DECISION DU COMMISSAIRE
Redélivrance: Il a été déterminé que des revendications contenues dans la
demande de redélivrance visaient une invention différente de
celle brevetée et étaient apparentées aux revendications radiées
de la demande originale en vue d'accélérer la délivrance du
brevet. Rejet confirmé.
La présente décision fait suite à la requête formulée par le demandeur auprès
du commissaire des brevets pour qu'il révise la décision finale de
l'examinateur concernant la demande no 342,635 (classe 93-93) de redélivrance
du brevet canadien no 980,612, accordé le 30 décembre 1975. La demande, qui a
été cédée à Dennison Manufacturing Co., porte sur une invention intitulée
"SYSTEMES DE FIXATION D'ATTACHES". A.R. Bone en est l'inventeur.
L'examinateur chargé du dossier a rendu sa décision finale le 4 février 1983,
rejetant la demande. Une audience, à laquelle le demandeur était représenté
par son agent des brevets, Me J.K. Carton, s'est tenue le 17 avril 1985.
La demande a trait à un appareil conçu pour distribuer, à partir d'un
dispositif du genre cartouche, des attaches individuelles à barres blocantes
pour étiqueter ou fixer des articles. Chaque attache comporte un mince
filament entre des extrémités semblables à une barre. L'appareil breveté est
illustré aux figures 5, 6 et 7 reproduites ci-après.
<IMGS>
L'appareil revendiqué, conçu pour amener et distribuer des attaches à
barres blocantes, comporte des moyens de guidage 38B munis d'une
rainure 39, une tige 88 qui pousse au travers des moyens de guidage
une extrémité de la barre de l'attache (non illustrée) de façon que
son filament sorte de la rainure, des moyens 92 pour amener l'attache
en ligne avec l'un des bouts des moyens de guidage, des moyens moteurs
déclenchables 45 qui actionnent la tige pour qu'elle agisse contre la
barre de l'attache et des moyens 26, 27, 28 et 48 pour déclencher le
moteur.
Dans sa pétition de redélivrance, le pétitionnaire prétend que le
brevet est défectueux ou inopérant du fait qu'il a revendiqué moins
qu'il n'avait le droit de revendiquer et il estime que tous les
aspects de l'invention ne sont pas protégés. Il s'explique, en
partie, comme suit :
[Traduction]
En particulier, les revendications ne visent pas l'appareil
d'alimentation et de distribution de l'inventeur dans lequel est
prévu un plongeur (88), au moins partiellement mobile dans un
guide, avec un mécanisme d'alimentation (92) pour amener chaque
attache d'une série d'attaches en magasin (60) en position pour
être poussée par le plongeur (88), appareil caractérisé par un
autre mécanisme (84) qui se déplace avec le plongeur de façon à
faire fonctionner le mécanisme d'alimentation. De plus, les
revendications ne visent pas l'aspect de l'invention par lequel
les attaches peuvent être éjectées par un plongeur (88) et une
roue d'entrainement (92) dans une rainure-guide, caractérisé par
une griffe (102) qui se déplace entre des arrêtoirs et qui est
solidaire d'un poussoir (84) se déplaçant avec le piston de façon
que la griffe, après chaque avance du piston, est avancée d'au
moins une division par les dents de la roue (92).
Le pétitionnaire attribue l'omission de revendiquer plusieurs aspects
inventifs de son appareil de distribution aux avocats américains, qui
n'ont pas su les comprendre et les apprécier à leur juste valeur.
C'est en examinant, en juillet 1977, le brevet américain correspondant
qu'il a pris connaissance de ce fait.
Dans sa décision finale, l'examinateur a rejeté les revendications 8,
9 et 10 de la demande de redélivrance, alléguant qu'elles visaient une
invention différente de celle décrite dans le brevet original et
faisant remarquer que les revendications 1 à 7 sont identiques à
celles du brevet. Il a comparé, en partie comme suit, la
revendication 1 du brevet avec la revendication 8 de la demande de
redélivrance :
La revendication 1 fait état, entre autres choses, de "moyens
moteurs déclenchables" et de "moyens pour déclencher les moyens
moteurs", tandis que la revendication 8 porte sur "un mécanisme
moteur (84) ... qui cause le fonctionnement du mécanisme
d'alimentation (92)". Il ne s'agit pas de la même chose, et le
mémoire descriptif fait état explicitement de l'élément (84)
comme d'un piston qui est distinct des moyens déclenchables.
et il a ajouté :
[Traduction]
La limitation que constitue les moyens déclenchables a été
insérée dans la revendication afin de surmonter l'antériorité
citée pendant l'instruction de la demande de brevet originale.
La nouvelle revendication a été présentée dans une modification
en date du 5 novembre 1974 dans laquelle il était déclaré que
"pour établir clairement le caractère distinctif (par rapport à
l'antériorité citée), les moyens moteurs dans la revendication 1
sont qualifiés de déclenchables, c'est-à-dire non actionnés par
une force motrice manuelle".
(...)
La plus large des trois revendications ajoutées est la
revendication 8, qui est essentiellement identique à la
revendication 20 figurant à l'origine dans la demande n o 110 588,
devenue le brevet n o 980 612. Cette revendication est l'une de
celles qui ont été annulées au cours de l'instruction de la
demande originale. Comme ces revendications ont été
volontairement annulées, elles ne peuvent être réintroduites par
le biais de la redélivrance.
L'examinateur a également rejeté la revendication 8 eu égard au brevet
américain n o 3 185 367, délivré le 25 mai 1965 à Rieger et cité comme
antériorité pendant l'instruction de la demande de brevet, de même que
les revendications 9 et 10, en raison de leur caractère indéfini.
Dans sa réponse à la décision finale de l'examinateur, le demandeur a
fait valoir que la revendication 8 définit la même invention que la
revendication 1, mais dans des termes appropriés à l'aspect ou la
réalisation qu'il décrit comme [traduction] "l'interaction de l'aspect
de mécanisme d'alimentation et de l'aspect de distribution". Il
signale la différence entre le libellé de la revendication 8 et celui
de la revendication 20 qui a été supprimée de la demande originale.
Il discute de la modification qu'il a apportée à la revendication 8 du
point de vue du fonctionnement de l'appareil et fait ressortir le
contraste entre l'action de l'appareil Rieger et ce qu'il appelle
l'action directe du cliquet 102 de son appareil après que la tige
d'éjection est en position pour l'avance des attaches. Le demandeur
prétend que l'examinateur n'est pas habilité à rejeter une
revendication dans une demande de redélivrance du fait qu'elle est une
réinsertion et qu'il ne convient pas de se référer à la jurisprudence
américaine. Il maintient qu'il aurait fallu interpréter les
dispositions de l'article 50 de la Loi sur les brevets à la lumière du
droit canadien.
Il nous paraît donc indiqué de reproduire ici l'article 50(1):
Lorsqu'un brevet est jugé défectueux ou inopérant à cause d'une
description ou spécification insuffisante, ou parce que le breveté
a revendiqué plus ou moins qu'il n'avait droit de revendiquer à
titre d'invention nouvelle, mais qu'il apparaît en même temps que
l'erreur a été commise par inadvertance, accident ou méprise, sans
intention de frauder ou de tromper, le commissaire peut, si le
breveté abandonne ce brevet dans un délai de quatre ans à compter
de la date de brevet, et après acquittement d'une taxe
supplémentaire prescrite, faire délivrer su breveté un nouveau
brevet, conforme à une description et spécification rectifiée par
le breveté, pour la même invention et pour la partie restant alors
à courir de la période pour laquelle le brevet original a été
accordé.
La question que la Commission doit trancher est la suivante: l'article 50 de
la Loi permet-il la redélivrance d'un brevet dont les revendications auraient
la portée des revendications modifiées 8, 9 et 10 et des revendications
supplémentaires 11 à 14 présentées pendant l'instruction? La revendication
modifiée 8 se lit comme suit:
Un appareil d'alimentation et de distribution de séries de pièces
d'attache (60) dans lequel les pièces individuelles sont
assujetties à une tige d'assemblage (64) par un col (63),
l'appareil comportant un plongeur (88) qui est au moins en partie
mobile dans un guide et conçu de façon à pousser les pièces
d'attache, un mécanisme d'alimentation (92) pour amener chaque
attache d'une série en position pour être poussée par le plongeur
(88), caractérisé par un mécanisme moteur (84) qui se déplace avec
le plongeur (88) de façon à causer le fonctionnement direct du
mécanisme d'alimentation (92).
Aux fins de l'examen de la demande de redélivrance, nous croyons qu'il est
utile de nous référer à l'arrêt rendu dans l'affaire Northern Electric Company
Ltd. v. Photo Sound Corporation (1936) Ex. C.R. 75, p. 89 (confirmé (1936) RCS
649):
Il est manifeste que le brevt modifié doit viser la même invention
et ne peut comprendre quelque nouvelle invention.
Dans la très grande majorité des cas, lorsqu'un brevet est
défectueux ou inopérant, cela tient à la description donnée de
l'invention dans le mémoire descriptif, dans les dessins ou dans
les deux, et c'est pour remédier à de telles situations que la Loi
prévoit une rectification. Ainsi, dans la plupart des cas, l'objet
de la redélivrance visera à corriger un brevet imparfait, les
défauts de la description ou des dessins, mais non l'objet
inventif, pour que le brevet divulgue et protège l'objet brevetable
que l'inventeur a cherché à faire protéger. Par conséquent, le
brevet redélivré doit être limité à l'invention que le breveté a
tenté de décrire et de revendiquer dans son mémoire descriptif
original, mais qu'il n'a pas fait de façon satisfaisante à cause
d'une erreur commise par "inadvertance, accident ou méprise". Le
breveté ne se voit pas octroyer un nouveau brevet, mais bien un
brevet rectifié. Permettre autre chose engendrerait une situation
intolérable. De toute évidence, il s'ensuit qu'un brevet ne peut
être "défectueux ou inopérant", au sens où l'entend la Loi, du fait
qu'il ne décrit et ne revendique pas un objet qui déborde le cadre
de l'invention telle que l'a conçue ou perçue l'inventeur au moment
de l'invention.
Afin de déterminer si la revendication modifiée 8, présentée par le demandeur en
réponse à la décision finale de l'examinateur, a trait à l'objet des revendications
1 à 7, nous examinerons d'abord la revendication 8 telle qu'elle a été déposée.
Nous constatons que l'examinateur a comparé la revendication 8 non seulement avec la
revendication 1 de la demande de redélivrance, mais encore avec la revendication 20
qui a été supprimée au cours de l'instruction de la demande ayant abouti au brevet
no 980,612 du demandeur. Dans sa lettre du 4 août 1983, le demandeur a fait valoir
que la revendication 8 porte sur l'aspect d'interaction de son invention et qu'elle
définit donc la même invention que la revendication 1, affirmant que: (traduction)
"s'il est vrai que l'objet de la revendication 8 est généralement similaire à celui
de la revendication 20, il est aussi vrai que la formulation de la revendiction, par
laquelle est définie la réalisation que l'on cherche à protéger, est différente."
Nous constatons que le libellé des neuf premières lignes de la revendictaion 1 se
terminant par l'expression "moyens de guidage" est similaire aux huit premières
lignes complètes de la revendication 8. Au cours de l'examen de la demande ayant
mené à la délivrance du brevet no 980,612, le demandeur a inséré une mention des
moyens moteurs déclenchables à la suite de l'expression "moyens de guidage" dans la
revendication 1 en vue de surmonter l'antériorité que constituait le brevet Rieger.
Selon le mémoire descriptif du demandeur, les moyens moteurs 45 sont déclenchés par
une soupape à solénoide 48 qui s'ouvre et se ferme de façon à contrôler le fluide
dans la chambre du moteur 45. Lorsque la came 26 agit sur l'élément 27,
l'interrupteur 28 se ferme et la soupape 48 est actionnée.
Nous remarquons qu'il n'est pas fait mention des moyens moteurs déclenchables dans
la revendication 8, qui contient, après les huit premières lignes, une énumération
des éléments suivants: le mécanisme moteur 84, le plongeur 88 et le mécanisme
d'alimentation 92. Dans les dessins, il s'agit, respectivement, du piston 84, de la
tige 88 et de la roue de positionnement 92. D'après la description dans la demande,
le piston et la tige sont raccordés de façon à se déplacer ensemble, le piston agis-
saut sur une roulette 101 et la tige, sur l'extrémité de la barre d'une attache.
Nulle part n'est-il indiqué dans le mémoire descriptif du brevet que le piston, la
tige ou la roue dont il est question dans la revendication 8, isolément ou en combi-
naison, constituent ou peuvent constituter les moyens moteurs déclenchables ou les
moyens de déclenchement. A notre avis, la revendication 8 expose une partie ou une
forme indépendante de l'appareil divulgué dans la demande, mais non définie
dans la revendication 1 du brevet, et elle vise une combinaison distincte, qui
n'est pas la même invention que celle définie dans la revendication 1.
L'ajout du terme "direct" dans la revendication modifiée n'apporte aucune
caractéristique qui, d'après nous, conférerait à la revendication 8 un aspect
équivalent à celui de la revendictin 1. A nos yeux, le qualificatif "direct"
renforce les différences distinctives existant entre les revendications 1 et
8. Le piston 84 ne peut causer directement le fonctionnement de la roue 92.
Comme le montre la figure 7, la surface du piston 84 fuit vers le centre de
façon à pouvoir agir sur la roulette 101 logée dans la surface rainurée de
l'une des extrémités d'un levier pivotant 98 à ressort 100, dont l'autre
extrémité porte un ergot 102. Quand le piston 84 se déplace vers la droite, la
roulette est poussée vers le bas, comme l'est l'extrémité droite du levier, et
l'ergot, dans un mouvement vers le haut, vient pousser contre une dent de la
roue 92. La roue tourne et fait avancer la cartouche d'attaches de façon à
positionner une barre d'attache en ligne avec la tige 88. Le cliquet à ressort
94 empêche la rotation inverse de la roue. Lorsque le piston est déplacé vers
la gauche, la tige pousse l'extrémité de la barre pour faire avancer l'attache
à travers le guide. Une ouverture pratiquée dans le boîtier 81 et la forme du
piston permettent à la roulette de remonter et au ressort de se détendre pour
faire pivoter le levier et ainsi faire baisser l'ergot en position pour la
prochaine avance. Nous sommes convaincus que l'expression (traduction) "de
façon à causer le fonctionnement du mécanisme d'alimentatin (roue 92)" dans la
revendication 8, prise isolément ou qualifiée par "direct" dans la
revendication modifiée 8, ne fait rien pour rendre ces revendications
équivalentes à l'invention définie dans la revendication 1.
Au cours de l'audience, Me Carton a prétendu que l'abrogation de l'article 60
des Règles sur les brevets modifiait le sens de la doctrine des équivalents et
il a fait valoir que différentes réalisations peuvent être définies dans un
brevet. Nous ne pouvons voir comment l'abrogation de l'article 60 des Règles
peut être interprétée de façon à modifier les exigences de l'article 38, ni
celles de l'article 50 applicables à la présente situation, vu les lignes
directrices de la jurisprudence, nommément l'arrêt Northern Electric v. Photo
Sound, précité. Dans son exposé concernant l'effet du qualificatif "direct"
sur l'objet de la revendication 8, l'agent du demandeur a fait valoirr qu'il
définissait une différente réalisation de la même invention. Il a également
prétendu que ce terme n'était pas un équivalent de la limitation qui a été
introduite dans la demande originale avant la délivrance du brevet. Il a
souligné que le terme "direct" ne s'écarte pas de l'esprit de l'inventino, mais
qu'il permet de surmonter l'antériorité et qu'il est étayé par l'exposé.
Nous estimons que le terme "direct" n'est pas équivalent de la limitation
introduite pour surmonter l'antériorité opposée à la demande pendant son
instruction. De plus, nous croyons que la modification apportée à la
revendication 8 en supprimant la mention des moyens moteurs déclenchables et
des moyens de déclenchement pour les remplacer par des éléments différents, qui
remplissent une fonction différente de celle énoncée dans la revendication
brevetée 1, est d'une ampleur telle que la revendication 8 ne vise pas, ni dans
sa forme originale, ni dans sa forme modifiée, la même invention que la
revendication 1. Or, l'une des principales exigences de l'article 50 est qu'un
brevet redélivré doit viser la même invention. Nous croyons que l'arrêt
Northern Electric v. Photo Sound, précité, s'applique en l'espèce. Pour
expliciter notre raisonnement, nous nous y référons de nouveau, en page 89, en
particulier à un passage tiré de Robinson on Patents, vol. 2, page 318, cité
par le juge Maclean pour sa valeur en tant qu'exposé sur la portée éventuelle
d'une redélivrance, et reproduit ci-après:
Si les moyens conçus par l'inventeur pouvaient donner lieu à une
élaboration ultérieure ou à une nouvelle application que
l'inventeur n'avait pas alors perçues, celles-ci ne font pas
partie de son invention. Si son idée telle qu'il l'a conçue et
embrassée pouvait être divisée en d'autres idées dont certaines
seulement ont été réalisées en pratique, seules celles-ci peuvent
avoir constitué son invention. Si son idée comportait différents
aspects, susceptibles de réalisation dans des inventions
essentiellement distinctes dont chacune aurait pu constituer la
matière inventive d'un brevet indépendant, l'aspect qu'il a retenu
en tant qu'objet du brevet qu'il cherche par la suite à rectifier
est la seule invention que ce brevet, s'il avait été complet,
aurait pu protéger. Ainsi délimitée, l'invention exclut donc tout
développement de l'idée des moyens qui serait survenu après la
délivrance du brevet original, toutes les idées qui n'étaient pas
réalisées en pratique avant la demande du brevet original, ainsi
que toutes les parties ou formes distinctes et indépendantes de
l'invention qui n'étaient pas englobées dans l'objet du brevet
délivré. Par conséquent, aucun défaut ni insuffisance de l'exposé
concernant ces éléments ne peut rendre le brevet original
inopérant ou invalide, ni justifier sa rectification. La
rectification, peu importe son degré ou sa nature, doit
obligatoirement viser les moyens complètement conçus, embrassés et
réalisés en pratique que l'inventeur a cherché à faire protéger et
à l'égard desquels l'Etat a accordé une protection. Les
inventions subséquentes, qu'elles soient tout à fait distinctes ou
qu'il s'agisse de variantes ou de perfectionnements importants de
l'invention originale, de découvertes ultérieures des
caractéristiques de l'invention ou de l'une ou l'autre de ses
parties, de techniques ou d'appareils indépendants, bien que
tirant leur origine de la même idée primitive, et de toute
nouvelle matière quelle qu'elle soit, débordent également le cadre
du brevet original et de toute rectificatin ou de tout
élargissement de celui-ci par le biais de la redélivrance.
Ayant examiné les revendications 9 et 10, nous concluons que l'invention
qu'elles définissent est apparentée à celle de la revendication modifiée 8.
Quant aux revendictions 11 à 14, qui ont été présentées après la décision
finale de l'examinateur, nous constatons qu'elles sont des variantes des
arrangements exposés dans les revendications 8, 9 et 10 et qu'elles ne visent
donc pas la même invention que celle définie dans les revendications 1 à 7 du
brevet. Ayant jugé que les revendications 8 à 14 ne visent pas l'invention qui
a été brevetée, force nous est de constater qu'il n'est pas satisfait à
l'exigence fondamentale de l'article 50, à savoir qu'un brevet ne peut être
redélivré que s'il s'agit de la même invention. Après avoir étudié les
mémoires déposés et entendu les arguments exprimés au cours de l'audience sur
les diverses décisions judiciaires, nous sommes convaincus qu'il n'y a pas eu
d'erreur susceptible de répondre aux exigences de l'article 50(1), définies par
la jurisprudence canadienne susmentionnée - c'est-à-dire commise par
inadvertance, accident ou méprise. Il convient de rappeler que, pendant
l'instruction de la demande ayant abouti au brevet no 980,612, le demandeur,
par sa lettre du 13 juin 1975, a supprimé les revendications 8 à 1 en vue
d'accélérer cette instruction, signalant qu'il se réservait le droit de
reprendre ces revendications dans une demande divisionnaire. Pendant cette
instruction, le demandeur a de plus annulé la revendication 20, qui contenait
un objet similaire à celui des revendications 8 à 14 de la présente demande.
Quant à l'argument de Me Carton, qui affirme que la revendication modifiée 8 est
manifestement brevetable en dépit du brevet Rieger, nous faisons observer que, dans
l'appareil Rieger, un piston plongeur est muni d'un dispositif à came qui agit sur un
dispositif d'embrayage pour actionner le mécanisme d'alimentation des attaches.
L'action de l'appareil Rieger et celle décrite dans la revendication 8 sont
semblables. Il ne nous apparaît pas du tout évident que l'insertion du terme
"direct" permet de surmonter l'antériorité que constitute le brevet Rieger.
En résumé, nous concluons que les revendications 8 à 14 portent sur le même objet que
la revendication 20 qui a été annulée su cours de l'instruction de la demande ayant
abouti au brevet canadien no 980,612 et ne visent pas le même objet que les revendi-
cations 1 à 7 de ce brevet. De plus, nous sommes d'avis que le fait d'annuler la
série de revendications, nommément 8 à 13, et l'ensemble comprenant la revendication
20 dont il est question ci-dessus, constitue une action délibérée de la part du
demandeur en vue d'obtenir un brevet. Nous estimons qu'il n'y a pas lieu de tenir
cette action pour une erreur commise par inadvertance, accident ou méprise. Au
contraire, nous constatons que le demandeur connaissait les recours qui s'offraient à
lui avant la délivrance du brevet no 980,612, soit déposer avant cette délivrance une
ou plusieurs demandes divisionnaires portant sur l'objet inventif non retenu.
Nous recommandons que le rejet des revendications 8, 9 et 10, telles qu'elles ont été
déposées et modifiées, soit maintenu pour la raison qu'elles visent une invention
différente de celle du brevet no 980,612 et que les revendications supplémentaires 11
à 14, présentées après la décision finale de l'examinateur, soient rejetées pour la
même raison.
M.G. Brown S.D. Kot
Président intérimaire Membre
Commission d'appel des brevets
Je souscris aux conclusions et à la recommandation de la Commission d'appel des
brevets. Par conséquent, je rejette la demande de redélivrance de brevet. Aux
termes de l'article 44 de la Loi sur les brevets, le demandeur dispose d'un
délai de six mois pour interjeter appel de la présente décision.
J.H.A. Gariépy
Commissaire des brevets Moffat & Co.
B.P. 2088 Succursale D
Fait à Hull (Québec) Ottawa (Ontario)
ce 22e jour d'avril 1986 K1P 5W3