Décision du Commissaire
Objet du domaine de l'informatique, article 2 : Détection d'interférence
Des revendications ont été rejetées dans la décision finale du fait
qu'elles étaient suffisamment étendues pour englober un ordinateur d'usage
courant. Les revendications modifiées comportent des moyens
supplémentaires qui peuvent être considérés comme une combinaison
d'éléments suffisante sans recours à une technique particulière.
Décision finale : Étude des revendications modifiées.
La présente décision fait suite à la requête formulée par le demandeur auprès du
commissaire des brevets pour qu'il révise la décision finale de l'examinateur
concernant la demande de brevet no 284 910 (classe 354-233), déposée le
17 août 1977 et cédée à Honeywell Information Systems Inc., pour une invention
intitulée APPAREIL DE DÉTECTION MULTIPLE D'INTERFÉRENCE. Mario G. Trinchieri en
est l'inventeur. L'examinateur chargé du dossier a rendu sa décision finale le
23 juillet 1980, rejetant les revendications. ~ la suite de sa réponse à la
décision finale, le demandeur a soumis une lettre de modification le
28 août 1987.
La demande concerne un système de traitement de données comportant des
mécanismes et des méthodes de protection qui permettent au système de poursuivre
son travail avec un certain degré de simultanéité lorsqu'une ou que plusieurs de
ses ressources sont consacrées à plus d'une opération à la fois. Ces mécanismes
et méthodes assurent en outre une protection contre d'autres dérangements, par
exemple un encombrement excessif pour l'entreposage temporaire de versions non
autorisées des ressources, l'interférence des procédés dans une situation de
multiprogrammation/multitraitement et les abandons secondaires. ~ l'aide de
divers schémas fonctionnels et de descriptions narratives correspondantes dans
l'exposé, la demande décrit l'application des mécanismes de protection dans le
logiciel microprogrammé/matériel. Les mécanismes de protection comprennent une
table d'utilisation par ressource, une matrice des relations pour chaque procédé
non autorisé et des listes de ressources affectées pour les mécanismes qui
doivent avoir recours aux ressources. Ces mécanismes indiquent les rapports
entre les procédés utilisés et choisissent des séquences logiques de rechange
lorsque les procédés exigent des ressources communes et que l'interférence se
produit pendant l'accès à ces ressources. Les structures connues qu'illustrent
les figures 10 à 13 montrent où le mécanisme de protection peut être utilisé.
Des descriptions particulières de la matérialisation sont données pour les
configurations de protection qu'illustrent les figures 17a, 17b, 20a et 20b. La
description et les nombreux schémas fournis montrent que les configurations du
demandeur présentent une combinaison d'éléments interactifs. Bien que tous les
schémas aient été examinés pour l'évaluation de l'objet de la demande, aucun
n'est reproduit ici pour des raisons de brièveté.
Dans sa décision finale, l'examinateur a rejeté les revendications du fait
qu'elles étaient suffisamment étendues pour englober l'ordinateur d'usage
courant dont fait mention l'exposé. Son refus repose sur le fait que les
revendications visent un objet non brevetable et ne portent que sur le programme
qui commande les machines. Il exprime par ailleurs son rejet comme suit :
[Traduction]
Le demandeur doit limiter ses revendications à des réalisations pour
lesquelles la nouveauté réside dans l'appareil comme tel...
Le demandeur souligne dans sa réponse à la décision finale que des machines
faisant appel à un état antérieur de la technique peuvent être utilisées pour la
réalisation de son invention. Il attire l'attention sur la figure 17a, parties
1 et 2, sur la figure 17b, parties 1 et 2, sur la figure 20, parties 1 et 2, et
sur la figure 20b, parties 1 et 2, qui illustrent le matériel intégré à sa
structure informatique. Le demandeur soutient, en partie, ce qui suit :
[Traduction)
Il est à noter que l'invention est constituée par le matériel des figures
17 et 20, intégré à un ordinateur faisant appel à l'état antérieur de la
technique (illustré en partie sur les figures 9-12). Il est clair qu'aucun
programme n'entre ici en jeu et que seul du matériel est en cause. Toutes
les revendications portent soit sur ce matériel nouveau, soit sur la
méthode utilisée par ce matériel. Par exemple, la revendication 1 renvoit
précisément à un appareil constitué d'une combinaison de moyens, soit un
premier moyen de mémorisation de signaux codés... et un deuxième moyen
couplé de manière à répondre audit premier moyen pour repérer les procédés
dont les antécédents d'utilisation de l'information commune ont démontré de
l'interférence avec un premier procédé prédéterminé.
(...)
Il est clairement à noter que, dans cette demande, ni les procédés, ni les
programmes de l'ordinateur ne sont exposés ni revendiqués directement ou
par induction, et qu'aucun n'est nécessaire à la réalisation de
l'invention. Ce qui est clairement exposé et revendiqué est l'addition de
matériel et de circuits logiques à un ordinateur faisant appel à l'état
antérieur de la technique, de manière à créer une nouvelle combinaison de
matériel pour le traitement de l'information d'une nouvelle façon.
L'invention porte sur l'addition de matériel à un ordinateur faisant appel
à l'état antérieur de la technique de façon à créer une combinaison
nouvelle et non évidente qui donne des résultats nouveaux et non évidents,
comme l'indiquent l'exposé et les revendications.
La question que la Commission doit trancher est la suivante : l'objet revendiqué
constitue-t-il une invention brevetable au sens où l'entend l'article 2 de la
Loi sur les brevets? La revendication 1 modifiée se lit comme suit :
[Traduction]
Dans un système d'ordinateur à multiprogrammation/multitraitement servant à
l'exécution d'un ensemble de procédés avec partage d'information commune,
appareil permettant de repérer les premiers procédés dudit ensemble de
procédés qui gênent l'exécution d'un deuxième procédé dudit ensemble
de procédés exécuté audit système d'ordinateur lorsque ledit deuxième
procédé permet l'accès à de l'information commune, ledit appareil étant
constitué :
(a) d'un premier moyen de mémorisation des premiers signaux codés
indiquant les antécédents d'utilisation de l'information commune par
un procédé quelconque dudit ensemble de procédés;
(b) d'un deuxième moyen permettant de repérer les troisièmes procédés qui
suivent en séquence ledit deuxième procédé pour fins d'exécution audit
système d'ordinateur;
(c) d'un troisième moyen, couplé audit deuxième moyen, permettant de
mémoriser les deuxièmes signaux codés qui servent à repérer lesdits
troisièmes procédés;
(d) d'un quatrième moyen, couplé auxdits premier et troisième moyens,
permettant de comparer lesdits premiers signaux codés avec lesdits
deuxièmes signaux codés; et
(e) d'un cinquième moyen, couplé audit quatrième moyen, indiquant quels
premiers procédés desdits troisièmes procédés interfèrent avec
l'exécution dudit deuxième procédé audit système d'ordinateur.
Afin d'évaluer les aspects informatiques de l'objet de la demande, nous trouvons
utile de nous référer aux observations faites par le juge Pratte dans l'arrêt
Schlumberger Canada Ltd. c. le commissaire des brevets (1981) 56 C.P.R, 204,
qui se lisent comme suit :
Pour savoir si une demande révèle une invention brevetable, il échet
d'examiner en premier lieu ce qui, d'après la demande, a été découvert.
(...)
A mes yeux, le fait qu'un ordinateur est employé ou requis pour
l'application d'une découverte ne change en rien la nature de cette
dernière. Ce que l'appelante revendique à titre d'invention en l'espèce,
n'est que la découverte selon laquelle certains calculs effectués
conformément à certaines formules, permettraient d'extraire des
informations utiles de certaines mesures. Voilà qui ne constitue pas une
invention au sens de l'article 2.
Dans les revendications modifiées 1 à 14 du demandeur, présentées le
28 août 1987, nous voyons une combinaison d'appareils comprenant du logiciel
microprogrammé et du matériel. Cette combinaison permet à des procédés
multiples d'utiliser des ressources communes en faisant appel à divers moyens en
interaction pour repérer les procédés qui interfèrent avec l'exécution d'un
certain procédé lorsque l'information provient d'une source commune. Nous
sommes persuadés par la demande et par les arguments du demandeur que les
revendications modifiées visent plus que l'exêcution de calculs et ont trait à
une invention au sens de l'article 2.
Pour déterminer quels éléments constituent la combinaison du demandeur, nous
trouvons un exposé clair de ce qui, aux yeux du demandeur, compose son
invention, dans sa réponse du 13 juin 1980 et qui, en partie, se lit comme
suit:
[Traduction]
... Afin d'effectuer cette évaluation, il est toutefois nécessaire de
cerner clairement les notions de "ensemble de procédés", "premiers
procédés", "deuxième procédé" et "troisièmes procédés". Pour mieux
comprendre ces expressions, on peut se reporter au DESSIN A ci-joint.
Un "ensemble de procédés" comprend tous les procédés d'un système
d'ordinateur. Exemple : procédés à l'intérieur du cercle externe sur
la figure.
Un "deuxième procédé" est un procédé particulier de cet ensemble.
Exemple : le point sur la figure.
Les "troisièmes procédés" sont un sous-ensemble dudit ensemble
comprenant tous les procédés "qui découlent" dudit deuxième procédé.
Exemple : procédés à l'intérieur du cercle intermédiaire sur la
figure.
Les "premiers procédés" sont le sous-ensemble des "troisièmes
procédés" comprenant ceux desdits troisièmes procédés qui "interfèrent
avec l'exécution" dudit deuxième procédé. Exemple : procédés à
l'intérieur du cercle interne.
L'invention a principalement pour objet de déterminer les "premiers
procédés" qui correspondent à un "deuxième procédé" donné.
Selon les revendications 2 et 3, cette détermination s'effectue en deux
étapes, qui reposent sur le fait que les "premiers procédés" constituent un
sous-ensemble des "troisièmes procédés". Premièrement, les "troisièmes
procédés" sont repérés (la revendication 2 porte sur cette partie de
l'opération), puis les "premiers procédés" sont déterminés parmi les
"troisièmes procédés" (la revendication 3 porte sur l'ensemble de
l'opération).
Voilà pourquoi la revendication 2, après avoir mentionné le repérage des
"premiers procédés" comme fonction principale de l'appareil, décrit le
moyen permettant de repérer les "troisièmes procédés", et ce n'est qu'au
moment où le "cinquième moyen" de la revendication 3 est également
considéré que les "premiers procédés" sont repérés.
Après l'examen de la description fournie dans le mémoire du demandeur et de ses
arguments du 13 juin 1980, nous en arrivons à la conclusion que les
revendications modifiées peuvent, en incluant le cinquième moyen, satisfaire aux
exigences d'une définition suffisante de la combinaison des éléments permettant
de réaliser l'objet principal de l'invention, c'est-à-dire de repérer parmi un
certain nombre de procédés celui qui interfère avec un autre procédé pour
l'accès à de l'information provenant d'une source commune.
Bien que les revendications modifiées 1 à 14 puissent être acceptables au sens
de l'article 2 et contenir suffisamment d'éléments pour définir l'invention,
nous constatons, comme le souligne également le demandeur, qu'aucune antériorité
n'a été opposée. Nous ne tirons donc aucune conclusion sur la brevetabilité de
l'invention.
En résumé, nous recommandons que le refus de l'objet revendiqué au sens de
l'article 2 soit annulé et que la demande soit renvoyée à l'examinateur pour
qu'il en reprenne l'instruction en conformité de la présente décision.
M.G. Brown S.D. Kot
Président intérimaire Membre
Commission d'appel des brevets
Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission d'appel des
brevets. Par conséquent, j'annule le rejet de l'objet revendiqué au sens de
l'article 2 de la Loi, et je renvoie la demande sous sa forme modifiée à
l'examinateur pour qu'il en reprenne l'instruction normale.
J.H.A. Gariépy
Commissaire des brevets
Fait à Hull (Québec),
ce 16e jour de novembre 1987.