Brevets

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                    BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

                  DECISION DU COMMISSAIRE DES BREVETS

 

Les demandes de brevet 446 251 et 502 373 ayant été rejetées en

vertu de l'article 47(2) des Règles sur les brevets, le demandeur

a demandé que les décisions finales de l'examinateur soient

révisées. Les demandes rejetées ont donc été examinées par la

Commission d'appel des brevets et par le commissaire des brevets.

Les conclusions de la Commission et la décision du commissaire

sont les suivantes:

 

Agent du demandeur

Dennison Associates

133, rue Richmond Ouest

Toronto (Ontario)

M5H 2L7

 

                  DECISION DU COMMISSAIRE

 

Le fait d'inclure dans une demande, comme revendications

divisionnaires, des revendications qui ont été retirées

d'une autre demande après entente que celle-ci serait

acceptée à la suite du retrait de ces revendications, est

considéré inacceptable, tout comme le fait de déposer une

demande de redélivrance contenant des revendications

retirées auparavant en prétextant une erreur commise par

inadvertance, accident ou méprise pour justifier la

redélivrance. Le rejet de la demande est maintenu.

 

La présente décision porte sur la requête de révision présentée

au Commissaire des brevets par le demandeur pour que soient

révisées les décision finales de l'examinateur au sujet de la

demande de redélivrance 446 291 du brevet 1 131 273 et de la

demande de redélivrance 502 .s73 du brevet 1 171 117 déposée comme

demande divisionnaire de la demande originale qui a mené à

l'émission du brevet 1 131 273. Pour les deux demandes (toutes

deux intitulées BACHE ENROULABLE POUR REMORQUES), le

pétitionnaire est la Wahpeton Canvas Company Inc., le demandeur

original. Les inventeurs sort Jerry R. Dimmer et al.

 

L'examinateur chargé d'étudier la demande a rendu les décisions

finales les 20 août 1985 et 4 mai 1988, rejetant la redélivrance

des brevets. Bien que les deux demandes aient été révisées

ensemble, le demandeur a accepté que la décision rendue fasse

partie du dossier de chacune des demandes. Une audience a eu

lieu le 12 juillet 1989 pour la révision des deux demandes et

M. F. Farfan, agent des brevets, représentait le demandeur. M.

Farfan a par la suite présenté un document supplémentaire le 16

juillet 1989.

 

Les demandes révèlent un système de bâche enroulable pour couvrir

une serai-remorque, comme le montrent les figures 1, 4 et 5

reproduites ci-dessous. La bâche est fixée à 28 et accrochée au

tube 36 qui la déroule jusqu"à sa position sous la plaque 50

inclinée vers le bas et dirigée vers l'extérieur afin d'empêcher

que le vent secoue la bâche. Le tube, par l'intermédiaire d'un

joint de cardan 44, est actionné par la tige 46 et la manivelle

48 qui sert, avec la barre 58, à fixer la bâche sous la plaque.

 

                       <IMG>

 

En rejetant la demande 446 291, l'examinateur a déclaré en partie

ce qui suit:

 

Cette demande comporte 64 revendications.

 

Le rejet des revendications 14 à 64 est maintenu. Les

revendications 1 à 13 sont acceptées .

 

Une redélivrance est une modification qui ne peut être acceptée

que si les défauts du brevet original résultent d'une erreur

commise par inadvertance, accident ou méprise. Une redélivrance

n'est donc pas permise afin d'insérer dans un brevet des

revendications de portée plus étendue que celle des

revendications du brevet original en retirant des restrictions

qui ont déjà été introduites intentionnellement. Le consentement

à la modification d'une revendication qui restreint la portée de

l'invention telle qu'elle avait initialement été décrite et

revendiquée, soit pour que la demande soit acceptée, soit pour

éviter un conflit, constitue une preuve évidente d'une intention

de la part du demandeur et ne peut donc pas être annulé par la

redélivrance du brevet.

 

Le demandeur doit prendre note qu'à la suite de

l'entrevue qui a eu lieu entre l'agent qui le

représentait à ce moment et l'examinateur, il a consenti

à ajouter la restriction la plaque de verrouillage 50 est

inclinée vers l'extérieur et dirigée vers le bas dans

toutes les revendications. La lettre du demandeur du 12

mai 1982, qui fait partie du dossier du brevet 1 131 273,

contient un compte rendu de cette entrevue.

 

Les revendications 14 à 64 ne comprennent pas la

restriction citée ci-dessus, à laquelle le demandeur a

consenti, et le refus de ces revendications est donc

maintenu.

 

En réponse, le demandeur affirme que ses brevets 1 131 273 et 1

171 117 sont défectueux à cause d'une description insuffisante ou

parce qu'il a revendiqué moins qu'il n'avait le droit de

revendiquer, et il demande un ou plusieurs brevets pour obtenir

la pleine protection à laquelle il a droit. Il affirme en partie

ce qui suit:

 

. . .

 

En somme, l'invention n'a simplement besoin, entre autres

choses, que d'un mécanisme de retenue pour empêcher le

mouvement vers le haut de: la barre lorsqu'elle est

remontée. Le matériau déroulé n'est pas calé en place.

Il est maintenu sous tension contre le mécanisme de

retenue par une manivelle. Il n'est pas important pour

l'invention que la plaque de verrouillage soit d'un genre

particulier.

 

...l'examinateur a demandé que la restriction soit

ajoutée pour que la plaque de verrouillage inclinée vers

l'extérieur et dirigée vers le bas soit mentionnée dans

la description de l'invention. Cet élément ne fait pas

partie de l'invention pour les raisons données aux

alinéas 3(c) à 3(e) de la: pétition de redélivrance. La

présence de cette restriction est la raison essentielle

du dépôt de cette demande: de redélivrance.

 

. . .

 

Il est mentionné dans le document du 12 mai 1982

modifiant la demande originale, qu'«un certain nombre de

modifications ont été apportées aux revendications

suivant les recommandations de l'examinateur». Le

document présenté expose ensuite un certain nombre de

modifications, y compris l'annulation sous toutes

réserves de la revendication 1 telle qu'elle avait été

déposée à cette date, qui ne comprenait pas la

restriction maintenant demandée par l'examinateur.

. . .  L'agent du demandeur a soumis des demandes de

renseignements en mars 1982. Il a déposé une requête de

décision le 20 avril 198:2. En mai 1982, il a de nouveau

présenté des demandes de renseignements. Aux environs du

4 mai 1982, l'agent du demandeur s'est entretenu au

téléphone avec le directeur de l'Examen des brevets . . .

 

Aux environs du 6 mai 1982, l'agent du demandeur a reçu

un appel téléphonique du chef de section . . .  Aux environs

du 6 ou du 7 mai 1982, il a reçu un appel de

l'examinateur, qui l'informait qu'il avait quelques

suggestions de modifications à apporter aux

revendications . . .

 

De plus, dans sa décision officielle du 20 août 1985, le

commissaire déclare qu'« ... à la suite de l'entrevue qui

a eu lieu entre l'agent qui représentait alors le

demandeur et l'examinateur, le demandeur a consenti à ce

que la restriction la plaque de verrouillage 50 est

inclinée vers l'extérieur et dirigée vers le bas soit

ajoutée à toutes les revendications».

 

La restriction demandée par l'examinateur dans cette

décision a été incluse dans la demande originale et dans

le brevet original à la suite d'une erreur commise par

inadvertance, accident ou méprise. Après l'entrevue du

10 mai 1982 de l'examinateur avec l'agent du demandeur,

l'agent a communiqué sans tarder par téléphone avec

l'agent américain. Ce dernier a demandé à l'agent

canadien d'effectuer la modification. Il n'a pas discuté

de cette modification avec le demandeur ou les

inventeurs. Il a donc commis une erreur en ne discutant

pas avec eux de la portée de l'invention et en ne

comprenant pas la nature véritable de l'invention. Il a

également commis une erreur en ne cherchant pas à obtenir

la plus grande protection possible pour l'invention.

 

L'agent canadien a donc effectué la modification suivant

les directives fautives de l'agent américain. Il a donc

par inadvertance introduit l'erreur dans la demande

canadienne, comme l'indique le paragraphe 4 de la

pétition de redélivrance. Donc, le défaut d'inclure une

revendication de portée étendue ne comportant pas une

telle restriction constituait une erreur commise par

inadvertance, accident ou méprise.

 

Le 12 mai 1982, le demandeur a déposé la modification

avec l'intention de déposer une demande divisionnaire

comportant la revendication annulée. Il croyait que la

demande divisionnaire permettrait de résoudre tout

conflit. La revendication a donc effectivement été

incluse dans la demande divisionnaire 408 317 déposée le

28 juillet 1982. Aucun conflit n'a été soulevé au cours

de la poursuite de cette demande.

 

. . .

 

La décision finale de l'examinateur au sujet de la demande 502

373 se lit en partie comme suit:

 

. . .

 

Les revendications 1 à 13 de la présente demande

divisionnaire sont identiques aux revendications incluses

dans la demande originale qui a mené à l'émission du

brevet 1 131 273 et aux revendications faisant l'objet de

la demande de redélivrance 446 291. Comme il a été

mentionné précédemment, le demandeur considérait ces revendications

comme ayant pour objet une invention différente de celle de la

revendication unique contenue dans la demande poursuivie et le brevet 1

171 117. Une demande de redélivrance doit avoir pour objet la même

invention que le brevet original, comme le stipule l'article 14.01 du

Recueil des pratiques du Bureau des Brevets, dernière phrase, premier

paragraphe. Donc les revendications 1 à 13 ne peuvent pas faire l'objet

d'une redélivrance à la suite de cette demande.

 

De plus, le demandeur a cité l'article 10.08.03, avant dernier

paragraphe, du Recueil des pratiques du Bureau des Brevets, qui stipule

essentiellement qu'un demandeur ne peut justifier des revendications

faisant partie d'une demande divisionnaire en les insérant par la suite

dans la demande originale passé le dépôt de la demande divisionnaire.

Les revendications 1 à 64, telles qu'elles avaient initialement été

déposées dans cette demande, n'apparaissaient pas dans la demande

originale 364 734 (à l'exception des revendications 1 à 13) avant le

dépôt de la demande divisionnaire 408 317. L'article 10.08.03, dernier

paragraphe, du Recueil des pratiques du Bureau des Brevets stipule qu'en

tout temps, advenant qu'une demande divisionnaire revendique de la

matière non revendiquée dans la demande originale, alors le demandeur

est avisé que ladite demande divisionnaire ne peut jouir de l'état

divisionnaire. Donc, puisque la présente demande contient de la matière

non revendiquée dans la demande originale, elle ne peut par conséquent

jouir de l'état divisionnaire. Toute mention de l'état divisionnaire

doit être supprimée de la présente demande.

 

Les revendications 14 à 64 telles qu'elles ont été déposées initialement

sont considérées comme ayant pour objet des inventions différentes de

celle de la revendication unique énoncée dans le brevet 1 171 117 et on

se réfère encore une fois à l'article 14.01, dernière phrase, premier

paragraphe, du Recueil des pratiques du Bureau des Brevets.

 

Les revendications 1 à 64 telles qu'elles ont été déposées dans la

présente demande sont identiques aux revendications 1 à 64 de la demande

de redélivrance 446 291 également en instance, qui est la demande de

redélivrance de la demande originale.

 

Les revendications modifiées 14 à 54 de la présente demande sont

considérées comme ayant pour objet une invention différente de celle de

la revendication unique énoncée dans le brevet 1 171 117 et ne peuvent

pas faire l'objet d'une redélivrance en vertu de l'article 14.01,

dernière phrase, premier paragraphe, du Recueil des pratiques du Bureau

des Brevets.

 

Les revendications 1 à 54 (à l'exception des revendications 1 à 13) de

la présente demande revendiquent de la matière non revendiquée dans la

demande originale, alors elles ne meuvent fouir de l'état divisionnaire.

Toute mention de l'état divisionnaire doit être supprimée de la présente

demande, comme le stipule le dernier paragraphe de l'article 10.08.03 du

Recueil des pratiques.

 

Avec la perte de l'état divisionnaire, la présente demande devient une

demande ordinaire déposée le 20 février 1986 et toutes les citations

s'appliquent, soit le brevet canadien 1 131 273 daté du 7 septembre

1982, correspondant au brevet américain 4 302 043 daté du 24 novembre

1981, et le brevet canadien 1 132 168 daté du 21 septembre 1982.

 

A l'article 4 de la pétition de redélivrance, le demandeur déclare que

les agents des brevets ont omis de consulter le pétitionnaire et ont

donc négligé (page 4) de revendiquer l'invention. En effet, le

demandeur déclare qu'il y a eu «ingéniosité inventive» insuffisante de

la part de l'avocat de brevets et que celui-ci n'a pas inséré des

revendications aussi larges qu'elles auraient pu l'être . . .

 

L'ingéniosité inventive dépend donc de l'habileté et de l'expérience du

rédacteur des revendications plutôt que du défaut de communiquer

l'invention originale.

 

La Cour suprême du Canada . . .  dans l'affaire Burton Pansons v.

Hewlett Packard (1976) 1. R.C.S., p. 555 à 568 a rejeté

l'affirmation qu'aucune erreur n'avait été commise parce que toute

inadvertance ou faute était celle de l'agent et non celle du

demandeur:

 

«Quand à la prétention qu'aucune «erreur» n'a été commise

parce que toute inadvertance ou faute est celle des

avocats de brevets et non celle de l'inventeur lui-même,

je ne vois rien qui puisse motiver une interprétation à ce

point restrictive de la Loi. Dans les cas de demandes de

prorogation de délai, de redressement suite à une non-

comparution et d'autres demandes semblables, aucune cour

ne retiendrait la prétention que le délai ou la négligence

résulte du fait de l'avocat de la partie et non de la

partie elle-même.»

 

Mais inversement, lorsqu'un agent pose un acte délibéré, le

demandeur ne peut pas désavouer ce que son agent a fait pour lui.

Dans l'affaire Bandag v. Vulcan Equipment 32 C.P.R. (2d) (une

affaire de brevet), à la page 3, la Cour fédérale a jugé correcte

la décision rendue dans l'affaire Scherin v. Paletta (1966) 57

D.L.R. (2d), p. 532 à 534, soutenant que:

 

[TRADUCTION] Lorsqu'un mandant donne à un agent

l'autorité générale pour mener une affaire en son nom, il

est lié en ce qui concerne une tierce personne par chaque

acte posé par l'agent qui a un effet sur le cours normal

de cette affaire ou qui entre dans les compétences de

l'agent.

 

. . .

 

. . .  dans  l'affaire Northern Electric v. Photosound, 1936,

C.L.R., p. 649 à 652:

 

[TRADUCTION Il n'est pas question dans la loi du cas où

un inventeur a fait défaut de revendiquer la protection

d'une chose qu'il a inventée, mais du cas où un inventeur

a fait défaut de décrire ou de spécifier suffisamment une

invention parce qu'il ne savait pas ou ne croyait pas que

ce qu'il avait fait constituait une invention au sens de

la loi régissant les brevets et que, par conséquent, il

n'avait pas l'intention de la décrire ou de la spécifier

ou de la revendiquer dans sa demande de brevet originale.

 

L'article exclut définitivement toute intention d'exonérer

le demandeur dans un tel cas».

 

De plus, à la page 653:

 

[TRADUCTION Pour le moins, la loi doit considérer qu'il

y a matière raisonnable à une certaine appréhension de la

part du breveté original que le brevet soit défectueux au

sens de l'article cela constituerait, à mon avis, un

abus de langage que de considérer qu'il y a matière à

appréhension dans un cas où il est évident que le brevet

correspond entièrement à l'intention du demandeur, qu'il

n'y a aucune insuffisance dans la divulgation ou la

spécification par rapport au but que le demandeur avait en

tête, autrement dit, que l'invention pour laquelle le

breveté tentait d'obtenir une protection est très

certainement et suffisamment décrite et spécifiée. Dans un

tel cas, le brevet n"est en aucun sens défectueux».

 

Il est fait référence à une décision de la jurisprudence

américaine sur la redélivrance, à savoir In ne Beyers (1956) (109

USPQ, p. 53 à 56):

... dans l'affaire Dobson v. Lees, 137 U.S. 258, la

Cour suprême des Etats-Unis déclare:

[TRADUCTION] Une redélivrance est une modification,

et elle ne peut être acceptée à moins que les défauts

du brevet original aient été commises par

inadvertance, accident ou méprise, sans intention de

frauder. Une redélivrance n'est donc pas permise afin

d'insérer des revendications de portée plus étendue

que celle des revendications originales en y insérant

de la matière une fois qu'elle a été omise

intentionnellement. Le consentement au rejet d'une

revendication, la supression d'une revendication par

une modification, soit pour que la demande soit

acceptée ou pour éviter un conflit, l'acceptation d'un

brevet contenant des restrictions imposées par le

Bureau des Brevets, qui limitent la portée de

l'invention telle qu'elle avait été initialement

décrite et revendiquée, sont des exemples d'une telle

omission.

 

De même, dans l'affaire Shepard v. Corrigan, 116 U.S. p. 593, la

Cour déclare ce qui suit:

 

[TRADUCTION] Lorsque le demandeur d'un brevet visant à

protéger une nouvelle combinaison est obligé en raison du

rejet de sa demande par le Bureau des Brevets de

restreindre la portée de ses revendications par l'ajout

d'un nouvel élément, il ne peut pas, après l'émission du

brevet, élargir la portée de sa revendication en supprimant

l'élément qu'il avait été obligé d'inclure dans la

revendication afin d'obtenir son brevet.

 

. . . Le commissaire déclare ce qui suit dans sa décision dans

l'affaire Ex parte White 1928 C.D. 6:

 

[TRADUCTION] Le retirait intentionnel d'une

revendication dans le but d'obtenir un brevet permet

de présumer qu'aucune erreur n'a été commise par

inadvertance, accident ou méprise, et l'invention

ainsi abandonnée ne peut être récupérée par une

interprétation large des revendications du brevet ou

par l'obtention d'une redélivrance avec des

revendications plus larges. La règle est la même, que

les revendications demandées par redélivrance ou

autrement soient identiques, essentiellement les mêmes

ou plus larges que les revendications abandonnées.

 

Si on examine la revendication 56 telle qu'elle a initialement

été déposée dans cette demande, il est évident qu'elle a été

élargie, de même que la revendication modifiée 37; ces deux

revendications s'avèrent inacceptables si on considère le

brevet américain 2 976 082 émis le 21 mars 1961 à Dahlman qui a

été d'abord cité dans la décision du Bureau du 22 mai 1981 dans

la poursuite de la demande originale portant le numéro de série

364 734 et ayant mené à L'émission du brevet 1 131 273. Il

faut donc en conclure que: le demandeur présente une demande de

redélivrance afin de changer les revendications parce que le

brevet est contourné par d'autres, et une telle assertion est

niée par l'existence du conflit mentionné à la page 6 de la

pétition. Il est fait référence à l'article 14.08 (J) du

Recueil des pratiques du Bureau des Brevets qui donne une

raison qui ne peut justifier une redélivrance.

 

. . . il est également fait. référence à l'affaire Northern

Electric v. Photo Sound, supra et à la page 89 de cette

décision et en particulier à un passage de Robinson on Patents,

Vol. 2, page 318 . . .

 

. . . Si l'idée des moyens présentait des possibilités de

développement ou de nouvelle application que l'inventeur n'a

pas saisies à ce moment, elles ne faisaient pas partie de son

invention réelle. Si son idée, telle qu'elle a déjà été conçue

et arrêtée était divisible en d'autres idées de moyens, dont

seulement une partie aurait été réduite à la pratique, seule

cette dernière aurait pu constituer son invention. Si son idée

comportait différents éléments, capables de se concrétiser en

des inventions essentiellement distinctes, chacune d'entre

elles ayant alors constitué de la matière pour un brevet

indépendant, celle qu'il a choisie comme objet du brevet dont

la modification est en cause est la seule invention que le

brevet aurait protégé s'il avait été parfait. Les limites de

cette invention excluent donc tout nouveau développement

d'idées de moyens qui serait survenu après l'émission du brevet

original, toutes les idées qui n'avaient pas été réduites à la

pratique avant la demande de brevet originale et toutes parties

ou formes distinctes ou indépendantes de l'invention qui

n'étaient pas incluses dans la matière du brevet déjà émis; et

par conséquent, aucun défaut ni énoncé incomplet de ces

éléments ne peut rendre le brevet original nul ou inopérant, ou

fournir la possibilité de le modifier. Tout ce que le brevet

peut protéger, grâce à tout degré ou toute sorte de correction,

ce sont les moyens complètement conçus, perçus et réalisables

que l'inventeur a demandé à protéger et auquel le gouvernement

a accordé une protection. Des inventions réalisées entre-

temps, qu'elles soient entièrement distinctes ou qu'elles

consistent en des variations ou des améliorations importantes

de l'invention originale, des attributs de l'invention ou de

n'importe laquelle de ses parties découverts subséquemment, des

techniques ou des instruments indépendants qui tirent cependant

leur origine de la même idée fondamentale, et une nouvelle

matière de tout genre, dépassent également la portée du brevet

original et de toute correction ou élargissement de ses

revendications par une redélivrance.

 

. . .

 

Le demandeur a répondu à la décision finale au sujet de la demande 502

373 en partie comme suit:

 

La seule intention du demandeur dans la poursuite de cette

demande et de la demande originale de redélivrance était

d'obtenir un brevet de la portée à laquelle il avait droit, ni

plus ni moins. Le demandeur a simplement cherché à corriger

les différentes erreurs survenues durant la poursuite des deux

demandes originales.

 

Durant la poursuite de la demande de redélivrance originale,

une décision rendue en 1981 par le Bureau des Brevets a été

portée à l'attention du soussigné (la décision, dont on croyait

qu'elle n'avait jamais été citée, a toutefois été brièvement

citée dans le bulletin no 85 de l'Institut canadien des brevets

et marques du 30 septembre 1981; une copie de cette citation a

été déposée). Dans cette affaire qui portait sur la

redélivrance du brevet canadien 1 101 917, deux brevets

canadiens, un brevet original et un brevet divisionnaire, ont

été abandonnés et redélivrés en un seul brevet. C'est à la

lumière de ce précédent que le demandeur a soumis la présente

demande et qu'il a abandonné sa demande divisionnaire.

 

Les circonstances de cette affaire sont pratiquement identiques

à celles du brevet 1 101 917. Le demandeur a maintenant

abandonné son brevet original et son brevet divisionnaire et il

cherche la même compensation que celle qui a été accordée

relativement au brevet 1 101 917. Les faits sur lesquels le

demandeur appuie sa demande de redélivrance ont été exposés en

entier dans les pétitions qu'il a déposées. Le demandeur est

prêt à modifier l'une ou l'autre de ces pétitions, ou les deux,

de n'importe quelle façon exigée par le Bureau des Brevets de

manière à rendre effectives ses intentions mentionnées ci-

dessus.

 

Les examinateurs chargés de la poursuite de cette demande de

redélivrance et de la demande originale de redélivrance ont

tous maintenu qu'à leur avis, le fait que certains actes aient

été posés volontairement par les agents du demandeur empêche

maintenant le Bureau des brevets d'accorder la redélivrance du

brevet. La position du demandeur tout au long de la poursuite

de cette demande a été que nonobstant toute nature volontaire

de tels actes, ces derniers ont

toutefois été posés à la suite d'une erreur commise par accident,

inadvertance ou méprise, ce qui donne droit au demandeur à la

redélivrance du brevet.

 

 . . .

 

. . .  Le brevet divisionnaire est un brevet déjà émis.

L'assertion qu'il pourrait perdre son état divisionnaire n'a

aucun fondement. La demande soumise à l'examinateur est une

demande de redélivrance. Il ne s'agit as d'une nouvelle

demande qui aurait été déposée le 20 février 1986 et il n'est

en aucun cas justifié de la traiter comme une nouvelle demande.

 

La seule décision que l'examinateur a le droit de prendre est

de déterminer si oui ou non les conditions de redélivrance

stipulées dans l'article 50 de la Loi sur les brevets ont été

remplies en ce qui concerne le brevet divisionnaire. Il est

reconnu qu'une demande de redélivrance est soumise à un examen

de la technique. Toutefois, comme le stipule le paragraphe

14.10.02 du Recueil des pratiques du Bureau des Brevets, un tel

examen se limite à la nouvelle technique qui aurait dû

s'appliquer (ou à la technique qui a été appliquée) en

opposition à la demande originale. Aucun nouvelle technique

n'a été mentionnée ni prise en considération par l'examinateur.

 

Compte tenu de ce qui précède, nous soumettons respectueusement

que les brevets canadiens 1 131 273 (correspondant au brevet

américain 4 302 043) et 1 132 168 ne sont pas pertinents à la

poursuite de la demande. . . .

 

. . .

 

. . .  le demandeur nie qu'il cherche à augmenter l'«ingéniosité

inventive insuffisante». Le fait est que l'invention a été

entièrement décrite et appuyée par des exemples dans la demande

de brevet originale. Les défauts mentionnés dans les pétitions

étaient liés non pas à la divulgation de l'invention, mais aux

revendications de l'invention entièrement appuyées par la

divulgation. La position du demandeur est que les

revendications 1 à 13 du brevet original et la revendication 1

du brevet divisionnaire original ne revendiquent pas

correctement l'invention,, car elles n'ont pas la portée à

laquelle le demandeur avait droit (selon la description de

l'invention). Le demandeur estime qu'il avait droit, et qu'il

a toujours eu droit, aux revendications plus larges qu'il

cherche à obtenir maintenant, parce qu'elles sont entièrement

justifiées et appuyées par la divulgation originale. C'est en

raison des erreurs mentionnées dans les pétitions que ces

revendications n'ont pas été obtenues dans les brevets

originaux.

 

La décision rendue dans l'affaire Northern Electric . . .  ne

s'applique que dans le cas où «un brevet correspond entièrement

à l'intention du demandeur» ou lorsqu'«une invention pour

laquelle le breveté a tenté d'obtenir une protection est

certainement et suffisamment décrite et spécifiée» (souligné

ajouté).

 

. . .

 

Le demandeur affirme en outre que l'affaire Bandas, également

citée par l'examinateur, n'était liée en aucune façon à

l'article 50 et n'est donc pas pertinente aux questions se

rattachant à la présente demande . . .  le mandat que donne un

demandeur à un agent des brevets est d'obtenir pour l'invention

des revendications de la portée à laquelle il a droit. Le

Bureau des Brevets connais bien ce fait, qui constitue le

fondement sur lequel la poursuite de toutes les demandes de

brevets s'appuie. Enfin, le demandeur fait remarquer que si la

position de l'examinateur au sujet de l'affaire Bandag devait

prévaloir, le résultat serait complètement contraire à la règle

de droit jurisprudentiel clairement établie par la Cour suprême

du Canada . . .  dans l'affaire Burton-Parsons. . . .

 

L'examinateur se fonde également sur les causes américaines In

re Beyers, Dobson v. Lees, Shepard v Corriqan et Ex parte

white pour appuyer son assertion ... Si la jurisprudence

américaine est différente, alors nous soumettons

respectueusement que cette jurisprudence ne constitue pas la

loi canadienne et qu'elle ne s'applique pas au Canada.

 

. . .

 

. . . il est également à remarquer que dans les causes Dobson,

Shepard et White, les décisions ont toutes été rendues avant

les affaires Curlmaster et Burton Parsons et de toute évidence

sans qu'on en ait tenu compte.

. . . Dans l'affaire Dahlman, on décrit un appareil qui utilise

un agencement complexe de ressorts servant à tendre la bâche.

On ne suggère certainement pas - et on décrit encore moins -

l'utilisation d'un mécanisme de retenue pour empêcher

l'enroulement de la bâche et pour tendre cette dernière . . .

 

. . .

 

Le demandeur nie qu'il cherche actuellement à protéger une

nouvelle invention conçue après que les brevets originaux ont

été émis. La nature de l'invention qu'il cherche à protéger

est clairement définie dans les pétitions.

 

La question soumise à la Commission est de déterminer si oui ou non les

demandes de redélivrance des brevets 1 131 273 et 1 171 117 devraient

être acceptées. Voici une comparaison de la revendication 1 contenue

dans chacune des demandes:

 

Demande 446 291                            Demande 502 373

 

Un recouvrement pour une

carrosserie allongée munie d'une

ouverture allongée, comprenant:

un matériau de recouvrement

flexible d'une dimension                    (même chose)

longitudinale environ égale à la

dimension longitudinale de

l'ouverture et d'une dimension

latérale un peu plus grande que

la dimension latérale de

l'ouverture, le matériau de

recouvrement possède une bordure

longitudinale adaptée pour être

fixée à un rebord longitudinal de

l'ouverture;

une barre est fixée

à l'autre bordure longitudinale

du matériau de recouvrement;

la manivelle fixée à la barre                 moyen (même chose)

permet de déplacer celle-ci

perpendiculairement à la

carrosserie pour enrouler ou

dérouler le matériau de

recouvrement; et

 

une plaque adaptée pour venir                  (même chose)

s'engager dans un rebord

longitudinal opposé de

l'ouverture, ladite plaque

 

étant inclinée vers                              possédant une surface

l'extérieur et dirigée vers le                   qui s'étend vers

bas                                              l'extérieur

 

par rapport à l'ouverture pour

tenir ladite barre et ledit

matériau calés lorsque ledit

matériau est déroulé de ladite                   (même chose)

barre par-dessus ladite plaque et

inversement lorsqu'il est enroulé

autour de ladite barre contre la

surface.

 

Dans cette décision, on utilise la numérotation des articles de la Loi

sur les brevets en vigueur le 12 décembre 1988, tandis que dans les

décisions finales et les réponses du demandeur, c'est celle de la loi en

vigueur avant cette date qui est utilisée.

 

Pendant l'audience, M. Farfan a présenté cinq figures dans une page

intitulée «Aperçu de l'invention» et deux pages intitulées «Liste

d'erreurs» pour tenter de montrer ce qu'il décrit comme un «déroulement

sous tension». Il soutient que cette information complète les données

contenues dans les pétitions de redélivrance respectives et qu'elle

définit l'étendue de la protection initialement demandée. Il se réfère

à la Partie 5 de la pétition 502 373, qui contient la description d'un

avocat américain, James P. Ryther, du genre d'action et des structures

nécessaires pour dérouler une bâche sous un support afin d'obtenir un

«déroulement sous tension» de la bâche, description qui contredit les

restrictions du brevet 1 131 273, soit une plaque inclinée vers

l'extérieur et dirigée vers le bas, et le calage de la bâche. Il fait

remarquer que M. Ryther s'est penché sur l'aspect du «déroulement sous

tension» du 20 mai au 1er août 1982, période de temps qui est antérieure

à l'émission du brevet 1 131 273, le 7 septembre 1982.

 

M. Farfan soutient que le «déroulement sous tension» est possible tant

avec une plaque horizontale qu'avec une plaque inclinée, comme le

montrent les figures 2 et 4 de sa présentation, qui sont reproduites ci-

dessous:

 

                        <IMG>

 

Il affirme que dans chaque figure la bâche est enroulée en sens inverse

par-dessus la surface de la plaque et puis vers le bas jusqu'à ce que la

bâche touche le dessous de la plaque, et, à ce moment-là seulement, la

bâche est enroulée un peu plus pour être tendue, et non pas pour être

calée contre le côté du conteneur, par exemple, et ainsi obtenir un

«déroulement sous tension». M. Farfan soutient que les limitations

d'une plaque inclinée vers l'extérieur et vers le bas et que le calage

de la bâche mentionnés dans 1.a revendication 1 du brevet 1 131 273 à la

suite d'une modification effectuée le 12 mai 1982 limitent indûment la

portée de l'invention. M. Farfan affirme que les inventeurs n'auraient

pas dû être privés d'une matière qu'ils avaient l'intention de protéger,

et il se fonde sur l'affaire Curl Master v. Atlas Brush (1966) EX. C.R.

4; (1967) R.C.S. p.514.

 

Dans le document présenté le 18 juillet 1989, M. Farfan compare la

plaque inclinée vers l'extérieur et dirigée vers le bas qu'on retrouve

dans les demandes du demandeur et la plaque horizontale du brevet Michel

1 132 168. Il note que le rouleau du brevet Michel effectue une

rotation d'une fraction de tour jusqu'à ce que la bâche soit à un angle

d'environ 90.degree. par rapport au rebord du brevet Michel avant de tendre le

rouleau, comme le prétend Michel. En affirmant qu'il n'y a pas de

différence matérielle entre la revendication 1 de Michel et la

revendication 1 du brevet 1 131 273, M. Farfan prétend que le Bureau a

commis une erreur en omettant de déclarer un conflit entre les demandes

du demandeur et la demande alors en instance de Michel.

 

La Commission estime qu'il y a un nouvel élément dans les demandes de

redélivrance, qui s'ajoute à l'orientation donnée par l'affaire Curl

Master, supra, dans laquelle la description et les dessins de la demande

avaient été examinés soigneusement. La nouvelle dimension provient des

circonstances liées au désir du demandeur d'obtenir un brevet canadien

au moment où il poursuivait sa demande originale. A cet égard, le

dossier montre que le demandeur était très pressé; en effet, une

ordonnance spéciale a été rendue, suivie de longues discussions entre

l'agent canadien du demandeur et le personnel examinateur sur la

description et les dessins dans le but de s'entendre sur la matière

pouvant faire l'objet de revendications et d'un brevet, et à la suite

desquelles la revendication 1 a été modifiée et a mené à l'émission du

brevet 1 131 273. L'affaire Curl Master ne comporte pas ce nouvel

élément.

 

Le demandeur soutient qu'aucun conflit n'a été déclaré en rapport avec

la demande qui a mené à l'émission du brevet 1 171 117, dans lequel la

revendication large, retirée de la demande qui a mené à l'émission du

brevet 1 131 273, avait été déposée par le demandeur à titre de

revendication divisionnaire. Pendant l'audience, le chef de la Section

des divisions, qui avait participé aux discussions menant à l'émission

du brevet, a déclaré que le 10 mai 1982, une entente était intervenue

avec l'agent représentant alors le demandeur, les parties s'étant

entendues sur une revendication acceptable appuyée par la description et

les dessins de la demande, et que le 12 mai, les représentants

américains avaient accepté le contenu de la revendication. Le dossier

indique que la revendication 1 modifiée a été déposée avec la lettre

datée du 18 mai 1982, et aucune mention n'était faite de l'intention de

déposer la revendication annulée comme revendication divisionnaire dans

une autre demande. Quoiqu'il en soit, le demandeur a déposé une demande

divisionnaire qui comportait comme unique revendication la revendication

1 ayant été annulée, dont M. Farfan fait remarquer qu'elle était en

instance en même temps que la demande de Michel, soit du 28 juillet 1982

au 22 septembre 1982, date à laquelle le brevet Michel a été émis.

 

En ce qui concerne les arguments au sujet de l'annulation sous toutes

réserves, le demandeur a supprimé la revendication large et l'a

remplacée par une revendication modifiée pour obtenir le brevet

 

1,131,273. Quant à l'affirmation qu'il n'y avait pas eu déclaration de

conflit lié à la demande qui a mené à l'émission du brevet 1 171 117, il

est à noter que le retrait par le demandeur de la revendication large

aurait alors permis au Bureau d'accepter la demande du demandeur et

celle de l'autre partie. En effet, les dossiers indiquent que

l'examinateur a accepté la demande originale du demandeur 364 734 et la

demande de Michel le même jour, le 26 mai 1982. D'après

l'interprétation que fait le Bureau des raisons décrites à l'article

14.08 du Recueil des pratiques du Bureau des Brevets, le fait de

présenter plus tard une revendication large annulée comme revendication

unique d'une demande identifiée par le demandeur comme demande

divisionnaire, compte tenu que cette revendication avait été

délibérément annulée antérieurement, constitue une façon douteuse

d'invoquer la présence d'un conflit.

 

On peut se demander si l'idée présentée par M. Farfan, dans les figures

1 à 5 de sa présentation, a été perçue par l'inventeur ou par M. Ryther,

à la suite de la discussion qui a eu lieu entre les agents des brevets

et le personnel examinateur en mai 1982. Il faut également déterminer

si les caractéristiques de l'invention dont M. Ryther parle dans sa

déclaration sont «...des attributs de l'invention qui ont été découverts

subséquemment...et qui dépassent la portée du brevet original...», comme

c'est la cas dans le passage de Robinson on Patents cité par

l'examinateur et tiré de l'affaire Northern Electric v Photo Sound,

supra. On peut aussi s'interroger sur la modification que l'agent a

apportée intentionnellement en mai 1982 en vue de l'obtention du brevet

1 131 273, en gardant à l'esprit les commentaires sur la redélivrance

auxquels on fait référence dans l'affaire re Byers 109 USPQ pages 53 à

56, colonne 1, et qui ont été énoncés par la Cour suprême des Etats-Unis

dans l'affaire Dobson v. Lees 137 U.S. 258:

 

Une redélivrance est une modification qui ne peut être acceptée

que si les défauts du brevet original résultent d'une erreur

commise, sans intention de frauder, par inadvertance, accident

ou méprise. Une redélivrance n'est donc pas permise afin

d'insérer dans un brevet des revendications de portée plus

étendue que celle des revendications du brevet original en

ajoutant de la matière quai avait déjà été omise

intentionnellement. L'acceptation du rejet d'une

revendication, le retrait d'une revendication à l'aide d'une

modification, soit pour que la demande de redélivrance soit

acceptée ou pour éviter un conflit, l'acceptation d'un brevet

contenant des restrictions imposées par le Bureau des brevets,

qui restreignent la portée de l'invention telle qu'elle avait

été initialement décrite et revendiquée, sont des exemples de

telles omissions.

 

On retrouve d'autres commentaires sur la redélivrance et l'action

délibérée de la part d'un demandeur dans re Byers colonne 2 page 56,

dans le passage tiré de l'affaire re White 23 F. 2d 776 et Ex parte

White 1928 C.D. 6:

 

(5) Il est évident que puisque la radiation intentionnelle

d'une revendication en vue d'obtenir un brevet constitue un

obstacle à l'acceptation de cette revendication par une

redélivrance, elle constitue également un obstacle à

l'acceptation d'une revendication qui diffère de celle qui a

été radiée uniquement en ce qu'elle est de portée plus large.

C'est la décision qui a été rendue dans re White, 23 F. 2d 776,

57 App.D.C. 355; dans l'affaire re Murray, supra, la cour a

cité et approuvé la déclaration suivante tirée de l'affaire Ex

parte White, 1928 C.D. 6: Le retrait intentionnel d'une

revendication dans le but d'obtenir un brevet permet de

présumer qu'il n'y a pas eu inadvertance, accident ou méprise,

et l'invention ainsi abandonnée ne peut être récupérée par une

interprétation large des revendications du brevet ou par

l'obtention d'une redélivrance avec des revendications plus

larges. La règle qui s'applique est la même, que les

revendications demandées par une redélivrance ou autrement

soient identiques aux revendications abandonnées, très

semblables ou de portée plus large.

 

La Commission estime qu'il est justifié de tenir compte de l'orientation

fournie par la déclaration citée ci-dessus, tirée de la jurisprudence

américaine, à la lumière d'une affaire entendue par la Cour de

l'Échiquier, The Detroit Fuse and Manufacturing Co y Metropolitan

Engineering Co. of Canada Vol. XXI Ex. C.R. pages 277 à 280:

 

La similarité qui existe de façon générale entre les lois

régissant les brevets au Canada et aux États-Unis, comme le

mentionne le juge Patterson dans Hunter v. Carrick (1),

justifie que nous ayons recours à la jurisprudence américaine

pour appuyer nos décisions. Dans re Allen v. Culp (2), on a

conclu que «lorsqu'un brevet est abandonné de cette façon (pour

une redélivrance), il ne fait aucun doute qu'il continue d'être

valide jusqu'au moment de la redélivrance, moment où il devient

inopérant.» Voir aussi Walker on Patent, 3rd Ed. page 214 et

suivantes.

 

En outre, la Commission fait remarquer que dans l'affaire Farbwerke

Hoechst Aktienctesellschaft Vormals Meister Lucius Bruning v. The

Commissioner of Patents (1966) R.C.S. pages 604 à 613, la Cour suprême

du Canada a fait référence à certaines opinions exprimées par la Cour

suprême des États-Unis dans Mahn y Harwood (1884) 112 U.S. 354 à 363.

 

La Commission constate à la Partie 5 de chaque pétition de redélivrance

que de nouveaux faits énoncés dans la divulgation modifiée ont été

obtenus par le pétitionnaire le 9 juin 1982 et que les nouvelles

revendications ont été formulées à la lumière de ces faits. Le 20 mai

1982, le pétitionnaire a retenu les services de M. Ryther, avocat, pour

le représenter dans l'affaire Wahpeton Canvas Co. y. Frontier Inc and

Koffler Mfq, Inc. Civil No. A3-82-61. Du 20 mai au 1er août 1982, M.

Ryther a obtenu des copies des brevets antérieurs, il a rencontré les

inventeurs, il a obtenu les documents se rapportant à l'invention et il

a pu examiner le fonctionnement de l'invention. En comparant les

brevets antérieurs avec la divulgation de l'invention, M. Ryther a

conclu que les revendications  du brevet américain 4 302 043,

correspondant au brevet 1 131 273, avaient été formulées de façon trop

restreinte. Dans la pétition, on mentionnait qu'il était évident que le

recouvrement amélioré pouvait être utilisé avec divers mécanismes de

verrouillage et qu'il n'exigeait pas un type de plaque particulier.

 

En conséquence, en avril 1983 ou vers cette période, on a procédé à une

révision du brevet canadien et on a conclu qu'il ne décrivait ni ne

revendiquait pas suffisamment les éléments que l'on voulait protéger.

La demande de redélivrance du brevet canadien 1 131 273 a été déposée le

27 janvier 1984. Dans la Partie 5 de la pétition de redélivrance du

brevet 1 171 117, le pétitionnaire mentionne qu'il désire obtenir au

moins un brevet qui contient les revendications appropriées et qu'il a

donc décidé d'abandonner le brevet 1 171 117.

 

La Commission constate d'après les dossiers que la révision du brevet

canadien 1 131 273 de Wahpeton a été effectuée par M. Ryther à la suite

d'un conflit survenu entre le brevet américain de Wahpeton et le brevet

américain de Michel. Dans sa déposition du 3 août 1983, dans le cadre

de ce conflit, M. Michel déclare que dans son modèle de novembre 1980,

le tuyau était accroché sous une cornière sans tension excessive, alors

que le tuyau Wahpeton s'abaisse et vient s'enrouler sous un rebord. La

Commission estime que cette déclaration peut être utile pour établir la

date de l'invention, mais qu'elle ne permet pas d'établir l'idée que les

inventeurs avaient du type d'éléments qu'on veut actuellement protéger

par la redélivrance de l'un ou l'autre ou des deux brevets canadiens de

Wahpeton. La Commission rappelle que la revendication 1 de la demande

de redélivrance 446 291 est identique à la revendication 1 du brevet 1

131 273, qu'elle a pour objet la manivelle, la plaque inclinée vers le

bas et dirigée vers l'extérieur et l'enroulement en sens inverse, et

qu'elle a été jugée acceptable après une révision approfondie.        

L'orientation donnée par la Cour suprême des Etats-Unis dans l'affaire

 

Dobson v. Lees aide à définie les termes inadvertance, accident ou

erreur qu'on retrouve à l'article 47(1) de la Loi canadienne sur les

brevets.

 

Comme la Cour de l'Echiquier le faisait remarquer dans Detroit Fuse v.

Metropolitan Engineering, supra, il existe une similarité entre les

dispositions sur la redélivrance au Canada et aux Etats-Unis et cela

justifie notre recours à la jurisprudence américaine dans le domaine de

la redélivrance.

 

La Commission considère que la jurisprudence ne lui permet pas

d'accepter les arguments du demandeur. Selon Robinson on Patents, entre

autres, si l'idée des moyens présentait des possibilités de

développement ou de nouvelle application que l'inventeur n'a pas saisies

à ce moment ou qui n'ont pas été réduites à la pratique avant la demande

du brevet original, ou si on découvre subséquemment de nouveaux

attributs à l'invention ou à l'une de ses parties, alors ces

possibilités et attributs dépassent la portée du brevet original et ils

ne peuvent être acceptés dans une demande de redélivrance. Selon la

jurisprudence de la Cour suprème des Etats-Unis, la redélivrance n'est

pas permise dans le cas d'une omission faite intentionnellement dans le

but d'éviter un conflit.

 

La Commission ne peut passer sous silence le fait qu'on a cherché par

tous les moyens à faire accepter les revendications du brevet 1 131 273

délivré le 7 septembre 1982, comme en témoignent la discussion de bonne

foi et les efforts de la part de l'agent des brevets et du personnel

examinateur qui ont mené au dépôt de ces revendications. La Commission

n'est pas convaincue qu'elle devrait accepter les modifications que M.

Ryther a apportées au mémoire descriptif du brevet 1 131 273 et qu'il a

soumises, à la suite de la révision effectuée par l'agent précédent et

le personnel examinateur, pour obtenir un brevet. Comme il est énoncé

dans chaque pétition, les services de M. Ryther ont été retenus le 20

mai 1982 par Wahpeton dans le conflit qui l'opposait, aux Etats-Unis,

avec Frontier Inc. et al, et du 20 mai au 1er août, M. Ryther a obtenu

des copies des brevets précédents. Dans les pétitions, on ne retrouve

aucune date à laquelle il aurait conclu que les revendications du brevet

américain correspondant 4 302 043 avaient été formulées de façon trop

restreinte. Dans sa lettre datée du 20 février 1986 portant sur la

demande 446 291, le demandeur mentionne qu'il a déposé une demande de

redélivrance d'un brevet correspondant, aux Etats-Unis, le 9 septembre

1982. Selon la pétition, Wahpeton a effectué une révision du brevet

canadien 1 131 273 en avril 1983 ou vers cette période. La Commission

ne voit, en aucun moment, aucune indication précise de la part des

inventeurs qui puisse signaler leur intention, soit avant ou après la

délivrance du brevet 1 131 273. La Commission fait remarquer que dans

l'affaire re Application 009 562, Patent 930 656 12 C.P.R. (2d) 163, à

laquelle le demandeur fait référence, il y avait un affidavit qui

indiquait l'intention des inventeurs. La Commission considère que cette

affaire ne touche qu'un des points à l'étude ici et non toutes les

circonstances, et que par conséquent elle ne peut appuyer la cause du

demandeur.

 

Dans la demande 446 291, les revendications 1 à 13 sont identiques aux

treize revendications du brevet 1 131 273 et elles sont acceptables.

Les revendications 14 à 64 sont inacceptables en ce que le demandeur

omet d'y mentionner les éléments qu'il s'était engagé à mentionner pour

obtenir la délivrance du brevet mentionné ci-dessus, à savoir la

manivelle, la plaque orientée vers le bas et dirigée vers l'extérieur et

l'enroulement en sens inverse, et en ce qu'elles sont formulées dans les

termes établis par l'avocat de Wahpeton, M. Ryther, durant le conflit

mettant en cause une autre partie aux Etats-Unis.

 

En ce qui concerne la demande de redélivrance 502 373 du brevet 1 171

117, la Commission est convaincue qu'elle ne devrait pas être acceptée.

Selon la Commission, la présence dans une seconde demande d'une

revendication unique de portées étendue qui a été tirée d'une première

demande, lorsque cette seconde demande ne contient aucune revendication

d'un élément revendiqué dans la première demande, ne permet pas

d'accorder l'état divisionnaire à la deuxième demande. La présence

d'une revendication de large portée dans la seconde demande, par sa

formulation, vise et couvre l'élément revendiqué dans la première

demande, et si elle est émise plus tard, elle contribue à prolonger la

durée du premier brevet délivré. La Commission note qu'une telle

situation contrevient à l'article 46 de la Loi sur les brevets qui

 

19

 

    établit la durée des brevets et qu'elle transgresse l'intention de

    l'article 36(1) de la loi de n'accorder un brevet que pour une seule

    invention. La revendication unique du brevet 1 171 117 vise la

    combinaison des éléments qu'on retrouve dans le brevet 1 131 273, mais

    en des termes plus larges. Les revendications 14 à 54 de la demande 502

    373 ne sont pas acceptables en ce qu'elles définissent de la matière qui

    n'a jamais été revendiquée dans le brevet 1 171 117 ni dans la demande

    originale qui a mené à la délivrance du brevet 1 131 273, et en ce

    qu'elles sont formulées dans les termes établis par l'avocat de

    Wahpeton, durant le conflit aux Etats-Unis. En outre, les

    revendications 1 à 13 de la demande 502 373 ne peuvent être incluses,

    car elles sont identiques aux revendications 1 à 13 de la demande 446

    291 et elles ont mené uniquement à la délivrance du brevet 1 131 273.

 

    La Commission note avec intérêt la décision qui a été rendue dans le cas

    du brevet canadien 1 101 917, à laquelle le demandeur a fait référence

    et qu'on retrouve dans le bulletin # 85 publié par l'Institut canadien

    des brevets et marques.

 

    A la Partie 6 de la pétition de redélivrance de ce brevet, il est

    énoncé:

 

    QUE ledit brevet 1 000 185 est aussi jugé défectueux. Selon

    les faits énoncés ci-dessus au paragraphe 5, votre

    pétitionnaire croit que le brevet 1 000 185 est défectueux de

    deux façons. Il est évident que si on avait accordé toute

    l'attention nécessaire à la poursuite de la demande 183 360,

    alors la demande 233 639 qui a mené à la délivrance du brevet 1

    000 185 n'aurait jamais été déposée et n'aurait jamais été

    acceptée.

 

    En outre, si la demande faite dans la présente pétition de

    redélivrance du brevet 985 619 est acceptée soit pour les

    raisons citées aux alinéas 3(a)(i) et (ii) ci-dessus soit

    intégralement, alors le droit du pétitionnaire à un monopole

    séparé dans le brevet 1 000 185 pour l'usage exclusif auquel

    est destiné l'appareil divulgué et revendiqué dans la

    redélivrance du brevet 985 619 est discutable. Le

    pétitionnaire croit qu'il peut alors y avoir deux brevets étant

    donné que ces deux groupes de revendications ne devraient ni ne

    pourraient exister dans des brevets portant des dates

    différentes. Sans aucune intention de tromper ou de frauder le

    public, le pétitionnaire croit qu'il aura obtenu la protection

    d'une seule invention par ces deux brevets pour une période

    supérieure à la période de 17 ans prescrite dans l'article 48

    de la Loi sur les brevets. Le pétitionnaire croit que vous

    pouvez accepter simultanément l'abandon de deux brevets, même

    s'il veut obtenir la redélivrance d'un seul de ces brevets.

 

    Le demandeur fait remarquer qu'il a abandonné deux brevets canadiens

    pour obtenir la délivrance de ce brevet. Comme il l'indique dans cette

    pétition, il est d'avis que les deux groupes de revendications contenues

dans ces brevets ne devraient pas être présentées dans des brevets

séparés, car elles auraient permis d'obtenir la protection d'une seule

invention pendant une période supérieure à la période de 17 ans

prescrite dans la loi.

 

Dans le cas qui nous occupe, les circonstances de la poursuite

précédente et les preuves soumises établissent une situation différente

de celle qu'on retrouve dans la poursuite du brevet 1 101 917. Il y a

peut-être une similarité dans le fait que les brevets du demandeur

offrent une période de protection supérieure à 17 ans pour une seule

invention, mais après révision, la Commission est convaincue que la

redélivrance de l'un ou l'autre des brevets du demandeur n'est pas

acceptable. La Commission note que les dispositions de l'article 47 de

la loi sur la redélivrance des brevets permettent qu'un nouveau brevet

consistant en une version modifiée acceptable du brevet original peut

être délivré, mais que le but de la redélivrance n'est pas d'abandonner

le brevet original sans le remplacer par une version modifiée

acceptable. L'article 47 se lit ainsi:

 

(1) Lorsqu'un brevet est jugé défectueux ou inopérant à cause

d'une description et spécification insuffisante, ou parce que

le breveté a revendiqué plus ou moins qu'il n'avait droit de

revendiquer à titre d'invention nouvelle, mais qu'il apparaît

en même temps que l'erreur a été commise par inadvertance,

accident ou méprise, sans intention de frauder ou de tromper,

le commissaire peut, si le breveté abandonne ce brevet dans un

délai de quatre ans à compter de la date du brevet, et après

acquittement d'une taxe réglementaire additionnelle, faire

délivrer au breveté un nouveau brevet, conforme à une

description et spécification rectifiée par le breveté, pour la

même invention et pour la partie restant alors à courir de la

période pour laquelle le brevet original a été accordé.

 

(2) Un tel abandon ne prend effet qu'au moment de la délivrance

du nouveau brevet, et ce nouveau brevet, ainsi que la

description et spécification rectifiée, a le même effet en

droit, dans l'instruction de toute action engagée par la suite

pour tout motif survenu subséquemment, que si cette description

et spécification rectifiée avait été originalement déposée dans

sa forme corrigée, avant la délivrance du brevet original.

Dans la mesure où les revendications du brevet original et du

brevet redélivré sont identiques, un tel abandon n'atteint

aucune instance pendante au moment de la redélivrance, ni

n'annule aucun motif d'instance alors existant, et le brevet

redélivré, dans la mesure où ses revendications sont identiques

à celles du brevet original, constitue une continuation du

brevet original et est maintenu en vigueur sans interruption

depuis la date du brevet original.

 

(3) Le commissaire peut accueillir des demandes distinctes et

faire délivrer des brevets pour des éléments distincts et

séparés de l'invention brevetée, sur versement de la taxe à

payer pour la redélivrance de chacun de ces brevets redélivrés.

S.R., ch. P-4, art. 50.

 

La Commission estime que les arguments du demandeur à propos de

l'adjonction des inventeurs ne sont pas utiles. Comme il est noté dans

le Manuel des pratiques du Bureau des Brevets, à l'article 14.08(f),

l'adjonction d'inventeurs n'est pas une raison justifiant une

redélivrance. De toute façon, la Commission est convaincue, à la

lumière des facteurs liés à l'action délibérée du demandeur pour obtenir

un brevet.

 

En résumé, la Commission recommande que les demandes 446 291 et 502 373

visant la redélivrance des brevets 1 131 273 et 1 171 117 respectivement

soient rejetées.

 

M.G. Brown

Président intérimaire

Commission d'appel des brevets

 

Je suis d'accord avec les conclusions et recommandations de la

Commission d'appel des brevets. En conséquence, je refuse d'accepter

les pétitions de redélivrance des brevets 1 131 273 et 1 171 117

présentées respectivement dans les demandes 446 291 et 502 373. Le

demandeur dispose de six mois pour interjeter appel de ma décision en

vertu des dispositions de l'article 42 de la Loi sur les brevets.

 

J.H.A. Gariépy

Commissaire des brevets

 

Fait le 21 décembre 1989

Hull (Québec)

 

Dennison Associates

133, rue Richmond Ouest

Toronto (Ontario)

M5H 2L7

 

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