Commissioner’s Decision #1293
Décision de la Commissaire #1293
TOPICS: A11
SUJETS : A11
Application No : 2,159,968
Demande no : 2,159,968
RÉSUMÉ DE LA DÉCISION DE LA COMMISSAIRE
D.C. 1293 Demande no 2,159,968
Il s’agit d’une demande qui porte de façon générale sur des dispositifs utilisés pour protéger les véhicules des dommages provoqués par des impacts mineurs. Elle porte plus particulièrement sur un pare-chocs qui remplacerait le pare-chocs d’origine d’un véhicule, mais qui offrirait une meilleure résistance aux dommages.
L’examinateur a refusé la demande aux seuls motifs que les modifications apportées au mémoire descriptif - les revendications 1 et 5 plus particulièrement - contenaient de nouveaux éléments, ce qui contreviendrait au paragraphe 38.2(2) de la Loi sur les brevets. Les autres objections qui avaient été présentées auparavant dans la présente instance ont été mises en suspens jusqu’à ce qu’il soit disposé de la question des nouveaux éléments. La Commission a conclu que les modifications apportées par le demandeur pouvaient raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif original. En conséquence, la Commission a recommandé que le refus de l’examinateur soit annulé et que la demande soit renvoyée à l’examinateur pour qu’il examine les autres irrégularités qui avaient été mises en suspens.
La commissaire a souscrit aux recommandations de la Commission et la demande a été renvoyée devant l’examinateur pour qu’il soit disposé des irrégularités en attente.
BUREAU CANADIEN DES BREVETS
DÉCISION DE LA COMMISSAIRE AUX BREVETS
La demande de brevet 2,159,968 ayant été refusée en vertu du paragraphes 30(4) des Règles sur les brevets, la décision finale de l’examinateur a été révisée. La Commission d’appel des brevets et la commissaire des brevets se sont penchées sur le refus. Leurs conclusions sont les suivantes :
Agent des demandeurs
GOWLING LAFLEUR HENDERSON LLP
1 First Canadian Place
1600 - 100 rue King Ouest
Toronto (Ontario)
M5X 1G5
Présentation
[1] La présente décision porte sur la révision par la commissaire aux brevets de la décision finale de l’examinateur concernant la demande de brevet no 2,159,968 et intitulée « ÉLÉMENT PROTECTEUR POUR UN VÉHICULE ». Les demandeurs sont Robert William Bartley, Ann Marie Bartley et Rex Ian McKinnon, collectivement à titre de fiduciaires de la RWB Trust.
[2] La demande se rapporte à des dispositifs utilisés pour protéger les véhicules contre les dommages causés par les impacts mineurs. En particulier, elle se rapporte à un pare‑chocs destinée à remplacer le pare‑chocs original du véhicule. Ce pare-chocs de remplacement serait plus résistant aux dommages que l’original. Diverses réalisations sont divulguées pour la forme d’un tel pare-chocs y compris certaines où le pare-chocs comprend des ouvertures pour les phares et les feux, des découpes pour les crochets de dépannage et des rallonges qui forment un cadre au-dessus du pare-chocs pour protéger le train avant d’un camion. La figure 1 de la demande ci-dessous illustre un tel pare-chocs.
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Contexte
a) Historique de la procédure d’examen
[3] La demande en cause a été déposée le 5 octobre 1995 et a fait l’objet d’une ordonnance spéciale peu de temps après la présentation par le demandeur d’une requête d’examen le 27 août 2002. L’examinateur a finalement refusé la requête le 30 juillet 2007 au motif que le mémoire descriptif (revendications 1 et 5) contenait de nouveaux éléments, ce qui qui contrevenait au paragraphe 38.2(2) de la Loi sur les brevets. La présente affaire est quelque peu inhabituelle en raison du fait que, préalablement à une décision du bureau datée du 22 mars 2006, l’examinateur avait formulé d’autres objections relatives à l’antériorisation, l’évidence et le caractère indéfini. Dans cette décision, l’examinateur a même laissé entendre qu’il était possible que l’objet brevetable soit aussi contestable. Par contre, après avoir déterminé que les modifications du 1er février 2006 ajoutaient de nouveaux éléments, l’examinateur a rendu une décision subséquente et une décision finale dans lesquelles ne se retrouvaient que les objections fondées sur l’ajout de nouveaux éléments en vertu du paragraphe 38.2(2). L’examinateur a maintenu ses objections en vertu du paragraphe 38.2(2) dans un résumé des motifs soumis à la Commission d’appel des brevets qui été transmis au demandeur le 28 novembre 2008. Après que le Commission eut procédé à un examen préliminaire de l’affaire, ce qu’il advenait des objections antérieures soulevées par l’examinateur ne nous semblait pas clair à la lumière du dossier. L’examinateur a indiqué à la Commission que les autres objections avaient été mises en suspens en attendant qu’il soit disposé de la question de l’ajout de nouveaux éléments.
[4] Nous appuyant sur le dossier de l’instance, plus particulièrement sur le passage qui suit de la réponse du demandeur à la décision finale :
[traduction] Dans la décision finale, l’examinateur a retiré toutes les objections relatives à l’antériorisation de la technique et l’objet non brevetable et il fonde ses autres objections sur l’absence de fondement dans la divulgation pour....
nous sommes d’avis que le demandeur n’a pas compris qu’il était possible que soient soulevées les objections encore en suspens fondées sur la nouveauté, l’évidence, etc. et qu’il faudrait ensuite qu’il y réponde après la présente de la commissaire.
[5] La Commission a donc communiqué avec le demandeur qui a confirmé qu’il ne savait pas que d’autres objections pourraient être soulevées. Pour tenter de clarifier la situation, on a demandé à l’examinateur de rédiger une note de service pour expliquer son point de vue. Cette note de service, envoyée au demandeur le 23 janvier 2009, indiquait que l’examinateur estimait effectivement qu’après la révision de la commissaire, il y aurait d’autres objections à présenter, notamment la possibilité d’opposer de nouvelles antériorités. Compte tenu de cet état de fait, la Commission a cru nécessaire d’agir dès que possible dans la présente affaire.
b) Conclusions
[6] Un examen préliminaire des ojections de l’examinateur fondées sur le paragraphe 38.2(2) et des réponses du demandeur, a permis de déterminer de façon claire que le refus de la demande n’était pas justifié. Le 6 février 2009, le demandeur a été informé du fait qu’il n’avait plus à présenter de nouvelles observations et qu’une audience ne serait pas nécessaire. L’analyse qui suit fait état des motifs pour lesquels nous recommandons que la décision de l’examinateur de refuser la demande soit annulée.
c) Question en litige
[7] La seule question en litige à examiner est la suivante :
Le mémoire descriptif (revendications 1 et 5), dans sa version modifiée par le demandeur dans une lettre datée du 1er février 2006, contient-il de nouveaux éléments en contravention avec le paragraphe 38.2(2) de la Loi sur les brevets ?
LES REVENDICATIONS MODIFIÉES CONTIENNENT-ELLES DE NOUVEAUX ÉLÉMENTS ?
[8] Les revendications telles que présentées dans la réponse du demandeur du 1erfévrier2006 sont comme suit :
[traduction]
1. Un élément protecteur pour un véhicule, ledit véhicule ayant une forme de train avant définie en partie par un pare-chocs de véhicule original, ledit élément protecteur comprenant un élément de pare-chocs de remplacement dont la forme est sensiblement la même que celle du pare-chocs d’origine, mais formé de matériau de calibre sensiblement plus gros afin d’assurer une résistance accrue à la déformation.
2. L’élément protecteur de la revendication 1 comprend également plusieurs éléments, reliés entre eux, fixés au pare-chocs de remplacement de façon à former un cadre protecteur au-dessus du pare-chocs de remplacement lorsque ce dernier est fixé au véhicule.
3. L’élément protecteur de la revendication 1 ou 2 où le pare-chocs de remplacement comprend des ouvertures correspondant aux feux de direction du véhicule afin de permettre à ces feux de direction d’éclairer à travers ces ouvertures.
4. L’élément protecteur des revendications 1, 2 ou 3 où au moins le pare-chocs de remplacement est formé d’un alliage métallique.
5. L’élément protecteur de la revendication 4 où l’alliage métallique contient au moins un d’acier et d’aluminium.
6. L’élément protecteur de la revendication 5 où l’alliage a une épaisseur d’au moins 8 mm.
[9] Aux fins de comparaison, les revendications qui figuraient au dossier avant l’objection fondée sur la présence de nouveaux éléments sont reproduites ci-dessous :
[traduction]
1. Un élément protecteur pour un véhicule sous forme d’un véhicule ayant un train avant dont la forme est définie en partie par un pare-chocs de véhicule d’origine, ledit élément protecteur étant un pare-chocs de remplacement au contour qui correspond à la forme du train avant du véhicule et qui est plus fort que le pare-chocs de véhicule d’origine.
2. L’élément protecteur de la revendication 1 comprend également plusieurs éléments, reliés entre eux, et fixés au pare-chocs de remplacement de façon à former un cadre protecteur au-dessus du pare-chocs de remplacement lorsque le pare-chocs de remplacement est fixé au véhicule.
3. L'élément protecteur de la revendication 1 ou 2 où le pare‑chocs de remplacement comprend des ouvertures correspondant aux feux de direction du véhicule afin de permettre à ces feux de direction d'éclairer à travers ces ouvertures
4. L'élément protecteur des revendications 1, 2 ou 3 où au moins le pare‑chocs de remplacement est formé d'acier ou d’un autre alliage.
5. L'élément protecteur de la revendication 4 où l'alliage a une épaisseur d'au moins 8 mm.
[10] La description et les dessins contenus dans la demande sont demeurés inchangés depuis leur dépôt.
Thèse de l’examinateur
[11] Dans la décision finale, l’examinateur a indiqué ses objections aux revendications, en partie comme suit :
[traduction]
Le rapport de l’examinateur du 22 mars 2006 indiquait que la revendication 1 modifiée ne respecte pas l’article 38.2 de la Loi sur les brevets puisque la caractéristique «...dont la forme est sensiblement la même que celle du pare-chocs d’origine ... » ne peut pas raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif ou des dessins déposés initialement. Le demandeur soutient qu’un appui existe et renvoie l’examinateur à la page 2 où la figure 1 est décrite comme suit : « la figure 1 - illustre un pare-chocs protecteur sous forme d’un pare-chocs de véhicule de remplacement renforcé ». Le demandeur ajoute également au paragraphe 3 de sa dernière réponse : « Pour que le pare-chocs soit un pare-chocs de remplacement, il doit ressembler au pare-chocs d’origine » (non souligné dans l’original). Pourtant, Coiner (brevet américain 5,364,142) divulgue un pare-chocs de remplacement et qui, suivant le même raisonnement, doit ressembler au pare-chocs d’origine; toutefois, la réponse du demandeur du 1er février 2006 déclare : « Coiner ne fait aucune mention de l’intégration des aspects ornementaux du pare-chocs d’origine à la structure de remplacement. »...
La revendication 1 modifiée ne respecte pas l’article 38.2 de la Loi sur les brevets puisque la caractéristique « ... formé de matériau de calibre sensiblement plus gros afin d'assurer une résistance accrue à la déformation ... » ne peut pas être raisonnablement inférée du mémoire descriptif ou des dessins déposés initialement. Le demandeur répond en déclarant qu’un brevet s’adresse à une personne versée dans l’art, et qu’ « une personne versée dans l'art des pare-chocs de véhicule constaterait que 12 mm (environ ½ pouce) est plus épais d’au moins un facteur de 3 qu’un pare-chocs de camion conventionnel ». Encore une fois, il incombe au demandeur de décrire et de revendiquer son invention. La déclaration du demandeur ci-dessus n’apparaît nulle part dans le mémoire descriptif ou les dessins déposés initialement et, par conséquent, l’argument du demandeur n’est pas convaincant.
La revendication 5 modifiée ne respecte pas l’article 38.2 de la Loi sur les brevets puisque la caractéristique « ... où l’alliage métallique contient au moins un d'acier et d'aluminium... » ne peut raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif ou des dessins déposés initialement. Le demandeur répond en déclarant qu’un brevet s’adresse à une personne versée dans l’art, et que «certainement dans l’industrie automobile, l’expression ‘alliage’, plus particulièrement ‘alliage léger’ est synonyme d’aluminium. Les ‘roues en alliage’ en sont notamment un exemple »
Le mot « alliage » est défini par le Dictionnaire Robert comme : « Action d’allier, de combiner un métal avec un ou plusieurs autres. »
Le mot « aluminium » n’apparaît nulle part dans le mémoire descriptif déposé initialement. De plus, la prétention que « alliage » est synonyme d’aluminium n’est pas fondée. Le magnésium par exemple est également un élément utilisé dans les roues en alliage léger. Par conséquent, l’argument du demandeur n’est pas convaincant.
[12] Pour résumer, sur la base des objections de l’examinateur, les parties litigieuses des revendications sont les suivantes :
Dans la revendication 1
(1) « dont la forme est sensiblement la même que celle du pare‑chocs d’origine », qui se rapporte à la forme du pare-chocs de remplacement,
(2) « formé de matériau de calibre sensiblement plus gros afin d'assurer une résistance accrue à la déformation » qui se rapporte à l’épaisseur du matériau utilisé pour former le pare-chocs,
Dans la revendication 5
(3) « où l'alliage métallique contient au moins un d'acier et d'aluminium », qui se rapporte au matériau qui peut être utilisé pour former le pare-chocs, l’examinateur soutien que « aluminium » comme composante possible de l’alliage est un nouvel élément.
Thèse du demandeur
[13] Dans le cadre de sa réponse du 29 janvier 2008 à la décision finale, le demandeur a cité une jurisprudence abondante pour appuyer sa prétention que la divulgation et les revendications doivent être interprétées du point de vue de la personne versée dans l’art. Nous soulignons toutefois que la jurisprudence citée ne porte pas spécifiquement sur la question de l’ajout de nouveaux éléments et sur la façon de l’examiner. Le demandeur a aussi déposé les affidavits de Mark McCarthy, directeur général de McCarthy Transport, et de Nigel Bruce Randall, un expert en conception, fabrication et installation de pièces automobiles, plus particulièrement pour les camions. Ce dernier est aussi un ingénieur qui conçoit des pièces pour les automobiles et les camions depuis 21 ans. Nous examinerons ces affidavits plus loin dans notre analyse.
[14] Le demandeur nous a aussi renvoyés aux observations antérieures datées du 10 janvier 2007, dans lesquelles des arguments portant sur la pertinence de la formulation de la revendication modifiée à laquelle s’oppose l’examinateur. À l’égard de la revendication 1, le demandeur a déclaré ce qui suit :
Avec déférence, le demandeur renvoie l’examinateur à la page 2 où la figure 1 est décrite comme illustrant « ...un élément protecteur sous forme d’un pare-chocs de remplacement renforcé... ». Pour que le pare-chocs soit un pare-chocs de remplacement, il doit ressembler au pare-chocs d’origine.
L’examinateur cite également la page 3 de la description : « Le pare-chocs 1 est moulé à la forme du train avant inférieur d’un camion 2 et correspond aux lignes de carrosserie du camion ». L’examinateur en conclut que la forme du pare-chocs d’origine comparée au pare-chocs de remplacement n’est pas divulguée.
Respectueusement et contrairement à ce que prétend l’examinateur, le passage cité étaye l’affirmation du demandeur. De façon évidente, les lignes de carrosserie du camion sont en partie définies par le pare-chocs d’origine sur le camion. Par conséquent, il est raisonnable de comprendre que pour que le pare-chocs de remplacement corresponde aux lignes de carrosserie d’origine du camion, le pare-chocs doit correspondre à la forme du pare-chocs d’origine. Bref, il faut qu’il s’agisse d’un pare-chocs « ...dont la forme est sensiblement la même que celle du pare‑chocs d’origine... ».
[15] Le demandeur a de plus affirmé aur la question de l’épaisseur :
Le demandeur rappelle respectueusement à l’examinateur qu’un brevet s'adresse à une personne versée dans l'art. Une personne versée dans l'art des pare-chocs de véhicule réaliserait que 12 mm (environ ½ pouce) est plus épais d'au moins un facteur de 3 qu'un pare‑chocs de camion conventionnel. Un pare-chocs de camion conventionnel est normalement pressé de feuille (tôle) d'acier. Par contre, une épaisseur de 12 mm relève du domaine des plaques plutôt que des feuilles (tôles). De plus, le moulage plutôt que le pressage est le processus de fabrication privilégié, ce qui ne correspond pas aux épaisseurs conventionnelles mais est conforme aux épaisseurs plus grandes.
[16] Sur la question de l’aluminium comme composante de l’alliage, voici ce que le demandeur a déclaré :
L’examinateur déclare qu’il n’y a aucun appui pour l’utilisation d’aluminium dans la description déposée à l’origine. Encore une fois, un brevet (ou une demande de brevet) s'adresse à une personne versée dans l'art. Certainement dans l'industrie automobile, l'expression « alliage » et plus particulièrement « alliage léger » est synonyme d'aluminium. Les « roues en alliage » en sont notamment un exemple.
[17] Avant d’examiner la présente affaire sur le fond, nous allons procéder à un tour d’horizon de la jurisprudence sur la question de l’ajout de nouveaux éléments sous le régime de l’article 38.2 de la Loi sur les brevets.
Nouveaux éléments : principes juridiques
[18] L’article 38.2 de la Loi sur les brevets énonce dans quelles circonstances il est possible d’apporter des modifications au mémoire descriptif et aux dessins d’une demande de brevet :
Modification du mémoire descriptif et des dessins
38.2 (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3) et des règlements, le mémoire descriptif et les dessins faisant partie de la demande de brevet peuvent être modifiés avant la délivrance du brevet.
Limite
(2) Le mémoire descriptif ne peut être modifié pour décrire des éléments qui ne peuvent raisonnablement s’inférer de celui-ci ou des dessins faisant partie de la demande, sauf dans la mesure où il est mentionné dans le mémoire qu’il s’agit d’une invention ou découverte antérieure.
Idem
(3) Les dessins ne peuvent être modifiés pour y ajouter des éléments qui ne peuvent raisonnablement s’inférer de ceux-ci ou du mémoire descriptif faisant partie de la demande, sauf dans la mesure où il est mentionné dans le mémoire qu’il s’agit d’une invention ou découverte antérieure.
[19] Récemment, cette disposition a été examinée dans la Demande de brevet de Martin Reesink, No 2,207,986 (2008), 68 C.P.R. (4th) 141 (C.A.B. et la commissaire aux brevets) :
La raison sous-tendant la restriction à l’encontre des nouveaux éléments est que la date de dépôt d’une demande est une date critique, en ce sens qu’il s’agit de la date pertinente pour juger de l’utilité d’une invention revendiquée, ainsi que pour les critères de nouveauté et de non-évidence (excluant les situations où il existe une demande de priorité fondée sur une demande produite à une date précédente étant donné qu’il n’y a aucune demande à cet effet dans l’instance qui nous concerne). Puisque le mémoire descriptif doit être évalué objectivement aux fins de la conformité aux exigences de brevetabilité à la date de dépôt de la demande, il serait injuste pour les tiers de permettre, après cette date, des modifications à une demande qui ajoutent des éléments non présents dans le mémoire descriptif et les dessins, tels qu’ils existaient à la date de dépôt. Permettre une telle pratique aurait inévitablement pour effet que, dans certains cas, l’invention considérée objectivement comme pêchant par absence de nouveauté à la date du dépôt du mémoire descriptif, serait considérée comme nouvelle vu les éléments ultérieurement ajoutés.
Tout comme dans cette affaire, aucune demande de priorité n’a été faite en l’espèce.
[20] À notre connaissance, la jurisprudence canadienne ne nous guide aucunement pour ce qui est de la question précise de l’ajout de nouveaux éléments dans une demande de brevet ou un brevet. Toutefois, cela a été souligné dans la décision Reesink, précitée, le commissaire des brevets s’est prononcé sur cette question. Dans Demande no 315,073 (1981), D.C. no 904 (C.A.B. et commissaire aux brevets), il a été formulé ce qui suit en lien avec la règle 52 (maintenant l’article 38.2) :
Cette règle appelle la question suivante : dans quelles conditions la déduction raisonnable doit-elle être faite, et par qui doit-elle être faite? Et l’on peut répondre clairement par ceci : la personne versée dans l’art dont relève l’invention au moment du dépôt de la demande.
[21] À la lumières de ce qui est énoncé ci-haut, pour déterminer s’il s’agit de nouveaux éléments, il faut donc comparer les mémoires descriptifs et les dessins en instance avec ceux de la demande initialement déposée. Il faut ensuite déterminer si l’objet des modifications est celui qu’une personne versée dans l’art aurait raisonnablement pu déduire à partir du mémoire descriptif ou des dessins originaux lors du dépôt .
[22] Au Royaume-Uni, le paragraphe 76(2) de la Patents Act 1977 est une disposition très semblable en matière de « nouveaux éléments » :
[traduction] Sont interdites les modifications à une demande de brevet en vertu des paragraphes 15A(6), 18(3) ou 19(1), s’il en résulte que la demande divulgue des éléments plus larges que ce qui était divulgué dans la demande initiale.
[23] Très récemment, dans Corus UK Ltd c. Qual-Chem Ltd, [2008] EWCA Civ 1177, le lord juge Jacob a repris le bref exposé sur les nouveaux éléments qu’il avait énoncé dans Richardson-Vicks Patent [1995] R.P.C. 568, à la page 576 :
[traduction]
... le test applicable pour déterminer s’il y a eu ajout de nouveaux éléments consiste à savoir si, lorsqu’un homme versé dans l’art lit le mémoire descriptif, il apprend apprend quelque chose sur l’invention qu’il n’aurait pas pu apprendre en lisant le mémoire descriptif non modifié.
Plus loin, il a ajouté ce qui suit :
[traduction]
Ce que nous devons donc faire, c’est d’évaluer ce qui est divulgué explicitement et implicitement dans le mémoire descriptif « A ». Cela ne doit pas être fait à posteriori, c’est-à-dire sans connaître le résultat escompté. On doit se livrer au même exercice pour le mémoire descriptif « C ». Nous cherchons à voir s’il y a eu un élargissment de l’objet.
[24] Déterminer ce qui est divulgué « explicitement et implicitement » est un exercice compatible avec le test antérieur élaboré par le juge Aldous dans Bonzel c. Intervention Ltd, [1991] R.P.C. 553, à la page 574, lequel a été cité avec approbation par le lord juge Jacob dans la décision Corus, précitée. À notre avis, déterminer ce qui est « implicitement » divulgué est un exercice compatible avec la détermination de ce qui « peut raisonnablement s’inférer ».
[25] Le test élaboré par le juge Aldous dans Bonzel, précité, est assorti d’un certain nombre de mises en garde qui semblent applicables dans notre propre cadre législatif, à savoir l’article 38.2 (non souligné dans l’original) :
[traduction] ... il est approprié d’examiner ce qui a été divulgué, tant explicitement, qu’implicitement. L’ajout d’une référence à ce dont tiendrait compte la personne versée dans l’art n’a donc aucune importance : DSM NV’s Patent [2001] R.P.C. 25 aux paragraphes [195] à [202]. Il faut par ailleurs souligner qu’il ne s’agit pas d’un critère pour évaluer l’évidence. Il n’est pas permis au titulaire de brevet d’ajouter par une modification un objet qui aurait été évident pour la personne versée dans l’art qui examine la demande...
... il est important d’éviter l’analyse à posteriori. Il faut faire preuve de diligence pour examiner la divulgation de la demande à travers les yeux d’une personne versée dans l’art qui n’a pas vu le mémoire descriptif détaillé et qui, par conséquent, ne sait pas ce qu’elle cherche. Cela est particulièrement important lorsqu’il est convenu que l’objet est implicitement divulgué dans le mémoire descriptif original.
[26] La première mise en garde limite l’ajout de nouveaux éléments à ce qui a explicitement ou implicitement été divulgué. À cet égard, tout ce qui appartient aux connaissances générales courantes pour la personne versée dans l’art ne serait pas implicitement divulgué par une demande, pas plus que ne le serait tout ce qui est considéré évident par une quelconque mosaïque d’antériorités. La seconde mise en garde est un sage conseil en ce sens qu’il est possible que la divulgation soit erronément élargie en tentant de dégager les éléments nouveaux qu’elle contient.
[27] De plus, même si les explications précédentes précisent que ce qui est divulgué explicitement et implicitement doit être circonscrit dans chaque mémoire descriptif, comme dans l’interprétation des revendications, l’analyse devrait se concentrer sur les points litigieux ou être dirigée là « où le bât blesse » (voir Laboratoires Servier c. Apotex (2008), 67 C.P.R. (4th) 241, au paragraphe 98, citant le juge Hughes dans Shire Biochem Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (2008), 67 C.P.R. (4th) 94, au paragraphe 21).
Analyse
[28] En l’espèce, il ne semble pas y avoir de débat sur la question de savoir si les passages modifiés sont explicitement divulgés ou non. Ils ne le sont pas. Il faut donc décider s’ils auraient pu raisonnablement s’inférer ou être « implicites » à partir du mémoire descriptif ou des desssins originaux. Il n’est pas nécessaire d’examiner l’ensemble du mémoire descriptif modifié puisque les points de vue du demandeur et de l’examinateur ne sont divergents qu’à l’égard des trois passages modifiés. Ce qui devait être inféré des dessins n’est pas non plus une question en litige. En conséquence, nous nous penchons maintenant sur le mémoire descriptif initial pour déterminer ce qu’il contenait d’implicite.
[29] Sous la rubrique « RÉSUMÉ DE L’INVENTION », le demandeur décrit comme suit l’invention en termes généraux :
Selon un aspect de l’invention, un dispositif est fourni pour protéger un véhicule composé d’un élément protecteur qui recouvre une section du véhicule, ainsi que d’un support pour fixer l’élément protecteur au véhicule.
On se rendra compte que l’invention présente un avantage particulier lorsqu’installée sur des véhicules utilisés dans des environnements où des impacts mineurs aux véhicules sont plus fréquents que dans des environnements de conduite normale. Ces environnements comprennent des endroits hors route comme les fermes et les forêts.
[30] S’agissant de la réalisation qui fait un pare-chocs de l’élément protecteur, la demande énonce (non souligné dans l’original) :
[traduction]
De préférence, l’élément protecteur est adapté pour remplacer un pare-chocs de véhicule existant ou est auxiliaire au pare-chocs du véhicule.
De préférence, l'élément protecteur est formé d’un matériau durable comme l’acier ou un alliage. De préférence, l'élément protecteur est formé d’un alliage de 12 mm.
[31] Ce que l’invention désigne est présenté de façon assez large dans les passages ci-dessus. Toutefois, il est évident que dans une réalisation privilégiée, le pare-chocs est un pare-chocs de remplacement et qu’il est formé d’un matériau comme de « l’acier ou un alliage ». Nous désirons souligner qu’en fait, l’acier est en soi un alliage, mais nous comprenons qu’il aurait été évident pour une personne versée dans l’art que le demandeur prévoyait une utilisation possible d’un alliage autre que l’acier. Également, le fait que le demandeur ait précisé « alliage de 12 mm » est important. Nous reconnaissons l’épaisseur inhabituelle que cela représente pour un pare-chocs en métal et le poids d’un tel pare-chocs s’il était fabriqué en acier, par exemple.
[32] Sous la rubrique « BRÈVE DESCRIPTION DES DESSINS », le demandeur décrit la figure 1 comme illustrant « un élément protecteur sous forme d'un pare‑chocs de véhicule de remplacement renforcé ». La personne versée dans l’art est ici en outre avisée que le pare-chocs est plus résistant que l’original, ce qui est correspond à l’objectif de protéger un véhicule des dommages causés par des impacts mineurs.
[33] À l’égard de la « DESCRIPTION DÉTAILLÉE DE L’INCARNATION PRIVILÉGIÉE», le passage suivant est particulièrement pertinent (c’est nous qui soulignons):
Nous faisons maintenant référence aux dessins. La figure 1 illustre un élément protecteur sous forme d’un pare-chocs amélioré et renforcé pour véhicule 1. Le pare-chocs1 est moulé selon la forme du train avant inférieur d’un camion 2 et correspond aux lignes de carrosserie du camion 2. Dans cet exemple, le pare-chocs 1 est conçu pour remplacer le pare-chocs d’origine du camion 2. Le pare-chocs 1 est fabriqué d’un matériau résistant et durable comme un alliage ou de l’acier. De préférence, le pare-chocs 1 est fabriqué d’alliage de 12 mm, à cause de sa légèreté, de sa résistance et de sa moulabilité.
[34] La dernière partie soulignée indique que l’alliage de 12 mm mentionné plus tôt doit être choisi sur la base de sa « légèreté, de sa résistance et de sa moulabilité ». Quoique la demande ne mentionne pas un alliage particulier, autre que l’acier, les passages comme celui-ci donnent une direction à la personne versée dans l’art sur le choix du matériau approprié. Le passage souligné antérieur se rapporte à la première modification contestée de la revendication 1, dont nous allons maintenant traiter.
((1) « dont la forme est sensiblement la même que celle du pare‑chocs d'origine »
[35] Comme mentionné plus haut, la description indique que l’élément protecteur est « adapté pour remplacer un pare-chocs existant », et que, en tant que réalisation privilégiée, il peut être « moulé selon la forme du train avant inférieur d'un camion 2 et correspond aux lignes de carrosserie du camion 2 ». Dans ses observations du 10 janvier 2007, le demandeur a déclaré notamment que (non souligné dans l’original) :
Pour que le pare-chocs soit un pare-chocs de remplacement, il doit ressembler au pare-chocs d’origine....
De façon évidente, les lignes de carrosserie d’un camion sont en partie définies par le pare-chocs d’origine du camion. Par conséquent, il est raisonnable d’inférer que pour que le pare‑chocs de remplacement adopte les lignes de carrosserie d'origine du camion, le pare‑chocs doit adopter la forme du pare‑chocs d'origine.
[36] Même si nous croyons que le mot « doit » est peut-être un mot trop fort, nous croyons également que la personne versée dans l’art comprendrait en lisant la description que lors du formage du pare-chocs de remplacement, il ressemblerait vraisemblablement beaucoup à l’original s’il correspondait aux lignes de carrosserie du camion, comme l’aurait fait un pare-chocs d’origine. Toutefois, nous ne voyons pas l’invention comme limitée à une réalisation où le pare-chocs adopte les lignes de carrosserie d’un camion. Il s’agit simplement d’une réalisation privilégiée et, comme l’indique la description de la page 3, elle n’est pas déterminante sur la portée de l’invention. De toute façon, nous croyons que l’on pouvait raisonnablement inférer qu’il s’agitd’un pare-chocs « dont la forme est sensiblement la même que celle du pare‑chocs d'origine» sur la base des passages cités de la description initiale. Contrairement à ce qui est énoncé dans la décision finale, nous croyons que le demandeur a suffisamment fait le lien entre la forme du pare-chocs d’origine et celle du pare-chocs de remplacement pour justifier l’ajout d’une telle expression.
[37] Dans son affidavit, Mark McCarthy déclare :
[traduction]
... il est très important que tous les accessoires d’appoint aient une apparence professionnelle et l’allure de l’équipement d’origine. Lorsqu’un nouveau modèle de camion arrivera dans le parc, nous communiquerons avec le constructeur et solliciterons son aval pour nous assurer que le pare-chocs de remplacement corresponde aux lignes de carrosserie.
[38] Même si cette déclaration appuie la position du demandeur, il ne s’agit pas d’une preuve déterminante de ce qui aurait constitué l’usage général à la date du dépôt de la demande voilà plus de dix ans. Il n’en demeure pas moins qu’il est accepté que lorsque la demande prévoit que l’élément protecteur remplacera le pare-chocs d’origine et adoptera les lignes du camion, le résultat final ressemblera beaucoup à l’original.
[39] L’affidavit de Nigel Bruce Randall, un ingénieur qui conçoit des pièces d’automobiles ou de camions depuis 21 ans, soutient le point de vue du demandeur. Son propos est le suivant :
[traduction]
9. Tout véhicule a une forme. La forme est définie par les « lignes de carrosserie » qui sont le contour extérieur des panneaux qui constituent la carrosserie. Un pare-chocs est un des panneaux de carrosserie qui définit la forme et en particulier définit la forme du train avant inférieur d’un camion. Si le pare-chocs n’était pas le même que celui d’origine, sa substitution pour celui d’origine ne correspondrait pas aux lignes de carrosserie du camion.
10. L’examinateur semble estimer que tout « remplacement pour » un pare-chocs est la même chose qu’un « pare-chocs de remplacement ». Non seulement ce point de vue est inexact mais il contrevient clairement aux exigences établies aux lignes 14 et 15 citées ci-dessus, à savoir que : « Le pare-chocs 1 est moulé à la forme du train avant inférieur d’un camion 2 et correspond aux lignes de carrosserie du camion 2 ».
11. Si le remplacement n’avait pas une forme similaire, il ne pourrait pas être considéré comme « ... moulé à la forme du train avant inférieur d'un camion 2 et correspond[re] aux lignes de carrosserie du camion .. ».
[40] Les déclarations de M. Randall nous semblent logiques et confirment notre propre point de vue à l’égard de la demande. Nous concluons donc que l’expression « dont la forme est sensiblement la même que celle du pare-chocs d’origine » pouvait raisonnablement s’inférer de la demande originale.
(2) « formé de matériau de calibre sensiblement plus gros afin d'assurer une résistance accrue à la déformation »
[41] Nous avons indiqué ci-dessus que la description spécifie un pare-chocs formé de préférence d’un « alliage de 12 mm » en raison de sa légèreté, de sa résistance et de sa moulabilité ». La description se rapporte également à un « pare‑chocs de véhicule de remplacement renforcé ». Un pare-chocs « renforcé » assurerait sans doute une « résistance accrue à la déformation ». Nous croyons qu’une façon évidente de renforcer un pare-chocs en métal pour une personne versée dans l’art aurait été de le fabriquer plus épais (c’est-à-dire avec un calibre plus gros), quoiqu’il yaurait eu d’autres façons de le faire cette méthode ne soit pas la seule. Un matériau différent aurait également pu donner les mêmes résultats. Quant à l’épaisseur de 12 mm, nous réalisons que 12 mm ne serait pas une épaisseur normale pour un pare-chocs et, comme le demandeur l’a indiqué dans ses observations du 10 janvier 2007, cela «relève du domaine des plaques plutôt que des feuilles (tôles) ».
[42] Dans la décision finale, l’examinateur a contesté l’affirmation du demandeur que 12mm était beaucoup plus épais qu’un pare-chocs conventionnel pour une personne versée dans l’art au motif que cela ne se trouvait ni dans le mémoire descriptif, ni dans les dessins. Toutefois, là n’est pas le critère. Ce qui importe, c’est la façon dont le mémoire descriptif et les dessins auraient été compris par la personne versée dans l’art et ce qu’elle en aurait raisonnablement inféré.
[43] Dans son affidavit, Nigel Bruce Randall déclare :
[traduction]
12. En général, les pare-chocs sont fabriqués en pliant ou en pressant une feuille (tôle) d’acier d’environ 2 à 3 mm d’épaisseur.
13. Le mémoire descriptif cité ci-dessus indique que de préférence « .. le pare‑chocs 1 est fabriqué d’alliage de 12 mm en raison de sa légèreté, sa résistance et sa moulabilité ». La spécification indique également que le pare-chocs est «amélioré et renforcé » (page 3, ligne 14).
14. 12 mm est considérablement plus épais qu’un pare-chocs de camion d’origine typique d’un facteur de 2. Le pare-chocs d’origine ne serait pas moulé. Par conséquent et de façon évidente, le mémoire descriptif permet non seulement d’« inférer » mais il impose un pare-chocs plus épais que celui d’origine à titre de «pare-chocs de véhicule amélioré et renforcé ». « Renforcé » exige une «résistance accrue à la déformation » comparativement au pare-chocs d’origine. Ainsi, le mémoire descriptif impose un pare-chocs ayant sensiblement la même forme, mais plus épais (c’est-à-dire fait avec un calibre plus gros), donc plus fort et plus résistant à la déformation (« résistance accrue à la déformation »).
[44] Nous convenons, au motif que la norme prévoyait un alliage de 12 mm pour le pare-chocs et qu’il devait être « renforcé », que « formé de matériau de calibre sensiblement plus gros afin d'assurer une résistance accrue à la déformation » était une caractéristique qui pouvait raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif initial.
(3) « où l'alliage métallique contient au moins un d'acier et d'aluminium ».
[45] Répétons-le, le mémoire descriptif énonce que le pare-chocs doit être formé « d’acier ou d’un alliage » et que l’alliage de 12 mm est approprié en raison « de sa légèreté, sa résistance et sa moulabilité ». Dans son affidavit, Mark McCarthy déclare :
[traduction]
Toute ma vie j’ai utilisé le mot « ali » qui est simplement une autre expression pour « alliage » et est un raccourci pour aluminium. Ce n’est pas seulement une abréviation utilisée dans l’industrie, mais l’expression consacrée pour chaque industrie.
[46] Nigel Bruce Randall dans son affidavit déclare :
[traduction]
15. Selon moi, en tant que personne qui connaît bien la terminologie automobile, l’expression « alliage léger » en référence à des pièces de véhicules automobiles se rapporte normalement à de l’aluminium. Alors que certaines composantes légères de véhicules automobiles sont fabriquées avec du magnésium, ce dernier n’est pas un métal couramment utilisé autrement que pour des fins liées aux courses en raison des difficultés associées à son formage, à son coût et aux risques d’incendie (le magnésium brûle intensément). Malgré tout, je serais disposé à reconnaître qu’« alliage léger » peut également viser du magnésium pour les usages liés aux véhicules automobiles. Par conséquent, l’expression signifie au moins un d’aluminium et de magnésium.
16. Compte tenu de ce qui précède, la phrase aux lignes 17 et 18 de la page 3 qui se lit comme suit : « de préférence, le pare‑chocs 1 est fabriqué d'alliage de 12 mm, en raison de sa légèreté, sa résistance et sa moulabilité » est de façon évidente une référence à l’aluminium. L’acier serait exclu en rapport avec la « légèreté » et «moulabilité ». La pratique conventionnelle de formage de pare-chocs en acier est le pressage et non le moulage. De plus, ll serait exceptionnellement lourd d’avoir une épaisseur de 12 mm serait exceptionnellement lourde si de l’acier et un autre matériau étaient utilisés.
17. Le fait que le mot « alliage » est en général synonyme d’aluminium dans les usages liés aux véhicules automobiles est démontré par son utilisation généralisée dans l’industrie automobile pour désigner des pièces en aluminium. Par exemple, vous trouverez en annexe des pièces produites qui illustrent des cas où le mot « alliage » est utilisé pour désigner des pièces fabriquées en aluminium.
[47] Même si les pièces citées ne sont pas utiles puisqu’elles sont trop récentes pour illustrer le sens que pouvait prendre le terme « alliage » en 1995, les déclarations de MM Randall et McCarthy le sont pour leur part et rien ne nous permet de douter de leur validité. Nous sommes d’accord avec l’argument voulant que la personne versée dans l’art comprendrait que la description implique l’utilisation de l’aluminium pour former un pare-chocs de l’épaisseur désirée. Dans la décision finale, les motifs de l’examinateur sur la raison pour laquelle le terme « aluminium » ne peut raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif initial sont que d’une part, ce mot n’avait pas été utilisé et que, d’autre part, « alliage » n’est pas un synonyme d’« aluminium ». En ce qui concerne le premier motif, il n’est pas nécessaire que l’on retrouve une mention expresse dans le mémoire descriptif. En ce qui concerne le deuxième motif, que le terme « alliage » soit synonyme ou non d’« aluminium » (ou « alliage d’aluminium » pour être plus précis), n’a aucune importance, il suffit que la personne versée dans l’art comprenne à la lecture du mémoire descriptif qu’un alliage d’aluminium constituerait un alliage convenable pour satisfaire aux exigences du demandeur en matière de légèreté, de solidité et de moulabilité.
[48] À la lumière de ce qui précède, nous concluons que la phrase « où l'alliage métallique contient au moins un d'acier et d'aluminium » pouvait raisonnablement s’inférer du mémoire descriptif initial.
RECOMMANDATION
[49] En résumé, la Commission recommande que :
le refus des revendications 1 à 6 du mémoire descriptif par l’examinateur au motif qu’elles ajoutent de nouveaux éléments soit annulé et que la demande soit renvoyée devant l’examinateur pour qu’il se penche sur les irrégularités qui avaient été mises en suspens jusqu’à ce qu’il soit disposé de la question des nouveaux éléments.
Stephen MacNeil Paul Fitzer Ed MacLaurin
Membre Membre Membre
[50] Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission d’appel des brevets d’annuler le refus des revendications par l’examinateur et de renvoyer la demande devant l’examinateur pour que soient tranchées les questions qui avaient été mises en suspens jusqu’à ce que la question des nouveaux éléments soit tranchée. Comme la présente demande fait l’objet d’une ordonnance spéciale depuis 2002, toute nouvelle décision de l’examinateur, y compris en réponse aux modifications du demandeur, doit être rendue dans le délai habituel de 30 jours ouvrables.
Mary Carman
Commissaire aux brevets
Fait à Gatineau (Québec)
le 17 juin 2009
Traduction certifiée conforme
Christiane Bélanger, LL.L.