DECISION DU COMMISSAIRE
Article 2; article 36 - Combinaison inacceptable
La demande porte sur la réparation de tubes faisant partie d'un échangeur de
chaleur. Les revendications ont été rejetées du fait qu'elles définissaient
la combinaison inacceptable d'un outil et d'un pièce à traiter. L'outil
consiste en une pastille détonante et en un dispositif de suppport. La pièce
à traiter, soit l'échangeur de chaleur, doit être réparée à l'aide de l'outil.
Décision finale confirmée.
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La demande de brevet nÀ 298,822 (classe 260145) portant sur une invention
intitulée "Pastille de support" a été déposée le 13 mars 1978. Gordon C.
Larzon, l'inventeur, a cédé ses droits à la Babcock & Wilcox Company.
L'examinateur chargé de la demande a pris une décision finale le 30 novembre
1979 dans laquelle il refuse que soient prises les dispositions ultérieures
en vue de l'obtention d'un brevet. Lors de la révision de la décision de
rejet, la Commission d'appel des brevets a tenu une audience le 19 janvier
1981; le demandeur y était représenté par M. R.A.R. Parsons.
La demande porte sur une combinaison de tubes de support qui fond partie d'un
échangeur de chaleur; les tubes en entourent un autre qui coule et qu'il faut
sceller à l'aide d'une pastille détonante.
L'examinateur rejette dans sa décision finale les revendications 1 à 6 parce
que, à son avis, elle définissent la combinaison inacceptable d'un outil et
d'une pièce à traiter. L'outil se compose d'une pastille détonnante et d'un
dispositif de support. La pièce à traiter, soit l'échangeur de chaleur, doit
être réparée à l'aide de l'outil. L'examinateur affirme (notamment):
............
La revendication 1 définit la combinaison d'un récipient sous
pression et d'un ensemble de pastilles de support insérées dans
certainstubes du récipient. Le récipient sous pression constitue
une pièce à traiter qui doit être réparée. Les pastilles font
partie d'un ensemble d'outils utilisés pour réparer le récipient.
Pendant la réparation, elles sont insérées temporairement dans les
tubes entourant le tube défectueux. Il s'agit d'une combinaison
transitoire qui n'existe que pendant la durée de la réparation.*
La Loi sur les brevets prévoit des dispositions relativement
aux revendications visant une méthode ou un procédé, un produit
résultant d'une méthode ou d'un procédé et un appareil pouvant
mettre en application une méthode ou un procédé ou pouvant être
utilisé dans une méthode ou un procédé. On attire l'attention du
* Traduction
demandeur sur la formule 22 du Règlement régissant les brevets
qui donne des exemples de ce genre de revendication.*
Le demandeur décrit son invention comme suit, à la page 1 de
l'original anglais: "...un appareil et une méthode grâce auxquels
la déformation des tubes et des portions de la plaque tubulaire
adjacents aux tubes, due à la force de l'explosion, est réduite
au minimum". Les revendications 7 à 10 partent sur la méthode
propre à l'invention.*
Si le demandeur considère que son appareil servant à appliquer
la méthode a un caractère inventif, il peut présenter des
revendications visant l'appareil. De même, s'il juge que le
produit réparé comporte un caractère inventif, il peut présenter
des revendications visant ce produit et y inclure les outils
qui font partie du récipient une fois celui-ci réparé.*
Toutefois, en aucune circonstance on ne peut inclure dans une
revendication le récipient sous pression endommagé. Le
récipient ne représente, avant d'être réparé, aucun aspect du
l'invention. Le fait de lui ajouter certains outils qui servent
particularité brevetable.*
Les revendication 1 à 6 sont rejetées parce qu'elles ne
comportent aucune définition d'une combinaison brevetable et
parce qu'elles ne définissent ni un produit ni un appareil
représentant l'invention.*
...
En réponse à la décision finale, le demandeur déclare notamment:
...
On demande également au Commissiare de réviser la décision de
l'examinateur dans laquelle il rejette les revendications 1 à
6 de la présente demande parce que, à son avis, elles portent
sur la combinaison inacceptable d'un outil et d'une pièce à
traiter.*
Nous prétendons que ce rejet ne se fonde sur aucune loi écrite
ne sur aucune loi du droit commun. L'examinateur n'a pas
précisé sur quel article de la Loi sur les brevets ou sur quel
règlement en vertu de la Loi il base son rejet et n'a cité
aucun précésent relativement à ce genre de rejet. Il ne renvoit
qu'à la formule 22 du Règlement régissant les brevets qui donne
des exemples de revendications acceptables. Toutefois, on
soutient que la formule 22 ne présente pas tous les genres de
revendications et l'examinateur semble le reconnaître en admettant
que d'atures formes de revedications, différentes de celles
présentées dans la formule 22, sont admissibles. In tout état
de cause, on ne reconnaît nullement que les revendications rejetées
dnas la présente demande ne correspondent pas aux présédents
mentionnés dans la formule 22, L'appareil utilisé à titre d'exemple
et les revendications visant un article sont des combinaisons de
pièces coopérantes, tout comme c'est le cas dans la présente
demande. Par conséquent, nous affirmons que les revendications
sont conformes aux exigneces du règlement 33.*
De plus, nous affirmons que les revendications rejetées sont
conformes aux exigneces de l'article 36(2) de la Loi sur les brevets
qui stipule (nous soulignons): "Le mémoire descriptif doit se
terminer par uen ou plusieurs revendications exposant distinctement
et en termes explicites les choses ouou combinaisons que le demandeur
conisidère comme nouvelles et dont il revendique la propriété ou le
privilge exclusif." Nous déclarons en outre que l'objet d'invention
des revendications rejetées constitue une invention au sens de
l'article 2 de la Loi sur les brevets étant donné qu'il s'agit d'un
produit industriel nouveau ou améloiré.*
Les agents du demandeur ne connaissent aucun précédent qui fasse
entrevoir que des revendications comme celles qui font l'objet du
rejet puissent être légitimement acceptées dans une demande de
brevet, pas plus qu'une révision du Recueil des pratiques du
Bureau des brevets n'indique que les revendications rejetées font
partie de l'une ou l'autre des catégories que cet ouvrage considère
comme inacceptables. On affirme que les revendications rejetées
portent sur une combinaison véritable en vertu du paragraphe 8.05
du Receuil, et elles ne portemt pas sur une combinaison exhaustive
telle que définie au paragraphe 8.05.01 qui stipule "qu'un inventeur
a le droit de revendiquer son invention, fut-elle un appareil, un
produit ou une méthode, de même que sont environnement immédiat".
(Nous soulignons) Dans le present cas, toutes les parties de la
combinaison revendiquée coopèreent entre elles pour produire un
rêsultat unitaire et réalisable qui ne correspond pas à la somme des
caractétistiques connues des parties. Le récipient sous pression
est une partie essentielle de la combinaison sans laquelle la
coopérationt shouhaitée n'existe pas.*
Il s'agit pour la Commission de savoir si les revendications 1 à sont sont des
revendications de combinaisons acceptable ou non. La revendication 1 se lit
comme suit:
En combinaison avec un récipient sous pression composé d'une plaque
tubulaire insérée transversalement s'ajoute un ensemble de tubes
d'acheminement du liquide disposés à l'intérieur du récipient et
dont les extrémités sont raccordées à laplaque tubulaire, les
tubes compenant des pastilles détonantes placées de manière à
Vitre insérées aux extrémités d'un tube qui coule, un dispositif
de détonation de l'explosif contenu dans les pastilles insérées
en vue de les fixer dans les parois du tube adjacent, scellant
ainsi les extrémités du tube défectueux, l'amélioration comprenant
un support pour la plaque tubulaire et les extrémités des tubes
adjacents au tube défectueux pendant la détonation, le support
comprenant des pastilles de support insérée dans les extrémités
desdits tubes adjacents.*
A l'audience, M. Parsons a soutenu qu'à son avis, les revendications 1 à 6
définissent adéqueatement l'invention décrite dans la divulgation. Il a
également examiné la formule 22 et L'exemple de revendication qu'elle donne,
où l'on définit un outil fonctionnel servant à enfoncer les piquets. Il
poursuit en disant que la présente revendication 1 s'apparente en quelque sorte
à l'exemple de revendication. Nous nous empressons toutefois d'ajouter que
l'emple ne comprend pas 1e piquet dans la combinaison qui, si tel était le cas,
se rapprocherait davantage de la tentative de revendication du demandeur.
Il est évident que si l'objet de l'invention défini dans une revendication ne
comporte aucune utilité brevetable, il s'agit alors d'une revendication
inacceptable en vertu de l'article 2 de la Loi sur les brevets. Nous sommes
d'avis que la loi de décisions des Etats-Unis qui établit et applique les
principes qui régissent le caractère brevetable d'un objet d'invention est,
dans le cas qui nous intéresse une loi valable au Canada. Nous en avons un
exemple dans l'affaire Ex parte Howard 1924 CD 75 où le principe juridique
dénonce comme suit:
Les revendications visant un article portent sur une goutte ou
boule de verre en fusion qui tombe librement. La goutte existe
en elle-même mais seulement lorsqu'elle tombe sur le moule.
Une fois tombée, elle prend une forme différente, se solidifie
aussitôt, et se transforme en un article achevé. Compte tenu
des décisions citées, je crois que c'est pour protéger le
produit fini en tant que produit industriel que la loi sur les
brevets a été élaborée, et non pour protéger quelque chose qui
se produit à une étape précise d'un procédé de fabrication,
quelque chose d'éphémère, adapté pour être utilisé dans la mesure
seulement où il peut faire partie d'une méthode et être modifié
au cours d'étapes ultérieures d'une méthode destinée à produire
un article achevé.*
En tirant cette conclusion, je n'oublie pas le fait que des
rpoduits issus d'étapes intermédiaires d'un procédé ou d'une
methode peuvent en soi être utiles et nouveaux, et par conséquent,
être brevetés comme articles. Ainsi, un toit est un produit
industriel en vertu de l'article 4886 des Statuts révisés, et la
constructeur qui fabrique le toit peut également fabriquer les
tuiles d'argile, les poutres, les boulons, les rivets, etc.,
servant à la fabrication du toit, constituant chacun un produit
intermédiaire qui, s'il est nouveau, est brevetable à titre
de "produit industriel". Toutefois, ces articles sont en soi
utiles et complets par eux-mêmes. Le produit est complètement
achevé. Par contre, la goutte de verre revendiquée ne constitue
qu'un état temporaire en attendant sa transformation en quelque
chose d'autre. Le "produit industriel" n'est pas encore achevé,
le procédé de fabrication n'est pas encore terminé.*
M. Parsons déclare que l'examinateur n'a mentionné aucun article de la Loi que
les revendications enfreignent. S'il s'agit d'une combinaison inacceptable,
l'objet d'envention revendiqué n'est pas conforme à l'article 2 ou à l'article
36 de la Loi sur les brevets. Les revendications 1 à 6 définissent une structure
mais se fondent sur les diverses étapes d'une méthode pour donner un tube scellé
d'échangeur de chaleur. La structure est à une étape de transition et non pas
dans sa forme définitive où les tubes ne coulent pas. Le cas dépend donc de
l'utilité de la structure de transition ou de la combinaison intermédiaire comme
l'a présenté l'examinateur, en vertu de l'article 2 de la Loi sur les brevets.
Il est évidentque tout produit intermédiaire peut ultérieurement être soumis à
un procédé qui en fasse un produit achevé. Cette caractéristique d'un produit
intermédiaire ne le rend pas d'emblée un produit intermédiaire brevetable. On
tient compte dans la définition de l'expression "produit intermédiaire" de
l'utilité d'un traitement ultérieur, mais l'utilité ne confère pas nécessaire-
ment la caractère brevetable d'un produit. L'utilité propre du produit
intermédiaire doit avoir une portée plus large ou bien la divulgation doit
faire valoir l'utilité du produit intermédiaire ou en indiquer l'usage. Le
demandeur a omis cet aspect relativement à l'objet d'invention des revendications
1 à 6. La seule méthode envisagée pas le demandeur dans le but de réaliser
l'invention, celle qui nous paraît d'ailleurs la meilleure, consiste à placer
l'explosif et les pastilles de support dans les tubes où l'on fera par la suite
détoner la charge explosive. Après qu'on ait inséré les pastilles dans
l'échangeur de chaleur, le produit est dans un état de transition avant de
devenir un produit achevé utile plutôt qu'un produit intermédiaire brevetable.
Même si l'on accorde couramment un brevet à des produit intermédiaires commerciaux
qui sont achevés à une étape ultérieure, le présent mémoire descriptif ne décrit
aucune utilité commerciale que pourraient avoir les pastilles d'explosif inertes
et les pastilles de support qui font partie du récipient sous pression. Nous
pouvons donc conclure que la combinaison revendiquée est un produit intermédiaire
de transition dénué de toute utilité commerciale (voir Ex parte Howard, ci-
dessous), Comme nous l'avons mentionné, l'usage transitoire du produite
intermédiaire s'incrit dans les étapes successives ou les étapes de traitement
pendant la fabrication d'un produit achevé utile. Le nouveau produit indus-
trial n'est pas encore fait et le procédé de fabrication n'est pas encore
terminé quand nous sommes en présence de la combinaison de transition d'un
outil et d'une pièce à traiter. A notre avis, la revendication 1 devrait donc
être rejetée "faute de définition d'une combinaison brevetable". Les
revendications subordonnées 2 à 6 définissent plus en détail le dispositif de
support et devraient également être rejetées.
Le président adjoint,
Commission d'appel des brevets, Canada
J.F. Hughes
J'ai révisé la procédure d'examen de la présente demande et j'ai étudié la
recommandation de la Commission d'appel des brevets et je suis d'accord avec
le raisonnement et les conclusions de cette dernière. Par conséquent, je
refuse d'accorder un brevet pour les revendications 1 à 6. Le demandeur dispose
d'une période de six mois au cours de laquelle il peut présenter les modificatifs
appropriés ou en appeler de ma dérision en vertu de l'article 44 de la Loi sur
les brevets.
Le Commissaire des brevets,
J.H.A. Gariépy
Daté à Hull (Québec)
le 5e jour de février 1981
Agent du demandeur
Ridout & Maybee
Centre Richmond-Adelaide, pièce 2300
101, rue Richmond ouest
Toronto, (Ontario)