Commissioner's Decision #1238
Décision du Commissaire no 1238
TOPIC: F00; ;F20; OO
SUJET: F00; F20; OO
Application No: 616,544
Demande no : 616 544
D.C. 1238
DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS
D.C. 1238 ....Demande no 616 544 (F00; F20; OO)
Les revendications de la demande ont été rejetées parce qu’elles ne présentent pas le caractère de nouveauté prescrit par l’article 2 de la Loi sur les brevets.
La demande dévoile des polypeptides exhibant une activité érythropoïétique, ainsi que des procédés pour les préparer par des méthodes de génie génétique. Les revendications 1 à 4 de la demande ont été rejetées parce que l’objet dévoilé était évident compte tenu de deux renvois cités. La Commission a recommandé d’infirmer le rejet des revendications fondé sur l’évidence et de renvoyer la demande à l’examinateur pour qu’il en poursuive l’examen, recommandation qu’a acceptée le Commissaire aux brevets.
BUREAU DES BREVETS DU CANADA
DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS
Les revendications de la demande de brevet no 616 544 ayant été rejetées en application du paragraphe 45(2) des Règles sur les brevets, le demandeur a demandé la révision de la décision finale de l’examinateur. La Commission d’appel des brevets et le Commissaire aux brevets ont examiné le rejet. Voici les conclusions de la Commission et la décision du Commissaire :
Agent du demandeur
Robic
55, rue St-Jacques
Montréal (Québec)
H2Y 3X2
La présente décision porte sur une demande de révision de la décision finale de l’examinateur par le Commissaire aux brevets en ce qui concerne la demande de brevet no 616 544 qui a été déposée le 22 octobre 1992 comme demande complémentaire à la demande de brevet no 540 234 déposée le 22 juin 1987. Le demandeur est le Board of Regents of the University of Washington, cessionnaire de l’inventeur Jerry S. Powell, et l’invention s’intitule [traduction] « GÈNE DE L’ÉRYTHROPOïÉTINE HUMAINE : NIVEAU D’EXPRESSION ÉLEVÉ DANS DES CELLULES MAMMALIENNES TRANSFECTÉES DE FAÇON STABLE ». L’examinateur responsable a rendu une décision finale le 28 novembre 1995, rejetant les revendications à la lumière de deux renvois cités. Le demandeur a négligé de répondre à la décision finale avant la date d’échéance mais, le 28 mai 1997, a sollicité le rétablissement de la demande, qui lui a été accordée. Une réponse supplémentaire a été soumise le 8 septembre 1997, demandant que l’examinateur retire sa décision de rejet des revendications, et la demande a alors été soumise à l’examen de la Commission.
L’invention concerne en général le domaine du génie génétique, en particulier l’expression de glycoprotéines par des gènes recombinants et, plus particulièrement, l’expression de fortes concentrations d’érythropoïétine humaine biologiquement active par des cellules transfectées de façon stable. Les revendications de cette demande complémentaire concernent un polypeptide exhibant une activité érythropoïétique, celui-ci étant le produit de l’expression d’une molécule de polynucléotides comprenant un fragment d’ADN génomique humain qui consiste essentiellement en une séquence de nucléotides correspondant à un fragment de restriction Apa I de 2,4 kb d’un gène de l’érythropoïétine humaine ou à une séquence qui lui est complémentaire. La revendication 1 qui est représentative des revendications rejetées est la suivante :
[traduction] 1. Un polypeptide exhibant une activité érythropoïétique, celui-ci étant le produit de l’expression d’une molécule de polynucléotides comprenant un fragment de l’ADN génomique humain qui consiste essentiellement en une séquence de nucléotides correspondant à un fragment de restriction Apa I de 2,4 kb d’un gène de l’érythropoïétine humaine ou à une séquence qui lui est complémentaire.
Dans sa décision finale, l’examinateur a refusé les revendications 1 à 4 compte tenu de deux renvois en déclarant, en partie, que :
Renvois soumis de nouveau
Lee-Huang, S. PNAS 81:2708-2712 (Mai 1984)
Jacobs, K., et. al. Nature 313:806-810 (Fév. 1985)
Les revendications de cette demande sont rejetées à cause de leur manque de nouveauté en vertu de l’article 2 de la Loi sur les brevets; elles revendiquent en effet des polypeptides existants et connus. L’érythropoïétine est ancienne et bien connue dans le domaine comme en font foi Lee-Huang et Jacobs ci-dessus.
Non seulement ces renvois démontrent-ils que le polypeptide est ancien, mais aussi qu’il a été cloné et exprimé avec succès par un recombinant. En fait, la séquence d’ADN dévoilée et utilisée par Jacobs ne diffère de celle de la présente demande que par la région non codante. En d’autres mots, les séquences de protéines exprimées par le recombinant seraient identiques. Le demandeur ne réussit pas à démontrer dans la demande telle que déposée que l’érythropoïétine qu’il a produite diffère d’une façon quelconque de celle déjà dévoilée. Le demandeur est renvoyé de nouveau aux pages 10 (de la ligne 36 jusqu’à la page 11) et 11 (lignes 17 à 22) de la divulgation où il démontre précisément que le polypeptide de la présente demande possède toutes les propriétés attendues de l’érythropoïétine humaine.
Dans ses arguments du 21 janvier 1994, le demandeur déclare que la méthode d’utilisation du fragment d’ADN Apa I, qui n’est pas démontrée dans des inventions antérieures, donne un produit différent, bien que nulle part dans la demande telle que déposée les différences alléguées ne soient démontrées. Tel que cité dans la dernière décision de l’examinateur, des méthodes de fabrication alléguées comme étant nouvelles ne donnent pas la brevetabilité aux produits anciens et connus. Pour guider le demandeur, l’examinateur le renvoie à la Section 8.04 du Recueil des pratiques du Bureau des brevets, selon laquelle un demandeur est tenu de distinguer son nouveau produit de tous les autres produits en présentant des revendications distinctes et explicites à cet effet. Comme on peut le voir dans la demande qui a été déposée, le demandeur n’a pas réussi à démontrer que la méthode de fabrication revendiquée comme étant nouvelle donne une quelconque propriété nouvelle au produit et a donc échoué à faire la distinction entre le produit et celui déjà existant.
La Commission doit donc se demander si les demandes soumises par le demandeur dans sa lettre du 21 janvier 1994 doivent ou non être considérées et, le cas échéant, si le polypeptide revendiqué dans les revendications 1 à 4 est évident compte tenu des inventions antérieures citées.
En rendant sa décision finale, l’examinateur est d’avis que les demandes du demandeur du 21 janvier 1994 doivent être ignorées étant donné que, selon elle, seule la divulgation originale peut être prise en compte. La divulgation semble indiquer que le polypeptide préparé par le demandeur est identique à l’érythropoïétine d’origine naturelle et, pour ces motifs, l’examinateur a rejeté les revendications présentes. Dans sa tentative pour répondre aux objections de l’examinateur, le demandeur a soumis une analyse des deux renvois cités parmi d’autres documents pour montrer que le polypeptide qu’il revendique présente en fait une structure chimique différente de l’érythropoïétine d’origine naturelle.
En premier lieu, en considérant la décision finale de l’examinateur, la Commission n’est pas d’accord avec la suggestion d’ignorer les demandes du demandeur du 21 janvier 1994 concernant une analyse des renvois et sa soumission de documents indiquant que le polypeptide préparé par le procédé du demandeur est nouveau. Le demandeur tente après tout de réagir au rejet par l’examinateur des revendications parce qu’elles concernent des produits anciens et connus. La Commission a par conséquent pris en compte les pièces et les arguments présentés par le demandeur le 21 janvier 1994, ainsi que la soumission du 8 septembre 1997.
En second lieu, la Commission, après avoir examiné les demandes du demandeur, est convaincue que le polypeptide revendiqué par le demandeur est en fait nouveau et n’est pas rendu évident par les renvois cités individuellement ou en combinaison.
Par conséquent, la Commission considère que le rejet des revendications pour motif d’absence de caractère de nouveauté parce que concernant des produits anciens et bien connus soit retiré.
En tirant cette conclusion, la Commission a pris en compte le test juridictionnel visant à démontrer l’évidence établi dans la décision de la Cour d’appel fédérale dans Beloit Canada Ltd. et al. v. Valmet Oy 8 C.P.R. (3d) 289, à la page 294, à savoir :
[Traduction] Le test visant à démontrer l’évidence ne consiste pas à demander ce que des inventeurs compétents ont ou auraient fait pour régler le problème. Les inventeurs sont inventifs par définition. Le test classique pour vérifier l’évidence est illustré par le technicien qualifié dans le domaine mais n’ayant aucune étincelle d’inventivité ni d’imagination; un parangon de déduction et de dextérité, entièrement dépourvu d’intuition; un triomphe de l’hémisphère gauche sur le droit. Il faut se demander si cette créature mythique (le commun des mortels de la loi sur les brevets) en serait venue, à la lumière des inventions existantes et de connaissances générales communes à la date revendiquée de l’invention, directement et sans difficulté à la solution exposée dans le brevet. C’est un test très difficile à réussir.
La Commission recommande donc de retirer le rejet des anciennes revendications 1 à 4 et de renvoyer la demande à l’examinateur pour un examen plus approfondi cohérent avec la recommandation.
P.J. Davies M. Howarth
Président Membre
Je souscris à la recommandation de la Commission de retirer le rejet des anciennes revendications 1 à 4 et de renvoyer la demande à l’examinateur pour un examen plus poussé cohérent avec la recommandation de la Commission.
A. McDonough
Commissaire aux brevets par intérim
Fait à Hull (Québec),
ce 11e jour de mai 1999