DÉCISION DU COMMISSAIRE
A2, Utilité : Le mémoire descriptif et les arguments présentés ne contiennent pas une description suffisante
permettant de déterminer l'utilité de l'invention et aucune des données relatives à l'exploitation de
l'invention ne prouve qu'elle peut être ramenée à une forme pratique. Le rejet est confirmé.
Cette décision porte sur la requête par laquelle le demandeur
demande que le Commissaire des brevets reconsidère la décision
finale relative à la demande de brevet 474 156 (Cl. 171-85)
déposée le 13 février 1985. Cette demande a pour titre Pressure
Cushion Motor Turbine (Moteur à turbine de coussins à pression)
et l'inventeur est M. Eugene Niderost. Le 7 février 1989,
l'examinateur chargé de l'affaire a rendu une décision finale
dans laquelle il rejette la demande.
L'invention porte sur un moteur rotatif dans lequel l'air et le
carburant sont allumés et les gaz d'échappement sont supposés
pousser un ressort contre un rotor et causer ainsi le mouvement.
La figure 2 reproduite ci-dessous montre le dispositif :
1. sens de rotation
<IMG>
Les gaz d'échappement sont introduits par une chambre de
distribution qui fait partie de l'arbre (68) et, par
l'intermédiaire d'un passage radial (70), dans une chambre (53)
disposée radialement possédant une paroi mobile (54) avec un
ressort (55), et une paroi mobile opposée (57) avec un ressort
(59). Les gaz traversent le passage dans la tige (51) et
atteignent le segment de pression (60).
Dans sa décision finale, l'examinateur déclare qu'il rejette la
demande parce que l'application n'est pas exploitable. En voici
quelques extraits :
...
La caractéristique essentielle du dispositif du demandeur est
une chambre ou une série de chambres dans un rotor. Les
chambres sont remplies à tour de rôle par un mélange de gaz
à pression élevée résultant de la combustion d'air comprimé
et d'un carburant qui sont allumés par une bougie. Lorsque la
chambre est sous pression, une "paroi de pression (57)" se
déplace et comprime un "ressort de réaction (59)". La pression
est maintenue dans la chambre, le ressort (59) s'oppose et
comme il ne peut pousser contre les gaz à pression élevée, il
pousse contre le rotor et le fait tourner.
Si ce processus constitue réellement le principe du dispositif
du demandeur, ce dernier doit tenir compte de la loi de
Charles, qui s'exprimes généralement sous la forme suivante :
P1V1/T1 = P2V2/T2
où P1 = première pression; P2 = deuxième pression;
V1 = premier volume; V1 = deuxième volume;
T1 = première température; T2 = deuxième
température.
Dans ce cas, on peut supposer que la température reste
constante.
Lorsque la "chambre de pression" est remplie du mélange air-
carburant allumé, une pression est exercée uniformément dans
toutes les directions par ce mélange, pas seulement sur la
"paroi de pression (57)" mais aussi sur la "paroi d'appui
(54)". Ces deux parois constituent les éléments mobiles de la
"chambre de pression".
Derrière chacune des deux parois (57 et 54) est placé un
ressort, le "ressort 55" derrière la "paroi d'appui (54)" et
le "ressort de réaction (59)" derrière la "paroi de pression
(57)". Les deux paroi; (57 et 54) exercent une force sur les
ressorts. Si la force exercée par les gaz sur les parois est
assez grande, les ressorts se compriment jusqu'à ce que cette
force exercée par les gaz sur les parois (57 et 54) soit égale
à la force exercée par les deux ressorts (55 et 59). Lorsque
ces forces sont égales et qu'un état d'équilibre est atteint,
il ne peut plus se produire de compression ni de détente des
ressorts. Il ne peut plus se produire non plus de mouvement
des parois (57 et 54).
Si le "ressort de réaction (59)" exerce une force sur le rotor
pour le faire tourner, il doit se détendre, et s'il se détend,
la "paroi de pression (57)" doit garder la même position par
rapport à "l'arbre principal (68)" pendant que le rotor
tourne. Autrement dit, le volume de la zone située derrière
la "paroi de pression (57)" doit augmenter à mesure que le
"ressort (59)" pousse sur le rotor.
...
De toute évidence, comme toute détente du ressort se traduit par
une réaction immédiate sur la "paroi de pression (57)", il ne peut
pas se produire de détente du ressort si la pression du gaz reste
constante. Cependant, le gaz est purgé de la chambre par le trou
de la "tige de raccordement (51)" vers le "segment de pression
(6o) ".
...
Comme le gaz est purgé sans arrêt, le "ressort de réaction (59)"
et le "ressort 55" doivent revenir doucement à leurs positions au
repos.
De plus, le demandeur à montré sur la figure 2 la "paroi d'appui
(54)" et le "ressort 55" qui sont placés dans la "chambre 53" pour
absorber l'exdécent de force centripète. La méthode
d'accomplissement de cette fonction n'est pas conforme à la
définition de la force centripète donnée dans l'ouvrage Fundamental
Physics, de Halliday et Resnick, publié par Jonh Wiley and sons
Ltd, Toronto, 1970, c,.-à-d. une force dirigée vers le centre, et
la "paroi d'appui (54)" et le "ressort (55)" sont perpendiculaires
à la ligne passant par le centre du rotor. Cependant, lorsque la
"chambre 53" est sous pression, comme la pression s'exerce
uniformément dans toutes les directions ... toute contraction du
"ressort 55" s'effectuerait sur la même base que celle du "ressort
de réaction (59)". L'hypothèse selon laquelle le volume pourrait
être maintenu par la détente du "ressort 59" et la compression du
"ressort 55" est également fausse. Une fois que les gaz sous
pression entrent dans la "chambre 53" et que l'équilibre est
atteint, le seul ... déplacement possible de la "paroi de pression
(57)" ou du "ressort de réaction (59)" résulte de l'addition
d'énergie au "ressort de réaction (59)" ou de la réduction de la
pression des gaz. C'est en réalité ce dernier phénomène qui se
produit. La "tige de raccordement (51)" comprend un trou dans le
sens de sa longueur par lequel le gaz peut s'échapper vers le
"renfoncement (62)", ce qui modifie l'état d'équilibre par rapport
à la relation P1V1 = P2V2 et permet aux ressorts de s' opposer. . . .
...
Dans sa réponse datée du 2 avril 1988 , le demandeur mentionne :
"dans votre décision (4 janvier 1988 ) , il est précisé qu' un ressort
se détend; il n'est d'aucune façon précisé dans la demande écrite
qu'un ressort se détend; au contraire, seulement une compression
d'un ressort peut produire une rotation". Cette observation est
conforme aux lignes 11 à 18 de la page 8, où le demandeur mentionne
que la compression du "ressort de réaction (59)" est la condition
requise pour produire la rotation du rotor. Ce phénomène semble
constituer la base du dispositif construit par le demandeur.
...
En réponse à la décision finale de l'examinateur, le demandeur a écrit
une première lettre puis une seconde, datées toutes les deux du 6 juin
1989. Dans sa première lettre, le demandeur déclare notamment :
...
Le demandeur estime que l'examinateur n'a rien compris à la
demande. Pour bien comprendre celle-ci, il faut posséder la
technique en cause et des connaissances de base en physique; il
s'agit ici non pas de la trouvaille d'un jardinier ou d'un
boulanger, mais plutôt de la découverte d'un expert. Le demandeur
déteste la vantardise, mais cela c'est la vérité. Quelle que soit
la personne qui a rédigé cette réponse, elle s'est égarée dans le
labyrinthe des détails techniques. Il y a à
Ottawa des professeurs que cette personne aurait pu consulter en cas
de doute, comme l'a fait le demandeur. Le demandeur reste convaincu
que cette demande est parfaite dans ses moindres détails.
A elle seule, notre atmosphère pourrait continuer d'aspirer de l'eau
pendant des millions d'années; tout ce qu'on a à faire, c'est de tirer
partie des lois de la nature. Le demandeur insiste pour que l'on donne
une suite favorable à sa demande.
...
Dans sa seconde lettre datée du 6 juin 1989, le demandeur présente entre
autres choses les arguments suivants :
...
Le demandeur vous fait parvenir une lettre de recommandation de la
faculté qui lui a décerné son diplôme en 1988. Il voudrait aussi
ajouter qu'il est l'expert dans l'exploitation de l'application en
cause.
Le demandeur aimerait que l'on procède maintenant à la définition du
mot
AMBIGU
Ambigu, c'est quelque choses qui est difficile à accomplir, comme par
exemple essayer de déplacer, en poussant dessus, une chaise sur
laquelle on est assis en poussant dessus. Les machines à double
fonction, par exemple le moteur électrique qui devient une génératrice
par commutation et le moiteur suralimenté par un turbocompresseur
entraîné en partie par l'échappement, sont bien connues. Il y a plus
de 30 ans, la suralimentation des moteurs diesels de la Brown Bovery
permettait d'obtenir, pour une même puissance de carburant, un
rendement de 150 %. Ainsi, ce moteur à turbine, qui a également une
double fonction, tombe dans cette catégorie et n'est pas AMBIGU.
Le demandeur a une fois de plus pris le temps de préparer une
feuille de croquis d'un coussin de pression unique, afin de
démontrer que la détente n'est possible que dans le sens montré sur
la coupe transversale du croquis (1). A1 représente l'adiabatique
due à la pression de l'explosion. A2 est l'équivalent de la section
transversale de l'intérieur du moteur, qui doit être remplie de gaz
brûlé ou d'air. A3 est l'adiabatique d'un segment dans la pompe à
air. La formule de votre réponse, P1 x V1 ~ T1 ~ P2 x V2 ~ T2, ne
s'applique pas à ce moteur. La compression est accomplie par la
pompe à air rotative et doit par conséquent être calculée comme une
compression de gaz parfait, qui est l'adiabatique. De plus, la
transformation isentropique n'est pas requise étant donné que l'air
comprimé et le carburant injecté se rencontrent dans la chambre de
combustion rotative pour l'allumage.
...
Étant donné que le demandeur a conçu la première pompe à compresseur
rotatif pour satisfaire aux exigences d'alimentation du cycle de
compression et qu'un diplôme en science lui a été attribué par des
professeurs accrédités pour ce travail, il aimerait présenter la
formule adéquate de calcul pour ce moteur.
Cette formule est la suivante : (See formula 1)
Les diagrammes sont tous compris dans le CROQUIS (1) pour démontrer
quelle devrait être leur apparence.
Le demandeur tient aussi à préciser que le seul but de l'explosion est
de comprimer le gaz en dilatation dans le coussin de pression, ce qui
est clairement formulé dans la demande à partir de la page 7 de
l'exposé de l'invention, aux figures 3, 5, 8 et 10.
La pression qui peut être atteinte n'est pas requise dans le brevet
et n'est pas revendiquée. Il doit se produire une accumulation de
pression, sans quoi le moteur n' est d' aucune utilité, ce dont le
demandeur est pleinement conscient.
Le demandeur sait que ce moteur est basé dans une certaine mesure
sur la physique appliquée .et qu'il faut maîtriser le domaine pour
comprendre son principe. L'anticipation de chaleur dans cette
application n'a pas de répercussions ou n'en a que très peu et elle
est négligeable, même si le demandeur utilise un pompe à air de type
ordinaire. Le principe de ce moteur est absolument valable et
correct à 100 %, comme le montre le croquis ci-dessous. Une brève
description des dessins est donnée conformément à la règle 23 de la
page 4 de la demande.
<IMG>
1. force : détente du coussin de pression seulement
2. quantité de mouvement
3. sens de rotation du rotor
4. force
5. antécédent de force
6. force théorique transmise.
De la réponse du bureau à la page 4, n o 2
A la position du troisième degré se rapporte à la fig. 4 et désigne
la position 3 avant 0 , utilisée comme admission du mélange air-
gaz.
N o 3. Les raccordements sont clairement montrés sur la fig. 2 et
sont représentés sur la fig. 8 par 'B'.
N o 4 . La pression statique est une pression qui n' est pas exercée
par une projection sur un objet comme la pression exercée par un
ventilateur de turbine, etc.
N o 5. Des carburants peuvent aussi être brûlés, ce qui a été énoncé
de cette façon dans la demande.
Le demandeur déclare qu'il s'agit seulement ici d'un brevet de
principe et qu'il n'entend aucunement revendiquer de droits sur
aucune composante mécaniques ni même sur le nom d'une pièce. Le
moteur Wankel a, en plus du brevet de principe, 120 sous-brevets.
Par exemple, le Bureau des brevets affirme à la page 1 de sa réponse
que le demandeur a utilisé une mauvaise terminologie dans la
revendication 1. Il peut exister autant de tiges différentes de
raccordement qu'il y a de moteurs sur la terre. On peut obtenir un
brevet pour chaque type de tige de raccordement, mais il est
impossible d'avoir un brevet pour le nom de ces produits. Combien
y a-t-il de types de moteurs diesel sur le marché?
Cette réponse du Bureau oblige en quelque sorte le demandeur à faire
une dissertation sur le sujet. Il est d'accord pour le faire un peu
plus tard, mais certainement pas au Bureau des brevets.
1. CROQUIS (1)
2. 15/1 (air/gaz) pression max. 40 atm. (abs.)
3. travail effectué par l'explosion
4. atm. (abs.)
5. section transversale intérieure équivalente du moteur remplie de
mélange air-gaz brûlé ou d'air seulement
6. 0,93
7. Fig. 2 demande
8. le seul sens possible de détente du coussin de pression
9. quantité de mouvement
10 la formule de base pour calculer l' adiabatique dans un compresseur
pour le point d'intégrale 1 - Z est la suivante :
<IMG>
... se calcule de la même façon
11. courbe adiabatique due à la pression de l'explosion
12. premier point d'explosion à 10 atm. (abs.)
13. le nouveau gaz est comprimé à l'intérieur du coussin de pression
et du moteur
14. course
15. adiabatique d'un segment unique de la pompe à ailettes Fig. 1
demande
16. 12,3 lb/po2
17. coussin de pression
18. fig. 2 demande
19. fig. 6 demande
20. segment et rouleaux appuyés contre la paroi de carter fixe
21. section transversale de la turbine
22. sens de rotation
La question que doit trancher la Commission est celle de savoir si oui ou
non les documents divulgués décrivent une invention qui est, comme l'exige
l'article 2 de la Loi sur les brevets, utile et exploitable. La
revendication 1 se lit comme suit :
Un moteur nouveau et amélioré comprenant :
a) une structure de stator et une structure de rotor,
b) un rotor avec au moins un coussin de pression, dans lequel le
coussin est le volume de la chambre de pression délimité par
les parois latérales, la paroi d' appui et la paroi de pression,
dans lequel la paroi de pression est l'élément mobile capable
de comprimer les ressorts de compression entre la paroi de
pression et le rotor,
c) un rotor avec au moins un ensemble paroi d'appui/tige de
raccordement/segment de pression, opposé à la paroi de pression
en b), dans lequel le segment de pression est muni de rouleaux
appuyés contre le carter neutre, de sorte que par un
accroissement forcé de la pression dans la chambre la détente
du coussin n'est possible que par l'intermédiaire de la paroi
de pression,
d) un ensemble paroi d'appui/tige de raccordement/segment de
pression a des segments de pression avec des rouleaux et les
rouleaux sont placés dans les segments de pression présentant
un renfoncement avec des joints d'étanchéité pour contre-
pression afin de libérer les rouleaux de l'excès de pression
pour une plus longue durée de vie, et les joints d'étanchéité
bloquent l'enfoncement de monoxyde de carbone,
e) un ensemble paroi d'appui/tige de raccordement/segment de
pression avec la paroi d'appui placée dans le rotor et la tige
de raccordement faisant saillie à la périphérie du rotor pour
permettre de repousser l'ensemble susmentionné à la paroi de
carter permanente en tant qu'élément répulsif, de sorte que le
contact du centre de pression est entraîné à 360 , ce qui
maintient la force libre en tout temps.
Une examen approfondi a été fait des diverses étapes de l'étude de cette
demande. Le demandeur a révoqué la nomination de son agent au 7 juillet
1987, et il a depuis donné lui-même suite aux mesures ou décisions de
l'examinateur.
Dans le brevet américain 4,347,698 accordé à Nelson, auquel on fait
référence dans la présente demande, on décrit un moteur rotatif. La figure
1 de ce brevet, reproduite ci-dessous, montre que les gaz d'échappement
(33) d'un mélange air/carburant allumé sont acheminés d'une chambre
disposée radialement (3) par l'intermédiaire d'un conduit d'échappement
vers un canal de sortie (24). La Commission remarque que le dispositif du
demandeur fonctionne de la même manière que le dispositif de Nelson,
c.-à-d. en utilisant les gaz d'échappement.
<IMG>
Dans le brevet de Nelson, on attribue le couple moteur à la puissance
réactive des gaz d'échappement qui sortent de la chambre 3. Dans le cas
présent, le demandeur croit que la force motrice est créée par la poussée
du ressort 59 sur le rotor plutôt que par les gaz d'échappement qui
entrent dans la chambre 53, sortent par le passage dans la tige 51 et
frappent la paroi du segment de pression. En ce qui a trait à cette
partie, l'examinateur a traité dans les dispositions finales de la
réaction égale des gaz sur les deux parois et leurs ressorts lorsque les
gaz entrent dans l'espace compris entre les parois. Le demandeur ne
réfute pas les arguments présentés par l'examinateur dans la décision
finale en ce qui a trait aux parois 54 et 57 et aux ressorts 55 et 59,
mais il présente une autre hypothèse sur le fonctionnement de son
dispositif. Il ajoute que l'examinateur ne comprenait pas l'application
et suggère qu'il aille consulter des professeurs.
L'examinateur a produit un document détaillé qui rejette toutes les
revendications exposées dans la demande. Cependant, le demandeur n'a
discuté du rejet des revendications dans aucune de ses réponses. La
Commission croit que le rejet de l'examinateur est fondé et, puisque le
demandeur n'a pas voulu donner suite aux motifs du rejet, la Commission
croit également que toutes les revendications sont non fondées, d'une part
à cause de leur caractère indéfini et ambigu et, d'autre part, parce
qu'elles ne sont pas conformes au paragraphe 34(2) (ancien paragraphe
36(2)) de la Loi sur les brevets.
Ce qui est plus important, le demandeur doit aussi satisfaire aux
exigences de l'article 2 de la Loi sur les brevets en démontrant de façon
satisfaisante l'utilité de son invention. L'article 2 définit ainsi une
invention :
"Invention" Toute réalisation, tout procédé, toute machine,
fabrication ou composition de matières, ainsi que tout
perfectionnement de l'un d'eux, présentant le caractère de la
nouveauté et de l'utilité;
Une des principales préoccupations de la Commission à ce stade-ci consiste
à déterminer le mode d'exploitation ou d'utilisation de l'invention,
c'est-à-dire son utilité, telle qu'elle est envisagée par l'inventeur.
La divulgation de la demande promettait un résultat à cause de la détente
du ressort 59 et, ce résultat promis doit provenir d'un homme de métier
versé dans l'art. Un grand nombre de tribunaux ont déjà examiné
l'exigence selon laquelle un mémoire descriptif doit fournir un exposé
exact et complet du mode d'exploitation. La Commission s'est inspirée
dans cette affaire des raisons fournies par ces tribunaux.
Dans la décision rendu par la Cour de l' Échiquier, dans l' affaire Minerals
Separation v. Noranda Mines Ltd., R.C.É. 306, le juge Thorson P. déclare
à la page 316 :
Deux choses doivent être décrites dans la divulgation des mémoires
descriptifs, d'abord l'invention et ensuite son fonctionnement ou
son mode d' exploitation tel qu' envisagé par l' inventeur, et dans
chaque cas la description doit être exacte et complète. Cette
exigence vise à donner au public, une fois révolue la durée du
monopole, la possibilité d'utiliser l'invention en se servant
seulement des mémoires descriptifs, avec autant de succès que
l'inventeur pouvait le faire au moment où il a présenté sa demande.
La description doit être exacte; cela veut dire qu'elle doit être
à la fois claire et précise.
Et il déclare à la page 317 :
Lorsqu'on dit qu'un mémoire descriptif doit être rédigé de façon à
donner au public, une fois révolue la durée du monopole, la
possibilité d'utiliser l'invention en se servant seulement du
mémoire descriptif, avec autant de succès que son inventeur, il faut
se rappeler que le mot "public" désigne ici les personnes versées
dans l'art auquel s'applique l'invention, car c'est à ces personnes
que s'adresse un mémoire descriptif de brevet.
L'affaire Northern Electric V. Brown's Theatre, (1940), R.C.É. 36 à 56,
traite de la question de l'utilité dans le passage suivant :
Une invention peut être brevetée à condition d'être profitable au
public. L'utilité, comme le présuppose une invention, doit avoir une
valeur industrielle. Aucun brevet ne peut être octroyé pour un
principe ou un dispositif sans valeur. La chose décrite et revendiquée
ici n' est d' aucune utilité, parce qu' elle ne sert pas les fins pour
lesquelles elle a été conçue.
Le passage suivant de l'affaire Raleigh Cycle v. Miller, (1946) 63 R.P.C
113, p. 140 est lui aussi pertinent :
En d'autres mots, on peut obtenir une protection dans la promesse
de résultats. Celle-ci ne survit pas et ne doit pas survivre à la
preuve que la promesse n'a pas produit les résultats escomptés.
Dans l'affaire Le Rasoir Appolo, (1932) 49 R.P.C. 1, la Cour a conclu que
lorsque la théorie sur laquelle se fonde un brevet est erronée, il n'y a
pas d'objet, donc aucune utilité.
Dans l'affaire Wandscheer v. Secard, (1946) Cour de l'Échiquier 112, et
(1948) R.C.S. 1, la Cour on a soutenu que :
Une invention est dite utile lorsqu'elle satisfait le but pour
lequel elle a été conçue et qu' elle est jugée, en ce qui a trait
aux buts énoncés par le breveté, d'une utilité pratique, au moment
où le brevet est octroyé.
Dans la récente décision rendue le 22 juin 1989 par la Cour suprême du
Canada dans l'affaire Pionneer Hibred c. le Commissaire des brevets, le
juge Lamer, en refusant d'octroyer un brevet, a déclaré que la Loi sur
les brevets stipule sans équivoque que l'invention doit être décrite de
façon complète pour permettre à l'homme de métier compétent de l'utiliser.
Le juge Lamer a alors déclaré : "l'inventeur doit décrire non seulement
comment utiliser l'invention mais aussi comment un tiers doit s'y prendre
pour la construire." A la lumière des points de vue de la Cour, le
commentaire de l'inventeur, selon qui il faut seulement consulter des
professeur pour comprendre la demande, ne satisfait pas à une des
exigences fondamentales de la Loi, à savoir que l'invention doit être
décrite de façon adéquate dans la demande.
Dans la réponse donnée le 6 juin 1989 à la décision finale de
l'examinateur et dans laquelle il allègue que ce dernier n'a pas compris
l'invention, le demandeur fait remarquer qu'"il y a à Ottawa des
professeurs qu'on aurait pu consulter en cas de doute comme l'a fait le
demandeur". Le demandeur ne stipule pas toutefois quel type de réponse
il avait reçu dans le cadre de ses propres consultations et ne fait
mention d'aucune donnée provenant de sources reconnues qui viendraient
corroborer et expliquer l'objet de la demande.
En particulier, selon la Commission, on n'explique pas suffisamment
comment ou pourquoi la pression s'exerce seulement sur la surface de la
paroi 57, et ne s'exerce pas également sur la surface qui lui est opposée,
formée de la paroi 54 et du passage 51, et on ne décrit pas de façon
satisfaisante l'effet du rejet des gaz par le passage 51 sur la dilatation
des gaz dans la chambre 53. Dans le croquis (1), qui comprend la figure 2
de la demande, le passage 51 est représenté comme étant séparé du carter.
A la page 8 de la demande, l'écoulement des gaz est décrit comme suit :
"passant par le trou de la tige de raccordement 51 (pour remplir) tout
l'intérieur du carter 12 et 13. Ainsi, une pression uniforme sera
exercée sur tous les coussins de pression entourant le rotor...
Cette pression statique cause une détente de la paroi de pression 57...
ce qui provoque une compression des ressorts qui, à leur tour, exercent
ume force tangentielle... sur le rotor... de sorte que la rotation doit
commencer."
L'expression "pression statique" n'est pas appropriée dans le passage
susmentionné de la demande parce qu'il y a un écoulement de gaz sous
pression dans la chambre 53, et à mesure qu'ils se dilatent, les gaz
exercent une pression sur toutes les surfaces. La pression est une
pression dynamique variable et non une pression statique. Cet écoulement
de fluide avec pression dynamique variable est la condition qui semble
exister dans le brevet de Nelson.
Selon la Commission, il semble que le fonctionnement du dispositif du
demandeur soit en réalité basé sur l'action exercée par les gaz, comme
cela pourrait se produire dans le dispositif de Nelson, et l'expression
"pression statique" ne reflète pas fidèlement la condition dans les
chambres. De plus, bien qu'il soit fait mention d' égale pression dans
les coussins de pression, il n"est pas tenu compte de la pression uniforme
sur toutes les surfaces des chambres, dont l'égalisation signifierait,
comme l'a expliqué l'examinateur, que les deux parois de la chambre
devraient se déplacer. En supposant, comme dans le brevet de Nelson,
qu'il n'y a pas de ressort dans les chambres, la Commission estime que les
gaz exerceraient une pression uniforme sur toutes les surfaces.
L'addition de ressorts dans les chambres n'annule pas l'action des gaz.
Par conséquent, il n'est pas évident pour la Commission que ce soit
l'action du ressort qui cause le déplacement du rotor, comme le croit le
demandeur. Le demandeur prétend que son dispositif fonctionne selon un
nouveau principe, mais la Commission n' a trouvé ni dans la demande ni dans
les arguments avancés une description ou un raisonnement suffisant qui la
porterait à abonder dans le sens du demandeur.
Les raisons évoquées par le demandeur n'on pas réussi à persuader la
Commission. Selon elle, le demandeur n'a pas donné une réponse
satisfaisante aux objections de l'examinateur. En conséquence, il n'y a
pour la Commission aucun motif de désaccord avec l'examinateur.
En conséquence, la Commission n'est pas disposée à accepter les mémoires
descriptifs dans lesquels le demandeur expose une théorie qui, d'une part,
n'a pas été démontrée de façon satisfaisante, compte tenu des principes
existants et acceptés et qui, d'autre part, se fonde sur une source
d' informations techniques non spécifiée au sujet de laquelle il ne fournit
aucune précision. Le demandeur soutient que "l'anticipation de chaleur
dans cette application n'a pas de répercussions ou n'en a que très peu et
elle est négligeable", et il présente "la formule adéquate de calcul pour
son moteur" en ajoutant qu'il est le spécialiste au plan du fonctionnement
du dispositif. N'ayant pas sur l'exploitation de la prétendue invention
de données provenant d'autorités reconnues du domaine scientifique, la
Commission est d'avis que la théorie exposée dans la demande n'a pas été
ramenée à une forme pratique, ou qu'elle ne peut être ramenée à une forme
pratique.
La Commission estime que la demande ne décrit pas un moteur pratique
capable de produire de l'énergie et que les raisons évoquées par le
demandeur ne démontrent pas qu'il s'agit d'un dispositif exploitable.
La Commission recommande que soit rejetée la demande, celle-ci n'ayant
pas trait à un dispositif utile.
M.G. Brown
Président intérimaire
Commission d'appel des brevets
Je suis d'accord avec les conclusions et la recommandation de la
Commission d'appel des brevets. En conséquence, je refuse d'octroyer un
brevet pour cette application. Conformément aux dispositions de l'article
42, ancien article 44, de la Loi sur les brevets, le demandeur a six mois
pour interjeter appel de ma décision.
J.H.A. Gariépy
Commissaire des brevets
fait à Hull (Québec)
ce 13e jour du mois d'août 1990
Eugene Niderost
66, avenue Madison
Toronto (Ontario)
M5R 2S4