DECISION DU COMMISSAIRE
Revendications indéterminées relatives à des dessins: Antibiotique produit
par les streptomyces
Deux revendications avaient été refusées par l'examinateur comme étant
indéterminées, car elles se rapportaient à un spectre d'absorption
infrarouge indiqué sur les dessins. Le bureau a jugé bon que, puisque
dans le cas qui nous occupe, il était difficile de donner à l'invention
une définition précise sans se reporter aux dessins, la référence serait
permise.
Décision finale: renversée
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La présente a trait à une demande de révision, par le Commissaire des brevets,
de la décision finale de l'Examinateur déposée le 16 décembre 1975, et
portant le numéro 120,508 (classée 195-104). La demande a été déposée le 13
août 1971 au nom de Julius Berger et est intitulée "antibiotique produit par
les streptomyces ATCC21386". Le 3 mai 1978, la Commission d'appel des brevets
a tenu une audience au cours de laquelle monsieur R. Fuller représentait le
demandeur. Etait aussi présente madame J. Harding, de la même firme.
L'invention porte sur un antibiotique nouveau désigné sous le nom d'antibiotique
X-5108, qui est produit par une nouvelle espèce de streptomyces: streptomyces
SP. X-5108. L'antibiotique agit contre les bactéries et, chez les volailles,
il favorise la croissance et améliore l'efficacité alimentaire.
Dans sa décision finale, l'examinateur a rejeté les revendications 18 et 19
(correspondant aux revendications actuelles 9 et 10) car elles "sont indéterminées".
Les revendications en question se repportent à un schéma dans les dessins.
D'autres objections formulées dans la décision finale ont été renversées par
voie d'amendement.
En matière d'indétermination, l'Examinateur déclarait dans sa décision finale:
En outre, les revendications 18 et 19 sont indéterminées.
Tout renvoi aux figures présentées dans le mémoire descriptif,
n'est pas admissible. Le Bureau a toujours eu pour politique
d'obtenir des données spectrales présentées sous forme
tabulaire ou descriptive (voir, à titre d'exemple, les brevets
canadiens 942,217 et 942,696).
Dans sa réponse du 10 juin 1976 à la décision finale, le demandeur affirme
notamment:
...
Afin de renverser l'objection de l'Examinateur, relativement à
l'inadmissibilité des revendications 18 et 19 portant référence
sur les figures présentées dans le mémoire descriptif, les
demandeurs ont inclus ces figures dans les revendications en
question. Ils en ont décidé ainsi car, pour reconnaître des
composés au moyen des données spectrales reconnues, soit sous
forme tabulaire, soit sous forme descriptive, cela ne représente
qu'un médiocre substitut pour reconnaître le composé si l'on
se reporter aux schémas spectraux. Ainsi, comme les demandeurs
l'ont déclaré précédemment, la définition d'un composé à partir
soit du spectre d'absorption infrarouge, soit du spectre de
résonance magnétique nucléaire, est la façon la plus satisfaisante
de la "dactyloscopier". Bien que les demandeurs aient été dans
l'impossibilité de trouver un fondement aux exigences de l'Examinateur,
soit dans la Loi, soit dans les Règlements des brevets, selon
lesquelles les revendications doivent être entièrement indépendantes
de tout document visé dans le mémoire descriptif et, auparavant, dans
les Règlements, ledit mémoire est défini comme étant telle partie du
mémoire descriptif autre que les revendications, ce qui porte à
croire qu'elle comporte les dessins; néanmoins, ils ont entrepris
l'unique démarche qu'il leur était possible d'entreprendre et ont
inclus les schémas spectraux dans lesdites revendications.
Toutefois, les demandeurs contestent l'opinion de l'Examinateur,
selon laquelle les revendications 18 et 19 sont indéterminées,
puisqu'il ne fait aucun doute qu'elles renvoient clairement aux
figures 1 et 4 d'une part et, aux figures 2 et 3 de l'autre, et
il ne fait aucun doute qu'il s'agissait de schémas spectraux
représentant clairement les matières visées. En conséquence, les
demandeurs estiment que les exigences de l'Examinateur pour
présenter les données spectrales sous forme tabulaire ou descriptive,
comme dans les brevets canadiens 942,217 et 942,696, sont particulièrement
absurdes, étant donné qu'on ne peut pas dire que c'est la politique du
bureau, puisque le bureau des brevets a, très souvent, accepté les
renvois aux dessins disant à désigner entièrement les matirès comme il
l'a fait dans le cas qui nous occupe.
...
La seule préoccupation de la Commission est de décider s'il faut accepter que
les revendications 9 et 10 renvoient aux dessins. La revendication 9 se lit
ainsi:
Une nouvelle substance antibiotique, capable d'enrayer la prolifération
des bactéries qui prennent et qui ne prennent pas le gram, désignée
antibiotique X-5108, substance jaune amorphe dont les caractéristiques
sont les suivantes: (a) analyse: carbone, 63,63%; hydrogène, 7,81%;
azote, 3,48%; (par différence); (b) solubilité dans le méthanol,
l'éthanol, le propanol 1 et 2, l'alcool tertiaire de butyle, les
acétates d'éthyle, d'amyle et de butyle et le chloroforme; (c) un
spectre d'absorption infrarouge comme l'indique la figure I ci-jointe;
(d) un spectre de résonance magnétique nucléaire caractéristique,
comme l'indique la figure 4 ci-jointe; et des sels cationiques
physiologiquement acceptables, lorsque préparés selon le procédé 1,
2 ou 3.
L'article 36(2) de la Loi sur les brevets stipule que la (ou les) revendications)
est (sont) distinctes) et explicite(s):
Le mémoire descriptif doit se terminer par une revendication
ou des revendications citant distinctement et en termes
explicites les choses ou combinaisons que le demandeur considère
comme nouvelles, et pour lesquelles il revendique la propriété
exclusive ou le privilège.
Il est donc évident qu'une revendication doit être élaborée dans un langage
clair et précis, et dont le sens ne prête pas à confusion (voir B.V.D. Co. Ltd.
contre Canadian Celanese Ltd. (1936) Ex. à 139), de sorte que le destinataire
du brevet, sur simple lecture de la revendication, puisse déterminer si la
proposition est en infraction, oui ou non. Par conséquent, une revendication
ne constitue pas une description supplémentaire de l'invention, mais se limite
à décrire l'invention contenue dans le corps du mémoire descriptif (voir
Gillette Safety Razor Co. du Canada Ltée contre Pal Blade Corp. Ltée (1932) Ex.
C.R. 132; (1933 S.C.R. 142).
Lors de l'instruction, monsieur Fuller a soutenu que dans certaines circonstances
il était permis de renvoyer aux dessins, par exemple lorsque cela procurait une
méthode pour "reconnaître uniquement" un composé particulier. Il a, en outre,
fait valoir qu'il était incompatible avec l'article 36(1), que le demandeur
ne devait livrer qu'une partie de l'histoire, selon les instructions de
l'Examinateur, pour revendiquer l'incorporation du produit de son invention.
Nous tendons à admettre, avec le demandeur que, dans certaines circonstances,
la définition d'un composé en fonction de son spectre a'adsorption infrarouge,
de son spectre de résonnance magnétique nucléaire ou de son spectre ultraviolet,
est plus distinct et explicite que la présentation des données spectrales sous
forme tabulaire ou descriptive.
Nous sommes convaincus que, dans les présentes revendications, il est difficile
de définir avec précision l'incorporation du produit de l'invention, en termes
distincts et explicites, lorsque les données spectrales sont présentées
uniquement sous forme tabulaire ou descriptive. A notre avis, on peut se
reporter aux dessins comme l'indique la revendication 9. Nous nous expressons
de signaler que cela, en aucun cas, n'autorise à une quelconque revendication de
renvoi aux dessins. Les revendications doivent renvoyer au dessin uniquement
dans les situations où il est autrement très difficile de définir l'invention en
termes distincts et explicites.
En conséquence, nous recommandons que la décision portant refus des
revendications 9 et 10 (antérieurement 18 et 19) soit retirée.
Le Président adjoint,
Commission d'appel des brevets
J.F. Hughes
J'ai révisé l'instruction de la présente demande et souscris aux recommandations
de la Commission d'appel des brevets. En conséquence, je retire l'objection
portée contre les revendications 9 et 10. La demande est retournée à
l'Examinateur pour la reprise de la procédure d'examen de la demande de brevet.
Le Commissaire des brevets
J.H.A. Gariépy
Fait à Hull (Québec)
le 6 juin 1978
Agent du demandeur
Fetherstonhaugh & Co.
Boîte postale 2999, station "D"
Ottawa (Ontario)