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                 DECISION DU COMMISSAIRE

 

ARTICLE 2 - Méthode destinée à diminuer le désir de fumer.

 

Les méthodes utilisées pour administrer une substance à un patient sont

assujetties à l'article 2 de la Loi sur les brevets. Les revendications

modifiées du demandeur ne portent pas sur un traitement médical.

Décision de rejet confirmée - Revendications modifiées acceptées.

 

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   La demande de brevet 261,672 (classe 167-247) déposée le 21 septembre 1976

vise une invention intitulée MÉTHODE DESTINÉE A SUPPRIMER OU A DIMINUER LE

 DÉSIR DE FUMER. Emmanuel Revici en est l'inventeur. L'examinateur chargé

de l'étude de la demande a pris une décision finale le 11 décembre 1979

dans laquelle il refuse que les démarches soient poursuivies en vue

d'obtenir un brevet.

 

La demande porte sur une méthode destinée à supprimer ou à diminuer

le désir chez l'homme de fumer du tabac en lui administrant une huile

sulfurée polyinsaturée.

 

L'examinateur a refusé les revendications touchant la méthode en vertu de

l'article 2 (les revendications visant la composition étaient acceptables)

et a déclaré (notamment):

 

Le demandeur déclare dans sa lettre que le procédé revendiqué dans

la présente demande ne consiste pas en un traitement médical parce

que la composition de l'invention n'est pas un médicament. Il affirme

également dans sa réponse à la décision du Bureau du 27 septembre 1978,

que la méthode n'avait pas pour but de prévenir la maladie ni de guérir.

Mais ces arguments ne réussissent pas à annuler l'objection, parce que

l'examinateur est convaincu que la composition tombe sous le coup de la

définition du mot médicament. On présente au demandeur la définition

du mot drogue donnée par le Parlement dans le cadre de la Loi des

aliments et drogues (1970) R.S.C., selon laquelle une drogue modifie les

fonctions organiques chez l'homme ou les animaux. D'après cette

définition, la composition qui fait l'objet de la présente demande est

ni plus ni moins une drogue et le procédé servant à administrer cette

drogue à un humain est par conséquent un traitement médical. En ce

qui a trait au deuxième argument, l'examinateur est d'avis qu'une

méthode consistant à diminuer ou à supprimer le désir chez l'homme de

fumer du tabac est une méthode de prévention de la maladie. Tout le monde

sait que l'usage abusif du tabac est à l'origine du cancer des poumons.

La méthode qui fait l'objet de la présente demande correspond exactement

 à la définition d'un objet d'invention non brevetable, soit

une méthode servant à prévenir la maladie à l'aide d'une drogue.

 

Les revendications 1 à 19 et 38 à 40 doivent être retirées

parce qu'elles ne correspondent pas à une invention brevetable

telle que définie à l'article 2 de la Loi sur les brevets.

 

En réponse à la décision finale, le demandeur déclare (notamment):

 

Pour savoir si la composition utilisée dans la méthode d'in-

vention est un "médicament", il faut établir si l'on considère

au point de vue général, plutôt qu'au point de vue scientifique

cette composition comme un médicament. En d'autres termes,

aux yeux du profane, cette composition est-elle un médicament?

Nous sommes d'avis que le profane ne penserait pas qu'une

composition utilisée dans le but de diminuer le désir de funer

soit un "médicament". Nous savons, par exemple, que le fait

de mastiquer de la gomme à mâhcer, de sucer des pastilles de

menthe ou des bonbons réduit le besoin de fumer du tabac;

toutefois, l'homme de la rue ne penserait pas qu'il s'agisse

là d'un traitement médical et que la gomme à mâcher, les

pastilles de menthe et les bonbons soient des "médicaments".

On connaît également des substances qui laissent chez la

personne qui fume un mauvais goût et grâce auxquelles cette

personne renonce à fumer; on ne peut toutefois considérer au

point de vue général, par opposition au point de vue scientifi-

que qu'il s'agisse là d'un traitement médical.

 

Il existe même des substances utilisées en médecine ou en

chirurgie que l'on ne considère pas comme étant des médicaments,

Par exemple, dans l'affaire Burton Parsons Chemicals Inc. et

al versus Hewlett-Packard (Canada) Ltd, et al, citée dans 17

CPR (2d) 97, la Cour suprême a décidé qu'une crème à électro-

cardiogramme n'était pas un médicament et n'était même pas

"destinée à l'usage de la médecine". La décision de la Cour

se lit comme suit (notamment):

 

"Il est bien évident qu'une telle crème (soit

son utilisation) est utilisée essentiellement

et principalement lorsque l'on prend des

électrocardiogrammes de routine, qui ne sont

pas nécessairement ou essentiellement reliés au

traitement de maladies. Il va sans dire qu'il

est bien difficile d'établir une démarcation

entre le médicament et le produit qui peut être

utilisé en liaison avec des traitements médicaux."

 

La composition qui fait l'objet de la présente invention n'est

ni un médicament, ni un produit pouvant être utilisé en

liaison avec des traitements médicaux.

 

Nous sommes d'avis que le point de vue considéré dans la

décision officielle qui réfère à la définition du mot drogue

selon la Loi des aliments et drogues n'est pas pertinent et

que ce n'est pas là le point de vue sanctionné par les

tribunaux; par conséquent, la décision de rejet fondée sur

ce motif ne veut être acceptée.

 

Il s'agit pour la Commission d'appel des brevets de savoir si les revendi-

cations de méthode sont assujetties ou non à l'article 2 de la Loi sur les

brevets. La revendication de méthode 1 se lit ainsi:

 

1. Une méthode destinée à supprimer ou à diminuer le

désir chez l'homme de fumer du tabac et qui consiste à lui

administrer une composition liquide obtenue par oxydation

d'un liquide contenant un groupement insaturé allylique,

 

-CH=CH-CH2-CH=CH-

 

et/ou

 

-CH=CH-CH=CH-CH2-,

 

choisi parmi des acides gras et des esters gras, vendant suf-

fisamment de temps pour obtenir un indice de peroxyde bien

supérieur au composé non traité, en concentration suffisante

pour supprimer ou diminuer le besoin de tabac.

 

Après avoir révisé à fond la procédure d'examen de la demande, nous ne voyons

aucune raison de changer notre opinion, à savoir si oui ou non une méthode

utilisée pour administrer une substance à un patient est assujettie à l'article

2 de la Loi sur les brevets. Notre opinion est la suivante: toute substance

destinée à modifier les fonctions organiques chez l'homme ou les animaux est

un médicament au sens large et toute méthode destinée à un traitement médical

est assujettie à l'article 2 de la Loi sur les brevets. Il n'y a aucun doute

que la substance revendiquée ici, soit "une huile sulfurée polyinsaturée",

modifie les fonctions organiques du corps lorsqu'elle a été absorbée.

 

Fort de cette analyse, nous avons communiqué avec l'agent du demandeur, M. K.

Murphy, à qui nous avons présenté notre point de vue. Après mûre réflexion,

M. Murphy a annulé ou modifié le 24 septembre 1981 toutes les revendications

de méthode et renuméroté les revendications de composition en conséquence.

 

Par conséquent, il semble qu'aucune autre discussion ne soit nécessaire et nous

recommandons que les revendications visant la composition soient acceptées.

 

Le président adjoint de la

Commission d'appel des brevets (Canada)

 

J. F. Hughes

 

J'ai révisé la procédure d'examen de la présente demande et je suis d'accord

avec le raisonnement et les conclusions de la Commission d'appel des brevets.

Par conséquent, j'ordonne que la procédure d'examen soit poursuivie en se

fondant sur les revendications modifiées.

 

Le Commissaire des brevets,

 

J.H.A. Gariépy

 

Datée à Hull (Québec)

ce 29e jour d'octobre 1981

 

Agent du demandeur

 

Swabey, Mitchell, Houle & Sher

111, rue Richmond ouest

Pièce 200

Toronto (Ontario)

M5H 2G4

 

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