Commissioner's Decision #1236
Décision du Commissaire #1236
TOPIC: OO
SUJET: OO
Application No: 579,048
Demande no: 579,048
D.C. 1236
SOMMAIRE DE LA DÉCISION DU COMMISSAIRE
D.C. 1236 ....Demande no 579,048 (OO)
Demande rejetée parce que l’objet de l’invention divulgé est évident compte tenu de plusieurs renvois cités.
La demande vise des compositions pouvant être utiles pour réduire ou prévenir le choc causé par la résine, c’est-à-dire l’augmentation non voulue de viscosité à la suite de l’addition de certaines résines réactives à des adhésifs amylacés alcalins pour carton ondulé, contenant du bore. La demande est rejetée parce que l’objet de l’invention divulgé est évident compte tenu de plusieurs renvois cités. La Commission a recommandé d’infirmer le rejet de la demande fondé sur l’évidence, recommandation acceptée par le commissaire aux brevets.
BUREAU DES BREVETS DU CANADA
DÉCISION DU COMMISSAIRE AUX BREVETS
La demande de brevet no 579,048 ayant été rejetée en application du paragraphe 45(2) des Règles sur les brevets, le demandeur a demandé la révision de la décision finale de l’examinateur. La Commission d’appel des brevets et le commissaire aux brevets ont examiné le rejet. Voici les conclusions de la Commission et la décision du commissaire.
Agent du demandeur
Barrigar et Moss
81, rue Metcalfe, 7e étage
Ottawa (Ontario)
K1P 6K7
La présente décision porte sur la demande de révision de la décision finale de l’examinateur, faite au commissaire aux brevets, relativement à la demande de brevet no 579,048 qui a été déposée le 30 septembre 1988. Le demandeur est H.B. Fuller Licensing & Financing, Inc., cessionnaire de l’inventeur Stephen M. Willging et l’invention est intitulée « ADHÉSIF POUR CARTON ONDULÉ, RÉSISTANT À L’HUMIDITÉ, À VISCOSITé SUBSTANTIELLEMENT STABLE ». L’examinateur compétent a rendu une décision finale le 16 juin 1995, rejetant la demande parce que l’objet de l’invention divulgué manquait de conception originale compte tenu de plusieurs renvois cités, et le demandeur a répliqué le 18 décembre 1995 en demandant que le rejet soit examiné par le commissaire aux brevets et qu’une audition orale soit tenue le cas échéant.
L’invention porte sur la prévention du choc causé par la résine, c’est-à-dire l’augmentation non voulue de viscosité à la suite de l’addition de certaines résines réactives à des adhésifs amylacés alcalins pour carton ondulé, contenant du bore. Plus particulièrement, l’invention porte sur un adhésif aqueux pour carton ondulé préparé à partir de constituants limitant l’augmentation non voulue de viscosité durant les étapes de préparation qui comprennent l’étape d’addition de la résine à la base amylacée aqueuse. Le demandeur a constaté que l’utilisation d’un hydrocarbure hydroxylé, par exemple un alcool en C1-C3, un mono-, di- ou trisaccharide ou un polyol cyclique ou linéaire, permet d’obtenir des adhésifs présentant une augmentation de viscosité moindre durant la fabrication, ce qui facilite leur utilisation sans sacrifier aucune de leurs propriétés souhaitables. Les hydrocarbures hydroxylés appropriés sont le méthanol, l’éthanol, le propanol, l’éthylèneglycol, le propylèneglycol, le glycérol, le glucose, ainsi que d’autres composés semblables. Voici les revendications indépendantes 1 et 5 de la demande, qui sont représentatives des revendications de la demande :
1. Une méthode de préparation du carton ondulé comprenant l’application d’un revêtement d’adhésif constitué :
(a) d’une dispersion aqueuse d’amidon gélatinisé;
(b) de particules d’amidon dispersées dans la dispersion aqueuse;
(c) d’environ 0,1 à 5 parties d’une résine acétone-formaldéhyde;
(d) d’environ 0,3 à 1 partie d’un hydroxyde d’un métal alcalin;
(e) d’environ 0,05 à 0,5 partie d’un composé de l’acide borique;
et
(f) d’environ 0,1 à 5 parties d’un composé choisi parmi le groupe comprenant le méthanol, l’éthanol, le propylèneglycol, l’éthylèneglycol, le glucose ou des mélanges de ces substances, par 100 parties de composition adhésive, dans lequel il y a environ 1 à 15 moles de groupes hydroxyle par mole de cétone dans la résine cétone-formaldéhyde, sur les cannelures d’un carton ondulé, puis la mise en contact des cannelures revêtues avec une ou plusieurs feuilles.
5. Une composition adhésive aqueuse qui, durant la préparation, ne présente pas une augmentation non voulue de la viscosité, constituée :
(a) d’environ 5 à 50 parties d’amidon;
(b) d’environ 0,1 à 5 parties d’un agent de réticulation résineux polymérique à réaction basique;
(c) d’environ 0,3 à 1 partie d’un hydroxyde d’un métal alcalin;
(d) d’environ 0,05 à 0,5 partie d’un composé de l’acide borique;
(e) d’environ 0,1 à 5 parties d’un hydrocarbure hydroxylé hydrosoluble choisi parmi le groupe constitué d’un alcanol inférieur en C1-3, d’un diol choisi parmi le groupe constitué de l’éthylèneglycol, du diéthylèneglycol, du propylèneglycol, du dipropylèneglycol et de mélanges de ces substances, d’un composé glucidique et de composés de l’oxyde de polyéthylène ou de l’oxyde de polypropylène ou de mélanges de ces substances, le reste étant constitué d’eau, par 100 parties de composition adhésive.
Dans sa décision finale, l’examinateur a rejeté la demande compte tenu des brevets américains numéros 2,890,182 [Langlois], 3,408,214 [Mentzer], 3,962,166 [Gordon], 3,562,001 [McGuire] et 4,033,914 [Bovier] et d’extraits tirés d’ouvrages de référence, notamment Urea Formaldehyde Resins (Addison-Wesley Publishers), 1979, Meyer, et Handbook of Adhesive Bonding, 1973, Cagle, précisant, en partie, que :
La demande est rejetée parce qu’elle manque de conception orginale compte tenu du brevet Bovier. La différence est considérée évidente compte tenu du brevet Gordon et de l’état de la technique, comme l’illustrent Langlois, McGuire, Mentzer, Meyer et Cagle.
et, finalement, que :
En conclusion, le principal renvoi à Bovier fait état d’une composition adhésive aqueuse à l’épreuve des intempéries constituée essentiellement des mêmes ingrédients que la composition divulguée par le demandeur. Bovier utilise des hydroxylamines pour stabiliser la composition et ainsi prévenir le choc causé par la résine (et accroître la durée d’utilisation), alors que le demandeur utilise des composés hydroxylés qui ne contiennent pas d’amine. La différence n‘est pas jugée brevetable compte tenu du brevet Gordon. Comme le souligne Bovier à la colonne 1, aux lignes 57-68 (et comme le soutient aussi le brevet Langlois), une substance qui réagit avec le constituant aldéhyde de l’adhésif aura pour effet d’accroître la durée d’utilisation. Le brevet Gordon indique que les hydroxylamines (composé de Bovier) et les composés hydroxylés qui ne contiennent pas d’amine (composés du demandeur) stabilisent tous les deux les résines à base de formaldéhyde. En conséquence, les personnes versées dans ce domaine s’attendraient à ce que les composés du demandeur et ceux de Bovier se comportent essentiellement de la même façon en ce qui concerne la stabilisation de la composition adhésive aqueuse à l’épreuve des intempéries. Selon tous les autres renvois cités,les composés hydroxylés, dont on a donné des exemples particuliers, stabilisent les résines à base de formaldéhyde, agissent comme des modificateurs de viscosité dans les compositions de résine contenant de l’amidon et du formaldéhyde ou augmentent la durée d’utilisation des adhésifs amylacés.
Les renvois cités démontrent donc clairement que les composés de Bovier et ceux du demandeur ont essentiellement la même fonction en ce qui concerne la stabilisation de la viscosité dans les compositions adhésives à base d’amidon et de formaldéhyde. De plus, ces renvois démontrent aussi clairement que les composés particuliers donnés en exemple et revendiqués par le demandeur peuvent être utilisés de cette façon. En conséquence, l’examinateur estime qu’une personne versée dans le domaine et connaissant les détails du brevet Bovier pourrait, directement et sans difficulté, arriver à la description de la présente demande.
En conséquence, on estime que la présente demande ne possède aucune valeur inventive compte tenu du brevet Bovier. La demande est donc refusée.
La Commission doit donc déterminer si l’invention revendiquée dans la demande est ou non évidente compte tenu de l’antériorité citée.
Dans sa réponse à la décision finale, le demandeur note d’abord que les demandes correspondantes qu’il a présentées aux États-Unis et en Europe comportaient, dans un cas comme dans l’autre, des revendications étroitement semblables aux revendications de la présente demande, même si l’antériorité citée dans ces demandes était très semblable à l’antériorité sur laquelle se fonde l’examinateur pour rejeter la présente demande, plus particulièrement en ce qui concerne le renvoi à Bovier qui est le principal renvoi. Le demandeur déclare ensuite que, dans l’évaluation de l’évidence d’une invention, il doit être tenu compte du critère judiciaire de l’évidence énoncé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Beloit Canada Ltd. et c. Valmet Oy 8 C.P.R. (3d) 289, p. 294 :
Pour établir si une invention est évidente, il ne s’agit pas de se demander ce que les inventeurs compétents ont ou auraient fait pour solutionner le problème. Un inventeur est par définition inventif. La pierre de touche classique de l’évidence de l’invention est le technicien versé dans son art mais qui ne possède aucune étincelle d’esprit inventif ou d’imagination; un parangon de déduction et de dextérité complètement dépourvu d’intuition; un triomphe de l’hémisphère gauche sur le droit. Il s’agit de se demander si, compte tenu de l’état de la technique et des connaissances générales courantes qui existaient au moment où l’invention aurait été faite, cette créature mythique (monsieur tout-le-monde du domaine des brevets) serait directement et facilement arrivé à la solution que préconise le brevet. C’est un critère auquel il est très difficile de satisfaire.
La Commission est d’accord avec ce point de vue.
Le demandeur note aussi correctement qu’une analyse ex post facto de l’invention et que la synthèse ex post facto d’une « mosaïque » d’antériorités préparée artificiellement sont insuffisantes pour établir l’évidence; en d’autres mots, la question de l’évidence ne doit pas être abordée en progressant à rebours, comme on le précise dans l’arrêt Van der Lely (C.) N.V. v. Bamfords Ld. [1960] R.P.C., 169 à 193,
...............Avec l’analyse a porteriori que permet de faire la divulgation du titulaire du brevet, les étapes individuelles de la conversion d’un dispositif en un autre peuvent sembler de caractère non inventif, même si M. North reconnaissait dans sa preuve l’existence de certaines difficultés pratiques. Néanmoins, il ne s’agit pas d’une évaluation équitable du mérite inventif. Il faut considérer la largeur totale du fossé à franchir et non seulement le passage sur les pierres de gué, visibles ou cachées, au moment de la traversée. (traduction)
En ce qui concerne les renvois cités par l’examinateur,le demandeur note que le brevet américain numéro 4,033,914 accordé à Bovier est le principal renvoi sur lequel repose la décision de l’examinateur. Bovier divulgue un adhésif pour carton ondulé contenant une résine et un composé aminohydroxy qui peut être une amine primaire, secondaire ou tertiaire mais qui est toujours un dérivé de l’éthanolamine. La présence, dans les compositions du demandeur, de composés hydroxylés ne portant aucun groupe amino constitue la principale différence entre les compositions du demandeur et les compositions de Bovier. Selon l’examinateur, le fait de remplacer les composés de Bovier par ceux du demandeur ne constitue pas une invention,car les additifs présents dans les compositions de Bovier et dans celles du demandeur contiennent dans les deux cas des composés hydroxylés. Toutefois, la Commission estime qu’il n’en est pas nécessairement ainsi; par conséquent, même si l’on reconnaît qu’en général les groupes hydroxyles réagissent de façon semblable, un composé amino-hydroxy et un composé hydroxy ne modifieront pas nécessairement de la même façon la viscosité des compositions à base de résine du type divulgué dans la demande. La Commission est du même avis que le demandeur et estime qu’une personne versée dans le domaine et ayant devant les yeux le brevet Bovier ne serait pas directement et facilement arrivée à la solution que préconise le demandeur.
Le brevet américain numéro 3,962,166 accordé à Gordon constitue, en importance, le deuxième renvoi pertinent cité par l’examinateur. La Commission note que Gordon divulgue des compositions urée-formaldéhyde stables présentant un rapport urée/formaldéhyde variant de 1/1,4 à 1/2,8 environ, une teneur en formaldéhyde libre de moins de 3 % environ et une concentration de méthylol-urée de plus de 60 % par rapport au poids du mélange. Pour préparer les compositions, on règle à plus de 10 environ le pH du mélange aqueux d’urée et de formaldéhyde, on chauffe le mélange pendant un certain temps, ensuite on ajoute un stabilisant choisi parmi le groupe comprenant divers alcools, amines, aldéhydes et cétones, puis on refroidit le mélange jusqu’à la température ambiante.
L’examinateur estime que le brevet Gordon indique que tant les composés hydroxylés que les composés portant des groupes amino et hydroxyles peuvent servir à stabiliser les résines de formaldéhyde et, par conséquent, que les deux types de composés seraient plus ou moins interchangeables lorsqu’ils sont appliqués pour modifier la viscosité des compositions adhésives divulguées par Bovier, en d’autres mots, que le fait de remplacer les composés amino-hydroxy divulgués dans le brevet Bovier par les composés hydroxylés divulgués par le demandeur n’exige aucune conception originale.
Toutefois, la Commission note que les compositions adhésives divulguées dans le brevet Gordon sont d’un type différent de celles divulguées dans le brevet Bovier et par le demandeur; plus particulièrement, ces compositions ne contiennent pas d’amidon comme constituant. De plus, les stabilisants sont ajoutés pour une raison différente, c’est-à-dire pour produire des compositions très concentrées qui doivent demeurer stables pendant des périodes de plusieurs mois. Par conséquent, la Commission est d’accord avec le demandeur et estime que le brevet Gordon, seul ou en combinaison avec le brevet Bovier, ne rend pas évidente l’invention divulguée par le demandeur.
En ce qui concerne les autres renvois cités par l’examinateur, la Commission estime qu’ils ont une pertinence considérablement moindre pour l’invention. Par conséquent, le brevet américain numéro 2,890,182 accordé à Langlois porte sur des adhésifs amylacés quelque peu semblables à ceux divulgués par le demandeur, dont la durée d’utilisation est augmentée par l’addition d’une substance réagissant avec le constituant aldéhyde de l’adhésif. Des substances appropriées sont choisies parmi le groupe comprenant l’ammoniac, des amines aliphatiques inférieures, des bisulfites de métaux alcalins, l’urée, l’hydroxylamine, l’hydrazine, la phénylhydrazine et les semicarbazides. Comme la grande majorité de ces substances sont des amines ne portant aucun groupe hydroxy, il n’y a rien dans le renvoi, de l’avis de la Commission, qui encourage une personne versée dans le domaine à indiquer que les composés hydroxylés seraient utiles pour réduire la viscosité des adhésifs divulgués par le demandeur.
En ce qui concerne le brevet américain numéro 3,408,214 accordé à Mentzer, l’invention divulguée porte sur la préparation d’un adhésif à réhumidifier possédant un temps ouvert plus long. L’adhésif est constitué d’une substance amylacée chimiquement modifiée et non gélatinisée, d’un glycol, choisi parmi le groupe comprenant le propylèneglycol et le polyéthylèneglycol, et d’un plastifiant. L’examinateur estime que ce renvoi est pertinent parce que, selon lui, le terme « temps ouvert » mentionné dans le brevet Mentzer est équivalent au terme « durée d’utilisation » apparaissant dans les autres renvois cités. Toutefois, on constate, à l’examen du terme « temps ouvert » dans le brevet Mentzer, que ce terme désigne le temps pendant lequel une couche d’adhésif séché appliquée sur un ruban reste utilisable après réhumidification, soit de 10 à 15 secondes dans le brevet Mentzer; par contre, le terme « durée d’utilisation » désigne le temps pendant lequel un adhésif liquide, comme celui divulgué par le demandeur, reste utilisable après avoir été préparé à l’état liquide, soit un temps de quelques heures plutôt que de quelques secondes. La Commission estime donc que le brevet Mentzer, seul ou en combinaison avec d’autres renvois, ne constitue pas une citation pertinente.
De même, le brevet américain numéro 3,562,001 accordé à McGuire porte sur des objets moulés faits de résines de mélamine dont le brillant, le lustre et la résistance à l’abrasion sont améliorés grâce à une composition constituée de résines de mélamine solubles et insolubles dans l’eau, d’un agent épaississant, d’un plastifiant choisi parmi le groupe comprenant des glycols tels que l’éthylèneglycol, le glycérol, etc., d’un solvant et d’un catalyseur. La composition est appliquée sur la feuille métallique servant à décorer l’objet avant l’application de cette feuille sur l’objet. Les compositions de McGuire sont donc totalement différentes de celles divulguées par le demandeur, et les additifs sont ajoutés pour une raison complètement différente. La Commission estime donc que le brevet McGuire n’indique nullement que des composés hydroxylés seraient utiles pour diminuer la viscosité d’adhésifs amylacés du type divulgué par le demandeur. En ce qui concerne les citations tirées des deux ouvrages, la Commission estime qu’elles ne sont utiles que pour illustrer l’état de la technique et qu’elles sont trop générales pour s’appliquer à l’invention du demandeur.
Par conséquent, la Commission recommande d’infirmer le rejet de la demande par l’examinateur et de renvoyer la demande à l’examinateur pour qu’il en poursuive l’examen conformément à la recommandation.
P.J. Davies M. Howarth M. Wilson
président membre membre
Je souscris à la recommandation de la Commission d’infirmer le rejet de la demande par l’examinateur et de renvoyer la demande à l’examinateur pour qu’il en poursuive l’examen conformément à la recommandation.
A. McDonough
commissaire intérimaire aux brevets
Fait à Hull, au Québec,
le 2 février 1999