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Le 25 février 2009                                                                  Commissioner’s Decision #1289

Décision de la Commissaire no 1289

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TOPICS: L04, L31, L32, L34, L38, L51, L54

SUJETS : L04, L31, L32, L34, L38, L51, L54

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Patent No : 2,200,422

Brevet n: 2,200,422


 

 

 

 

 

 

 

RÉSUMÉ DE LA DÉCISION DE LA COMMISSAIRE

 

 

 

D.C. 1289                   Brevet no 2,200,422

 

Le brevet faisant l’objet de la demande de redélivrance concernait un système de rangement à rail sur lequel on peut ranger des articles ménagers. La raison que donne le titulaire du brevet pour sa demande de redélivrance est que le brevet est défectueux ou inopérant puisque les revendications dépendantes visant diverses ferrures spécifiques qui fonctionnent avec le système n’ont pas été incluses, ni les revendications dépendantes concernant la fonction spécifique des ouvertures formées dans une rainure sur la partie inférieure du rail qui permettent de fixer les ferrures sur ce dernier. La demande de redélivrance a été transmise à la Commission d’appel des brevets par le Conseil de redélivrance en raison de l’absence de preuve que l’intention du breveté n’avait pas été réalisée par le brevet délivré et des incompatibilités entre les défectuosités alléguées et les rectifications proposées de la description et des revendications.

 

La Commission d’appel des brevets a recommandé que la demande de redélivrance soit rejetée, n’étant pas convaincue qu’il soit survenu une erreur ayant eu pour conséquence que l’intention originale de l’inventeur/demandeur n’ait pas été réalisée. La Commission a aussi souscrit à la position du Conseil de redélivrance selon laquelle certaines rectifications de la description et des revendications n’étaient pas appropriées parce qu’elles ne se rapportaient pas aux défectuosités alléguées dans le brevet.

 

La commissaire a accepté la recommandation de la Commission et la demande de redélivrance a été rejetée.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

 

DÉCISION DE LA COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 

 

 

 

Une demande de redélivrance du brevet numéro 2,200,422 ayant été jugée non conforme au paragraphe 47(1) de la Loi sur les brevets, la demande a été examinée. La demande de redélivrance a été considérée par la Commission d’appel des brevets et par la commissaire aux brevets. Voici les conclusions de la Commission et la décision de la commissaire :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Agent du demandeur

 

Parlee McLaws LLP

1500 Manulife Place

10180-101 Street                                                             

Edmonton, Alberta

T5J 4K1


INTRODUCTION

 

[1]               La présente décision porte sur l’examen par la commissaire aux brevets de l’opinion du Conseil de redélivrance au sujet d’une demande de redélivrance du brevet no 2,200,422, intitulé « RAIL POUR SYSTÈME DE RANGEMENT ». Le breveté et inventeur est Jan B. Leurdijk.

 

[2]               Le brevet porte de façon générale sur un système de rangement à rail sur lequel on peut ranger des articles ménagers. Le système est constitué d’un rail qui peut être installé sur un mur et qui comprend une rainure dans laquelle peut être insérée la partie supérieure d’une ferrure de suspension ou d’un élément semblable sur laquelle des articles peuvent être suspendus. La partie inférieure de la ferrure est fixée au moyen de pièces de fixation engagées dans la deuxième rainure située dans la partie inférieure du rail. La figure 2 du brevet montre une réalisation de l’invention—:

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LE CONTEXTE

 


[3]               Le brevet en cause a été délivré le 7 mai 2002 et la demande de redélivrance a été déposée le 8 mai 2006 (le 7 mai 2006 étant un jour férié). Dans une lettre datée du 2 février 2007, le Conseil de redélivrance (le Conseil), qui est un groupe au sein de l’Examen des brevets composé d’examinateurs principaux de brevets chargés d’effectuer l’examen initial des demandes de redélivrance, a jugé la demande de redélivrance non acceptable en vertu du paragraphe 47(1) de la Loi sur les brevets. Le breveté a répondu en transmettant d’autres observations le 1er mai 2007. Malgré ces observations, l’affaire a été transmise à la Commission d’appel des brevets (la Commission) et dans le résumé des motifs présenté à la Commission, qui a été transmis au breveté le 9 janvier 2008, le Conseil a maintenu sa position selon laquelle la demande de redélivrance n’est pas acceptable.

 

[4]               En réponse à la demande d’audience du breveté, une audience a été tenue par téléconférence le 11 juin 2008 et à ce moment-là, le breveté était représenté par M. J. Jay Haugen du cabinet Parlee McLaws LLP. Le Bureau des brevets était représenté par M. David Green du Conseil, tandis que les autres membres du Conseil, Mme Sophie Beaudoin, M. Mark Janczarski, M. Jason Fisher et M. Stephen Decker étaient présents à titre d’observateurs. Avant l’audience, le 3 juin 2008, M. Haugen a présenté à la Commission, pour le compte du breveté, des observations écrites dans lesquelles étaient proposées des rectifications de la description et des revendications qui faisaient auparavant partie de la demande de redélivrance. Les présentations faites à l’audience ont été centrées sur ces observations. Plus loin, dans notre analyse, nous nous attacherons à la description et aux revendications proposées dans la forme où elles se trouvent dans les observations présentées à la Commission. Toutefois, les observations antérieures seront importantes en ce qui concerne les défectuosités alléguées et la preuve présentée avec ces observations.

 

LA QUESTION

 

[5]               La seule question à trancher est la suivante :

 

La demande de redélivrance est-elle conforme au paragraphe 47(1) de la Loi sur les brevets?

 

LA REDÉLIVRANCE : LES PRINCIPES JURIDIQUES

 

[6]               Le paragraphe 47(1) de la Loi sur les brevets définit les conditions selon lesquelles la redélivrance d’un brevet peut être octroyée :

 


Lorsquun brevet est jugé défectueux ou inopérant à cause dune description et spécification insuffisante, ou parce que le breveté a revendiqué plus ou moins quil navait droit de revendiquer à titre dinvention nouvelle, mais quil apparaît en même temps que lerreur a été commise par inadvertance, accident ou méprise, sans intention de frauder ou de tromper, le commissaire peut, si le breveté abandonne ce brevet dans un délai de quatre ans à compter de la date du brevet, et après acquittement dune taxe réglementaire additionnelle, faire délivrer au breveté un nouveau brevet, conforme à une description et spécification rectifiée par le breveté, pour la même invention et pour la partie restant alors à courir de la période pour laquelle le brevet original a été accordé.

 

[7]               Plusieurs conditions doivent être réunies pour qu’un brevet puisse être redélivré en vertu du paragraphe 47(1), à savoir : a) qu’il soit défectueux ou inopérant à cause d’une description et spécification insuffisante, ou parce que le breveté a revendiqué plus ou moins qu’il n’avait droit de revendiquer à titre d’invention nouvelle; b) que l’erreur, ou la défectuosité, résulte d’une inadvertance, d’un accident ou d’une méprise, sans intention de frauder ou de tromper; c) que le breveté abandonne ce brevet dans un délai de quatre ans à compter de la date du brevet et acquitte une taxe réglementaire; et d) que le brevet redélivré porte sur la même invention que le brevet original.

 

[8]               La première de ces conditions est que le brevet soit «  défectueux ou inopérant à cause d’une description et spécification insuffisante, ou parce que le breveté a revendiqué plus ou moins qu’il n’avait droit de revendiquer à titre d’invention nouvelle ». Dans l’arrêt Northern Electric Co. c. Photo Sound Corp. [1936] R.C.S. 649, à propos de cette formulation de la loi, le juge en chef Duff a dit :

 

[traduction] À tout le moins, la loi doit envisager quelque sorte de motif raisonnable pour le titulaire du brevet original de craindre que le brevet soit défectueux au sens de cet article. Ce serait, à mon avis, forcer cette formulation que de lappliquer à un cas où il est évident que le brevet réalise complètement lintention du demandeur, où il ny a insuffisance ni de la description ni de la spécification, par rapport au but que le demandeur avait à lesprit.

 

[9]               Il en découle qu’un brevet ne saurait être « défectueux ou inopérant » que s’il ne réalise pas l’intention du demandeur. De plus, la défectuosité doit être une défectuosité ayant trait à « une description et spécification insuffisante... ». La spécification comprend les revendications et il serait donc possible de revendiquer par la voie du brevet redélivré quelque chose qui n’avait pas été revendiqué antérieurement même si le breveté n’a pas revendiqué « plus ou moins qu’il n’avait droit de revendiquer à titre d’invention nouvelle ».

 

[10]            La loi précise aussi que la défectuosité ou l’« erreur » doit résulter « [d’une] inadvertance, [d’un] accident ou [d’une] méprise, sans intention de frauder ou de tromper ». Ainsi que l’a fait observer le juge en chef Duff dans l’arrêt Northern Electric, précité :

 


[traduction] Ces conditions impliquent nécessairement que linadvertance, laccident ou la méprise doivent être une inadvertance, un accident ou une méprise touchant la suffisance de la description ou spécification dans le brevet original, et cest seulement à légard dune telle inadvertance, dun tel accident ou dune telle méprise que la loi envisage une mesure correctrice.

 

[11]           Au sujet de ce qui constitue « [l’] inadvertance, [l’] accident ou [la] méprise », le juge en chef Duff a dit, dans l’arrêt Northern Electric, précité (non souligné dans l’original) :

 

[traduction] linadvertance, laccident ou la méprise au sujet de la suffisance de la description ou spécification doit constituer une défectuosité du brevet au sens quil ne donne pas effet de façon adéquate à lintention du demandeur.

 

[12]           Ainsi qu’il est souligné dans l’extrait cité ci-dessus, c’est l’intention du demandeur qui est primordiale. Il faut que « [l’]inadvertance, [l’]accident ou [la] méprise », quelle qu’en soit la forme et quelle que soit la personne qui en est la cause, ait entraîné un résultat autre que celui que visait l’inventeur/demandeur. Dans l’arrêt Farbwerke Hoechst Aktiengesellschaft Vormals Meister Lucius & Bruning c. Commissioner of Patents (1966), 50 C.P.R. 220 à la page 254 (C.S.C.), la Cour a réitéré l’importance de l’intention de l’inventeur/demandeur :

 

[traduction] La personne qui invoque une méprise en vertu de larticle 50 [maintenant, larticle 47] devrait établir que le brevet qui a été délivré nexprimait pas de façon exacte lintention de linventeur à légard de la description ou spécification de linvention ou à légard de la portée des revendications quil a formulées.

 

[13]           Étant donné qu’il faut établir que le brevet ne reflète pas l’intention originale de l’inventeur, la question se pose de savoir ce qui est nécessaire pour fournir la preuve d’une telle allégation. Pour prouver qu’il y a eu quelque « inadvertance, accident ou méprise », il va sans dire que la personne qui demande la redélivrance devrait donner un aperçu des événements qui ont conduit au résultat erroné. Mais quels éléments peuvent être pris en compte pour déterminer quelle était l’intention de l’inventeur? Dans l’arrêt Northern Electric, précité, le juge en chef Duff a dit clairement qu’il fallait une preuve permettant d’établir l’intention :

 

[traduction] Il est également très clair, daprès les éléments quon nous a présentés, que, dans la procédure devant le commissaire menant à loctroi du brevet redélivré, aucune preuve na été présentée pour établir que la spécification, la description ou les revendications du brevet original étaient insuffisantes pour donner effet à lintention de [linventeur]. Il y a eu encore moins de preuve présentée pour établir que [linventeur] avait fait défaut de donner une description ou spécification suffisante de linvention à légard de laquelle il demandait la protection par inadvertance, accident ou méprise. Il ny a pas non plus dallégation en ce sens.

 


[14]           La dernière phrase de la citation ci-dessus mentionne une [traduction] « allégation » d’une défectuosité ou d’une erreur. Dans l’arrêt Paul Moore Co. Ltd. c. Commissaire des brevets (1979), 46 C.P.R. (2d) 5 à la page 10 (C.A.F.), la Cour a formulé des commentaires sur la possibilité qu’une telle « allégation » suffise :

 

 La simple allégation de lappelante selon laquelle son agent a commis une erreur ne constitue pas une preuve de cette erreur ou, du moins, ne constitue pas un élément de preuve pouvant amener le Commissaire ou cette Cour à conclure quune erreur a réellement été commise au moment de la rédaction des revendications.

 

[15]           Donc, la personne qui demande la redélivrance doit fournir quelque élément de preuve pour établir que l’instruction de la demande de brevet a eu pour résultat quelque chose d’autre que ce qui était visé. La portée d’une telle preuve a été examinée dans la décision Mobil Oil Corp. et al. c. Hercules Canada Inc. (1994), 57 C.P.R. (3d) 488, à la page 499 (C.F. 1re inst.), révisée pour d’autres motifs (1995), 63 C.P.R. (3d) 473 (C.A.F.) (non souligné dans l’original) :

 

Lintention des inventeurs doit être constatée à laide de la preuve objective, comme le texte des brevets, et non à laide de la preuve subjective que ceux‑ci ont eux-mêmes présentée (A.T. & T., précité, à la p. 257). Le brevet américain désignant MM. All et Duncan comme inventeurs a été délivré alors que les revendications 4 à 7 inclusivement figuraient dans le mémoire descriptif. À mon avis, cela représente bien lintention des inventeurs, à savoir que ces revendications étaient destinées à être incluses et que, si elles étaient interprétées compte tenu de lobjet visé, une certaine quantité dagent glissant était permise dans le film, dans la mesure où cela ne nuisait pas à ladhérence du support du film au revêtement métallisé. Par conséquent, la demande concernant le brevet canadien original était défectueuse, en ce sens que les revendications correspondant aux revendications 4 à 7 inclusivement du brevet américain nétaient pas incluses.

 

[16]           Ainsi qu’il est indiqué ci-dessus, une preuve objective, comme le texte du brevet, ou la preuve de ce qui a été fait dans d’autres pays, par opposition à une preuve subjective, peut indiquer qu’un brevet est défectueux en ce qu’il ne représente pas l’intention du demandeur. Cette position a été appuyée par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt cité ci‑dessus, à la page 481 :

 

Le juge du procès était très conscient des limites auxquelles était assujetti son examen de la portée visée par le brevet original. Il était sensibilisé au fait quil avait besoin de trouver des éléments de preuve et des moyens dappui objectifs dans le libellé du brevet lui-même.

 


[17]           Une fois le brevet délivré, il faut présumer que l’intention de l’inventeur/demandeur a été réalisée, présomption qu’il faut renverser pour obtenir une mesure correctrice en vertu de l’article 47 de la Loi sur les brevets. Dans l’arrêt Northern Electric, précité, le juge en chef Duff a fait ressortir cette idée à propos du brevet en cause dans cette affaire :

 

[traduction] Il existe, naturellement, une présomption, qui est une présomption légale, que [linventeur], en signant ces documents, connaissait la nature de leur contenu.

...

Il faut supposer, en labsence de quelque preuve du contraire, que [linventeur] connaissait le contenu des documents que je mapprête à analyser et quil connaissait leur effet conformément à leur interprétation correcte.

 

[18]           Il peut exister une forte présomption de cette nature, selon le degré d’expérience que possède l’inventeur à l’égard du système des brevets. Par exemple, dans l’affaire Northern Electric, précitée, il y avait une forte présomption que l’inventeur connaissait les effets de son brevet, sur le fondement de sa vaste expérience d’inventeur habitué à rédiger des mémoires descriptifs. Par contre, dans l’affaire Curl-Master Manufacturing Co. Ltd. c. Atlas Brush Ltd. (1967), 52 C.P.R. 51 (C.S.C.), un inventeur inexpérimenté a réussi à convaincre la Cour que son agent de brevets n’avait pas protégé l’invention qu’il avait réellement faite.

 

[19]           L’article 47 prévoit que le brevet qui doit être redélivré soit abandonné dans les quatre ans suivant la date du brevet (la date de délivrance). Cette condition a trait au délai dans lequel il faut déposer la demande de redélivrance (voir l’arrêt Curl-Master, précité, à la page 74).

 

[20]           Une fois remplies les conditions traitées ci-dessus, le commissaire peut octroyer un nouveau brevet « conforme à une description et spécification rectifiée par le breveté, pour la même invention et pour la partie restant alors à courir de la période pour laquelle le brevet original a été accordé ». Le juge en chef Duff, dans l’arrêt Northern Electric, précité, a aussi formulé un commentaire sur la nécessité que le nouveau brevet porte sur la même invention, en réponse à un argument faisant valoir que ce qu’on voulait obtenir par la voie de la redélivrance devait se trouver dans la spécification (y compris le dessin) (non souligné dans l’original) :

 

[traduction] Largument repose naturellement sur la thèse quil suffirait, pour obtenir une mesure correctrice en vertu de la loi, détablir que le dessin dans le brevet original montre un dispositif à légard duquel le breveté aurait pu revendiquer la protection sil lavait demandée et sil avait divulgué suffisamment la nature de linvention. Bien entendu, cela laisse de côté les parties de la loi que jai mises en relief, qui établissent très clairement que léconomie de la loi est daccorder la mesure correctrice seulement à légard dune invention clairement conçue en tant que telle, à légard de laquelle le breveté original comptait revendiquer la protection, mais à légard de laquelle, pour les causes définies par la loi, la description ou spécification est insuffisante. Lidentité de linvention ne constitue quune des conditions prévues par la loi.


 

[21]           De cet extrait, il ressort que la nécessité qu’il s’agisse de « la même invention—» entraîne que l’objet visé par la redélivrance doit être divulgué dans le brevet original. Une invention qui n’a pas été divulguée ne peut être revendiquée (p. ex., un élément nouveau). Il est aussi évident d’après l’extrait cité ci-dessus qu’un simple appui pour une revendication visée par la redélivrance n’est pas suffisant. La personne qui demande la redélivrance doit aussi prouver que ce qu’elle revendique maintenant était couvert par la protection qu’elle avait l’intention d’obtenir.                                                      

 

[22]           Dans l’arrêt Mobil Oil, précité, le juge Wetston a parlé de la nécessité qu’il s’agisse de « la même invention » de la même manière lorsqu’il a dit :

 

Larticle 47 permet la rectification des revendications de façon que ces dernières soient conformes à lintention de linventeur. Cela étant, les revendications du brevet redélivré et celles du brevet original seront différentes. Pour satisfaire à lexigence selon laquelle il doit sagir de la « même invention », les revendications rectifiées doivent viser linvention qui a été divulguée dune façon quelque peu imparfaite dans le mémoire descriptif du brevet original...

 

[23]           On peut également s’appuyer sur les dessins pour étayer une invention qu’on cherche à protéger par la voie de la redélivrance (voir l’arrêt Curl-Master, précité, à la page 71).

 

[24]           Une fois réunies les conditions de l’article 47, le commissaire « peut » faire délivrer un nouveau brevet. Il est important de noter que l’octroi de la redélivrance est discrétionnaire; toutefois, ce pouvoir discrétionnaire ne peut être exercé que si les conditions de la loi sont réunies. Dans la décision Bergeron c. DeKermor Electric Heating Co. [1927] R.C. de l’É. 181, le juge Audette a dit :

 

[traduction] Le pouvoir doctroyer la redélivrance na été conféré au commissaire aux brevets que dans les cas prévus par la loi; or la présente affaire échappe à la portée de la loi; donc le commissaire na pas le pouvoir doctroyer la redélivrance dans les circonstances de lespèce.

 

[25]           De même, dans l’arrêt Farbwerke Hoechst, précité, la Cour suprême, en comparant la loi américaine à la loi canadienne, a dit :

 

[traduction] [L]a loi américaine oblige le commissaire à redélivrer un brevet, dans les circonstances définies, même dans les cas où le brevet initial est invalide. La loi canadienne confère un pouvoir discrétionnaire, et seulement dans les cas où le brevet initial est « jugé défectueux ou inopérant ».

 

[26]           La question de la charge de la preuve à l’égard d’une demande de redélivrance a été traitée dans l’arrêt Paul Moore c. Commissaire des brevets, précité :


 

Lorsquune demande visant la redélivrance dun brevet est présentée, en vertu de larticle 50, le Commissaire ne peut accorder cette demande sauf sil est convaincu que le brevet renferme une erreur « commise par inadvertance, accident ou méprise ». Sil nen est pas convaincu il doit rejeter la demande; il na pas à être persuadé de façon absolue quil ny a pas eu dinadvertance, daccident ni de méprise.

 

[27]           En d’autres termes, lors du dépôt de la demande de redélivrance, le breveté a la charge d’établir que la demande est visée par les dispositions de la loi, à défaut de quoi le commissaire doit rejeter la demande.

 

[28]           Compte tenu de l’effet rétroactif de la redélivrance prévu au paragraphe 47(2), il est important que chaque demande soit examinée attentivement. Dans l’arrêt Northern Electric, précité, le juge en chef Duff a signalé cet aspect :

 

[traduction] Il convient de noter que larticle est rétroactif sous un aspect important. La rectification sapplique à compter de la date du brevet original pour ce qui est des motifs dinstance postérieurs à la date du nouveau brevet. Même avec linterprétation la plus rigoureuse, une grave injustice peut résulter de lapplication de cette disposition lorsque des gens ont pris des dispositions et dépensé des sommes sur la foi du mémoire descriptif du brevet entre la date du brevet original et celle du brevet redélivré, soit une période de cinq ans en lespèce. Dans ces conditions, il nous incombe, à mon sens, de ne pas étendre le libellé de larticle au-delà des espèces qui entrent manifestement dans son périmètre.

 

[29]           Dans la décision Créations 2000 Inc. c. Canpar Industrial Products Ltd. (1988), 22 C.P.R. (3d) 389 (C.F. 1re inst.), le juge Dubé a exprimé le même avis :

 

Étant donné le préjudice que peut créer la redélivrance dun brevet, vu son effet rétroactif, les motifs justifiant une telle redélivrance doivent être interprétés restrictivement et les conditions prescrites au paragraphe précité doivent être respectées scrupuleusement.

 

[30]           Les principes primordiaux de base suivants, que nous dégageons de l’exposé ci‑dessus, peuvent être utiles pour l’examen de ces demandes. Toutefois, nous reconnaissons que ces principes peuvent ne pas embrasser l’ensemble des facteurs à prendre en considération dans un cas donné.

 

(1)        Pour exercer son pouvoir discrétionnaire d’octroyer une redélivrance, le commissaire doit être convaincu que le brevet est défectueux ou inopérant et que la défectuosité (ou l’erreur pour reprendre le terme de l’article 47) résulte d’une inadvertance, d’un accident ou d’une méprise.


(2)        La défectuosité se limite à une description ou spécification insuffisante ou au fait que le breveté a revendiqué plus ou moins qu’il n’avait droit de revendiquer à titre d’invention nouvelle.

(3)        En vue de décider si le brevet est défectueux ou inopérant, il faut que la personne demandant la redélivrance établisse que le brevet délivré n’exprime pas l’intention originale de l’inventeur/demandeur.

(4)        Une preuve objective est nécessaire pour établir cette intention.

(5)        L’invention revendiquée par la voie de la redélivrance doit trouver un appui dans le brevet original (c’est-à-dire que le brevet redélivré doit porter sur la même invention).

 

LA DEMANDE DE REDÉLIVRANCE

 

[31]           Il faut examiner les motifs pour lesquels le breveté estime que le brevet est défectueux. Dans la partie 3 de la demande de redélivrance, les défectuosités sont présentées de la manière suivante :

 

[traduction] Les raisons pour lesquelles le brevet est jugé défectueux ou inopérant sont les suivantes : dautres réalisations de linvention couvertes par des revendications indépendantes larges ne font pas lobjet de revendications expresses. Les revendications 1 et 25 du brevet décrivent un système de rangement constitué dun rail dont la partie inférieure comporte une rainure et au moins une ferrure de suspension dont la partie inférieure est conçue pour sengager dans la rainure du bas. La revendication 1 présente une réalisation de linvention alors que la revendication 25 donne une définition générale de linvention. Les revendications 13 à 20, qui dépendent de la revendication 1, présentent une série de ferrures qui fonctionnent avec le système. Il ny a pas une série de revendications analogues, dépendantes de la revendication 25, pour les ferrures. De plus, les revendications 22, 25 et 28 comportent une restriction large selon laquelle la rainure sur la partie inférieure faisant partie du rail est conçue pour la fixation dune ferrure de suspension au rail. Une réalisation de linvention telle quelle est divulguée dans le mémoire descriptif de la demande de brevet originale comprenant des ouvertures formées dans la rainure à des endroits prédéterminés de la partie inférieure faisant partie du rail conçues pour la fixation dune ou plusieurs ferrures dans le rail, nest pas expressément revendiquée.

 

[32]           Donc, le breveté allègue que la demande comporte deux défectuosités principales, à savoir :

 

(1)        il n’y a pas d’ensemble de revendications dépendantes de la revendication 25, qui seraient équivalentes aux revendications dépendantes 13 à 20;


(2)        il n’y a pas de revendications dépendantes des revendications 22, 25 et 28, qui revendiquent expressément une réalisation de l’invention comportant des ouvertures formées dans la rainure, à des endroits prédéterminés de la partie inférieure faisant partie du rail, et conçues pour la fixation d’une ou plusieurs ferrures dans le rail.

 

[33]           À l’appui de cette allégation, le breveté allègue que l’erreur est survenue de la manière suivante :

 

[traduction] [D]ans le prototype de linvention fabriqué par le breveté, et comme celui-ci la divulgué à son agent de brevets dans le cadre de la préparation de la demande de brevet, une ferrure de suspension était solidement fixée au rail au moyen dune pièce de fixation passant dans une ouverture dans la ferrure et prise dans une ouverture dans la rainure inférieure du rail de manière à empêcher la ferrure de remonter ou de senlever du rail au moment de la pose ou du retrait des articles sur la ferrure. Ceci a été fait à des fins purement pratiques. Le breveté savait que linvention fonctionnerait aussi bien si la ferrure de suspension était simplement engagée dans la rainure inférieure du rail sans utiliser de pièce de fixation. Cependant, le breveté a commis lerreur de ne pas informer lagent de brevets que lengagement de la pièce de fixation dans les ouvertures de la rainure et dans celle de la ferrure, nétait pas le seul moyen de fixer les ferrures aux rails et que cet élément de linvention nétait ni important ni nécessaire. Le titulaire du brevet ignorait que le nombre restreint de revendications de sa demande de brevet pourrait restreindre la portée de son brevet dune manière qui ne correspondait pas à son intention.

 

[34]           À la lecture de cet extrait, notre première impression est que les allégations qui y sont formulées ne sont pas compatibles avec les défectuosités indiquées auparavant. En effet, si le breveté s’inquiétait de ce que la portée du brevet puisse être trop étroite et que les ouvertures et les fixations dans la rainure inférieure ne soient pas nécessaires, nous ne voyons pas en quoi les revendications seraient défectueuses du fait qu’elles ne comprennent pas ces réalisations plus limitées. Nous notons également que les revendications 22, 25 et 28 du brevet délivré ne sont pas limitées à un type particulier d’engagement dans la rainure inférieure.

 

[35]           Dans son exposé des événements ayant mené à la demande de redélivrance, le breveté a dit, dans la partie 5 de la pétition :

 


[traduction] Le breveté a été mis au courant des faits nouveaux donnant lieu à la présente demande vers septembre 2000 de la manière suivante : il sest rendu compte quun système de rangement à rail dun tiers était en vente dans les grands magasins, au Canada. En raison des activités du tiers, le breveté a demandé un devancement de lexamen de sa demande, qui lui a été accordé, et le brevet a été délivré le 7 mai 2002. Depuis la délivrance du brevet, le breveté a pu procéder à un examen plus détaillé du système de rangement à rail du tiers. Le breveté a remarqué que le système de rangement à rail du tiers était essentiellement le même que le sien puisquil utilisait une rainure dans la partie inférieure du rail dans laquelle sengageait la ferrure de suspension. Lorsquil a demandé à son agent de brevets sil y avait contrefaçon de son brevet, celui-ci lui a répondu que, bien que les revendications indépendantes 22, 25 et 28 de son brevet soient suffisamment larges pour couvrir dautres réalisations de son invention, y compris le système de rangement à rail du tiers, il ne contenait pas de revendications plus étroites couvrant expressément les ferrures vendues par le tiers au Canada.

 

[36]           Cet extrait nous conduit à des préoccupations semblables à celles que nous avons déjà exprimées relativement aux circonstances entourant l’erreur. À savoir, le problème indiqué semble être que, malgré la présence de revendications étendues couvrant le produit d’un contrefacteur potentiel, il n’y a pas de revendications de réalisations plus limitées qui ressemblent plus étroitement au produit contrefaisant. Toutefois, ce problème ne semble pas résulter du fait que l’intention de l’inventeur n’aurait pas été réalisée au cours de l’instruction de la demande de brevet.

 

[37]           En examinant seulement la demande de redélivrance initiale et les revendications du brevet délivré, ainsi qu’il est exposé ci-dessus, nous ne voyons pas clairement, sur le fondement des défectuosités proposées et de l’analyse de l’intention du breveté, que ce qui a été obtenu par la voie du brevet était quelque chose d’autre que ce qui était visé. Il n’y a pas de preuve, à ce stade, qu’il y ait jamais eu une intention d’inclure les revendications dépendantes plus étroites qui sont proposées par la voie de la redélivrance. En fait, ainsi qu’il a été noté auparavant et relativement à la partie 5 de la demande, l’inventeur semblait s’inquiéter davantage de ce que la portée du brevet puisse être trop étroite. Nous noterions aussi que le fait qu’un brevet ne couvre pas un produit contrefaisant potentiel ne saurait être une raison valide de redélivrance. Toutefois, s’il arrivait que, par suite de la reconnaissance du produit d’un concurrent, on découvre une véritable erreur comme celle que prévoit l’article 47, cela pourrait faire l’objet d’une demande de redélivrance.

 

[38]           Avec la demande de redélivrance, le breveté a aussi présenté le projet de rectifications de la description et des revendications. Nous traiterons plus loin dans le présent document du caractère approprié de la description et des revendications rectifiées en mettant l’accent sur le projet de rectifications dont est actuellement saisie la Commission.

 

LA POSITION DU CONSEIL DE REDÉLIVRANCE

 

[39]           Dans la lettre du 2 février 2007, le Conseil a défini les défectuosités alléguées par le breveté, d’une manière qui concorde généralement avec notre position exposée ci‑dessus. De plus, le Conseil n’a pu trouver d’élément de preuve indiquant une intention d’obtenir la protection dans le brevet original, qui concorderait avec les défectuosités définies par le breveté.


 

[40]           Dans la lettre, le Conseil a indiqué des exemples de preuve qui pourraient appuyer une demande de redélivrance :

[traduction]

        revendications déposées à lorigine et omises par inadvertance, que ce soit dans la même demande ou dans une autre demande;

        revendications déposées dans des demandes étrangères équivalentes ou incluses dans des brevets étrangers équivalents;

        communications entre les inventeurs et/ou les agents indiquant clairement lintention de linventeur;

        modèles de démonstration des dispositifs revendiqués;

        tout autre élément de preuve quon peut trouver.

 

[41]           Nous jugeons nécessaire de formuler des commentaires sur cet extrait qui tente de donner des exemples de certains types de preuve qui pourraient justifier une demande de redélivrance. Sur le premier point, nous devons faire observer que nous voyons mal comment des revendications qui auraient été omises par inadvertance dans une autre demande pourraient justifier de rectifier un brevet donné, comme il doit y avoir eu une erreur dans l’instruction de la demande de brevet en cause pour justifier l’octroi du brevet redélivré. Il faut aussi se rappeler qu’une allégation portant que des revendications déposées à l’origine ont été omises par inadvertance doit être établie au moyen d’éléments de preuve. S’agissant du deuxième point, ainsi qu’il a été établi dans l’examen que nous avons fait de la jurisprudence, ces éléments de preuve doivent établir l’intention, mais il faut se rappeler qu’il faut considérer la preuve dans son ensemble. D’autres éléments de preuve peuvent indiquer une intention différente dans le cas du brevet canadien équivalent. Relativement au troisième point, nous tenons à signaler que toute communication pertinente devant servir à établir l’intention de l’inventeur doit être antérieure à la date de délivrance du brevet pour être de quelque utilité. Enfin, s’agissant des modèles de démonstration, ils doivent eux aussi être antérieurs à l’octroi du brevet pour être de quelque utilité en vue d’établir que l’inventeur n’a pas obtenu la protection de ce qu’il a véritablement inventé.

 

[42]           Le Conseil a également exprimé des préoccupations concernant le moment de la découverte de l’erreur et le défaut du breveté d’examiner rapidement les supports de rangement de son concurrent. Nous pensons que le breveté a apaisé ces préoccupations dans sa réponse, que nous traiterons dans la section suivante, puisque ces préoccupations ne figuraient pas dans le résumé des motifs transmis à la Commission et qu’elles n’ont pas non plus été soulevées à l’audience.

 

[43]           Dans le résumé des motifs transmis à la Commission, le Conseil a réitéré ses conclusions relatives à l’absence de preuve d’une erreur, en indiquant au sujet des allégations du breveté :


 

[traduction] Nous notons que les circonstances relatées ne semblent pas correspondre aux défectuosités. Ce qui précède donne à penser que les revendications incluses dans le brevet sont trop étroites du fait quelles revendiquent des « pièces de fixation et des ouvertures» alors quil aurait fallu une revendication plus large à lexamen des défectuosités exposées, nous ne voyons rien qui indique que la défectuosité appelant une correction serait que les revendications sont trop étroites du fait quelles incluent « les pièces de fixation et les ouvertures ».

 

Sauf cet élément, il ny a pas eu de preuve de lintention du breveté qui a été fournie avec la demande de redélivrance, que ce soit relativement aux défectuosités exposées explicitement, ou relativement à lautre défectuosité implicite dans la partie 4 de la demande de redélivrance. En outre, le Conseil de redélivrance a examiné le dossier dinstruction au Canada et le dossier dinstruction de la demande correspondante aux États-Unis en vue de trouver une preuve de lintention mais nen a trouvé aucune qui soit apparente.

 

[44]           En réponse à une déclaration solennelle de M. Leurdijk, inventeur et breveté, exposant sa position sur l’intention qu’il avait eue, le Conseil a exprimé l’opinion suivante :

 

[traduction] Il semblerait que lintention du breveté de présenter des revendications larges était déjà manifeste dans le libellé des revendications, cest pourquoi aucun vice de forme associé à la réalisation indûment restrictive comportant «des ouvertures destinées aux pièces de fixation » nest présent. Mais, comme il a déjà été mentionné, cela ne constitue même pas une défectuosité daprès la partie 3 de la demande de redélivrance.

 

[45]           Précisons le dernier point dans l’extrait qui précède : les défectuosités qu’aurait comportées la demande consistaient en ce que des réalisations plus étroites particulières n’avaient pas été revendiquées.

 

[46]           À l’audience, le Conseil, représenté par M. David Green, a réitéré l’absence manifeste de preuve d’une intention de l’inventeur qui indiquerait une défectuosité du brevet. Le Conseil a aussi souligné le fait qu’un simple appui dans le brevet ne suffit pas à justifier la redélivrance, en avançant l’argument que tous les brevets délivrés comportent des éléments qui ne sont pas revendiqués. Nous trouvons que l’argument a une certaine logique, qui vient s’ajouter à ce que nous avons dégagé auparavant de la jurisprudence, puisque, si un simple appui suffisait, tous les brevets pourraient donner lieu à la redélivrance. Toutefois, cela supposerait qu’on ne tienne aucun compte des autres conditions prévues par l’article 47 de la Loi sur les brevets. Le Conseil a aussi formulé des commentaires sur les éléments de preuve supplémentaires du breveté et les a jugés insuffisants pour établir une erreur au sens de la loi. Nous passons maintenant à l’examen des observations supplémentaires pour le compte du breveté.


 

LES OBSERVATIONS DU BREVETÉ

 

[47]           Une déclaration solennelle de Jan. B. Leurdijk, inventeur et titulaire actuel du brevet, a été transmise dans une lettre datée du 1er mai 2007. M. Leurdijk y traite des circonstances entourant l’élaboration de son invention jusqu’à la demande de redélivrance. Voici un bref résumé de ces événements.

 

[48]           Dans sa déclaration, M. Leurdijk indique qu’en 1996, il a pris contact avec une société (Majestic Plastics Ltd.) en vue de la fabrication de son invention et a conclu un accord de non‑concurrence (et de non-divulgation) avec cette société. Plus tard, un fabricant associé (Royal Foam Ltd.) a décidé de fabriquer son système à rail. Vers novembre 1996, M. Leurdijk a retenu les services d’un agent de brevets nommé James Nenniger pour la préparation et le dépôt d’une demande de brevet au Canada et aux États-Unis. M. Leurdijk prétend n’avoir jamais attiré l’attention de M. Nenniger sur le fait qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser les trous et les vis pour fixer les ferrures de suspension à la partie inférieure du rail et que d’autres configurations fonctionneraient aussi bien.

 

[49]           Après avoir commencé la vente de son système de rangement à rail, M. Leurdijk s’est rendu compte qu’il n’avait pas les ressources nécessaires et a pris contact avec Royal (société qui fabriquait son rail) pour voir si elle serait intéressée à investir dans son produit. Après avoir essuyé un refus, M. Leurdijk a recherché d’autres investisseurs. Lors de sa rencontre suivante avec des représentants de Royal, M. Leurdijk s’est rendu compte que la société comptait fabriquer et commercialiser un système de rangement à rail remarquablement semblable au sien. Il en a informé son agent de brevets et celui-ci lui a dit qu’il fallait attendre la délivrance du brevet pour poursuivre Royal. Par la suite, M. Leurdijk a expressément dit à son agent qu’il pensait que le rail de Royal était l’équivalent fonctionnel de son propre rail. M. Leurdijk a fini par perdre le financement qu’il avait obtenu lorsque les investisseurs ont été mis au courant de la contrefaçon éventuelle de sa conception. Après son déménagement en Alberta, M. Leurdijk a engagé un autre agent de brevets, M. Ted Yoo, qui a poursuivi l’instruction de sa demande jusqu’au stade de l’acceptation, en formulant des rectifications des revendications. Dans sa déclaration solennelle, M. Leurdijk affirme n’avoir jamais clairement indiqué à M. Yoo que la caractéristique importante était la fonctionnalité de la rainure inférieure dans laquelle la ferrure doit être fixée et non pas les moyens de fixation particuliers. Après la délivrance du brevet, M. Leurdijk a été incapable de faire avancer son dossier jusqu’à ce qu’il engage M. Haugen, son représentant actuel. C’est M. Haugen qui lui a dit que le brevet ne comprenait pas toutes les revendications qu’il avait le droit de formuler et qu’il pouvait déposer une demande de redélivrance pour obtenir tout ce qu’il avait droit de revendiquer dans la demande de brevet originale.

 


[50]           La déclaration solennelle de M. Leurdijk était accompagnée d’une copie d’une lettre datée du 15 février 1999, adressée par lui à M. Nenniger, son ancien agent de brevets, dans laquelle il exposait ses préoccupations au sujet des activités de Royal et donnait une esquisse comparant la conception de Royal à la sienne. M. Leurdijk expliquait qu’il était convaincu que le modèle de Royal était une contrefaçon du sien et que la rainure inférieure avait la même fonction, soit de maintenir les accessoires en place et de les empêcher de tomber au moment de décrocher l’article rangé sur le mur. Il indiquait que Royal avait éliminé les trous dans le bas du rail et modifié la rainure inférieure afin de pouvoir fixer les crochets sans avoir à utiliser des trous.

 

[51]           La déclaration résumée ci-dessus et la lettre qui l’accompagne indiquent que les préoccupations de M. Leurdijk étaient que Royal utilisait un système à rail dont la rainure inférieure remplissait les mêmes fonctions que celles de son modèle, mais en utilisant des moyens spécifiques différents pour fixer la ferrure de suspension à la rainure inférieure. Il semble clair que M. Leurdijk s’inquiétait de ce que sa demande de brevet puisse ne pas couvrir pas les modèles équivalents sur le plan fonctionnel à son système de vis et trous. Cela recoupe les préoccupations mentionnées dans la demande originale de redélivrance. Cependant, les préoccupations de M. Leurdijk au sujet de la possibilité que sa demande de brevet ait une portée trop étroite sont incompatibles avec les défectuosités dont il allègue la présence dans le brevet délivré, à savoir que les réalisations d’une portée plus étroite n’étaient pas revendiquées par la voie de revendications dépendantes. Par conséquent, nous ne voyons pas ces éléments de preuve comme étayant davantage la demande de redélivrance.

 

[52]           Dans la lettre du 1er mai 2007, on trouve un commentaire sur les démarches de M. Yoo :

 

[traduction] Je vous prie de bien vouloir tenir compte du fait que M. Yoo ne saisissait pas pleinement limportance de linvention du breveté, ni lintention du breveté selon laquelle cest la fonction de la rainure inférieure de maintenir en place la partie inférieure dune ferrure de suspension qui est lélément important, non la méthode utilisée pour fixer la ferrure.

 

[53]           Nous jugeons que la preuve ne justifie pas cette conclusion. En particulier, au cours de l’instruction de la demande de brevet, c’est M. Yoo, qui, en agissant pour le compte du breveté, a introduit, le 8 mars 2001, les nouvelles revendications 22, 25 et 28, qui ne sont pas limitées à un moyen particulier de fixation des ferrures de suspension à la partie inférieure du rail. Ces revendications se sont ensuite retrouvées dans le brevet délivré dont on demande maintenant la redélivrance. Voici la partie pertinente de la revendication 22 :

 


[traduction] ... une partie inférieure faisant partie du rail et comportant une rainure conçue pour maintenir une ferrure de suspension en place sur la partie inférieure dudit rail.

 

[54]           Nous pensons, d’après les actions de M. Yoo, qu’il comprenait très bien que la méthode de fixation de la ferrure n’était pas un élément essentiel de l’invention. Ses actions visaient à introduire des revendications qui couvriraient toutes les méthodes de fixation de la ferrure de suspension à la partie inférieure du rail.

 

[55]           Il est aussi allégué dans la lettre du breveté du 1er mai 2007 qu’il aurait été possible pour M. Yoo d’ajouter les rectifications de la description et des revendications qui sont maintenant proposées, au cours de l’instruction de la demande de brevet. Le breveté a aussi soutenu à l’audience que l’absence d’autres revendications dépendantes peut être attribuable au fait que les agents précédents s’étaient trop attachés à l’introduction de revendications larges seulement. Malheureusement, nous n’avons pas de preuve de ce que les agents précédents pouvaient penser et s’il se peut que les rectifications de la description et des revendications auraient pu être apportées au stade de l’instruction, M. Yoo ne l’a pas fait et il n’y a pas non plus de preuve que c’est ce que souhaitait l’inventeur et demandeur, M. Leurdijk. Ce dernier semble s’être fié à l’expertise de son agent de brevets pour lui obtenir une large protection par brevet et il semble que c’est cela qui s’est passé. Une fois le brevet délivré, il incombe au breveté de prouver qu’une erreur au sens de l’article 47 est survenue.

 

[56]           Passons maintenant aux observations ultérieures du breveté devant la Commission, datées du 3 juin 2008. Il convient de noter que le résumé par le breveté des défectuosités alléguées indiquées dans la demande de redélivrance originale à la page 4 est conforme à notre propre appréciation et à celle du Conseil.

 

« La différenciation des revendications »

 

[57]           Le breveté, dans les observations susmentionnées présentées à la Commission et à l’audience, a formulé pour la première fois un argument supplémentaire expliquant pourquoi le brevet était défectueux en raison du défaut d’inclure des revendications dépendantes plus étroites. Cet argument était fondé sur le principe de la « différenciation des revendications ». Voici un extrait de la page 4 des observations du breveté :

 


[traduction] Il naurait pas été possible dajouter dans la demande du breveté des revendications ou des rectifications de la description pour couvrir la réalisation spécifique du système de rangement à rail du concurrent (ce serait ajouter au brevet un élément nouveau). Mais il aurait été possible dajouter des revendications indépendantes larges excluant les restrictions liées aux ouvertures et aux fixations au cours de linstruction de la demande de brevet ainsi que des revendications dépendantes ajoutant les restrictions spécifiques relatives aux ouvertures et aux fixations dune manière qui aurait établi une différenciation appropriée entre les revendications indépendantes larges et les revendications dépendantes plus étroites. Cela na pas été fait.

 

Lorsquil a déménagé en Alberta en 1999, le breveté a retenu les services de M. Yoo comme deuxième agent de brevets. Le breveté a informé M. Yoo de ce quil savait sur le système de rangement à rail que fabriquait et vendait le concurrent. M. Yoo a modifié les revendications pour inclure les revendications 22 à 28 qui semblaient couvrir les réalisations nincluant pas les restrictions relatives aux ouvertures et aux fixations, mais il na inclus aucune autre revendication dépendante qui aurait ajouté ces restrictions aux revendications 22 à 28. Du fait quon avait procédé ainsi, il manquait encore à la demande de brevet des revendications qui auraient établi une différenciation appropriée entre les réalisations. Les réalisations de linvention revendiquées dans les revendications 22, 25 et 28, combinées aux restrictions relatives aux ouvertures et aux fixations, ne sont pas équivalentes aux réalisations de linvention revendiquées dans les revendications 1 ou 21, elles nont pas non plus la même structure ni les mêmes caractéristiques. Les revendications 1 et 21 et les revendications 22, 25 et 28 sont toutes des revendications indépendantes. Le principe de la différenciation des revendications utilisé dans linterprétation des revendications ne peut pas être appliqué à ces revendications, puisquil ny a pas de revendication dépendante qui ajoute une restriction à une revendication plus générale. Il ny a pas de revendications dépendantes des revendications 22 à 28 servant à définir la restriction relative aux ouvertures et aux fixations, de manière à établir la différenciation appropriée entre les réalisations de linvention qui omettent ces restrictions et celles qui les englobent, réalisations que le breveté avait lintention de protéger au moyen de son brevet.

 


[58]           Le principe de base invoqué semble être que, par suite de l’absence d’autres revendications dépendantes précisant les ouvertures et les fixations, les revendications indépendantes plus larges peuvent s’interpréter comme si elles étaient limitées à une telle réalisation. Nous ne voyons pas comment cela serait possible, étant donné qu’on ne trouve pas de moyens spécifiques du genre dans les revendications indépendantes 22, 25 et 28. De plus, ces revendications omettent clairement la limitation consistant dans les ouvertures dans la rainure inférieure pour faciliter la fixation des ferrures de suspension, qu’on trouve dans les autres revendications indépendantes. Le breveté fait valoir que la « différenciation des revendications » ne s’applique qu’à la relation entre les revendications indépendantes et dépendantes, mais nous ne pouvons souscrire au principe énoncé de façon si rigide. Il est bien exact que la décision Halford c. Seed Hawk Inc. (2004), 31 C.P.R. (4th) 434 (C.F.), invoquée par le breveté, traitait de revendications indépendantes et dépendantes, mais il convient de noter qu’une revendication dépendante est simplement une façon abrégée d’exprimer une revendication indépendante. Autrement dit, chaque revendication dépendante peut être reformulée comme une revendication indépendante équivalente. Dire que s’il en était ainsi, on ne pourrait tenir compte des différences dans les caractéristiques revendiquées dans les diverses revendications indépendantes pour évaluer leur portée, ce serait,  semble-t-il,  accorder trop d’importance à la forme sous laquelle les revendications dépendantes sont ordinairement présentées. En fait, dans la décision Halford c. Seed Hawk, précitée, le juge Pelletier a cité des décisions américaines à l’appui de la « différenciation des revendications », en particulier un extrait de l’arrêt Deere & Co. c. International Harvester Co., 658 F.2d 1137 :

 

Lorsque certaines revendications sont étendues et dautres limitées, les restrictions de la revendication limitée ne peuvent pas être considérées comme faisant partie de la revendication étendue pour éviter linvalidité ou la contrefaçon.

 

Cette formulation n’est pas limitée à la relation entre des revendications « indépendantes » et « dépendantes ». De fait, dans l’arrêt Deere & Co., le principe a été énoncé relativement à l’ensemble des 18 revendications du brevet, dont plusieurs revendications indépendantes de portée plus ou moins grande.

 

[59]           Le breveté, dans une communication postérieure à l’audience, a reconnu que le principe de la différenciation des revendications n’était pas nouveau et existait en droit des brevets du Canada depuis au moins 1997 (voir la décision Heffco Inc. c. Dreco Energy Services Ltd. (1997), 73 C.P.R. (3d) 284 (C.F. 1re inst.)). Donc, le principe était connu au moment de l’instruction de la demande de brevet.

 

[60]           Vu l’analyse qui précède, nous ne pensons pas que le principe de la différenciation des revendications oblige à rectifier le brevet en ajoutant d’autres revendications dépendantes. De plus, si ce n’est l’argumentation habile présentée pour le compte du breveté par son représentant, il n’y a pas d’indication que ce principe était lié aux défectuosités indiquées dans la demande de redélivrance.

 

[61]           Dans ses observations du 3 juin 2008, le breveté a réitéré le fait que l’utilisation des ouvertures et des fixations pour maintenir les ferrures de suspension dans le rail n’était pas une caractéristique importante ou nécessaire de l’invention. Nous sommes une fois de plus en accord avec cet énoncé, étant donné la portée des revendications 22, 25 et 28 du brevet délivré. Cependant, puisque les revendications 22, 25 et 28 font partie du brevet délivré, nous avons de la difficulté à voir en quoi l’intention de l’inventeur à ce sujet n’aurait pas été réalisée.

 


[62]           Il est également allégué dans les observations susmentionnées que les agents de brevets s’occupant de l’instruction de la demande n’ont pas apprécié pleinement l’importance des renseignements que le breveté leur a fournis et n’ont pas revendiqué l’invention correctement. Toutefois, il n’y a pas de preuve que les agents précédents aient agi de façon incorrecte ou non conforme à l’intention de l’inventeur. En fait, M. Yoo a obtenu une protection étendue au moyen d’une rectification des revendications au cours de l’instruction pour ajouter les revendications indépendantes 22, 25 et 28.

 

[63]           Comme nous l’avons déjà noté, on a débattu du moment où le breveté a découvert que l’erreur alléguée était survenue; toutefois, sur le fondement des observations du 3 juin 2008, et de la déclaration solennelle de M. Leurdijk qui les accompagne, nous acceptons que le breveté ne s’est rendu compte des défectuosités perçues qu’après la délivrance du brevet; l’instruction de la demande de brevet jusqu’à la délivrance s’est donc faite sans qu’il ait pleinement connaissance des défectuosités alléguées. Nous tenons également à noter que la déclaration solennelle présentée le 3 juin 2008 contenait aussi une version révisée d’une lettre de M. Leurdijk à M. Nenniger, déjà présentée, visant à réparer l’omission d’une page dans la version antérieure, page qui se rapportait à un accord de non-concurrence entre Majestic Plastics et M. Leurdijk et qui n’est pas pertinente par rapport à la question à trancher, comme l’indique le breveté dans ses observations.

 

[64]           À l’audience, M. Haugen, représentant du breveté, a exprimé ses préoccupations au sujet des événements qui se sont déroulés entre MM. Leurdijk et Royal, son ancien fabricant. Nous apprécions la position dans laquelle M. Leurdijk se trouve maintenant et nous reconnaissons les efforts remarquables déployés par M. Haugen pour son compte, mais nous devons observer les dispositions de la loi et nous ne sommes pas convaincus que soit survenue dans la présente affaire une erreur relevant de l’article 47 de la Loi sur les brevets.

 

[65]           Les éléments de preuve qui ont été présentés, ainsi que le contenu du brevet délivré, confirment que l’intention de M. Leurdijk était que ses revendications ne soient limitées par aucun dispositif particulier de fixation de la ferrure de suspension à la partie inférieure du rail. Toutefois, ces éléments de preuve ne révèlent aucune défectuosité du brevet attribuable à l’omission d’autres revendications dépendantes, comme il est allégué dans la demande de redélivrance. M. Leurdijk a effectivement obtenu une protection étendue couvrant tout rail [traduction] « ayant une rainure conçue pour maintenir une ferrure de suspension fermement en place dans ladite partie inférieure dudit rail », comme le précise la revendication 22 du brevet délivré. Par conséquent, nous n’avons aucune raison de penser que le brevet délivré n’était pas conforme à l’intention de M. Leurdijk, telle qu’on peut la déduire de la preuve objective figurant au dossier.

 

LES RECTIFICATIONS DE LA DESCRIPTION ET DES REVENDICATIONS

 


[66]           Dans le résumé des motifs présenté à la Commission, le Conseil a signalé que certaines des rectifications apportées n’avaient aucun rapport avec les défectuosités indiquées. En reprenant l’article 47 de la Loi sur les brevets, il dit (non souligné dans l’original) :

 

[traduction] Lorsquun brevet est jugé défectueux ou inopérant à cause... le commissaire peut, si le breveté abandonne ce brevet... faire délivrer au breveté un nouveau brevet, conforme à une description et spécification rectifiée par le breveté...               

 

[67]           Selon notre interprétation, la formule « conforme à une description et spécification rectifiée par le breveté » signifie que les changements apportés à la description et spécification doivent correspondre aux défectuosités trouvées dans le brevet. Autrement dit, les rectifications apportées au brevet visent à réparer les défectuosités alléguées. Il ne semble pas y avoir de fondement permettant d’apporter d’autres rectifications au brevet délivré, puisque toute rectification proposée en vertu de l’article 47 doit se rapporter à une erreur survenue au cours de l’instruction de la demande de brevet et ayant entraîné une défectuosité. Une demande de redélivrance ne constitue pas un moyen de réouverture de l’instruction permettant au breveté de modifier le brevet comme il peut le faire au cours de l’instruction normale de la demande de brevet. Selon le juge en chef Duff, dans l’arrêt Northern Electric, précité, la loi :

 

[traduction] limite les rectifications admissibles à celles qui peuvent être nécessaires pour corriger toute insuffisance de la description ou spécification découlant de lerreur du breveté qui na pas donné une description ou spécification suffisante dune invention à légard de laquelle il avait lintention de demander la protection et résultant dune inadvertance, dun accident ou dune méprise.

 

[68]           Le breveté a modifié les changements proposés à la description et aux revendications dans ses observations du 3 juin 2008 en réponse aux préoccupations du Conseil. Toutefois, les changements contiennent toujours une rectification de la page 9 de la description du brevet. À l’audience, le Conseil a encore mis en question la légitimité de cette rectification. Compte tenu de notre analyse ci-dessus, nous ne voyons pas de fondement permettant de rectifier la description du brevet délivré. La description n’a pas été indiquée comme défectueuse dans la demande de redélivrance et ne peut donc être rectifiée. De plus, s’agissant de la première défectuosité indiquée dans la demande de redélivrance, nous notons que les dernières revendications proposées contiennent les revendications 32 à 39, qui dépendent des revendications 25 ou 30. La mention de la revendication 25 correspond bien à la première défectuosité alléguée, mais non la mention de la revendication 30. Ce problème ne se posait pas dans les revendications qu’examinait auparavant le Conseil et n’a été introduit que par les observations présentées devant la Commission. Nous reconnaissons que cette question n’a pas été soulevée à l’audience, mais, compte tenu de notre position sur les autres parties de la demande de redélivrance, elle serait déterminante pour l’issue de la présente affaire.


 

[69]           Dans son résumé des motifs, le Conseil a accepté qu’il n’y avait pas d’élément nouveau dans les rectifications proposées et nous serions d’accord avec cette appréciation compte tenu des revendications proposées devant la Commission, malgré le fait que, comme nous l’avons indiqué ci-dessus, nous ne permettrions pas que certaines des rectifications soient apportées, parce qu’elles ne se rapportent pas aux défectuosités alléguées. Naturellement ce point est purement théorique, étant donné que le breveté n’a pas établi que le brevet est défectueux pour les motifs indiqués dans la demande de redélivrance.

 

CONCLUSIONS

 

[70]           Pour revenir aux principes que nous avons exposés ci-dessus relativement à la redélivrance, nous pourrions résumer nos conclusions de la façon suivante. Nous ne sommes pas convaincus que le brevet soit défectueux ou inopérant et que l’erreur soit survenue par inadvertance, accident ou méprise. Nous ne sommes pas convaincus que le brevet délivré ne reflète pas l’intention originale de l’inventeur/demandeur. Comme nous l’avons dit, la preuve objective nous porte à penser que M. Leurdijk avait pour intention que ses revendications ne soient pas limitées à un moyen particulier de fixation des ferrures de suspension à la partie inférieure du rail. Nous n’arrivons pas à voir comment le brevet serait défectueux à cet égard étant donné la portée des revendications du brevet délivré. Nous n’arrivons pas non plus à voir comment les rectifications proposées, soit l’ajout d’autres revendications dépendantes, corrigeraient une défectuosité par rapport à l’intention de l’inventeur. L’argument avancé, selon lequel ces revendications supplémentaires sont nécessaires à cause du principe de la « différenciation des revendications—», n’est pas convaincant et, de toute façon, on n’a pas présenté de preuve que cela ait été pris en compte à un moment quelconque. En fait, cet argument n’est apparu que dans les observations devant la Commission. S’agissant de la question de « la même invention », comme nous l’avons indiqué, nous pensons qu’il n’y a pas d’éléments nouveaux.

 

[71]           Étant donné que nous ne sommes pas convaincus que toutes les conditions de l’article 47 sont réunies, nous devons conclure que la demande de redélivrance ne saurait être acceptée.

 

 

 

 

 

 

 

 


 

RECOMMANDATIONS

 

[72]           Par conséquent, la Commission recommande que la commissaire rejette la présente demande de redélivrance.

 

 

 

Stephen MacNeil                    Paul Fitzner                 Ed MacLaurin

Membre                                   Membre                       Membre          

 

[73]           Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission d’appel des brevets. Par conséquent, je refuse d’accorder un nouveau brevet fondé sur la présente demande de redélivrance. En vertu de l’article 41 de la Loi sur les brevets, le breveté dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision auprès de la Cour fédérale du Canada.                                       

 

 

 

Mary Carman

Commissaire aux brevets

 

Fait à Gatineau (Québec),

le 13 février 2009

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