Article 2; utilisation nouvelle de composés déja connus:
Etant donné l'arrêté Shell Oil c. Commissaire des brevets (1982)
RCS 536, les revendications 1 à 4 portant sur l'utilisation
nouvelle d'un composé déjà connu, et les revendictaions 7 à 9
afférantes à l'utilisation d'un composé, ont été jugées
acceptables. Rejet annulé.
La présente décision fait suite à la requête formulée par le demandeur auprès
du Commissaire des brevets pour qu'il révise la décision finale de
l'examinateur concer- nant la demande de brevet no 400,261 (classe 167-238),
déposée le 31 mars 1982. Cédée à la Wayne State University, la méthode a pour
titre: "Méthode de réduction des métastases et de la croissance néoplasique".
Les inventeurs sont W.D. Busse, K.V. Honn, E. Moller et F. Seuter.
L'examinateur charge du dossier a rendu sa décision finale le 6 juin 1985,
rejetant la demande de brevet. Dans une lettre date de juin 1988, le
demandeur a retiré la demande d'audition qu'il avait formulée.
La demande se rapporte à une méthode thérapeutique permettant la réduction des
métastases et de la croissance néoplasique chez un mammifère. On administre au
patient une quantité efficace sur le plan thérapeutique de
3-méthyl-1-(2-(2-naphtyloxy)-éthyl)-2-pyrazolin-5-one ou d'un sel acceptable du
point de vue pharmaceutique.
Dans sa décision finale, l'examinateur fonde son rejet des revendications 1 à 4
sur les enseignants du brevet américain nÀ 4,053,621, et celui des
revendications 7 à 9 sur l'article 2 de la Loi sur les brevets. La décision
est expliqué, en partie, comme suit:
Dans sa lettre, le demandeur fait valoir que sa revendicatin est
brevetable parce qu'elle concerne une composition pharmaceutique
permettant de réduire les métastases et la croissance néoplasique
chez un mammifère. Cet argument ne fait toutefois pas disparaître
l'objection à la revendication 1. Comme en fait mention la décision
finale du bureau, la composition de la présente demande et celle
préconisée par le brevet américain sont identiques, même pour ce qui
est de la forme posologique (se reporter à la page 6 de cette
demande et à la page appropriée du brevet américain). L'examinateur
recon- naît que le demandeur a fait une découverte, soit
l'utilisation nouvelle d'une composition déjà connue; toutefois,
cette utilisation nouvellement découverte n'octroie pas un caractère
de nouveauté et de brevetabilité à la composition déja connue.
Il a été tenu compte de l'argumentation du demandeur à l'encontre
du rejet de la revendication 4. Cette argumentation ne dissipe
toutefois pas l'objection parce que, encore une fois, l'ingrédient
actif est connu et la forme posologique effective est fournie dans
l'antériorité mentionnée ci-dessus. L'indication ne rend donc pas
cette revendication brevetable. Ce n'est que l'utilisation
envisagée qui différencie la revendication 4 des enseignements du
brevet antérieur, et cette distinction ne suffit pas à rendre la
revendication 4 brevetable.
Les revendications 7 à 9 portant sur l'utilisation d'un composé ne
répondent pas aux exigences de la définition d'une invention
brevetable telle qu'elle est énoncée à l'article 2 de la Loi sur
les brevets. Cette utilisation n'est ni un procédé ni une
composition. Le demandeur soutient qu'il faut interpréter
l'utilisation de l'ingrédient actif comme englobant les activités
dont le caractère peut être qualifié d"'industriel", sans toutefois
comprendre le traitement effectif d'une maladie par
l'administration de l'ingrédient actif. Cet argument ne fait
toutefois pas disparaître l'objection puisque, comme on l'a fait
remarquer ci-dessus, l'utilisation ne décrit ni le procédé ni le
produit (composition).
Pour répondre à la décision finale, le demandeur a présenté les revendications
additionnelles 10 à 17. Son argumentation faisait notamment valoir ceci:
L'invention du demandeur consiste à avoir déterminé que le composé
3-méthyl-1-(2-2-naphtyloxy)-éthyl))-2-pyrazolin-5-one ou un sel de
ce composé acceptable du point de vue pharmaceutique peuvent être
utilisés pour réduire les métastases et la croissance néoplasique.
Le demandeur a donc fait une découverte importante. De fait,
l'examinateur reconnaît que le demandeur a fait une découverte
utile. Des dépenses considérables ont été engagées pour établir la
validité de l'invention, et le demandeur souhaite naturellement
bénéficier de toute protection que l'octroi d'un brevet peut lui
conférer. De surcroît, il est certainement dans les intentions du
Parlement d'accorder le bénéfice du doute à tout demandeur qui
cherche à faire breveter une invention; voir l'article 42 de la Loi
sur les brevets de même que les paroles du juge Pigeon dans l'arrêt
de la Cour suprême du Canada Monsanto c. Commissaire des brevets.
On affirme, et apparemment les examinateurs partagent cet avis, que
le demandeur a fait une découverte utile. Le demandeur a droit de
bénéficier d'un brevet à moins que son invention tombe dans l'une
des catégories susmentionnées pour lesquelles aucune protection
n'existe. Bien que l'examinateur ne puisse évidemment pas admettre
des revendications pour une invention qui se classe dans l'une des
catégories dont il vient d'être fait mention, il est
respectueusement allégué que l'examinateur lui-même doit, dans
toute la mesure du possible, être désireux d'admettre les
revendications ayant trait à une découverte valable.
Les revendications 1 à 4 et 7 à 9 sont rejetées dans la décision
finale du 6 juin 1985. Elles ont été rejetées pour des raisons
qu'une lettre officielle du 19 décembre 1984 avait déjà fait
valoir. Une réponse détaillée à cette lettre officielle a été
déposée le 19 mars 1985. Nous ne désirons pas reprendre tous les
arguments y énoncés, mais nous souhaitons les incorporer dans la
présente réponse.
Le demandeur présente maintenant de nouvelles revendications visant
à protéger divers aspects de son invention. La nouvelle
revendication 10 traite d'une méthode qui permet de déterminer
l'activité antimétastasique ou antinéoplasique in vitro sur des
cellules tumorales précises. Il n'est certainement pas fait état
de cet aspect de l'invention dans le brevet américain n o 4,053,621
cité en référence, qui ne traites aucunement de métastases ni de
croissance néoplasique. Il est, par conséquent, respectueusement
allégué que cet objet est clairement admissible.
La question dont est saisie la Commission d'appel des brevets est la suivante:
les revendications 1 à 4 se distinguent-elles manifestement de l'antériorité
invoque, et les revendications 7 à 9 correspondent-elles aux définitions de
l'invention brevetable qui sont énoncées à l'article 2 de la Loi sur les
brevets? La revendication 1 se lit comme suit:
Une composition pharmaceutique présentée sous une forme posologique
appropriée pour l'administration orale ou parentérale et permettant
la réduction des métastases et de la croissance néoplasique chez un
mammifère, qui renferme comme ingrédient actif de la
3-méthyl-1-(2-(2-naphtyloxy)-éthyl)-2 2-pyrazolin-5-one ou un sel
acceptable du point de vue pharmaceutique; l'ingrédient actif est
présent à une concentration efficace pour la réduction des
métastases et de la croissance néoplasique chez un mammifère et est
mélange à un diluant ou à un excipient approprié, acceptable du
point de vue pharmaceutique.
Considérons d'abord le rejet des revendications 1 à 4 d'après les enseignements
du brevet américain n o 4,053,621. La décision finale nous montre que la
composition de la demande et celle du brevet antérieur sont les mêmes, mais
l'examinateur reconnaît que le demandeur a fait une découverte, soit "une
utilisation nouvelle pour une composition déjà connue". A son avis, seule
l'utilisation envisagée distingue la revendication 4 des enseignements de
l'antériorité invoquée et cette différence ne suffit pas à rendre brevetable la
revendication 4.
Le demandeur soutient que son invention consiste à avoir déterminé que le
compose 3-méthyl-1-(2-2(-naphtyloxy)-éthyl- 2-pyrazolin-5-one ou un sel
acceptable du point de vue pharmaceutique peuvent être utilisés pour réduire
les métastases ou la croissance néoplasique. Il fait valoir les dépenses
considérables qui ont été engagées pour établir la validité de l'invention et
soutient que son invention est brevetable puisqu'il est dans les intentions du
Parlement, sauf en ce qui concerne certaines catégories particulières, de
faire, dans la plus grande mesure du possible, bénéficier les inventions de la
protection des brevets.
Nous avons examiné la position adoptée par l'examinateur et les arguments
avancés par les demandeurs. Les commentaires de Mme le juge Wilson dans
l'arrêt de la Cour suprême Shell Oil c. Commissaire des brevets du 2 novembre
1982 valent pour le présent cas lorsqu'elle dit:
Si j'ai raison de dire que la découverte d'un usage nouveau et
réalisable en pratique de ces composés constitue une "invention" au
sens de la définition, je ne vois rien dans la Loi qui interdise
une revendication visant ces compositions. L'article 36 ne semble
pas constituer un obstacle parce que l'activité inventive se trouve
ici dans l'usage nouveau de composée déjà connus et non dans les
composés eux-mêmes. Après avoir découvert l'usage, l'appelante a
mélangé les composés à des supports appropriés pour les appliquer
aux plantes. A mon avis, il n'est pas nécessaire dans le cas de la
découverte d'un nouvel usage pour un composé déja connu que le
mélange du composé à l'adjuvant soit lui-même nouveau, sauf dans la
mesure où cela est nécessaire pour réaliser cet usage particulier
du composé, En l'espèce, on ne prétend pas que l'activité
inventive dépend de la combinaison, celle-ci est seulement le moyen
de réaliser les possibilités nouvellement découvertes qu'offrent
les composés. En l'espèce, l'activité inventive se trouve dans la
découverte du nouvel usage et point n'est besoin d'autre activité
inventive pour appliquer les composés à cet usage c.-à-d, préparer
les compositions approprées.
Nous estimons donc qu'une nouvelle utilisation d'un composé connu est une
invention qui peut bénéficier de la protection d'un brevet. Nous recommandons
que le rejet des revendications 1 à 4 soient annulées.
Examinons donc maintenant le rejet des revendications 1 à 9, lesquelles
traitent de l'utilisation d'un composé et ne correspondent pas, de ce fait, aux
définitions de l'invention brevetable aux termes de l'article 2 de la Loi sur
les brevets. Le rejet indique que l'utilisation décrite dans les
revendications rejetées ne décrivent "ni le procédé ni le produit
(composition)".
Le demandeur soutient qu'il s'est conformé aux exigences de l'article 36(2) de
la Loi puisqu'il revendique en termes explicites les choses ou combinaisons
qu'il estime nouvelles. Il déclare, de surcroît, que si la meilleure façon de
se conformer aux exigences de l'aticle 36 consiste à énoncer la revendication
en fonction d'une utilisation, il est donc approprié d'agir de cette façon. Il
allègue que le rejet de l'utilisation. revendiquée, pour cause de
non-brevetabilité de son objet, ne se justifie pas puisque de nombreuses
inventions portent sur l'utilisation de substances ou d'objets.
Bien qu'il soit exact que les revendications rejetées ne décrivent ni un
procédé ni un produit, il n'en découle pas, dans le cas présent, qu'elles ne
correspondent pas à la définition d'u.ne invention énoncée à l'article 2 de la
Loi sur les brevets. Le demandeur a allégué qu'il faut interpréter les
revendications relatives à l'utilisation d'un ingrédient actif comme englobant
des activités dont le caractère peut être qualifié d'"industriel". La décision
finale reconnaît que le demandeur a fait une découverte, soit l'utilisation
nouvelle d'une compositin déja connue. Nous estimons que puisque le demandeur
a concu une nouvelle utilisation pour une compositin déjà connue, il devrait
être autorisé à en revendiquer le bénéfice. Le fait que les revendications ne
décrivent ni un procédé ni un produit ne constitue pas, en lui-même, une raison
valide de rejeter celles-ci. A notre avis, le rejet des revendicatins 7 à 9
devrait donc être annule.
Nous ne formulons aucun commentaire au sujet des revendications 10 a 17 qui ont
été ajoutés à la demande à la suite de la décisin finale.
Nous recommandons en conséquence que le rejet des revendications 1 à 4 et des
revendications 7 à 9 soit annulé.
M.G. Brown S.D. Kot
Président par intérim Membre
Commission d'appel des brevets
Ayant passé en revue l'instruction de la demande, je souscris aux conclusions
et recommandations de la Commission d'appel des brevets. Par conséquent,
j'annule le rejet de la demande et des revendications et je renvoie la demande
à l'examinateur pour qu'il en reprenne l'instruction en conformité de la
recommandation.
J.H.A. Gariépy
Commissaire des brevets
Fait à Hull
ce 20e jour de septembre 1988
Fetherstonhaugh & Co.
B.P. 2999, Succursale D
Ottawa (Ontario)
R1P 5Y6