DÉCISION DU COMMISSAIRE
REDÉLIVRANCE : COUPE-BISE AUTORÉGLABLE
La demande initiale a été déposée par l'inventeur et celui-ci a retenu les
services d'un agent après sa première réplique à la décision rendue par l'exa-
minateur. Les preuves par affidavit permettent d'établir qu'il y a eu
manque de communication entre le demandeur et l'agent. L'utilisation d'un
seul ressort au lieu de plusieurs pour actionner l'élément mobile du coupe-
bise est jugée acceptable. La décision de rejet est annulée.
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La demande de brevet n o 341,876 (classe 108-58) a été déposée le 20 novembre 1979
et porte sur une invention intitulée "coupe-bise autoréglable". L'inventeur
est M. George Khallil. L'examinateur chargé d'étudier la demande a rendu
une décision finale le 11 février 1982, dans laquelle il a refusé au demandeur
la possibilité de poursuivre les démarches nécessaires pour obtenir un brevet.
Au cours de la révision de cette décision, la Commission d'appel des brevets
a tenu une audience le 15 décembre 1982 à laquelle a assisté M. R. Frayne
à titre de représentant du demandeur.
La demande porte sur un coupe-bise autoréglable destiné à assurer la
fermeture étanche d'une porte. Le coupe-bise se compose d'un élément
principal en forme de U présentant un encastrement et une rainure
sur l'un de ses côtés, rainure dans. laquelle se meut un deuxième élément
en forme de I qui est soumis à la pression d'un ressort et dont l'action
se compare à celle d'un piston. Les figures 1, 2, 3, 6 et 7 illustrent.
ces éléments.
<IMGS>
La paroi (20) de l'élément principal (12) comporte une rainure dans laquelle
se meut l'élément mobile (26) placé dans l'encastrement. Le ressort (32),
placé entre la paroi (14) et la barre transversale (28) de l'élément (26),
pousse l'élément (26) vers la paroi extérieure de l'encastrement afin
que l'élément devienne en contact avec la porte (38).
Dans sa décision finale, l'examinateur a refusé d'agréer la pétition en
redélivrance alléguant que (TRADUCTION) "la revendication n o 3 porte sur
un objet distinct de celui qu'a divulgué et revendiqué le demandeur dans
le brevet qui fait l'objet de la présente demande de redélivrance".
Dans sa décision finale, l'examinateur a déclaré (en partie) :
...
(TRADUCTION) Le demandeur déclare dans la partie 3b) de sa pétition
que (TRADUCTION) "l'invention divulguée dans ledit brevet peut
fonctionner et se prêter à une exploitation commerciale avec un
seul ressort". Or, je répète que cette affirmation est inacceptable,
car rien dans la divulgation de l'invention brevetée ne laisse
supposer qu'il serait possible d'utiliser un seul ressort sans nuire
au bon fonctionnement ou à l'exploitation commerciale de l'objet
revendiqué.
A preuve les énoncés suivants que renferme la divulgation originale
anglaise du demandeur : (TRADUCTION) "ressorts" (page 1, ligne 12);
(TRADUCTION) "plusieurs ressorts ondulés à l'intérieur dudit
encastrement" (page 1, ligne :18); (TRADUCTION) "l'encastrement
du profilé d'aluminium (10) est destiné à recevoir plusieurs
ressorts (32)" (page 2, ligne 24); (TRADUCTION) "l'action des
ressorts (32)" (page 4, ligae 9). Donc, rien dans le brevet n'indique
que l'utilisation d'un seul ressort serait possible du point de
vue du fonctionnement ou de l'exploitation commerciale de l'objet
de l'invention.
L'examinateur signale à nouveau l'inexactitude de l'énoncé de la
partie 3 b) de la pétition du demandeur selon lequel (TRADUCTION)
"si l'on utilise un seul ressort, la courte rallonge ne se trouve
pas à constituer un élément essentiel du ressort, ce qui est évident
d'après ma divulgation". Comme nous venons de le démontrer, il n'est
pas du tout évident, d'après la divulgation du brevet du demandeur,
qu'un seul ressort est utilisé ou peut l'être. Il n'est pas évident
non plus, d'après cette divulgation, que la courte rallonge ne constitue
pas un élément essentiel du ressort.
A la page 1, ligne 29 (original anglais), on trouve la mention
suivante : (TRADUCTION) "lesdits ressorts, dont chacun se termine
par une courte rallonge conçue pour mordre une surface d'aluminium",
etc. A la page 3, les lignes 3 à 13 (original anglais) expliquent
en détail les raisons pour lesquelles cette forme particulière de
ressort est utilisée.
Le demandeur n'a jamais mentionné de façon explicite ni même implicite
que la courte rallonge ne constituait pas un élément essentiel du ressort.
Les revendications du brevet du demandeur portent essentiellement et
explicitement sur un objet qui se distingue de l'objet des antériorités
citées par l'utilisation de plusieurs ressorts d'une forme identique
à celle du ressort illustré à la figure 5, cette forme ayant été
adoptée précisément pour limiter les mouvements des petits ressorts
munis d'une courte rallonge (?I4) le long des profilés.
La revendication n o 3 porte sur un objet qui ne s'apparente en
rien à l'objet revendiqué ici.
De plus, l'examinateur aimerait attirer l'attention du demandeur
sur le fait que la divulgation présentée dans le brevet faisant
l'objet de la demande de redélivrance n'indique ni explicitement
ni implicitement que le coupe-bise peut être exploité commercialement
et qu'il peut fonctionner avec un seul ressort. Cette divulgation
n'indique pas clairement non plus que la courte rallonge ne constitue
pas un élément essentiel du ressort.
L'examinateur aimerait également signaler que d'après la divulgation
présentée dans le brevet qui fait l'objet de la demande de redélivrance,
l'utilisation de plusieurs ressorts, chacun étant muni de la courte rallonge
déjà mentionnée, est essentielle au bon fonctionnement du coupe-bise
du demandeur, ce qui contredis: manifestement l'énoncé de la partie 3 b)
de la pétition en redélivrance du demandeur.
Par conséquent, ni le brevet du demandeur, ni sa demande de redélivrance
ne viennent appuyer la revendication n o 3 figurant dans la présente demande,
compte tenu de la nature et de la portée de cette revendication.
De plus, il n'y a rien qui puisse établir que (TRADUCTION) "par inadvertance,
par accident ou par méprise, le demandeur s'est vu accorder une revendication
d'une portée inférieure à ce qu'il aurait été en droit de revendiquer"
pour reprendre les propos mêmes du demandeur (lettre du 31 juillet 1981,
page 2).
De toute évidence, rien ne justifie l'acceptation de la revendication n o 3
du demandeur, compte tenu de la portée et des restrictions de cette
revendication.
L'examinateur réaffirme que, selon la divulgation de la demande initiale
déposée par le demandeur, rien n'indique que celui-ci avait l'intention
de protéger l'objet décrit dans la revendication n o 3 de son brevet ou
en fait, qu'il connaissait l'objet décrit dans la revendication n o 3.
De plus, il semble que si l'on se fonde sur la divulgation de la
présente demande, la revendication n o 3 du demandeur porte sur un
coupe-bise qui ne correspond pas exactement à la description donnée
dans la divulgation.
Dans la partie 4 de la pétition en redélivrance, le demandeur soutient
que l'erreur est attribuable au fait que (TRADUCTION) "au cours de
(ses) entretiens avec (son) agent, (il) n'a pas signalé qu'il serait
également possible d'utiliser un seul ressort, compte tenu de la
portée de (son) invention".
L'examinateur ne peut que répéter encore une fois que le fait que
le demandeur ait omis d'informer son agent de la possibilité
d'utiliser un seul ressort sans rallonge ne constitue pas un argument
pertinent dans l'étude de cette demande de redélivrance.
...
En réponse à la décision finale rendue par l'examinateur, le demandeur
a déclaré (entre autres) :
...
(TRADUCTION) Par exemple, la lettre officielle du 9 janvier 1981
adressée au demandeur citait neuf brevets canadiens comme antériorités
opposables à la revendication n o 3. En réalité aucune de ces antério-
rités, séparément ou collectivement, n'a une relation directe avec
l'invention divulguée et revendiquée. Le demandeur a réfuté ces
objections dans en lettre du 28 janvier 1981.
Par conséquent, l'examinateur a laissé tomber les objections fondées
sur ces antériorités.
Le demandeur estime donc que son invention peut être entièrement
protégée par un brevet. Le problème tient à la définition du ressort
utilisé dans la fabrication du coupe-bise qui a été divulgué.
Bien que le ressort soit une partie essentielle de l'invention,
le demandeur affirme que le caractère nouveau de l'invention réside
dans l'utilisation de la paire de profilés mentionnés dans la divulgation,
lesquels, par leur interaction, agissent comme un piston. Le ressort
a donc une importance secondaire seulement. Aucune des antériorités
citées ne divulgue un coupe-bise composé de deux profilés allongés
ayant une interaction telle que décrite dans la divulgation.
Dans sa décision finale, l'examinateur déclare que le brevet qui
fait l'objet de la demande de: redélivrance ne mentionne pas à la fois
l'utilisation d'un seul ressort de forme allongée et d'une paire
de profilés interdépendants.
Le demandeur joint sous ce pli un affidavit préparé par lui-même
et par son agent à l'intention de la Commission d'appel des brevets.
Dans son affidavit, l'inventeur décrit ses premières expériences au
cours desquelles il a utilisé un seul ressort allongé ayant une
forme ondulée et indique qu'il a délaissé ce genre de ressort au
profit des ressorts courts décrits dans la divulgation parce que
le permier ressort allongé perdait son élasticité après une
certaine période d'utilisation. A noter également le dernier
paragraphe de l'affidavit où il est indiqué que des compétiteurs
ont adopté l'élément essentiel de l'invention, à savoir une paire
de profilés allongés et qu'ils utilisent égalent un ressort
long et ondulé, d'où une concurrence injuste à l'égard du demandeur.
Le demandeur estime qu'il y a lieu de signaler à l'attention
de la Commission d'appel des brevets 1a décision rendue par la Cour
d'appel fédérale dans l'affaire Deere & Co. c. le Commissaire des
brevets, 17 novembre 1891, 59 C.P.R. (2d), page 1.
...
La Commnission doit donc déterminer si le brevet initial doit être redélivré
ou non.
Les parties 3 à 5 de la pétition en redélivrance se lisent comme suit :
(TRADUCTION) 3) QUE le brevet est jugé défectueux ou inopérant pour
les raisons suivantes :
a) Le brevet canadien n o 1,042,725 du pétitionnaire renferme
une revendication indépendante dont la formulation en restreint
la portée de la façon suivante :
"plusieurs ressorts ondulés à l'intérieur dudit encastrement
placés entre le côté de cet encastrement faisant face à ladite
rainure et la barre de section carrée dudit élément en forme
de I, ressorts se terminant à l'une de leurs extrémités par
une courte rallonge conçue pour mordre une surface d'aluminium
lorsque cette rallonge est en contact avec cette surface et
pour maintenir ledit ressort en contact avec cette surface";
b) la restriction tient à la mention de "plusieurs ressorts ondulés",
alors que l'invention divulguée dans le brevet du demandeur
peut fonctionner et être exploitée commercialement avec un
seul ressort, ce qui justifie une revendication formulée comme
suit :
"Un coupe-bise autoréglable comprenant
un profilé d'aluminium principal composé d'une plaque d'appui
plate et d'un encastrement le long de cette plaque, ledit
encastrement étant de section rectangulaire et comportant une
rainure sur l'un de ses côtés :
un deuxième profilé d'aluminium allongé présentant une section
en I, l'une des barres transversales du I étant de section à
peu près carrée et étant conçue pour se glisser dans l'encas-
trement dudit profilé principal, le tronc du I s'insérant
dans ladite rainure allongée dudit encastrement, l'autre
barre transversale dudit I étant conçue pour recevoir une
bande de contact allongée;
au moins un ressort ondulé à l'intérieur dudit encastrement,
placé entre le côté de celui-ci faisant face à la rainure et
la barre transversale de section carrée dudit profilé présentant
une section en I;
une bande de contact posée entre la deuxième barre transversale."
Que d'une part, 1a divulgation décrit la courte rallonge du
ressort ondulé, celle-ci étant conçue pour mordre une surface
du profilé d'aluminium à l'intérieur duquel elle se trouve,
et que d'autre part, si l'on utilise un seul ressort, la
courte rallonge ne constitue pas une partie essentielle du
ressort, ce qui est évident d'après la divulgation.
4) QUE l'erreur a été commise par inadvertance, par accident ou par
méprise, sans intention de frauder ou de tromper, comme il est
expliqué ci-après.
Le pétitionnaire a rédigé sa demande de brevet canadien n o 274, 043,
laquelle a été rejetée par le Bureau des brevets du Canada. Après
ce refus, le demandeur a retenu les services d'un agent pour que
celui-ci rédige à nouveau la demande afin qu'elle soit conforme
aux exigences du Bureau des brevets du Canada. L'agent du
demandeur a donc reformulé aussi fidèlement que possible la
divulgation et les revendications originales, lesquelles faisaient
toutes mention de plusieurs ressorts. Mais au cours de ses entretiens
avec son agent, le demandeur n'a pas signalé qu'il serait également
possible d'utiliser un seul ressort, coopte tenu de la portée
de son invention.
5) QUE le pétitionnaire a pris connaissance des faits nouveaux dont
découle la nouvelle revendication vers le 15 octobre 1979 de la
manière suivante :
C'est à Kentville, en Nouvelle-Ecosse où il habite, que le
demandeur a eu l'occasion de découvrir les coupe-bise fabriqués
par les trois entreprises canadiennes suivantes :
1) Jacobs & Thompson Limited,
89, Kenhar Drive,
Weston (Ont.)
2) R.C.R. Limited,
2295, Métropole
Longueil (Qc)
3) Stop Aluminum Company
Perkay
Longueil (Qc).
Le pétitionnaire a acheté des coupe-bise fabriqués par ces
entreprises et en a envoyé des spécimens à son agent pour
lui demander comment il serait possible d'empêcher la vente
de ces produits qui portait atteinte à ses droits. L'agent
a répondu que chacun des produits fabriqués par les entreprises
susmentionnées situaient dans le champ de l'invention du
demandeur à une différence près : les coupe-bise ne comprenaient
qu'un seul ressort ondulé, alors que son brevet portait sur
un coupe-bise possédant plusieurs ressorts un peu plus courts.
L'agent du demandeur lui a également fait savoir que les
fabriquants auraient probablement gain de cause, étant donné
cette différence, si le demandeur intentait une poursuite
en contrefaçon contre eux. Le demandeur a donc eu une
conversation téléphonique avec son agent le 31 octobre 1979
pour discuter du problème, et pour lui demander d'entreprendre
les démarches nécessaires pour obtenir une redélivrance de
brevet afin d'y inclure la revendication énoncée plus haut
et d'obtenir la protection entière de son invention au
Canada.
La demande comprend trois revendications, les revendications n os 1 et 2
restant inchangées par rapport à celles de la demande initiale. Quant à la
revendication n o 3, elle se lit comme suit :
(TRADUCTION) Un coupe-bise autoréglable comprenant :
un profilé d'aluminium principal composé d'une plaque d'appui
plate et d'un encastrement le long de cette plaque, ledit
encastrement étant de section rectangulaire et comportant une
rainure sur l'un de ses côtés;
un deuxième profilé d'aluminium allongé présentant une
section en I, l'une des barres transversales du I étant de
section à peu près carrée et étant conçue pour se glisser dans
l'encastrement dudit profilé principal, le tronc du I s'insérant
dans ladite rainure dudit encastrement, l'autre barre transversale
dudit I étant conçue. pour recevoir une bande de contact allongée;
au moins un ressort ondulé à l'intérieur dudit encastrement, placé
entre le côté de celui-ci faisant face à la rainure et la barre
transversale de section carrée dudit profilé présentant une
section en I;
une bande de contact posée contre la deuxième barre transversale.
Lors de l'audience, M. Frayne a fait remarquer que le concept inventif était
décrit à la page 1, paragraphe 3 (original anglais), de la demande. Ce para-
graphe se lit comme suit :
(TRADUCTION) L'invention divulguée dans la présente demande porte
sur un coupe-bise autoréglable, le caractère nouveau de celui-ci
tenant à l'utilisation d'une paire de profilés d'aluminium, l'un
d'eux comportant un encastrement et une rainure pratiquée sur
l'un de ses côtés, l'encastrement étant conçu pour recevoir une
partie du deuxième profilé, l'autre partie de celui-ci se prolongeant
à l'extérieur de la rainure; on ressort placé à l'intérieur de l'en-
castrement, servant normalement à maintenir le deuxième profilé en
place contre l'un des côtés de l'encastrement, comme on le verra
clairement plus loin. Le coupe-bise divulgué dans la présente est
efficace pour fermer hermétiquement une porte ou toute autre ouverture
semblable, même si la porte est passablement gauchie. De plus, grâce
à l'action du ressort dont est muni le coupe-bise décrit, le joint
entre le coupe-bise et la parte ou toute autre ouverture du même
genre est absolument étanche, l'étanchéité étant considérablement
accrue grâce au nouveau ressort mis en place.
Dans sa décision finale, l'examinateur signale que (TRADUCTION) "rien dans la
divulgation de l'invention brevetée. ne laisse supposer qu'il serait possible
d'utiliser un seul ressort sans nuire su bon fonctionnement ou à l'exploitation
commerciale de l'objet revendiqué."
L'inventeur, M. Khallil, a rédigé es déposé sa demande initiale en 1977.
Après avoir répliqué à la décision rendue par l'examinateur au sujet de
cette demande, il a retenu les services d'un agent, M. Frayne, qui a révisé
la demande, laquelle lui a finalement valu l'obtention du brevet canadien
n o 1,042,725.
M. Khallil a envoyé, en même temps que sa réponse à la décision finale, un
affidavit dont les paragraphes 2 à 7 se lisent comme suit :
(TRADUCTION) 2. QUE J'AI préparé et déposé la demande de brevet
initiale qui m'a finalement valu l'obtention du brevet canadien
n o 1,042,725, après avoir retenu les services d'un agent, nommément,
M. Robert D. Frayne, d'Ottawa;
3. QUE losrque j'ai conçu le coupe-bise qui constitue l'objet
de ma demande de brevet canadien, j'ai commencé par mettre au
point les deux profilés d'aluminium à action interdépendante
qui sont décrits dans ma demande de brevet, et que j'ai par la
suite fait des essais avec des ressorts que j'ai placés à
l'intérieur des profilés, ces ressorts étant destinés à exercer
une pression sur le profilé mâle pour qu'il se déplace vers
l'extérieur en passant par la rainure du profilé femelle;
4. QUE le premier ressort que j'ai utilisé lors de mes essais était
constitué d'un ruban à mesurer métallique, que j'ai plié avec mes
mains pour lui donner une forme ondulée;
5, QUE j'ai placé ce long ressort dans le profilé femelle et que
j'ai posé le profilé mâle contre le ressort placé à l'intérieur
du profilé femelle afin de produire l'action d'un piston que je
cherchais à obtenir;
6. QUE le résultat ne m'a pas paru satisfaisant, car je me suis
rendu compte qu'après une certaine période d'utilisation, le ressort
long avait tendance à s'étirer et à perdre son élasticité.
7. QUE j'ai poursuivi mes essais afin de trouver un meilleur ressort
et que j'ai fini par opter pour les ressorts plus courts que j'ai
décrits dans ma divulgation et que ce sont ces ressorts que j'ai
utilisés dans la fabrication commerciale de mon coupe-bise et qui
ont fait l'objet de revendications précises dans mon brevet original;
L'agent du demandeur, M. Frayne, nous a également fait parvenir un affidavit,
qui renferme les déclarations suivantes :
(TRADUCTION) 4. QUE j'ai suivi les directives de M. Khallil à la
fois pour ce qui est de la demande de redélivrance et pour ce qui est
de son brevet, dès le début du mois de février 1978;
5. QU'au cours de la première semaine de février 1978, M. Khallil,
qui avait lui-même rédigé et déposé sa demande de brevet n o 274, 043
(maintenant devenu le brevet canadien n o 1,042,725), est venu me
rencontrer à mon bureau;
6. QUE M. Khallil m'a donné un exemplaire de sa demande de brevet
canadien et un exemplaire de la lettre dans laquelle il avait répliqué
à la première décision finale: rendue le 28 juillet 1977;
7. QU'il m'a semblé tout à fait manifeste que la demande de brevet
nécessitait des corrections substantielles pour satisfaire aux
exigences de la Loi sur les brevets et du Réglement connexe. Par
conséquent, en collaboration avec M. Khallil, j'ai commencé à réviser
la demande au cours de la première semaine de février 1978. J'ai
déposé la demande révisée au Bureau des brevets le 9 février 1978;
8. QUE M. Khallil ne m'a jamais mis au courant des étapes de
l'élaboration de son coupe-bise autoréglable décrit dans sa demande
de brevet qu'il avait lui-même déposée au Bureau des brevest du
Canada;
9. QUE c'est seulement après l'octroi dudit brevet canadien et
l'apparition sur le marché de coupe-bise présentant les caractéristiques
essentielles du coupe-bise inventé par M. Khallil que j'ai appris
que M. Khallil avait fait des essais avec d'autres formes de ressorts
dans la fabrication de son coupe-bise;
Compte tenu des affidavits susmentionnés, il ressort clairement que
M. Khallil a utilisé un seul ressort (un ruban à mesurer métallique plié
pour lui donner une forme ondulée) au cours de la mise au point de son coupe-bise
autoréglable. Toutefois, M. Khallil n'a fait que mentionner brièvement cette
application dans sa demande initiale, insistant surtout sur la description
de la réalisation commerciale pour laquelle il a utilisé plusieurs ressorts
courts. M. Khallil n'a discuté que de la réalisation commerciale avec
M. Frayne, lequel a rédigé les revendications à l'égard desquelles le
brevet a été octroyé, comme l'explique M. Frayne aux paragraphes 8 et 9
de son affidavit.
Les faits exposés dans l'affaire Curl Master Manufacturing Co. Ltd. c.
Atlas Brush Ltd. (1967) S.C.R. @514, sont semblables à ceux dont il est
question ici. Le coupe-bise autoréglable a été commercialisé avec succès.
L'inventeur, M. Khallil, désirait protéger son invention, mais
(TRADUCTION) "n'avait aucune expérience dans le domaine des brevets".
Lorsqu'il a rédigé sa demande, il a insisté sur la réalisation commerciale
de son invention et son agent a fait de même conformément aux directives de
M. Khallil. Nous estimons que l'invention mise au point par le demandeur
a été revendiquée en termes précis étant donné que les renseignements transmis
à l'agent, qui a été engagé après que le demandeur eut répliqué à la décision
initiale de l'examinateur, portaient uniquement sur la réalisation commerciale
de l'invention, comme il est indiqué au paragraphe 7 de l'affidavit de M. Khallil.
L'élément que l'on cherche à corriger est la restriction contenue dans
les revendications qui mentionnent l'utilisation de (TRADUCTION) "plusieurs
ressorts ondulés... conçus pour mordre une surface d'aluminium ...". Nous
avons reproduit plus haut le paragraphe 3 de la page 1, dans lequel
le demandeur explique les raisons pour lesquelles il croit que la revendication
n o 3 est acceptable. Au cours de l'audience, M. Frayne a fait une démonstration
du fonctionnement du coupe-bise en utilisant un seul ressort placé au centre
du coupe-bise pour montrer que celui-ci exerçait une pression suffisante
sur toute la longueur du coupe-bise et que partant, cette réalisation
fonctionnait conformément à la description donnée dans le paragraphe
susmentionné.
En vertu de l'article 50 de la Loi sur les brevets, il est possible de
délivrer au breveté un nouveau brevet "lorsqu'un brevet est jugé défectueux
ou inopérant à cause d'une description ou spécification insuffisante, ou
parce que le breveté a revendiqué plus ou moins qu'il n'avait droit de
revendiquer à titre d'invention nouvelle, mais qu'il apparaît en même
temps que l'erreur a été commise par inadvertance, accident ou méprise,
sans intention de frauder ou de tromper."
Comme le demandeur l'indique dans sa pétition, la raison de la demande
de redélivrance est que le breveté a revendiqué moins qu'il n'avait droit
de revendiquer. Plus précisément, les revendications du brevet initial
demeurent en vigueur et une autre revendication indépendante dont l'élément
essentiel est l'utilisation (TRADUCTION) "d'au moins un ressort ondulé" s'ajoute
aux premières.
Lorsque le demandeur a déposé sa demande initiale, il a fait mention (TRADUCTION)
"d'un ruban d'acier en forme de ressort illustré à la figure 5 et inséré sous
(B) à la figure 4 comme le montre la figure (7)". Le paragraphe 3, page 1,
que nous avons reproduit plus haut, fait état d'un (TRADUCTION) "ressort"
ce qui, en combinaison avec la demande déposée initialement, justifie la
mention (TRADUCTION) "au moins un ressort ondulé" introduite dans une
revendication. Par conséquent, nous ne sommes pas d'accord avec l'énoncé
de la décision finale selon lequel (TRADUCTION) "rien dans la
divulgation de l'invention brevetée du demandeur ne laisse supposer qu'il
serait possible d'utiliser un seul ressort sans nuire au bon fonctionnement
ou à l'exploitation commerciale de l'objet en cause."
Dans sa demande initiale, le demandeur a revendiqué gins qu'il n'avait
droit de revendiquer à titre d'invention nouvelle en raison du manque de
communication entre lui-même et son agent. M. Khallil affirme dans son
affidavit qu'il a utilisé un seul ressort. L'agent n'a jamais été informé
des étapes de l'élaboration de l'invention comme le déclare M. Frayne aux
paragraphes 8 et 9 de son affidavit. Nous sommes convaincus que le
demandeur n'avait aucune intention de frauder ou de tromper. Nous comprenons
le point de vue que l'examinateur a fait valoir dans sa décision finale mais,
à la lumière des affidavits déposés ultérieurement, nous ne somme pas d'accord
avec lui.
Compte tenu des preuves par affidavit, il nous semble utile de signaler l'affaire
Curl Master Manufacturing Co. Ltd. c. Atlas Brush Ltd. (1967) S.C.R. @514.
Dans cette affaire, une application particulière avait été divulguée, mais
par inadvertance, par accident ou par méprise, et sans intention de frauder,
toute l'invention originale n'avait pas été revendiquée.
Nous estimons que le demandeur a fait preuve de son droit d'élargir la
portée de la revendication de l'objet de son invention par voie de redélivrance
de brevet.
Par conséquent, nous recommandons que la décision finale dans laquelle la
pétition en redélivrance est refusée parce que (TRADUCTION) "la revendication
n o 3 porte sur un objet distinct de celui divulgué et revendiqué par le
demandeur" soit annulée.
Le Président intérimaire,
S.D. Kot M.G. Brown
Commission d'appel des brevets, Canada Membre
Après étude du dossier de la demande et de la recommandation formulée par la
Commission d'appel des brevets, je déclare que j'abonde dans le sens de la
Commission. En conséquence, j'annule la décision finale et je renvoie la
demande à l'examinateur.
Le commissaire des brevets,
J.H.A. Gariépy
Datée à Hull (Qc),
ce 28e jour de février 1983
Agent du demandeur
Robert Frayne & Co.
309, rue Cooper
Ottawa (Ont.)
K2P 0G5