Brevets

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Décision du commissaire no 1382

Commissioner’s Decision #1382

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJETS : O-00, A-11, G-00

TOPICS : O-00, A-11, G-00

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Demande no 2 655 473

Application No : 2,655,473

 

 


 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 

 

 

 

                Ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets, la demande de brevet numéro 2 655 473 a donc fait l’objet d’une révision, conformément aux dispositions du paragraphe 30(6)c) des Règles sur les brevets. La recommandation de la Commission et la décision suivent ci-dessous.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Agent du demandeur

 

SMART & BIGGAR

55 rue Metcalfe, Suite 900

Ottawa (Ontario)  K1P 5Y6


INTRODUCTION

 

[1]               Cette décision porte sur l’examen du refus de la demande de brevet numéro 2 655 473, intitulée « Détermination de code de famille utilisant marque et sous-marque », déposée le 14 juin 2007. Le demandeur et l’inventeur sont J. Michels. La demande concerne l’amélioration de la génération de codes à barres sur les coupons pour la vente au détail.

 

[2]               La demande a été portée devant la Commission d’appel des brevets au motif qu’elle n’est pas conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets du fait qu’elle est évidente, que le nouvel objet n’est pas admissible et qu’il y a manque d’utilité.

[3]               Pour les raisons exposées ci-dessous, nous recommandons que cette demande soit rejetée.

 

CONTEXTE

[4]               La demande concerne le domaine des codes à barres lisibles par machine, plus particulièrement, la création d’un code à barres lisible par machine destiné à être utilisé sur des coupons pour la vente au détail. Les coupons sont généralement échangés par les consommateurs lors d’une transaction de vente au détail dans le but de recevoir un rabais ou de profiter d’un prix spécial sur des produits achetés. Les codes à barres qui apparaissent sur les coupons permettent le balayage efficace au terminal de point de vente, puisque les données des coupons, comme l’information sur le produit et la valeur du coupon, y sont encodées.

[5]               Le format des codes à barres imprimés sur les coupons est normalisé et contient plusieurs champs. Un format commun est fondé sur code uniforme de produit (CUP), mis au point par l’Uniform Code Council (UCC, connu sous le nom GS1). Comme on peut le voir dans l’image ci-contre (adaptée de la figure 1 du « UPC Coupon Code Guidelines Manual » de l’UCC, 1994), le code à barres CUP du coupon est un code numérique de 12 chiffres contenant : un système de caractère de numérisation à un chiffre, où 5 indique que le code à barres signifie qu’il s’agit d’un coupon; l’identificateur du fabricant à 5 chiffres (aussi appelé le préfixe de l’entreprise); un code de famille à 3 chiffres pour identifier le produit ou la famille de produits visés par le code à barres; un code de valeur à 2 chiffres qui désigne la valeur de remise; et finalement, un total de contrôle à un chiffre pour vérifier l’exactitude des 11 chiffres précédents.

[6]               Les codes de famille sont utilisés de pair avec l’ID du fabricant pour confirmer que le consommateur a acheté un produit pour lequel le coupon est valide. Un code de famille est assigné à chaque produit pouvant être visé par un coupon. Le choix des codes de famille peut être difficile et fastidieux, puisque le plus souvent, les fabricants vendent diverses marques, sous-marques et différents produits, dans de nombreuses combinaisons de tailles, couleurs, saveurs, etc.

[7]               La demande décrit une méthode et un système pour la génération d’un code à barres destiné à être utilisé sur un coupon, y compris un élément de création d’un code de famille pour intégrer les critères relatifs au coupon et au produit fournis par l’utilisateur et ainsi suggérer un code de famille de coupon fondé sur les données relatives au produit, à la marque ou à la sous-marque et comportant au moins un ensemble sélectionné de produits choisis en fonction de leur nom. Grâce à la génération automatique d’un code de famille suggéré pour un groupe de produits, le nombre d’erreurs qui surviennent dans le processus de génération de coupons est réduit, et il n’est plus nécessaire que les utilisateurs du système détiennent une connaissance détaillée de chaque code de famille pour l’ensemble des produits.  

HISTORIQUE DU TRAITEMENT DE LA DEMANDE

[8]               Le 17 janvier 2013, une décision finale a été envoyée au demandeur dans laquelle ce dernier était avisé du refus de la demande sur le fondement de deux motifs : l’évidence et le manque d’utilité. Comme la réponse du demandeur à la décision finale n’a pas permis de remédier aux irrégularités, la demande refusée a été transmise à la Commission d’appel des brevets (« la Commission »), accompagnée d’un résumé des motifs pour lesquels la demande est considérée comme non conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets. Le résumé des motifs maintient le refus de la demande, sur la base de l’évidence et du manque d’utilité, et relève une nouvelle irrégularité, indiquant que les modifications apportées aux revendications, soumises en réponse à la décision finale, introduisent un nouvel objet inadmissible. 

[9]               La réponse écrite du demandeur au résumé des motifs du 10 octobre 2013 a fourni d’autres arguments au sujet des trois irrégularités non corrigées, et comportait deux ensembles de revendications proposées (annexe B et annexe C) aux fins d’examen par la Commission.

[10]           Ce comité a procédé à l’examen initial de la demande et, dans une lettre datée du 23 avril 2014, a invité le demandeur à répondre à plusieurs observations préliminaires concernant l’interprétation téléologique et l’évidence.

[11]           Le comité a également précisé que les revendications 1 à 6 proposées, lesquelles figurent à l’annexe B, seraient considérées, si nécessaire, comme remédiant aux irrégularités décelées, mais que ce ne serait pas le cas pour les revendications 1 à 27 qui figurent à l’annexe C, puisqu’elles sont clairement incompatibles avec les revendications actuelles et qu’elles ne sont pas accompagnées d’une explication quant à la manière dont elles permettent de remédier aux irrégularités décelées. Le demandeur a été invité à répondre à notre lettre et à fournir un autre ensemble de revendications proposées, si désiré.

[12]           Dans une lettre datée du 2 juin 2014, le demandeur a informé le comité qu’aucune autre observation ne serait fournie et l’offre du comité concernant la tenue d’une audience a été refusée. Le demandeur a demandé que l’examen fait par le comité soit fondé sur le dossier écrit.

[13]           Par conséquent, cet examen est fondé sur les revendications 1 à 6 soumises en réponse à la décision finale (« revendications au dossier »). Comme il a été déterminé dans le cadre de l’examen qu’aucune des revendications au dossier n’est conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets, cet examen tient aussi compte des revendications 1 à 6 de l’annexe B, soumises en réponse au résumé des motifs (« les revendications proposées »).

QUESTIONS

[14]           Trois questions issues du résumé des motifs doivent être tranchées par le comité : l’évidence, l’utilité et le nouvel objet. À la suite de notre examen, il a été établi que les revendications 1 à 6 au dossier ne manquent pas d’utilité et que leur modification n’introduit aucun nouvel objet inadmissible. Par conséquent, le comité n’a plus qu’une seule question déterminante à trancher concernant cette recommandation : les revendications 1 à 6 au dossier sont-elles évidentes et, donc, non conformes aux exigences de l’article 28.3 de la Loi sur les brevets?

[15]           Cependant, par souci d’exhaustivité, cette recommandation contiendra un sommaire du raisonnement du comité au sujet des autres questions que sont le nouvel objet et l’utilité, à la suite de notre analyse de la question de l’évidence. 

 

PRINCIPES JURIDIQUES

Interprétation des revendications

[16]           Dans la foulée de la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans Canada (Procureur général) c Amazon.com Inc, 2011 CAF 328 [Amazon], le Bureau a publié deux avis qui clarifient la pratique d’examen et l’approche du Bureau en ce qui concerne l’interprétation téléologique (PN2013-02) et les inventions mises en œuvre par ordinateur (PN2013-03), à la lumière de la jurisprudence canadienne pertinente. Ces avis sont tous deux cités dans la lettre qui a fait suite à notre examen initial.

[17]           L’interprétation téléologique d’une demande de brevet vise à déterminer la signification des termes employés dans les revendications et les éléments qui sont essentiels au fonctionnement de l’invention. L’interprétation téléologique est réalisée du point de vue de la personne versée dans l’art et implique d’envisager le mémoire descriptif dans son ensemble à la lumière des connaissances générales courantes, y compris une compréhension du problème et de la solution visés par la demande. Tel qu’il est indiqué dans l’avis PN2013-02, il est admis également [traduction] « qu’une invention brevetable est une solution ingénieuse à un problème concret » et [traduction] « qu’une invention doit être divulguée (et ultimement revendiquée) de façon à fournir à la personne versée dans l’art une solution qui fonctionne ». Une fois précisée, la solution éclaire la détermination des éléments qui sont essentiels à l’invention revendiquée. L’avis PN 2013-02 indique également que [traduction] « tous les éléments qui ont un effet concret sur le fonctionnement d’une réalisation donnée ne sont pas nécessairement essentiels au fonctionnement de l’invention ».

Évidence

[18]           L’article 28.3 de la Loi sur les brevets porte que l’objet que définit une revendication ne doit pas être un objet qui aurait été évident, à la date de la revendication, pour une personne versée dans l’art ou la science dont il relève, eu égard à certaines informations :

L’objet que définit la revendication d’une demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans l’art ou la science dont relève l’objet, eu égard à toute communication :

 

(a)    qui a été faite, plus d’un an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui l’information à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

(b)   qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle qu’elle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

[19]           Une démarche en quatre étapes pour évaluer l’évidence a été établie par la Cour suprême dans Apotex Inc c Sanofi-Synthelabo Inc, 2008 CSC 61 [Sanofi]; cette démarche est la suivante :

1. a)       Identifier la personne fictive versée dans l’art;

   b)      Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

2.            Définir l’idée originale de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation;

3.            Recenser les différences, s’il en est, entre ce qui ferait partie de « l’état de la technique » et l’idée originale qui soustend la revendication ou son interprétation;

4.            Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

Nouvel objet

[20]           Les conditions auxquelles des modifications peuvent être apportées au mémoire descriptif d’un brevet sont énoncées au paragraphe 38.2(2) de la Loi sur les brevets, lequel est libellé comme suit :

Le mémoire descriptif ne peut être modifié pour décrire des éléments qui ne peuvent raisonnablement s’inférer de celui-ci ou des dessins faisant partie de la demande, sauf dans la mesure où il est mentionné dans le mémoire qu’il s’agit d’une invention ou découverte antérieure.

[21]           La Loi exige donc que toute modification puisse « raisonnablement s’inférer » du mémoire descriptif ou des dessins produits au départ. Comme l’inférence est admissible, il n’est pas nécessaire de trouver une référence explicite à l’objet supplémentaire dans le mémoire descriptif.

[22]           L’évaluation du nouvel objet a été récemment abordée par la Commission dans Objet : Demande no 2 313 707 (2013), C.D. 1353. Cette décision réitère le fait que l’évaluation se fait du point de vue de la personne versée dans l’art qui possède les CGC pertinentes au moment du dépôt du mémoire descriptif original.

Utilité

[23]           L’article 2 de la Loi sur les brevets définit le mot « invention » de la manière suivante :

« invention » Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de l’un d’eux, présentant le caractère de la nouveauté et de l’utilité.

[24]           Une invention doit donc être utile : l’utilité au sens de la Loi sur les brevets peut être considérée comme une exigence pour qu’une invention soit opérationnelle, contrôlable et reproductible (voir le Recueil des pratiques du Bureau des brevets [RPBB] à la section 12.08.01). 

[25]           La condition exigeant de l’invention qu’elle soit opérationnelle indique seulement que l’invention doit fonctionner pour le but recherché. Comme l’a fait remarqué la Cour suprême du Canada dans Consolboard Inc c MacMillan Bloedel (Saskatchewan) Ltd, [1981] 56 CPR (2d) 145 (SCC) à la p 160, il y a manque d’utilité lorsque [traduction] « l’invention ne fonctionnera pas, dans le sens qu’elle ne produira rien du tout ou, dans un sens plus général, qu’elle ne fera pas ce que le mémoire descriptif prédit qu’elle fera ».

ANALYSE

Interprétation téléologique

[26]           Nous étudions l’interprétation téléologique des revendications au dossier avant d’aborder les questions susmentionnées.

La personne versée dans l’art et les connaissances générales courantes

[27]           Dans lettre qui a fait suite à notre examen initial, nos observations préliminaires sur la personne versée dans l’art et leurs CGC ont été communiquées au demandeur et celui-ci a été invité à formuler des commentaires, s’il désire le faire. Comme le demandeur n’a soumis aucun commentaire ni argument en réponse à ces observations, nous les adopterons pour les besoins de notre examen.

 

[28]           La personne versée dans l’art est considérée comme une équipe composée d’un programmeur informatique/base de données et d’un professionnel de l’industrie des coupons de réduction. Les connaissances générales courantes (CGC) de cette personne comprennent :

a.       une connaissance des codes à barres pour les produits du fabricant, y compris une connaissance des différents modèles de classification (coupon);

b.      une connaissance des bases de données de produits courantes et la manière de stocker l’information dans des bases de données électroniques;

c.        une connaissance des champs de données utilisés dans les codes à barres imprimés sur des coupons (comme le précisent les normes UPC pour les codes à barres, tenues à jour par le Uniform Code Council [UCC], maintenant exploitée sous le nom GS1);

d.       une connaissance des fonctions courantes des bases de données informatiques, de l’architecture d’ordinateur et des techniques de programmation, de l’utilisation courante des navigateurs Web ou des interfaces graphiques (GUI) et une de l’usage généralement connu d’ordinateurs pour automatiser ou faciliter l’exécution d’étapes manuelles.

[29]           La connaissance des champs de données du code à barres (point [c] ci-dessus) est fondée sur les champs de données de codes à barres de l’UCC énoncés dans la demande aux paragraphes [003] et [0061] à [0075], et sur un document cité par le comité dans la lettre qui a suivi notre examen initial : « UPC Coupon Code Guidelines Manual », publié en septembre 1994 par UCC.

Le problème et la solution apportée par l’invention

[30]           D’après la description (pages 1 et 2), le codage des codes à barres imprimés sur des coupons peut s’avérer difficile et sujet à l’erreur, ce qui entraîne des coûts élevés pour le fabricant, des pertes de ventes et des retards dans les transactions à la caisse. Un problème particulier associé au codage des codes à barres imprimés sur les coupons concerne le choix de code de famille pour un ensemble de produits. Comme il a été noté précédemment (paragraphes [5] et [6]), le choix du code de famille suppose la sélection d’un nombre à 3 chiffres qui sera associé à chaque produit pour lequel l’utilisateur souhaite produire un coupon. L’attribution du code de famille se fait selon une structure hiérarchique à l’aide de nombres entre 100 et 990. Les normes de l’industrie dictent également certaines règles concernant l’attribution des codes de famille, par exemple, plusieurs codes de famille réservés (comme les codes de 001 à 009 et 990 à 999); tout code se terminant par un seul « 0 » est défini comme un code de famille sommaire; et enfin, tout code se terminant par « 00 » est défini comme un code de famille sommaire super. Chacun de ces codes de famille spéciaux comporte certaines règles et restrictions quant à leur emploi, conformément à ce qui est énoncé dans les normes. 

[31]           Le problème auquel s’attaque la présente demande est la génération d’un code de famille convenable, conforme aux règles et restrictions susmentionnées, qui permettra à un fabricant de générer un coupon unique, échangeable contre plusieurs produits. 

[32]           La solution proposée dans la demande consiste en une méthode améliorée pour la génération informatisée de codes à barres à imprimer sur des coupons. Selon cette méthode, un code de famille convenable est généré pour plusieurs produits en fonction d’une marque, d’une sous-marque ou d’un nom de produit, choisi par l’utilisateur, sans que soient requises une formation et une connaissance approfondies des codes de famille pour les produits ou des règles associés au codage d’un code de famille pour un coupon. La solution aborde les difficultés relevées concernant le codage des codes à barres sur des coupons, plus précisément au moment de déterminer le bon code de famille de coupon en fonction des codes de famille sous-jacents d’un ensemble de produits.

Éléments essentiels des revendications

[33]           Le dossier comprend 6 revendications, dont les revendications indépendantes 1, 4, 5 et 6. La revendication 1 est énoncée comme suit :

1.      Une méthode mise en œuvre par ordinateur comprenant :

                la présentation d’une interface utilisateur à un utilisateur, ladite interface présentant un ensemble d’articles pouvant être sélectionnés;

                où chacun de ces articles sélectionnables correspond à un produit différent de la base de données de produits;

                où chacun des produits différents est associé, dans la base de données, à un nom de produit, à une sous-marque et à une marque;

                où chaque article sélectionnable est associé, dans l’interface utilisateur, au nom de produit, à la sous-marque, à la marque qui, eux, sont associés au produit correspondant parmi les articles sélectionnables;

                la réception, depuis l’utilisateur par l’entremise de ladite interface utilisateur, du choix d’au moins deux articles sélectionnables;

                où au moins deux produits correspondant auxdits articles sélectionnables sont associés, dans la base de données, à plusieurs codes de famille différents;

                l’obtention de l’ensemble des différents codes de famille à partir de la base de données en réponse à la demande;

                la génération automatique d’un code de famille suggéré à partir de l’ensemble des différents codes de famille;

                où la génération du code de famille suggéré comprend le choix d’une valeur numérique qui est arrondie à un chiffre significatif, commun à l’ensemble des différents codes de famille, ou le choix d’une valeur réservée lorsque l’ensemble des codes de famille ne comporte aucun chiffre commun;

                la génération d’un symbole de code à barres pour un coupon en fonction du code de famille suggéré.

[34]           La décision finale (page 4) résume l’interprétation de toutes les revendications, indiquant que toutes les caractéristiques revendiquées ont été considérées comme essentielles à la résolution du problème auquel les inventeurs sont confrontés. Le demandeur n’a fourni aucun commentaire particulier concernant les éléments essentiels.

[35]           Compte tenu du problème et de la solution, le comité estime qu’une personne versée dans l’art comprendrait que les éléments de la revendication 1 agissent ensemble dans une large mesure afin de fournir la solution divulguée. Les éléments essentiels de la solution comprennent la fonctionnalité d’une interface utilisateur pour le choix de plusieurs produits en fonction de leur nom, de leur sous-marque et de leur marque à partir d’une base de données, et la fonctionnalité de génération d’un code de famille convenable pour l’ensemble de ces produits, en fonction des codes de famille individuels associés aux produits sélectionnés. Le code de famille suggéré est généré par l’arrondissement au chiffre significatif qui est commun aux codes de famille individuels des produits sélectionnés. Sinon, lorsqu’aucun chiffre significatif n’est commun aux codes de famille individuels, l’étape de génération du code de famille suggérée consiste simplement à sélectionner un code réservé. Un code à barres est ensuite généré pour le coupon à l’aide de ce code de famille, ce qui permet l’échange d’un seul coupon au moins pour les quelques produits sélectionnés.

[36]           Compte tenu de la solution divulguée et des considérations susmentionnées, nous sommes d’avis que les éléments essentiels que la personne versée dans l’art considérerait comme importants pour l’invention sont les suivants :

-       une interface utilisateur sur ordinateur permettant de choisir, à partir d’une base de données, les produits désirés, en fonction du nom, de la sous-marque et de la marque; et

-       la détermination du code de famille suggéré par l’arrondissement au chiffre significatif qui est commun à l’ensemble des codes de famille des différents produits sélectionnés, sinon l’utilisation d’une valeur réservée aux cas où il n’y a pas de code de famille commun, puis l’utilisation du code de famille suggéré pour générer un symbole de code à barres approprié.  

[37]           L’établissement des éléments essentiels ainsi effectué est conforme à celui qui a été reformulé dans la décision finale aux fins de simplification, avec l’ajout d’une fonctionnalité selon laquelle il est possible d’utiliser une valeur réservée lorsqu’il n’y a aucun chiffre significatif commun. Comme le demandeur n’a produit aucune observation concernant l’interprétation des revendications, il ne nous est pas nécessaire de développer davantage cette question. Nous remarquons aussi qu’il ne semble pas y avoir de problème concernant la signification des termes utilisés dans les revendications.

[38]           On peut soutenir que la solution pourrait être perçue comme le calcul d’un code de famille suggéré selon un ensemble de règles et donc, on pourrait faire valoir que les seuls éléments essentiels sont des règles non prévues par la Loi, des calculs ou des algorithmes (semblable à l’objet non brevetable dont il est question dans Schlumberger Canada Ltd c Commissioner of Patents,[[1981], 56 CPR [2nd], 204 [FCA]]). Cependant, comme la décision finale n’aborde pas cette possibilité, et compte tenu de nos conclusions sur la question de l’évidence ci-dessous, il n’est pas nécessaire que le comité s’y attarde davantage.

 

[39]           Les autres revendications indépendantes définissent d’autres modes de réalisation de l’invention, comportant les mêmes caractéristiques essentielles que la revendication 1 : les revendications 4 et 6 définissent les modes de réalisation du système de la méthode de la revendication 1 et la revendication 5 définit un support lisible par ordinateur pour la méthode de la revendication 1.

[40]           Les revendications dépendantes 2 et 3 introduisent chacune une caractéristique essentielle additionnelle à la revendication 1. La revendication 2 définit la génération d’identificateurs particuliers dans le symbole de code à barres produit à l’aide de la méthode de la revendication 1. La revendication 3 définit l’affichage d’un ou de plusieurs produits non admissibles auxquels le code de famille suggéré généré par la méthode de la revendication 1 ne s’applique pas.  

Les revendications 1 à 6 sont-elles évidentes?

Étape 1 : Identifier la « personne versée dans l’art » et les connaissances générales courantes de cette personne

[41]           Ces deux étapes ont été abordées précédemment dans notre interprétation des revendications (paragraphes [27] et [28], ci-dessus), et ces résultats seront appliqués à notre analyse ici, 

Étape 2 : Définir le concept inventif de la revendication en cause, au besoin par voie d’interprétation

[42]           La décision finale a fourni un concept inventif fondé sur les revendications ayant antérieurement été versées au dossier (revendication précédant les « revendications au dossier »). La décision finale a maintenu le même concept inventif issu de la revendication 1 pour chacune des revendications indépendantes restantes. Nous convenons que cette méthode est correcte en l’espèce, puisque les revendications ne sont différentes que dans leur forme (c.-à-d. méthode, système ou support lisible par ordinateur). Par conséquent, le concept inventif défini dans la décision finale est le même pour les revendications 1, 4, 5 et 6 :

 

une méthode informatique permettant à un utilisateur (probablement un fabricant) de créer un coupon en choisissant une gamme de produits qui seront associés à un même coupon. Les produits sont stockés dans une base de données, laquelle est affichée à l’aide d’une interface graphique (GUI). Une fois les produits choisis, un chiffre significatif commun est identifié et sert de base au code de famille suggéré afin de relier tous les produits ensemble. Le code de famille suggéré est stocké dans un code à barres qui apparaît sur le coupon.

[43]           Le demandeur n’a fourni aucun autre libellé ni n’a exprimé son désaccord avec ce concept inventif. Cependant, nous formulons les deux observations suivantes : D’abord, après la décision finale, la demande a été modifiée de sorte que les revendications actuellement au dossier comprennent l’autre caractéristique additionnelle relative au choix d’une valeur réservée lorsqu’il n’y a pas de chiffres communs. Ensuite, nous remarquons que le concept inventif susmentionné ne précise pas que le choix des produits peut se faire par nom, marque ou sous-marque (plutôt que par codes numériques). Notre interprétation téléologique des revendications (au paragraphe [36]) aborde ces deux observations.

[44]           Compte tenu du problème et de la solution abordés ainsi que de l’interprétation téléologique des revendications, le comité est d’avis que le concept inventif des revendications est une méthode de génération de codes à barres à imprimer sur des coupons qui comprend les fonctionnalités suivantes :

-      une interface utilisateur sur ordinateur permettant de choisir les produits désirés en fonction de leur nom, de leur sous-marque ou de leur marque, plutôt que de les choisir à partir d’une connaissance des codes de famille numériques;

-      la détermination du code de famille suggéré par l’arrondissement au chiffre significatif qui est commun à l’ensemble des codes de famille des différents produits sélectionnés, sinon l’utilisation d’une valeur réservée aux cas où il n’y a pas de code de famille commun. 

Étape 3 : Recenser les différences, s’il en est, entre la matière citée comme faisant partie de l’état de la technique et le concept inventif de la revendication ou la revendication telle qu’elle est interprétée

[45]           La décision finale et le résumé des motifs définissent l’unique référence suivant en tant qu’antériorité :

                Document de brevet :

                US2004-0103023A1                   27 mai 2004                                      Irwin      

[46]           Irwin décrit (voir le résumé et la page 5) un système de vérification de codes à barres de coupons qui permet de vérifier qu’un coupon est valide pour les produits concernés après la création du coupon, mais avant sa publication. Le processus de vérification fournit une liste d’erreurs possibles et de solutions pour un coupon numérisé. La vérification est fondée sur des normes de l’industrie comme les lignes directrices d’UCC (GS1) et les normes relatives aux formats de codes à barres. Des avertissements sont donnés à l’utilisateur lorsqu’un coupon numérisé comporte un code de famille sommaire, un code de famille sommaire super ou le code de famille de contournement 992. 

[47]           Le système décrit dans Irwin (voir les paragraphes [0039] à [0041]) comprend une interface utilisateur et un affichage et produit soit un rapport de validation si le coupon est lisible par les terminaux aux points de vente, soit un rapport d’échec si le code à barres du coupon n’est pas lisible. La vérification comprend la génération d’une liste de tous les produits pour lesquels le coupon est valide, selon le code de famille et le préfixe de l’entreprise figurant sur le code à barres. 

[48]           L’interface utilisateur décrite dans Irwin ne permet pas explicitement de choisir par nom un groupe (plusieurs) de produits, de marques ou de sous-marques avant l’attribution d’un code de famille. Plutôt, l’interface utilisateur décrite dans Irwin est conçue pour la vérification du coupon après que le code à barres du coupon a été attribué aux produits et à leur code de famille.

[49]           En ce qui concerne la manière de générer les codes de famille, Irwin ne décrit pas explicitement la manière précise de générer un code à barres suggéré en procédant à un arrondissement au chiffre significatif commun aux codes de famille individuels, puisque dans Irwin, les codes de famille semblent avoir été attribués avant l’utilisation du système de vérification de codes à barres. Irwin ne mentionne pas non plus la génération d’un code à barres suggéré [traduction] « par le choix d’une valeur réservé lorsque les codes de famille n’ont aucune valeur en commun ».

Résumé des différences

[50]           À la lumière de ce qui précède, nous concluons que les différences entre le concept inventif des revendications 1, 4, 5 et 6 et l’état de la technique sont les suivantes :

                                i.            une interface utilisateur pour choisir un groupe (ou plusieurs) de produits, de marques ou de sous-marques par nom;

                              ii.            la génération d’un code à barres suggéré pour le coupon de la manière suivante :

a.        l’arrondissement à un chiffre significatif qui est commun aux codes de famille individuels des produits sélectionnés; ou

b.       la sélection d’une valeur réservée lorsque le groupe de codes de famille n’a aucune valeur en commun.

Étape 4 : Abstraction faite de toute connaissance de l’invention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans l’art ou dénotent-elles quelque inventivité?

Différence (i) – une interface utilisateur pour choisir un groupe de produits, de marques ou de sous-marques par nom

[51]           La personne versée dans l’art reconnaîtrait que les codes de famille sont, par définition, inextricablement liés aux produits individuels auxquels ils sont attribués. Selon les lignes directrices de l’UCC (section 4.3), les codes de famille sont attribués aux produits. En outre, dans ces lignes directrices, les fabricants sont informés qu’ils doivent [traduction] « prévoir toute combinaison possible de produits susceptibles d’être inclus dans une même offre de coupon au moment de créer les codes de famille ». Cela confirme que toute sélection ou attribution des codes de famille suppose nécessairement une connaissance et une compréhension des produits et de leur relation avec les autres produits. Il serait logique pour la personne versée dans l’art qu’une telle connaissance des produits sélectionnés comprenne invariablement et sans esprit inventif l’information sur le produit, y compris le nom, la marque et la sous-marque.

[52]           De plus, bien que cela ne soit pas entièrement décrit, Irwin mentionne au paragraphe [0039] un [traduction] « gestionnaire de codes de famille » qui [traduction] « affiche les données du code de famille selon une structure de texte hiérarchique et facile à lire, relie tous les produits des points de vente actuels à leur code de famille respectif... et signale tout emploi d’un code de famille qui n’est pas conforme aux lignes directrices de l’UCC ». Cela réitère le lien connu entre les noms des produits et les codes famille pour faciliter le choix des produits pour la création de coupons et de leurs codes à barres. En outre, dans ce passage, Irwin définit le concept d’une interface utilisateur conçue pour gérer les codes de famille et les produits. Une interface utilisateur entièrement fonctionnelle, comme le propose le gestionnaire de codes de famille dans Irwin, afficherait et désignerait logiquement les produits gérés par nom, marque, etc. Comme on peut le voir à la figure 7 dans Irwin, le système de vérification de codes à barres identifie les produits par nom et par description : la personne versée dans l’art pourrait, sans recourir à un esprit inventif, concevoir une interface de gestion des codes à barres pour afficher au moins la même information que celle que l’on voit dans la figure 7.

[53]           Compte tenu de ces faits, une personne versée dans l’art reconnaîtrait que le point de départ du processus d’attribution d’un code de famille est l’identification du groupe de produits. Il serait logique pour la personne versée dans l’art que les produits soient énumérés ou présentés à l’aide de leur nom commun afin d’en faciliter l’identification. Il serait évident pour la personne versée dans l’art que la manière la plus simple de sélectionner un groupe de produits est de choisir ceux-ci à partir d’une liste fondée sur un langage descriptif qui permet d’identifier le produit, plutôt que sur une chaîne de numéros, comme un code d’identification de produit. On sait également, grâce au [traduction] « gestionnaire de codes de famille » dans Irwin, qu’il est possible de fournir une interface utilisateur pour dresser la liste des noms de produits aux fins de gestion des codes de famille. Conformément aux lignes directrices de l’UCC, au moment de choisir des codes de famille qui permettront qu’un même coupon soit valide pour plusieurs produits, [traduction] « la gestion des codes de famille » suppose intrinsèquement l’attribution d’un code de famille à une liste de produits. Par conséquent, l’idée d’une interface utilisateur qui affiche les noms, les marques et les sous-marques de produits à sélectionner ne relève pas d’un esprit inventif.

[54]           En ce qui concerne la question de savoir si la mise en œuvre d’une interface utilisateur serait inventive par rapport à l’attribution manuelle d’un code de famille fondé sur une sélection faite à partir d’une liste de noms de produits, le comité considère qu’il s’agit d’une mise en œuvre évidente. La personne versée dans l’art, détenant une connaissance des architectures d’ordinateurs, des bases de données et des techniques de programmation, de l’utilisation de navigateurs Web ou d’interfaces graphiques (GUI) et de l’utilisation d’ordinateurs pour automatiser ou faciliter l’exécution d’étapes manuelles, mettrait rapidement en place un concept de listes de noms, marques et sous-marques de produits à partir desquelles choisir les produits désirés. La description ne contient aucun détail précis sur la mise en œuvre allant au-delà des compétences de la personne versée dans l’art. La personne versée dans l’art comprendrait aussi que seule une programmation de routine est nécessaire une fois que l’idée d’automatiser une interface utilisateur est conçue. Par conséquent, aucun esprit inventif n’est requis pour mettre en œuvre l’idée d’offrir une interface utilisateur pour sélectionner plusieurs produits, marques ou sous-marques par nom.

Différence (ii)(a) – arrondissement à un chiffre significatif commun

[55]           Comme il a été noté précédemment (paragraphe [30]), les codes de famille sommaires sont des codes de famille qui se terminent par un seul « 0 » et, lorsqu’ils sont utilisés sur un coupon, permettent de valider « tout article dont le code de famille comporte les deux mêmes premiers chiffres que le nombre qui se termine par "0" » (Lignes directrices de l’UCC, paragraphe 4.4). Par exemple, le code de famille sommaire 210 validera le coupon pour l’achat de tout produit associé à un code de famille de 211 à 219. Autrement dit, un élément fondamental de la définition du code de famille sommaire concerne le fait qu’il est fondé sur l’arrondissement au chiffre significatif qui est commun à l’ensemble des produits individuels. En ce qui concerne les codes de famille de produits 211 et 212, le chiffre significatif commun est le « 1 » et la valeur numérique arrondie est « 210 ». C’est identique à la solution particulière du concept inventif des revendications 1 à 6.

[56]           De la même façon, un code sommaire super est, par définition, un code de famille qui se termine par les chiffres « 00 » et permet de valider un coupon pour utilisation avec tout produit qui contient le premier chiffre qui précède les deux zéros (Lignes directrices UCC, paragraphe 4,4). Par exemple, les produits associés aux codes de famille 219, 239 et 288 seront tous des produits individuels valides pour l’utilisation avec un coupon associé à un code de famille sommaire super de 200, selon un arrondissement au chiffre significatif qui est commun aux trois valeurs 219, 239 et 288, soit la valeur « 200 ». La méthode d’arrondissement utilisée dans la définition d’un code sommaire super est identique à celle utilisée dans le concept inventif des revendications 1 à 6.

[57]           Irwin décrit aussi (paragraphe [0046] et tableau 1) l’utilisation bien connue des codes de famille sommaire et des codes de famille sommaire super dans la validation du code de famille d’un coupon pour un groupe de produits. Dans la figure 7, le code à barres d’un coupon en cours de validation indique que le code de famille dudit coupon est 300 (un code sommaire super) et qu’il couvre les produits dont les codes de famille sont 311, 312, 321 et 322. 

[58]           Aucun esprit inventif n’est requis pour préciser que le code de famille suggéré est fondé sur l’arrondissement à un chiffre significatif commun aux codes de famille individuels qui existent déjà. La manière de déterminer le code de famille du concept inventif des revendications 1 à 6 est équivalente à celle de déterminer un code de famille sommaire ou un code de famille sommaire super comme ceux définis dans les normes de l’UCC. Bien que le concept d’« arrondir à un chiffre significatif commun » ne soit pas précisément décrit dans les lignes directrices comme une façon d’attribuer des codes sommaire ou des codes sommaires super, la personne versée dans l’art comprendrait immédiatement et sans esprit inventif les concepts mathématiques qui y sont rattachés.

[59]           En réponse à la décision finale, le demandeur soutient également que, s’il est connu qu’il existe une autre manière de déterminer le code de famille suggéré, la méthode revendiquée ne serait pas inhérente aux enseignements d’Irwin. Le demandeur a fourni un exemple dans lequel un code sommaire pourrait être généré d’abord par la sélection du nombre « 110 » comme code sommaire, puis par l’attribution des codes « 111 » à « 119 » aux produits individuels voulus. Autrement dit, le demandeur soutient que le code de famille suggéré pourrait d’abord être directement saisi par l’utilisateur, avant que les codes de produits soient établis.

[60]           Cependant, nous ne sommes pas d’accord pour dire que ce raisonnement modifie la nature évidente de la manière de déterminer les codes de famille tels qu’ils sont actuellement revendiqués. Les lignes directrices de l’UCC indiquent que les codes sommaires sont utilisés afin de créer des coupons pour une série de produits dont les codes de famille attribués commencent par les deux mêmes premiers chiffres (ou le même premier chiffre pour les codes sommaires super). La personne versée dans l’art comprendrait que cela nécessite que les codes de famille de produits soient déjà attribués avant qu’un code sommaire puisse être généré. Par conséquent, la description d’Irwin ne serait pas lue de manière incompatible avec celle de la personne versée dans l’art et ses CGC. L’autre lecture d’Irwin proposée ci-dessus par le demandeur n’est pas compatible avec les connaissances générales courantes et ne constitue donc pas une raison irréfutable pour laquelle l’objet revendiqué ne serait pas évident.

Différence (ii)(b) – la sélection d’une valeur réservée lorsque le groupe de codes de famille n’a aucune valeur en commun.

[61]           Dans une situation où un code de famille suggéré ne peut pas être généré automatiquement parce qu’il n’y a pas de chiffres communs, il existe un nombre fini de solutions. Une solution connue de la personne versée dans l’art consiste à saisir manuellement une valeur choisie par l’utilisateur. L’autre solution consiste à attribuer automatiquement un autre code de famille qui n’est pas fondé sur l’arrondissement à un chiffre significatif.

[62]           Comme il en a été question précédemment, les codes de famille réservés de 990 à 999 étaient bien connus à la date de revendication (par exemple, lignes directrices de l’UCC, page 7). Comme il a été reconnu dans la demande (paragraphe [0087]), le code de famille de contournement 992 est une valeur réservée connue pour valider un coupon sans qu’il soit nécessaire de faire référence au produit exact balayé. Ainsi, le code de contournement 992 permet de « contourner » la validation des produits achetés. Irwin (tableau 1) décrit aussi le code de famille de contournement 992 comme un code permettant [traduction] « un balayage non validé ». Donc, l’utilisation d’une valeur réservée (n’importe lequel des codes de famille réservés de 990 à 999) pour un code de famille était connue à la date de revendication. Elle permet le choix d’un autre code de famille dans les cas où un code sommaire ou un code sommaire super ne convient pas, pour quelque raison que ce soit. 

[63]           L’autre restriction associée à la sélection d’une valeur réservée lorsqu’il n’y a pas de chiffre commun constitue un choix inévitable et logique pour la personne versée dans l’art. Par exemple, dans la méthode manuelle d’attribution d’un code de famille suggéré, lorsqu’un groupe de codes individuels ne présente aucun chiffre commun (par exemple les codes 111 et 222), la personne versée dans l’art doit réattribuer un code approprié qui permet d’atteindre le but, soit d’obtenir un coupon unique valide pour l’ensemble des produits sélectionnés. Comme il n’y a aucun chiffre commun, il n’existe aucun code sommaire super qui permettra d’atteindre cet objectif. La personne versée dans l’art doit donc se tourner vers l’outil qu’il lui reste pour attribuer un code de famille approprié, conformément aux normes établies par l’industrie, soit la valeur réservée, comme le code de contournement 992. L’utilisation d’un code de famille de contournement 992 permet l’atteinte du but, soit d’obtenir un coupon unique valide pour plusieurs produits individuels.

[64]           Dans le cas de la méthode automatisée de la revendication 1, dans une situation semblable où plusieurs produits sélectionnés n’ont pas de chiffres communs que l’on peut arrondir pour obtenir un code de famille approprié, il serait évident d’employer aussi le code de famille de contournement 992 de manière à atteindre ce même objectif qui consiste à obtenir un coupon unique valide pour plusieurs produits individuels. Par conséquent, la personne versée dans l’art ne percevrait aucun degré d’inventivité dans la différence (ii)(b), soit la génération d’un code de famille suggéré par la sélection d’une valeur réservée. 

[65]           Ayant déterminé qu’il n’existe aucune étape inventive relativement aux différences prises individuellement, nous évaluons donc maintenant s’il y a quelque inventivité dans leur combinaison.

[66]           La combinaison de l’interface utilisateur et des méthodes connues d’attribution d’un code de famille pour plusieurs produits (selon un code de famille sommaire, un code de famille sommaire super ou un code de famille de contournement réservé) ne produit aucun résultat inattendu ni ne représente un progrès ingénieux par rapport à l’interface ou à la génération d’un code de famille suggéré. Par conséquent, la personne versée dans l’art n’aurait pas besoin de recourir à un esprit inventif pour combiner les deux différences. 

[67]           Par conséquent, les revendications 1, 4, 5 et 6 au dossier sont évidentes.

Les revendications dépendantes 2 et 3

[68]           La revendication 2 définit [traduction] « la méthode mise en œuvre par ordinateur de la revendication 1, où la génération d’un symbole de code à barres comprend également la génération du symbole de code à barres à l’aide d’un système de caractère de numérisation et d’un identificateur d’application ».

[69]           Au paragraphe [5], nous avons noté qu’un [traduction] « système de caractère de numérisation » ou NSC constitue une caractéristique standard des codes à barres selon les normes de l’UCC, où le chiffre 5 indique un code à barres qui peut être utilisé sur des coupons. Cet énoncé est également corroboré au paragraphe [0003] de la présente description, et la personne versée dans l’art connaîtrait cette caractéristique, étant donné ses CGC. En ce qui concerne l’identificateur d’application, la personne versée dans l’art, détenant une connaissance des normes de l’UCC pour les codes à barres, connaîtrait les autres champs de données associés aux spécifications étendues des codes à barres (UCC/EAN-128), précisées aux paragraphes [0003] et [0066] de la description. Par conséquent, l’utilisation de ces champs de données particuliers par la personne versée dans l’art pour la génération d’un code à barres serait une activité de routine et ne nécessiterait aucun esprit inventif.

[70]           La revendication 3 définit [traduction] « la méthode mise en œuvre par ordinateur de la revendication 1, comprenant également l’affichage d’un ou de plusieurs produits inadmissibles pour lesquels le code de famille suggéré ne s’applique pas ».

[71]           Irwin (figure 7) illustre la validation du code à barres d’un coupon auquel un code de famille sommaire super de 300 est attribué, couvrant les produits associés aux codes de famille 311, 312, 321 et 322. Dans ce cas, la personne versée dans l’art est informée que les produits admissibles à un code de famille particulier sont affichés. La personne versée dans l’art, ayant une connaissance des codes sommaires super, reconnaîtrait également qu’il est possible que d’autres produits non visés par le coupon ayant un code de famille de 300 soient affichés. De plus, il ne serait que chose courante et futile pour la personne versée dans l’art, que de mettre en œuvre d’un tel affichage par l’identification de ces produits pour lesquels le code de famille sommaire et le code de famille sommaire super ne s’appliquent pas, et d’afficher ces produits en tant que produits non admissibles. Par conséquent, aucun degré d’inventivité n’est défini dans l’objet de la revendication 3.

[72]           La personne versée dans l’art considérerait qu’il n’existe aucune étape inventive dans les caractéristiques additionnelles des revendications dépendantes 2 et 3, prises individuellement et en combinaison avec les caractéristiques de la revendication 1, de laquelle elles dépendent. Les revendications dépendantes 2 et 3 sont donc évidentes.

Revendications proposées figurant à l’annexe B

[73]           Nous examinons maintenant les revendications 1 à 6 proposées afin de déterminer si elles permettent de rectifier le problème d’évidence relevé dans les revendications au dossier.

[74]           Les revendications indépendantes 1, 4, 5 et 6 remplacent la phrase [traduction] « ... ou la sélection d’une valeur réservée lorsque le groupe de codes de famille n’a aucune valeur en commun... » par « ... ou la sélection d’une valeur fournie par l’utilisateur ». Donc, la clause « où » de la revendication proposée 1 devient la suivante :

où la génération du code de famille suggéré comprend le choix d’une valeur numérique qui est arrondie à un chiffre significatif, commun à l’ensemble des différents codes de famille, ou le choix d’une valeur fournie par l’utilisateur (soulignement ajouté).

[75]           Cependant, nous ne considérons pas que cette caractéristique, prise seule ou en combinaison avec d’autres caractéristiques de la revendication, comme étant inventive, à la lumière d’Irwin et des CGC de la personne versée dans l’art. 

[76]           L’entrée d’une valeur fournie par l’utilisateur plutôt que la génération automatique d’une telle valeur représente la même chose que la saisie manuelle par défaut d’un code de famille, ce qui est connu dans le domaine. Comme il en est question dans les lignes directrices de l’UCC, la méthode connue de sélection d’un code de famille pour plusieurs produits consiste simplement à sélectionner manuellement un code sommaire ou un code sommaire super approprié. Celui-ci devient la valeur du code sommaire fournie par l’utilisateur. Il n’y a rien d’inventif dans cette méthode de génération d’un code de famille suggéré, puisqu’il s’agit simplement d’une méthode manuelle déjà connue et de la méthode que la présente invention tentait d’améliorer. 

[77]           On pourrait soutenir que l’inclusion d’une caractéristique permettant la saisie manuelle d’une valeur fournie par l’utilisateur constituerait une amélioration non évidente à une méthode automatisée de génération de codes de famille. Toutefois, il relève de la pratique courante, et il est bien connu de la personne versée dans l’art, qui détient une connaissance des techniques de programmation informatique courantes et des interfaces utilisateurs, qu’une interface utilisateur doit être conçue de manière à autoriser la saisie manuelle de données afin de permettre la saisie de données redondantes ou alternatives dans les cas où l’entrée suggérée par le système automatisé ne convient pas.

[78]           Comme les revendications proposées définissent un objet évident, on ne peut s’appuyer sur celles-ci pour corriger les revendications évidentes au dossier et le comité ne recommande donc pas que les revendications proposées soient soumises par modification.

AUTRES QUESTIONS EN LITIGE

Les revendications 1 et 4 à 6 introduisent-elles un nouvel objet inadmissible?

[79]           En réponse à la décision finale, le demandeur a choisi de modifier les revendications indépendantes de manière à énoncer une étape supplémentaire :

 « ... où la génération du code de famille suggéré comprend le choix d’une valeur numérique qui est arrondie à un chiffre significatif, commun à l’ensemble des différents codes de famille, ou le choix d’une valeur réservée lorsque l’ensemble des codes de famille ne comporte aucun chiffre commun; » (je souligne)

[80]           Selon le résumé des motifs, la modification constitue un nouvel objet inadmissible puisque les termes « valeur réservée » et « chiffre commun » ne sont pas corroborés par le mémoire descriptif original.

[81]           Nous estimons qu’il est raisonnable que la personne versée dans l’art déduise ces termes à partir du mémoire descriptif original et des dessins. En ce qui concerne la « valeur réservée », le paragraphe [0087] de la description indique qu’un « code de famille de contournement 992 » peut constituer un code de famille suggéré pour un coupon. La personne versée dans l’art, au vu des normes connues concernant les codes pour coupons (paragraphe [28][c] ci-dessus), saurait que le code de famille de contournement 992 constituait l’un des différents codes de famille réservés. Par conséquent, comme il est décrit dans les paragraphes [0074] (code de famille réservé) et [0087] (code de famille de contournement), le terme « valeur réservée » tel que revendiqué peut être raisonnablement inféré.

[82]           L’autre terme contesté, « chiffres communs », bien qu’il ne soit pas explicitement décrit dans le mémoire descriptif, constitue néanmoins l’expression d’un concept mathématique courant. La personne versée dans l’art (phase nationale) travaillant avec des codes à barres pour coupons comprendrait ce terme comme signifiant tout chiffre (ou chiffres) partagé par au moins deux codes de famille à trois chiffres ou commun à ceux-ci. Donc, le terme « chiffres communs » serait aussi raisonnablement inféré à partir du mémoire descriptif.

[83]           Nous avons également examiné ces termes dans le contexte tel que revendiqué. Nous avons nommément cherché à déterminer si l’on peut raisonnablement conclure qu’une valeur réservée peut être utilisée comme code de famille suggéré lorsque plusieurs codes de famille n’ont aucun chiffre en commun. 

[84]           Dans les paragraphes [0058] et [0085] à [0087] de la demande, deux options sont décrites pour suggérer un code de famille approprié pour plus d’un produit lorsqu’il n’existe aucun chiffre en commun : soit la saisie manuelle du code de famille par l’utilisateur, soit l’utilisation d’un « code de famille de contournement 992 ». Pour la personne versée dans l’art, il serait logique d’utiliser un « code de famille de contournement 992 » pour générer un code de famille suggéré approprié plutôt que de demander la saisie manuelle par l’utilisateur, puisque l’invention cherche à réduire le nombre d’erreurs et les difficultés associées aux méthodes de création manuelle de codes à barres, en partie en fournissant une méthode pour générer automatiquement un code de famille approprié.

[85]           Par conséquent, la personne versée dans l’art, compte tenu de la possibilité qu’il n’existe aucun chiffre commun aux produits sélectionnés, conclurait raisonnablement que le « code de famille de contournement 992 » constitue un autre moyen de générer un code de famille suggéré.

Les revendications 1 et 4 à 6 sont-elles dépourvues d’utilité?

[86]           La décision finale souligne particulièrement deux cas où, au vu de la description et des figures 7C à 8F, l’invention ne fonctionne pas telle que décrite :

(a)   lorsqu’un utilisateur sélectionne au moins deux produits qui n’ont aucun chiffre en commun, aucun code de famille suggéré n’est généré, donc l’invention ne peut pas fonctionner comme prévu;

(b)   lorsqu’au moins deux produits sont sélectionnés par l’utilisateur, mais que d’autres produits ne sont pas sélectionnés, le code de famille suggéré généré peut néanmoins être valide pour les produits non sélectionnés, et donc l’objectif de réduire les erreurs de codage n’est pas atteint.

[87]           En réponse au point (a), le demandeur a choisi de modifier les revendications afin d’y inclure la caractéristique additionnelle suivante : « le choix d’une valeur réservée lorsque l’ensemble des codes de famille ne comporte aucun chiffre commun ». Le comité considère qu’en définissant de manière explicite l’utilisation d’un code de contournement pour les cas où aucun chiffre commun n’est identifié dans les codes de famille individuels, toute circonstance de non-fonctionnement due au fait qu’un code de famille suggéré ne peut pas être établi se trouve résolue.

[88]           En ce qui a trait au point (b), le demandeur a fait valoir que les revendications ne sont pas inopérantes, puisqu’elles définissent une solution qui permet l’exécution de la fonction prévue de l’invention, en ce sens que le code de famille suggéré qui a été généré couvre au moins les produits qui ont été sélectionnés.

[89]           Nous ne considérons pas qu’une situation où le code de famille suggéré fait en sorte que le coupon est valide pour des produits non sélectionnés constitue une situation qui rend l’invention inopérante. L’invention telle que revendiquée remplit sa fonction : elle permet de générer automatiquement un code de famille suggéré associé à plusieurs produits sélectionnés pour lesquels on souhaite produire un coupon unique. Bien qu’il soit préférable que le code de famille suggéré ne s’applique pas également aux produits non sélectionnés, une telle lacune observée dans les dessins ou le fonctionnement ne rend pas la revendication inopérante.

[90]           En outre, le paragraphe [0081] de la description indique que [traduction] « la GUI peut afficher une liste de produits ou de familles de produits pour lesquels les codes à barres précédemment demandés ne s’appliquent pas ». Ainsi, l’utilisateur peut voir quels produits ne seront pas visés par le coupon sur lequel apparaît le code à barres généré. La personne versée dans l’art n’interpréterait pas le mémoire descriptif comme promettant que les codes de famille suggérés n’incluront pas de produits auxquels le coupon ne s’applique pas.

[91]           Par conséquent, les revendications originales au dossier ne manquent pas d’utilité au sens de l’article 2 de la Loi sur les brevets.

 

RECOMMANDATION DE LA COMMISSION

[92]           Compte tenu des conclusions qui précèdent, la Commission recommande que la demande soit rejetée au motif que les revendications 1 à 6 au dossier sont évidentes et, par conséquent, non conformes à l’article 28.3 de la Loi sur les brevets.

 

 

 

 

 

 

                Andrew Strong                               Paul Fitzner                                      Stephen MacNeil          

Membre                                              Membre                                              Membre


 

DÉCISION

[93]           Je suis d’accord avec les conclusions et la recommandation de la Commission, à savoir que la demande doit être rejetée, puisque les revendications 1 à 6 au dossier sont évidentes, et donc non conformes au paragraphe 28.3 de la Loi sur les brevets, et que les revendications 1 à 6 proposées ne permettent pas de corriger cette irrégularité.   

[94]           Donc, en application des dispositions de l’article 40 de la Loi sur les brevets, je refuse d’octroyer un brevet pour cette demande. Conformément aux dispositions de l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision devant la Cour fédérale du Canada.

 

 

 

 

 

 

 

Agnès Lajoie

Sous-commissaire aux brevets

 

Fait à Gatineau (Québec),

En ce 15e jour de juillet 2015

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