DECISION DU COMMISSAIRE
OBJET D'INVENTION NON CONFORME AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 2 DE LA LOI:
le monte-charge revendiqué par le demandeur offre un service d'ascenseur
s'arrêtant automatiquement à un étage particulier dans un établissement de
services; les antériorités citées ne décrivent nullement un système semblable.
La présente demande est donc recevable eu égard à la décision rendue relative-
ment à l'affaire Schlumberger.
Décision de rejet annulée.
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La présente décision porte sur une demande de révision par le Commissaire des
brevets de la décision finale rendue au sujet de la demande no 229,518 (classe
364-2) intitulée MONTE-CHARGE. L'inventeur, Robert C. MacDonald, a cédé ses
droits à la Westinsthouse Electric Corporation. L'examinateur responsable de
l'étude de la demande a rendu une décision finale de rejet. Les agents de bre-
vets, Robert H. Fox et Edward H. Oldham, ont représenté le demandeur lors de la
tenue d'une audience.
La demande vise un monte-charge et un système permettant de desservir en prio-
rité un étage particulier désigné. Le système peut être relié à tout
monte-charge déja en place et servir à répondre à des appels transmis par des
commutateurs installés su rez-de-chaussée et à l'étage particulier désigné. Le
système choisit parmi les cabines qui peuvent desservir l'étage particulier
désigné, la cabine libre la plus près qui n'a pas été affectée par le proces-
seur ou qui n'a pas à répondre à d'autres appels. Le système détermine
également si l'étage particulier désigné se trouve dans la moitié supérieure de
l'établissement et le cas échéant, accorde la priorité aux appels en direction
des étages supérieurs; par contre, si l'étage particulier désigné se trouve
dans la moitié inférieure de l'établissement, les appels à destination des
étages inférieurs ont priorité.
La figure 6, illustrée ci-après, montre que le système revendiqué par le deman-
deur permet de faire passer un signal du point 605 au point 606 qu'on retrouve
dans le monte-charge décrit dans le brevet no 3,851,733 délivré aux Etats-Unis
à la Westinghouse Electric Corporation, puis du point 605 au point 604 pour
exécution. Du point 605, le signal franchit la première étage 60 du système
revendiqué où sont entrés en mémoire le niveau de l'étage particulier et celui
du rez-de-chaussée; le signal est transmis ensuite au point 62 où le système
détermine si on a demandé un ascenseur vers un étage supérieur ou inférieur à
partir de d'étage particulier désigné. Dans la négative, le signal passe su
point 64 d'où, en l'absence de rappel automatique de l'ascenseur vers le
rez-de-chaussée, il est transmis au point 606. Si à l'étape 64, le système
enregistre un appel en direction de l'étage particulier désigné et provenant du
rez-de-chaussée, le système revendiqué par le demandeur choisit alors parmi les
cabines pouvant desservir l'étage particulier, la cabine libre la plus près qui
n'a pas été affectée par le processeur ou qui n'a pas à répondre à d'autres
appels. Si toutes les cabines sont occupées, le signal est transmis au point
606.
<IMG>
Lorsqu'il repère une cabine au point 70, le système détermine si cette dernière
se trouve au-dessus de l'étage principal 72 ou au niveau même de l'étage
principal 73, après quoi l'instruction d'affectation pertinente est transmise
au point 604.
Dans le cas d'un appel provenant de l'étage particulier désigné (étage 62), le
système décrit par le demandeur entre en action à l'étape 90, et si l'on ne
repère pas, de cabine à l'étape 92, le signal est transmis au point 606.
Cependant, dès le repérage d'une cabine, la position de cette dernière par
rapport au rez-de-chaussée fait l'objet d'une vérification. Si la cabine se
trouve plus près du rez-de-chaussée et qu'on y a demandé un ascenseur en
direction de l'étage particulier désigné, le signal est transmis au point 72
pour exécution. Si la cabine se trouve plus près de l'étage particulier
désigné et qu'on n'a relevé aucun appel en direction d'un étage supérieur, un
signal d'affectation est transmis au point 604, après avoir franchi les étapes
100 et 102. Dans le cas d'un appel en direction d'un étage supérieur et repéré
à l'étape 98, le système vérifie à l'étape 104 si on a demandé un ascenseur
vers un étage inférieur; dans la négative, le signal est transmis aux points
106 et 108, après quoi il passe par l'une des deux voies d'exécution possibles
pour ensuite sortir en 604.
Dans le cas d'un appel en direction d'un étage supérieur ou d'un étage
inférieur et relevé au point 104, le système détermine à l'étape 118 le niveau
de l'étage particulier. Si ce dernier est situé dans la partie supérieure de
l'établissement, le signal est transmis des points 106, 108, etc. jusqu'au
point 604 afin de répondre à l'appel en direction d'un étage supérieur, mais si
l'étage particulier se trouve dans la moitié inférieure de l'établissement, le
signal passe par les points 118, 100 et 102 jusqu'à la sortie 604 pour assurer
un service aux étages inférieurs.
Dans sa décision finale, l'examinateur rejette la demande parce qu'elle ne
divulgue ni un nouvel appareil, ni un circuit électronique nouveau qui
permettraient à des gens du métier de réaliser le système décrit dans les
revendications. Il appuie son refus sur l'un des critères invoqués par la
Commission d'appel des brevets au moment de rendre sa décision concernant une
affaire particulière; ainsi, la Commission a stipulé que dans le cas où un
programme constitue le seul caractère de nouveauté d'une invention, les
revendications visant un ordinateur programmé d'une façon nouvelle ne peuvent
donner lieu à la délivrance d'un brevet. L'examinateur ne cite aucune
antériorité démontrant que les revendications visent un monte-charge connu. Il
déclare (notamment) ce qui suit:
...
...le caractère de nouveauté du monte-charge revendiqué par le
demandeur est attribuable uniquement à la mise en oeuvre, par le
processeur programmable et bien connu d'un ordinateur, de programmes
permettant de faire fonctionner le monte-charge connu au moyen de la
méthode nouvelle décrite dans les revendications 1 à 10.
Dans son argumentation, le demandeur allègue qu'il est manifeste que le système
décrit est un monte-charge et que ses revendications ne visent nullement un
ordinateur ou un programme informatique nouveau ou différent. Il prétend que
la demande-renferme suffisamment de renseignements pour permettre à une
personne du métier de réaliser l'objet d'invention décrit dans les
revendications. Il fait également état d'une décision rendue par la Cour
suprême des Etats-Unis et publiée le 2 mars 1981, soit avant que ne soit rendue
la décision relativement à l'affaire Schlumberger Canada Ltd. c. le Commissaire
des brevets. 56 CPR, 204 (1981).
La Commission doit donc déterminer si la demande vise un objet d'invention
brevetable aux termes des articles 2 et 36(1) de la Loi sur les brevets. La
revendication 1 se lit comme suit:
Une méthode permettant d'offrir un service d'ascenseur s'arrêtant
automatiquement à un étage particulier dans un établissement de
services, cet étage particulier se trouvant entre l'étage le plus bas
et le dernier étage de l'établissement en question, et ladite méthode
comportant les étapes suivantes:
enregistrement des appels en direction des étages supérieurs ou
inférieure à l'étage particulier et provenant de ce dernier,
enregistrement des appels en direction et d'un étage inférieur et
d'un étage supérieur à l'étage particulier et provenant de ce dernier,
priorité accordée à l'un ou l'autre de ces appels vers un étage
supérieur et vers un étage inférieur, suivant le niveau auquel se
trouve l'étage particulier dans l'établissement,
ladite priorité étant accordée suivant les critères que voici:
priorité accordée aux appels vers un étage supérieur lorsque l'étage
particulier se trouve dans la moitié supérieure de l'établissement et
priorité accordée sua appela vers un étage inférieur lorsque l'étage
particulier se trouve dans la moitié inférieure de l'établissement.
Dans notre étude de la présente question, nous nous inspirons de la décision
rendue par la Cour fédérale au sujet de l'affaire Schlumberger mentionnée
ci-haut. Nous remarquons que ni l'examinateur, ni le demandeur n'ont pu à
l'époque prendre connaissance de la décision finale rendue au sujet de cette
affaire. Au moment de rendre sa décision relativement à un objet d'invention
associé à un ordinateur, le juge Pratte a déclaré:
Afin d'établir si une demande divulgue ou non une invention
brevetable, il faut d'abord établir ce qui a été découvert aux termes
de la demande.
et
Je suis d'avis que le fait d'utiliser ou d'avoir à utiliser un
ordinateur pour mettre en application une découverte ne change en rien
la nature de cette découverte.
Il apparaît, à la lecture de la présente demande, que cette dernière porte sur
un système nouveau que l'on peut placer dans un monte-charge et qui permet à
l'ascenseur de s'arrêter automatiquement à un étage particulier choisi situé
entre le dernier étage et le raz-de-chaussée d'un établissement. La demande
fait état de monte-charge divulgués dans des brevets délivrés aux Etats-Unis et
dont le demandeur est le cessionnaire; on explique toutefois que ces
monte-charge ne peuvent s'arrêter automatiquement à un étage particulier
désigné. En outre, les présentes revendications visent une méthode et un moyen
qui permettent de faire fonctionner un monte-charge dans lequel on a installé
le nouveau système grâce auquel la priorité est accordée aux appels provenant
de l'étage particulier, suivant que ce dernier se trouve dans la moitié
supérieure ou dans la moitié inférieure de l'établissement. Les revendications
démontrent que le demandeur décrit plus qu'un simple algorithme ou programme.
La découverte du demandeur a trait, selon nous, à un monte-charge s'arrêtant
automatiquement à un étage particulier, quel que soit le niveau de cet étage.
L'ajout de ce nouveau système permet, à notre avis, de mettre au point un
service d'ascenseur différent des autres monte-charge dont fait état le
demandeur. Nous sommes convaincus que le demandeur n'a pas découvert un simple
programme, mais plutôt un nouveau mode de fonctionnement des monte-charge.
Nous estimons que le nouveau monte-charge ainsi amélioré que revendique le
demandeur constitue bel et bien un objet d'invention brevetable sua termes de
l'article 2 de la Loi sur les brevets.
Passons maintenant à la décision de rejet rendue par l'examinateur et fondée
sur des motifs d'insuffisance de l'exposé de l'invention. Le demandeur
soutient que le mémoire descriptif contient tous les renseignements permettant
à des gens du métier de mettre au point le nouveau système décrit dans les
revendications. D'après la divulgation, il est clair qu'en suivant les
diverses étapes qui y sont exposées et en utilisant les ascenseurs, bien connus
d'ailleurs des gens du métier, ces derniers peuvent arriver à mettre au point
le système décrit grâce à une méthode et à un moyen réalisables. Compte tenu
des motifs invoqués et de la preuve présentée par l'examinateur, nous ne sommes
nullement disposés à rejeter la présente demande. Nous sommes d'avis que le
système illustré à la figure 6 est différent de tous ceux dont on a fait état
plus haut et qu'il est décrit de façon satisfaisante.
La Commission recommande que soit annulée la décision de rejet pour cause de
divulgation et de revendication d'un objet d'invention non conforme aux
dispositions de l'article 2 de la Loi sur les brevets, et pour cause de
divulgation insuffisante aux termes de l'article 36.(1) de la Loi.
Le président de la Le président adjoint Membre
Commission d'appel des brevets
A. McDonough M.G. Brown S.D. Kot
Je suis d'accord avec les conclusions et les recommandations de la Commission
d'appel des brevets. La décision finale est par le fait même annulée et la
présente demande est renvoyée à l'examinateur pour examen ultérieur
conformément aux recommandations de la Commission.
Le Commissaire des brevets
J.H.A. Gariépy
Daté à Hull (Québec)
le 6e jour de mai 1985