Brevets

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      DANS UNE DÉCISION DU COMMISSAIRE

 

      DU BUREAU CANADIEN DES BREVETS

 

La demande de brevet 379,817 ayant été rejetée en vertu de la

règle 47(2) des Règles sur les brevets, le demandeur a demandé que

l'on examine la décision finale de l'examinateur. Par conséquent, le

Commissaire et la Commission d'appel des brevets ont examiné le

rejet. Les conclusions de la Commission et la décision du Commissaire

sont les suivantes.

 

Agent du demandeur

 

MM. Smart & Biggar

C. P. 2999, succursale D

Ottawa (Ontario)

K1P 5Y6

 

         DECISION DU COMMISSAIRE

 

       Redélivrance: L'instruction de la demande de brevet a démontré que le

       demandeur avait fait preuve de discernement pour revendiquer la

       distinction de l'invention par rapport à l'état antérieur de la

       technique. Aucune intention d'élargissement de la portée des

       revendications n'a été décelée. Rejet des deux parties de la pétition

       maintenu.

 

La présente décision a trait à une demande de révision soumise par le demandeur

au Commissaire des brevets en ce qui concerne la décision finale rendue à

l'égard de la demande 379,817 (classe 281-10) de redélivrance du brevet

canadien 1,012,183 délivré le 14 juin 1977. La demande de brevet est cédée à

Moore Business Forms Inc. et est intitulée MACHINE IMPRINTABLE BUSINESS FORMS

WITH TRANSVERSE COLORED BARS (formules commerciales avec barres de couleurs

transversales imprimables à la machine). Les inventeurs sont Alan M. Gould et

Robert H. Allen. Le 24 septembre 1982, l'examinateur chargé du dossier a rendu

une décision finale dans laquelle il rejetait la demande. A l'audience tenue

le 5 décembre 1984, le demandeur s'était fait représenter par son agent de

brevets, M. D. Morrow.

 

La demande a trait à une formule commerciale qui comporte plusieurs barres de

couleur parallèles imprimées. A l'illustration 1 ci-dessous, on voit une

formule (10) sur laquelle figurent plusieurs barres parallèles d'au moins trois

couleurs différentes et dissemblables. Des barres de couleurs différentes

(15-16) sont imprimées sur la formule et sont séparés par des interlignes (17)

d'une couleur plus pâle, par exemple, du blanc, afin qu'il soit ainsi plus

facile de distinguer les barres. La formule est introduite dans une machine au

moyen de perforations d'entraînement (11).

 

       <IMG>

 

        Dans son rejet de la demande de redélivrance, l'examinateur a refusé les

        modifications concernant les paragraphes a), f), g), h), i), l) et m) de la

        partie 3 de la pétition en redélivrance et a formulé (entre autres) les

        observations suivantes:

 

...

            Le demandeur n'a pas prouvé que c'est parce qu'une erreur avait été

            commise que les paragraphes rejetés dans la demande de redélivrance

            n'avaient pas été décrits ou revendiqués dans le brevet original et que

            la description dans sa demande originale manquait de clarté et était

            incomplète.

 

        Ses motifs de rejet des paragraphes a) et i) sont les suivants:

 

        ...

        Paragraphe a) Il est vrai que les revendications ont toujours porté sur

                  "au moins trois couleurs". Toutefois, l'ajout, dans la

                  divulgation, de nouveaux détails tels que ceux qui

                  figurent dans les lignes 7 à 13 de la page 7, seulement

                  parce qu'ils sont couverts par la portée des

                  revendications, ne peut être accepté. En outre, le fait

                  de dire qu'il s'agit d'une erreur ne justifie rien.

 

        ...

        Paragraphe i) Le demandeur explique que les mots "différentes" et

                  "dissemblables" sont synonymes, qu'ils ont exactement le

                  même sens et qu'ils sont redondants. Cette explication

                  n'est pas convaincante. En premier lieu, le titulaire du

                  brevet a toujours employé les deux termes ensemble en les

                  séparant par la conjonction "et". Il n'a jamais

                  considéré que les deux termes étaient interchangeables et

                  estimait donc que chacun d'eux avait un sens distinct.

                  Si les deux termes sont acceptés tels qu'ils figurent

                  dans le brevet original, ils décriront et définiront la

                  même invention, tout comme dans le brevet original.

                  Toutefois, la suppression du terme "dissemblables"

                  modifie la portée des revendications. Le mémoire

                  descriptif original ne laisse voir aucune intention

                  préalable d'emploi des deux mots de façon non conjointe.

 

        Dans sa réponse, le demandeur a accepté la décision de l'examinateur en ce qui

        concerne les paragraphes f), g), h), l) et m) et a effectué les suppressions,

        modifications ou annulations appropriées. Il a par contre soutenu que l'objet

        des paragraphes a) et i) était acceptable et a justifié le maintien de ces

        paragraphes en formulant (entre autres) les observations suivantes:

 

              ...

            a) Les revendications ont toujours porté sur "au moins trois couleurs"

            et ont donc toujours clairement indiqué qu'il pouvait y avoir plus de

            trois couleurs. La modification apportée à la divulgation (lignes 9 à

            13, page 7) ne vient qu'apporter une précision qui correspond à la

            portée des revendications. Il est manifeste que le demandeur a toujours

            envisagé la possibilité d'utiliser plus de trois couleurs; ceci fait,

            bien sûr, essentiellement partie des revendications. L'erreur en

            question est une erreur pure et simple, commise par un avocat de

            brevets; en effet, les avocats de brevets sont censés savoir que l'objet

            de la divulgation est d'étayer les revendications. La modification

            requise est un type de modification qui a été autorisée à maintes

            reprises en ce qui concerne des demandes de redélivrance. Elle a

            simplement pour objet de corriger une erreur technique commise par un

            avocat de brevets. Avec tout notre respepct, nous estimons que cette

            modification devrait être acceptée, et l'énoncé a été conservé dans la

            divulgation.

 

    (i) Avec tout notre respect, nous maintenons cette modification. Il

        s'agit manifestement d'un autre cas où un avocat a commis une

        erreur. Les mots "différentes" et "dissemblables" sont des

        synonymes. Même si leurs significations ne coincident pas de façon

        tout à fait exacte, il est clair qu'elles se recoupent

        considérablemennt. Ces termes sont redondants.

 

        Aucun demandeur de brevet n'inclut intentionnellement des termes

        redondants dans ses revendications. Cependant, tout demandeur

        représenté par un avocat doit se fier à ce dernier en ce qui

        concerne la terminologie qui doit être employée dans les

        revendications. L'emploi de ces termes particuliers n'a soulevé

        aucun problème au cours de l'instructin de la demande. Il s'agit

        d'une erreur commise dans les revendications qui a été relevée

        après la délivrance du brevet. Avec tout notre respect, nous

        soutenons qu'une simple modification de la demande est requise qui

        permettrait de supprimer une restriction manifestement ambigue dans

        les revendications. Quant à savoir si les revendications, dans

        leur version actuelle ou modifiée, portent sur deux tons différents

        d'une même couleur, il s'agit là d'une considération hypothétique

        qui reste en dehors de la question et qui n'a pas à être examinée

        dans le contexte de la présente demande. Avec tout notre respect,

        nous soutenons que cette modification doit être acceptée.

 

     ... 

La Commission doit donc établir si les parties 3a) et 3i) de la pétition en

redélivrance de la demande sont acceptables en vertu de l'article 50 de la loi.

 

Dans la lettre qu'il a fait parvenir le 24 mars 1983 en réponse à la décision

finale, le demandeur jugeait que le seul problème qui se posait était la

question de savoir si plusieurs paragraphes de la pétition en redélivrance

étaient acceptables. Depuis lors, le demandeur et l'examinateur, après de

nombreuses discussions, ont réussi à limiter à deux le nombre de ces

paragraphes, soit les paragraphes a) et i) de la partie 3 de la pétition. A

l'audience, M. Morrow a déclaré qu'à son avis ces deux paragraphes étaient les

deux seuls problèmes qu'il restait à résoudre, et a fait remarquer que toutes

les atures parties de la pétition avaient été approuvées par l'examinateur ou

que les parties rejetées avaient été retirées. Il a ajouté que le titulaire du

brevet estime que l'expression "au moins" qui figure dans les revendicatiions

se limite à trois couleurs, et souhaite maintenant que cette expression soit

interprétée de façon à signifier que plus de trois couleurs puissent apparaître

dans toute suite de quatre barres, bien qu'un passage de la divulgation ne soit

pas rédigé en ces termes. Il affirme que le demandeur croit qu'il n'y a aucun

empêchement particulier à ce que la divulgation comporte plus de trois

couleurs. Toujours à l'audience, la Commission a demandé si la formulation de

la revendication pourrait manquer de précision, étant donne qu'une partie d'une

revendication porte sur plus de trois couleurs et qu'une autre partie de la

même revendication semble porter sur trois couleurs seulement. L'agent a

déclaré que le problème lié aux revendications ne se posait plus, car

l'examinateur avait laissé tomber cette objection formulée à l'égard des

revendications. Il insiste sur le fait que le demandeur cherche maintenant à

régler le problème de la divulgation. De plus, il soutient qu'aucun avocat de

brevets n'emploierait un terme différent dans la divulgation pour décrire la

même caractéristique à deux endroits différents.

 

Au cours de l'audience, il a été longuement question de l'article 50 de la Loi

sur les brevets. En effet, comme cet article ne comporte aucune disposition

qui permette de modifier la pétition, toute erreur qui se trouve dans ce

document entraîne le refus de la redélivrance. Dans le cas qui nous intéresse,

l'examinateur a jugé certaines parties de la pétitin acceptables et d'autres,

inacceptables. Or, il nous incombe de déterminer si la pétiion est dans

l'ensemble acceptable. Si ce document n'est pas conforme aux exigences de

l'article 50, la demande de redélivrance est donc inacceptable.

 

De façon générale, l'agent s'est dit d'accord avec la Commission sur ce point,

mais il a déclaré qu'il ne s'attendait pas a avoir affaire a ce type de rejet,

c'est-à-dire au rejet de la présente pétition, car, d'après ce qu'il avait

compris du rejet, il ne restait su demandeur et à l'examinateur qu'à s'entendre

sur deux points, soit les parties a) et i) évoquées ci-dessus. M. Morrow a

fait valoir que si l'erreur, l'accident ou la méprise était le fait de l'avocat

de brevets et non celui de l'inventeur, et que si le Commissaire est convaincu

que les faits présentés dans la pétitin concordent avec l'objet de la demande

de correction, la redélivrance doit être accordée. M. Morrow a de plus fait

remarquer que certaines modifications avaient été jugées acceptables par

l'examionateur, tandis que d'autres qu'il avait jugées inacceptables ont été

retirées. Il s'est fondé sur l'instruction de la demande originale pour

souligner le fait que les erreurs étaient attribuables au souci qu'avait eu

l'avocat de brevets de distinguer l'état antérieur de la technique des

réclamatins. Il a également déclaré que les modifications visées par la

demande concernent les difficultés au niveau du dessin et, qu'à son avis,

l'avocat tout d'abort chargé du dossier n'avait pas accordé suffisamment

d'attention à la rédaction du mémoire descriptif.

 

Il semble que l'examinateur n'ait pas maintenu son rejet initial de certaines

parties de la pétition; nous ne nous pencherons pas sur cette question, bien

que nous estimions que l'Avis aux praticiens en matière de brevets, publié aux

pages vii et viii de la Gazette du Bureau des brevets le 22 juillet 1969, soit

essentiel a cet égard. Dans cet avis, le Commissaire précise qu'aucune

modification ne pourra être apportée aux parties (3), (4) et (5) des pétitions

en redélivrance, à l'exception de modifications relatives à des erreurs de

dactylographie: de plus, si les faits présentés dans ces parties de la

pétition se révèlent inexacts, la seule façon de rémédier au problème

consisterait à déposer une nouvelle demande de redélivrance (si le temps le

permet) et à verser de nouvelles taxes. Voici le contenu de l'Avis en

question:

 

      AVIS AUX PRATICIENS EN MATIERE DE BREVETS

 

   Demandes de redélivrance

      Sur dépôt d'une demande de redélivrance d'un brevet, une pétition

selon la formule 10 doit être remplie. Dans cette pétition, le

demandeur doit indiquer aux parties (3), (4) et (5) les données

pertinentes appuyant les raisons pour lesquelles une redélivrance du

brevet devrait être accordée.

 

      Les demandeurs sont avertis qu'après le dépôt d'une pétition en vue

de la redélivrance d'un brevet, aucune modification relative aux parties

(3), (4) et (5) de la formule ne sera accueillie, à l'exception de la

correction de simples erreurs de dactylographie que l'on peut déceler

facilement. Si nécessaire, il peut être permis de déposer des preuves

supplémentaires à l'appui des faits présentés dans la pétition, mais

elles ne peuvent être incluses dans la pétition même.

 

      Si les faits présentés dans les parties (3), (4) et (5) de la

première pétition se révèlent par la suite inexacts, la seule façon d'y

remédier sera de déposer une demande de redélivrance totalement nouvelle

(si le temps le permet encore) et de verser de nouvelles taxes.

 

Au cours de l'audience, nous avons formulé des observations sur les lettres que

le demandeur avait soumises au cours de l'instruction qui avait donné lieu à la

délivrance du brevet original. Nous croyons qu'il est essentiel de bien

comprendre ce qui s'est passé au cours de l'instruction du brevet aux fins de

l'examen du rejet des parties 3a) et 3i) de la pétition. Dans le cadre de

l'instruction de la demande originale, après émission d'un premier avis

d'acceptation le 12 mars 1976, deux modifications après acceptation, un

supplément à une modification après acceptation et une modification volontaire

ont été soumis. Le 23 août 1976, l'acceptation a été annulée. Une décision,

fondée sur l'antériorité, a ensuite été rendue, et deux réponses ont été

soumises avant que le dossier ne fasse l'objet d'une seconde acceptation, le

1er février 1977. Par la suite, une autre modification après acceptation a été

déposée, un autre nom d'inventeur a été inscrit, et le brevet a été délivré le

14 juin 1977. Tout au long de l'instruction, l'expression "différentes et

dissemblables" a été conservée. On a laissé sous-entendre, au cours de

l'audience, que lorsqu'un agent commet une erreur, il peut y remédier en

expliquant qu'il s'agissait soit d'un accident, d'une inadvertance ou, encore,

d'une méprise. Nous avons donc demandé si, dans le cas qui nous intéresse,

l'on pourrait parler d'erreur de jugement plutôt que d'accident, d'inadvertance

ou de méprise. M. Morrow a répondu que lorsqu'une erreur de jugement véritable

a été commise dans un dossier, le demandeur ne peut rien faire. Il a dit

toutefois estimer que l'avocat n'a pas fait une erreur de jugement en ce qui

concerne l'expression susmentionnée. Il a soutenu qu'une simple erreur avait

été commise et que le demandeur n'avait pas à en faire les frais. Il a

également affirmé que le titulaire du brevet avait toujours eu l'intention de

délimiter la matière qu'il désire maintenant ajouter à la demande. Il a fait

valoir que la controverse relative à l'état antérieur de la technique était la

raison pour laquelle le premier avocat chargé du dossier avait omis de tenir

compte de l'importance des mots sur le plan technique.

 

Nous nous sommes penchés sur les raisons exposées des plus expertement par M.

Morrow à l'appui de la demande de redélivrance, et sur son opinion selon

laquelle seules deux questions restent à être examinées, c'est-à-dire les

paragraphes a) et i) de la partie (3) de la pétition. Pour déterminer si ces

paragraphes sont acceptables, nous estimons devoir nous fonder sur l'article 50

de la Loi et sur l'Avis du Commissaire aux praticiens en matiere de brevets.

Notre tâche consiste à déterminer si les parties 3a) et i) de la pétition

satisfont aux exigences de l'article 50. A cette fin, il nous faut donc

examiner la description de l'invention dans la demande originale ainsi que

l'instruction de ladite demande.

 

Afin de déterminer les critères qui sont à l'origine de l'acceptation des

revendications du brevet, nous nous reportons à la demande originale et à

l'argument invoqué dans la lettre de modificatin datée du 13 décembre 1976

soumise au cours de l'instruction de la demande. A la page 2 de la demande

originale, il est précisé qu'une partie capitale de l'invention est une formule

commerciale comportant plusieurs barres ".. d'au moins trois couleurs

différentes et dissemblables, une couleur étant plus pâle que les deux

autres". Ce passage nous incite à partager l'impression que le titulaire du

brevet dit maintenant avoir, c'est-à-dire qu'il n'y a pas plus de trois

couleurs qui sont évoquées de façon précise. Dans les cinq dernières lignes de

la page 2, la disposition répétitive des barres est décrite de la façon

suivante: "de telle manière que les barres de couleur claire scient tour à

tour espacées au moyen d'une barre d'une autre des couleurs plus foncées...".

Une autre caractéristique serait celle-ci: "... toute sorte de quatre barres

superposées, y compris des barres d'au moins trois différentes couleurs...".

Nous notons, tout comme le demandeur, qu'il n'est nullement question de plus de

trois couleurs. A la page 3, une deuxième caractéristique de l'invention est

présentée, selon laquelle les nombreuses barres sont "... d'au moins deux

couleurs différentes et dissemblables l'une de l'autre et de la couleur de

fond...". Les barres de couleur foncée et de la couleur de fond sont espacées

selon le même ordre, tout comme l'indique le passage concernant la partie

capitale de l'invention, de façon que "... les barres de couleur soient

disposées selon un ordre régulier sur la formule et que chaque barre de couleur

soit précédée ou suivie d'une barre intercalaire...". Il est aussi indiqué, à

la page 4, que la suite de quatre barres superposées comporte "... au moins une

barre intercalaire et deux barres de couleur différentes...", et la disposition

idéale d'une formule comporte deux barres de différentes couleurs" ... espacées

de barres intercalaires blanches servant à séparer nettement les barres les

unes des autres..." Nous constatons, après avoir examiné les exemples

présentés dans la demande originale aux fins de description de l'invention,

qu'il n'est jamais question de plus de trois couleurs. Nous apprécions le fait

que le demandeur ait pris le soin de ne jamais décrire toute suite de quatre

barres en plus de trois couleurs.

 

Nous passons maintenant à la lettre de modification datée du 13 décembre 1976

que le demandeur a produite dans le dossier en réponse à la décision de

l'examinateur qui, en raison de l'état antérieur de la technique, avait rejeté

toutes les revendications. A la page 3 du document, le demandeur indique qu'il

emploie des barres de trois couleurs différentes - l'une étant plus pâle que

les deux autres couleurs - et que la disposition des barres constitue une

caractéristique essentielle de l'invention. Il précise que la disposition est

décrite dans ses revendicatins et fait remarquer que chaque barre de couleur

claire est suivie ou précédée d'une barre de l'une des autres couleurs. La

disposition des barres est donc: une barre de couleur claire - une barre de

couleur X - une barre de couleur claire - une barre de couleur Y - une barre de

couleur claire, une barre de couleur X, et ainsi de suite. Le demandeur

soutient, pour restreindre davantage la portée des revendications, que "...

toute suite de quatre barres superposées comporte au moins trois couleurs

différentes." Il réfute ensuite l'argument concernant l'état antérieur de la

technique, en se fondant particulièrement sur les failles des brevets Eberhardt

et Baskerville qui, soutient-il, ne comportent pas les caractéristiques

décrites à la page 3 de sa lettre de modification. Toujours dans le même

document, il explique que les lignes intercalaires sont en blanc et soutient

que ce type de disposition ne se retrouve dans aucun des deux autres brevets.

A notre avis, les arguments invoqués jusqu'à ce stade ont pour objet non

seulement de fournir un exposé précis de la conception qu'a le demandeur de son

invention, mais aussi de démontrer que, compte tenu de l'état antérieur de la

technique, l'invention était brevetable. D'après l'illustration fournie par le

demandeur, qui montre que la disposition qu'il a imaginée repose sur une suite

de quatre barres dans laquelle on constate qu'une couleur claire - la couleur

blanche qui est celle du fond de la formule - sert non seulement de barre

d'encadrement aux barres de couleur X et Y, mais aussi de barre intercalaire,

nous sommes persuadés que la disposition a comme caractéristique de ne

comporter qu'une seule couleur claire et non des couleurs claires différentes.

Nous estimons également que la divulgation et les arguments ne laissent

nullement sous-entendre que la couleur claire doit être intercalée entre des

couleurs claires différentes. Nous sommes convaincus que , lorsque le

demandeur emploie l'expression "au moins trois", il veut dire qu'au mons trois

couleurs doivent figurer dans la suite de quatre barres, et que les deux barres

de couleurs plus foncées sont toujours suivies ou précédées d'une barre de

couleur claire. Les arguments invoqués par le demandeur aux fins de

l'instruction de sa demande de redélivcrance et par l'agent au cours de

l'audience n'ont pas réussi à nous convaincre qu'une erreur a été commise par

inadvertance, par accident ou par méprise. Nous sommes d'avis contraire, car

la preuve démontre que le demandeur a agi avec discernement en vue d'obtenir

les revendications du brevet qui avaient été acceptées.

 

Nous passons maintenant à l'information fournie par le demandeur, dans sa

lettre du 16 juillet 1982, au cours de l'instruction de la demande de

redélivrance. Il affirme que l'avocat qui s'est occupé de la demande originale

n'a accordé ".. aucune attention à la question de la portée des

revendicatrions, ou à la portée de l'invention". D'après notre examen du

dossier, nous ne partageons pas cette opinion. De plus, si nous voulons

déterminer à quel moment les inventeurs se sont aperçus du problème qui a donné

lieu au litige, nous constatons qu'il en a été question pour la première fois

dans une lettre datée du 16 juillet 1982 dans laquelle le demandeur dit que ce

problème "... n'a été étudié sérieusement que lorsque les services d'un avocat

ont été retenus, après la délivrance du brevet...". C'est ce qui nous amène à

croire que la pétition en redélivrance ne satisfait pas aux exigences de

l'article 50. Dans l'affaire Northern Electric Co Ltd c Photo Sound Corp.

et al  (1936) R.C.S. 651, la Cour formule les observations suivantes:

 

   La loi ne tient pas compte d'un cas où un inventeur a omis de

revendiquer une protection à l'égard de quelque chose qu'il a inventé,

mais qu'il a omis de décrire ou de préciser de façon adéquate parce

qu'il ignorait ou ne croyait pas qu'il s'agissait d'une invention au

sens de la Loi sur les brevets, et qui n'avait donc aucune intention de

décrire, de préciser ni de revendiquer l'invention dans son brevet

original.

 

De plus, lorsqu'il évoque, dans sa lettre du 16 juillet 1982, les entretiens

qu'il a eus avec les inventeurs, le demandeur déclare ce qui suit:

 

   Les inventeurs estimaient en outre que ce qui conférait un caractère

unique à leur invention était l'emploi, dans une formule commerciale,

d'au moins trois couleurs; de façon plus précise, une des trois couleurs

est beaucoup plus pâle que les deux autres, et la couleur pâle fait

fonction d'espace intercalaire entre les couleurs foncées. Il

s'agissait là de la caractéristique fondamentale de l'invention, non

divulguée dans l'état antérieur de la technique, qui facilite la lecture

longitudinale de nombreux caractères imprimés au moyen d'une machine de

bureau.

 

Le demandeur soutioent maintenant que le brevet qui a été délivré renferme des

restrictions inutiles qui ne concordent pas avec la position adoptée par la

société titulaire du brevet. Il prétend en outre que l'erreur commise par

l'avocat ne constitue pas un motif de rejet de la demande de redélivrance.

 

Avec tout notre respect, nous ne pouvons souscrire aux arguments invoqués par

le demandeur. Il est vrai qu'en général une erreur commise par un avocat ne

constitue pas un motif valable de rejet d'une demande de redélivrance, mais,

dans le présent cas, aucune erreur n'a été commise par accident, par

inadvertance ou par méprise. A notre avis, l'instruction de la demande

originale révèle que l'agent a étudié en détail le mémoire descriptif et qu'il

a fait preuve de discernement pour formuler son raisonnement à partir de ce

document. Nous remarquons que, au cours de l'instruction de la demande

originale, les avocats ont fait valoir des arguments solides, y compris des

raisonnements et des explications détaillés, qui démontraient pour quelle

raison la suite de quatre barres qui comportaient seulement trois couleurs

constituait une invention brevetable, compte tenu de l'état antérieur de la

technique. Après avoir examiné l'instruction de la demande originale ainsi que

les plaidoyers écrits et oraux présentés à l'appui de celle-ci, nous constatons

d'après la preuve que ce n'est qu'après la délivrance du brevet qu'il a été

question de faire figurer plus de trois couleurs dans une suite de quatre

barres. Nous en concluons qu'avant la délivrance du brevet, le demandeur avait

jugé satisfaisantes la formulation de ses revendications ainsi que la portée de

son mémoire descriptif. A notre avis, la matière supplémentaire permet

d'étendre la portée des revendications, possibilité qui, d'après nous, n'avait

été envisagée ni par les inventeurs ni par le demandeur avant la délivrance du

brevet. Rien ne vient nous indiquer, ni dans la demande originale ni au cours

de l'instruction de celle-ci, que le demandeur ait pu avoir l'intention de

revendiquer la matière aujourd'hui requise. En outre, nous partageons

l'opinion de l'examionateur selon laquelle la suppression du mot

"dissemblables" de l'expression "différents et dissemblables" rend la portée

des revendications plus large que ce qui avait été prévu au départ.

 

Nous sommes convaincus, d'après la preuve versée au dossier, que le demandeur,

avant la délivrance du brevet, n'a jamais eu l'intention de présenter la

matière supplémentaire visée par la demande de redélivrance. Compte tenu des

exigences de l'article 50, nous avons constaté que les parties 3a) et 3i) de la

pétition en redélivrance ne comportaient aucun motif valable et ne reposaient

sur aucun argument satisfaisant qui auraient pu nous permettre de déclarer

acceptable la demande de redélivrance.

 

Nous recommandons que la demande de redélivrance dans laquelle est définie la

portée de l'objet visé par les parties 3a) et 3i) de la pétition en

redélivrance soit rejetée, parce que le demandeur n'a pas réussi à prouver

clairement qu'il avait voulu décrire et revendiquer dans le brevet original la

matière qu'il revendique aujourd'hui.

 

M.G. Brown                                 S.D. Kot

Président intérimaire                      Membre de la Commission

Commission d'appel des brevets

 

Je suis d'accord avec les constatations et le raisonnement de la Commission

d'appel des brevets. En conséquence, je rejette la demande de délivrance dans

laquelle est définie la portée de l'objet visé par les parties 3a) et 3i) de la

pétition. Le demandeur a six mois pour interjeter appel de ma décision,

conformément à l'article 44 de la Loi sur les brevets.

 

J.H.A. Gariépy

Commissaire des brevets                     Agent du demandeur

                                            MM. Smart & Biggar

Fait à Hull (Québec) ce 21e jour de         C.P. 2999, succursale D

janvier 1986                                Ottawa (Ontario)

                                             K1P 5Y6

 

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