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                     DECISION DU COMMISSAIRE

 

Art. 2 : SYSTEME DE COMMUTATION D'APPELS INTERURBAINS

 

Système de commutation comprenant une mémoire commune accessible à un premier

et un second processeur permettant de stocker les données correspondant à

l'état des circuits périphériques établis. Ce système est brevetable en

vertu de l'article 2 de la Loi.

 

   Décision finale : renversée

 

           ***********************

 

La demande de brevet n o 164,446 (classe 354-233), déposée le 23 février 1973,

porte sur une invention intitulée SYSTEME DE COMMUTATION D'APPELS INTERURBAINS.

Les inventeurs sont Juliaan L.G. Janssens et al. Dans la décision finale rendue

le 23 juin 1974, l'examinateur chargé de la demande refuse au demandeur le

droit de poursuivre les démarches en vue de l'obtention d'un brevet.

 

La présente demande vise un réseau de commutation d'appels contrôlé par des

processeurs au moyen de circuits périphériques de liaison. Chaque processeur

comprend une mémoire autonome permettant de stocker les programmes machines

et, de plus, chacun a accès à une mémoire commune dans laquelle sont stockées

les données correspondant à l'état des circuits périphériques de liaison.

La figure 1 de la demande est illustrée ci-dessous.

 

                     <IMG>

 

Le système de commutation comprend le réseau de commutation RC, les circuits

périphériques CP, deux processeurs A et B, une mémoire commune ainsi qu 'une

mémoire pour le processeur A et une mémoire pour le processeur B.

 

Dans sa décision finale, l'examinateur estime que les revendications ne

définissent pas un objet brevetable aux termes de l'article 2. de la

Loi sur les brevets et, par conséquent, les rejette. Dans cette décision, il

déclare entre autres :

 

(TRADUCTION)

 

Le demandeur soutient que l'invention vise un système

de traitement informatique de données comprenant plusieurs

processeurs ainsi qu'un équipement contrôlable de commutation

d'appels. Les processeurs assurent le contrôle de l'ensemble au

moyen d'une gamme de programmes. La divulgation de l'invention

est étayée par un organigramme ainsi que par des dessins réservés

aux programmes informatiques en question.

 

Le demandeur soutient que les revendications, telles qu'elles

sont présentées, décrivent un système automatisé de commutation

d'appels comprenant un réseau de commutation, un réseau de

traitement informatique de données ainsi qu'un ensemble de

circuits périphériques. De plus, le demandeur soutient que

les revendications, dans leur formulation actuelle, portent

sur un objet visé par la Loi.

 

Le 28 février 1978, la CAB a émis les directives suivantes :

 

1. La revendication d'un programme en soi n'est pas

brevetable.

 

2. La revendication d'une nouvelle méthode d'exploitation

d'un ordinateur n'est pas brevetable.

 

3. Les revendications visant une nouvelle façon de

programmer un ordinateur, quelle que soit cette méthode,

ne constituent pas un objet brevetable aux termes de

l'article 2, de la Loi sur les brevets, lorsque la

seule nouveauté réside dans le programme ou

l'algorithme visé.

 

4. Les revendications visant un appareil de traitement

informatique programmé d'une nouvelle façon sont

brevetables lorsque le progrès technique visé réside

dans l'appareil même.

 

En outre, les revendications du demandeur visent un ensemble de

processus qui, par l'exécution de certains programmes, assurent

l'établissement et la supervision des appels traités par le

système de commutation. La nouveauté réside dans l'exécution

de programmes. Aucun nouvel appareil n'est revendiqué ici.

 

En réponse à la décision finale, le demandeur déclare (entre autres) ce qui suit:

 

L'examinateur a commencé par citer les quatre directives émises

le 28 février 1978 par la Commission d'appel des brevets. Toutefois,

aucune explication n'a été donnée quant à l'application de ces direc-

tives aux présentes revendications.

 

Si l'on considère les directives émises, il est évident

que les revendications ne portent pas sur un programme en soi.

Ainsi, la directive no 1 ne s'applique pas aux revendications.

Les revendications ne découlent pas d'une nouvelle utilisation

d'un ordinateur. La directive n o 2 ne s'applique donc pas

non plus. Quant à la directive n o 3, elle vise un ordinateur

programmé selon une nouvelle façon, quelle qu'elle soit; elle

ne s'applique donc pas en l'occurrence.

 

Selon la directive n o 4, les revendications visant un

appareil de traitement programmé d'une nouvelle façon constituent

un objet brevetable lorsque le progrès technique tient à

l'appareil même, Bien que cette directive ne s'applique pas

directement aux revendications en cause, c'est celle qui s'en

rapproche le plus.

 

La présente application s'apparente plus à ce qu'on a appelé

"Programmation d'une application mécanographique", dans

laquelle un ordinateur est relié à un système qui remplit

une fonction propre. Cependant, la présente invention vise

un ensemble permettant de relier plusieurs ordinateurs qui

assurent le traitement en temps réel d'appels entrants

aléatoires et la répartition de ces appels entre les ordinateurs

en fonction de leurs mémoires respectives, lesquelles doivent

stocker les données régissant l'interface des différents

ordinateurs en cause.

 

Il incombe donc à la Commission de déterminer si les revendications visent un

objet brevetable aux termes de l'article 2. de la Loi sur les brevets. La

revendication 1 se lit comme suit :

 

(TRADUCTION) Un système automatique de commutation d'appels

comprenant un réseau de commutation permettant d'établir les

appels, un réseau de traitement informatique des données

permettant de contrôler l'établissement et la supervision

des appels dans le système grâce à l'exécution de certains

programmes, un ensemble de circuits périphériques reliant

ledit réseau de commutation et le réseau de traitement des

données de façon que les signaux concernant l'état du réseau

de commutation soient transmis au réseau de traitement et que

ces signaux soient ensuite transmis pour permettre le contrôle

et la supervision du fonctionnement du réseau de commutation;

ledit réseau de traitement des données comprenant un premier

et un second processeur, le premier ayant normalement accès

uniquement à une première mémoire individuelle dans laquelle

sont stockées les données concernant les appels qui sont

traités par ledit premier processeur, et une seconde mémoire

accessible uniquement au second processeur permettant de stocker

les données comprenant les programmes dudit premier ensemble

concernant les appels traités par ledit second processeur;

le système comprend des mémoires individuelles permettant également

de stocker les informations d'adresse des appels grâce aux

circuits périphériques, ces appels étant traités par les processeurs

reliés à chacune de ces mémoires, ainsi qu'une mémoire commune

accessible aux deux processeurs et permettant de stocker

les données correspondant à l'état desdits circuits

périphériques contrôlés par les deux processeurs entre lesquels

la charge de traitement est répartie, chacun des processeurs

étant conçu de façon que les programmes ne puissent être

exécutés simultanément par les deux processeurs et que l'on

évite ainsi les conflits résultant du traitement simultané de

programmes semblables; à cette fin, le système comprend une

table de stockage propre à chaque processeur indiquant les

programmes qui doivent être exécutés par un ordinateur donné

et ceux qui ne doivent pas l'être.

 

L'examinateur estime que la prétendue invention vise un système de traitement

de données dans lequel les processeurs contrôlent l'ensemble au moyen de

l'exécution d'un certain nombre de programmes, et que la nouveauté réside

dans l'exécution de ces programmes. D'autre part, le demandeur soutient que

l'invention vise (TRADUCTION) "un ensemble de processeurs fonctionnant en temps

réel pour assurer le traitement sélectif des appels d'entrée et dans lequel les

appels sont répartis entre les ordinateurs grâce à leur mémoire respective,

et les données nécessaires au contrôle de l'interface des ordinateurs,

stockées dans la mémoire commune à tous ces ordinateurs.

 

Après un examen de la question telle qu'elle a été exposée par l'examinateur

et étayée par les arguments du demandeur, nous nous appuyons sur la décision

rendue par la Cour fédérale dans l'affaire Schlumberger Canada Ltd c. le

Commissaire des brevets 56 C.P.R. (2d) à 204 (1981). Cette décision n'ayant

été rendue qu'en 1981, elle ne pouvait être invoquée ni par l'examinateur,

ni par le demandeur lorsque la décision finale concernant la présente

demande a été rendue. Dans cette décision portant sur un objet relevant du

domaine de l'informatique, le juge Pratte a déclaré ce qui suit:

 

(TRADUCTION)

Dans le but de déterminer si la divulgation d'une demande

s'applique à un objet brevetable, il faut d'abord déterminer

l'objet de la découverte selon la demande déposée.

 

...

 

A notre avis, le fait qu'un ordinateur soit utilisé ou doive

l'être pour mettre en oeuvre une découverte ne modifie en rien

cette découverte.

 

Dans la divulgation, nous apprenons que le brevet n o 3,557,315, accordé aux

Etats-Unis à S. Kobus et al., porte sur un système de traitement informatique

de données dans lequel chacun des processeurs utilisé est en mesure d'exécuter

tous les programmes permettant de contrôler toutes les opérations nécessaires

à l'établissement d'une communication au moyen de l'équipement de commutation.

Pour éviter qu'un processeur n'exécute un programme en même temps qu'un

autre processeur, ce qui risquerait d'entraîner une certaine confusion, le

brevet de Kobus préconise l'utilisation d'un dispositif inhibiteur.

 

Dans la présente demande, le dispositif inhibiteur est inutile car l'exécution

des programmes est partagée en deux séries, la première étant traitée par un

processeur et la deuxième, par au moins deux autres processeurs. Cette

répartition permet de diriger l'accès aux processeurs et d'éliminer la mise

en file d'attente de traitement qui caractérise les systèmes existants.

 

La présente demande est également caractérisée par le fait qu'un dispositif

de communication relie les processeurs entre eux en faisant passer les

informations d'un processeur à l'autre au moyen d'une mémoire commune.

 

L'utilisation d'une mémoire commune, telle qu'elle est décrite dans la

divulgation, est déjà connue si l'on tient compte du brevet n o 3,503,048,

délivré aux Etats-Unis, qui porte également sur un système de commutation

d'appels utilisant une mémoire commune. Ce brevet décrit un système permettant

d'établir les communications en exécutant un certain nombre de programmes,

chacun étant exécuté par un processeur donné. Ce système offre une grande

latitude dans la répartition des programmes entre tous les processeurs

qui traitent successivement tous les appels qui doivent être établis.

Comme le transfert des informations entre les processeurs est assuré par

la mémoire commune et qu'aucun des programmes n'est exécuté par plus de

deux processeurs, il y a donc un temps d'attente entre l'exécution des

programmes, ce qui augmente le délai d'établissement d'un appel.

 

Tel qu'il est déclaré dans la demande, l'amélioration réside dans la

répartition ordonnée des programmes entre les processeurs. Dans le système

de traitement revendiqué par le demandeur, les programmes sont répartis de

façon sélective entre les processeurs, en fonction de masques programmés, de

sorte que certains programmes sont répartis entre plusieurs processeurs tandis

que d'autres sont exécutés par un seul. Au dire du demandeur, une telle

souplesse est particulièrement utile lorsqu'il est impossible de remplacer

dans le même temps d'exécution un programme long par plusieurs programmes

courts.

 

La figure 5 ci-dessous illustre de façon schématique les composantes de la

mémoire commune dont il est question dans la demande, soit les tables de

mémoire et les commandes de masquage.

 

                          <IMG>

 

Le dispositif de masquage illustré utilise des mots de 32 bits pour stocker

les informations concernant l'état d'occupation (bloqué/libre) des éléments

du système tels que les joncteurs d'arrivée et de départ, le réseau principal

de commutation et le réseau de signalisation de l'émetteur. La table tampon

des joncteurs d'arrivée (TTJA) enregistre toutes les informations concernant

les appels parvenant à ce joncteur. Une table magasin d'instructions

d'entraînement de marqueur constitue une liste d'attente contenant les

informations qui doivent être traitées par le dispositif d'entraînement du

marqueur. Le masque effectif de base (MEB) indique les programmes de base qui

ne doivent pas être exécutés, en raison d'un manque d'information. Comme le

MEB est stocké dans la mémoire commune, il est accessible aux deux processeurs

 

     qui, tous deux, peuvent le modifier. Les masques de requête de base (NRB)

     indiquent les programmes de base qui doivent être exécutés respectivement

     par les processeurs A et B et ce, le plus tôt possible, indépendamment

     d'autres conditions.

 

     La revendication 1 décrit un système de commutation automatique d'appels dans

     lequel une mémoire commune est accessible à un premier et à un second

     processeur pour stocker les données concernant l'état d'établissement des

     circuits périphériques. Dans la revendication 1, on dit des circuits périphé-

     riques qu'ils sont reliés aux processeurs entre lesquels la charge de traitement

     est répartie, chacun des processeurs étant muni d'un dispositif permettant

     d'indiquer les programmes qu'il peut ou non traiter, ce qui accélère le

     traitement. Nous jugeons que cette revendication ainsi que les revendications 2

     à 4 décrivent plus que des algorithmes ou des calculs et plus que la simple

     exécution de programmes. Nous estimons qu'elles décrivent correctement

     la découverte revendiquée par le demandeur.

 

     En résumé, nous recommandons que le rejet des revendications soit retiré

     et que la demande soit à nouveau soumise à l'examinateur.

 

     Le président,                Le président adjoint,

 

     A. McDonough                 M.G. Brown                   S.D. Kot

     Commission d'appel des brevets                             Membre

 

J'abonde dans le sens des recommandations de la Commission d'appel des

brevets. Par conséquent, je renverse la décision finale et je recommande la

révision de la demande par l'examinateur.

 

Le Commissaire des brevets,

 

J.H.A. Gariépy

 

Datée à Hull (Québec)                  Agent du demandeur

ce 15e jour d'août 1984                Smart & Biggar

                                       C.P. 2999, Succursale D

                                       Ottawa, Ontario

 

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