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Paragraphe 63(2)

6 mois

 

28 octobre 1982

 

MM. Scott et Aylen

170 ouest, av. Laurier

Ottawa (Canada)

 

Demande N o: 366 748

Déposée le:  12 décembre 1980 - Demande divisionnaire N o 323 341,

     déposée le 13 mars 1979,

     Demande de priorité conventionnelle américaine

     N o 889 626 du 24 mars 1978

Titre:      Rotor pour séparateur rotatif à flux axial

 

Monsieur,

 

J'accuse réception de votre lettre du 11 août 1982 ainsi que de la

copie certifiée de la demande américaine n o 889 626 (série 1970) qui

indique que le demandeur a droit de priorité conventionnelle.

 

J'ai examiné les arguments présentés au nom du demandeur, mais, pour

les raisons expliquées ci-dessous, ils ne me convainquent pas. Par

conséquent, à moins que dans les six mois à compter de la date de la

présente le demandeur entame une procédure pour annuler le brevet

canadien antérieur n o 1  040 043 du 10 octobre 1978, dans la mesure où

il protège l'invention en question et qu'il la mène rapidement à bien

par la suite, je rejette cette demande en vertu du paragraphe 63(2) de

la Loi sur les brevets. Autrement, le demandeur pourra annuler les

revendications 1, 3, 4, 5, 6 et 11 dans le même laps de temps.

 

Le brevet canadien n o 1 040 043 a été déposé le 22 décembre 1976 et

porte la date du 19 février 1976 qui est celle de la priorité

conventionnelle américaine. Notons en passant que cette dernière date

précède d'environ 4 ans et 9 mois celle du dépôt de la demande

divisionnaire par le demandeur et d'environ 3 ans celle du dépôt de la

demande originale. En outre cette date de priorité précède

approximativement de vingt-et-un mois la date de priorité

conventionnelle du demandeur. De plus, l'examinateur a accepté le

brevet le 13 janvier 1978 soit plus de deux mois avant la date de la

priorité conventionnelle du demandeur et quatorze mois avant celle du

dépôt de sa demande originale au Canada, c.-à-d. le 13 mars 1979.

 

Il est certain que les revendications 1, 3, 4, 5, 6 et 11 de la

présente demande traitent de la même invention que celle qui est

revendiquée dans le brevet canadien n o 1 040 043. En revanche,

j'estime que tel n'est pas le cas pour la revendication 10.

 

Il est également évident que le 10 octobre 1978, lors de la délivrance

du brevet canadien n o 1,040,043, la présente demande n'était pas en cours

au Canada puisqu'on ne l'a déposée au Bureau des brevets que le 13 mars 1979,

soit environ cinq mois après la délivrance du brevet canadien. Je suis donc

convaincu que cette invention était déjà brevetée en vertu de la Loi cana-

dienne sur les brevets et que, conformément au paragraphe 63(2), la présente

demande doit être rejetée.

 

Le demandeur prétend, cependant, qu'il a droit à la concession de ce qui

serait un second brevet canadien pour la même invention en raison d'un

précédent juridique qui s'est produit dans l'affaire In Re Fry (1939) tel que

publié au numéro 135 de la Section II du Volume I du Canadian Patent Reporter

et également du fait que sa demande de convention correspondance a été

déposée le 24 mars 1973 aux Etats-Unis, environ six mois avant la délivrance

du brevet canadien n o 1,040,043. Il soutient avoir droit, en vertu de

l'article 29, à ce que sa demande divisionnaire n o 366,748 introduite au

Canada soit examinée comme si elle y avait été déposée le 24 mars 1978 et

que le brevet canadien n o 1,040,043 doit donc être réputé en coinstance avec

cette demande. Il prétend, en outre, que du fait de la décision rendue dans

l'affaire re Fry ainsi que de l'applicabilité du paragraphe 29(1), le brevet

canadien précité ne constitue pas un obstacle à la délivrance d'un brevet.

 

Je note, cependant, que dans le cas présent les faits sont différents de

ceux de l'affaire Fry où, au même moment, les deux demandes étaient réellement

en coinstance devant le Bureau canadien des brevets dont l'erreur fut de ne

pas établir de conflit en vertu de l'article 45 (44 à l'époque). Le cas qui

nous occupe ne présente aucune situation semblable.

 

En outre, la rectitude du jugement Fry est discutable. Dans cette instance,

le défendeur n'était pas représenté et l'on n'a jamais débattu le motif

pour lequel la demande Fry ne devait pas être acceptée. Dans un jugement

beaucoup plus récent, Radio Corp. of America c. Philco Corp. 1966 CPR vol. 64

1, 14 et 15, le président de la Cour de l'Echiquier a exprimé énormément de

doute concernant l'affaire Fry:

 

... Selon moi, il faut lire le paragraphe 63(2)

comme s'appliquant à toute demande d'invention

pour laquelle on a déjà émis un brevet au

moment où le Commissaire doit décider s'il y

a lieu de "devoir la rejeter". Il semble que   

l'intérêt public serait certainement servi si

le Commissaire était dans l'obligation d'ap-

pliquer la règle du paragraphe 63(2) toutes les

fois qu'il reconnait l'existence d'un brevet

pour l'invention revendiquée de façon à éviter

chaque fois qu'il y a possibilité la coexistence

de deux brevets pour la même invention. ...

 

et

.... Le paragraphe 63(2) traite d'un problème tout à

fait différent (que l'article 43), celui d'éviter,

lorsqu'il est possible, la coexistence de deux

brevets pour la même invention en vertu de la

 

   Loi sur les brevets. Ce paragraphe interdit

l'émission d'un brevet pour une invention déjà

brevetée en vertu de la Loi canadienne jusqu'à ce

que le brevet antérieur ait été contesté avec

succès devant les tribunaux. Cette règle s'applique

évidemment à certains des cas qui ressortent de

l'article 43 et elle était exprimée pour s'appliquer

par dérogation à cet article. Il n'y a aucune raison

pour laquelle il faudrait limiter la règle énoncée

au paragraphe 63(2) à une demande présentée après

l'émission du brevet et ce paragraphe ne renferme

pas de restriction expresse de ce genre. Le fait que

l'article 43 en comprend une et non le paragraphe 63(2)

me confirme qu'il n'est pas nécessaire de le sous-

entendre dans ce dernier article.

 

De plus, il est à noter nue le demandeur ne peut se prévaloir des avantages

du paragraphe 29(1) que si les citoyens canadiens jouissent de la récipro-

cité dans le pays de la priorité. Dans le cas présent, le dépôt de la

priorité avait eu lieu aux Etats-Unis d'Amérique. Dans des circonstances

analogues, en vertu de la loi américaine, la demande serait refusée jusqu'à

ce que le demandeur puisse prouver que son invention est antérieure à la

plus ancienne date d'enregistrement du brevet n o 1,040,043, c.-à-d. au 19

février 1976, et même dans ce cas, il serait alors en conflit avec le brevet

lorsqu'il s'agirait de déterminer qui était réellement le premier inventeur.

 

Au Canada, le Bureau des brevets n'est pas habilité à ce genre de démarche

puisque l'on ne peut créer un conflit entre un brevet délibré et une

demande, cela doit se faire par l'entremise du tribunal en vertu des dispo-

sitions de l'article 63. L'alinéa 63(1)c) prévoit que si le demandeur

désire lui-même obtenir un brevet, il peut recourir à l'article 63 pour

annuler l'ancien. Il est alors tenu, en vertu du paragraphe 63(2) d'intenter

une action en justice pour écarter le brevet antérieur.

 

Dans ce cas-ci, le Bureau a reconnu qu'en cas de coinstance les demandes

pourraient être en contradiction. Le Bureau n'a pas pu laisser passer

l'éventualité d'un conflit, étant donné que la demande que lui a présentée

le demandeur au même moment n'était pas réellement en coinstance avec celle

qui a donné lieu à la délivrance du brevet no 1,040,043.

 

J'ai par conséquent, la certitute que l'on ne peut autoriser la délivrance

d'un second brevet pour la même invention avant d'annuler le premier.

 

Il convient de signaler au demandeur que la décision du Commissaire publiée

le 16 décembre 1930 dans la Gazette du Bureau des brevets faisait état d'une

situation analogue.

 

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments distingués.

 

Le Commissaire des brevets,

 

J.H.A. Gariépy

 

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