DÉCISION DU COMMISSAIRE
Objet ayant trait à des ordinateurs, art. 2: Ordinateur. Le système de
registres, les en-têtes de chaîne de temporisation et les dispositifs
d'interconnexion des éléments qui concourent à libérer les signaux
permettant l'exécution séquentielle et à éviter la suspension de
l'exécution ont été jugés acceptables. Aucune audience n'a semblé
nécessaire. Le rejet de la demande est annulé.
La présente décision fait suite à la requête formulée par le demandeur auprès
du Commissaire des brevets pour que celui-ci révise la décision finale de
l'examinateur concernant la demande de brevet no 319,883 (classe 354-231),
déposée le 18 janvier 1979 et cédée à Plessey Handel und Investments Ag pour
une invention intitulée ORDINATEUR EXPLOITE EN TEMPS RÉEL POUR LE TRAITEMENT DE
COMMANDES DE PÉRIODE TEMPORELLE. Peter Fox en est l'inventeur. L'examinateur
chargé du dossier a rendu sa décision finale le 22 décembre 1981, refusant
d'accueillir la demande.
La demande concerne des ordinateurs apparentés aux systèmes de commutation en
télécommunication, dans lesquels un processus peut être suspendu durant une
certaine période temporelle, par exemple la suspension du processus de
numérotation d'un chiffre durant une certaine période après réception de chaque
chiffre. Le nombre de processus suspensus, durant n'importe quel intervalle,
est souvent imposant dans de tels systèmes. L'inventin permet à un groupe de
dispositifs de configurer toutes les commandes de suspension ou "d'attente"
dans une liste, et perrmet une façon de redémarrer le processus lorsque les
commandes d'attente viennent à échéance selon leur position dans la liste, ou
comporte un dispositif qui répond à un événement externe se produisant avant
l'échéance de la période d'attente et provoque la suppression du processus en
condition d'attente. Les piles contenant l'information concernant les
processus en attente sont enchaînées dans l'ordre de suspension, comme sur la
figure 7. Des indicateurs raccordent les segments de pile avec les segmente
d'en-tête de chaîne de temporisation. Tous les en-têtes de chaîne de
temporisation sont reliés entre eux comme sur la figure 8 de sorte que les
listes de tous les segments des en-têtes peuvent être appelées dans l'ordre.
Le système comporte un processus. de surveillance de chaîne de temporisation qui
analyse les en-têtes de chaîne de temporisation, confirme les processus
suspendus à supprimer et calcule le prochain passage à partir de l'information
dans les en-têtes.
Les figures 7 et 8 ci-dessous montrent certains éléments qui fonctionnent avec
les piles, les registres, et d'autres éléments du système décrits et illustrés
dans la combinaison globale des figures 1A et 1B. Ces éléments permettent de
réintroduire les processus suspendus dans le système.
<IMGS>
En formulant son rejet en vertu de l'article 2, l'examinateur a dit, en partie,
ce qui suit:
...
Le demandeur a divulgué un processus à exécuter sur un ordinateur
antérieur (voir page 5, ligne 24 de la divulgation). Aucun nouvel
appareil n'a été divulgué. A ce titre, les revendications sont
contraires aux lignes directrices exposées dans la décision du
Commissaire publiée dans la Gazette des brevets du 1er août 1978, aux
pages xviii à xxvi.
...
Pour avoir raison du rejet, le demandeur doit donc montrer que le
processus exécuté par l'ordinateur est une invention au sens de
l'article 2. Le fait que legs revendications ont rapport à un système
plutôt qu'à un processus ne modifie pas cette exigence, compte tenu du
jugement Schlumberger qui, connue il a été mentionné ci-dessus,
établissait le principe que "le fait qu'un ordinateur est employé ou
requis pour l'application d'une découverte ne change en rien la nature
de cette dernière".
...
Le demandeur a répondu aux objections, en partie, dans les termes suivants:
...
En ce qui concerne les revendications 1 à 11 de la présente demande,
le système, ou les revendications de dispositif, du demandeur
définissent l'invention du demandeur en termes de combinaison de
moyens et, en conséquence, l'objection selon laquelle la demande ne
divulgue aucun dispositif nouveau et que l'invention divulguée est un
processus, à exécuter sur un ordinateur antérieur, semble totalement
erronée. L'examinateur s'est référé à la description figurant en page
5, ligne 24. Si l'on se reporte au paragraphe commençant à la ligne 4
de la page 5, on voit que ce que le demandeur décrit là et ce à quoi
il se réfère à la ligne 24 de la page 5 a à voir avec une unité
centrale qui pourrait être utilisée dans le système d'exploitation
défini dans les revendications du demandeur. Dans la phrase se
terminant à la ligne 24, le demandeur mentionne que cette unité peut
être organisée sur ce qu'il est convenu d'appeler la structure de
registre potentielle et le demandeur se reporte à un mémoire
descriptif britannique qui divulgue une organisation de ce type. Le
demandeur ne précise nulle part que la présente inventin est un
processus exécuté sur un ordinateur antérieur.
...
Je soumets respectueusement que l'examinateur est tout à fait dans
l'erreur lorsqu'il laisse entendre que les lignes directrices exposées
dans la Gazette des brevets d'août 1978 pourraient avoir reçu l'appui
de jugements rendus par les tribunaux canadiens. Il n'y a aucun
renvoi précis dans le jugement du juge Pratte à la Gazette des brevets
d'août 1978 ou aux lignes directrices particulières contenues dans ce
numéro de la Gazette des brevets. Le demandeur soutient et le fait
que ces lignes directrices sont totalement arbitraires et dénuées de
toute autorité en vertu de la Loi sur les brevets ou des décisions
publiées de la Cour fédérale ou de la Cour de l'Echiquier interprétant
la Loi sur les brevets.
...
... Le dernier paragraphe des motifs du jugement ne se lit pas tel
qu'il a été exposé dans la décision. (Il) commence à la page 205, 56
CPR 2(d), et il est assez important pour être lu en entier. La teneur
de ce paragraphe ne sera pas répétée ici, étant donné que le jugement
complet accompagne la présente réponse. Pour tirer de ce dernier
paragraphe la partie significative, les phraes débutant à la première
ligne de la page 106 devraient être prises en compte:
Ce qui est nouveau en l'espèce, c'est la découverte des
divers calculs à effectuer et des formules mathématiques à
employer à cet effet. Si ces calculs devaient être
effectués par l'homme et non par un ordinateur, l'objet de
la demande se réduirait à des formules mathématiques et à
une série d'opérations purement mentales, lesquelles, à mon
avis, ne sauraient être brevetables."
.,. Le savant juge a conclu que dans l'affaire
Schlumberger, la divulgation n'était qu'une simple série de
formules mathématiques et que les formules mathématiques
comme telles sont des principes scientifiques ou des
théorèmes abstraits et donc interdits en vertu de l'article
28(3) de la Loi. Le juge a alors conclu que vu
l'interdiction de ces formules en vertu de l'article 28(3),
l'invention n'était pas une invention au sens de l'article
2.
...
.... A l'heure actuelle, tous les systèmes téléphoniques
exploités au Canada sont, de fait, des systèmes de
commutation complexes contrôlés par processus numérique
ayant recours à de vastes techniques numériques, tant pour
transmettre les signaux vocaux que pour transporter les
données numériques et l'information par signaux
numériques. Presque tous les appels interurbains au Canada
sont maintenant effectués au moyen de systèmes qui
transforment les voix en données numériques et transmettent
ensuite ces signaux vocaux par processeur numérique et
liaison de données d'un endroit à l'autre, en
reconstruisant les signaux vocaux à partir de l'information
numérique su terminal récepteur. Comme nous l'a appris la
présente demande, l'invention du demandeur est
particulièrement utile pour les systèmes de commutation en
télécommunication.
La Commission doit déterminer si la demande et les revendications ont trait à
l'objet brevetable visé à l'article 2 de la Loi sur les brevets. La
revendication 1 se lit comme suit:
Un système permettant de commander l'exécution des processus
suspendus dans un ordinateur exploité en temps réel, les processus
étant suspendus pour des périodes temporelles prédéterminées dans
l'ordinateur, d'exécuter un sous-programme, jusqu'à la rencontre
d'une commande de période temporelle d'attente, chaque commande
spécifiant une période temporelle prédéterminée parmi plusieurs, le
système comportant une mémoire pour enregistrer l'information
concernant les processus, et au moins un processeur configuré pour
exécuter les processus, chaque processus comportant un segment
d'information dans la mémoire pour maintenir les paramètres de
travail associés su processus lorsque ce processus est suspendu, le
segment d'information comprenant (i) une indication du temps auquel
la période temporelle d'attente viendra à échéance pour ce
processus, et (ii) un segment d'information reliant l'information
configurant les segments d'information de tous les processus qui sont
suspendus par des commandes ayant la même période temporelle
particulière dans une première liste reliée configurée selon l'ordre
chronologique dans lequel les processus sont suspendus, la première
liste reliée étant également reliée à un segment d'en-tête de chaîne
de temporisation enregistré dans la mémoire et exclusivement attribué
à la période temporelle particulière en cause, le segment d'en-tête
de chaîne de temporisation mémorisant une valeur de mise en garde
indiquant le temps auquel la période temporelle d'attente du premier
segment d'information dans la première liste reliée viendra à
échéance, et chaque segment d'en-tête de chaîne de temporisation
comportant de l'informtion de liaison d'en-tête configurant les
segments d'en-tête de chaîne de temporisation dans une deuxième liste
reliée, et la mémoire comportant une entrée pour chaque processus qui
est prêt à être exécuté par le processeur, le système exécutant une
procédure de recherche de chaîne de temporisation qui est organisée
pour être exécutée lorsque le temps réel atteint une valeur
prédéterminée, la procédure de recherche de chaîne de temporisation
comportant:
(a) La lecture des valeurs de mise en garde dans chacun de
segments d'en-tête de chaîne de temporisation,
(b) la comparaison des valeurs de mise en garde lues avec le
temps auquel la procédure de recherche de chaîne de temporisation est
exécutée,
(c) le placement dans le fichier "prêt à être exécuté" des
processus ayant des valeurs de mise en garde égale au temps pendant
lequel la procédure de recherche de chaîne de temporisation est
exécutée,
(d) la suppression, sur les premières listes reliées, des
processus ayant des valeurs de mise en garde égales su temps pendant
lequel la procédure de recherche de chaîne de temporistion est
exécutée et le réglage des valeurs de mise en garde dans les segments
d'en-tête de chaîne de temporisation pertinents,
(e) la lecture des valeurs de mise en garde de chaque segment
d'en-tête de chaîne de temporisation et la sélection de la valeur de
mise en garde la plus faible pour produire la prochaine valeur
prédéterminée.
Au cours de la procédure d'examen, l'examinateur et le demandeur se sont tous
deux penchés sur la décision Schlumberger Canada Ltd. v. The Commissioner of
Patents (181) 56 C.P.R. 204. Pour trancher les questions dont nous sommes
saisis, nous nous inspirons des passages suivants du juge Pratte tirés de cette
décision:
Pour savoir si une demande révèle une révision brevetable, il échet
d'examiner en premier lieu ce qui, d'après la demande, a été
découvert.
et
A mes yeux, le fait qu'un ordinateur est employé ou requis pour
l'application d'une découverte ne change en rien la nautre de cette
dernière. Ce que l'appelant revendique à titre d'invention en
l'espèce, n'est que la découverte selon laquelle certains calculs
effectués conformément à certaines formules, permettraient d'extraire
des informations utiles de certaines mesures. Voilà qui ne constitue
pas une invention au sens de l'article 2.
Dans l'évaluation de l'objet de l'invention du demandeur, nous sommes persuadés
que la "nature" du dispositif du demandeur est le groupement d'éléments dans un
système de commutation permettant la mise en file d'attente de processus en
suspens et le séquencement de leur acceptation dans le système. Pour produire
le résultat voulu, le demandeur a configuré un système faisant appel à des
registres contenant des piles d'informations, et des en-têtes de chaîne de
temporisation, par exemple, ainsi que différents dispositifs d'interconnexion
de tous les éléments du système qui concourent à mémoriser et à libérer les
signaux permettant l'exécution séquentielle des différents processus. Nous
voyons également que des processus spéciaux sont exécutés avec la configuration
décrite pour permettre qu'un événement externe libère un processus mis en file
d'attente ou enchaîné dans une séquence, pour que ce processus soit exécuté
avant que la séquence temporelle le permette. Nous sommes d'avis que la
combinaison d'éléments du demandeur représente un type d'objet d'invention qui
relève d'une technique brevetable.
Dans sa réponse, le demandeur souligne que sa combinaison est utile dans un
système de commutation en télécommunication. Quant à l'examinateur, il se rend
bien compte qu'un système est revendiqué et il souligne que d'après lui, aucun
dispositif nouveau n'a été divulgué. Même si les parties du dispositif du
demandeur sont anciennes, la question qui prévaut ici est de savoir si
l'arrangement qu'en a fait le demandeur a fourni une combinaison de structures
qui produit un dispositif tombant sur le coup de l'article 2. Nous sommes
persuadés par la divulgation et les arguments du demandeur que son arrangement
fournit des systèmes acceptables en vertu de l'article 2. Nous notons
qu'aucune technique n'a été invoquée au cours de la procédure d'examen et nous
ne rendons aucune décision sur l'acceptabilité de l'objet revendiqué. Si telle
question était soulevée, une audience pourrait alors s'avérer nécessaire.
Nous recommandons que le rejet de la demande et des revendications, signifié
pour ne pas satisfaire à l'article 2 de la Loi, soit annulé.
M.G. Brown S.D. Kot
Président intérimaire Membre
Commission d'appel des brevets
Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission d'appel des
brevets. Par conséquent, j'annules le rejet de la demande et renvoie celle-ci à
l'examinateur pour qu'il en continue l'examen.
J.H.A. Gariépy
Commissaire des brevets
Fait à Hull (Québec)
le 14 août 1986.
Scott & Aylen
170 ouest, avenue Laurier
Ottawa (Ontario)
K1P 5V5