DÉCISION DU COMMISSAIRE
Objet brevetable, antériorité : un dispositif de centrage en deux
parties permettant d'aligner et de fixer des pièces optiques aux deux
parties, a été retenu comme brevetable à la lumière de la technique
citée. La revendication 1 modifiée a été rejetée parce qu'elle ne
définit pas les caractéristiques innovatrices. Décision finale
modifie.
La présente décision fait suite à la requête présentée par le
demandeur au commissaire des brevets pour qu'il révise la décision
finale de l'examinateur concernant la demande de brevet no 442 294
(classe 33-53), déposée le 30 novembre 1983 par Thomson-CSF, pour une
invention intitulée PROCÉDÉ D'ALIGNEMENT D'UN DISPOSITIF
ÉLECTRO-OPTIQUE. R. Henry, J.-C. Carballes, E. Duda, E. Grard sont
les inventeurs. L'examinateur chargé du dossier a rendu sa décision
finale le 23 juin 1986, rejetant la demande de brevet. Dans une
lettre en date du 18 août 1988, le demandeur a retiré sa demande
d'audience.
L'invention porte sur un procédé d'alignement d'un boîtier de tête
optique constitué d'une pièce supportant un composant semi-conducteur
optique et d'une pièce retenant une fibre optique, qui permet
d'aligner les éléments optiques et de fixer de façon rigide les pièces
du boîtier, comme l'illustre la figure 3 reproduite ci-dessous:
<IMG>
L'une des pièces du boîtier comprend un manchon de centrage (16) fixé
à un support (12) sur lequel est monté un élément servi-conducteur (2)
et ses connexions externes (9). L'autre pièce (13) retient en son
centre la fibre optique (4) il proximité de l'élément adjacent (2);
elle se caractérise par la gorge dans laquelle se trouve la brasure
fondue dans laquelle l'embout du manchon de centrage est encastré.
Durant l'alignement des éléments optiques (2) et (4) par déplacement
du manchon de centrage (16), celui-ci demeure encastré dans la gorge;
une fois l'alignement atteint, la brasure est durcie, créant ainsi un
boîtier étanche dont les éléments optiques sont alignés.
L'examinateur a refusé d'accueillir la demande eu égard aux brevets
suivants :
Brevet britannique
2 022 280 le 12 décembre 1979 Goodfellow et al
(Brevet américain
4 357 072 le 2 novembre 1982 Goodfellow et al)
Demande de brevet européen
0 021 473 le 7 janvier 1981 Kock
Le brevet britannique décrit un procédé servant à sceller une fibre
optique alignée avec une diode électroluminescente, tel qu'illustré
sur la figure 4 ci-dessous:
<IMG>
La diode (6), qui doit être alignée avec la fibre optique (10), est
supportée sur un socle (4) soudé à une embase (2). On coule de la
brasure en fusion (9) dans l'ouverture en entonnoir (8) de l'embase
(2); le fond en épaule (2a) limite l'écoulement de la brasure.
L'embout (12) de la fibre optique, adjacent à la diode, est dénudé par
procédé chimique. La surface externe (18) de la collerette de cuivre
(16) est étamée afin que la brasure y ahdère; la surface interne de la
collerette adhère au revêtement (11). On se sert de cette collerette,
au centre de laquelle est fixée la fibre optique, comme manchon de
centrage; elle est fixée à un outil de positionnement, non illustré,
qui permet de la déplacer et d'aligner la fibre sur la diode. Après
avoir introduit de l'azote autour de la diode et de la fibre afin d'y
créer une atmosphère inerte, on coule dans l'embase de la brasure (9)
en fusion qui adhérera à l'enveloppe étamée de la collerette (18).
Une fois l'alignement optique obtenu, on laisse la brasure refroidir,
formant un lien étanche qui maintient l'alignement, puis on retire
l'outil de positionnement de la collerette.
Le brevet européen présente un dispositif à plusieurs pièces qui
permet d'aligner une fibre optique et une diode et de fixer la fibre
optique en place, comme le démontre la figure 2 reproduite ci-dessous:
<IMG>
Le socle (31) supporte les diodes (35) et (51), l'embase (33) et les connexions
des diodes. Un support de centrage (37) est soudé l'embase (33) avec de la
brasure d'indium (59). Une plaque de verre (39a) est aussi soudée au support à
la brasure d'indium; finalement des lentilles sont collées à la plaque à l'aide
de résine d'époxy. Le bloc soutient le support (43) au milieu duquel la fibre
optique (45) est suspendue. En appuyant sur le support (37), une déformation
plastique de la brasure (59) se produit et permet à la fibre (45) de s'aligner
avec les lentilles et la diode; une fois aligné, le bloc (43) est collé au
support et la fibre est collée en place.
Dans sa décision finale, l'examinateur a déclaré, en partie, ce qui suit:
...
Les références se rapportent à un dispositif dynamique de
fixation étanche comme dans le cas qui nous occupe. En d'autres
termes, les éléments à sceller peuvent être déplacés, l'un par
rapport à l'autre, tout en demeurant étanches, jusqu'à ce que
l'alignement désiré soit atteint.
Les références nous apprennent de plus que le matériau de
scellement, comme dans le cas présent, est à l'état liquide
lorsque les éléments sont déplacés l'un par rapport à l'autre et
est durci lorsqu'on réussit à aligner les éléments.
Plus loin, Rock révèle une méthode et un mécanisme d'alignement
d'un servi-conducteur et d'un fibre optique dans une chambre
scellée par la méthode présentée et revendiquée ici.
Lettre du demandeur en date du 30 décembre 1985.
Le brevet américain n o 4,357,072 de Goodfellow, en date du 2
novembre 1982, a été publié en Grande-Bretagne le 12 décembre
1979 et peut être cité en vertu de l'article 28 de la Loi sur
les brevets.
Dans sa lettre du 30 décembre 1985, le demandeur déclare que la
présente invention a trait à un procédé pour aligner un
composant comprenant une fibre optique et un semi-conducteur.
Il est cependant clair d'après le présent exposé que lorsque
l'on parle de composants électro-optiques, il peut s'agir de
photodiodes, de connecteurs émetteurs ou de laser à
servi-conducteur. Il peut s'agir de composants semblables à ceux
exposés dans Goodfellow, tels les faisceaux de diodes, les
faisceaux de lasers, les détecteurs, les accouplements
directionnels et les connecteurs ou comme dans la publication
britannique citée, de lasers semi-conducteurs et d'autres
éléments. Il ressort clairement du brevet cité que les
composants ou les éléments sont les mêmes que les composants en
cause ou sont équivalents.
Le logement 15 n'a pas vraiment d'importance du point de vue de
la brevetabilité pour les raisons suivantes:
Goodfellow expose que l'ouverture (8) de l'embase a la forme
d'un entonnoir pour que la brasure en fusion, lorsqu'on l'y
coule, ne s'en échappe pas et le brevet n o 0,021,473 (Kock) fait
état d'un matériau de scellement épais. En raison des
structures mentionnées par Goodfellow et Kock, le support de la
fibre peut être déplacé dans plus de deux directions. Cette
conclusion n'est pas énoncée spécifiquement mais est évidente
d'après l'exposé.
...
En soutenant que la demande ne pouvait être rejetée pour les raisons invoquées
par l'examinateur, le demandeur a modifié la revendication 1 et affirmé en
partie ce qui suit:
...
Si on la compare à la technique précédente, l'invention du
demandeur présente le composant servi-conducteur (2) fixé à son
support (12) sans grande précision et la fibre (4) étant fixée à
un support (13) usiné également sans grande précision. Puis,
les deux éléments sont alignés avec précision (de 1 à 5
micromètres); cette grande précision est rendue possible parce
que le support consiste en un manchon de centrage (de forme
cylindrique, voir références (16) à (21)) et que l'autre support
comporte au moins une rainure (14) (en forme de gorge) ou trois
(28) (en forme de coupelles dans lesquelles pénètrent trois
tiges (29)). Le manchon de centrage (16), (21) ou (29) et les
rainures (14) ou (28)) sont aussi usinés sans grande précision.
Par conséquent, ce qui est essentiel dans la présente invention,
c'est que le manchon de centrage doit être encastré dans ces
rainures pour être ajusté.
BREVET AMERICAIN No 4M357,072 (GOODFELLOW)
Ce brevet présente une fibre optique (10) avec une collerette
(16) enrobée d'une couche d'étain (18) qui est alignée
relativement à la diode (6) à l'aide d'un micromanipulateur
(voir colonne 3, lignes 50 et suivantes), dont la couronne de
brasure (9) est refroidie, telle que représentée par la figure
1, et au centre de laquelle passe la fibre (10). Une fois
l'alignement obtenu, la couronne est chauffée jusqu'à la fusion
(voir colonne 4, lignes 5 est suivantes) et la brasure adhère,
par capilarité, à la collerette (16) et à l'embase étanche (2).
Le demandeur reconnaît qu'une fois que la brasure (9) a fondu,
il est possible, comme le déclare Goodfellow, d'ajuster la
position de la fibre (10) tel qu'il est démontré à la figure 4,
mais cela est pratiquement impossible dans le cas illustré à la
figure 5. Il est à signaler qu'une fibre optique a un diamètre
d'environ 100 micromètres; avec une telle longueur de brasure en
fusion (9), c'est la fibre qui pliera si elle est déplacée.
Quoi qu'il en soit, même si la diode (6), dans Goodfellow, est
bien montée sur un support, la fibre (10) n'est pas fixée sur un
deuxième support et il n'y a ni manchon de centrage ni rainure
pour permettre à un support de se déplacer relativement à un
autre et subséquemment de s'y fixer.
BREVET EUROPEEN 0,021,472 (KOCK)
Le composant servi-conducteur (35) de cette référence est monté
sur un support complexe qui comprend le manchon (33) et la bride
(61); la fibre (45), elle, est montée sur un support (43). Même
en supposant que l'élément (37) serve de manchon de centrage, il
ne s'encastre pas dans une rainure toutefois (comme la gorge
(14) ou la coupelle (28) du système du demandeur). En effet, le
demandeur obtient l'alignement par encastrement ajustable du
manchon de centrage (16) dans la rainure (14), tandis que Kock
contrôle l'alignement en déformant une épaisse couche d'indium
(59). C'est tout à fait différent de ce qui est décrit et
revendiqué dans la demande du demandeur.
Le demandeur ne comprend pas pourquoi l'examinateur
déclare que le logement (14) (et non (15) n'est pas
brevetable. Si Goodfellow prévoit un rétrécissement
(2a) dans l'ouverture (8) (qui, soit dit en passant,
n'est pas sur la figure 5), c'est pour retenir la
brasure par capillarité. Il est bon de rappeler que
Goodfellow a aligné la fibre optique antérieurement, une
fois l'anneau de brasure refroidi et solidifié.
Nous estimons par conséquent que la revendication 1 se
distingue, du point de vue de la brevetabilité, des deux
autres brevets, pris séparément ou combinés. Il est
avancé qu'il serait impossible d'arriver au procédé du
demandeur après avoir lu le raisonnement de Goodfellow
et Kock.
Par ailleurs, la revendication 1 avait été révisée de
manière à mieux définir l'une des étapes les plus
importantes de la présente invention qui n'est pas
énoncée dans les antériorités, c'est-à-dire qu'un
support mécanique est déplacé relativement à un autre en
ajustant dynamiquement le manchon de centrage dans trois
directions à l'intérieur d'un logement rempli d'un
matériau en fusion ou sous une forme non durcie.
...
La Commission doit déterminer si l'objet de la demande est brevetable
compte tenu des brevets mentionnés. La revendication 1 est ainsi
rédigée :
Un procédé pour aligner un composant électro-optique qui
comprend:
- un composant semi-conducteur pour émettre ou recevoir
la lumière, ledit composant semi-conducteur étant fixé à
un premier support mécanique; et
- une fibre optique fixée à un deuxième support
mécanique;
lesdits premier et deuxième supporte mécaniques étant
indépendants l'un de l'autre, l'un desdits supports
mécaniques comprenant un manchon de centrage tandis que
l'autre comprend au moins un logement contenant un
matériau qui peut être durci, ledit manchon de centrage
étant encastré dans ledit matériau, le volume dudit
logement et le volume dudit matériau étant tels qu'ils
permettent audit manchon de centrage de se déplacer dans
ledit logement dans trois directions différentes, ledit
procédé comprenant les étapes suivantes:
- déplacer l'un desdits supports mécaniques relativement
à l'autre en ajustant dynamiquement ledit manchon de
centrage dans trois directions dans ledit logement,
contenant ledit matériau sous forme non durcie, afin
d'obtenir le positionnmement optimum entre ledit
composant semi-conducteur et ladite fibre optique; et
- durcir ledit matériau quand le positionnement optimum
est atteint.
Les deux références citées exposent des mécanismes permettant le
mouvement dans trois directions pour l'alignement optique d'une diode
et d'une fibre optique. Elles présentent différents moyens de sceller
les pièces mobiles en place après que l'alignement optique a été
atteint, en plus de moyens de fixer en place la fibre optique.
L'invention du demandeur réside dans le même domaine que ces deux
brevets. Cependant, il présente une structure particulière selon
laquelle l'un des deux supports mobiles possède un logement pour le
matériau fondu, et l'autre est formé et positionné de façon telle
qu'une de ses extrémités est encastrée en tout temps dans le matériau
fondu durant le processus d'alignement. Lorsque le positionnement est
atteint, le matériau fondu peut être durci, assurant ainsi
l'alignement et scellant à la fois les supports et les éléments
optiques. A notre avis, la disposition prévue par le demandeur vise
une invention différente de l'objet des brevets cités.
Nous examinons maintenant l'objet revendiqué. En examinant la
modification proposée à la revendication 1, nous constatons qu'en la
révisant, le demandeur veut souligner qu'un support mécanique se
déplace relativement à l'autre afin d'obtenir un ajustement dynamique
du manchon de centrage dans trois directions dans un logement
contenant un matériau qui est: durci une fois que l'alignement est
atteint. D'après la description, nous apprenons que l'invention du
demandeur est une structure en deux pièces, qu'une extrémité de la
pièce de centrage ou d'ajustage est encastrée en tout temps durant
l'alignement de la diode et de la fibre optique dans un logement ou
gorge se trouvant sur l'autre pièce, et que la gorge referme du
matériau fondu qui est durci une fois que le positionnement optique de
la diode et de la fibre optique a été obtenu. En examinant les
brevets cités, nous estimons que la revendication 1 ne définit pas
clairement l'invention décrite.
La revendication 2 du demandeur, liée à la revendication 1 proposée,
établit que la pièce centrale est tubulaire, et que le logement formé
dans l'autre pièce a la forme appropriée pour recevoir la pièce
tubulaire afin que l'extrémité de celle-ci soit couverte de matériau
fondu.
Le brevet britannique présente une disposition selon laquelle un
support mécanique se déplace relativement à un autre et réussit
l'alignement dynamique du manchon de centrage par mouvement dans trois
directions dans un logement contenant le matériau à être durci.
notre avis, la revendication 1 modifiée vise la disposition d'écrite
dans le brevet britannique. On ne retrouve pas cependant dans le
brevet britannique la revendication (2) du demandeur, qui décrit une
pièce tubulaire s'encastrant dans une gorge contenant un matériau
fondu couvrant l'extrémité de ladite pièce tubulaire.
Le brevet européen présente un manchon de centrage en deux parties
dont l'une peut être déplacée dans trois directions et qui porte en
son extrémité sur l'autre pièce. Cependant, elle ne contient pas de
logement pouvant contenir le matériau fondu, et ne prévoit pas
l'immersion d'un manchon de centrage tubulaire dans un matériau
durcissable contenu dans un logement se trouvant dans une autre
pièce. Nous croyons que ce brevet ne contient pas les
caractéristiques précisées par le demandeur.
Nous recommandons donc le retrait du rejet de la demande parce qu'elle
ne concerne pas un objet brevetable. En ce qui a trait à la
revendication modifiée proposée, nous recommandons que son rejet se
fonde sur le fait qu'elle ne se différencie pas du brevet britannique
cité, alors que la revendication 2 liée à la revendication 1 modifiée
devrait être acceptable par rapport à l'antériorité.
M.G. Brown S.D. Kot
Président intérimaire Membre
Commission d'appel des brevets
Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission
d'appel des brevets. Par conséquent, je retire le rejet de la demande
et je refuse d'accorder un brevet contenant la revendication 1
modifiée. Le demandeur a un délai de six mois pour en appeler de ma
décision devant la Cour fédérale du Canada, en vertu de l'article 42
de la Loi sur les brevets.
J.H.A. Gariépy Goudreau, Gage, Dubuc &
Commissaire des brevets Martineau, Walker
3 400, La Tour de la Bourse
Fait à Hull (Québec) B.P. 242, Place Victoria
le 27e jour de février 1989. Montréal (Québec)
H4Z 1E9