Commissioner’s Decision # 1267
Décision du commissaire nº 1267
TOPIC: D02
SUJET : D02
Application No.: 2,303,601 (Class A61K-9/12)
Demande nº : 2,303,601 (Classe A61K-9/12)
RÉSUMÉ DE LA DÉCISION DU COMMISSAIRE
D.C. 1267 Demande nº 2,303,601
Statut de demande complémentaire
L’examinateur a refusé d’accorder à la présente demande le statut de demande complémentaire parce que les revendications visaient une invention non divulguée dans la demande originale. La Commission a été du même avis que l’examinateur.
La demande a été renvoyée à l’examinateur pour qu’il en poursuive l’examen à titre de demande ordinaire.
BUREAU DES BREVETS DU CANADA
DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS
La demande de brevet nº 2,303,601 ayant été refusée en vertu du paragraphe 30(4) des Règles sur les brevets, la demanderesse a demandé la révision de la décision finale de l’examinateur. La Commission d’appel des brevets et le commissaire aux brevets ont révisé la demande. Les conclusions de la Commission et la décision du commissaire sont les suivantes :
Agent de la demanderesse
ROBIC
Centre CDP Capital
1001, square Victoria
Bloc E, 8e étage
Montréal (Québec)
H2Z 2B7
La présente décision vise une demande de révision adressée au commissaire aux brevets à l’égard de la décision finale du commissaire aux brevets relative à la demande de brevet nº 2,303,601, déposée le 14 avril 2000 et intitulée [traduction] « AÉROSOLS MÉDICINAUX ». La demanderesse est Riker Laboratories, Inc., cessionnaire des inventeurs Tarlochan S. Purewal et David J. Greenleaf. La demande nº 2,303,601 est une demande complémentaire de la demande de brevet canadien nº 2,004,598, déposée le 5 décembre 1989 et pour laquelle le brevet a été délivré le 7 novembre 2000.
Le 5 janvier 2001, l’examinateur chargé de l’examen a rendu une décision finale de refus du statut de demande complémentaire. Selon la décision finale, l’abrégé, la description et les revendications contiennent un objet qui n’est pas divulgué dans le mémoire descriptif de la demande originale (devenue le brevet nº 2,004,598).
La demanderesse a répondu à la décision finale le 4 juillet 2001 en faisant valoir qu’il s’agit d’une demande complémentaire correcte et que la décision finale devrait être annulée. Lorsque la Commission d’appel des brevets a contacté l’agent de la demanderesse au sujet d’une audience, celui-ci a demandé que la Commission révise le dossier et que le commissaire rende sa décision sans audience.
La demande de brevet (maintenant devenue le brevet) nº 2,004,598 décrit et revendique une formulation en aérosol à 4 composantes, essentiellement sans chlorofluorocarbures, contenant un médicament, du 1,1,1,2-tétrafluoroéthane, un agent tensioactif ainsi qu’au moins un composant de polarité plus élevée que le 1,1,1,2-tétrafluoroéthane et miscible avec lui. La demande nº 2,303,601 (la demande complémentaire) décrit et revendique une bombe aérosol munie d’une valve doseuse contenant une formulation aérosol à 3 composantes, sans chlorofluorocarbures, composée d’un médicament, de 1,1,1,2-tétrafluoroéthane ainsi que d’un composant de polarité plus élevée que le 1,1,1,2-tétrafluoroéthane. La formulation revendiquée dans la demande complémentaire ne comporte pas l’agent tensioactif présent dans la formulation de la demande originale.
La décision finale indique notamment ce qui suit :
[traduction] L’objet de la présente demande complémentaire dans l’abrégé, à la page 2a de la description et dans les revendications 1 à 4 comporte un objet nouveau non divulgué dans le mémoire descriptif original de la demande originale nº 2,004,598.
Le nouvel objet de la présente demande complémentaire a fait l’objet d’une décision finale au sujet de la demande originale nº 2,004,598. Dans cette décision finale, il a été refusé en vertu du paragraphe 27(4) de la Loi sur les brevets au motif qu’il était incomplet, ne définissait pas d’éléments suffisants pour l’application appropriée de l’invention alléguée, avait une portée plus large que les enseignements donnés dans la description en vertu du paragraphe 138(2) des Règles sur les brevets et ajoutait un nouvel objet en regard de l’article 38.2 de la Loi sur les brevets. L’abrégé, la page 2a et les revendications 1 à 4 contiennent un nouvel objet non divulgué dans la demande de brevet originale nº 2,004,598 et, par conséquent, le statut de demande complémentaire est refusé.
Quand on lit l’ensemble de la divulgation, accompagnée des exemples et de ce qui était considéré comme classique à l’époque, la conclusion est celle d’un ensemble à 4 composantes comportant un agent tensioactif classique. Le mémoire descriptif n’envisage pas l’absence de l’agent tensioactif classique dans la réalisation d’une suspension stable de particules médicamenteuses.
Dans sa réponse à la décision finale, la demanderesse a déclaré notamment :
[traduction] Il est bien établi en droit que tout ce qu’un demandeur souhaite revendiquer doit se fonder sur le mémoire descriptif original de la demande de brevet. Il n’est toutefois pas prescrit que le mémoire descriptif original divulgue comme tel ce qui est revendiqué et en donne des exemples. Ce qui est établi, c’est plutôt que le demandeur [traduction] « n’est pas tenu de limiter ses revendications à ce qui a été spécifiquement divulgué dans le mémoire descriptif mais, à l’intérieur de la portée de son invention, il peut la revendiquer aussi largement que le permettrait l’interprétation normale de la personne versée dans l’art qui lit l’ensemble du mémoire descriptif » (Riddell c. Patrick Harrison & Co. Ltd. (1957) 28 C.P.R. 85 à la page 125).
La réponse à la décision finale renvoie aussi à des extraits spécifiques de la demande originale (2,004,598) qui, selon la demanderesse, appuient la formulation d’un aérosol formé de 3 composantes :
[traduction][...] on peut se référer aux lignes 1 à 7 et 14 à 17 de la page 3 de la description originale. Dans cette partie de la description originale, il n’est pas fait mention de l’usage d’un agent tensioactif. L’invention est plutôt divulguée comme reposant sur la découverte de la possibilité d’employer le propulseur 134 dans une formulation aérosol adaptée à l’inhalothérapie, lorsqu’il est utilisé en combinaison avec un adjuvant. Par la suite, à la page 4 et aux pages suivantes, il est expliqué que [traduction] « l’usage du propulseur 134a associé à un médicament en mélange binaire ou combiné à un agent tensioactif classique [...] ne produit pas une formulation dotée des propriétés adaptées à un usage avec un inhalateur pressurisé ». Puis, il [traduction] « a été établi qu’en [...] choisissant un composant approprié de polarité plus élevée que celle du propulseur 134, on peut préparer avec le propulseur 134a des formulations aérosol stables » (voir les lignes 5 à 15 de la page 4 de la description originale).
Comme on peut le remarquer, cette partie de la description originale ne divulgue pas qu’un agent tensioactif doive nécessairement être utilisé. La conjonction [traduction] « ou », soulignée ci‑dessus, indique qu’il s’agit seulement d’une option (même si elle a été effectivement décrite dans l’ensemble des revendications présenté initialement lors du dépôt de la demande originale nº 2,004,598).
La demanderesse dit également :
[traduction] Les lignes 5 à 9 de la page 4, quand on les lit avec attention, sont très précises en ce qu’elles mentionnent simplement, dans leur formulation, le fait que des mélanges binaires du 134a et d’un médicament ou d’un agent tensioactif « classique » ont des propriétés ne convenant pas à un usage dans des « inhalateurs » pressurisés. Cela n’équivaut pas à une affirmation portant que l’« invention » elle-même nécessite le propulseur 134a, un médicament, un adjuvant polaire et un agent tensioactif. Au contraire, il serait clair aux personnes versées dans l’art, par exemple, que des agents tensioactifs non classiques peuvent être utilisés et aussi que des formulations à 3 composantes comme celle décrite à la revendication 1 (soit le propulseur 134a, un médicament et un adjuvant polaire) ne sont pas exclues
et elle ajoute plus loin que
[traduction] toute personne versée dans l’art qui lit l’ensemble du mémoire descriptif comprendrait que la présence de l’agent tensioactif dans la formulation aérosol est d’un grand intérêt mais qu’elle n’est pas vraiment essentielle, car l’invention ne porte pas sur l’usage d’un agent tensioactif, pratique relativement courante, mais bien sur l’usage d’un adjuvant dont la nature est spécifiquement divulguée.
La question que doit résoudre la Commission est de savoir si le mémoire descriptif de la demande originale (devenue le brevet) nº 2,004,598 peut fonder une formulation aérosol à 3 composantes. Dans la négative, la demande nº 2,303,601 n’est pas recevable comme demande complémentaire.
La demanderesse a fait référence à des extraits des pages 3 et 4 du mémoire descriptif 2,004,598 à l’appui de formulations ne contenant pas d’agent tensioactif. Elle a déclaré que les lignes 1 à 7 et 14 à 17 de la page 3 [traduction] « ne font pas référence à l’usage d’un agent tensioactif ». Toutefois, ces extraits ne visent pas la formulation elle-même mais plutôt la découverte du fait que le propulseur 134a peut être utilisé dans des formulations adaptées à l’inhalothérapie quand il est employé en combinaison avec un adjuvant de polarité plus élevée. Cette combinaison peut alors être utilisée dans des formulations avec d’autres composantes, comme l’indiquent les lignes 14 à 19 de la page 3 :
[traduction] La combinaison d’un ou de plusieurs de ces adjuvants avec le propulseur 134a assure un système propulseur qui possède des propriétés comparables à celles des systèmes propulseurs reposant sur les CFC, ce qui permet l’usage d’agents tensioactifs et d’additifs connus dans les formulations pharmaceutiques et dans les composantes classiques des valves. (Non souligné dans l’original.)
Il n’y a pas de divulgation d’une formulation à 3 composantes formée d’un médicament, du propulseur 134a et d’un adjuvant de polarité plus élevée que celle du propulseur 134a.
Le texte dont il est fait mention à la page 4 du mémoire descriptif (lignes 5 à 15) ne divulgue pas de formulations inventives mais bien des formulations qui ne sont pas adaptées à un usage avec des inhalateurs pressurisés. Aussi l’usage du propulseur 134a et d’un médicament en mélange binaire, avec ou sans agent tensioactif, ne produit pas une formulation dont l’usage est adapté à des inhalateurs pressurisés. Encore une fois, il n’y a pas de divulgation, comme variantes de l’invention, de formulations à 3 composantes qui ne contiennent pas un agent tensioactif.
À la page 2 du mémoire descriptif 2,004,598, l’invention est décrite en ces termes :
[traduction] On sait maintenant que le 1,1,1,2-tétrafluoroéthane possède des propriétés particulièrement adaptées à un usage de propulseur dans les aérosols médicinaux quand il est utilisé en combinaison avec un agent tensioactif et un adjuvant de polarité plus élevée que la sienne.
La présente invention fournit une formulation aérosol composée d’un médicament, de 1,1,1,2‑tétrafluoroéthane, d’un agent tensioactif et d’au moins un composé de polarité plus élevée que le 1,1,1,2-tétrafluoroéthane.
La formulation comporte 4 composantes, dont un agent tensioactif. Rien ne laisse entendre que l’agent tensioactif est facultatif. Aux pages 2a et 2b, d’autres variantes de l’invention sont divulguées. Toutes définissent une formulation aérosol à 4 composantes, dont un agent tensioactif.
Les lignes 16 à 24 de la page 4 décrivent l’avantage que présente l’usage d’un composé de polarité plus élevée que le 1,1,1,2-tétrafluoroéthane (aussi appelé propulseur 134a) :
[traduction] L’ajout au propulseur 134a d’un composé de polarité plus élevée que celle du propulseur 134a produit un mélange apte à dissoudre des quantités supérieures d’agent tensioactif par rapport à la solubilité de l’agent tensioactif dans le seul propulseur 134a. La présence de quantités supérieures d’agent tensioactif solubilisé permet la préparation de suspensions stables et homogènes des particules médicamenteuses. Elle peut également faciliter l’obtention de formulations de solutions stables pour certains médicaments.
Cet extrait ne suggère aucunement que des formulations sans agent tensioactif sont envisagées. En fait, de l’avis de la Commission, c’est exactement le contraire, la présence d’un composé de polarité plus élevée que celle du propulseur 134a permettant d’obtenir des [traduction] « quantités supérieures d’agent tensioactif » dans la formulation. L’extrait laisse également entendre que l’agent tensioactif peut stabiliser la formulation. Aux lignes 6 à 8 de la page 8, la demanderesse dit précisément :
[traduction] Les formulations aérosol comprennent un agent tensioactif pour stabiliser la formulation et lubrifier les composantes de la valve.
Comme l’examinateur l’a signalé dans la décision finale, tous les exemples (24 au total) décrivent une formulation à 4 composantes, dont un agent tensioactif. Il n’y a pas d’exemples de formulations sans agent tensioactif.
La Commission n’est pas persuadée que le mémoire descriptif du brevet nº 2,004,598 divulgue des formulations inventives ne contenant pas d’agent tensioactif. En réalité, le mémoire descriptif vise des formulations à 4 composantes comportant un agent tensioactif. La Commission recommande par conséquent de refuser le statut de demande complémentaire à la demande nº 2,303,601.
M. Gillen M. Wilson
Président Membre
Je partage les conclusions et la recommandation de la Commission d’appel des brevets. Par conséquent, je refuse d’accepter le statut de demande complémentaire de la demande nº 2,303,601. En vertu de l’article 41 de la Loi sur les brevets, la demanderesse a six (6) mois pour interjeter appel de ma décision à la Cour fédérale du Canada.
David Tobin
Commissaire aux brevets
Fait à Gatineau (Québec),
le 17 août 2006