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            DÉCISION DU COMMISSAIRE

 

OBJET NON BREVETABLE, ARTICLE 2. :        AFFICHAGE DE COUPES SISMIQUES

 

L'affichage isométrique de coordonnées joint à l'utilisation d'un ordinateur ne

constitue pas uniquement de simples calculs.

 

Décision finale annulée.

 

      ***************

 

La présente décision porte sur une demande présentée au Commissaire des brevets

par le demandeur et visant la révision de la décision finale rendue par l'examinateur

à l'égard de la demande de brevet 285 029 (classe 349-22), intitulée AFFICHAGE

ISOMÉTRIQUE DE COUPES SISMIQUES. Les inventeurs, L.R. Chapman et R.F. O'Doherty,

ont cédé leurs droits à la Seiscom Delta Inc. L'examinateur a rendu une décision

finale de rejet de la demande.

 

La demande porte sur un affichage tridimensionnel sur une grille à deux dimensions

de traces sismiques représentant une partie du sous-sol terrestre, pour obtenir

un bloc diagramme, tel qu'illustré à la figure 1.

 

<IMG>

 

Les traces sismiques levées sont enregistrées au moyen de coordonnées x et y dont

les valeurs correspondant au début et à la fin de chaque trace sont traitées par

ordinateur puis stockées. L'affichage est élaboré en extrayant de la mémoire toutes

les traces ayant une valeur de x commune et en les reproduisant à l'aide de points

sur l'écran, comme l'illustre la verticale 100 qui porte les ordonnées y. Cette

méthode produit un enregistrement composé pour chaque coupe relevée, à partir duquel

un bloc diagramme est monté. En outre, cette méthode simplifie l'analyse de la

continuité latérale des phénomènes d'une coupe à l'autre, et son interprétation.

 

Dans sa décision finale, l'examinateur fait allusion à l'objet revendiqué en ces

termes: (TRADUCTION) "... une méthode d'affichage de traces sismiques à trois

dimensions sur une surface d'affichage à deux dimensions, dans une perspective

isométrique". Il mentionne par la suite la décision rendue dans l'affaire

Schlumberger Canada Ltd. c. le Commissaire des brevets 56 CPR (1981) p. 204 et

estime que la méthode du demandeur consiste à (TRADUCTION) "... convertir des

mesures en données plus utiles ..." et n'est pas (TRADUCTION) "... une invention

aux termes des dispositions de l'article 2".

 

Dans sa réponse à l'examinateur, le demandeur fait également allusion à la décision

rendue dans l'affaire Schlumberger et cite un passage dans lequel le juge Pratte

déclare que l'article 2. ne comporte aucune disposition relative (TRADUCTION)

"... à l'exclusion des inventions qui utilisent des ordinateurs ...".

 

Il s'agit pour la Commission de savoir si la demande et les revendications visent

un objet d'invention brevetable au sens de l'article 2. de la Loi sur les brevets.

 

La revendication 1 se lit comme suit :

 

(TRADUCTION) Une méthode servant à élaborer sur une surface d'affichage

à deux dimensions un affichage isométrique de phénomènes sismiques en vue

de présenter une image à trois dimensions des traces sismiques traversant

plusieurs coupes sismiques et tirées de graphes élaborés sur une grille

à deux dimensions; cette méthode comporte les étapes suivantes :

 

      a) assignation aux graphes affichés d'une position relative à deux

        dimensions en fonction de leur longueur et de leurs points

        d'intersection respectifs sur la surface d'affichage, compte tenu

      de la représentation isométrique à élaborer;

 

      b) regroupement des traces sismiques dans l'ordre, en respectant

      la position relative assignée à leur graphe, en calculant les

      valeurs des coordonnées verticales et horizontales correspondant

      au début et à la fin des traces sismiques et

 

      c) affichage de l'ensemble des traces sismiques sur la surface

      d'affichage sur laquelle une représentation isométrique des traces

      sismiques est réalisée à l'aide des renseignements plus détaillés

      tirés de la surface d'affichage à deux dimensions.

 

Étudions maintenant le bien-fondé des citations tirées de l'affaire Schlumberger

dans le cadre de l'étude de la demande. A la lecture de la décision finale, nous

constatons que l'examinateur associe à l'objet décrit dans l'affaire Schlumberger

la méthode revendiquée par le demandeur et consistant à convertir des mesures en

données plus utiles grâce à certains calculs; de l'avis de l'examinateur, l'invention

de Schlumberger consiste à (TRADUCTION) "... effectuer des calculs à l'aide de

certaines formules en vue de tirer des renseignements utiles fondés sur des mesures".

Les examinateurs utilisent assez souvent la méthode de l'analyse comparative lors

de l'étude des demandes dans le but de savoir si un objet d'invention satisfait

aux exigences de l'article 2., étant donné que toutes les inventions ne sont pas

brevetables au sens de cet article, comme les méthodes de traitement médical.

Voir Tennessee Eastman c. le Commissaire des brevets 1974 SCR 111, et Schlumberger,

ci-dessus.

 

En ce qui a trait au passage cité par le demandeur, nous croyons qu'il fait partie

du préambule du jugement rendu par le tribunal et devrait donc être relié à la

première phrase du paragraphe suivant la citation du demandeur dans laquelle le

juge Pratte déclare:

 

(TRADUCTION) Dans la démarche visant à déterminer si la demande divulgue

une invention brevetable, il faut d'abord établir, à partir de la demande,

ce qui a été découvert.

 

Selon le juge Pratte, l'invention de Schlumberger vise l'exécution de calculs et

l'utilisation de formules mathématiques. A son avis, les opérations et les

processus mentaux ne sont pas de ceux dont il est question dans la définition que

donne l'article 2. du mot invention. Il ajoute que le fait d'utiliser un ordinateur

ne confère aucun caractère brevetable aux inventions qui ne sont aucunement

brevetables aux termes des dispositions de la Loi. En rendant sa décision, le

juge Pratte déclare:

 

(TRADUCTION) Je suis d'avis que le fait d'utiliser ou d'avoir à utiliser

un ordinateur pour mettre à exécution une découverte ne modifie pas la

nature de cette découverte. Ce que le demandeur revendique à titre d'invention

dans le cas qui nous occupe consiste simplement en la découverte selon

laquelle certains calculs faits à l'aide de certaines formules donnent des

renseignements utiles qui peuvent être tirés de certaines mesures. Il ne

s'agit pas là, selon moi, d'une invention au sens de l'article 2.

 

Alors, en quoi consiste l'invention qui fait l'objet de la présente demande? Pour

l'examinateur qui rend sa décision finale, il s'agit d'une méthode de transformation

de mesures en renseignements plus utiles au moyen de calculs effectués à l'aide

de certaines formules. Quant au demandeur, il mentionne dans sa description de

l'antériorité que certains relevés ont donné des lectures faisant état des

variations caractérisant le sous-sol terrestre. Il présente son invention comme

étant un affichage significatif des caractéristiques relevées. Il soutient tout

au long de la procédure d'examen de la demande de brevet que l'invention vise un

affichage nouveau, sur une surface à deux dimensions, de données sismiques

correspondant à une couche souterraine en trois dimensions. Il déclare que la

revendication vise la combinaison de phases de traitement informatique suivant

un ordre nouveau. Il revendique une invention visant un procédé et comportant

deux aspects, soit la combinaison et la succession des phases d'une part, et la

méthode d'application concrète d'autre part. A son avis, l'examinateur ne s'est

penché que sur un seul aspect de son invention, à savoir l'utilisation d'un ordinateur

conventionnel qui de fait constitue le moyen de réaliser l'invention. Le demandeur

insiste sur le fait que ses revendications visent un procédé parce qu'elles décrivent

une combinaison d'étapes sans mentionner le moyen utilisé, c'est-à-dire l'ordinateur.

Les parties a) et b) de la revendication 1 visant la méthode décrivent les étapes

au cours desquelles une position est assignée aux graphes sur l'écran et les signaux

sont regroupés sur les graphes en calculant les valeurs des coordonnées x et y;

la partie c) de la revendication traite de la disposition des signaux en vue de

présenter un affichage isométrique.

 

Nous nous inspirerons ici des passages tirés de l'affaire Schlumberger qui ont

été cités au cours de l'étude de la demande en y ajoutant un autre commentaire

du juge Pratte selon lequel le simple fait que des ordinateurs effectuent des calculs

ne confère pas un caractère brevetable à une invention qui n'est pas brevetable

aux termes de la Loi. Il s'agit donc de savoir si la demande vise une méthode

de conversion de mesures ou une combinaison brevetable d'éléments. A notre avis,

c'est l'affichage des coordonnées dans une perspective isométrique allié aux phases

de traitement informatique qui constituent l'invention du demandeur, et nous ne

croyons pas que l'invention se résume à effectuer des calculs. Nous sommes

convaincus que l'étape correspondant à, l'affichage isométrique d'une formation

constitue un progrès technique brevetable aux termes de l'article 2., à la condition

toutefois que l'invention ne déroge à aucun autre article de la Loi.

 

Nous croyons qu'il serait pertinent d'ajouter quelques brefs commentaires sur les

antériorités citées dans la présente demande. Au moins une des antériorités citées

par le demandeur, soit le brevet américain 3 931 609 du 6 janvier 1976,

correspondant au brevet canadien 1 007 352 délivré le 22 mars 1977, porte sur

l'affichage isométrique de données sismiques sur un bloc diagramme dans le but

d'illustrer les variations caractérisant le sous-sol terrestre. En outre, le

demandeur cite deux autres sources qui font état de la représentation sous une

forme tridimensionnelle de données sismiques, soit l'Encyclopedia Dictionary of

Exploration Physics (1973) qui illustre, aux pages 77 et 79, un bloc diagramme

isométrique, et un article de Dorbin publié en 1969 dans Computer Processing of

Seismic Reflections. Nous remarquons que les étapes des revendications, soit

l'assignation de la position relative des signaux sismiques, le regroupement des

traces par le calcul informatique des valeurs des coordonnées et l'affichage des

traces sous une forme isométrique sur une surface d'affichage ressemblent à celles

des antériorités citées. Dans la mesure où les revendications visent un objet

d'invention conforme aux dispositions de l'article 2., nous les jugeons recevables.

Nous remarquons toutefois qu'aucune antériorité n'a été citée dans la décision

finale et nous ne rendons aucune décision relativement au caractère brevetable

des revendications.

 

Nous recommandons l'annulation du rejet de la demande fondé sur le fait qu'elle

ne vise pas un objet d'invention brevetable aux termes de l'article 2., ainsi que

le renvoi de la demande à l'examinateur pour qu'il y donne suite.

 

Le Président,                  Le Président adjoint,

 

A. McDonough                   M.G. Brown                   S.D. Kot

Commission d'appel                                          Membre

des brevets

 

Je suis d'accord avec les conclusions et la recommandation de la Commission d'appel

des brevets. Par conséquent, j'annules la décision finale et je renvoie la demande

à l'examinateur pour qu'il y donne suite conformément aux conclusions de la Commission.

 

Le Commissaire des brevets,

 

J.H.A. Gariépy

 

Hull (Québec)

6 mai 1985

 

Agent du demandeur

G.H. Riches et associés

2, rue Bloor est, pièce 2900

Toronto (Ontario)

M4W 3J5

 

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