeil à l’intérieur d’un groupe donné, une différence entre le temps de sommeil du groupe témoin et celui du groupe testé peut-être statistiquement très significative (p. ex., P<0,001), mais néanmoins insignifiante en ce qui concerne l’effet concret (p. ex., temps de sommeil de 40 minutes au lieu de 39 minutes).

 

[92]      Les données présentées dans le tableau de la Déclaration-1 et les données comparables présentées dans le Tableau 1 de la présente demande montrent que certaines doses des combinaisons d’extraits végétaux testées ont eu des effets similaires en ce qui concerne l’accroissement du temps de sommeil et que certains des effets observés pour chacune des combinaisons d’extraits végétaux testées ne sont vraisemblablement pas dus au hasard, à différents niveaux de signification statistique. À notre avis, la PVA n’aurait pas perçu comme particulièrement surprenant l’effet déclaré de la combinaison d’extraits de graines de Platycladus orientalis et de racines de Polygala spp. sur le temps de sommeil comparativement à l’effet des autres combinaisons d’extraits végétaux présentées dans le tableau de la Déclaration-1 et le Tableau 1 de la présente demande. En ce qui concerne les doses spécifiques, nous soulignons que les revendications au dossier ne comprennent aucune limitation quant à une dose prédéterminée, car les revendications les plus larges prévoient simplement des [Traduction] « quantités thérapeutiquement efficaces pour la modulation des troubles physiologiques du sommeil ». Étant donné que le mémoire descriptif ne contient aucun enseignement quant à ce que [Traduction] « quantités thérapeutiquement efficaces » des extraits mentionnés pourraient vraisemblablement signifier dans le cas d’un sujet humain souffrant d’insomnie, nous considérons que le mémoire descriptif laisse à la PVA le soin de déterminer la dose appropriée à la lumière de ses CGC.

 

[93]      Enfin, à l’audience, la Dre Xueju Xie a également fait valoir que la Déclaration-3 fournit la preuve qu’un effet synergique est associé à la combinaison d’extraits de graines de Platycladus orientalis et de racines Polygala spp., à la combinaison d’extraits de graines de Platycladus orientalis et de graines de Zizyphus jujube, et à la combinaison d’extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube. Pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus, les observations de la Dre Xueju Xie ne modifient pas notre opinion quant à ce que la PVA considérerait comme étant le concept inventif des revendications en cause d’après l’information contenue dans le présent mémoire descriptif et, nous sommes d’avis, comme nous l’avons déjà indiqué, que le concept inventif des revendications n’inclut pas d’effet synergique.

 

Revendications dépendantes

[94]      Dans la Lettre du comité, à la page 21, nous exprimons l’opinion préliminaire que les revendications dépendantes 3 à 15 et 17 à 26 des revendications au dossier sont également évidente à la lumière de l’état de la technique. Les revendications dépendantes 3 à 6, 9 à 12, 21, 22 et 24 à 26 auraient été évidentes pour la PVA à la date de revendication pour les raisons exposées précédemment relativement aux revendications indépendantes 1, 2 et 16. En ce qui concerne les revendications dépendantes 7, 8, 13 à 15, 17 à 20 et 23, nous indiquons à la page 22 de la même lettre qu’il n’est fait mention dans le mémoire descriptif d’aucun effet inattendu ou surprenant associé à une forme posologique spécifique, à un ratio spécifique entre la quantité d’extrait de Polygala spp. et celle d’extrait de Platycladus orientalis, à l’utilisation d’un solvant spécifique autre que l’eau ou à l’ajout d’une étape d’assèchement, et que les revendications 14 et 15 ne font qu’énoncer de nouveau ou définir davantage l’utilisation de la composition déjà mentionnée dans les revendications indépendantes 1 et 2.

 

[95]      Dans sa Réponse à la Lettre du comité et à l’audience, le demandeur n’a pas présenté d’observations ou d’arguments portant spécifiquement sur l’inventivité de ces revendications dépendantes, en dehors des arguments présentés relativement aux revendications indépendantes.

 

Conclusion quant à l’évidence

 

[96]      Nous sommes d’avis, pour les raisons présentées dans la Lettre du comité et pour celles exposées ci-dessus, que l’objet défini par les revendications au dossier aurait été évident pour la PVA à la lumière de l’état de la technique décrit ci-dessus et que, par conséquent, les revendications au dossier ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

 

3.      Absence d’utilité des revendications au dossier (article 2 de la Loi sur les brevets)

 

[97]      Dans la Lettre du comité, aux pages 26 à 28, nous avons évalué les éléments pertinents du critère de la prédiction valable du point de vue de la PVA et avons indiqué pour quelles raisons, à notre avis, la PVA n’aurait pas valablement prédit que des compositions contenant des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube ou obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau atténueraient les troubles du sommeil, y compris l’insomnie. En résumé, nous avons exprimé l’opinion suivante :

 

         le fondement factuel pertinent, exposé dans la description ou faisant partie des CGC, n’établit pas dans les faits ni même ne donne à penser que les composés actifs des compositions testées qui sont efficaces pour prolonger le temps de sommeil sont également présents dans des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube ou dans des extraits obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau;

 

         l’existence d’un raisonnement valable n’aurait pas été manifeste aux yeux de la PVA parce que cette dernière, après considération du fondement factuel, n’aurait pas su si le ou les composés actifs nécessaires et leurs propriétés correspondantes étaient présents ou si l’on pouvait s’attendre à ce qu’ils soient présents dans les extraits produits à partir d’autres constituants végétaux ou obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau.

 

[98]      Le demandeur n’a exprimé aucun désaccord avec ces évaluations spécifiques du fondement factuel et du raisonnement, mais a fait valoir, aux pages 32 et 33 de sa Réponse à la Lettre du comité, qu’en tout état de cause, les limitations introduites dans l’Ensemble de revendications proposées-3 remédient aux problèmes susmentionnés.

 

[99]      Nous examinerons les revendications proposées plus en détail ci-dessous, mais d’emblée nous soulignons que les revendications 40 à 55 de l’Ensemble de revendications proposées-3 ne comportent aucune limitation quant au solvant utilisé. Lorsqu’à l’audience, nous avons expressément fait part de cette observation au demandeur, ce dernier a essentiellement fait valoir qu’une telle limitation en ce qui concerne le solvant peut être facilement contournée par les contrefacteurs potentiels, mais n’a pas présenté d’arguments précis à savoir pourquoi les propriétés observées prolongeant le sommeil qui sont associées aux compositions constituées d’extraits obtenus au moyen d’un solvant aqueux pouvaient être extrapolées aux compositions constituées d’extraits obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau.

 

[100]  Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, le demandeur dans sa Réponse à la Lettre du comité et à l’audience n’a pas présenté d’arguments précis quant à la validité de la prédiction selon laquelle ces compositions contenant des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube ou obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau seraient efficaces pour atténuer l’insomnie. Dans sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur affirme cependant ce qui suit, à la page 13 [Traduction] :

 

Le demandeur soumet respectueusement que la présente demande satisfait à l’exigence de l’« utilité » dans le contexte de la pratique et du droit canadiens, au moins pour les raisons suivantes : i) aucune promesse n’est faite quant à un résultat précis et, par conséquent, aucun niveau d’utilité spécifique n’est requis; et ii) des données antérieures au dépôt concernant l’administration des compositions revendiquées à des humains souffrant de troubles du sommeil sont disponibles et ont été fournies à titre de preuve pendant le traitement de la demande. Le demandeur soumet également que : iii) l’invention ne concerne pas une « nouvelle utilisation », de sorte que le critère de la « prédiction valable » ne devrait pas être appliqué en l’espèce; et iv) le demandeur n’a pas l’obligation de divulguer les effets synergiques des compositions revendiquées dans la divulgation.

 

[101]  Nous examinerons chacun des arguments du demandeur successivement.

 

i) aucune promesse n’est faite quant à un résultat précis et, par conséquent, aucun niveau d’utilité spécifique n’est requis

 

[102]  Dans la Lettre du comité, après examen des revendications indépendantes 1, 2 et 16 au dossier, nous avons exprimé l’opinion que ces revendications exposent d’une façon manifeste et non ambiguë l’utilité alléguée des compositions mentionnées et que nous interprétons l’utilité alléguée des compositions mentionnées comme tenant à l’efficacité de ces dernières pour la modulation des troubles physiologiques du sommeil. Nous avons également indiqué qu’à notre avis, l’expression [Traduction] « pour la modulation » inclut au moins l’atténuation d’un trouble physiologique du sommeil.

 

[103]  Dans sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur semble être en désaccord avec ce point; il soutient essentiellement, aux pages 13 à 15, qu’aucune promesse n’est faite dans la présente demande quant à un résultat précis et que, par conséquent, aucun niveau d’utilité spécifique n’est requis. Le demandeur ne traite pas du libellé des revendications, il invoque plutôt différents passages de la description (lignes 8 à 10 de la page 1 lues conjointement avec les lignes 1 à 3 de la page 3) à l’appui de sa théorie selon laquelle la modulation des troubles physiologiques du sommeil n’est pas une promesse, mais un objectif ou un résultat espéré.

 

[104]  En toute déférence, nous ne sommes pas d’accord. Lorsqu’un résultat est allégué dans les revendications, ce résultat sera généralement perçu comme une promesse d’utilité (voir Apotex Inc. c. Pfizer Canada Inc., 2014 CAF 250, au par. 71). Nous répétons que nous considérons que les revendications indépendantes 1, 2 et 16 au dossier énoncent explicitement l’utilité alléguée de la composition mentionnée. Les revendications 1, 2 et 16 font toutes mention d’une [Traduction] « composition pour la modulation des troubles physiologiques du sommeil ».

 

[105]  En outre, les passages de la description cités par le demandeur n’appuient pas sa théorie voulant que la modulation des troubles physiologiques du sommeil ne soit pas une utilité alléguée, mais un objectif ou un résultat espéré.

 

[106]  Le premier passage, qui se trouve à la page 1 de la description, aux lignes 8 à 10, est libellé comme suit [Traduction] :

 

Les troubles du sommeil peuvent inclure les dyssomnies, l’insomnie, les troubles du sommeil liés au rythme circadien, l’hypersomnie et les parasomnies.

 

[107]  À la page 15 de sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur affirme, à l’égard du passage susmentionné, que l’emploi du mot [Traduction] « peuvent » indique qu’il ne s’agit pas d’une promesse, mais bien d’un objectif ou d’un résultat espéré. Nous considérons que le mot [Traduction] « peuvent » se rapporte uniquement à ce que l’expression « troubles du sommeil » signifie dans le contexte de la présente demande et ne renseigne pas la PVA à savoir si la modulation des troubles physiologiques du sommeil est une promesse d’un résultat précis ou simplement un objectif ou un résultat espéré.

 

[108]  Le deuxième passage cité par le demandeur se trouve à la page 3 de la description, aux lignes 1 à 3, et est libellé comme suit [Traduction] :

 

De façon surprenante, il est apparu que les compositions constituées uniquement d’un extrait de Baiziren ou d’un extrait de Baiziren combiné à un extrait de Yuanzhi et/ou de Suanzaoren sont utiles pour la modulation des troubles du sommeil, p. ex., l’insomnie. [soulignement ajouté]

 

[109]  Nous considérons que le passage précité contient une formulation claire et non ambiguë quant à l’utilité alléguée des compositions mentionnées, et que cette formulation concorde avec le libellé des revendications et qu’elle est du même genre que celle identifiée dans Eli Lilly Canada Inc. c. Hospira Healthcare Corporation, 2016 CF 47, au par. 31 (« Lilly ») [Traduction] :

 

L’argument de Lilly selon lequel la promesse du brevet est limitée à la simple exigence d’une activité cytotoxique in vitro mesurable est intenable parce qu’il ne tient pas compte d’un langage clair et sans ambiguïté dans la description de l’utilité et, en particulier, la phrase d’ouverture :

 

La présente invention concerne les nouveaux dérivés de pyrrolopyrimidine, qui sont utiles comme agents antitumoraux, ainsi que la production et l’utilisation de ceux-ci. [souligné dans l’original]

 

[110]  Comme nous l’avons mentionné au paragraphe [46] ci-dessus, aux pages 14 et 15 de sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur soutient à titre subsidiaire que [Traduction] « la présente demande peut, au mieux, être interprétée uniquement comme promettant un traitement pour l’insomnie ».

 

[111]  Bien que nous ne soyons pas du même avis que le demandeur en ce qui concerne la signification exacte de l’expression « troubles du sommeil » et la question de savoir si cette expression se limite à l’insomnie dans le contexte des revendications au dossier (voir le paragraphe [47] ci-dessus), nous convenons néanmoins avec le demandeur que l’utilité alléguée des compositions mentionnées inclut le fait que les compositions visées par les revendications sont efficaces pour atténuer l’insomnie. Nous avons déjà considéré cette interprétation limitée dans le cadre de notre analyse préliminaire des revendications dépendantes 6 et 15 qui définissent expressément l’insomnie comme l’un des troubles du sommeil envisagés et avons exprimé l’opinion que ces revendications dépendantes sont dépourvues d’utilité pour des raisons qui sont communes à toutes les revendications au dossier, indépendamment de la nature exacte du trouble du sommeil à atténuer.

 

ii) des données antérieures au dépôt concernant l’administration des compositions revendiquées à des humains souffrant de troubles du sommeil sont disponibles et ont été fournies à titre de preuve pendant le traitement de la demande.

[112]  Aux pages 15 et 16 de sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur soutient que les résultats présentés dans la Déclaration-3 et les résultats fournis dans le cadre de l’Exemple 3 de la présente demande démontrent que les compositions revendiquées sont utiles pour atténuer l’insomnie.

 

[113]  Notre opinion préliminaire sur l’absence d’utilité des revendications 1 à 26 des revendications au dossier était fondée sur le constat que les revendications au dossier englobent des compositions contenant des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube (revendications 1 à 26) ou obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau (revendications 1 à 15).

 

[114]  Les résultats divulgués dans la présente demande et les résultats divulgués dans la Déclaration-3 ont été obtenus à partir de compositions constituées d’extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et/ou de graines de Zizyphus jujube. De plus, les compositions données comme exemples dans la demande ont été obtenues à partir d’extraits aqueux chauffés alors que la Déclaration-3 ne divulgue pas la méthode utilisée pour produire les différents extraits végétaux. Par conséquent, en toute déférence, nous ne partageons pas l’avis du demandeur selon lequel les résultats présentés dans la Déclaration-3 et les résultats fournis dans le cadre de l’Exemple 3 de la présente demande démontrent que toutes les compositions visées par les revendications au dossier sont utiles.

 

iii) l’invention ne concerne pas une « nouvelle utilisation », de sorte que le critère de la « prédiction valable » ne devrait pas être appliqué en l’espèce

[115]  Aux pages 16 et 17 de sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur soutient que la règle de la « prédiction valable » intervient dans l’analyse de l’utilité uniquement [Traduction] « lorsque la nouvelle utilisation est l’élément essentiel de l’invention », citant AZT, aux par. 2, 23, 48, 56 et 82, et Astrazeneca Canada Inc. et al. c. Apotex Inc., 2014 CF 638, aux par. 140 à 142 (« Astrazeneca ») à l’appui de sa prétention. Le demandeur soutient en outre que, puisque les compositions revendiquées dans la présente demande ne sont pas [Traduction] « une nouvelle utilisation d’un produit déjà connu », la règle de la prédiction valable ne s’applique pas pour déterminer l’utilité des compositions revendiquées dans la présente demande et que l’analyse que nous avons présentée aux pages 25 à 28 de la Lettre du comité ne s’applique pas pour déterminer si les compositions revendiquées présentent ou non le caractère de l’utilité.

 

[116]  En toute déférence, nous ne souscrivons à aucune de ces deux prétentions. Premièrement, même si, dans AZT, les principes de la règle de la prédiction valable ont été appliqués dans le contexte d’une nouvelle utilisation d’un composé chimique déjà connu, nous n’interprétons pas AZT comme limitant l’application de la règle de la prédiction valable au seul contexte d’une « nouvelle utilisation d’un produit déjà connu », comme le prétend le demandeur. L’exigence de l’utilité énoncée à l’article 2 de la Loi sur les brevets est la même pour tous les types d’inventions. À son niveau le plus élémentaire, l’idée générale est que, à la date de dépôt, l’utilité de l’invention revendiquée doit déjà avoir été démontrée ou, à défaut, doit faire l’objet une prédiction valable fondée sur le mémoire descriptif et les CGC au moment de cette prévision.

 

[117]  Les principes de la prédiction valable établis dans AZT ont depuis été appliqués à de nombreuses reprises par les tribunaux fédéraux dans des contextes autres que celui d’une invention de type « nouvelle utilisation d’un produit déjà connu », y compris un nouveau train d’atterrissage (voir Eurocopter), un nouveau composé (voir, par exemple, Lilly), une nouvelle formulation d’un composé déjà connu (voir, par exemple, Allergan Inc. c. Apotex Inc., 2016 CF 344 (« Allergan »)) et une nouvelle composition constituée de deux composés déjà connus (voir, par exemple, Leo Pharma Inc. c. Teva Canada Limited, 2015 CF 1237).

 

[118]  En ce qui concerne la décision rendue dans Astrazeneca que le demandeur cite à l’appui de son interprétation d’AZT, nous comprenons que le juge Rennie, aux paragraphes 140 à 142 de cette décision, s’est exprimé sur la signification qu’il convient de donner à l’élément « divulgation suffisante » du critère de la prédiction valable établi dans AZT, mais il a néanmoins reconnu la pertinence du critère de la prédiction valable et appliqué ce critère dans le contexte de revendications visant un nouveau composé. En d’autres termes, il a indiqué qu’il n’était pas nécessaire que le fondement factuel d’une prédiction valable de l’utilité soit divulgué dans le brevet lui-même, excepté dans le cas des brevets portant sur une nouvelle utilisation. Par conséquent, nous ne sommes pas disposés à admettre que Astrazeneca appuie la théorie selon laquelle la règle de la prédiction valable ne doit intervenir dans l’analyse de l’utilité que dans le cas des inventions de type « nouvelle utilisation d’un composé déjà connu ».

 

[119]  En tout état de cause, le demandeur n’a pas indiqué l’existence d’un fondement factuel extérieur à la demande de brevet qui, à la date du dépôt, venait appuyer la prédiction selon laquelle des compositions contenant des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube ou obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau seraient efficaces pour atténuer l’insomnie, et nous n’avons pas connaissance de l’existence d’un tel fondement. Par conséquent, le fait d’adopter l’interprétation qu’a faite le juge Rennie de l’élément « divulgation suffisante » du critère de la prédiction valable n’aurait en rien modifié les opinions que nous avons exprimées en ce qui concerne le fondement factuel et le raisonnement, soit les deux éléments du critère de la prédiction valable qui étaient déterminants quant aux conclusions que nous avons formulées.

 

iv) le demandeur n’a pas l’obligation de divulguer les effets synergiques des compositions revendiquées dans la divulgation

[120]  À la page 19 de sa Réponse à la Lettre du comité, le demandeur soutient essentiellement que [Traduction] « les "effets synergiques" de la combinaison des extraits végétaux ont été démontrés avant la date de dépôt de la présente demande (voir, par exemple, la Déclaration-3) » et que [Traduction] « il n’y a encore aucune obligation dans le contexte de la pratique ou du droit des brevets au Canada de divulguer une preuve d’une telle synergie dans la demande de brevet elle-même ».

 

[121]  Comme nous l’avons expliqué aux paragraphes [50] ci-dessus et indiqué à la page 26 de la Lettre du comité, nous ne considérons pas que l’utilité alléguée comprend un effet synergique.

 

[122]  Nous soulignons également l’absence de tout élément de preuve au dossier, dans une déclaration ou dans la demande elle-même démontrant ou apportant la preuve qu’un effet synergique est associé aux compositions contenant des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube ou obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau, c’est-à-dire à l’objet revendiqué en cause au regard de l’irrégularité liée à l’absence d’utilité. Les résultats divulgués dans la Déclaration-3 ont été obtenus à partir de compositions constituées d’extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et/ou de graines de Zizyphus jujube et la Déclaration-3 ne divulgue pas le solvant utilisé pour produire les différents extraits végétaux. Par conséquent, en toute déférence, nous ne partageons pas l’avis du demandeur selon lequel les résultats présentés dans la Déclaration-3 de la présente demande démontrent l’utilité de l’objet revendiqué en cause au regard de l’irrégularité liée à l’absence d’utilité. En conséquence, nous estimons qu’il n’est pas nécessaire que nous examinions cet argument spécifique plus avant.

 

Conclusion quant à l’absence d’utilité

 

[123]  Nous maintenons l’opinion que nous avons exprimée à la page 28 de la Lettre du comité, à savoir que la PVA n’aurait pas valablement prédit que des compositions contenant des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube (revendications 1 à 26) ou obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau (revendications 1 à 15) atténuerait l’insomnie, pour les raisons présentées dans la Lettre du comité et pour les raisons exposées ci-dessus.

 

[124]  En conséquence, nous concluons que les revendications 1 à 26 au dossier sont dépourvues d’utilité et ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 

 

Analyse des revendications proposées

 

[125]  Étant donné que nous considérons que les revendications au dossier sont non brevetables en raison de leur évidence et de leur absence d’utilité, nous examinerons l’Ensemble de revendications proposées-3 présenté le 21 novembre 2016 conjointement avec la Réponse à la Lettre du comité, lequel comprend toutes les modifications proposées postérieurement à la DF puisqu’il est constitué des revendications 1 à 21 et 23 à 26 des revendications au dossier, de la revendication 22 de l’Ensemble de revendications proposées-1, des revendications 27 à 39 de l’Ensemble de revendications proposées-2 et des nouvelles revendications 40 à 55.

 

[126]  La seule différence significative entre l’Ensemble de revendications proposées-3 et les revendications correspondantes des revendications au dossier est que la portée de certaines des revendications indépendantes proposées (revendications 27 à 55) est restreinte par des caractéristiques déjà incluses dans les revendications dépendantes au dossier. Les revendications indépendantes de l’Ensemble de revendications proposées-3 qui ont les portées les plus restreintes sont les revendications 40, 41, 45, 52 et 55 qui font mention d’un trouble du sommeil précis (c.-à-d. l’insomnie), des extraits de constituants végétaux spécifiques (c.-à-d. des extraits de graines de Platycladus orientalis, d’extraits de racines de Polygala spp. et des extraits de graines de Zizyphus jujube) ainsi que d’un ratio spécifique entre la quantité d’extrait de Polygala spp. et celle d’extrait de Platycladus orientalis (c.-à-d. un ratio se situant entre 1:1 et 2,48:1).

 

Évidence

 

[127]  Comme nous l’avons indiqué, nous avons sommes d’avis que, eu égard au traitement de l’insomnie et aux extraits aqueux de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube, les revendications au dossier sont évidentes à la lumière de l’état de la technique pour les raisons exposées ci-dessus. En outre, nous avons exprimé l’opinion que la PVA n’aurait pas considéré qu’une activité inventive était requise pour utiliser des quantités d’extraits de Polygala spp. et de Platycladus orientalis selon un ratio compris entre 1:1 et 2,48:1 dans des compositions destinées à atténuer l’insomnie et qu’il n’y a aucune preuve d’un effet inattendu ou surprenant associé à l’un quelconque des ratios compris dans cette gamme. Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, dans sa Réponse à la Lettre du comité comme à l’audience, le demandeur n’a pas présenté d’observations ou d’arguments portant spécifiquement sur l’inventivité de la gamme de ratios mentionnée.

 

[128]  Étant donné que l’Ensemble de revendications proposées-3 vise uniquement un objet que nous avons déjà jugé évident au regard des revendications au dossier, nous sommes d’avis que l’objet des revendications 1 à 55 de l’Ensemble de revendications proposées-3 aurait été évident pour la PVA à la date de revendication pour les raisons exposées précédemment.

 

 

Absence d’utilité

 

[129]  Comme nous l’avons indiqué, nous sommes d’avis que la PVA n’aurait pas valablement prédit que des compositions contenant des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube ou obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau auraient atténué l’insomnie.

 

[130]  Les revendications 1 à 27, 29, 31 à 36 et 38 de l’Ensemble de revendications proposées-3 visent toutes des compositions pour le traitement de l’insomnie contenant des extraits de constituants végétaux autres que des extraits de graines de Platycladus orientalis, de racines de Polygala spp. et de graines de Zizyphus jujube.

 

[131]  Les revendications 1 à 12, 14, 15, 27 à 43 et 52 à 55 de l’Ensemble de revendications proposées-3 visent toutes des compositions pour le traitement de l’insomnie contenant des extraits obtenus au moyen d’un solvant autre qu’un solvant contenant de l’eau.

 

[132]  En conséquence, nous sommes d’avis que les revendications 1 à 43 et 52 à 55 de l’Ensemble de revendications proposées-3 sont dépourvues d’utilité et ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 

 

Conclusions

 

[133]  Nous sommes d’avis que les revendications au dossier ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets et ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 

[134]  Les revendications 1 à 55, telles qu’elles sont proposées dans la lettre du 21 novembre 2016, ne changent en rien notre opinion quant à l’évidence des revendications au dossier, et les revendications 1 à 43 et 52 à 55 ne changent en rien notre opinion quant à l’absence d’utilité des revendications au dossier.

 


 

Recommandation de la Commission

 

[135]  Le comité recommande que la demande soit rejetée parce que les revendications au dossier ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets et ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 

[136]  De plus, les modifications proposées ne remédient pas aux irrégularités et, par conséquent, ne constituent pas des modifications déterminées qui sont « nécessaires » en vertu du paragraphe 30(6.3) des Règles sur les brevets.

 

 

 

 

 

 

 

 

Marcel Brisebois                                Ed MacLaurin                                 Andrew Strong

Membre                                                  Membre                                              Membre

 

 


 

Décision du commissaire

 

[137]  Je souscris aux conclusions de la Commission ainsi qu’à sa recommandation de rejeter la demande parce que les revendications au dossier ne sont pas conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets et ne sont pas conformes à l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 

[138]  En conséquence, je refuse d’octroyer un brevet relativement à la présente demande. Conformément à l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.

 

 

 

 

 

 

Johanne Bélisle

Commissaire aux brevets

Fait à Gatineau (Québec),

en ce 23e jour de février 2017

 



[1] Dans sa forme la plus simple, le principe de la différenciation des revendications prévoit qu’une limitation contenue dans une revendication dépendante ne peut pas être considérée comme faisant partie d’une revendication indépendante (voir Halford c. Seek Hawk Inc., 2004 CF 88, au par. 93 (conf. par 2006 CAF 275).

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