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Commissioner’s Decision #1264

Décision du Commissaire #1264

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TOPIC: H00, H20, O

SUJECT : H00, H20, O

 

 

 

 

 

 

Application No : 2,286,794

Demande no : 2,286,794

 

 

 

 

 


 

 

 

 

SOMMAIRE DE LA DÉCISION DU COMMISSAIRE

 

 

 

D.C. 1264 Demande no 2,286,794

 

Évidence, agrégation, combinaison exhaustive

 

 

L’examinateur a rejeté cette demande en invoquant que l’invention revendiquée était évidente à la date de la revendication, en vertu de l’antériorité citée, qui comprenait le brevet canadien, un brevet américain et un brevet français. L’examinateur a aussi rejeté l’invention revendiquée comme agrégation et comme combinaison exhaustive. La Commission a décidé que le demandeur revendiquait une invention qui était évidente, mais que la combinaison des éléments ne constituait ni une agrégation, ni une combinaison exhaustive.

 

Le Commissaire aux brevets a rejeté la demande.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS

 

 

 

 

 

 

 

La demande de brevet numéro 2,286,794 ayant été rejetée en vertu du paragraphe 30(3) des Règles sur les brevets, le demandeur a sollicité une révision de la décision finale de l'examinateur. Le rejet a été étudié par la Commission d'appel des brevets et par le Commissaire aux brevets. Les conclusions de la Commission et la décision du Commissaire sont les suivantes :

 

 

 

 

 

 

Agent du demandeur

 

Ridout & Maybee LLP

150, rue Metcalfe, 19e étage

Ottawa (Ontario)

K2P 1P1                             

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


La présente décision fait suite à une demande visant l'examen, par le Commissaire aux brevets, de la décision finale de l'examinateur sur la demande numéro 2,286,794 déposée le 6 mai 1998 et intitulée « SUBWAY TV MEDIA SYSTEM » [SYSTÈME DE TÉLÉVISION DANS LE MÉTRO]. Le demandeur et inventeur est Scott Blair. L'examinateur saisi a rendu sa décision finale le 21 octobre 2002, refusant les revendications 1 à 16 en invoquant le brevet américain 5,606,154 octroyé à Doigan et al. ainsi que les connaissances courantes relatives à la technique, illustrées par le brevet français 2,652,701 octroyé à Comerzan-Sorin et le brevet canadien 1,316,253 octroyé à Tagawa et al. Les revendications 9 à 16 ont également été rejetées en tant que simple agrégation d’éléments et combinaison exhaustive.

 

À la requête du demandeur, la Commission d’appel des brevets a tenu une audience par téléconférence le 24 novembre 2004, alors que le demandeur était représenté par M. Randy Mitchell de la société Ridout & Maybee LLP. L’inventeur et demandeur, M. Scott Blair, accompagnait aussi M. Mitchell. Le Bureau des brevets était représenté par M. Terry Cartile, examinateur saisi de la demande, et par son chef de section, M. André Gélinas.

 

L’invention porte sur l’incorporation d’un système de présentation vidéo dans un wagon de métro. Le wagon de métro comprend plusieurs terminaux vidéo montés près du plafond, qui peuvent servir à la présentation de messages télévisés d’intérêt public, ainsi qu’un système de divertissement et de publicité. Le système présente aux usagers du métro des séquences télévisuelles de divertissement et de publicité, d’une durée adaptée à un parcours typique relativement court. La figure 2 illustre l’invention divulguée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Voici le texte de la revendication indépendante 1 :

[TRADUCTION]

1.  Wagon de métro pour transport en commun comprenant des murs opposés longitudinaux, un plafond reliant ces murs, un système de présentation vidéo incorporant un certain nombre de moniteurs vidéo dotés chacun dun écran vidéo et une source de signaux vidéo raccordée pour fonctionner avec lesdits moniteurs, espacés sur les côtés opposés le long du wagon, de façon que chacun des moniteurs soit monté à la jonction du mur et du plafond, leur écran se trouvant à peu près au niveau de la structure de surface du mur adjacent du wagon, orienté en oblique vers les sièges du wagon, pour que les passagers à bord du wagon de métro puissent facilement voir chaque écran vidéo.

 

 

Dans sa décision finale, l'examinateur a refusé les revendications de la

demande en invoquant le brevet américain 5,606,154 octroyé à Doigan et al. ainsi que les connaissances courantes relatives à la technique, illustrées par le brevet français 2,652,701 octroyé à Comerzan-Sorin et par le brevet canadien 1,316,253 octroyé à Tagawa et al., et en précisant notamment ce qui suit :

 

 

[TRADUCTION]

 

Des wagons de métro utilisés pour le transport en commun ont été divulgués par Doigan et al., sous lappellation système léger de transfert horizontal de passagers à wagons sur rails. Les trois antériorités décrivent une source de signaux vidéo raccordée au moniteur. Tout comme les écrans vidéo couramment utilisés dans les bars, il est évident que les moniteurs sont montés à lintersection du mur et du plafond et quils sont orientés en direction du public.

 

Les revendications subordonnées najoutent aucun objet brevetable, et les revendications 1 à 16 ne satisfont donc pas au paragraphe 28.3 de la Loi sur les brevets, car lobjet de ces revendications aurait été évident à la date de la revendication, eu égard à Doigan et al. ainsi quaux connaissances courantes des moniteurs multiples à bord des voitures de transfert de passagers, révélées par Comerzan-Sorin ou Tagawa et al.

 

 

L’examinateur a également refusé les revendications 9 à 16 en tant que simple agrégation d’éléments et combinaison exhaustive, en précisant notamment ce qui suit :

[TRADUCTION]

Le wagon de métro et les moniteurs vidéo exécutent chacun leur fonction propre indépendamment les uns et des autres. Les spécifications ne révèlent pas dinterrelation de fonctionnement entre ces unités connues. Contrairement à lantériorité appliquée de Doigan et al., qui révèle des méthodes de synchronisation des durées de présentation vidéo à louverture et à la fermeture des portes du wagon, aucune interrelation de fonctionnement nest révélée ici. Lenvironnement de coopération immédiat des programmes de publicité et de divertissement est celui du système vidéo, et non celui du wagon de métro. Le wagon de métro fonctionne très indépendamment du moniteur vidéo dudit wagon, qui offre des fonctions de divertissement et de publicité (page 2, ligne 22).

.....

En outre, les revendications 9 à 16 visent également une combinaison exhaustive, comme le précise le rapport de lexaminateur du 5 juin 2000.

 

Le rapport du 5 juin 2000 précise notamment ce qui suit :

[TRADUCTION]


Linvention peut être utilisée dans un wagon de métro, mais le wagon de métro ne constitue pas une invention, comme lindique la présente revendication.                                         

 

Dans sa réponse du 17 avril 2003, le demandeur a annulé les revendications 1 à 16 et les a remplacées par les revendications 1 à 11, les revendications 1 à 6 ayant trait à la combinaison du wagon de métro et du système de présentation vidéo et les revendications 7 à 11 ayant trait au système de présentation vidéo, plus particulièrement à la diffusion de séquences télévisées aux passagers d’un wagon de métro.

 

Dans sa réponse, le demandeur a notamment précisé ce qui suit :

[TRADUCTION]

Laccent porte particulièrement sur une caractéristique de la revendication 1, qui spécifie que lécran du moniteur se trouve « à peu près au niveau de la structure de surface du mur adjacent du wagon », sur une caractéristique ne se retrouvant dans aucune des antériorités citées et sur une caractéristique inventive et non évidente, spécialement adaptée à lutilisation des systèmes vidéo dans un wagon de métro, où lespace est limité et le montage des écrans doit seffectuer non seulement à des endroits offrant une bonne visibilité à tous les passagers (caractéristique également incluse dans les revendications), mais aussi dune façon qui ne bloque pas les fenêtres, les portes et les sorties tout en sintégrant à lapparence générale de lintérieur du wagon.

Une autre caractéristique inventive est incorporée à la revendication 5 (elle-même subordonnée à la revendication 1 et contenant donc toutes les caractéristiques de la revendication 1), nommément une unité transparente rigide recouvrant lécran de chaque moniteur et dont la forme coïncide avec celle du mur interne du wagon de métro. Aucune caractéristique semblable ne se retrouve dans lune ou lautre des antériorités citées. Son étendue est examinée dans la divulgation de lapplication, page 7, lignes 17 à 30. Elle permet de donner à lécran du moniteur une forme concave qui sintègre de façon continue aux murs des wagons de métro, comme le précise par ailleurs la revendication 6. Respectueusement, le demandeur ne partage pas lavis de lexaminateur, selon lequel lantériorité de Doigan et al., brevet américain 5,606,154, constitue une divulgation relative à des wagons de métro. Lexpression soulignée par lexaminateur, « système léger de transfert horizontal de passagers à wagons sur rails » ne sapplique pas aux wagons de métro. Les systèmes légers de transfert horizontal de passagers à wagons servent au transport de surface. Si Doigan et al. avaient voulu englober des wagons de métro dans des installations, ils lauraient clairement indiqué. Doigan envisage des navettes déplacées par câbles, par moteurs à induction linéaire ou autrement dans le passage pertinent de la colonne 2, lignes 55 et 66, et si Doigan et al. avaient eu lintention dappliquer cette invention aux wagons de métro, ils lauraient sûrement précisé dans ce passage, en faisant clairement référence aux wagons de métro. Les systèmes légers de transfert horizontal de passagers sur rails fonctionnent en surface, sur des rails élevés. Ce nest absolument pas le cas des wagons de métro.

.......

Ainsi, non seulement lantériorité citée ne renferme-t-elle aucun élément démontrant que lincorporation dun système de télévision dans des wagons de métro a été envisagée auparavant, mais les revendications sont aussi clairement limitées à des caractéristiques spéciales remédiant aux problèmes de structure et dinstallation que posent les systèmes à wagons de métro. Linventeur a fait preuve de lidée novatrice dincorporer ces systèmes à des métros, tout en résolvant des problèmes techniques et esthétiques liés à de telles installations, dune manière non évidente.


En ce qui a trait au refus de lexaminateur relativement à lagrégation mise de lavant dans les revendications antérieures 9 à 16, nous soutenons respectueusement que les nouvelles revendications 1 à 6 définissant un wagon de métro ne donnent pas lieu à une telle objection. Linclusion de la caractéristique selon laquelle les moniteurs sont montés à la jonction du mur et du plafond, lécran se trouvant à peu près au niveau de la structure de surface du mur adjacent du wagon, définit un environnement de coopération et des interrelations de la structure du wagon de métro et du système vidéo, qui définissent correctement une invention unitaire fonctionnant comme un tout.

À nouveau au sujet de lévidence, nous rappelons respectueusement à lexaminateur lopinion dexpert, présentée sous la forme daffidavits et de déclarations durant la phase de poursuite internationale et versée au dossier. Selon lopinion dexpert rassemblée, linvention divulguée dans les présentes nest pas évidente.

 

Durant la téléconférence, le demandeur a indiqué que les revendications 7 à 11, déposées le 17 avril 2003 en réponse à la décision finale, ne devaient pas être prises en compte. La Commission n’a donc plus qu’à se pencher sur les revendications 1 à 6, semblables aux revendications antérieures 9 à 16, dont il est fait mention dans la décision finale.

 

Au cours de la téléconférence, le demandeur a souligné deux aspects qui, selon lui, devaient être pris en compte dans l’évaluation de la nature inventive des revendications.

 

1) Était-il évident d’incorporer aux wagons de métro des systèmes de télévision pour le divertissement et la publicité?

2) La façon particulière dont cela a été fait était-elle évidente?

 

Pour évaluer l’évidence d’une invention revendiquée, la Commission doit examiner les critères appropriés que les tribunaux ont fait valoir, en particulier dans Beecham Canada Ltd. c. Proctor and Gamble Co. (1981), 56 C.P.R. (2d) 214 (C.F. 1re inst.), conf. (1982), 61 C.P.R. (2d) 1 (C.A.F.), autorisation d’appel refusée (1982), 63 C.P.R. (2d) 260 (C.S.C.), où il est précisé que :

 

[TRADUCTION]                    

La question est de savoir si, à l'époque de l'invention ..., un technicien versé dans la technique mais peu imaginatif, se fondant sur ses connaissances générales, sur ce qui avait été écrit dans le domaine et sur les renseignements qu'il avait à sa disposition, aurait été amené directement et sans aucune difficulté à linvention.

 

La question a été précisée dans Beloit Canada Ltd. c. Valmet Oy (1984), 78 C.P.R. (2d) 1 (C.F. 1re inst.), rév. (1986), 8 C.P.R. (3d) 289 (C.A.F.) :

 

[TRADUCTION]


Pour établir si une invention est évidente, il ne s'agit pas de se demander ce que des inventeurs compétents ont ou auraient fait pour solutionner le problème. Un inventeur est par définition inventif. La pierre de touche classique de l'évidence de l'invention est le technicien versé dans sa technique mais qui ne possède aucune étincelle d'esprit inventif ou d'imagination; un parangon de déduction et de dextérité complètement dépourvu d'intuition; un triomphe de l'hémisphère gauche sur le droit. Il s'agit de se demander si, compte tenu de l'état de la technique et des connaissances générales courantes qui existaient au moment où l'invention aurait été faite, cette créature mythique (monsieur tout‑le‑monde du domaine des brevets) serait directement et facilement arrivée à la solution que préconise le brevet. C'est un critère auquel il est très difficile de satisfaire.

 

Étant donné l’importance de la conception de l’invention et de sa mise en oeuvre, l’observation suivante de MacLean J. dans Canadian Gypsum Co. Ltd. c. Gypsum, Lime & Alabastine, Canada, Ltd., (1931) R.C. de l'Éch. 180, semble pertinente dans la situation actuelle :

 

[TRADUCTION]

lactivité inventive nécessaire à lappui dun brevet valide peut se trouver dans lidée sous-jacente, ou dans lapplication pratique de cette idée, ou dans les deux. Il peut arriver que lidée ou la conception soit méritoire mais que, une fois proposée, lapplication se révèle très simple. Ou bien, il se peut que lidée soit évidente, mais que de lingéniosité soit nécessaire pour la mettre en pratique. Ou encore, lidée elle-même peut avoir du mérite et sa mise en pratique peut aussi nécessiter une activité inventive.

 

Eu égard à ces décisions, les questions suivantes posées par le demandeur semblent pertinentes pour déterminer si l’invention est évidente ou non :

 

1) Était-il évident, pour une personne versée dans sa technique, d’incorporer  aux wagons de métro des systèmes de télévision pour le divertissement et la publicité?

2) La façon précise dont cela a été fait était-elle évidente pour une telle personne?

 

Afin de répondre à ces questions, il est impératif d’analyser l’antériorité appliquée par l’examinateur ainsi que son effet cumulatif.

 

Pour ce qui est de l’antériorité, plus particulièrement du brevet américain 5,606,154 octroyé à Doigan et al., ce brevet porte sur un système de diffusion d’une ou de plusieurs annonces dans un ascenseur, ou une autre navette, les annonces ayant une durée inférieure au temps qu’il faut pour atteindre le prochain arrêt prévu. Les annonces sont classées par groupes de durées ou sélectionnées par le système, successivement jusqu’à ce que le temps se soit écoulé. Le brevet porte particulièrement sur un système de sélection d’un message approprié, selon l’entrée fournie par le passager, par exemple en appuyant sur un bouton d’appel de navette. Selon la divulgation, le terme « messages » peut, dans ce cas, désigner :

[TRADUCTION]

les messages dynamiques, sonores et/ou visuels, et pas les imprimés ou les graphiques fixes, mais pouvant comprendre une image vidéo constante présentée simultanément avec une séquence audio.

 

Il est précisé que l’invention :

[TRADUCTION]

repose sur le fait quà lintérieur dune navette, comme un ascenseur, la durée dun message se limite au temps nécessaire pour se déplacer dun point darrêt déterminé au point darrêt suivant.

 


Comme il est également précisé à la col. 2, lignes 48 à 52 :

 

[TRADUCTION]

linvention sapplique aussi à dautres types de navettes, comme celles qui servent au transfert de personnes aux aéroports et aux universités, les véhicules parcourant un chemin prédéterminé et donnant accès à des points prédéterminés sur le chemin.

 

La signification du terme « navette » est en outre précisée à la col. 2, lignes 58 et 59, où il est question de :

[TRADUCTION]

systèmes légers de transfert horizontal de passagers à wagons sur rails, à déplacement par câbles, par moteurs à induction linéaire ou autrement.

 

Il est indiqué à la col. 3, lignes 6 et 7 que :

[TRADUCTION]

Linvention peut être utilisée dans les wagons du système ou aux points darrêt du système ou à ces deux endroits.

 

et à la col. 3, lignes 34 à 39, que :

[TRADUCTION]

le terme « annonce » peut indiquer de la publicité et des messages non commerciaux de toute sorte. Les messages peuvent être audio seulement ou audiovisuels et être enregistrés sur divers supports, comme des bandes en cassette et des mémoires de disque compact à lecture seulement.

 

À la col. 15, il est mentionné que :

[TRADUCTION]

Les messages particuliers à diffuser peuvent être enregistrés à un endroit central et transmis sur demande à lendroit où ils doivent être présentés

.....

Les messages peuvent être enregistrés dans le format de télévision à haute définition (TVHD) et transmis par un moyen à large bande vers les endroits où ils doivent être présentés ou par des lignes de type téléphonique matérialisant une norme de compression-décompression MPEG. Par ailleurs, des signaux analogiques peuvent être utilisés, comme pour la télévision par câble. Chaque message analogique peut être enregistré sur sa propre bande vidéo et sélectionné par la mise en marche du lecteur correspondant ou par toute autre méthode appropriée, utilisant les installations nécessaires de transmission et de diffusion.

 


D’après l’information présentée dans Doigan et al., il est évident qu’on envisageait clairement d’incorporer des systèmes de télévision pour le divertissement et la publicité, sous la forme d’annonces ou d’autres messages vidéo, dans un environnement de type wagon sur rails. Le demandeur a fait valoir que les « systèmes légers de transfert horizontal de passagers sur rails » ne comprennent pas les wagons de métro et qu’ils désignent plutôt des systèmes de transport de surface fonctionnant sur rails élevés. La Commission ne peut toutefois pas accepter cette interprétation. Les systèmes de métro sont effectivement des systèmes légers de transfert sur rails, et il arrive souvent que les rames se déplacent aussi bien en surface que sous le niveau du sol pour parcourir le trajet qui leur est assigné. Par conséquent, la réponse à la première question posée doit être qu’il est évident d’incorporer aux wagons de métro des systèmes de télévision pour le divertissement et la publicité.

 

Quant à la seconde question, à savoir si la façon précise dont l’incorporation s’est effectuée aurait été évidente, la Commission se penchera d’abord sur l’antériorité Doigan et al. L’antériorité Doigan et al. laisse l’installation particulière du système de présentation vidéo à l’attention d’une personne versée dans la technique. Cette personne doit, à ce qu’il semble, déterminer la nature exacte du système, l’endroit où il doit être monté sur la « navette » et la façon dont il doit l’être. Certaines lignes directrices sont fournies, par exemple à la col. 1, lignes 53 à 55 :

[TRADUCTION]

Selon la présente invention, un message est sélectionné ... et est présenté pour permettre la perception des passagers (dans le wagon ou à un point darrêt).

 

Il semble donc que la personne versée dans sa technique doive effectuer toute adaptation mineure nécessaire au bon fonctionnement du système de présentation vidéo à un certain égard (système de montage, mise en place, câblage, etc.). Apparemment, cela s’appliquerait à tout système de présentation qu’un technicien doit installer à un endroit particulier. Il n’apparaît pas que le technicien doive faire preuve d’un esprit inventif pour déterminer le meilleur lieu de montage des éléments (haut-parleurs, moniteurs, etc.) ou pour établir la façon appropriée d’acheminer les câbles. Ces décisions font appel aux connaissances courantes et au bon jugement des techniciens.

 

Dans le cas de l’antériorité Comerzan-Sorin, le document contient une divulgation relative à un réseau vidéo câblé international, commandé par ordinateur et comprenant plusieurs moniteurs de télévision qui doivent être installés à bord d’avions, de trains, de voitures, de bateaux, etc. Les moniteurs doivent présenter de l’information en circuit fermé sur chaque endroit ainsi que des émissions de divertissement sous la forme de films, de commerciaux, de bulletins météorologiques, etc. Les émissions doivent être reçues de satellites ou provenir de vidéocassettes ou de vidéodisques préenregistrés. Les moniteurs de télévision peuvent, par exemple, être munis d’un tube cathodique ou d’un afficheur à cristaux liquides. Cette invention a pour objet de doter chaque passager d’un moniteur à commande individuelle et d’installer un moniteur central à grand écran permettant une présentation générale. Pour ce qui est des moniteurs individuels, diverses positions de montage sont spécifiées autour des passagers, soit sur l’appui-bras, sur un support fixé au plancher ou à l’arrière des sièges. Encore une fois, cette antériorité laisse le montage particulier du moniteur et l’installation du système à l’attention compétente d’une personne versée dans la technique, car l’utilisation de tels systèmes vidéo répartis semble aller de soi. Le système devrait être adapté à chaque moyen de transport (trains, avions, voitures, bateaux, etc.).

 


Quant à l’antériorité Tagawa et al., le document renferme une divulgation relative à un appareil d’émission d’un certain nombre de signaux vidéo et audio en parallèle vers chacun des terminaux éloignés pouvant se trouver à l’emplacement ou à proximité d’un siège de passager à bord d’un véhicule de passagers comme un aéronef, un train, un autobus, etc. Cette antériorité s’apparente à l’antériorité Comerzan-Sorin, car elle porte sur l’installation, à chaque position de passager, d’un appareil de télévision recevant ses signaux vidéo et audio en provenance d’un point central. Dans ce cas, l’invention s’applique plus particulièrement aux déplacements sur de grandes distances et, à bord d’un avion, les terminaux se montent de préférence à l’arrière d’un certain nombre de sièges de passager. Un terminal peut comprendre un tube cathodique plat, un afficheur à cristaux liquides (LCD) ou l’équivalent, et l’utilisateur peut sélectionner l’information qu’il veut obtenir. Cette antériorité s’attache particulièrement au système de transmission et aux éléments qui entrent en jeu dans la sélection des émissions par l’utilisateur. À nouveau, certaines lignes directrices sont fournies au sujet des positions de montage particulières, mais il revient généralement à une personne versée dans la technique d’en déterminer la nature exacte.

 

D’après les antériorités susmentionnées, il apparaît clair que les auteurs ne jugent pas important pour leurs concepts inventifs de préciser le système de montage exact de leurs terminaux de présentation. Il revient à une personne versée dans la technique de le déterminer. L’antériorité Doigan et al. ne renferme aucune déclaration particulière sur le montage et indique simplement que l’appareil est positionné « pour permettre la perception des passagers ». Les antériorités Comerzan-Sorin et Tagawa et al. s’attachent plus, l’une et l’autre, aux longues durées de déplacement que Doigan et al. et traitent particulièrement des situations où les passagers occupent tous une place prédéterminée et peuvent donc disposer d’un écran individuel ainsi que d’une certaine capacité de commande de la présentation, même si ces antériorités font effectivement mention de plusieurs modes de transport pouvant exiger une plus large adaptation. Dans ces deux antériorités, tout comme dans Doigan et al., il revient toutefois à une personne versée dans la technique de déterminer la nature exacte du montage des moniteurs ainsi que l’emplacement des moyens de production et de transmission des signaux.

 

La Commission doit maintenant examiner les revendications 1 à 6 pour déterminer si l’arrangement de montage précis revendiqué par le demandeur comporte une étape inventive eu égard à l’état de la technique exposé et aux connaissances générales courantes d’une personne versée dans la technique. En ce qui a trait à la revendication 1, outre les caractéristiques connues du wagon de métro, il est revendiqué que les moniteurs sont montés :

[TRADUCTION]

à la jonction du mur et du plafond, leur écran se trouvant à peu près au niveau de la structure de surface du mur adjacent du wagon, orienté en oblique vers les sièges du wagon, pour que les passagers à bord du wagon de métro puissent facilement voir chaque écran vidéo.


 

Tel que susmentionné, il a été proposé dans Doigan et al. d’installer les systèmes de présentation vidéo à bord de navettes, par exemple dans des systèmes légers à wagons sur rails. Pour obtenir une réalisation de cet ordre, une personne versée dans la technique devrait nécessairement déterminer l’emplacement de montage approprié. Pour ce qui est de la première caractéristique, soit « à la jonction du mur et du plafond », comme en témoignera quiconque a déjà voyagé à bord d’un métro ou d’un autobus urbain, l’endroit habituel d’affichage des annonces se situe, en fait, à la jonction du mur et du plafond, ce qu’a aussi attesté le demandeur à la p. 10, lignes 19 à 21 de la demande en question. Il s’agit donc de l’emplacement logique, peut-être en fait le seul emplacement disponible, où une personne versée dans la technique pourrait installer l’écran vidéo. La deuxième caractéristique, « leur écran se trouvant à peu près au niveau de la structure de surface du mur adjacent du wagon », semble destinée à des fins esthétiques. En ce qui a trait à la dernière caractéristique, c’est-à-dire que l’écran est « orienté en oblique vers les sièges du wagon, pour que les passagers à bord du wagon de métro puissent facilement voir chaque écran vidéo », cette idée découle du montage des écrans à la jonction du mur et du plafond et du principe de Doigan et al. qui consiste à monter les écrans « pour permettre la perception des passagers ». Par conséquent, la Commission conclut que la combinaison des caractéristiques de la revendication 1 ne constitue pas une invention et qu’une personne versée dans la technique ne devrait surmonter aucune difficulté importante pour mettre en pratique l’idée d’installer des écrans vidéo dans des wagons de métro. Elle n’aurait qu’à faire appel à ses connaissances courantes et à se laisser guider par les lignes directrices générales découlant de l’état de la technique.

 

Quant à elles, les revendications 2 et 3 indiquent simplement les éléments particuliers du système de présentation vidéo qui, selon la divulgation du demandeur, sont d’usage courant. Les antériorités appliquées en donnent également une illustration.

 

Dans la revendication 4, « un système de câblage autonome », semblerait, eu égard à l’antériorité, s’appliquer à n’importe quel système de présentation vidéo du même genre.

 


Dans les revendications 5 et 6, il est mentionné qu’une unité transparente rigide recouvre les écrans et que sa forme coïncide avec celle du mur interne du wagon de métro, la revendication 6 précisant que cette forme est effectivement concave. En premier lieu, une unité transparente rigide recouvrant un écran ne semble rien de plus qu’un dispositif de protection. La Commission est d’avis que l’installation d’un dispositif de protection sur un écran vidéo dans un métro, un autobus ou un véhicule semblable représente simplement une mesure de prudence qu’une personne versée dans la technique serait forcée d’envisager, compte tenu des risques évidents de dommages que pourraient occasionner les usagers du système de métro. On peut difficilement imaginer qu’un élément matériel aussi fragile puisse être installé dans un tel environnement sans une certaine forme de protection.

 

Il est également à souligner que le demandeur a déposé, à l’appui de ses arguments, plusieurs affidavits provenant d’experts dans le domaine du transport en commun. Ces déclarations ne sont pas convaincantes et semblent uniquement indiquer que ces experts ne connaissent pas de système semblable à celui des revendications en question. L’examinateur ne s’est toutefois pas penché sur l’aspect de la nouveauté. Dans la situation actuelle, il s’agit plutôt de déterminer si l’invention revendiquée aurait été évidente pour une personne versée dans la technique, compte tenu de ses connaissances générales courantes et de l’état de la technique.

 

En raison de ce qui précède, la Commission est d’avis qu’il était évident, à la date de la revendication, d’incorporer aux wagons de métro des systèmes de télévision pour le divertissement et la publicité et que la façon précise de le faire aurait été évidente pour un technicien versé dans la technique qui n’aurait pas fait preuve d’imagination.

 

Bien qu’il ait été établi que les revendications ne satisfont pas au paragraphe 28.3 de la Loi sur les brevets, les autres questions soulevées par l’examinateur seront maintenant examinées.

 

La deuxième question traitée par l’examinateur dans sa décision finale porte sur le fait que les revendications ne visent qu’une simple agrégation et que « le wagon de métro et les moniteurs vidéo exécutent chacun leur fonction propre indépendamment les uns et des autres ». Il importe d’abord de souligner que cette objection n’a été soulevée que dans la décision finale et qu’un tel refus ne conviendrait pas aux fins de l’article 30 de la Loi sur les brevets. Toutefois, par mesure d’exhaustivité, cette question sera examinée.

 

La nature d’une agrégation a été examinée par les tribunaux à de nombreuses occasions. Dans Lester c. Commissaire aux brevets (1946) 6 C.P.R. 2, qui portait sur un pistolet-jouet intégrant un sifflet, il a été précisé ce qui suit (soulignement ajouté) :

[TRADUCTION]

Les autorités stipulent très clairement quune combinaison nest pas brevetable lorsque chaque partie exécute sa fonction indépendamment de lautre et que les parties ne sont pas combinées pour produire un certain résultat commun.

 

Cest ce que Lord Tomlin a exprimé comme suit dans British Celanese Ltd. c. Courtaulds Ltd. [1935], 52 R.P.C. 171, à la p. 193 :

 

« il est accepté comme justifié en droit quune simple mise en place côte à côte danciennes unités, de sorte que chacune exécute sa propre fonction indépendamment de toutes les autres, ne constitue pas une combinaison brevetable, mais que lorsque danciennes unités mises en place ensemble démontrent une certaine interrelation de fonctionnement produisant un résultat nouveau ou amélioré, il existe alors un objet brevetable constitué par lidée de linterrelation de fonctionnement qui découle de la co‑implantation des unités ».

 

Dans Williams c. Nye, 7 R.P.C. 37 à 40, il est précisé ce qui suit (soulignement ajouté) :


[TRADUCTION]

À mon avis, le titulaire du brevet sest contenté de faire ce que toute personne sétant penchée sur la question aurait fait sans la moindre difficulté, cest-à-dire quaprès avoir trouvé les deux machines, il les a réunies sans ajouter quoi que ce soit. Selon moi, rien ne mérite ici le nom dinvention. Je crois quil a soigneusement décrit ce quil dit avoir inventé, et je ne pense pas quil ait décrit quoi que ce soit qui puisse, dun point de vue juridique, être considéré comme une invention. Il a joint deux choses lune à lautre sans y ajouter délément intermédiaire. Il soutient que deux anciennes choses combinées, cest-à-dire ajoutées lune à lautre de la façon la plus simple possible, constituent une nouvelle chose.  Ce nest pas, à mon avis, justifié en droit.

 

Dans The King c. American Optical Co. (1950) 13 C.P.R. 87 à 98, Thorson P. précise ce qui suit :

[TRADUCTION]

Outre la nouveauté et lactivité inventive, il est essentiel à la validité du brevet dune invention combinée que la combinaison mène à un résultat unitaire plutôt quà une succession de résultats, que ce résultat diffère de la somme des résultats des éléments et quil soit simple et non complexe. Les éléments peuvent interagir les uns avec les autres à condition de se combiner pour donner un résultat unitaire et simple qui ne soit attribuable à aucun des éléments, mais qui découle de la combinaison elle-même et serait impossible sans elle.

 

Il est évident, d’après ces déclarations, qu’une combinaison admissible doit regrouper des éléments (ou des unités) d’une façon qui produise un résultat commun unique ou unitaire, et non pas un résultat correspondant à la somme des résultats des différents éléments. Pour produire le résultat, les éléments doivent coopérer ou présenter une « interrelation de fonctionnement ».

 

En ce qui a trait à la revendication 1 du demandeur, il est à souligner que les éléments, nommément le wagon de métro et le système de présentation vidéo, ne sont pas nouveaux et que le demandeur ne prétend pas qu’ils le sont. Toutefois, la revendication 1 précise que l’écran vidéo est monté « à peu près au niveau de la structure de surface du mur adjacent du wagon ». Cette caractéristique, comme le montrent clairement la description et les dessins, exige que la structure existante du wagon de métro soit modifiée en fonction de l’écran vidéo et qu’elle soit adaptée d’une certaine façon. Dans de telles conditions, les éléments ne seraient alors pas simplement placés « côte à côte », ni « joints l’un à l’autre », mais intégrés plutôt en une certaine « interrelation de fonctionnement » pour produire un résultat unitaire et commun, soit un wagon de métro doté d’un système de télévision pour le divertissement. Bien que cette interrelation de fonctionnement ne soit peut-être pas aussi apparente qu’elle l’aurait été si la combinaison avait porté sur une machine à pièces mobiles, des éléments statiques combinés peuvent tout aussi bien « interagir » correctement les uns avec les autres pour constituer une combinaison admissible. Pour ces raisons, la Commission n’est pas d’avis que les revendications visent une simple agrégation.

 


La dernière question soulevée par l’examinateur a trait à l’exhaustivité de la combinaison dont traitent les revendications 9 à 16 (comme les actuelles revendications 1 à 6). Il est à souligner que cette question a été soulevée dans le rapport de l’examinateur du 5 juin 2000, qu’elle n’a pas été abordée dans le rapport de l’examinateur du 13 novembre 2001 et qu’elle a été reprise dans la décision finale. Afin, encore une fois, que les revendications soient examinées sous tous leurs aspects, la question de la combinaison exhaustive sera également étudiée.

 

En ce qui a trait à la demande 132,421 (1976) 52 C.P.R. (2d) 220 à 224, confirmée (1977) 52 C.P.R. (2d) 229, il est précisé ce qui suit :

[TRADUCTION]

Les revendications doivent définir linvention elle-même, sans aller au­-delà. Le paragraphe 36 2) de la Loi sur les brevets (maintenant le paragraphe 27 4)), L.R.C. 1970, c. P-4, constitue la disposition législative habilitante à cette fin.

Il exige que linventeur revendique distinctement la partie constituant linvention. Il nous faut établir jusquoù peut se rendre un demandeur pour atteindre entièrement lobjectif de protection de son invention sans en dépasser les limites en revendiquant ce qui ne lui appartient pas de droit. Pour paraphraser ce qua indiqué la Cour suprême dans B.V.D. Co. c. Canadian Celanese Ltd., [1937] 2 D.L.R. 481, [1937] R.C.S. 221 [demande de nouvelle audience refusée [1937] 3 D.L.R. 449, [1937] R.C.S. 441; modif. [1939] 2 D.L.R. 289], si les revendications vont effectivement au-delà de linvention, le brevet nest pas valide. Dans la cause de B.V.D. (confirmée par le Conseil privé, 56 R.P.C. 122), la Cour se penchait manifestement sur des revendications comportant des aspects anticipés, et il est essentiel de faire preuve de prudence avant dadopter le raisonnement général qui sappliquait aux circonstances dune autre situation.

 

Il est bien admis qu’un demandeur puisse revendiquer son invention et son environnement de coopération immédiat sans aller au-delà de l’invention. Dans le présent cas, le demandeur a revendiqué un système de présentation vidéo en combinaison avec un wagon de métro. L’invention a pour objet de fournir cette combinaison et une façon de la mettre en pratique. Il semble donc peu probable que la combinaison revendiquée du wagon de métro et du système de présentation vidéo aille au-delà de l’invention alléguée. Il s’agit précisément de la combinaison représentant le concept inventif allégué. Le wagon de métro fait clairement partie de l’environnement de coopération immédiat du système de présentation vidéo.

 

Nonobstant les commentaires susmentionnés relativement aux questions d’agrégation et de combinaison exhaustive, la Commission est d’avis que les revendications auraient été évidentes pour une personne versée dans la technique, eu égard aux connaissances générales courantes et à l’antériorité envisagée par l’examinateur.

 


Par conséquent, la Commission conclut que les revendications 1 à 6 auraient été évidentes à la date des revendications et qu’elles ne satisfont pas au paragraphe 28.3 de la Loi sur les brevets. Il est donc recommandé que la décision finale par laquelle la demande a été rejetée conformément au paragraphe 28.3 soit confirmée.

 

 

 

M. Wilson                     J. Cavar                     S. MacNeil

Membre                       Membre                       Membre

 

 

 

Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission d’appel des

brevets. En conséquence, je refuse d’octroyer un brevet au regard de cette

demande. En vertu de l’article 41 de la Loi sur les brevets, le demandeur

dispose d’un délai de six mois pour interjeter appel de ma décision devant la Cour

fédérale du Canada.

 

 

David Tobin

Commissaire aux brevets

 

Fait à Gatineau (Québec),

le 13e janvier 2006

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