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Décision de la Commissaire #1311

Commissioners Decision #1311

  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJETS : O00

TOPICS: O00

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                 

Demande n: 2,292,065

Application No: 2,292,065


     

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉSUMÉ DE LA DÉCISION DE LA COMMISSAIRE

 

 

 

D.C. 1311             Demande no 2,292,065

 

La demande porte sur des affranchisseuses, et plus particulièrement sur une affranchisseuse à système fermé dans laquelle laffranchisseuse en question est couplée à un lecteur optique. Les affranchisseuses à système fermé ont ainsi accès à des renseignements sur les destinataires leur permettant de créer des affranchissements sécurisés de la même façon que le font les affranchisseuses à système ouvert. Le fait davoir accès à de tels renseignements permet également aux affranchisseuses à système fermé détablir et dimprimer un code postal à barres, comme le code à barres de PostNet, en plus dun affranchissement sécurisé. Il est également possible dapporter des modifications découlant dun changement dadresse.

 

Évidence

 

Toutes les revendications de la demande ont été rejetées par lexaminateur, qui les a jugées évidentes compte tenu de deux combinaisons de documents. 

 

Décision : Refus pour ces motifs infirmé en partie, confirmé en partie.

 

La commissaire a conclu que le refus des revendications de la demande en raison de la combinaison des documents Tygar et coll. (1) et Allen et coll. était injustifié, mais elle a conclu que le refus des revendications en raison de la combinaison des documents Tygar et coll. (2) et  Allen et coll. était justifié.

 

La demande a été par conséquent rejetée.

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

 

DÉCISION DE LA COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

                                                                             

 

 

 

 

 

La demande de brevet no 2,292,065 ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets, la demanderesse a sollicité la révision de la décision finale de lexaminateur. Le refus des revendications a été examiné par la Commission dappel des brevets et la commissaire aux brevets. Voici les conclusions de la Commission et la décision de la commissaire.

 

 

 

 

 

Agent de la demanderesse

 

Sim & McBurney

6th Floor

330 University Avenue

Toronto (Ontario)

M5G 1R7

 


INTRODUCTION

 

[1]    La présente décision porte sur la demande de révision par la commissaire aux brevets de la demande de brevet no 2,292,065 intitulée « MACHINE À AFFRANCHIR À SYSTÈME CLOS, DOTÉE DE CARACTÉRISTIQUES DE CORRECTION D’ADRESSE ». La demanderesse est PITNEY BOWES INC. Les inventeurs sont Robert W. Allport, Stephen Kelly, Timothy J. Nicholls, Christopher J. Capelli et Douglas B. Quine.

 

[2]    L’invention se rapporte à des systèmes d’affranchissement fermé qui impriment l’affranchissement, et notamment à une méthode qui génère et attribue un code postal (à savoir un code à barres) en plus de l’affranchissement grâce à une affranchisseuse à système fermé couplée à un lecteur optique.

 

[3]    Historiquement parlant, et comme cela est précisé dans le contexte entourant la présente demande, les affranchisseuses ont été divisées en deux catégories, celles à système ouvert et celles à système fermé.

 

[4]    Dans une affranchisseuse typique, l’imprimante est couplée de façon sécurisée aux fonctions comptables de l’affranchisseuse et est réservée à ces fonctions, si bien qu’il ne peut y avoir affranchissement sans opération comptable connexe. Un tel dispositif est en règle générale un appareil autonome qui n’exécute que des fonctions d’affranchissement. À titres d’exemples, on peut citer les affranchisseuses à système fermé classiques de type mécanique ou électronique.

 

[5]    En comparaison, dans un système ouvert, l’imprimante n’est pas réservée aux fonctions d’affranchissement, ce qui la libère pour rendre d’autres services. Un système informatique faisant appel à un PC et à une imprimante numérique constitue un exemple de système ouvert. Dans un tel système, il a fallu relier l’affranchissement à un article postal en particulier en incluant des renseignements sur le destinataire dans les renseignements figurant sur la preuve encodée de l’empreinte postale (à savoir l’affranchissement) imprimée sur l’article postal. Deux dessins montrant les systèmes ouvert et fermé sont présentés ci-dessous, les deux provenant de documents de brevets de Pitney Bowes et n’apparaissant qu’aux fins d’illustration.

 


Affranchisseuse à système fermé

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Envelope = Enveloppe

 

Affranchisseuse à système ouvert

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Computer = Ordinateur; Printer = Imprimante; To Public Electronic Communication Network = Vers un réseau de communication électronique public

 

[6]    Comme l’indique plus loin la demanderesse, de par la nature même des affranchisseuses à système fermé, l’emploi de celles-ci s’est généralement limité à l’impression d’affranchissements sur des articles postaux. Comme elles n’ont pas accès aux renseignements sur les adresses de l’expéditeur et du destinataire de chaque article postal (renseignements qui pourraient être stockés dans le PC d’un système ouvert), il leur manque certains moyens offerts par les systèmes ouverts, comme le nettoyage des adresses et d’autres services à valeur ajoutée.

 


[7]    Dans le cadre de la présente demande, la demanderesse propose de donner aux affranchisseuses à système fermé certains des moyens dont disposent les systèmes ouverts en les couplant à un lecteur optique. Ainsi, les affranchissements créés par les affranchisseuses à circuit fermé pourront être sécurisés de la même manière que le sont ceux des systèmes ouverts, et ce, grâce à l’inclusion de renseignements sur le destinataire dans l’affranchissement encodé. De plus, et particulièrement en ce qui concerne les revendications de la présente demande, le fait d’avoir accès aux renseignements sur le destinataire au sein même du dispositif permet d’établir le code à barres approprié, comme le code à barres de PostNet, et d’apporter des modifications découlant d’un changement d’adresse.

 

HISTORIQUE DE L’INSTRUCTION

 

[8]    La présente demande a été déposée au Canada le 13 décembre 1999 et revendique la priorité fondée sur une demande de brevet américain déposée le 30 décembre 1998. La demande a été refusée par l’examinateur dans une décision finale en date du 16 novembre 2004. L’examinateur a refusé les revendications 1 à 3 pendantes en raison de leur évidence eu égard au brevet américain no 5,703,783 délivré à Allen et coll. [Allen] le 30 décembre 1997, combiné aux enseignements formulés par Tygar et coll. (1) [Tygar (1)] dans la publication Cryptography: Its Not Just For Electronic Mail Anymore parue le 1er mars 1993, ou aux enseignements formulés par Tygar et coll. (2) [Tygar (2)] dans la publication Cryptographic Postage Indicia parue en janvier 1996.

 

[9]    En réponse à la décision finale, la demanderesse a apporté une modification mineure à la description et a modifié la revendication 1 pour préciser que la méthode en cause comprenait à la fois la création et l’impression d’une empreinte de système ouvert et d’un « code postal ». Les revendications 2 et 3 n’ont pas été modifiées. Puisque l’examinateur a conclu que les modifications apportées et les arguments avancés étaient insuffisants pour réfuter les objections, le dossier de l’affaire a été transmis à la Commission d’appel des brevets avec le résumé des motifs de l’examinateur justifiant le maintien des objections, qui a été communiqué à la demanderesse le 3 août 2006. Dans un courriel daté du 9 août 2007, la demanderesse s’est désistée de la possibilité de se faire entendre lors d’une audience.

 


[10]           À la suite de la publication, par la Cour suprême, de l’arrêt  Sanofi‑Synthelabo Canada Inc. c. Apotex Inc., 2008 CSC 61, 69 C.P.R. (4th) 251 [Sanofi], la demanderesse a été informée quelle avait loccasion de présenter des observations jugées nécessaires pour traiter des effets de larrêt Sanofi et sest vu de nouveau accorder loccasion de se faire entendre. Dans sa réponse écrite en date du 3 juin 2009, la demanderesse fondait son argumentation sur lapplicabilité du critère de l’« essai allant de soi » dans les circonstances de lespèce, en faisant valoir que ce critère était inapproprié, puisque lobjet de linvention visée ne relevait pas du domaine pharmaceutique ou du domaine de la chimie, et que les progrès relativement à un système daffranchissement postal ne sont pas souvent le fruit de lexpérimentation, comme dans le cas de ces domaines. La demanderesse na pas demandé la tenue dune audience.

 

PROBLÈMES DE FORMULATION DES REVENDICATIONS

 

[11]  Après une révision préliminaire de la présente demande, la Commission s’est vite rendu compte de la présence de problèmes de clarté découlant de certaines formulations employées dans les revendications, et notamment de l’expression « code postal ». Les revendications sont reproduites ci-dessous par souci de commodité [c’est nous qui soulignons] :

 

[Traduction]

1.  Méthode permettant de générer et dimprimer un code postal sur un article postal à laide dune affranchisseuse à système fermé possédant une imprimante réservée à cette fin, cette méthode comprenant les étapes suivantes :

couplage dun lecteur optique à ladite affranchisseuse;

lecture optique des renseignements relatifs à ladresse du destinataire imprimée sur ledit article postal;

encodage des renseignements sur ladresse lus optiquement dans un affranchissement;

établissement automatique du code postal correspondant à ladresse du destinataire;

impression du code postal et de laffranchissement sur larticle postal grâce à limprimante réservée à cette fin.

 

2.  La méthode de la revendication 1 comprenant létape suivante :

comparaison des renseignements sur ladresse du destinataire à ladresse correspondante dans une base de données constituée dun répertoire dadresses avant létablissement automatique du code postal.

 

3.  La méthode de la revendication 1 comprenant les étapes suivantes :

établissement du fait que les renseignements sur ladresse du destinataire ont changé;

génération du bon code postal lorsque les renseignements sur ladresse du destinataire ont changé;

impression du code postal et de ladresse corrigés sur larticle postal.  

 


[12]  D’après la présente revendication, si l’on donne à l’expression « code postal » son sens raisonnable le plus large de façon à y inclure le traditionnel code postal alphanumérique imprimé sur une enveloppe, cela voudrait dire que la revendication 1 va demander la lecture optique d’une adresse imprimée sur un article postal (comprenant normalement un code postal) et l’établissement automatique du code postal pertinent, lequel serait alors imprimé sur l’article postal. Cela nécessiterait l’établissement et l’impression d’un code postal figurant déjà sur l’article postal, une opération apparemment superflue. Le libellé des lignes 18 à 20 de la page 8 de la description va toutefois dans ce sens large donné à l’expression « code postal ».

 

[13]  D’un autre côté, une grande partie de la description porte sur la génération d’un code postal à barres, comme le code à barres de Postnet dont il est fait mention dans la description (voir page 3, page 4a et page 5, 1er paragraphe). Dans ce cas, la revendication porterait sur l’établissement d’un tel code à barres fondé sur les renseignements lus optiquement, lesquels seraient alors imprimés sur l’article postal, tout comme l’affranchissement. Cette interprétation nous paraît avoir plus de sens; toutefois, le caractère général de l’expression « code postal » et le fait qu’elle soit employée au sens large dans la description posent problème.

 

[14]  Vu cette ambiguïté, la Commission a communiqué avec l’agent de la demanderesse, lequel a convenu de discuter de ce sujet par téléconférence. Lors de cette discussion, qui a eu lieu le 5 février 2010, la Commission a également souligné ses préoccupations quant à la revendication dépendante 2. Celle‑ci précise qu’avant que le « code postal » soit déterminé automatiquement, l’adresse numérisée est comparée avec l’information figurant dans un répertoire d’adresses. Si la notion de « code postal » doit être interprétée comme étant un certain type de « code postal à barres », la revendication dépendante 2 ferait alors double emploi, vu qu’il s’agirait d’une étape inhérente à l’« établissement automatique du code postal » de la revendication 1. Il est difficile de savoir, compte tenu de la description, comment serait réalisée une telle étape et cela rend incertain le sens élargi du mot « automatique » dans la revendication 1.

 

[15]  Lors de la téléconférence, l’agent de la demanderesse a indiqué à titre provisoire (après avoir obtenu la confirmation de la demanderesse), qu’il conviendrait mieux de remplacer le terme « code postal » par « code postal à barres » et d’ajuster les revendications par suite du problème susmentionné concernant la revendication 2. L’agent de la demanderesse a indiqué aussi qu’aux modifications proposées concernant les questions soulevées, qu’il transmettrait bientôt, s’ajouteraient des observations sur la démarche à quatre volets relative à l’évidence qui a été énoncée dans l’arrêt Sanofi et qui ne faisait pas l’objet des observations antérieures à cet égard.

 

[16]  À ce jour, la demanderesse ne nous a pas transmis des observations sur l’une ou l’autre des questions susmentionnées ni de réponse concernant le suivi fait par son agent à ce sujet. Néanmoins, nous devons procéder à l’instruction en l’absence de toute modification proposée et de commentaires par la demanderesse sur l’application de la démarche à quatre volets de l’arrêt Sanofi.

 


[17]  Toutefois, nous examinerons l’objection fondée sur l’évidence en supposant que la demanderesse corrigerait l’ambiguïté signalée de la revendication 1 sur demande de la commissaire au titre de l’alinéa 31(c) des Règles sur les brevets, si la demande était par ailleurs jugée acceptable.         

 

QUESTION EN LITIGE

 

[18]  Selon la décision finale et le résumé des motifs fourni par l’examinateur, la question qui se pose en l’espèce consiste à savoir si les revendications 1 à 3 auraient été évidentes compte tenu des enseignements d’Allen combinés à ceux de Tygar (1) ou de Tygar (2).

 

ÉVIDENCE

 

[19]  L’opinion de l’examinateur quant à l’évidence des revendications se reflète dans le passage suivant tiré de la décision finale :

[Traduction]

Le dispositif exposé par Allen et coll. (colonne 2, lignes 24 à 65; colonne 5, ligne 39 à colonne 8, ligne 34) lit optiquement les renseignements sur ladresse du demandeur imprimés sur larticle postal, consulte une base de données afin de vérifier ladresse, la corrige au besoin et imprime le code postal à barres correspondant à la bonne adresse du destinataire (et, si nécessaire, ladresse corrigée) sur larticle postal. Bien que Allen et coll. exposent que ce dispositif servirait à traiter des articles postaux interceptés dans le circuit postal, il nen demeure pas moins évident quun procédé similaire serait utilisé à nimporte quelle étape du processus de traitement du courrier dans lequel on souhaiterait nettoyer les adresses, y compris dès le début. Comme lindique la présente demande (page 2, lignes 20 à 26), les affranchisseuses à système ouvert servent déjà à nettoyer les adresses dès le début, puisquelles ont de façon générale accès aux renseignements sur les adresses. Comme lont démontré Tygar et coll. dans Cryptography (résumé; section 5) et dans Cryptographic Postage (résumé; section 5), les personnes versées dans lart connaissent déjà la technique qui consiste à coupler des lecteurs optiques à des affranchisseuses dans le but dimprimer des codes à barres renfermant des renseignements lus sur un article postal commet tel. Un technicien habile mais sans imagination confronté à un problème de courrier de départ nécessitant un nettoyage des adresses et la présence de codes à barres arriverait directement et sans effort à la méthode revendiquée après avoir lu les exposés de Allen et coll. et de Tygar et coll.

 

[20]  Dans sa réponse du 7 mars 2005 à la décision finale, la demanderesse a notamment indiqué ceci :

 

[Traduction]


La présente invention, au contraire du dispositif divulgué dans Allen et coll., se rapporte aux affranchisseuses à système fermé qui peuvent établir et générer le code à barres de PostNet dun article postal qui est imprimé sur ledit article au moment où laffranchisseuse à système fermé imprime laffranchissement sur larticle postal, tout en effectuant des corrections à ladresse sur larticle postal. Il ne sagit pas dune simple variante du traitement effectué par Allen et coll. Dans Allen et coll., ladresse déjà imprimée sur un article postal qui est entré dans le circuit postal est lue durant le traitement dudit article par lUSPS afin détablir si larticle postal est mal adressé. Sil est établi que larticle postal est mal adressé, alors une étiquette de réexpédition est apposée sur larticle postal et ladresse de réexpédition est imprimée sur létiquette de réexpédition. Dans Allen et coll., le traitement est effectué par le bureau de poste après la préparation de larticle postal par lexpéditeur et son entrée dans le circuit postal. Au contraire, la présente invention utilise une affranchisseuse à système fermé permettant de générer et dimprimer un code à barres postal alors que lexpéditeur est en train de préparer larticle postal. Dans Allen et coll., on ne trouve à aucun moment une divulgation, un exposé ou une suggestion portant sur la génération dun code à barres à laide dune affranchisseuse à système fermé comme celle décrite dans la présente invention. Le dispositif exposé par Allen et coll. ne renferme aucune affranchisseuse à système fermé et, par conséquent, il ne demande pas lexécution des étapes de la méthode dont il est question dans les présentes revendications.

Les renvois à Tygar et coll. ne contrecarrent en rien les lacunes indiquées plus haut, puisquils ne font jamais référence à létablissement et à limpression, sur un article postal, dun code postal accompagné dun affranchissement, pas plus que les renvois à Tygar et coll. divulguent, exposent ou suggèrent lexécution de modifications découlant dun changement dadresse.

Il ny a, dans aucune des références auxquelles renvoie lexaminateur, ni divulgation, ni exposé, ni suggestion traitant soit du problème soulevé, soit de la solution présentée dans cette demande. Lexaminateur prétend que « le moment dans un processus dadministration et de logistique (comme la livraison du courrier) au cours duquel un dispositif doit être utilisé, ne distingue en rien ce dispositif du point de vue de la délivrance dun brevet, notamment si la fonction ou lusage de ce dispositif sont similaires ou analogues. » Lexaminateur omet toutefois de considérer que les fonctions de génération dun article postal, y compris de son affranchissement faisant office de preuve des frais postaux, et la livraison darticles postaux ne sont ni similaires ni analogues. Sans utilisation du présent mémoire descriptif et des présentes revendications comme feuille de route, il ny a aucun fondement à la prétention de lexaminateur portant que nimporte qui aboutirait directement et sans aucune difficulté à la méthode revendiquée après avoir lu les exposés dAllen et coll. et de Tygar et coll.

 


[21]  Dans le passage cité plus haut tiré de la décision finale, l’examinateur a parlé d’« un problème de courrier de départ nécessitant un nettoyage des adresses et la présence de codes à barres ». Nous ne pouvons, après examen du mémoire descriptif, identifier la présence d’un tel problème. Si, à la page 2, la demanderesse fait état des limites intrinsèques des affranchisseuses à système fermé, aucun problème spécifique de ce genre n’a été souligné. Ce que l’examinateur a qualifié de problème comprend des caractéristiques de l’invention revendiquée par la demanderesse (à savoir, la solution proposée aux anciennes limites existantes). En ce qui concerne les commentaires de la demanderesse, il est fait mention de l’absence de divulgation, d’exposé ou de suggestion visant « soit le problème soulevé, soit la solution proposée ... ». Toutefois, la demanderesse n’identifie aucun « problème ». Par conséquent, nous ne pouvons voir aucun problème général dans ce domaine, à l’exception des limites intrinsèques des affranchisseuses à système fermé par rapport à celles à système ouvert, comme l’indique la demande, limites qui sont dues au manque d’accès aux renseignements sur les adresses de l’expéditeur et du destinataire de chaque article postal.

 

Principes juridiques applicables en matière dévidence

 

[22]  L’article 28.3 de la Loi sur les brevets énonce les conditions dans lesquelles une revendication peut être considérée évidente :

 

28.3  Lobjet que définit la revendication dune demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans lart ou la science dont relève lobjet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, plus dun an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui linformation à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle quelle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle quelle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs.

 

[23]           Dans l’arrêt Sanofi, la Cour suprême du Canada a énoncé la démarche à suivre pour apprécier le caractère évident, qui comprend désormais les quatre volets suivants, avec la question de l’« essai allant de soi » qui se pose à la quatrième étape :

 

1) a) Identifier la « personne versée dans lart »;

    b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

2)     Définit lidée originale de la revendication en cause, au besoin par voie dinterprétation;

3)    Recenser les différences, sil en est, entre ce qui ferait partie de « létat de la technique » et lidée originale qui sous‑tend la revendication ou son interprétation;

4)    Abstraction faite de toute connaissance de linvention revendiquée, ces différences constituent‑elles des étapes évidentes pour la personne versée dans lart ou dénotent‑elles quelque inventivité?

 

[24]  Dans ses observations en date du 3 juin 2009, la demanderesse a affirmé qu’en l’espèce il ne s’agissait pas d’un cas où le critère de l’« essai allant de soi » était applicable, parce que l’invention en cause était différente du type d’invention qui faisait l’objet de l’analyse énoncée par la Cour suprême (Voir Sanofi, au par. 68). Nous sommes du même avis.

 

[25]  Dans l’arrêt Sanofi, le juge Rothstein indique au paragraphe 65 que l’expression « allant de soi » signifie quelque chose de « très clair ». La Cour d’appel fédérale a repris cette interprétation dans Pfizer Canada Inc. c. Apotex Inc., 2009 CAF 8, 72 C.P.R. (4th) 41, au par. 29.     

 


[26]  Dans une affaire comme en l’espèce, où on fait valoir que l’invention aurait été évidente compte tenu d’une combinaison de documents, il faut retenir les indications suivantes données par la juge Snider au par. 254 de la décision Laboratoires Servier c. Apotex Inc., 2008 FC 825, 67 C.P.R. (4th) 241; conf. par 2009 CAF 222, 75 C.P.R. (4th) 443 :

 

Comme la reconnu Servier, il est possible de réunir une mosaïque de réalisations antérieures afin de faire en sorte quune revendication soit évidente. On suppose que même des techniciens non inventifs versés dans lart lisent différentes revues professionnelles, participent à différents congrès et appliquent les enseignements tirés dune source à un autre contexte ou quils combineraient même les sources. Toutefois, ce faisant, la partie faisant valoir lévidence doit être en mesure de montrer non seulement lexistence de réalisations antérieures, mais aussi la manière dont la personne normalement versée dans lart aurait été amenée à combiner les éléments pertinents provenant de la mosaïque des réalisations antérieures.

 

Analyse selon la démarche à quatre volets énoncée dans larrêt  Sanofi

 

(1)a) La personne versée dans lart

 

[27]  Aux fins de la présente affaire, la personne versée dans l’art serait un technicien travaillant dans le domaine des affranchisseuses à système aussi bien fermé qu’ouvert. De plus, cette personne connaîtrait très bien les systèmes de traitement du courrier en général, y compris l’équipement servant à cette fin ainsi que ses fonctions.

 

(1)b) Les connaissances générales courantes pertinentes

 

[28]  Les connaissances générales courantes d’une telle personne comprendraient les connaissances des affranchisseuses conventionnelles, à système tant ouvert que fermé, comme les renseignements divulgués dans la partie consacrée au contexte du mémoire descriptif de la demanderesse aux pages 2 à 3. Les énoncés formulés dans la demande à propos de l’art antérieur ou des connaissances générales courantes doivent être considérés comme des déclarations qui lient la demanderesse (voir Merck & Co., Inc. c. Pharmascience, Inc., 2010 CF 510, par. 8). Par exemple, la personne versée dans l’art connaîtrait bien les caractéristiques qui différencient les systèmes fermés des systèmes ouverts, comme une imprimante réservée aux fonctions d’affranchissement par rapport à une autre qui ne l’est pas, la sécurisation de l’affranchissement d’un système ouvert grâce à l’inclusion de renseignements sur l’adresse dans la preuve encodée de paiement des frais postaux ainsi que les limites intrinsèques des fonctionnalités des systèmes fermés à cause de l’absence d’accès aux renseignements sur les adresses de l’expéditeur et du destinataire. La personne versée dans l’art devrait également avoir des connaissances des systèmes conventionnels de traitement du courrier et des façons de faire utilisées par les autorités postales.


 

(2) L’idée originale

 

[29]  L’idée originale de la revendication 1 peut être définie comme une méthode dans laquelle, à la suite du couplage d’un lecteur optique à une affranchisseuse à système fermé, des renseignements sur les adresses sont accessibles au système, lesquels servent alors à générer et à imprimer un affranchissement de type système ouvert ainsi qu’à établir et à imprimer automatiquement un code à barres postal sur un article postal en plus de l’affranchissement.

 

[30]  L’idée originale de la revendication 2 porte sur l’ajout d’une caractéristique permettant d’établir le « code à barres » pertinent en comparant les renseignements de l’adresse susmentionnés à ceux que renferme une base de données constituée d’un répertoire d’adresses. Malgré notre discussion avec l’agent de la demanderesse quant à la présence de cette revendication, nous allons nous y intéresser, bien que, à la lumière de cette discussion, il est très probable que la reconnaissance ou le rejet du caractère brevetable de cette revendication dépendra de la décision rendue à propos de la revendication 1.

 

[31]  L’idée originale de la revendication 3 diffère de celle de la revendication 1, en ce sens qu’elle comprend l’étape additionnelle consistant à effectuer des corrections relatives à des changements d’adresse et à imprimer une adresse révisée ainsi que le code à barres correspondant.

 

(3) Différences entre « létat de la technique » et lidée originale

 

[32]  L’examinateur s’est appuyé sur Allen, Tygar(1) et Tygar(2) dans son refus pour cause d’évidence. Nous allons examiner chacun de ces documents, puis nous allons les comparer à l’idée originale pour voir où se trouvent les différences.

 

Allen

 


[33]  Allen (US 5,703,783) divulgue un système de traitement des articles postaux qui sert à identifier, à intercepter et à réexpédier les articles postaux mal adressés provenant du circuit postal au moment du dépôt des articles postaux dans le système. Ce dernier est appelé à être incorporé dans le matériel de traitement automatisé du United States Postal Service (USPS). S’il est possible de lire automatiquement l’adresse de l’article postal, une image de l’adresse peut alors être faite, numérisée et traitée par un système de reconnaissance optique des caractères (ROC), et ces renseignements servent à vérifier s’il y a une adresse de réexpédition dans la base de données nationale des changements d’adresse de l’USPS en cherchant une adresse qui correspond à celle qui a été lue optiquement. Si aucune adresse n’est trouvée, l’article postal est alors intercepté et on lui imprime la bonne adresse ainsi que le code à barres POSTNET pertinent.

 

[34]  Si aucune adresse de réexpédition n’est trouvée, le code à barres de destination (POSTNET) correspondant au code postal du point de livraison de l’adresse de destination est imprimé sur l’article postal. Ce code à barres est ensuite utilisé par une machine à trier afin de diriger l’article dans le bon sac postal (voir col. 6 et 7).

 

[35]  Dans le cas des articles postaux qui ne peuvent être lus optiquement, le processus est similaire, si ce n’est qu’une opération manuelle doit être faite par un opérateur humain afin qu’il soit possible d’entrer les renseignements nécessaires pour effectuer la vérification relative à un changement d’adresse et retrouver le code à barres (POSTNET) de destination. D’autres variations mineures du système décrit ci-dessus sont divulguées, mais elles n’apportent rien de plus à la présente discussion.

 

[36]  Le document Allen ne fait pas mention des affranchisseuses à système ouvert ou fermé, comme l’a signalé la demanderesse dans sa réponse du 7 mars 2005. En fait, il n’y est nullement question du processus d’affranchissement. Toutefois, on peut s’attendre à ce qu’au moins une partie des article postaux entrés dans le système de traitement du courrier aient un affranchissement apposé par une affranchisseuse. En relation avec les codes à barres de POSTNET, le document Allen, dans l’examen de l’art antérieur concernant le traitement des articles postaux à leur arrivée dans des installations postales générales de l’USPS à la col. 5, lignes 24-38, indique trois types d’articles postaux à l’arrivée, à savoir ceux dont les adresses peuvent être lues à la machine, ceux dont les adresses ne peuvent pas l’être et ceux sur lesquels a déjà été apposé le code à barres (POSTNET) de destination. Puisque certains articles postaux entrent dans le circuit postal en ayant déjà un code à barres POSTNET, cela veut logiquement dire que ce code doit avoir été apposé du côté de l’expéditeur au moment de la génération de l’article postal.

 

Tygar(1)

 

[37]  Ce document porte sur l’introduction de techniques de cryptographie pour produire des timbres postaux, et ce, grâce à l’utilisation de la technologie des codes à barres pour encoder les renseignements servant à produire un timbre électronique. Dans ce document, on discute des affranchisseuses « fermées » de l’art antérieur et on montre à la Figure 1 un timbre non sécurisé produit par une telle affranchisseuse, timbre qui peut être facilement contrefait.

 


[38]  Afin de minimiser le risque qu’un timbre cryptographié puisse être contrefait, les auteurs suggèrent, à la section 2, page 3 du document, d’encoder

 

[Traduction]

dans le timbre, tous les renseignements pertinents à la livraison dun article postal en particulier - p. ex. ladresse de retour ainsi que celle de destination, le montant des frais postaux, la classe de courrier, etc. - ainsi que dautres renseignements didentification, comme le numéro de série de laffranchisseuse, un numéro de série de timbre ainsi que la date et lheure (timbre dateur).

 

[39]  Ces renseignements sont ensuite encodés numériquement et reçoivent une signature cryptographiée. Les renseignements ainsi que la signature cryptographiée sont ensuite transformés en format de code à barres et imprimés à l’aide d’une imprimante laser. Puisque le timbre contient des renseignements sur l’adresse de destination, il ne peut servir à envoyer du courrier à une autre adresse, et les timbres dateurs limitent la durée de vie des reproductions.

 

[40]  À la section 5 de ce document, on donne un aperçu de l’équipement nécessaire pour qu’une affranchisseuse électronique puisse créer un timbre électronique, à savoir un coprocesseur sécurisé, un PC, une imprimante laser, un modem et, éventuellement, un lecteur de ROC et/ou une interface de réseau. Les renseignements servant à créer un timbre sécurisé (à savoir les adresses de destination et de retour ainsi que le poids et la classe de courrier) proviennent d’un traitement de texte du PC de l’utilisateur au moyen d’un réseau local, d’un logiciel de ROC avec lecture optique des renseignements de l’enveloppe, ou par entrée directe de l’utilisateur à l’aide d’un clavier. Le processeur sécurisé crée alors un timbre cryptographié sous la forme d’un code à barres.

 

[41]  Il est évident d’après la description de la configuration du système non exclusivement réservé à ce genre de travail, à savoir un PC et une imprimante laser, que ce qui est décrit est une affranchisseuse à système ouvert, par opposition au système fermé de la présente demande. Il est dit dans la divulgation que les renseignements nécessaires à la création d’un timbre sécurisé dans un tel système peuvent être obtenus au moyen d’un lecteur optique ou d’un logiciel ROC pour lire les renseignements sur l’adresse d’un article postal. Toutefois, il n’est pas suggéré qu’une telle fonctionnalité soit appliquée à une affranchisseuse à système fermé. Tygar(1) divulgue la création d’un affranchissement de système ouvert obtenu par une affranchisseuse à système ouvert, comme cela a été expliqué dans la section consacrée au contexte de la présente demande.

 


[42]  De plus, bien que Tygar(1) divulgue la saisie de renseignements d’un article postal dans le but de produire un timbre sécurisé (à savoir un affranchissement) sous la forme d’un code à barres, il ne divulgue ni l’établissement d’un code à barres correspondant à l’adresse du destinataire (p. ex. un code à barres de POSTNET) ni l’impression de ce code à barres sur l’article postal en plus de l’affranchissement sécurisé dont il est question dans la revendication 1.

 

Tygar(2)

 

[43]  Ce document ressemble beaucoup au document Tygar(1), puisqu’il traite d’un système capable de produire un affranchissement de type système ouvert sécurisé qui englobe des renseignements concernant les adresses de destination et de retour d’un article postal ainsi que la date et l’heure de création de l’affranchissement (voir la section 4 de ce document). On aborde également dans ce document les affranchisseuses à système fermé d’art antérieur ainsi que les timbres non sécurisés qu’elles produisent. Comme dans Tygar(1), les renseignements contenus dans l’affranchissement sont représentés sous forme numérique, accompagnés d’une signature cryptographiée et imprimés sur un article postal sous la forme d’un code à barres.

 

[44]  Tygar(2) commence par décrire la création d’un affranchissement sécurisé dans un environnement à système ouvert constitué d’une imprimante laser ou d’un dispositif similaire ne servant pas exclusivement à cette fin, commandé par un poste de travail ou un PC. Toutefois, à la section 5 du document, on discute de l’applicabilité d’un tel affranchissement à un environnement à système fermé [c’est nous qui soulignons] :

 

[Traduction]

Jusquà maintenant, nous avons discuté de systèmes incorporant ladresse de destination dans laffranchissement. Malheureusement, cette exigence élimine les modèles autonomes traditionnels daffranchisseuses qui apposent un affranchissement sans connaître ladresse de destination. Pour utiliser un système autonome capable de générer laffranchissement indiqué ci-dessus, il faudrait que lopérateur fasse une lecture optique ou entre manuellement les renseignements sur ladresse dans lappareil.

                                                                             


[45]  Ce passage laisse clairement entrevoir (comme l’a indiqué l’examinateur à la page 3 de la décision finale et à la page 3 du résumé des motifs) l’option de créer un affranchissement de type système ouvert sécurisé à l’aide d’une affranchisseuse à système fermé (à savoir un modèle autonome traditionnel). Comme cela a déjà été dit, pour y parvenir, il faut que l’affranchisseuse ait accès aux renseignements sur l’adresse, lesquels peuvent être obtenus par lecture optique de l’adresse sur l’article postal. L’affranchisseuse à système fermé devrait bien entendu être modifiée pour pouvoir créer l’affranchissement de type système ouvert à l’aide du processus divulgué. La mise en oeuvre technique propre à la création de l’affranchissement sécurisé est abordée dans Tygar(2), mais l’ajout d’un lecteur optique à une affranchisseuse à système fermé ne l’est pas. Cette dernière modification tomberait, semble-t-il, dans le champ des compétences attendues d’une personne connaissant bien ce domaine. Ce point de vue est renforcé par le fait que la propre divulgation de la demanderesse ne fournit aucun détail sur le couplage d’un lecteur optique à une affranchisseuse à système fermé. Si des renseignements supplémentaires étaient nécessaires pour mettre en oeuvre ce processus, la présente demande serait alors défaillante à cause de l’absence de renseignements sur la réalisation d’un tel agencement. Toutefois, nous sommes d’avis que la description de la demanderesse n’est pas incomplète et que le couplage d’un lecteur optique à une affranchisseuse à système fermé ne devrait pas présenter de problèmes à une personne versée dans l’art.

 

Conclusions sur les « différences »

 

[46]  En ce qui concerne la divulgation 1, l’examen du document Tygar(1) montre que les différences résideraient dans l’idée nouvelle elle-même. Tygar(1) ne suggère ni la génération ni l’impression par une affranchisseuse à système fermé d’un affranchissement de type système ouvert grâce au couplage d’un lecteur optique à l’affranchisseuse à système fermé. Il ne suggère pas non plus la détermination et l’impression d’un code à barres postal par une telle affranchisseuse à système fermé. En ce qui concerne les revendications 2 et 3, les différences seraient celles de la revendication 1 auxquelles s’ajouteraient les caractéristiques additionnelles de ces revendications.

 

[47]  Il est évident d’après les observations faites ci-dessus que le document Tygar(2) est la pièce la plus pertinente en matière d’art antérieur. Ce document, contrairement à Tygar(1), divulgue une partie de l’idée originale mentionnée plus tôt, à savoir la génération et l’impression, par une affranchisseuse à système fermé, d’un affranchissement sécurisé de type système ouvert incorporant des renseignements sur l’adresse de destination, grâce à la lecture optique des renseignements sur l’adresse d’un article postal et à l’entrée de ces renseignements dans le système qui serait alors en mesure de coder les renseignements afin de produire un affranchissement postal.

 

[48]  Par conséquent, en ce qui concerne la revendication 1, la différence entre l’idée originale et l’« état de la technique » réside dans la détermination automatique d’un code à barres postal correspondant à l’adresse du destinataire et dans l’impression de ce code à barres sur un article postal en plus de l’affranchissement postal.

 

[49]  En ce qui concerne la revendication 2, les différences seraient celles de la revendication 1 auxquelles s’ajouteraient les caractéristiques additionnelles de la revendication 2 portant sur la recherche dans une base de données constituée d’un répertoire d’adresses avant la détermination du code à barres.

 


[50]  En ce qui concerne la revendication 3, les différences seraient celles de la revendication 1 auxquelles s’ajouteraient les caractéristiques additionnelles de la revendication 3 portant sur les corrections relatives à des changements d’adresse.

 

(4) Ces différences auraient-elles été évidentes?

 

[51]  En ce qui concerne la revendication 1, nous avons dit plus haut que les différences entre Tygar(1) et l’idée originale de la revendication 1 auraient tenu à l’idée originale elle‑même. Le document additionnel Allen n’aurait été d’aucun secours pour arriver à l’objet de la revendication 1, puisque, comme nous l’avons déjà dit, Allen ne parle pas du tout des processus d’affranchissage. Par conséquent, nous ne voyons pas pourquoi la personne versée dans l’art aurait apporté les modifications nécessaires pour arriver à l’idée originale reposant sur une combinaison des documents Tygar(1) et Allen. De la même façon, les revendications 2 et 3, qui dépendent de la revendication 1, n’auraient pas été évidentes.

 

[52]  À la lumière de ces constatations, l’analyse qui suit se concentre sur le caractère brevetable des revendications en fonction de la combinaison des documents Tygar(2) et Allen.

 

Revendication 1 : Détermination et impression dun code à barres postal

 

[53]  Nous avons déjà signalé que la demanderesse a divulgué dans la présente demande les limites connues des affranchisseuses à système fermé et nous avons conclu que celles-ci faisaient partie des connaissances générales courantes d’une personne versée dans l’art. Selon la divulgation, c’est à cause de ces limites (à savoir le manque d’accès aux renseignements sur l’adresse) que les affranchisseuses à système fermé ne disposent pas des mêmes fonctionnalités que les affranchisseuses à système ouvert, comme le nettoyage des adresses ou d’autres services à valeur ajoutée.

 


[54]  Dans l’étape 3 ci-dessus, il apparaît que Tygar(2) a suggéré le couplage d’un lecteur optique à une affranchisseuse à système fermé afin que celle-ci ait accès aux renseignements sur l’adresse nécessaires à la création d’un affranchissement sécurisé de type système ouvert. Par conséquent, cela signifie qu’au moins à partir de la divulgation faite par Tygar(2) en 1996, la limite perçue par la demanderesse n’existait plus. Compte tenu de cela, à la date de la divulgation, la personne versée dans l’art ainsi libérée des limites alors perçues aurait immédiatement su que les services à valeur ajoutée avantageux, comme le nettoyage des adresses mentionné plus haut, auraient été tout aussi bien applicables aux affranchisseuses à système fermé couplées à un lecteur optique et ayant accès aux renseignements sur l’adresse d’un article postal. Nous considérons qu’il en aurait été ainsi parce que le critère permettant l’utilisation de tels services à valeur ajoutée résidait dans l’accès à de tels renseignements sur les adresses. La question devient alors la suivante : quels services à valeur ajoutée des systèmes ouverts, autres que le nettoyage des adresses, auraient été tout autant applicables aux systèmes fermés avec accès égal aux renseignements sur les adresses?

 

[55]  À la page 3, lignes 13-18 de la présente demande, la détermination du code à barres postal est décrite de la façon suivante :

[Traduction]

Un avantage additionnel a été découvert à propos de lutilisation, par un système fermé, des renseignements sur ladresse lus de façon optique sur un article postal. Conformément à la présente invention, une affranchisseuse à système fermé couplée à un lecteur optique peut déterminer et générer un code à barres de PostNet destiné à un article postal qui sera imprimé sur ledit article postal au moment où laffranchisseuse à système fermé imprime laffranchissement sur larticle postal.

 

[56]  Et à la page 5, lignes 3-11, il est dit ceci :

[Traduction]

Grâce aux techniques de ROC, le processeur de laffranchisseuse peut déterminer le code à barres de PostNet de ladresse du destinataire à partir des renseignements sur ladresse du destinataire imprimés à la surface de larticle postal. À laide de ces renseignements, le processeur de laffranchisseuse se sert dune table de consultation dun répertoire dadresses (se trouvant de préférence dans laffranchisseuse) pour déterminer le code à barres de PostNet. Une fois ce code déterminé, une imprimante numérique imprime le code à barres de PostNet à lextérieur de larticle postal afin den accélérer la livraison et doffrir éventuellement une réduction des frais dexpédition de larticle postal.


 

[57]  La demanderesse ne prétend pas avoir inventé l’utilisation du « code à barres de PostNet ». Concrètement, à la page 8, lignes 18-20, il est fait référence à un code à barres utilisé par l’USPS et, pour reprendre la citation ci-dessus, l’USPS lui reconnaît certains avantages. Son utilisation et la méthode de création étaient donc chose courante avant la date de revendication de la présente demande. Nous pourrions prendre la création d’un tel code à barres comme l’un des services à valeur ajoutée que pouvaient rendre les affranchisseuses à système ouvert, mais non celles à système fermé à cause de leur manque d’accès aux renseignements sur les adresses des articles postaux, du moins selon la demanderesse.

 

[58]  En ce qui concerne le document Allen, bien que l’on y traite essentiellement d’un système où la vérification des adresses se fait dans les installations postales générales de l’USPS, le système appose lui aussi des codes à barres de POSTNET sur les articles postaux. Une fois qu’une adresse postale a été lue optiquement par un rehausseur d’images vidéo à haute résolution (voir Fig. 4), ces renseignements sur l’adresse sont traités dans la base de données ZIP+4 de l’USPS afin de déterminer le code postal du point de livraison de l’article postal, lequel code sert ensuite à déterminer le code à barres de POSTNET correspondant au code postal du point de livraison de l’adresse de destination (voir col. 6, lignes 4-41).

 

[59]  Allen révèle comment il aurait été possible de déterminer le code à barres de POSTNET à partir des renseignements lus optiquement sur un article postal, fonctionnalité qui, d’après nous, aurait été un service à valeur ajoutée d’une affranchisseuse à système ouvert et, par conséquent, aurait été applicable à une affranchisseuse à système fermé couplée à un lecteur optique ayant accès aux renseignements sur les adresses des articles postaux.

 


[60]  Une fois qu’il a été connu qu’il était possible de donner aux affranchisseuses à système fermé accès aux renseignements sur les adresses des envois postaux, comme l’a démontré Tygar(2), il y aurait eu une incitation claire à ajouter cette fonctionnalité déjà connue donnant un tel accès, vu les lacunes connues des systèmes fermés inhérentes à leur manque historique d’accès à de tels renseignements.

 

[61]  Nous concluons donc que la revendication 1 aurait été évidente à la lumière des exposés de Tygar(2) et d’Allen.

 

Revendication 2 : Comparaison des renseignements sur ladresse afin de déterminer le code à barres postal

 

[62]  Nous avons déjà fait part de nos préoccupations à propos de la présence d’une telle revendication dépendante, puisqu’elle semblerait intrinsèquement nécessaire pour pouvoir déterminer automatiquement un code à barres postal à partir de renseignements lus optiquement dans le but de faire une certaine forme de recherche dans une base de données. Ce point de vue est renforcé par l’examen antérieur du document Allen, lequel divulgue l’utilisation des renseignements lus optiquement sur l’article postal afin de déterminer le code postal du point de livraison à partir de la base de données ZIP+4 de l’USPS, ce code servant alors à déterminer le code à barres de POSTNET. Compte tenu de ce qui précède, les caractéristiques de la revendication 2 ne peuvent pas servir à distinguer l’invention revendiquée de l’art antérieur. Par conséquent, nous concluons que la revendication 2 aurait elle aussi été évidente à la lumière des exposés de Tygar(2) et d’Allen.

 

Revendication 3 : Correction découlant dun changement dadresse

 


[63]  En ce qui concerne la correction découlant d’un changement d’adresse, il est clair d’après la discussion de la page 5, lignes 12-28, que la demanderesse n’a pas inventé ce processus. Il est divulgué que FASTforward™, le système de gestion des adresses devant être utilisé, a été fourni par l’USPS et que, de ce fait, il aurait fait partie des connaissances générales courantes à la date pertinente. Il permettait aux expéditeurs de faire apposer les bonnes adresses les plus récentes sur les articles postaux [Traduction] « immédiatement avant l’entrée dans le circuit postal ». On peut également lire ceci :

 

[Traduction]

Jusquici, le système FASTforward na pas pu être utilisé directement avec des affranchisseuses à système fermé.

 

[64]  Comme ce processus devait être utilisé avant l’entrée dans le circuit postal et qu’il est dit qu’il ne pouvait servir avec des affranchisseuses à système fermé, nous pourrions être d’avis qu’il était utilisable avec des systèmes ouverts, vu qu’ils avaient accès aux renseignements sur les adresses. De plus, nous avons noté que, dans le document Allen, à l’étape du traitement postal, la correction découlant d’un changement d’adresse est effectuée par traitement de l’adresse de destination dans la base de données nationale des changements d’adresse de l’USPS afin de déterminer si une adresse de réexpédition y figure. Dans l’affirmative, la nouvelle adresse est alors apposée, tout comme le nouveau code à barres de POSTNET (voir col. 6-8). Bien que dans ce document on ne parle pas des affranchisseuses, on y révèle cependant que la fonctionnalité d’un système de changements d’adresse était connue, fonctionnalité qui est dans le droit fil des caractéristiques additionnelles de la revendication 3.

 


[65]  Compte tenu de notre conclusion selon laquelle il était déjà connu de coupler un lecteur optique à une affranchisseuse à système fermé afin d’obtenir des renseignements sur les adresses des articles postaux, ce service à valeur ajoutée autrefois applicable aux systèmes de traitement de courrier et aux affranchisseuses à système ouvert l’aurait été tout autant à celles à système fermé. La personne versée dans l’art, comme en ce qui concerne la détermination et l’impression d’un code à barres postal, une fois levée par Tygar(2) la barrière empêchant l’utilisation d’un tel service à valeur ajoutée, aurait immédiatement reconnu qu’une telle fonction de correction des adresses pouvait tout aussi bien s’appliquer aux affranchisseuses à système fermé. Une fois de plus, les lacunes connues des affranchisseuses à système fermé par rapport à celles à système ouvert, comme le reconnaît la demanderesse, auraient incité une personne versée dans l’art à ajouter aux affranchisseuses à système fermé les services à valeur ajoutée de celles à système ouvert, une fois disponible l’accès aux renseignements sur les adresses indispensable pour pouvoir ajouter de tels services.

 

[66]  Il en résulte que, d’après nous, la revendication 3 aurait elle aussi était évidente à la lumière des exposés de Tygar(2) et d’Allen.


RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION

 

[67]  Compte tenu des conclusions qui précèdent, la Commission recommande que :

 

1)   le refus, par l’examinateur, des revendications 1 à 3 en raison de leur évidence compte tenu de Tygar et coll.(1) et Allen et coll., soit infirmé;

2)   le refus, par l’examinateur, des revendications 1 à 3 en raison de leur évidence compte tenu de Tygar et coll.(2) et Allen et coll., soit confirmé.

 

 

 

Stephen MacNeil         Paul Fitzner            Andrew Strong

Membre                  Membre                 Membre

 

 

DÉCISION DE LA COMMISSAIRE

 

[68]  Je souscris aux conclusions et aux recommandations formulées par la Commission d’appel des brevets que :

 

1)   le refus, par l’examinateur, des revendications 1 à 3 en raison de leur évidence compte tenu de Tygar et coll.(1) et Allen et coll., soit infirmé;

2)   le refus, par l’examinateur, des revendications 1 à 3 en raison de leur évidence compte tenu de Tygar et coll.(2) et Allen et coll., soit confirmé.

 

Par conséquent, je refuse d’accorder un brevet dans la cadre de la présente demande. En vertu de l’article 41 de la Loi sur les brevets, la demanderesse dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision auprès de la Cour fédérale du Canada.    

 

 

 

 


Mary Carman

Commissaire aux brevets

 

Fait à Gatineau (Québec),

ce 23e jour de mars 2011

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