DÉCISION DU COMMISSAIRE
Evidence: Moteur à combustion interne
L'invention revendiquée porte sur un moteur doté d'une paroi cylindrique
transparente, et conçu à des fins d'enseignement. Les pièces mobiles à l'inté-
rieur du moteur sont rendues visibles pendant son fonctionnement. Le rejet de
certaines des revendications est confirmé.
Décision fina;eL Confirmée, mais les revendications modifiées sont acceptées.
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La demande de brevet nÀ 120,868 (classe 35-19) a été déposée le 18 août 1971, et
l'invention revendiquée s'intitule "Moteur à combustion interne avec paroi
transparente". Charles W. Haldeman et al sont les inventeurs mais ils ont cédé
leurs droits à Megatech Corporation. L'examinateur responsable de la demande a
rendu une décision finale le 12 janvier 1977 dans laquelle il refuse au demandeur
la possibilité de poursuivre les démarches pour l'obtention d'un brevet. La
Commission d'appel des brevets a analysé le rejet, et tenu une audience le 11
octobre 1978. M. G. Houle représentait alors le demandeur. Le docteur C.W. Halde-
man, l'un des inventeurs, y assistait aussi.
La demande porte sur un moteur à combustion interne et touche plus particulièrement
les moteurs dotés de parois cylindriques transparentes, et conçus à des fins
d'enseignement. Les pièces mobiles du moteur sont rendues visibles pendant son
fonctionnement. Voir figure 3 ci-dessous:
<IMG>
Dans la décision finale, l'examinateur a rejeté les revendications 1 à 9, 11 à
15 alléguant "l'absence d'éléments brevetables par rapport aux antériorités
citées et aux connaissances notoires dans ce domaine."
Brevets des Etats-Unis
2,919,688 5 janvier 1960 Bowditch et al
2,751,146 19 juin 1956 Moseley
3,358,414 19 décembre 1967 MacMillan
3,315,581 25 avril 1967 Halpin et al
2,992,052 11 juillet 1961 De John
Catalogue-Perry School Supplies Ltd., no de nomenclature 1060
Glass Motor (Envoyé au Bureau des brevets le 27 janvier 1969 et
disponible dans Cl. 35-19 (anciennement C1. 35-10)).
Internal Combustion Engines - Lester C. Lichty - 6e édition,
1951, p. 135.
Les antériorités Moseley et MacMillan traitent de l'agencement d'un piston et
d'une paroi cylindrique pour les compresseus d'air; les pistons sont pourvus
de rainures dans lesquelles on a introduit des bagues de plastique pour une
lubrification à sec. L'antériorité Bowditch et le catalogue cité font mention,
au moyen d'une illustration, du fonctionnement interne des pièces mobiles d'un
moteur. De John fournit la description d'un piston dont l'obturation automatique
est rendue possible par l'utilisation d'un clapet flexible, tandis que l'anté-
riorité Halpin porte sur les diverses possibilités de lubrification automatique.
Dans sa décision finale, l'examinateur a exposé explicitement les motifs de
rejet des revendications, pour absence d'éléments brevetables. Il déclare
notamment dans le cas de la revendication no 1, ce qui suit:
La revendication no 1 est rejetée pour absence d'élément brevetable
par rapport à l'antériorité Bowditch et al ou à la référence donnée
dans le Perry Catalogue lorsqu'ils sont associés conjointement aux
connaissances notoires dans ce domaine ou à l'une des antériorités
suivantes: Moseley, MacMillan ou Halpin. Compte tenu de l'anté-
riorité Bowditch et du Perry Catalogue, l'incorporation de matériaux
transparents aux pièces mobiles dans le but de voir le fonctionnement
du mécanisme est une technique connue. Bien que le moteur de verre
dont il est fait mention dans le catalogue Perry ne puisse être utilisé
à des fins pratiques comme celui de Bowditch, l'utilisation de
dispositifs visuels visant à illustrer le fonctionnement d'une machine
est connu depuis longtemps. D'ailleurs, Bowditch et Perry l'ont mani-
festement démontré. Qui plus est, à la première colonne, lignes 23 à
30, Bowditch explique que les fenêtres d'observation aménagées sur la
culasse étaient connues depuis longtemps lors de l'obtention de son
brevet (janvier 1960). Même en faisant abstraction de l'antériorité
Bowditch, un mécanicien spécialisé dans ce domaine aurait éprouvé peu
de difficulté à concevoir la maquette d'un moteur à combustion interne
doté de parois transparentes, à partir de données connues sur les
motuers de ce genre, tout en ayant consulté le Perry Catalogue où l'on
fait mention d'un moteur de verre. Il va sans dire que le matériau
transparent utilisé doit être fort, réfractaire, etc. Ainsi, dans un
moteur à combustion interne, la substitution de certaines
pièces de métal par un matériau transparent ne représente qu'une
simple modification pour un spécialiste dans ce domaine. D'autre
part, lorsqu'il mentionne dans une de ses revendications avoir prévu
un dispositif d'obturation qui, de concert avec le piston et la
paroi cylindrique, assure une lubrification à sec, le demandeur ne
peut en ignorer l'utilisation antérieure et la description faite
dans les brevets de Moseley, MacMillan et Halpin qui suggèrent
l'emploi d'un matériau plastique résilient comme le Teflon pour
fabriquer des segments de piston.
...
Dans sa réponse à la décision finale, le demandeur a présenté des revendications
modifiées (1 à 15) et déclaré, entre autres:
...
Les références principales de l'examinateur sont celles de
Bowditch et al et du Perry Catalogue, associées aux connaissances
notoires dans ce domaine ou à l'une des antériorités suivantes:
Moseley, MacMillan ou Halpin. L'antériorité Bowditch et al
porte sur un moteur en état de fonctionner, et soulève le problème
que pose la possibilité de voir à l'intérieur de la chambre de
combustion du moteur pendant son fonctionnement. Dans cette même
antériorité, les demandeurs déclarent que le problème a déjà été
résolu en fixant une culasse transparente. Par contre, cette
méthode peut s'avérer coûteuse lorsqu'il faut utiliser des culasses
de formes différentes. Pour contourner cette dernière difficulté,
Bowditch et al suggèrent une culasse transparente ainsi qu'un
dispositif de miroirs le long de la jupe du piston, entre la
culasse et la bielle. Le montage en est certainement compliqué.
Bowditch et al ne suggère ni ne divulguent la possibilité d'utiliser
une paroi cylindrique transparente.
Le brevet Bowditch et al démontre l'avantage que comporte la
possibilité de voir à l'intérieur d'un moteur, de suivre le mouve-
ment des liquides dans les chanbres de détente constituées par
l'ensemble piston-cylindre, et d'en étudier certaines opérations.
Dans la divulgation et les revendications de ce brevet, on ne fait
nullement mention d'une paroi cylindrique transparente.
...
A première vue, la référence du Perry Catalogue semble dévoiler
l'utilisation d'une paroi cylindrique transparente, mais le moteur
dont il est question n'est pas en état de fonctionner De plus, rien
ne nous indique que la chambre de combusion soit dotée d'un obturateur
qui permette d'éviter des dommages à la paroi cylindrique, au cours
du fonctionnement du moteur.
Bien que l'incorporation de matériaux transparents aux pièces mobiles
d'un moteur pour en visionner le contenu (comme l'indiquent l'exami-
nateur et les antériorités Bawditch et al et le Perry Catalogue) soit
une technique connue, ces antériorités ne suggèrent ni ne divulguent
la possibilité d'utiliser une paroi cylindrique transparente. Le
recours à la paroi cylindrique transparente ne constitue pas uniquement
une méthode moins compliquée pour rendre la chambre de combustion
visible, mais présente avant tout un avantage par rapport au brevet
Bowditch et al, car elle laisse voir une plus grande portion du moteur.
L'utilisation de parois cylindriques transparentes présente certains
problèmes. Il faut prévoir un dispositif qui permette de voir à
travers la paroi cylindrique lorsque le moteur est en marche. Pour
ces motifs, la chambre de combustion est dotée d'un obturateur dont le
matériau composant permet d'éviter l'endommangement de la paroi
cylindrique.
...
Au cours de l'audience, M. Houle a cherché à démontrer qu'effectivement il y
avait eu une invention, et que la divulgation en fournissa ~ une description
détaillée. Le docteur Haldeman a illustré l'invention à l'aide d'un modèle du
motuer à combustion interne, ce qui lui a permis de faire valoir les avantages
d'une paroi cylindrique transparente. M. Houle a insisté sur le point suivant:
l'antériorité citée ne suggère ni ne divulgue la possibilité d'utiliser une paroi
cylindrique transparente pour un moteur en état de fonctionner. Il déclara aussi
que le recours à la paroi cylindrique transparente ne constitue pas uniquement une
méthode moins compliquée pour rendre la chambre de combustion visible, mais
présente avant tout un moyen plus avantageux de laisser voir une plus grande portion
du moteur et, par le fait même, faciliter la compréhension du phénomène de combustion.
Il s'agit avant tout pour la Commission de déterminer si la divulgation comporte
un élément brevetable. Nous allons donc analyser l'ensemble des revendications
contenues dans les antériorités citées.
Le brevet Bowditch démontre l'avantage que comporte la possibilité de voir à
l'intérieur d'un moteur pour suivre le mouvement des liquides dans les chambres
de détente constituées par l'ensemble piston-cylindre, et d'en étudier certaines
opérations. Par contre, la paroi cylindrique n'est pas transparente et le vi-
sionnement se fait au moyen d'une fenêtre de quartz et d'un dispositif visuel
(miroir). Il n'y est nullement question d'une paroi cylindrique transparente. Par
contre, le Perry Catalogue divulgue une paroi cylindrique transparente, mais le
moteur dont il est question n'est pas en état de fonctionner.
Il est vrai que les brevets Moseley et MacMillan traitent de l'agencement d'un
piston et d'une paroi cylindrique tandis que De John et Halpin décrivent des
systèmes de lubrification automatique. Les brevets de Moseley, MacMillan et
Halpin portent sur des compresseurs et ne traitent nullement des problèmes que
comporte l'élaboration de moteurs à combustion interne.
Nous sommes d'accord avec le demandeur lorsqu'il déclare que l'antériorité citée
ne suggère ni ne divulgue la possibilité d'utiliser une paroi cylindrique
transparente pour un motuer en état de fonctionner. Toutefois, le demandeur se
voit dans l'impossibilité de revendiquer l'exclusivité totale de son invention car
un dispositif semblabie a déjà été présenté dans le cas d'un moteur qui n'était pas
en état de fonctionner.
Nous avons étudié attentivement la divulgation et analysé les illustrations
fournies dans la présente demande, en regard de l'ensemble des revendications
contenues dans les antériorités citées. Nous reconnaissons que le demandeur a
surmonté des problèmes qui n'ont pas été soulevés dans les antériorités citées,
et que pour réaliser son projet, il a dû faire preuve d'ingéniosité. Ces problèmes
touchent l'ensemble piston-obturateur, et le demandeur a dû prendre les disposi-
tions nécessaires pour que le pison n'entre pas en contact avec la paroi cylin-
drique transparente. Les dispositifs encerclant la partie supérieure du piston
(l'obturateur, les segments) servent de coussinet entre le piston et la paroi
cylindrique tout en jouant le rôle de joint étanche. Il s'agit d'une pratique
inhabituelle car dans un moteur classique, le piston et la paroi cylindrique en-
trent en contact dans le sens de la longueur, et nécessitent normalement un
système de lubrification liquide.
Nous devons donc déterminer l'étendue du privilège exclusif auquel le demandeur
peut prétendre lorsqu'il fait part de son invention par le biais des revendications.
A notre avis, le recours à une paroi transparente pour un moteur en état de
fonctionner, associé à la mise en application ingénieuse de la trouvaille consti-
tue le progrès technique brevetable. D'une part, le piston doit être fabriqué
d'un matériau conducteur de chaleur tandis que la paroi cylindrique doit être faite
en verre transparent. Il faut souligner l'importance des dispositions prises par
le demandeur pour que le piston n'entre pas en contact avec la paroi cylindrique.
D'autre part, il ne faut pas négliger l'utilisation de segments flexibles dont le
but est d'assurer une lubrification automatique tout en jouant le rôle de joint
étanche.
Pour éclaircir un point soulevé lors de l'audience, le demandeur n'est pas tenu
de revendiquer sa réalisation concrète principale; les revendications peuvent
comprendre une description de l'invention dont la portée peut être aussi étendue
que celle de la description fournie dans la divulgation, et ce, en fonction de
l'antériorité citée.
Examinons maintenant les revendications. La revendication no 1 modifiée se lit
comme suit:
Un moteur à combustion interne pouvant être mis en marche,
conçu dans le but de représenter le fonctionnement des
pièces mobiles et regroupant un piston, une paroi cylindrique
entourant ledit piston, fabriquée d'un matériau transparent
de manière que le mouvement des pièces dudit moteur puisse
être visualisé lorsque le moteur est en marche; ledit moteur
est doté d'un dispositif d'obturation qui, de concert avec
le piston et la paroi cylindrique, assure l'étanchéité de la
chambre de combustion délimitée par la paroi cylindrique et
le piston; ce dispositif assure aussi une lubrification à sec
sur toute la course piston dans la paroi cylindrique lorsque
le moteur est en marche; ledit moteur ne nécessite pas de
lubrification liquide à l'intérieur de la paroi cylindrique;
le dispositif d'étanchéité de la chambre de combustion com-
prend au moins un anneau d.'étanchéité fabriqué d'un matériau
résilient auto-lubrifiant dont l'indice de frottement est peu
élevé, ledit dispositif est fixé au piston et assure l'étan-
chéité de l'espace compris entre le piston et la paroi cylin-
drique. Le moteur comprend les dispositifs suivants: disposi-
tif fixé sur le piston afin de permettre un déplacement axial
relatif le long de la paroi cylindrique; autre dispositif qui,
de concert avec le premier et avec le piston, assure un
espacement radial entre ledit piston et la paroi cylindrique
pour éviter tout frottement. Le piston étant fabriqué d'un
matériau qui pourrait endommager la paroi cylindrique s'il y
avait frottement, le moteur est doté d'un joint d'étanchéité
et d'un dispositif d'espacement radial qui permettent d'éviter
les dommages à la paroi cylindrique.
Nous avons constaté que cette revendication est la seule à constituer un nouvel
appareil. Par conséquent, toutes les autres revendications connexes devraont être
comprises dans cette même revendication no 1.
Au cours de l'audience, certaines modifications ont fait l'objet de discussions.
Entre autres, l'expression "matériau transparent du cylindre" est trop générale
et devrait plutôt préciser "verre à résistance thermique". Nous désirons souligner
un point soulevé lors de l'audience pour son importance: il s'agit du pisont
fabriqué d'un "matériau conducteur de chaleur". Nous estimons que le demandeur
devrait en faire mention. Après analyse de sa revendication, nous avons répéré
quelques répétitions et quelques contradictions, entre autres, "dispositif visant
à assurer un espacement radial entre le piston et la paroi cylindrique..." On
parle ensuite du matériau de fabrication du piston "susceptible d'endommager la
paroi cylindrique s'il y avait frottement..." La revendication traite effective-
ment des dispositifs de lubrification et d'étanchéité ainsi que du dispositif
encore plus important qui "assure un espacement radial entre le piston et la
paroi cylindrique", ce que l'on retrouve dans l'expression suivante: "pour assurer
un espacement radial entre le piston et la paroi cylindrique afin d'éviter tout
frottement". Par contre, lors de l'audience, il s'agissait d'un espace plus
important et touchant naturellement d'autres moteurs à explosion interne. Encore
une fois, nous croyons que le demandeur aurait intérêt à le signaler dans sa reven-
dication. L'illustration tirée du brevet Halpin porte sur l'espacement radial
à l'intérieur du cylindre d'un compresseur d'air. Toutefois, dans la divulgation
de ce brevet, l'on déclare que "le piston 10 peut être inversé de la manière
habituelle, à l'intérieur de la garniture l6 d'un cylindre en fonte." En d'autres
termes, ce brevet ne démontre pas l'utilisation d'un espacement "substantiel" à
une fin particulière.
Nous estimons qu'une fois modifiée, la revendication déterminerait l'étendue du
privilège exclusif auquel le demandeur peut prétendre par le biais de la descrip-
tion de l'invention fournie dans la divulgation et des illustrations. Toute
revendication logique en découlant pourrait être accueillie favorablement.
La revendication no 15 modifiée touche un mode d'opération et se lit comme suit:
Le mode d'opération d'un moteur à combustion interne
conçu dans le but de représenter le fonctionnement des
pièces mobiles et regroupant un piston, une paroi
cylindrique entourant ledit piston ainsi qu'une chambre
de combustion; le mode d'opération comprend la démarche
nécessaire à l'approvisionnement de la chambre de combustion
en mélange d'air et de carburant dont la combustion n'en-
gendrera à peu près pas de déchets susceptibles d'adhérer
à la paroi cylindrique et de réduire par le fait même son
degré de transparence; les instructions indiquent comment
faire exploser le mélange pour assurer un déplacement
relatif du piston et de la paroi cylindrique sans en altérer
la transparence.
La présente revendication constitue une mise en marche applicable à tout moteur
à combustion interne; elle ne fait preuve d'aucune capacité inventive digne de
mériter le titre d'invention. La revendication doit donc être rejetée.
Pour conclure, nous estimons que la divulgation renferme la description d'un
progrès technique brevetable. Par conséquent, nous recommandons que la revendi-
cation no 1, dans sa forme modifiée, de même que les revendications en découlant,
soient accordées. Par contre, nous recommandons que la décision finale de rejeter
les revendications nos 1 à 9 et 11 à 15 soit confirmée. La revendication no 15
doit aussi faire l'objet d'un rejet.
Le président adjoint de la
Commission d'appel des brevets, Canada
J.F. Hughes.
Après étude du dossier et des conclusions de la Commission, je rejette la
revendication no 15. Toutefois, j'accepte la revendication no 1, dans sa
forme modifiée, de même que toute revendication en découlant. Le demandeur
a six mois pour présenter une modification appropriée ou pour interjeter appel
de la présente décision, conformément aux dispositions de l'article 44 de la
Loi sur les brevets.
Le Commissaire des brevets,
J.H.A. Gariépy
Datée à Hull (Qué)
ce 24e jour de novembre 1978
Agent du demandeur
Alan Swabey & Co.
625 avenue du Président Kennedy
Montréal (Québec)