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Décision du commissaire n°1230

Commissioner's Decision #1230

                                                                                                       

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SUJET :   J-10

TOPIC:   J-10

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Demande n° 2,084,989

(Classification internationale: G06F-007/548)

Application No: 2,084,989

(International Classification:G06F-007/548)


 

D.C. n° 1230

 

 

SOMMAIRE DE LA DÉCISION DU COMMISSAIRE

 

 

D.C. n° 1230     Demande n° 2,084,989

 

 

 

 

Objet non brevetable

 

 

L’examinateur a rejeté la demande sur le fondement de l’article 2 et du paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets au motif que l’invention revendiquée n’est qu’un ordinateur à vocation universelle programmé pour calculer des fonctions trigonométriques inverses. La Commission a décidé que la demande divulgue et revendique un appareil conçu spécifiquement pour exécuter la nouvelle méthode de la demanderesse pour le calcul des fonctions trigonométriques inverses.

 

La demande a été renvoyée à l’examinateur pour qu’il en poursuive l’instruction.


D.C. #1230 

 

 

 

 

 

 

 

BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

DÉCISION DU COMMISSAIRE

 

 

 

 

 

La demande n° 2,084,989 ayant été rejetée en vertu de la règle 47(2) du Règlement sur les brevets, la demanderesse a demandé la révision de la décision finale de lexaminateur. Le rejet a ensuite été examiné par la Commission dappel des brevets et par le commissaire. Les conclusions de la Commission et la décision du commissaire ont la teneur suivante :

 

 

 

 

 

 

 

 

Représentant de la demanderesse

 

Gowling Strathy and Henderson

C.P. 466, Succursale D

Ottawa (Ontario)

K1P 1C3


 

Il sagit dune demande de révision par le commissaire de la décision finale de lexaminateur datée du 25 janvier 1995 et portant sur la demande de brevet n° 2,084,989 (classification internationale G06F-007/548) déposée le 24 juin 1991 et intitulée « DISPOSITIF POUR ÉVALUER LES FONCTIONS TRIGONOMÉTRIQUES INVERSES ». La demanderesse est Motorola Inc., cessionnaire des inventeurs Brett L. Lindsley et Darleen J. Stockley. Dans la décision finale, lexaminateur a rejeté toutes les revendications de la demande, ainsi que la demande au complet, pour absence dobjet brevetable sur le fondement de larticle 2 et du paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets. Une audience a eu lieu le 26 novembre 1997; la demanderesse était alors représentée par M. Gary ONeil, de Gowling, Strathy & Henderson.

 

La demande porte sur un appareil qui traite une valeur dentrée pour déterminer une valeur de sortie qui est la fonction trigonométrique inverse de la valeur dentrée. La figure 1A donnée ci-dessous présente un schéma fonctionnel de la réalisation dans un matériel informatique de linvention.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La revendication 6, qui constitue la revendication indépendante la plus large, est ainsi conçue :

 

Un dispositif servant à convertir une valeur dentrée en au moins une valeur de sortie qui est au moins une valeur dune fonction trigonométrique inverse et qui est une combinaison dune valeur dapproximation linéaire et dau moins une valeur de correction, ce dispositif comportant :

A) un dispositif de modification qui réagit à lintroduction de la valeur dentrée pour déterminer une valeur dapproximation de cette valeur dentrée, cette valeur dapproximation étant sélectionnée dans un ensemble de valeurs prédéterminé qui constitue un groupe de valeurs prédéterminées par des algorithmes darrondissement sélectionnés;

B) un dispositif générateur de fonctions comportant une première mémoire morte (ROM), qui est couplé au dispositif de modification pour déterminer une valeur intermédiaire;


 

C) un dispositif générateur de facteurs de correction qui réagit à lintroduction de la valeur dentrée et est couplé au dispositif de modification pour déterminer au moins une valeur de correction; et

D) un premier dispositif combinateur couplé au dispositif générateur de fonctions et au dispositif générateur de facteurs de correction, qui est utilisé pour combiner lapproximation intermédiaire et la ou les valeurs de correction de façon à obtenir au moins une valeur dune fonction trigonométrique inverse de la valeur dentrée, ce premier dispositif combinateur comportant au moins un quatrième dispositif daddition servant à déterminer une quatrième somme de la ou des valeurs dapproximation intermédiaires et dune troisième somme avec signe, cette quatrième somme étant substantiellement une valeur au moins dune fonction trigonométrique inverse de la valeur dentrée et, plus exactement , substantiellement lune au moins des fonctions arc sinus, arc cosinus et arc tangente de la valeur dentrée.

 

Dans sa décision finale, lexaminateur a rejeté toutes les revendications, ainsi que la demande elle-même, en disant notamment :

 

[TRADUCTION]Le rejet de toutes les revendications ainsi que du reste de la demande est confirmé au motif de labsence dobjet brevetable sur le fondement de larticle 2 et du paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets.

 

Lapplication enseigne une technique mathématique pour lévaluation des fonctions trigonométriques inverses.

 

Ce qui est revendiqué, cest un appareil de calcul qui ne comporte pas de caractéristiques nouvelles, car il ne réalise que des fonctions particulières dun ordinateur à vocation universelle avec le but de calculer des fonctions trigonométriques inverses.

 

Le fait que la demanderesse présente linvention alléguée sous la forme dun matériel informatique spécialisé ne rend pas la découverte plus brevetable. La réalisation dans un matériel informatique nest que lune de plusieurs réalisations possibles.

 

..........

 

Il est évident pour tout homme du métier que lenseignement de linvention alléguée consiste en un algorithme mathématique qui est revendiqué comme dispositif. Cest cet algorithme mathématique que la demande enseigne et qui a de fait été découvert. Quil soit revendiqué comme dispositif - ou peut-être comme programme dordinateur - nest pas pertinent pour répondre à la question « Quest-ce qui, selon la demande, a été découvert ... »

 

Dans sa réponse à la décision finale, la demanderesse passe en revue de façon détaillée l’évolution du droit concernant la brevetabilité des inventions reliées à l’ordinateur tel qu’il ressort des décisions de divers tribunaux américains. Il a été relevé que la seule décision de la jurisprudence canadienne portant sur les inventions reliées à l’ordinateur, l’arrêt Schlumberger c. Commissaire des brevets, 56 C.P.R. 2d (p. 204), n’est pas pertinente dans la présente affaire.

 

La demanderesse a notamment fait valoir :

 

[TRADUCTION] Lexaminateur cite la décision de la Cour dappel fédérale dans laffaire Schlumberger c. Commissaire des brevets, 56 C.P.R. 2d (p. 204) et semble sappuyer sur celle-ci. Ainsi quil sera exposé de façon plus détaillée, cette décision doit être considérée comme non pertinente en lespèce en ce quelle ne porte que sur la question de la brevetabilité dun programme informatique en soi.


 

...........

 

.... La première et jusquà maintenant la seule décision qui puisse nous servir de guide dans ce domaine est larrêt de la Cour dappel fédérale Schlumberger Canada Ltd. c. Commissaire des brevets, (56 C.P.R.) (2d) 204.  La demande dans laffaire Schlumberger portait dabord sur la production de données utiles à lexploration géologique. Selon ce procédé, les mesures dentrée provenant des trous de forage étaient enregistrées sur des bandes magnétiques, puis transmises à un ordinateur programmé selon les formules mathématiques prévues. Lordinateur convertissait ces informations en informations utiles sous forme de graphiques, figures ou tableaux qui pouvaient être lus par les géologues.

 

..........

 

Il est tout à fait évident, sur la base de ce qui précède, que la présente affaire est diamétralement opposée, en ce qui concerne les faits, à laffaire Schlumberger citée plus haut, dans laquelle on cherchait à obtenir la protection pour une méthode dutilisation dun ordinateur dune manière déterminée en vue daccomplir certains calculs mathématiques, le résultat final consistant simplement en nombres utiles pour permettre à des géologues qualifiés de prendre certaines décisions. À lopposé de laffaire Schlumberger, la présente demande décrit et revendique un appareil qui, considéré comme un tout, est nouveau et utile, ainsi que lexige larticle 2, et qui nest pas un « simple principe scientifique ou conception théorique », pour reprendre les termes du paragraphe 27(3). Les revendications de la demanderesse ne font pas obstacle à lutilisation par dautres dune forme quelconque de programme ou dalgorithme en soi; elles cherchent seulement à faire obstacle à lutilisation du dispositif exposé dans les revendications.

 

La Commission doit donc décider si linvention de la demanderesse est brevetable selon larticle 2 et le paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets.

 

Le terme « invention » reçoit, à larticle 2 de la Loi sur les brevets, la définition suivante :

 

Toute réalisation, tout procédé, toute machine, fabrication ou composition de matières, ainsi que tout perfectionnement de lun deux, présentant le caractère de la nouveauté et de lutilité.

 

Le paragraphe 27(3) de la Loi sur les brevets était, au moment de la décision finale, ainsi conçu :

 

Il ne peut être délivré de brevet pour une invention dont lobjet est illicite, non plus que pour de simples principes scientifiques ou conceptions théoriques.

 

La Commission a revu lensemble de la demande pour déterminer ce qui a été découvert. Selon la divulgation de la demanderesse, linvention alléguée porte sur une méthode et un dispositif permettant de traiter une valeur dentrée pour obtenir de manière rapide et efficace une valeur de sortie qui est la fonction trigonométrique inverse de la valeur dentrée. Au cours de linstruction, la demande a été modifiée pour retirer du titre le mot « méthode » et toutes les revendications se rapportent à un dispositif.

 


Au terme de cet examen, la Commission a décidé que la demanderesse a découvert un algorithme servant au calcul de la fonction trigonométrique inverse d’un nombre, a converti cet algorithme en une série d’étapes et a finalement mis au point un dispositif permettant de réaliser cette série d’étapes.

 

Il est généralement accepté quil nest pas possible dobtenir un brevet contenant des revendications portant sur un algorithme en tant que tel. Une méthode qui ne fait rien qu’exposer les étapes nécessaires pour résoudre un algorithme n’est pas brevetable.

 

La revendication d’un appareil qui consiste exclusivement en une série d’énoncés dispositif et fonction est habituellement considérée comme n’étant rien de plus qu’une revendication de méthode « déguisée » et si la méthode elle-même n’est pas brevetable, ce type d’appareil n’est pas non plus brevetable.

 

Comme le montre la formulation de la revendication 6, l’appareil divulgué et revendiqué dans la demande est plus que simplement une série d’énoncés dispositif et fonction. Il comprend, dans la section B), un dispositif générateur de fonctions qui se compose d’une mémoire morte, couplée à un dispositif de modification. Il s’agit là d’un élément spécifique de matériel informatique et, en tant que telle, cette revendication est nécessairement limitée à une configuration spécifique d’au moins un élément physique ainsi que de certains éléments qui sont ordinairement des composantes ordinaires d’un ordinateur bien connu, programmés pour exécuter les fonctions désirées.

 

La Commission a conclu que la demanderesse a inventé un dispositif qui est spécifiquement adapté à exécuter la méthode de résolution des algorithmes qu’elle a élaborée. Ce dispositif, s’il contient beaucoup d’énoncés dispositif et fonction, comprend aussi au moins une pièce spécifique de matériel informatique qui est un élément physique réel. En conséquence, la Commission croit que les revendications de la demande ne portent pas que sur un simple principe scientifique ou conception théorique. La demanderesse ne cherche pas à empêcher d’autres personnes d’utiliser la méthode elle-même, mais à empêcher d’autres personnes d’utiliser le dispositif spécifique qui est revendiqué.


 

 

En résumé, la Commission recommande que le rejet de toutes les revendications et de la demande elle-même soit retiré et que la demande soit renvoyée à l’examinateur pour la poursuite de l’instruction.

 

 

 

 

P.J. Davies,             M. Howarth,                        M. Wilson,

président                membre                             membre

 

 

 

 

 

J’accepte les conclusions et la recommandation de la Commission d’appel des brevets. En conséquence, je renvoie la demande à l’examinateur pour la poursuite de l’instruction conformément à la présente décision.

 

 

 

 

 

 

S. Batchelor

Commissaire aux brevets

 

Hull (Québec),

le 3 novembre 1998

 

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