DECISION DU COMMISSAIRE
Revendication imprécise - Régulateur de la croissande des plantes
L'une des revendications axées sur le procédé fait allusion à la dose de
régulateur de croissance utilisée, en ces termes: "... une dose suffisante
pour engendrer chez la plante, l'effet souhaité....". Dans une revendication,
les expressions quantitatives comme une "dose suffisante", etc. peuvent être
acceptées à condition que la divulgation précise de quelle dose il s'agit,
ou que les spécialistes en la matière connaissent la quantité indiquée.
Décision finale: rejetée
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La demande 272797 (classe 260-578.5) déposée le 28 février 1977 s'intitule
"Succédané de benzophenones". Osamu et al en sont les inventeurs. L'examinateur
responsable de l'étude de la demande a rendu une décision finale le 15 mars 1978
dans laquelle il refuse au demandeur la possibilité de poursuivre les démarches
pour l'obtention d'un brevet.
La demande porte sur un succédané de benzophenones, soit un régulateur de la
croissance des plantes.
Dans sa décision finale, l'examinateur a rejeté les revendications 6 à 10. Les
revendications 6 à 9 portent sur la composition tandis que la revendication 10
porte sur un "mode d'emploi". Dans sa réponse à la décision finale, le
demandeur a retranché les revendications 6 à 10. Le contenu de la revendication
10 originale a été modifié, et représenté sous le couvert de la nouvelle reven-
dication 6. En raison des modifications apportées, nous supposons que les
revendications 7 et 8 devraient être subordonnées à la revendication 6 plutôt
qu'à la revendication 10.
Par conséquent, le seul point en litige demeure la revendication 6 axée sur le
mode d'emploi. Dans sa décision finale, l'examinateur a déclaré que la reven-
dication 10 "faisait l'objet d'un rejet parce qu'elle n'était pas assez précise"
comme le stipule l'article 36 de la Loi sur les brevets.
Dans sa réponse à la décision finale, le demandeur soutient que la revendication
10 modifiée "correspond exactement aux autres revendications sur le mode d'emploi
présentées dans des cas semblables de régulateurs de la croissance des plantes,
et pour lesquelles le Bureau des brevets donne régulièrement son assentiment".
Il déclare également que "la revendication précise le mode d'emploi du composé
actif tout en faisant connaître le résultat, à partir de la description donnée
à la page 1 du mémoire descriptif."
I1 incombe à la Commission de décider si, dans sa teneur modifiée, la reven-
dication 6 parvient à surmonter le manque de précisions sur lequel est fondé le
rejet de la décision finale. La revendication 6 se lit comme suit:
Le procédé de régulation de la croissnace des plantes qui
comprend l'application, sur la plante ou dans son aire
d'habitation, de l'un ou de plusieurs composés de la
formule (1a), de la manière décrite dans la revendication
1, en quantité suffisante pour engendrer au moins un des
effets inhibiteurs nécessaires: inhibition de la germina-
tion de la graine, inhibition de l'élongation de la racine
ou inhibition de la croissance de la plante (y compris
aligae).
Dans sa décision finale, il semble que l'examinateur ait rejeté la revendication
10 parce que le demandeur "n'y avait pas précisé la dose" utilisée. Dans cette
même revendication, le demandeur y fait allusion en ces termes ".., une dose
suffisante pour engendrer chez la plante, l'effet souhaité...",
Bien entendu, l'objet visé par une revendication est de définir l'importance du
monopole de l'invention pour laquelle la protection est accordée. L'article
36(2) stipule que celle-ci doit exposer ".., distinctement et en termes expli-
cites...". En vertue de l'article 36(1), "Dans le mémoire descriptif, le demandeur
doit décrire d'une façon exacte et: complète l'invention et son application ou
exploitation, .., et exposer clairement les diverses phases d'un procédé, ou le
mode de construction, de confection, de composition ou d'utilisation d'une
machine, d'un objet manufacturé ou d'un composé de matières, dans des termes
complets, clairs, concis et exacts ... qui permettent de confectionner, construire,
composer ou utiliser l'objet de l'invention...". En d'autres termes, le mémoire
descriptif doit renfermer une description (compte rendu détaillé) tandis que les
revendications doivent définir (préciser l'importance du monopole) l'invention.
Dans l'affaire Riddel v Patrick Harrison (1956-1960) il a été déclaré ce qui suit:
"un inventeur n'est pas tenu de restreindre ses revendications à l'objet précis
de la description donnée dans le mémoire descriptif .., tout en respectant le cadre
de son invention, il lui est possible de présenter une revendication aussi éten-
due que le permettent les connaissances que possèdent habituellement les spécialistes
en la matière...".
Après l'avoir analysée attentivement, la Commission estime que la divulgation
renferme une description suffisante d'une invention qui est "décrite de façon
exacte et complète" ainsi que de son "application et exploitation", y compris
les "gammes de dosage" censées produire les résultats escomptés ou l'effet désiré.
La Commission reconnaît qu'il existe un principe en vertu duquel les expressions
comme une "quantité efficace" ou "une dose suffisante pour engendrer l'effet
souhaité" peuvent être acceptées à condition que la divulgation précise de quelle
"dose" il s'agit, ou que les spécialistes en la matière connaissent la quantité
indiquée.
Le principe énoncé ci-dessus est corroboré par l'affaire Burton Parsons v Hewlett
Packard (1975) S.C. 17 C.P.R. 2e 97). Dans ce jugement, nous constatons qu'une
partie de la revendication 17 se lit comme suit: "... renfermant une quantité
suffisante de sel dont le pouvoir d'ionisation est très élevé pour assurer une
bonne conductivité de l'électricité..."
Par conséquent, la Commission est convaincue que la revendication 6 définit
l'étendue du monopole de l'invention en des termes "explicites" et qu'elle
n'enfreint pas les dispositions de l'article 36 de la Loi sur les brevets.
La Commission recommande que le motif de rejet de la revendication 10 axée sur
le procédé (la nouvelle revendication 6) soit retiré. L'autre motif de rejet
a été éliminé par suite de l'apport de modifications.
Le président adjoint de la
Commission d'appel des brevets
J.F. Hughes
J'ai étudié la présente demande, et analysé la recommandation formulée par la
Commission. Je souscris aux conclusions de la Commission, et par conséquent,
je retire le motif de rejet. La demande est par le fait même renvoyée à
l'examinateur pour exécution.
Le Commissaire des brevets,
J.H.A. Gariépy
Datée à Hull (Québec)
ce 19e jour de juin 1979
Agent du demandeur
Fetherstonhaugh & Co.,
C.P. 2999, Terminus D
Ottawa, (Ont.)
K1P 5Y6