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Commissioners Decision #1295

Décision de la Commissaire no 1295

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TOPICS: O00

SUJETS : O00

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Application No : 2,312,221

Demande no : 2,312,221


 

 

 

 

 

 

 

 

RÉSUMÉ DE LA DÉCISION DE LA COMMISSAIRE

 

 

 

C.D. 1295            Demande no 2,312,221

 

La demande porte essentiellement sur une méthode permettant de confirmer la remise dun article postal dans le contexte dun système de courrier. Selon la méthode revendiquée, linformation sur les « services à valeur ajoutée », comme ladresse de lexpéditeur (nécessaire pour retourner un accusé de réception), est intégrée à une marque postale numérique imprimée sur larticle postal. Lors de la remise de larticle, ladresse de lexpéditeur est lue et saisie, et un accusé de réception confirmant la remise est généré et envoyé à lexpéditeur.

 

Toutes les revendications de la demande ont été rejetées par lexaminateur, qui les a jugées évidentes. La Commission a estimé que les revendications nauraient pas été évidentes et a recommandé que le refus de lexaminateur soit infirmé. 

 

La Commissaire a souscrit aux recommandations de la Commission, et la demande a été renvoyée à l’examinateur pour que celui-ci y fasse droit.



 

 

 

 

 

 

 

 

 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

 

DÉCISION DE LA COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

                                                                             

 

 

 

 

 

La demande de brevet no 2,312,221 ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets, la demanderesse a sollicité la révision de la décision finale de lexaminateur. La Commission dappel des brevets et la commissaire aux brevets ont examiné le refus opposé par lexaminateur. Voici les conclusions de la Commission et la décision de la commissaire :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Agent du demandeur

 

Sim & McBurney

330, avenue University, 6e étage

Toronto (Ontario)

M5G 1R7


INTRODUCTION

 

[1]    La présente décision statue sur une demande sollicitant la révision, par la commissaire aux brevets, de la décision finale rendue par l’examinateur relativement à la demande de brevet no 2,312,221, intitulée « SYSTÈME ET MÉTHODE PERMETTANT D’EMPLOYER DES MARQUES POSTALES NUMÉRIQUES POUR DES SERVICES À VALEUR AJOUTÉE D’UN SYSTÈME POSTAL ».  La demanderesse est PITNEY BOWES INC., et les inventeurs sont Leon A. Pintsov, Theresa Biasi, Shirish S. Joshi et Frederick W. Ryan junior.

 

[2]    L’invention porte sur une méthode permettant de confirmer la remise d’un article postal dans le contexte d’un système de courrier. Selon cette méthode, la preuve d’affranchissement et l’information sur les « services à valeur ajoutée », comme l’adresse pour l’envoi d’un avis de réception à l’expéditeur, sont combinés et intégrés à ce qu’on appelle communément une marque postale numérique, qui est imprimée sur un article postal physique. Selon la demande, une marque postale numérique est composée normalement de données informatisées imprimées sur un article postal, ou jointes d’une quelconque autre façon à l’article, par l’expéditeur afin de fournir une preuve d’affranchissement à un organisme de vérification (p. ex. le service postal des États‑Unis). Le format de la marque postale numérique peut être un code à barres de deux dimensions pouvant être lu par un scanneur. Lors de la remise d’un article postal, la marque postale numérique peut être lue, et l’information sur les services à valeur ajoutée p Computer = Ordinateur; Printer = Imprimante ; To Public Electronic Communication Network = Vers un réseau de communication électronique public


ajoutée peut être saisie, afin de permettre l’envoi d’un accusé de réception à l’expéditeur. La figure 1 de la demande, reproduite ci-dessus, montre un système pouvant servir à la création d’une telle empreinte sur un article postal ainsi que l’article postal en tant que tel.

 

 

[3]    Tel qu’il est mentionné dans le paragraphe qui commence au bas de la page 2 et se poursuit en haut de la page 3, ce processus se fait d’habitude en demandant au destinataire de signer un accusé de réception. C’est ensuite le service postal qui envoie cet accusé à l’expéditeur. Ce processus était, en soi, coûteux, étant donné qu’il requérait un traitement spécialisé des preuves physiques d’acceptation et de remise.

 

[4]    La demanderesse propose d’intégrer l’information sur l’expéditeur dans la marque postale numérique (comme l’adresse de courriel de l’expéditeur), de sorte que cette information puisse être lue et saisie au moment de la remise de l’article et qu’un avis de réception (sous forme de courriel par exemple) soit envoyé à l’expéditeur. Tel qu’il a été indiqué, l’utilisation d’un courriel pour accuser réception réduit le coût encouru par le service postal, et l’expéditeur bénéficie aussi de ces économies.

 

CONTEXTE

 

[5]    La demande a été déposée au Canada le 22 juin 2000 et revendique la priorité fondée sur une demande de brevet américain déposée le 24 juin 1999. La demande a été refusée par l’examinateur dans une décision finale en date du 6 mai 2004. Dans sa décision, l’examinateur a rejeté les revendications 1 et 4 au motif qu’elles étaient évidentes eu égard à la demande de brevet européen no 0 878 778 (Sansone), publiée le 18 novembre 1998, et il a rejeté les revendications  2, 3, 5, et 6 au motif qu’elles étaient évidentes eu égard à Sansone et au brevet américain no 5,826,034 (Albal), délivré le 16 mai 1999. Ce faisant, l’examinateur a rejeté toutes les revendications en instance.

 

[6]    En réponse à la décision finale, la demanderesse a apporté une modification mineure au libellé de la revendication  4 et a modifié semblablement la description. L’examinateur ne s’est pas opposé à ces modifications.

 


[7]    Le 1er septembre 2005, la demande a été déférée à la Commission d’appel des brevets pour révision. Le 12 septembre 2005, la Commission a transmis le résumé des motifs de l’examinateur à la demanderesse. Le 13 juillet 2007, l’agent de la demanderesse, M. Matthew Powell, du cabinet Sim & McBurney, a informé la Commission, après qu’on eut communiqué avec lui relativement à la possibilité de tenir une audience, que la demanderesse souhaitait que l’affaire soit tranchée sans audience. En conséquence, la Commission a révisé la décision de l’examinateur en se fondant sur les éléments au dossier.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[8]    Les questions particulières soulevées par la présente affaire ressortent clairement du dossier. Conformément aux objections formulées dans la décision finale et aux arguments avancés dans la réponse de la demanderesse, la Commission doit répondre aux questions suivantes :

 

(1)  Les revendications 1 et 4 auraient-elles été évidentes à la date de la  revendication, eu égard à Sansone?

(2)  Les revendications  2, 3, 5, et 6 auraient-elles été évidentes à la date de la revendication, eu égard à Sansone et à Albal?

 

LE LIBELLÉ DES REVENDICATIONS

 

[9]    Avant d’entreprendre la comparaison entre le dossier d’antériorité et les revendications, la Commission doit examiner le libellé des revendications elles-mêmes. Comme l’a souligné le juge Binnie dans l’arrêt  Whirlpool Corp. c Camco Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 129, à la page 146 (C.S.C.) :

 

Linterprétation des revendications précède lexamen des questions de validité et de contrefaçon.

 

[10]  La revendication indépendante 1, dont les caractéristiques et la terminologie s’apparentent à la seule autre revendication indépendante (la revendication 4), se lit comme suit :

[traduction]

Méthode permettant de confirmer la remise darticles postaux dans un système de courrier, la méthode comprenant :

la détermination des données postales requises comme preuve daffranchissement dun article postal physique envoyé par un expéditeur;

la combinaison des données postales avec dautres données relatives aux services à valeur ajoutée voulus pour larticle postal, ces dernières données comprenant ladresse pour lenvoi dun accusé de réception à lexpéditeur;

la création dune marque postale numérique sur larticle postal physique, lempreinte comprenant les données postales et les données relatives aux services à valeur ajoutée;

la lecture de la marque postale numérique sur larticle postal physique au moment de la remise de larticle;


la saisie des données relatives aux services à valeur ajoutée à partir de la marque postale numérique; 

lenvoi dun message daccusé de réception à lexpéditeur à ladresse appropriée.                       

 

[11]  La caractéristique « détermination des données postales requises comme preuve d'affranchissement... » fait partie de la revendication 1. Conformément au texte débutant à la page 1, ligne 30, et se terminant à la page 2, ligne 19, il est évident que ces données sont liées à la vérification de la preuve d’affranchissement qui doit être fournie à un organisme de vérification (p. ex. le service postal des États‑Unis).

 

[12]  Le terme « données relatives aux services à valeur ajoutée », même s’il peut comprendre plusieurs types de données, est limité par la revendication 1; ces données doivent comprendre l’adresse de l’expéditeur.

 

[13]  Le terme digital postmark (marque postale numérique ), qui comprend les postal data (données postales) et les value-added services data (données relatives aux services à valeur ajoutée) et qui, conformément à la description, est aussi appelé digital indicia (empreinte postale numérique) (voir la page 2, ligne 1), signifie [traduction] « données informatisées imprimées sur un article postal, ou jointes d’une quelconque autre façon à l’article » (voir page 2, lignes 1 à 3), cette information étant habituellement utilisée pour fournir la preuve de l’affranchissement. Cette information peut, par exemple, être présentée sous la forme d’un code à barres de deux dimensions (voir la page 2, lignes 9 à 15).

 

[14]  Il semble évident que les étapes de « lecture » et de « saisie » sont effectuées au moyen d’une quelconque sorte d’appareil électronique, étant donné que l’information est censée être lue et saisie à partir d’une « marque postale numérique », conformément à la revendication 1. Cette idée est renforcée par la discussion à la page 2 sur les systèmes  classiques qui utilisent un certain type de « scanneurs commandés par ordinateur », et le chiffrement habituel des données relatives aux empreintes postales numériques.

 

[15]  La portée de la dernière étape de la revendication 1, « l’envoi d’un message d’accusé de réception à l’expéditeur à l’adresse appropriée », semble à première vue évidente. Cependant, bien que la description fasse référence de façon générale à la création et à l’envoi d’un accusé de réception par des moyens électroniques, la revendication 1 ne comporte aucune telle restriction. À vrai dire, lorsqu’on examine la revendication 2, dans laquelle il est précisé :

 

[traduction]  dans lequel ladresse consiste en un identificateur demplacement de communication électronique[...]


 

il devient évident que la revendication 1 nest pas restreinte à un « identificateur demplacement de communication électronique ». Cette interprétation est conforme au principe de la  « différenciation des revendications » énoncé dans la décision Halford c. Seed Hawk Inc., 2004 CF 88, au paragraphe 93, 31 C.P.R. (4th) 434; conf. par 2006 CAF 275, aux paragraphes 28 à 33, 54 C.P.R. (4th) 130, dans laquelle le juge Pelletier a analysé la question de linterprétation des revendications dans le cas de revendications indépendantes et dans le cas de revendications dépendantes :

 

Dans sa forme la plus simple, la différenciation des revendications exige uniquement que [traduction] « les restrictions dune revendication ne soient pas considérées comme faisant partie dune revendication générale ».

 

[16]  Tenant compte de ces facteurs, la Commission examinera le dossier d’antériorité et les arguments respectifs de la demanderesse et de l’examinateur pour évaluer le caractère évident des revendications.

 

LES REVENDICATIONS 1 ET 4 AURAIENT-ELLES ÉTÉ ÉVIDENTES EU ÉGARD À SANSONE?           

 

La position de lexaminateur

 

[17]  Dans la décision finale, à la page 2, l’examinateur déclare, en réponse à l’objection contestant le caractère évident de la revendication 1 :

 

[traduction]  Selon la méthode de Sansone, lexpéditeur doit décider quelles données postales sont requises pour prouver lenvoi dun article postal (figure 4; colonne 3, ligne 46 à colonne 4, ligne 22). Il combine ensuite ces données postales à dautres données liées aux services à valeur ajoutée voulus pour cet article postal, afin de créer une empreinte daffranchissement qui sera imprimée sur larticle postal (figures 3 et 4; colonne 3, lignes 16 à 18 et 38 à 45; colonne 5, lignes 39 à 47). Le service à valeur ajoutée peut consister en une demande daccusé de réception (colonne 7, lignes 20 à 24).

 


[18]  Premièrement, lorsqu’on examine les passages cités par l’examinateur relativement à l’inclusion de services à valeur ajoutée dans l’empreinte, la première partie, soit la colonne 3, lignes 16 à 18, ne fait pas état de données touchant l’inclusion de services à valeur ajoutée dans l’empreinte d’affranchissement 14. De fait, les parties suivantes de ce paragraphe précisent clairement que le service à valeur ajoutée, soit le courrier certifié, est signalé par un graphique distinct de l’empreinte 14. Les lignes 38 à 45 de la colonne 3, contrairement à ce qu’affirme l’examinateur, n’indiquent pas que des données relatives à des services à valeur ajoutée sont intégrées dans l’empreinte 14 et, là encore, ce passage énonce clairement que l’information concernant le courrier certifié et l’empreinte d’affranchissement sont tout à fait distinctes. Quant à la déclaration de l’examinateur portant que les services à valeur ajoutée peuvent comprendre un accusé de réception, bien qu’elle puisse être généralement vraie, rien n’indique que des données relatives à ce service font partie de l’empreinte 14.

 

[19]  L’examinateur déclare ensuite :

 

[traduction]  Naturellement, lors de la remise de larticle postal, lempreinte daffranchissement sera lue sur larticle, les données  (demande daccusé de réception) seront saisies et le destinataire enverra un accusé de réception à lexpéditeur (figures 14 et 15).

 

[20]  Cette affirmation semble elle aussi dénuée de fondement, puisque l’examinateur n’a relevé aucune indication portant que des données concernant un accusé de réception sont imprimées sur l’article postal, puis lues et saisies afin d’établir un accusé de réception. Poursuivant son analyse de Sansone, l’examinateur expose (non souligné dans l’original) : 

 

[traduction] Sansone précise que ladresse de lexpéditeur est imprimée sur un côté dune carte daccusé de réception, mais il est tenu pour évident quelle serait incluse dans lempreinte figurant sur lendroit de larticle postal si lexpéditeur le souhaitait. Quoi quil en soit, ladresse de lexpéditeur fait bien partie de la marque postale numérique proposée par Sansone (figure 4; colonne 3, ligne 46, à colonne 4, ligne 22), conformément au IBIP. Il est également tenu pour évident que la totalité ou une partie des éléments de lempreinte seraient présentés sous forme de marque postale numérique si lexpéditeur le souhaite et si les autorités postales lautorisent.

 

[21]  Puisque l’intégration de l’adresse de l’expéditeur dans l’empreinte numérique, qui permet d’utiliser ensuite cette information pour créer un accusé de réception, semble constituer un élément important de l’invention revendiquée, on peut difficilement rejeter cet élément au motif qu’il est évident sans une preuve additionnelle ou un raisonnement détaillé reposant sur l’antériorité. De plus, contrairement à ce qu’affirme l’examinateur, aucun élément, dans les passages auxquels il se réfère, n’indique que l’adresse de l’expéditeur fait partie de la marque postale numérique proposée par Sansone. Les passages signalés par l’examinateur indiquent l’existence d’un code à barres 30, tiré du champ d’adresse 12, qui correspond à l’adresse du destinataire, non à celle de l’expéditeur. Une analyse complète de ce que divulgue Sansone suivra, dans l’analyse de la présente recommandation, aux paragraphes 42 à 54.


 

 

[22]  Les autres arguments de l’examinateur concernant la revendication 4 sont conformes aux arguments déjà relevés; il n’est donc pas utile de les répéter.

 

[23]  À la page 3 de la décision finale, l’examinateur fait remarquer, au sujet des lettres reçues de la demanderesse :

 

[traduction]  Dans la correspondance (page 3, lignes 16 à 20), il est précisé que Sansone préconise lemploi continu daccusés de réception, alors que lobjet de la présente demande rend superflus les accusés de réception. Cet aspect napparaît pas dans les revendications en lespèce.

 

[24]  La Commission souscrit à cette remarque, étant donné que cet aspect n’est pas abordé dans les revendications 1 et 4 et ne peut donc pas être utilisé pour distinguer les revendications en cause de la réalisation antérieure de Sansone. En outre, comme le révèle l’analyse de la portée de la revendication 1, l’accusé de réception n’est pas limité au format électronique.

 

[25]  La position de l’examinateur énoncée dans le résumé des motifs est conforme à celle exposée ci-dessus, et il est inutile de la répéter.

 

La position de la demanderesse

 

[26]  Dans sa réponse du 8 novembre 2004 à la décision finale, la demanderesse déclare notamment :

 

[traduction]  Tout dabord, comme lexaminateur le sait certainement, lobjet de la réalisation antérieure principale de Sansone appartient au même propriétaire que la présente demande. De ce fait, la demanderesse se trouve dans la position très particulière davoir une perspective additionnelle des enseignements de Sansone, dont ne bénéficierait pas une personne normalement versée dans lart.

 

[27]  La réalisation antérieure doit être interprétée comme le ferait une personne normalement versée dans l’art. La Commission ne peut pas recourir à des renseignements extrinsèques fournis par la demanderesse pour modifier la signification qu’aurait la réalisation antérieure aux yeux de la personne versée dans l’art. La demanderesse ajoute :

 


[traduction]  La question essentielle, dans le présent appel, consiste à décider si Sansone révèle que des renseignements sur ladresse de lexpéditeur seraient inclus dans les données relatives aux services à valeur ajoutée voulus pour larticle postal, ou propose quils le soient. Plus particulièrement, la demanderesse soutient, en toute déférence, que Sansone ne révèle ni ne propose les  « services à valeur ajoutée comprenant  ladresse pour lenvoi dun accusé de réception à lexpéditeur »« la création dune marque postale numérique [...] comprenant [...]  les données relatives aux services à valeur ajoutée » , « la lecture de la marque postale numérique »« la saisie des données relatives aux services à valeur ajoutée » ou  « lenvoi dun message daccusé de réception à lexpéditeur à ladresse appropriée », exposés dans la revendication 1. De même, la demanderesse fait observer, en toute déférence, que Sansone ne révèle ni ne propose lexistence dune « marque postale numérique [...] comprenant  ladresse pour lenvoi dun avis de réception à lexpéditeur »« la lecture de la marque postale numérique », « la saisie des données relatives à  ladresse » ou  l« envoi dun message daccusé de réception à lexpéditeur à ladresse appropriée », exposés dans la revendication 4.

 

[28]  Après avoir cité des extraits des arguments de l’examinateur, la demanderesse poursuit en citant le passage de Sansone qui traite de la figure 4 de cette réalisation antérieure, soit l’extrait débutant à la colonne 3, ligne 46 et se poursuivant jusqu’à la colonne 4, ligne 22.  La demanderesse fait valoir ce qui suit à cet égard :

 


[traduction]  On constate, à la lecture du passage cité, quil ne révèle ni ne propose linclusion de ladresse de lexpéditeur dans lempreinte postale 23 ou dans le code à barres 30. La mention « endroit 27 où larticle postal 11 a été posté » désigne le code postal attribué à la machine à affranchir  qui a créé lempreinte postale (lequel, suivant la réglementation des États-Unis, correspond au bureau de poste où larticle postal a été déposé à la poste). Elle ne désigne pas du tout ladresse de lexpéditeur, sauf si celle‑ci comporte le même code postal que celui attribué à la machine à affranchir. La mention  « endroit 27 où larticle postal 11 a été posté » est incluse dans lempreinte postale parce quelle permet à la poste daffecter des fonds de cette machine à affranchir à linstallation postale où larticle postal est déposé. Cest la raison pour laquelle seul le code postal est requis.  La mention  « endroit  27 où larticle postal 11 a été posté » ne se rapporte daucune façon à « ladresse »  de lexpéditeur utilisée dans les revendications de la présente demande. Pour étayer son argument, la demanderesse joint aux présentes lannexe A, qui consiste en une copie des pages A-3 et A-4 du mémoire descriptif du IBIP dont il est fait état dans Sansone. Veuillez noter que seul un projet de mémoire descriptif a été publié jusquà ce jour. Comme on le voit dans le tableau A-1 du mémoire descriptif ci-joint, lempreinte, dans le IBIP, renferme uniquement le code postal dans le code à barres, et la ville, lÉtat et le code postal sous forme de données que lil humain peut lire. À la page A-4, le mémoire descriptif prévoit que les données énumérées dans le tableau A‑1 doivent être incluses dans lempreinte. Le format de chacune des données que peut lire lil humain doit être précisé dans le DMM [Domestic Mail Manual ou manuel sur le courrier du régime intérieur]. Dans le champ réservé à ladresse de départ, les données sont : Ville, État et Code postal, qui correspondent à la ville, à lÉtat et au code postal à cinq caractères du bureau de poste autorisant lutilisation sous licence. Par conséquent, manifestement, le terme « endroit 27 » dans Sansone représente le code postal à cinq caractères correspondant au bureau de poste ayant autorisé lutilisation sous licence.

Qui plus est, à supposer même que ladresse de lexpéditeur soit incluse dans la marque postale numérique, nulle part dans Sansone ou dans Albal est-il indiqué que la marque postale numérique est lue au moment de la remise de larticle postal, ou proposé quelle le soit. Lempreinte daffranchissement numérique 23 et le code à barres 30 de Sansone (qui, séparément ou collectivement, peuvent correspondre à la marque postale numérique), sont distincts du symbole de courrier certifié 24. Ainsi, Sansone ne révèle ni ne propose la lecture de la marque postale numérique (cest-à-dire lempreinte daffranchissement numérique 23 et/ou le code à barres 30) lors de la remise de larticle postal physique. Néanmoins, dans la décision finale, lexaminateur conclut :

[traduction« Naturellement, lors de la remise de larticle postal, lempreinte daffranchissement sera lue sur larticle, les données (demande daccusé de réception) seront saisies et le destinataire enverra un accusé de réception à lexpéditeur (figures 14 et 15) ».

Les seuls éléments sur lesquels sappuie lexaminateur pour conclure que lempreinte imprimée sur larticle postal sera lue, que les données relatives aux services à valeur ajoutée seront saisies à la lecture de la marque postale numérique et quun message daccusé de réception sera envoyé à lexpéditeur à ladresse appropriée, sont les figures 14 et 15. Or, ces figures ne montrent que le recto et le verso dune carte daccusé de réception sur lequel figurent des renseignements imprimés par limprimante 72 sous le contrôle de lordinateur 71. Plus particulièrement, dans la figure 15, le champ 462 est un espace réservé à ladresse de lexpéditeur, champ 13. Néanmoins, rien de ce qui précède nest révélé ni proposé : il ny est pas indiqué que ladresse de lexpéditeur est comprise dans les données relatives aux services à valeur ajoutée que comporte la marque postale numérique, qui est lélément fondamental de linvention revendiquée par la demanderesse.

 

[29]  Comme il a déjà été mentionné à propos de la position de l’examinateur, il semble clair, à la lecture du passage cité (qui débute à la colonne 3, ligne 46, et se poursuit jusqu’à la colonne 4, ligne 22, de Sansone) que l’adresse de l’expéditeur ne fait pas partie de l’information comprise dans l’empreinte numérique de Sansone, mais un examen plus détaillé de Sansone suivra. Le mémoire descriptif du IBIP, auquel fait référence la demanderesse pour clarifier la divulgation de Sansone, sera étudié plus tard, dans l’examen et l’analyse du dossier d’antériorité.

 

Caractère évident : principes juridiques

 


[30]  L’article 28.3 de la Loi sur les brevets énonce les circonstances dans lesquelles une revendication peut être jugée évidente :

 

28.3  Lobjet que définit la revendication dune demande de brevet ne doit pas, à la date de la revendication, être évident pour une personne versée dans lart ou la science dont relève lobjet, eu égard à toute communication :

a) qui a été faite, plus dun an avant la date de dépôt de la demande, par le demandeur ou un tiers ayant obtenu de lui linformation à cet égard de façon directe ou autrement, de manière telle quelle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs;

b) qui a été faite par toute autre personne avant la date de la revendication de manière telle quelle est devenue accessible au public au Canada ou ailleurs. 

 

[31]  La référence classique pour apprécier la question de l’évidence, au Canada, est le critère énoncé par le juge Hugessen dans l’arrêt Beloit Canada Ltée c. Valmet Oy (1986), 8 C.P.R. (3d) 289, à la page 294 (C.A.F.); inf. (1984), 78 C.P.R. (2d) 1 (C.F. 1re inst.) :

 

Pour établir si une invention est évidente, il ne sagit pas de se demander ce que des inventeurs compétents ont ou auraient fait pour solutionner le problème. Un inventeur est par définition inventif. La pierre de touche classique de lévidence de linvention est le technicien versé dans son art mais qui ne possède aucune étincelle desprit inventif ou dimagination; un parangon de déduction et de dextérité complètement dépourvu dintuition; un triomphe de lhémisphère gauche sur le droit. Il sagit de se demander si, compte tenu de létat de la technique et des connaissances générales courantes qui existaient au moment où linvention aurait été faite, cette créature mythique (monsieur tout-le-monde du domaine des brevets) serait directement et facilement arrivée à la solution que préconise le brevet. Cest un critère auquel il est très difficile de satisfaire.

 

[32]  Dans l’arrêt Novopharm Limited c. Janssen-Ortho Inc. (2007), 59 C.P.R. (4th) 116, à la page 123, la Cour d’appel fédérale a approuvé une liste révisée de facteurs énoncés par le juge Hughes, qu’il convient de prendre en considération dans l’appréciation de l’évidence. Ces facteurs sont les suivants :

 

Principaux facteurs

1.            Linvention

2.            La personne hypothétique versée dans lart dont parle Beloit

3.             Les connaissances que possède la personne hypothétique normalement versée dans lart 

4.             Le climat régnant dans le domaine en question à lépoque où linvention supposée a été faite

5.             La motivation qui, à lépoque où linvention supposée a été faite, incitait à résoudre un problème reconnu

6.             Le temps et les efforts qua exigés linvention supposée

 


Facteurs secondaires

Ces facteurs peuvent se révéler pertinents, mais on leur accorde en général moins de poids parce quils se rapportent à des faits postérieurs à la date de linvention supposée. 

 

7.             Le succès commercial

8.             Les prix et autres récompenses

 

[33]  Il se peut que la Commission, ne bénéficiant pas de témoignages d’experts et tributaire, dans une large mesure, d’une preuve consistant en des brevets, demandes de brevets et publications imprimées, n’attache pas une grande importance à certains de ces facteurs, comme le climat qui régnait dans le domaine en question et les connaissances générales courantes.

 

[34]  La juge Sharlow, dans l’arrêt Janssen-Ortho, précité, a incité à la prudence et recommandé de ne pas suivre à la lettre un modèle rigide d’analyse des faits pour décider si une invention serait ou non évidente :

 

Il nexiste aucune question factuelle ni aucun ensemble de telles questions qui puisse décider de lissue de toutes les affaires ou même dune seule.

 

[35]           Plus récemment, dans l’arrêt  Sanofi‑Synthelabo Canada Inc. c. Apotex Inc., 2008 CSC 61, 69 C.P.R. (4th) 251, le juge Rothstein a fait sienne la méthode dappréciation de lévidence reformulée par le lord juge Jacob dans  Pozzoli SpA c. BDMO SA, [2007] F.S.R. 37, [2007] EWCA Civ 588.  Plus précisément, lappréciation de lévidence se fait maintenant en suivant la démarche en quatre étapes exposée ci‑dessous :

 

(1) a) Identifier la « personne versée dans lart ».

      b) Déterminer les connaissances générales courantes pertinentes de cette personne;

(2)     Définir lidée originale de la revendication en cause, au besoin par voie dinterprétation; 

(3)    Recenser les différences, sil en est, entre ce qui ferait partie de « létat de la technique » et lidée originale qui sous-tend la revendication ou son interprétation;

(4)    Abstraction faite de toute connaissance de linvention revendiquée, ces différences constituent-elles des étapes évidentes pour la personne versée dans lart ou dénotent-elles quelque inventivité?

 

et comporte la possibilité dappliquer le critère de l’« essai allant de soi » à la quatrième étape.

 


 

[36]  Le juge Rothstein a jugé que le recours à la notion d’« essai allant de soi » était indiqué « [d]ans les domaines d’activité où les progrès sont souvent le fruit de l’expérimentation »; il a donné comme exemple le secteur pharmaceutique. Le cas qui nous occupe ne semble pas s’inscrire dans la catégorie envisagée par la Cour suprême; aussi n’entreprendrons-nous pas l’examen de la question de savoir si l’« essai allant de soi » s’applique à la présente invention. Cependant, il convient de signaler qu’il existe de nombreuses similarités entre les facteurs énoncés dans l’arrêt  Janssen-Ortho et la démarche en quatre étapes utilisée en combinaison avec les éléments de l’« essai allant de soi décrits dans l’arrêt Sanofi.  De fait, dans l’arrêt Apotex Inc. c. Adir et Servier Canada Inc., 2009 CAF 222, la juge Layden-Stevenson, s’exprimant au nom de la Cour, a fait remarquer :

 

La question de lévidence repose dans une large mesure sur la recherche des faits. La juge de première instance a appliqué le cadre danalyse énoncé dans larrêt Janssen-Ortho. Par la suite, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision dans laffaire Sanofi. Le cadre de Janssen-Ortho nest pas incompatible avec celui décrit dans larrêt Sanofi.

 

[37]  Bien que nous ne soyons pas tenus de suivre la démarche en quatre étapes exposée dans l’arrêt Sanofi, il faut néanmoins pouvoir, en bout de ligne, répondre à la question  « L’invention était-elle évidente? », à la quatrième étape. Les facteurs énoncés dans l’arrêt Janssen-Ortho demeurent certainement utiles à cet égard. Nous remarquons aussi que dans Sanofi, le juge Rothstein n’a pas écarté l’emploi des critères formulés dans l’arrêt Beloit, mais a simplement déclaré qu’il ne pensait pas :

 

[...] que dans cet arrêt, le juge Hugessen a voulu conférer un caractère universel à la définition plutôt colorée quil y donne de lévidence, de façon quelle sapplique indépendamment du contexte à toute catégorie de revendication.

 

[38]  Dans l’arrêt Sanofi, le juge Rothstein, au paragraphe 65, indique que l’expression « allant de soi » signifie « très clair ». La Cour d’appel fédérale a relevé cette interprétation dans l’arrêt Pfizer Canada Inc. c. Apotex Inc., 2009 CAF 8, au paragraphe 29, 72 C.P.R. (4th) 41.

 

Analyse fondée sur la démarche en quatre étapes de larrêt Sanofi

 

(1)a) La personne versée dans lart

 


[39]  En l’espèce, la personne versée dans l’art serait fort probablement un technicien ou un ingénieur possédant de l’expérience dans le domaine des systèmes de courrier et de communication, et plus particulièrement dans les systèmes qui utilisent des machines attestant l’affranchissement au moyen d’empreintes postales numériques.

 

(1)b) Les connaissances générales courantes pertinentes

 

[40]  Les connaissances générales courantes de cette personne comprendraient la connaissance des systèmes et méthodes de traitement du courrier ainsi que la connaissance de systèmes de communication électronique.

 

(2) Lidée originale

 

[41]  À notre avis, l’idée originale, d’après les revendications 1 et 4 et l’exposé de l’invention présenté dans le mémoire descriptif, tient aux étapes consistant à intégrer l’adresse de l’expéditeur dans une marque postale numérique, à lire et à saisir cette information au moment de la remise de l’article, et à utiliser cette information pour créer un accusé de réception qui est envoyé à l’expéditeur. Il faut se rappeler que nous avons examiné la portée de ces étapes lorsque nous avons analysé le libellé de la revendication 1, ci-dessus.

 

(3) Les différences entre l« état de la technique » et lidée originale

 

[42]  La décision finale de l’examinateur et la réponse de la demanderesse semblent témoigner d’une différence d’opinion assez marquée quant à savoir ce que divulgue la réalisation antérieure Sansone, surtout en ce qui touche l’information faisant partie de l’empreinte postale  numérique. Lorsqu’on examine Sansone, de façon générale, on constate que celle-ci tente d’éviter la pratique antérieure consistant à utiliser [traduction] « des autocollants de service et à compléter à la main des cartes et formulaires conçus pour le courrier spécial » (voir la colonne 1, lignes 33 et 34). Sansone propose plutôt d’imprimer ces représentations graphiques sur les articles postaux et d’utiliser un ordinateur personnel et une imprimante pour remplir et imprimer les formulaires spéciaux requis pour les services postaux spéciaux (voir la colonne 1, lignes 36 à 54, et la colonne 4, lignes 49 à 54), comme le courrier certifié et le courrier recommandé.  

 

[43]  En ce qui touche la figure 4, Sansone traite de l’intégration d’une empreinte numérique imprimée sur une enveloppe, intégration qui semble constituer l’élément le plus pertinent au regard de l’objet revendiqué en l’espèce, comme en fait foi le débat entre l’examinateur et la demanderesse quant à son contenu. Les passages pertinents sont reproduits ci-dessous par souci de commodité :

 


[traduction] La figure 4 montre le dessin dun article postal qui contient une empreinte daffranchissement électronique (Information-Based Indicia ou IBI ) et dautres symboles graphiques de services postaux demandés par lexpéditeur. Larticle postal 11 comporte une adresse de destinataire au champ 12 et une adresse dexpéditeur au champ 13. Larticle postal 11 montre aussi une empreinte daffranchissement électronique du service postal des États-Unis (USPS Information-Based Indicia (IBI)) 23 et un symbole de courrier certifié 24. Le symbole de courrier certifié 24 comprend un numéro de série 32. Le centre dingénierie du service postal des États-Unis a récemment publié un avis de projet de mémoire descriptif portant sur une empreinte daffranchissement électronique. Le titre du mémoire descriptif est Information Based Indicia Program Postal Security Device Specification [mémoire descriptif dun dispositif de sécurité postale du programme dempreinte daffranchissement électronique), il est daté du 13 juin 1996 et est incorporé aux présentes par renvoi. Le mémoire descriptif du programme dempreinte daffranchissement électronique (IBIP) inclut à la fois les spécifications proposées pour la nouvelle empreinte et les spécifications proposées à légard dun dispositif de sécurité postale. Lempreinte postale 23 comporte un montant en dollars 25, la date 26 à laquelle lempreinte postale a été apposée sur larticle postal 11, lendroit 27 où larticle postal 11 a été posté, le numéro de série 28 du dispositif de sécurité postale, un code FIM 29 et un code à barres crypté de deux dimensions. Le numéro de série 32 peut être tiré du code à barres 30 ou correspondre à celui-ci. Le code à barres 30 est un nombre unique qui provient du champ dadresse 12 et de linformation comprise dans le dispositif de sécurité postale qui a apposé lIBI 23. La façon dont le code à barres est obtenu est expliquée dans le brevet américain de Sansone et autres portant le numéro 4,831,555 et intitulé « UNSECURED POSTAGE APPLYING SYSTEM », incorporé aux présentes par renvoi. Larticle postal 11 comporte également une indication 31 de la classe de courrier de larticle postal 11. Le symbole de courrier certifié 24 comprend un numéro de série 32. La façon dont le symbole 24 est apposé sur larticle postal 11 sera  plus amplement expliquée dans la description de la figure 10. Un slogan publicitaire est également apposé sur larticle postal 11. 


[44]           Telle qu’elle a été divulguée, l’« empreinte d’affranchissement électronique du service postal des États-Unis 23 » est distincte du « symbole de courrier certifié 24 ». Lorsqu’on examine la figure 4, on voit que l’IBI est inscrite à l’intérieur d’un contour pointillé. Cest linformation comprise dans cet espace qui serait équivalente à la marque postale numérique divulguée et revendiquée par la demanderesse, la marque qui fournit linformation afférente à la preuve daffranchissement et que les autorités postales liraient au moyen dun scanneur. Les éléments devant être inclus dans lempreinte sont décrits à la colonne 4, lignes 4 à 16. En loccurrence, lindication « endroit 27 où larticle postal 11 a été posté » ne correspond pas à ladresse de lexpéditeur, mais bien plutôt à une installation postale où larticle postal doit être traité. Dans le cas contraire, il semblerait logique que dans  lillustration de la figure 4, ladresse de lexpéditeur et ladresse qui fait partie de lempreinte daffranchissement électronique soient la même. Nous remarquons également que dans le passage précité, le code à barres est tiré « du champ dadresse 12  et de l’information comprise dans le dispositif de sécurité postale qui a apposé l’IBI 23 ». Dans la figure 4, « le champ dadresse 12 » se rapporte à ladresse du destinataire, non à ladresse de lexpéditeur. La façon dont le code à barre est formé, selon Sansone, est expliquée dans le brevet américain no 4,831,555. Dans ce document, à la colonne 4, lignes 14 à 30, où lon décrit linformation inscrite sur une étiquette qui doit être apposée sur une enveloppe, il est précisé :

 

[traduction] La première ligne 38 de létiquette contiendrait de linformation sur le montant de laffranchissement et le numéro de client. La deuxième ligne 40 indique la date de lenvoi, lheure à laquelle laffranchissement est imprimé et la classe de courrier. La troisième ligne 42 contient une combinaison cryptée de chiffres et de lettres qui peuvent provenir de linformation consignée sur les deux premières lignes et dinformation tirée de ladresse du destinataire de larticle postal, qui suit la troisième ligne, ainsi que dinformation tirée de la machine à affranchir 14. Par exemple, le premier message crypté  B7C14 pourrait avoir rapport au montant de laffranchissement et à la date, le second groupe 45647, au code postal, le troisième groupe 66646, au numéro de client et au numéro de transaction, et le dernier groupe 40028, à la classe de courrier. À la suite de ces trois lignes 38, 40 et 42, sont inscrits le nom et ladresse du destinataire de larticle postal, qui sont imprimés au moyen de limprimante 30.

 

[45]  Le document de référence 555 ne semble pas divulguer la formation d’un code à barres, comme le propose Sansone, mais seulement d’un code alphanumérique crypté. Bien que l’information relative au numéro de client puisse être intégrée au code crypté, rien n’indique dans ce cas que les éléments de l’adresse de l’expéditeur sont inclus dans l’information cryptée figurant sur l’étiquette, comme l’exigent les revendications de la demanderesse.

 


[46]  Si l’on revient à Sansone, il est fait état, à la colonne 3, lignes 56 à 59, d’un mémoire descriptif d’une empreinte d’affranchissement électronique du service postal des États‑Unis en date du 13 juin 1996, document qui est incorporé par renvoi au mémoire descriptif pour illustrer la façon dont l’empreinte de la figure 4 est formée. Ce document, dont une partie a été fournie à la Commission par l’examinateur avec le résumé des motifs, indique, dans le tableau 3-1, quelles données doivent être incluses dans l’empreinte proposée. L’une de ces données est « Originating Address » [l’adresse de départ]. La ville, l’État et le code postal correspondant à l’adresse de départ doivent être présentés sous forme « Human-Readable » [lisible par l’—il humain], alors que le « Licensing ZIP Code » [code postal correspondant à l’autorisation] doit faire partie d’un « Computer-Based Bar Code » [code à barres informatisé]. Sur demande de la Commission, l’examinateur a fourni à celle-ci la version complète du document mentionné ci‑dessus . À la page 5-1 du document, il est mentionné, au sujet de la composition de l’empreinte :

 

[traduction]  Linformation lisible par loeil humain  doit comprendre, à tout le moins, la ville, lÉtat et le code postal à cinq caractères du bureau de poste ayant autorisé lutilisation sous licence, le numéro didentité ou de catégorie du dispositif de sécurité postale, la date (au besoin) et le montant de laffranchissement. Lempreinte peut aussi indiquer le code postal au lieu des noms de la ville et lÉtat. Le cas échéant, les mots « Mailed From ZIP Code » [posté depuis le code postal] et le code postal de ladresse de livraison de lexpéditeur doivent figurer au lieu des noms de la ville et de lÉtat, respectivement.

 

 

[47]  Combiné au tableau 3-1, ce passage révèle que la ville, l’État et le code postal qui doivent figurer dans l’empreinte sont ceux du bureau de poste qui a autorisé l’utilisation sous licence, et non ceux de l’expéditeur, à moins, comme l’a relevé la demanderesse, que l’expéditeur ne réside à une adresse qui porte le même code postal. Étant donné cette signification de « Originating Address », le terme « Licensing ZIP Code », qui est présenté en rapport avec l’adresse de départ du  tableau 3-1 – laquelle doit faire partie du code à barres – désigne également le code postal du bureau de poste ayant autorisé l’utilisation sous licence.

 

[48]  Ainsi qu’il appert des extraits reproduits ci-dessus, la demanderesse, en réponse à la décision finale, a transmis certaines pages d’une version subséquente de ce document, soit les pages A‑3 et A‑4 du mémoire descriptif plus récent,  afin de clarifier quels renseignements doivent être inclus dans l’empreinte numérique. Ce document précise également que l’« Originating Address », qui correspond à [traduction] « la ville, l’État de le code postal », doit être incluse dans l’empreinte. À la page 4, la signification de ces champs est définie et il est précisé, au regard de « Originating Address » :

 

[traduction] Ce champ correspond à la ville, à lÉtat et au code postal à cinq caractères du bureau de poste ayant autorisé lutilisation sous licence. Lempreinte peut indiquer le code postal au lieu des noms de la ville et de lÉtat. Le cas échéant, les mots « Mailed from ZIP Code » et le code postal de ladresse de livraison de lexpéditeur doivent figurer au lieu des noms de la ville et de lÉtat, respectivement.

 

[49]  Ces précisions sont compatibles avec la version du 13 juin 1996. Quoi qu’il en soit, nous avons utilisé la version initiale du 13 juin 1996 pour notre analyse.

 


[50]  Il appert clairement de ce qui précède que les éléments à inclure dans l’empreinte IBIP proposée ne renvoient pas à l’adresse de l’expéditeur, mais plutôt à l’adresse du bureau de poste qui a autorisé l’utilisation sous licence (c’est-à-dire le bureau de poste qui a autorisé l’utilisation sous licence de la machine à affranchir). Il semble que tel ait été le cas également pour l’empreinte proposée dans Sansone, compte tenu de son renvoi à ce mémoire descriptif et de son illustration de l’information comprise dans l’empreinte, comme nous l’avons exposé.

 

[51]  Revenons une fois de plus au mémoire descriptif de l’empreinte d’affranchissement électronique du service postal des États‑Unis auquel il est fait référence dans Sansone. Ce document, aux pages 2 et 3, précise qu’une fois le programme d’empreinte d’affranchissement  informationnelle (IBIP) pleinement appliqué, [traduction] « de nouveaux services “à valeur ajoutée” peuvent être pris en charge par une utilisation créative des données comprises dans l’empreinte », et que, « au besoin, des champs additionnels de données seront délimités dans l’empreinte pour prendre en charge les services à valeur ajoutée ». Le mémoire descriptif du service postal des États-Unis prévoit aussi que [traduction] « les clients pourront avoir la possibilité d’ajouter une quantité limitée de données dans l’empreinte pour répondre à leurs propres besoins. Les clients pourront obtenir accès à des données recueillies au moment où le service postal des États‑Unis balaye l’empreinte de leur courrier ». 

 

[52]  Selon ce qui précède, le mémoire descriptif du service postal des États-Unis propose l’inclusion de données relatives à des services « à valeur ajoutée » dans l’empreinte projetée. Il indique aussi que lorsque le service postal des États‑Unis balayera un article postal, l’information comprise dans l’empreinte sera lue et saisie, et que cette information pourra être mise à la disposition des clients, le client, dans ce contexte, étant une personne qui utilise une machine à affranchir capable de créer la nouvelle empreinte, conformément à l’exposé général sur le contexte du système, qui débute à la page 2-1. Ce document, cependant, n’indique pas quels pourraient être les services à valeur ajoutée ni comment les renseignements recueillis depuis l’empreinte lors de la lecture par scanneur faite par le service postal des États‑Unis, pourraient être utilisés. Nous remarquons également que rien, dans le mémoire descriptif du IBIP, n’indique que l’empreinte serait lue par scanneur au moment de la remise de l’article de façon à créer un accusé de réception qui serait envoyé à l’expéditeur.

 


[53]  La Commission doit convenir avec la demanderesse que Sansone ne divulgue pas l’inclusion de l’adresse de l’expéditeur dans l’empreinte d’affranchissement électronique dont traite Sansone, du moins pour ce qui est de la représentation de la figure 4. La Commission examinera le reste de la réalisation antérieure de Sansone pour déterminer quelles autres caractéristiques pertinentes y sont divulguées. À la colonne 4, lignes 49 à 54, Sansone indique qu’une imprimante est utilisée pour imprimer les formulaires à joindre à un article postal, comme les reçus pour le courrier certifié, le courrier assuré, etc. À la colonne 5, lignes 42 à 45, ce sujet est de nouveau abordé, et il est fait état de cartes d’accusé de réception. Par conséquent, Sansone mentionne bien la fourniture d’une carte d’accusé de réception à l’expéditeur, mais il s’agit d’une carte imprimée qui doit être jointe à l’article postal, puis renvoyée à l’expéditeur lors de la remise de l’article au destinataire. Les figures 14 et 15 illustrent la présentation d’une carte d’accusé de réception. Contrairement à ce qu’affirme l’examinateur dans la décision finale, la Commission ne saurait dire que l’information qui est lue et saisie dans l’empreinte postale au moment de la remise est utilisée pour envoyer un accusé de réception à l’expéditeur.  

 

[54]  En résumé, Sansone ne divulgue ni ne propose l’idée d’inclure l’adresse de l’expéditeur dans l’empreinte numérique, et cette réalisation antérieure ne révèle ni ne propose non plus la lecture de l’empreinte postale et la saisie de l’information qu’elle contient au moment de la remise de l’article, puis la création d’un accusé de réception à être transmis à l’expéditeur.

 

(4) Les différences auraient-elles été évidentes?

 

[55]  Est-il possible de dire qu’il aurait été évident d’inclure l’adresse de l’expéditeur dans la marque postale numérique, puis de lire et de saisir cette information lors de la remise de l’article afin de créer un accusé de réception devant être envoyé à l’expéditeur? Ces changements auraient-ils été « très clairs »? Au regard des revendications 1 et 4, l’état de la technique est représenté par Sansone, qui, a-t-on démontré, ne suffit pas à orienter la personne versée dans l’art vers l’invention revendiquée.

 

[56]  Quant au climat régnant dans le domaine, la demanderesse, dans la section concernant le contexte de l’invention, parle des modes connus de communication, notamment les communications électroniques (par exemple le courriel) et les communications sur support papier (comme les articles postaux traditionnels), ainsi que des formes de communication qu’elle considère comme des formes mixtes, notamment la télécopie usuelle et le courrier hybride. La demanderesse souligne certains avantages et désavantages de ces modes de communication, par exemple la rapidité et l’économie des communications électroniques, qui en revanche n’offrent pas la couverture universelle du courrier traditionnel, et elle fait état de certaines préoccupations juridiques et questions liées à la sécurité. Elle indique comment le courrier physique, tout en étant plus lent, rejoint la plus grande partie de la population et offre la preuve juridique souhaitée de la communication.


 

[57]  En ce qui concerne la motivation à l’époque où l’invention a été faite, la demanderesse, à la page 3 de la demande, traite du recours traditionnel aux accusés de réception et du fait que ceux-ci sont [traduction] «  peu efficaces du point de vue économique et coûteux en temps ». Bien que ces remarques dénotent un désir d’améliorer l’efficacité du processus, elle n’aiguillent pas la personne versée dans l’art vers une solution précise du problème soulevé, comme la possibilité d’intégrer l’adresse de l’expéditeur dans une marque postale numérique, puis de lire et de saisir cette information lors de la remise de l’article afin de créer un accusé de réception qui sera envoyé à l’expéditeur. La demanderesse évoque également, à la page 3, l’importance grandissante du courrier électronique, mais elle fait remarquer qu’à l’époque où l’invention a été faite, les communications électroniques étaient considérées comme [traduction] « une forme de communication offrant une solution de remplacement à la livraison physique du courrier ». Ces remarques n’inciteraient pas la personne versée dans l’art à combiner des aspects de chacun des systèmes pour aboutir, d’une façon ou d’une autre, à l’invention en cause.

 

[58]  Si l’on se tourne de nouveau vers le mémoire descriptif de l’empreinte d’affranchissement électronique du service postal des États‑unis dont traite Sansone, il a été reconnu que ce mémoire préconise l’inclusion de données relatives à des services « à valeur ajoutée » dans l’empreinte proposée, ainsi que le balayage et la saisie de ces données par le service postal des États‑Unis. Si l’on peut faire valoir en conséquence qu’il était possible d’inclure l’adresse de l’expéditeur dans l’empreinte numérique, de sorte que cette information aurait pu être lue et saisie par le service postal des États‑Unis lors du balayage, cela n’explique pas pourquoi il aurait été évident ou « très clair » de ce faire avant la date de la revendication. Comme il a été mentionné, le mémoire exprime, d’une manière générale, le souhait d’améliorer l’efficacité de l’utilisation des accusés de réception, mais l’énoncé ne propose pas d’utiliser des renseignements précis qui sont cryptés dans la marque postale numérique, puis de lire et saisir l’information cryptée à l’étape de la remise de l’article postal, et de créer et envoyer un accusé de réception à l’expéditeur.  

 

[59]  Dans la décision finale, l’examinateur a déclaré (non souligné dans l’original) :

 

[traduction] il est tenu pour évident que [ladresse de lexpéditeur] serait incluse dans lempreinte figurant sur lendroit de larticle postal si lexpéditeur le souhaitait.

 

 


[60]  L’examinateur n’a signalé aucune preuve dénotant le souhait ou la motivation de procéder à l’inclusion de l’adresse de l’expéditeur dans l’empreinte ou d’utiliser celle-ci de la façon revendiquée par la demanderesse.

 

[61]  Il importe de souligner que l’empreinte du service postal des États‑Unis dont il est question ci-dessus est mentionnée dans la réalisation antérieure de Sansone que l’examinateur a appliquée. Bien que le mémoire descriptif du IBIP ait pu prévoir la possibilité que de l’information relative à des services à valeur ajoutée puisse être ajoutée dans l’empreinte, information qui aurait pu ensuite être lue et saisie, il reste que le mémoire descriptif du IBIP est mentionné dans le cadre de l’invention divulguée par Sansone. Comme nous l’avons expliqué, Sansone a décrit un système qui emploie des cartes physiques d’accusé de réception. Par conséquent, même si le mémoire descriptif du IBIP prévoit la possibilité d’appliquer certaines caractéristiques de l’invention revendiquée par la demanderesse, ce mémoire est évoqué dans Sansone pour illustrer la constitution d’une empreinte numérique dans le contexte d’un système qui utilise des accusés de réception physiques, qui sont imprimés et envoyés avec l’article postal afin d’être renvoyés à l’expéditeur après la remise de l’article. Dès lors, la personne versée dans l’art n’aurait pas été incitée à inclure les éléments de l’adresse de l’expéditeur dans l’empreinte dans le but d’intégrer un service à valeur ajoutée comme la fourniture d’un accusé de réception, puisque Sansone s’intéresse à des formulaires papier imprimés et envoyés avec les articles postaux, écartant de ce fait toute raison d’inclure l’adresse de l’expéditeur dans l’empreinte. Le système de Sansone ressemble beaucoup à la méthode prévoyant le recours aux accusés de réception traditionnels à laquelle la demanderesse se réfère dans la présente demande.

 

[62]  En ce qui a trait au temps et aux efforts qu’a exigés l’invention, aucune information pertinente n’a été présentée à la Commission. Il ne fait aucun doute que certaines modifications devraient être apportées aux dispositifs existants. Toutefois, nous sommes portés à supposer que l’absence de description technique indique que les modifications requises ne seraient pas difficiles à réaliser. Quoi qu’il en soit, l’absence de difficulté technique ne serait pas décisive en l’absence de toute orientation vers la méthode proposée, dans le dossier d’antériorité. Les facteurs secondaires comme le succès commercial et les récompenses ne sont pas en cause en l’espèce.

 


[63]  Compte tenu de l’analyse qui précède, l’on peut difficilement dire que les différences (c’est-à-dire l’inclusion de l’adresse de l’expéditeur dans la marque postale numérique, la lecture et la saisie de ces données au moment de la remise de l’article postal, puis l’envoi d’un accusé de réception à l’expéditeur à l’adresse indiquée) sont évidentes, en l’absence de quelque impulsion ou motivation incitant la personne versée dans l’art à les introduire. La Commission ne dispose d’aucune preuve additionnelle sur les connaissances générales courantes de la personne versée dans l’art, si ce n’est, peut‑être, d’éléments d’appréciation d’ordre général contenus dans le dossier d’antériorité et dans la présente demande. Nous avons traité de ces éléments d’appréciation dans notre analyse de l’état de la technique ainsi qu’au regard du climat régnant dans le domaine et de la motivation existante, mais ces éléments ne comblent pas les lacunes. En conséquence, il est difficile de prétendre que l’on s’attendrait à ce que les différences soient introduites par des personnes versées dans l’art.

 

[64]  Pour les motifs qui précèdent, la Commission ne peut convenir que l’objet des revendications 1 et 4 aurait été évident eu égard à Sansone.


LES REVENDICATIONS 2, 3, 5 ET 6 AURAIENT-ELLES ÉTÉ ÉVIDENTES EU ÉGARD À SANSONE ET À ALBAL?

 

Position de lexaminateur

 

[65]  En ce qui touche les revendications 2 et 3, l’examinateur déclare, dans la décision finale (non souligné dans l’original) :

 

[traduction]  Les revendications  2 et 3 sont subordonnées à la revendication 1, et elles nécartent pas les objections soulevées à légard de cette revendication;  la teneur de linformation imprimée sur lenveloppe ne fait aucune différence brevetable cette information consiste en des données descriptives non fonctionnelles. De toute façon, Albal propose déjà une méthode de livraison dun message mettant à profit différents médias et informant automatiquement lexpéditeur de la remise dun message (abrégé; figures 1 et 10). Le message peut être un article postal, et lavis de livraison peut être transmis par courriel (revendication 10; figure 10; passage débutant à la colonne 9, ligne 43, et se poursuivant jusquà la colonne 10, ligne 14).

 

[66]  Nous avons déjà conclu que la revendication 1 ne diffère pas de Sansone uniquement quant à la teneur de l’information qui serait intégrée dans la marque postale numérique. Sansone ne révèle ni ne propose la fonctionnalité additionnelle permettant de lire et de saisir l’adresse de l’expéditeur afin de créer un accusé de réception, fonctionnalité rendue possible grâce à l’inclusion de l’adresse de l’expéditeur dans la marque postale numérique.

 

La position de la demanderesse

 

[67]  Les seules remarques formulées par la demanderesse au sujet de la réalisation antérieure d’Albal, dans la réponse à la décision finale, sont les suivantes :

 

[traduction]  En outre, même si ladresse de lexpéditeur était incluse dans la marque postale numérique, on ne trouve, dans Sansone ni dans Albal, aucune indication ou proposition préconisant la lecture de la marque postale numérique lors de la remise de larticle postal.

[...]

Comme il a été expliqué, Albal ne fournit aucun autre enseignement ou proposition visant linclusion de ladresse de lexpéditeur dans la marque postale numérique afin quun accusé de réception lui soit envoyé, comme le décrivent les revendications indépendantes 1 et 4 de la demanderesse.

 

 

 


Analyse

 

[68]  La réalisation antérieure d’Albal n’ a été appliquée qu’en combinaison avec celle de Sansone, à l’égard des revendications 2, 3, 5 et 6. Néanmoins, la Commission examinera la réalisation antérieure d’Albal pour vérifier si celle-ci fournit une justification additionnelle au rejet, pour motif d’évidence, des revendications 1 à 6; en effet, en toute logique, si les revendications dépendantes avaient été évidentes eu égard à Sansone et Albal, il en aurait été de même des revendications indépendantes.

 

[69]  À la colonne 2, lignes 8 à 15, l’idée générale du système d’Albal est expliquée en ces termes :

 

[traduction]  La présente invention propose un système et une méthode de livraison de bout en bout de données utiles ubiquistes, qui est essentiellement léquivalent électronique du courrier enregistré et qui procure les avantages de la rapidité, de la configurabilité, de la commodité, de la préservation des ressources et de la ponctualité, en évitant les inconvénients du système manuel utilisé pour le courrier recommandé, comme les travaux décritures, les retards, les ressources en temps et les limites géographiques dapplicabilité.

 

Par ailleurs, certaines autres caractéristiques du système sont signalées à la colonne 2, lignes 29 à 31 :

 

[traduction]  De plus, lexpéditeur peut désigner des événements qui donneront lieu à la fourniture dun avis, pendant la livraison des données utiles, de sorte que lexpéditeur sera en mesure de suivre lévolution de la livraison et la réception de ces données.

 

[70]  Il appert donc clairement qu’Albal prévoit bien la création d’un accusé de réception électronique pour les données utiles livrées par ce système. Les caractéristiques normales des données utiles envisagées sont décrites à la colonne 3, lignes 24 à 28 :

 

[traduction]  Aux fins de la présente divulgation, les données utiles peuvent consister en toute compilation numérique de données, par exemple une télécopie, un courrier vocal, un message de téléavertisseur ou un courrier électronique (peut comprendre un ou plusieurs des éléments suivants : données sous forme de texte ou dimages, données vidéo, données audio ou toute combinaison de ces éléments).

 

[71]  En ce qui touche l’avis de livraison, les possibilités suivantes sont soulignées à la colonne 4, lignes 55 à 63 :

 


[traduction]  Dans le cadre de la présente invention, le destinataire pourrait recevoir les avis suivants : un avis confirmant que le destinataire a reçu les données utiles, un avis portant que la livraison au moyen dun support défini a échoué ou un avis informant quune conversion de support a été effectuée. Lexpéditeur, pour sa part, non seulement peut recevoir les mêmes avis que ceux fournis au destinataire, mais reçoit préférablement toujours un avis de livraison qui lui garantit que les données utiles ont été reçues par le destinataire.

 

[72]  Jusque­-là, il est clair que, même si Albal envisage manifestement la création d’un accusé de réception lors de la remise de données utiles, Albal s’intéresse essentiellement à un système de livraison de données utiles électroniques, comme un courriel, par opposition à la livraison d’un article postal physique au moyen d’un système de livraison conventionnel. Le système de livraison d’Albal prévoit qu’il peut y avoir conversion d’un format à un autre lorsque la livraison des données utiles par la méthode choisie est impossible (par exemple, voir la colonne 2, lignes 15 à 28), mais il ne prévoit pas la lecture ni la saisie de données consignées sur un article postal physique afin de créer un accusé de réception, comme le divulguent les revendications 1 et 4 et les revendications qui en dépendent, puisqu’il n’y aurait aucun article postal physique à livrer. De même, le système d’Albal ne prévoit pas l’utilisation d’une marque postale numérique dans laquelle il serait possible d’intégrer une adresse pouvant plus tard être lue et saisie.   

 

[73]  Néanmoins, il est précisé, à la colonne 8, lignes 41 à 44, qu’une des méthodes de livraison consiste en la livraison à une adresse postale, auquel cas l’utilisateur choisit un transporteur précis, par exemple le service postal des États‑Unis, etc. La façon d’appliquer cette option est expliquée en ces termes, à la colonne 9, lignes 43 à 51 :

 

[traduction]  Si le message doit être livré à une adresse postale, selon le transporteur indiqué dans ladresse du destinataire, le gestionnaire de sortie détermine le point de présence (POP) du transporteur et sa proximité du destinataire. Un courrier électronique ou une télécopie est ensuite envoyé à ce point de présence, où lon effectue la livraison par porteur au destinataire. Dans le cas de livraison par porteur, lexpéditeur est informé du moment où la livraison est effectuée, non du moment où le transporteur reçoit le courrier électronique ou la télécopie.

 


[74]  Ce passage expose qu’en cas de livraison à une adresse postale, une communication électronique est d’abord envoyée à un transporteur, qui livre ensuite par porteur les données utiles ou le message. Plus loin, à la colonne 9, lignes 55 à 64, il est expliqué que ce qui est livré par porteur est un formulaire précis renfermant un message, dont le sceau doit être brisé pour permettre la lecture du message. Aucune indication ne donne à penser qu’il existe une forme quelconque de marque postale numérique d’où sont puisés des renseignements qui servent à créer et envoyer un accusé de réception. Il ne fait aucun doute que l’expéditeur est informé de la livraison, mais la façon dont il en est informé n’est pas claire.

 

[75]  Bien qu’Albal puisse divulguer un système et une méthode de livraison de messages, lesquels sont créés sous forme électronique mais peuvent être convertis et livrés, notamment par porteur, ainsi que l’envoi d’un avis de livraison à l’expéditeur, la référence à cette réalisation antérieure ne contribue pas à expliquer pourquoi il aurait été évident d’inclure l’adresse de l’expéditeur dans une marque postale numérique, puis de lire et de saisir cette information à partir de l’empreinte, et de créer et envoyer enfin un accusé de réception, comme dans les revendications en instance.  Il n’existe aucune raison évidente, à la lumière du dossier dont nous sommes saisis, pour laquelle une personne versée dans l’art aurait combiné les enseignements de Sansone, qui utilise un système conventionnel de livraison de courrier, avec ceux d’Albal, qui portent sur la livraison de messages électroniques, de façon à obtenir l’invention revendiquée en l’espèce. Récemment, dans la décision Les Laboratoires Servier c. Apotex Inc., 2008 CF 825, au paragraphe 254, 67 C.P.R. (4th) 241; conf. par 2009 CAF 222, la juge Snider a réitéré (non souligné dans l’original) :

 

Comme la reconnu Servier, il est possible de réunir une mosaïque de réalisations antérieures afin de faire en sorte quune revendication soit évidente. On suppose que même des techniciens non inventifs versés dans lart lisent différentes revues professionnelles, participent à différents congrès et appliquent les enseignements tirés dune source à un autre contexte ou quils combineraient même les sources. Toutefois, ce faisant, la partie faisant valoir lévidence doit être en mesure de montrer non seulement lexistence de réalisations antérieures, mais aussi la manière dont la personne normalement versée dans lart aurait été amenée à combiner les éléments pertinents provenant de la mosaïque des réalisations antérieures.

 

[76]  Il convient de remarquer que dans l’extrait cité ci-dessus, la juge utilise les mots « aurait été amenée » (would) plutôt que d’employer un mode exprimant la possibilité (could), relativement à la façon dont l’évidence doit être appréciée. 

 


[77]  Albal divulgue le recours à des reçus électroniques mais ne fournit aucune autre motivation à modifier le système de Sansone, qui fait appel à une marque postale numérique conventionnelle et à des formulaires d’accusé de réception imprimés avant la livraison, de façon à obtenir l’invention revendiquée par la demanderesse. Le dossier ne révèle tout simplement aucune raison de retenir certaines caractéristiques d’un des systèmes de livraison pour les appliquer à l’autre, comme l’emploi d’accusés de réception électroniques divulgué dans le système Sansone, et de faire les modifications consistant à intégrer dans une marque postale numérique des renseignements sur l’expéditeur qui seront lus et saisis au moment de la remise, de façon à obtenir l’invention revendiquée. Le fait que les diverses composantes de la technologie utilisée étaient déjà décrites dans divers documents et qu’il n’existe aucune difficulté apparente à les rassembler et à les combiner précisément comme le propose l’invention revendiquée (ainsi que le donne à penser l’absence de divulgation technique dans la présente demande), ne constitue pas un fondement suffisant pour établir que le procédé proposé dans l’invention revendiquée était évident. Comme l’a déclaré le président Thorson dans l’arrêt R. c. Uhlemann Optical Co. (1949), [1950] Ex. C. R. 142; conf. par [1952] 1 R.C.S. 143 :

 

[traduction]  Il est possible, en conséquence, de se trouver en présence dune invention même la mise en uvre de lidée ne présente aucune difficulté  une fois celle-ci conçue.

 

[78]  La Commission ne peut conclure que les revendications 2, 3, 5 et 6 auraient été évidentes eu égard à Sansone et à Albal. Elle ne peut non plus conclure que les revendications 1 et 4 auraient été évidentes eu égard à la combinaison de ces réalisations antérieures.


RECOMMANDATIONS

 

[79]  En résumé, la Commission recommande que :

 

1)   le rejet, par l’examinateur, des revendications 1 et 4 au motif qu’elles étaient évidentes eu égard à Sansone, soit infirmé; 

2)   le rejet, par l’examinateur, des revendications  2, 3, 5 et 6 au motif qu’elles étaient évidentes eu égard à Sansone et à Albal, soit infirmé.

 

 

 

 

Stephen MacNeil    Paul Fitzner     Paul Sabharwal

Membre             Membre           Membre

                              

 

[80]  Je souscris aux conclusions et recommandations de la Commission d’appel des brevets selon lesquelles :

 

1)   le rejet, par l’examinateur, des revendications 1 et 4 au motif qu’elles étaient évidentes eu égard à Sansone, doit être infirmé;

2)   le rejet, par l’examinateur, des revendications  2, 3, 5 et 6 au motif qu’elles étaient évidentes eu égard à Sansone et à Albal, doit être infirmé.

 

     Étant donné que les questions en instance ont été réglées, la présente demande est conforme à la Loi sur les brevets et aux Règles sur les brevets et devrait être acceptée.

 

 

 

 

Mary Carman

Commissaire aux brevets

 

Fait à Gatineau (Québec),

le 2 novembre 2009

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