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    DÉCISION DU COMMISSAIRE

 

Absence de caractère inventif, objet non exploitable: dispositif réducteur de débit

                                    d'une gouttière servant à

                                    empêcher une surcharge du

                                    système de drainage pluvial

 

Les preuves par affidavit invalident l'objection portant sur l'absence de caractère

inventif. La demande est renvoyée à l'examinateur pour qu'il tienne compte de

l'antériorité mentionnée. Décision de rejet modifiée.

 

                        ****

 

La présente décision vise la demande de révision par le Commissaire des brevets

de la décision finale de l'examinateur concernant la demande nÀ 316,795 (classe

20-106.1) déposée le 23 novembre 1978 et intitulée "Systèmes de drainage pluvial".

L'invention est revendiquée par M. Richard J. Stoltz. L'examinateur chargé de

l'étude de la demande a rendu sa décision de rejet le 5 décembre 1980.

 

La demande porte sur un dispositif visant à réduire l'ouverture d'une descente

pluviale de gouttière. En réduisant le débit d'eau dans la descente, on empêche

une surcharge du système de drainage lorsqu'il y a de très fortes pluies. Le

trop-plein d'eau déborde simplement de la gouttière et tombe sur la pelouse et

autour de la construction. Le demandeur propose aussi un système de drainage

pluvial comprenant un dispositif réducteur de débit pour chaque gouttière de

maison, les descentes pluviales des gouttières étant raccordées au système d'égout

municipal. Les eaux pluviales mettraient ainsi plus de temps à se déverser dans

le système d'égout, empêchant par le fait même une surcharge du réseau. La

figure 3 illustre l'objet de l'invention.

 

        <IMG>

 

    Dans sa décision finale, l'examinateur a rejeté les revendications parce qu'elles

    ne définissaient pas de nouveauté brevetable. Aucune antériorité n'a été

    invoquée.

 

    Voici, en partie, la position adoptée par l'examinateur:

 

***

 

    (TRADUCTION) Il ne fait aucun doute que le dispositif en

    question peut réduire le débit d'eau dans la descente pluviale,

    mais rien de plus. La gouttière débordera très vite et le

    trop-plein d'eau s'écoulera dans les entrées, sur les pelouses,

    etc., et aura tôt fait d'atteindre le système d'égout. Bref,

    l'entrée de l'eau dans les égouts ne sera, au mieux, que retardée:

    le demandeur n'a donc aucunement résolu le problème, il n'a fait

    que le retarder. A moins de prévoir un système permettant de

    retenir toute l'eau de ruissellement pendant un bon moment (disons

    une heure), cette solution est inefficace et ne règle pas vraiment

    le problème que le demandeur cherche à résoudre. En passant, il

    aurait été moins coûteux de boucher simplement l'ouverture de la

    descente pluviale au lieu d'installer un clapet réducteur de débit.

    Le résultat aurait été le même. En fait, toute chute de pluie

    modérée fera généralement déborder les gouttières des maisons de

    ville, de sorte qu'aucun dispositif spécial n'est requis pour en

    arriver aux mêmes résultats que ceux que connaît le demandeur en

    utilisant un clapet réducteur de débit.

 

    Malgré cela, je ne vois rien d'inventif dans les revendications

    du demandeur. Ce dernier n'a fait que résoudre le problème de

    trop-plein d'eau en utilisant un dispositif aussi vieux que les

    tuyaux eux-mêmes, soit un clapet. Il ne revendique aucun type

    particulier de clapet, mais seulement l'idée générale d'utiliser

    un clapet dans une descente pluviale. A mon avis, le demandeur

    n'a rien inventé du tout. Le principe est simple et bien connu:

    lorsque trop d'eau pénètre dans un système, on y installe un

    dispositif réducteur de débit, c'est-à-dire un clapet. C'est

    une pratique très répandue. Le demandeur peut revendiquer une

    nouvelle sorte de clapet mais non l'idée générale d'utiliser un

    clapet.

 

***

 

    Dans sa réponse à la décision finale, le demandeur réplique (notamment):

 

***

 

    (TRADUCTION) En ce qui a trait à l'exploitabilité de l'invention

    revendiquée dans son ensemble, il semble y avoir divergence

    d'opinion entre l'examinateur et le demandeur sur ce qui représente

    un "délai important". A ce sujet, mentionnons que le demandeur est

    un spécialiste de la gestion des eaux de pluie. Pour étayer

    davantage le principe de l'exploitabilité de l'invention revendiqué e

    nous avons joint l'affidavit de M. Paul E. Theil. M. Theil est lui

    aussi une autorité en matière de gestion des eaux de pluie, comme le

    démontre clairement l'affidavit qui, selon nous, établit hors de tout

    doute qu'un spécialiste en la matière reconnaîtrait que l'utilisation

    d'un dispositif réducteur de débit du type défini dans le mémoire

    descriptif et tel qu'il est revendiqué permettrait d'améliorer le

    rendement du système de drainage pluvial, tel qu'il est présenté dans

    le mémoire descriptif.

 

    Quant à la question d'exploitabilité, l'examinateur a soutenu qu'à

    moins de prévoir un système permettant de retenir toute l'eau de

    ruissellement pendant une heure, il ne pourra y avoir de solution

    satisfaisante aux problèmes que le demandeur cherche à résoudre.

 

    A ce sujet, notons que, de l'avis de M. Theil, un délai de trois

    à cinq minutes serait considéré comme important et qu'un tel délai

    serait forcément attribuable à l'utilisation du dispositif réducteur

    de débit de la présente invention dans un système de drainage pluvial

    standard où les nombreuses descentes pluviales des constructions à

    toit en pente sont raccordées à un système d'égout.

 

***

 

    Quant à la question de l'évidence, mentionnons que le problème que

    la présente invention vise à résoudre existait depuis bien longtemps,

    même si la solution proposée par le demandeur semble très simple.

    Nous affirmons, toutefois, que la simplicité de la présente invention

    apparait après coup, une fois qu'on a lu le mémoire descriptif du

    demandeur, et ne résulte pas de l'examen de l'état de la technique

    au moment de l'invention. Comme le demandeur l'a indiqué dans son

    mémoire descriptif et comme l'a confirmé ensuite M. Paul E. Theil, la

    façon de procéder pour accroître le rendement d'un système de drainage

    pluvial était déjà bien établie: elle consistait à remplacer les

    conduits de drainage existants par des conduits de diamètre plus

    grand. Ainsi, un spécialiste en gestion des eaux pluviales qui aurait

 

    voulu accroître la capacité d'un système de drainage, au moment de

    l'invention, aurait augmenté le diamètre ou le nombre des conduits de

    drainage pluvial. C'est pourquoi nous soutenons que le demandeur s'est

    écarté radicalement de la pratique établie depuis fort longtemps

    lorsqu'il a suggéré d'augmenter la capacité d'un système de drainage

    pluvial en retardant le déversement, dans le système, des eaux de pluie

    recueillies dans les gouttières des constructions à toit en pente,

    simplement en plaçant un dispositif réducteur de débit à l'ouverture

    de la descente pluviale. Même s'il est vrai que, une fois reconnu, le

    dispositif requis pour atteindre le but de l'invention peut paraître

    assez simple, nous maintenons qu'il est clair que l'idée même présente

    un caractère inventif et que la simplicité de l'invention ne doit pas

    empêcher sa brevetabilité.

 

    Pour étayer ses affirmations, le demandeur a soumis trois affidavits, soit

    ceux de MM. Paul E. Theil, Anastasios M. Candaras et C. Douglas Leavans. Chacune

    de ces personnes a affirmé être titulaire d'un diplôme universitaire supérieur

    en génie civil et avoir participé à des projets municipaux portant sur le drainage

    des eaux de pluie.

 

    Voici (en partie) ce qu'elles ont déclaré:

 

    Extrait de l'affidavit de M. Paul E. Theil (partie 14):

 

***

 

    (TRADUCTION) Que j'ai lu le mémoire descriptif de la demande de

    brevet canadien nÀ 316,795 et je suis d'avis que le dispositif

    décrit dans la revendication 1 du mémoire descriptif du brevet

    permettra de réduire le débit d'eau provenant d'une gouttière et,

    par le fait même, celui du système de drainage pluvial. Le

    crois en outre qu'on peut réduire considérablement le débit d'eau

    de pluie se déversant dans un système de drainage pluvial

    standard, où plusieurs constructions à toit en pente sont raccordées

    au réseau de drainage pluvial de la municipalité par l'intermédiaire

    de gouttières et de descentes pluviales, en installant un dispositif

    permettant de réduire le débit d'eau s'écoulant de la gouttière à la

    descente pour que le trop-plein d'eau déborde de la gouttière en

    cas de pluies d'une intensité prédéterminée.

 

    Je crois aussi qu'en faisant en sorte de faire déborder la gouttière,

    comme le demandeur l'explique dans son mémoire descriptif, il en

    résultera un délai important dans le temps que mettra toute cette

    eau pour atteindre le système de drainage pluvial.

 

***

 

    Je considère un délai de trois à cinq minutes comme un délai

    important dans le temps que mettra le trop-plein d'eau pour se

    déverser dans un système de drainage pluvial standard étant donné que

    dans bien des pluies d'orage, la période de pointe est de courte durée,

    ne dépassant souvent pas deux minutes.

 

    Extrait de l'affidavit de M. Anastasios M. Candaras (partie 4):

 

    (TRADUCTION) Que j'ai étudié le mémoire descriptif de la demande de

    brevet canadien nÀ 316,795 et je suis d'avis que le dispositif qui

    y est décrit permettra de restreindre le débit d'eau provenant d'une

    gouttière et qu'il contribuera, par le fait même, à réduire le débit

    d'eau s'écoulant de la gouttière dans le système de drainage pluvial.

    Je crois que le dispositif réducteur de débit décrit dans ce mémoire

    et le système selon lequel ce dispositif est utilisé dans le but de

    retarder et de réduire le débit d'eau s'écoulant de plusieurs

    constructions à toit en pente dans le système de drainage pluvial

    pourraient permettre d'accroître le rendement de ce système dans son

    ensemble.

 

    Extrait de l'affidavit de M. C. Douglas Leavans (parties 11 et 12):

 

    (TRADUCTION) Que j'ai lu le mémoire descriptif de la demande de

    brevet canadien n 316,795 et je crois qu'un dispositif comprenant

    un couvrecle s'ajustant à l'intérieur de la gouttière et bouchant

    une bonne partie de l'ouverture de la descente pluviale, et

    incluant aussi une fixation pour retenir le couvercle par-dessus

    l'ouverture de la descente, ledit couvercle comprenant un passage

    pour permettre à un débit d'eau réduit de passer de la gouttière

    à la descente, permettra de réduire la quantité et le débit d'eau

    s'écoulant des gouttières des constructions à toit en pente dans le

    système de drainage des eaux pluviales.

 

    Je crois aussi qu'en plaçant un dispositif réducteur de débit dans

    la descente pluviale d'une gouttière, comme on l'indique dans le

    mémoire descriptif de la demande nÀ 316,795, on peut réduire

    considérablement le débit d'eau de pluie s'écoulant de diverses

    constructions à toit en pente dans le système de drainage pluvial.

    De plus, je pense qu'en faisant déborder la gouttière, comme le

    demandeur l'explique dans son mémoire descriptif, il en résultera

    un délai important dans le temps que mettra le trop-plein d'eau

    pour se déverser dans le système de drainage pluvial. Je considère

    comme suffisant un délai de l'ordre de trois à cinq minutes étant

    donné que dans bien des pluies d'orage, la période de pointe est

    de courte durée. Je suis d'avis que la solution qui consiste à

    accroître le rendement d'un système de drainage pluvial en réduisant

    le débit d'eau au moyen d'un dispositif placé à l'ouverture de la

    descente pluviale est une approche tout à fait différente de celle

    employée avant novembre 1978.

 

    Il appartient maintenant à la Commission de déterminer si l'objet décirt dans

    les revendications permettra d'obtenir les résultats exposés dans le mémoire

    descriptif et s'il est brevetable. La revendication 1 se lit comme suit:

 

***

(TRADUCTION) Un dispositif visant à réduire le débit d'eau s'écoulant

de la gouttière dans la descente pluviale, la descente ayant une

ouverture à la base de la gouttière à laquelle elle est raccordée,

ledit dispositif comprenant:

 

a) un couvercle s'ajustant à l'intérieur de ladite gouttière et

bouchant une bonne partie de la descente pluviale pour empêcher

le plein écoulement de l'eau de la gouttière à la descente,

 

b) une fixation pour retenir ledit couvercle par-dessus

l'ouverture de ladite descente,

 

c) un passage dans ledit couvercle pour permettre à un débit d'eau

réduit de s'écouler de la gouttière à la descente, ledit passage

ayant une surface de coupa beaucoup plus petite que celle de

l'ouverture de ladite descente pour que le débit d'eau soit de

beaucoup inférieur au plein débit afin d'en arriver à une réduction

substantielle du débit d'eau passant de la gouttière à la descente.

 

L'examinateur a prétendu que le demandeur n'avait fait que retarder le problème

de surcharge causée par de trop fortes pluies et qu'il aurait fallu prévoir un

système de retenue de l'eau de ruissellement pour résoudre le problème de façon

satisfaisante. A ce sujet, les affidavits de MM. Theil et Leavans indiquent

qu'un délai de trois à cinq minutes dans le temps que mettra le trop-plein

d'eau pour atteindre un système de drainage pluvial standard est suffisant dans

bien des cas pour donner les résultats recherchés par le demandeur. Après avoir

lu les affidavits, nous en sommes venus à la conclusion que l'invention fonctionnera

tant bien que mal et ne peut donc être considérée comme "inexploitable". Il est

clair qu'en bloquant partiellement le système, on réduira le débit d'eau qui

s'y déversera. C'est pourquoi, nous croyons que l'objection portant sur

l'inexploitabilité de l'invention ne devrait pas être maintenue.

 

Quant aux revendications portant sur le dispositif réducteur de débit, que

l'examinateur assimile à un clapet dans un tuyau, nous croyons que le demandeur a

décrit l'objet en des termes le définissant davantage comme un réducteur de débit

que comme un clapet. Nous nous fondons à ce sujet sur l'information contenue

dans les affidavits de MM. Theil, Candaras et Leavans et sur le fait qu'aucune

antériorité n'a été invoquée. Mais pour ce qui est de l'acceptabilité de ces

revendications et, en fait, de toutes les autres, nous avons de sérieuses

réserves sur le caractère inventif de l'objet revendiqué. L'endigage des

canalisations et des cours d'eau pour réduire le débit d'eau se fait depuis des

siècles, souvent pour empêcher les inondations en aval. Nous nous référons

aussi au brevet américain n o 2,547,940 délivré à M. Swenson le 4 janvier 1949 et

portant sur l'installation dans la descente pluviale d'une gouttière d'un

dispositif ressemblant à un déversoir et permettant un lent écoulement de l'eau

lorsque le ruissellement pluvial n'est par trop fort et, dans le cas contraire,

un lent écoulement accompagné d'un système de retenue de l'eau. Par conséquent,

nous recommandons que la demande soit renvoyée à l'examinateur pour qu'il tienne

compte de cette antériorité et de toute autre antériorité pertinente.

 

Nous recommandons que l'objection portant sur l'inexploitabilité de l'invention

soit retirée et que la demande soit renvoyée à l'examinateur pour qu'il détermine

si l'objet revendiqué a une valeur inventive.

 

Le Président,

 

G. Asher                      S. Kot            M. Brown

Commission d'appel des brevets, Canada    Membre            Membre

 

Je suis d'accord avec les conclusions de la Commission. Je refuse le rejet

fondé sur les raisons invoquées et je renvoie la demande à l'examinateur pour

qu'il y donne suite en tenant compte de ma décision.

 

Le Commissaire intérimaire des brevets,

 

G.R. McLinton

 

Datée à Hull (Québec)

ce 12e jour de février 1982

 

Agent du demandeur

 

Fetherstonhaugh & Co.

439 University Ave.

Toronto (Ontario)

 

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