DECISION DU COMMISSAIRE
PARTIE 2 - MOTEUR APÉRIODIQUE A COURANT CONTINU
Le moteur électrique a été jugé inexploitable. Aucun prototype en
état de fonctionner n'a été fourni.
Décision définitive: Confirmée
***********************
La demande de brevet 312,909 (C1. 310-88), a été déposée le 6 octobre 1978
pour une invention désignée "D.C. Machine" (machine à courant continu).
L' inventeur est William R. Cruikshank. L'examinateur chargé de la
demande a pris une décision définitive le 21 septembre 1979 rejetant la
demande de brevet.
La demande concerne un moteur ou générateur à commutateur. La renvendication 1
se lit comme suit:
Une machine réelle à courant continu constituée des éléments
suivants: bâti de stator, enroulement de stator, rotor
principal, pôles inducteurs de rotor et arbre de rotor; dans
laquelle les inducteurs montés sur le rotor principal sont
de mêmes grandeur et polarité magnétiques et sont orientés
perpendiculairement à la périphérie intérieure du stator;
les conducteurs de l'enroulement du stator étant perpendiculaires
au champ du rotor dans le plan axial, le noyau du stator fixé
entre les deux bâtis latéraux du stator ayant un ou plusieurs
étroits éléments rapportés fait d'une matière non magnétique
placés entre le noyau du stator et chaque bâti latéral: le rotor
est fixé à l'arbre du rotor mais il en est séparé au moyen d'une
bride montée à chaque extrémité et solidement fixée à l'arbre
au moyen d'un ou de plusieurs éléments en matière non magnétique
placés entre chaque bride et les extrémités du rotor, le centre
du rotor étant percé d'un trou d'un diamètre légérement supérieur
à celui de l'arbre; la machine est munie de dispositifs permettant
d'appliquer les tensions et courants continus à l'enroulement ou
de les enlever, elle comporte des dispositifs de refroidissement et
de lubrification et d'autres dispositifs permettant de fixer la
machine à des supports fixes.*
Dans sa décision finale, l'examinateur a rejetê la demande parce que:
a) l'exposé de l'invention est insuffisant et ne répond pas
aux exigences de l'article 36, alinéa l, de la Loi sur
les brevets;
b) l'invention alléguée est inexploitable et ne répond pas
aux exigences de l'article 2 de la Loi sur les brevets
parce qu'elle est d'aucune utilisé.*
En ce qui concerne l'insuffisance de l'exposé de l'invention, l'examinateur
a fait valoir ce qui suit (en partie):
Dans sa dernière lettre, le demandeur a expliqué certaines
choses, entre autres, il prétend que par "machine réelle
à courant continu", il voulait dire "machine homopolaire ou
apériodique". L'examinateur n'était pas en mesure de le
de~iner parce que la machine décrite et illustrée aux
figures 1, 2, 3 et 4 n'est pas du tout apériodique. Néanmoins,
le présent exposé de l'invention est jugé tout aussi insuffisant,
incomplet et embrouillé qu'auparavant même si toutes les
modifications proposées dans la dernière lettre ont été faites.
On ne sait toujours pas comment la machine proposée
pourrait produire du courant continu sans un commutateur, si
les deux enroulements, tant du stator que du rotor, sont
bobinés (voir le présent exposé, page 3, lignes 15 à 20).
On ne sait toujours pas comment un "rotor à cage d'écureuil",
élément typique d'un moteur à courant alternatif, pourrait
avoir une utilité quelconque dans une machine à courant continu.
Le demandeur renvoie l'examinateur à la page 5A, lignes 24 et 25,
pour une explication. Ces deux lignes, toutefois, ne donnent
absolument aucune explication. On ne sait toujours pas comment
un enroulement à cage d'écureuil pourrait être intégré à la
présente machine. Sera-t-il dans le rotor ou dans le stator?
Comment pourra-t-il produire une tension et un courant s'il est
stationnaire (voir l'exposé de l'invention, page 1, lignes 21, 22
et 23) et s'il ne se déplace pas par rapport au champ magnétique.
Le demandeur semble connaître de nom seulement les enroulements
à cage d'écureuil, sans en comprendre l'utilité et les fonctions.
Le présent exposé d'invention est incomplet et vague parce qu'il
ne dit pas comment les bagues collectrices ou les collecteurs
de courant sont fixés à la machine. En particulier, on ne voit
pas clairement comment le courant pourrait être fourni à un rotor
à cage d'écureuil ou comment ce dernier pourrait en fournir. Cette
question est encore plus importante dans le cas d'une machine
homopolaire parce qu'avec une telle machine, le prélèvement du
courant pose un problème très ardu (voir l'exemplaire du manuel
technique fourni par le demandeur). A cause de tout ce qui
précède, une personne versée dans la technique ne pourrait pas
fabriquer une machine utile en suivant uniquement l'actuel
exposé incomplet du demandeur.
Dans sa dernière lettre, le demandeur a proposé de modifier
partout dans l'exposé de son invention l'expression "enroulement
blindé" par "enroulement partiellement blindé". Cependant, on ne
sait toujours pas pourquoi les enroulements doivent être blindés,
ce qu'on y gagne et quel matériel est utilisé pour le blindage.
(Voir l'exposé de l'invention page 1, ligne 22, etc.)
Le rôle des éléments rapportés en matière non magnétique reste
toujours obscur. Dans sa lettre, au paragraphe 5(b), le demandeur
dit que l'élément non magnétique 3f rapporté a "pour but de
confiner le flux à un ensemble particulier (autant que possible)".
Mais ce n'est pas le cas. D'après les lignes 2 à 5 de l'exposé
de l'invention, page 4, le tracé normal du flux magnétique dans
la figure 2 se fait à partir du noyau interne 4A vers les
anneaux 3E. L'élément interposé 3f ne fait qu'interrompre ce
tracé du flux magnétique et rend la machine inefficace, sinon
inutile.
I1 est jugé que le présent exposé de l'invention ne décrit
pas "d'une façon exacte et complète l'invention et son
application ou exploitation, telles que les a conçues
l'inventeur dans des termes complets, clairs, concis et
exacts qui permettent à toute personne versée dans la
technique... de confectionner, construire, composer ou
utiliser l'objet de l'invention", comme l'exige l'article 36,
alinéa 1, de la Loi sur les brevets.*
En ce qui concerne l'inexploitabilité de l'invention, l'examinateur a
déclaré (en partie):
A la première page de sa dernière lettre, au paragraphe 3,
le demandeur dit: "I1 serait plus approprié d'appeler
cette machine apériodique ou homopolaire...". Voilà qui
est une donnée radicalement nouvelle parce que la machine
divulguée et illustrée ne ressemble pas du tout à une machine
apériodique et ne peut pas fonctionner selon un mode apériodique.
...
Pour une autre raison encore, la machine du demandeur ne peut
pas fonctionner selon un mode apériodique. Dans un champ
magnétique homopolaire uniforme, le rotor doit être fait d'un
seul conducteur rectiligne. I1 ne peut pas être bobiné,
c'est-à-dire disposé en boucles. Si c'était le cas, les tensions
induites dans une moitié de l'enroulement s'opposeraient aux
tensions induites dans l'autre moitié, ce qui donnerait une
sortie de puissance nulle. Pour cette raison, une machine
homopolaire comportant un rotor bobiné ne peut pas fonctionner.
C'est toutefois exactement ce que présente le demandeur, une
machine avec un stator bobiné (voir page 3 de l'exposé,
lignes 10 et 11) et un rotor bobiné (page 3, lignes 19 et 20)...
Ainsi donc, si la machine du demandeur n'est pas homopolaire,
il s'agit toujours de la même machine analysée par l'examinateur
à la page 4 de la dernière décision. Les trois caractéristiques
inhabituelles A, B et C ont été condensées à partir du présent
exposé et des dessins, et l'invention alléguée est en conséquence
de nouveau jugée inexploitable pour les raisons suivantes:
A. La machine du demandeur, ayant un rotor bobiné, ne peut
pas fonctionner à partir d'une alimentation continue ou
produire un courant continu parce qu'elle n'a pas de
commutateur, soit pour exciter uniquement certains
enroulements qui se trouvent dans l'entrefer du moteur,
ou pour redresser la sortie d'un générateur, selon le
cas.
B. Si tous les pôles du stator faisant face au rotor avaient
la même polarité et si tous les pôles du rotor faisant
face au stator avaient la même polarité opposée, alors
chaque pôle nord correspondrait uniquement à un pôle sud,
et le moteur ne produirait aucun couple. Aucune tension
ne serait produite dans un générateur parce qu'aucun flux
magnétique se serait coupé.
C. Si les enroulements du rotor étaient protégés d'une façon
quelconque, en entier ou en partie, du flux magnétique
du stator de façon à éliminer ou à réduire la force
contre-électromotrice, aucun flux ne pourrait traverser
les conducteurs, ce qui donnerait peu ou pas de tension
dans un générateur et produirait peu ou pas de couple
dans le cas d'un moteur.
Il est par conséquent jugé de nouveau que le dispositif décrit par
le demandeur est inexploitable et d'aucune utilité.*
En réponse à la décision définitive, le demandeur déclare (en partie)'
a) Les objections soulevées concernant l'insuffisance de l'exposé
ne sont pas valables parce que les éléments de la machine mis
en cause sont bien connus d'une personnes versée dans la technique,
connue par exemple les bagues collectrices.
b) Les objections soulevées concernant l'exploitabilité ne sont pas
valables parce que le fonctionnement des machines décrites et la
disposition de leurs éléments ne sont pas comme le pense
l'examinateur et parce qu'il n'a pas correctement appliqué les
principes se rapportant à ces machines.*
Nous avons révisé l'exposé de l'invention et nous avons tenu compte
des arguments que représente le demandeur dans sa lettre du 18 décembre 1979
en réponse à la décision finale. A la page 2 de cette lettre, le demandeur
déclare (soulignement ajouté):
Une machine apériodique est par définition une machine dans
laquelle i1 n'y a pas inversion de polarité des pôles inducteurs,
de sorte que les machines que j'ai décrites sont nettement
apériodiques. Les machines présentées dans le Standard Handbook
des techniques en électricité sont essentiellement apériodiques
et UNIPOLAIRES (elles n'ont qu'un seul pôle constitué de bobines
enroulées concentriquement autour de l'arbre sauf sur le stator).
Les machines que j'ai décrites son apériodiques mais NON unipolaires.*
La définition ci-après d'un générateur homopolaire ou d'une machine
homopolaire est tirée de l'ouvrage "McGraw-Hill Dictionary of Scientific
and Technical Terms", 2e édition, 1978, D.N. Lapedes, rédacteur en chef
Un fénérateur à courant continu dans lequel les pôles présentés
à l'induit ont tous la même polarité de sorte que la tension
produite dans des conducteurs actifs a la même polarité en tout
temps, un courant continu est ainsi produit, sans commut~tion,
aussi connu sous le nom de machine apériodique; machine homopolaire,
machine unipolaire.*
Une machine apériodique est donc, par définition ci-dessus des machines
unipolaire.
Il s'agit dès lors pour la Commission de décider sa le demandeur a conçu
une nouvelle invention qui fait que la définition ci-dessus des machines
apériodiques devient périmée comme le laisse entendre le demandeur, ou
s'il y a dans les machines proposée une erreur quelconque qui les rend
inexploitables.
Pour répondre à cette question, nous répétons ci-après le paragraphe
suivant de la décision finale:
Pour une autre raison encore, la machine du demandeur ne
peut pas fonctionner selon un mode apériodique. Dans un
champ magnétique homopolaire uniforme, le rotor doit être
fait à une seul conducteur rectiligne. Il ne peut pas être
bobiné, c'est-à-dire disposé en boucles. Si c'était le cas,
les tensions induites dans une moitié de l'enroulement
s'opposeraient aux tensions induites dans l'autre moitié,
ce qui donnerait une sortie de puissance nulle. Pour
cette raison, une machine homopolaire comportant un rotor
bobiné ne peut pas fonctionner. C'est toutefois exactement
ce que présente le demandeur, une machine avec un stator
bobiné (voir page 3 de l'exposé, lignes 10 et 11) et un
rotor bobiné (page 3, lignes 19 et 20).*
En réponse à ce paragraphe, le demandeur a présenté à la page 3 de
sa lettre l'argument suivant:
Conducteur simple rectiligne.
Comme les pôles inducteurs sont sur un seul côté de l'enroulement
ou de l'induit, qu'est-ce qui induirait une tension dans le
côté opposé dans la direction opposée? Le flux magnétique change
de direction passant d'un tracé perpendiculaire à un tracé
parallèle.*
Nous versons au dossier parce qu'il est pertinent l'article de A.M. Gray
intitulé "Homopolar Induction Machine" et publié dans le Canadian Electrical
News du 1er mars 1913. L'article traite des machines homopolaires
impossibles, et explique l'objection de l'examinateur et la question du
demandeur en ces termes:
Beaucoup d'efforts et de temps ont été consacrés à la conception
d'une machine homopolaire qui n'exigerait pas de curseurs. Le
résultat habituel de ces tentatives donne une machine
semblable à celle présentée schématiquement à la figure 2,
le fonctionnement de cette machine est fondé sur une erreur,
et peut-être même deux erreurs.
<IMG>
Si l'on fait passer un courant continu autour de la bobine
inductrice B, un champ magnétique se produit comme on le
suppose, ce qui peut être exact ou non, mais ceci n'a jamais
été prouvé expérimentalement. L'hypothèse est la suivante:
à mesure que le rotor C tourne, le champ magnétique tourne
avec lui et les lignes de force traversent le conducteur fixe ab
et y induisent une tension, on présume également que, vu que
le conducteur be passe par une grande ouverture et conséquemment
qu'il ~ trouve ainsi dans un champ magnétique de faible intensité,
less lignes de force glissent autour du conducteur d'une façon
ou d'une autre sans le traverser, ou que si elles le traversent,
la tension qui y est mdmte sera très faible à cause de la
faible densité du flux magnétique dans l'entrefer.*
L' article poursuit pour dire que la dernière hypothèse est fausse.
Bien que la densité de flux magnétique dans l'entrefer soit faible, les
lignes de force progressent très rapidement et toutes ces ligne de force
sont traversées par un conducteur dans l'entrefer comme le ferait un
conducteur noyé dans le fer. Le demandeur a indiqué dans la lettre
que l'expression utilisée pour la tension induite est E : BLV
A la figure 2 de (de l'article), tout ce même flux magnétique
est coupé par le conducteur be de même que par le conducteur ab,
et les tensions induites dans ces conducteurs s'équivalent
et sont opposées, de sorte que la tension résultante mesurée
aux bornes ac est nulle.*
A la figure 2, nous voyons que le flux magnétique change également de
direction, passant de la perpendiculaire à la parallèle comme le soutient
le demandeur. En utilisant la règle bien connue de la main droite,
on constate que la tension induite dans la ligne ab annule la tension
induite dans la ligne bc. En conséquence, nous devons conclure que la
définition que donne le dictionnaire d'une machine apériodique doit être
maintenue sans modification, et qu'en fait les machine du demandeur ne
peuvent pas fonctionner. Il y a également lieu de souligner que le demandeur
ne semble pas avoir un modèle de ses machines en état de fonctionner
bien que l'examinateur en ait fait la demande (paragraphe 8 de la décision
de 23 juillet 1979). Cela aussi nous porte à croire que l'invention du
demandeut n'est qu'une conception théorique qui n'a pas été réalisée
vous une forme concrète (article 28, alinéa 3, et article 40).
Pour appuyer davantage notre conclusion, nous retournons à la page 1
de l'exposé de l'invention du demandeur où il est dit (en partie).
L'enroulement du stator peut être bobiné, à cage d'écureuil
on blindé, avec une tension continue appliquée aux enroulements
du stator ou tirée de ces derniers.*
De même, la revendication 1 (12, 13 et 14) contient l'expression
... avec un dispositif permettant d'appliquer des tensions
et courants continus à la machine et d'en prélever...*
La figure 1 des dessins du demandeur illustre un stator fixe. Vu que le
stator ne se déplace pas, ce dernier ne nécessite aucun balai ou collecteur.
Parce qu'elle est pertinente, nous citons la référence ci-après intitulée
"The Unipolar Generator", publiée dans la revue Westinghouse Engineer,
de mars 1956, volume 16, pages 56-61:
Rares sont les jeunes concepteurs de machines à courant
continu qui n'ont pas tenté de tourner l'unipolaire
"à l'envers" de façon que les éléments fénérateurs de
tension et porteurs de courant soient sur le stator.
Cela permettrait d'éviter tous les problèmes relatifs
aux balaie et aux collecteurs. Toutefois, jusqu'à
maintenant, toutes ces tentatives ont échoué. Comme
l'a dit M. B.G. Lamme, "La théorie du flux magnétique est immuable".*
Nous croyons qu'il n'y a pas lieu de traiter plus longuement du sujet.
De nombreuses personnes ont déjà tenté de trouver des solutions aux
problèmes que le demandeur a voulu résoudre. Toutes les tentatives
en vue de concevoir des machines apériodiques dont les éléments
générateurs de tension et porteurs de courant seraient fixés sur le
stator échouent parce qu'elles sont fondées sur des erreurs comme il
a été expliqué plus haut.
Nous avons pris en considération tous les arguments présentés et avons
examiné la demande avec soin. Le projet de machines apériodiques du
demandeur est fondé sur une théorie fausse. En conséquence, nous
appuyons le rejet de la demande par l'examinateur en vertu de l'article 2
de la Loi sur les brevets pour cause d'inexploitabilité.
Le Président de la Commission d'appel des brevets Canada
C.A Asher S Kot
Membre de la Commission
J'ai examiné le dossier de la présente demande et la recommandation
de la Commission. Je suis d'accord avec le raisonnement et les conclusions
de la Commission. En conséquence, je refuse la demande de brevet.
Le Commissaire des brevets
J.H.A. Gariépy
Agent du demandeur
William R. Cruikshank
5300 rue Tobin, app 9
Halifax, (Nouvelle-Ecosse)
B3H 1S2
Daté à Hull (Québec)
ce 20e four de mars 1980