DECISION DU COMMISSAIRE
REVENDICATIONS FONCTIONNELLES
Les revendications décrivant un résultat plutôt que les étapes menant audit
résultat ne sont pas acceptables. La Commission propose un modèle de reven-
dication acceptable.
Décision finale: Confirmée
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La demande de brevet 259168 (classe 13-17) a été déposée le 16 août 1976, et
l'invention revendiquée s'intitule "Procédé de fabrication de flans". Les
inventeurs Arthur G. McMullen et al ont cédé leurs droits à Sherritt Gordon
Mines Limited. L'examinateur responsable de l'étude de la demande a rendu une
décision finale le 12 janvier 1978 dans laquelle il refuse au demandeur le
droit de poursuivre les démarches en vue de l'obtention d'un brevet. Au moment
de la révision du rejet, la Commission d'appel des brevets a tenu une audience
le 13 novembre 1979. M. R. Delbridge représentait alors le demandeur.
La demande porte sur un procédé de fabrication de flans en vue de la frappe de
pièces de monnaie. Pour obtenir la finition désirée, un noyau de métal bon
marché est recouvert d'une couche d'un autre métal par galvanisation. On a
découvert qu'il est possible d'obtenir un dépôt plus épais sur la tranche que
sur la face du noyau métallique, si. le dépôt galvanoplastique s'opère dans un
baril et sous certaines conditions. Cette technique s'avère avantageuse parce
que la tranche d'une pièce de monnaie est la partie qui subit le plus d'usure.
La revendication 1 de la demande se lit comme suit:
Un procédé de fabrication de flans en vue de la frappe
de pièces de monnaie, y compris: fournir des noyaux de
métal, chaque noyau de métal comportant des faces à peu
près planes, situées de part et d'autre d'une tranche
commune; verser lesdits noyaux de métal à l'intérieur d'un
récipient perforé; placer ledit récipient dans une cuve de
galvanisation; recouvrir les noyaux de métal d'un revêtement
métallique tout en déplaçant le récipient obliquement par
rapport à un axe horizontal, jusqu'à ce que le revêtement
métallique atteigne une épaisseur minimale d'environ 0.05 mm
sur chaque face de tous les noyaux de métal, et une épaisseur
d'au moins 2 à 4 fois supérieure à celle de la face pour ce
qui touche l'épaisseur du revêtement de chaque tranche de
tous les noyaux de métal, et retirer les noyaux de métal
recouverts du récipient.
Dans sa décision finale, l'examinateur rejette toutes les revendications de la
demande parce qu'il s'agit de revendications fonctionnelles à l'étape de
l'invention. Il déclare que le procédé décrit dans les revendications ne peut
aboutir au résultat escompté à moins de respecter certaines conditions. Entre
autres, il précise:
Il se pose une question à savoir s'il suffit d'indiquer
tout simplement dans les revendications qu'il faut laisser
les pièces à l'intérieur du baril jusqu'à ce que l'épaisseur
du revêtement atteigne 0.05 mm sur chaque face, et une
épaisseur d'au moins 2 à 4 fois supérieure à celle de la
face pour ce qui touche l'épaisseur du revêtement de la
tranche de chacune des pièces. La réponse se trouve dans
la divulgation en ces termes "Le dosage du revêtement de
nickel sur chacune des faces du noyau de métal par rapport
à celui du revêtement de nickel sur la tranche du noyau de
métal est essentiellement établi en fonction du rapport qui
existe entre le diamètre d'un noyau de métal et le diamètre
du récipient". (original anglais, page 4, lignes 1 à 5).
Cet extrait démontre que les revendications sont fonction-
nelles à l'étape de l'invention parce qu'elles ne font que
suggérer l'idée plus ou moins évidente de produire un
revêtement plus épais, mais elles ne fournissent aucune
description du procédé en vertu duquel on peut aboutir
audit résultat." (nous soulignons)
Dans sa réponse à la décision finale, M. Delbridge prétend qu'à partir des
données fournies dans la divulgation de la demande, un spécialiste en la matière
peut facilement poursuivre des expériences dans le but de déterminer le diamètre
approprié du récipient en toutes circonstances. Il profit également de l'occa-
sion pour présenter un affidavit rédigé par un certain M. A.R. Moore à l'emploi
de Canadian Hanson Limited. Ce dernier a beaucoup d'expérience dans le domaine
du placage à l'intérieur d'un baril et, à ce titre, il déclare que la galvani-
sation à l'intérieur d'un baril n'est pas une pratique commerciale habituelle
parce que si l'on désire obtenir un revêtement par placage dont l'épaisseur est
supérieure à 0.01 mm, cette technique exige beaucoup de temps.
La Commission doit trancher une seule question: les revendications décrivent-
elles adéquatement l'invention?
Au cours de l'audience, M. Delbridge a abordé la question de l'évidence.
Toutefois, nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire d'analyser cet aspect de
sa plaidoirie. Dans sa décision finale, l'examinateur ne s'appuie pas sur ses
objections antérieures afférentes à l'évidence. L'examinateur et les membres
de la Commission sont convaincus que la présente demande comporte une invention
brevetable.
Le demandeur attire l'attention sur le fait que le placage des flans se fait
au cours d'une opération de galvanisation à l'intérieur d'un baril. Nous
constatons que la revendication 1 actuelle ne parle pas du placage à l'intérieur
d'un baril. Nous estimons qu'il s'agit d'un élément essentiel qu'il y aurait
lieu de préciser dans la revendication. Les autres éléments importants sont:
un récipient perforé fabriqué à partir d'une matière inerte ainsi qu'une électrode
flexible en forme de tige, installée à l'intérieur dudit récipient.
Dans sa décision finale, l'examinateur déclare que la revendication est fonction-
nelle parce qu'elle décrit un résultat plutôt que les étapes menant audit résultat:
un revêtement métallique d'une épaisseur minimale de 0.05 mm sur chaque face, et
d'une épaisseur d'au moins 2 à 4 fois supérieure sur la tranche de chaque pièce.
Pour aboutir au résultat escompté, il est écrit à la page 4 de la divulgation
(original anglais) que le rapport qui existe entre le diamètre de la pièce et le
diamètre du récipient constitue un élément primordial. Par conséquent, nous
estimons qu'il y aurait lieu d'inclure cet aspect du procédé dans la revendication.
Cependant, nous ne croyons pas qu'il s'agisse d'un rapport fixe mais plutôt d'une
variante en fonction du diamètre de la pièce et de celui du baril. Il n'est donc
pas nécessaire d'indiquer un rapport exact dans la revendication. Compte tenu
des déclarations faites lors de l'audience, nous présumons que cette question
inquiétait vivement M. Delbridge, et qu'elle a provoqué le débat sur le caractère
fonctionnel de la revendication.
La restriction afférente à des électrodes flexibles en forme de tige n'a pas
été abordée dans la revendication, et d'après ce qui est écrit à la ligne 20 de
la page 3 (original anglais) il s'agirait d'un autre élément de l'invention.
Au cours de l'audience, M. Delbridge nous a fait savoir qu'il était disposé à
modifier les revendications de manière à préciser l'invention. Nous lui suggérons
donc d'inclure ces deux caractérisitiques dans les revendications. Dans le but
de préciser nos intentions, nous lui proposons la revendication suivante qui, à
notre avis, devrait représenter le fondement d'une revendication étendue
acceptable.
1. Un procédé de fabrication de flans en vue de la frappe de
pièces de monnaie, qui regroupe les opérations suivantes: dépo-
ser des noyaux de métal à l'intérieur d'un récipient perforé
inerte pour la galvanisation, ledit récipient étant muni d'une
électrode flexible; placer ledit récipient dans une cuve de
galvanisation; poursuivre les opérations du dépôt galvanoplastique
tout en déplaçant le récipient obliquement par rapport à un axe
horizontal, jusqu'à ce que le revêtement métallique atteigne une
épaisseur minimale d'environ 0.05 mm sur chaque face de tous les
noyaux de métal, et une épaisseur d'au moins 2 à 4 fois supérieure
à celle de la face pour ce qui touche l'épaisseur du revêtement de
la tranche, le rapport entre les deux épaisseurs étant proportion-
nel au rapport qui existe entre le diamètre du noyau de métal et
le diamètre du récipient de galvanisation, à la densité du courant,
et au nombre de flans à l'intérieur du récipient.
Nous sommes convaincus que le rejet des revendications au dossier est justifié
par le fait que ces dernières ont une portée plus grande que l'invention, mais
nous recommandons toutefois que soit acceptée la revendication proposée, ou toute
revendication englobant les restrictions qui y ont été incorporées. Les reven-
dications subordonnées 2-7 et 9-10 pourraient également suivre à condition de
dépendre de revendications étendues et recevables. Il en est de même pour la
revendication 8 actuelle, c'est-à-dire qu'elle nécessite les mêmes modifications
que celles préconisées dans le cas de la revendication 1.
Le président de la
Commission d'appel des brevets
S.D. Kot
G.A. Asher Membre
Après analyse du dossier de la présente demande, et des recommandations formulées
par la Commission d'appel des brevets, je rejette, en vertu des présentes, les
revendications 1 à 10 inclusivement. Le demandeur dispose d'un délai de six
mois pour annuler les revendications, et les amender conformément aux propositions
de la Commission, ou interjeter appel en vertu de l'article 44.
Le Commissaire des brevets,
J.H.A. Gariépy
Datée à Hull (Québec)
ce 16e jour de janvier 1980
Agent du demandeur
Fors & Piper
8 King St. E., pièce 2010
Toronto (Ontario)