DECISION DU COMMISSAIRE
EVIDENCE: Chariot élévateur à fourche.
La fourche du chariot élévateur est actionnée vers le bas, ce qui lui permet
de se hisser sur l'arrière de la plate-forme d'un camion muni des prises
appropriées destinées à recevoir legs fourchons. Le rejet de plusieurs
revendications a été confirmé, à l'exception de deux qui constituent variment
une contribution au progrès de la technique.
DECISION FINALE: confirmée en partie
La présente décision a trait à une demande de révision, par le Commissaire
des brevets, de la décision finale de l'examinateur en date du 4 janvier 1977,
portant sur la demande 187,240 (classe 214-1). La demande a été déposée le 3
décembre 1973, au nom de Tobias H.A. Grether, et est intitulée "Chariot
élévateru à fourche". La Commission d'appel des brevets a tenu une audience
le 26 avril 1978, à laquelle M.G. Fisk était le mandataire du demandeur.
L'invention a trait aux chariots élévateurs à fourche. Plus précisément, elle
se rapporte aux chariots élévateurs dont la fourche est actionnée en directions
ascendante et descendante, ce qui permet au chariot de se hisser de lui-même
lorsque la fourche est actionnée en direction descendante, sur l'arrière de la
plate-forme d'un camion muni des prises destinées à recevoir les fourchons
du chariot élévateur. Ce dernier est équipé d'éléments porteurs de roues avant
individuellement déployables au reployables. La figure 12 ci-dessous illustre
cette réalisation
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Plus loin, la figure démontre le rôle des roues auxillaires fixées a l'arrière
de l'assemblage à pivot de chacun des éléments porteurs des roues avant.
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Dans la décision finale, l'examinateur refuse la demande pour défaut de
divulguer "un quelconque élément inédit" par rapport aux références suivantes:
Américaines:
3,390,797 le 12 juillet 1968 Goodacre
3,616,148 le 14 juillet 1971 Schaffer
Britannique
1,239,148 le 14 juillet 1971 Winter
Le brevet de Goodacre fait état d'un chariot élévateur à fourche avec mât
fixé au bâti. La fourche est montée' sur le mât pour le levage et la descente
mécanique de la fourche. Aux fins du transport, la fourche s'insère dans les
prises fixées au camion. Le chariot quitte alors le sol en abaissant la fourche
à l'aide du moteur du chariot. Deux châssis accessoires fixes, sous les fourchons
sont munis de galets 20 à leur extrémité. La figure 2 ci-dessous du présent
brevet illustre cette invention:
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Le brevet de Schaffer fait état d'un chariot élévateur à fourche dont
l'empattement est réglable par le déploiement et le repliement de deux
de ses roues 32, actionnées hydrauliquement, et glissant le long de l'axe
longtudinal du chariot. Ces roues sont supportées par un châssis accessoire
et demeurent reliées l'une à l'autre. Cette disposition assure une meilleure
stabilité pour le transport des charges lourdes. La figure 2 ci-dessous du
présent brevet représente cette invention:
<IMG>
Le brevet de Winter fait également état d'un chariot élévateur à fourche dont
l'empattement peut se régler en déployant hydrauliquement deux des roues du
chariot le long de l'axe longitudinal du véhicule. Cette disposition assure,
elle aussi, une meilleure stabilité.
Dans la décision finale, l'examinateur ajoute, entre autres choses:
...
Toutes les revendications de la présente demande demeurent
rejetées pour défaut de proposer le moindre élément inventif
par rapport au brevet de Goodacre, étant donné que les leçons
tirées de Schaffer et de Winter sont déjà bine connues.
Le chariot du brevet de Goodacre et celui revendiqué dans la
présente demande fonctionnent de la même façon. La seule
différence entre les deux réside dans le fait que les roues
avant de celui du demandeur sont latéralement espacées, à
l'extérieur des fourches, ce qui soulève un problème
d'interférence entre le châssis accessoire et le camion.
Ce problème auquel Schaffer et Winter ont eu à faire face,
s'est posé également au demandeur qui a dû recourir exactement
à la même solution.
...
En réponse à la décision finale, le demandeur déclare (en partie):
...
La position du demandeur est la même que celle qu'il a
prise dans sa lettre du 12 novembre 1976, en ce sens qu'il
prétend toujours qu'il n'existe aucune suggestion, dans
l'une ou l'autre des références, qui puisse permettre la
combinaison formulée par l'examinateur en vue d'atteindre
les résultats structuraux et fonctionnels offerts par la
structure conçue par le demandeur, et reprise dans les
revendications en cause. La seule référence qui divulgue
un chariot élévateur pouvant se hisser sur le châssis d'un
camion est celle du brevet 3,390,797. Ce levage est
consécutif à l'abaissement des fourches à l'aide du moteur
du chariot, alors que les roues avant sont placées directement
sous les fourches selon la figure 3 du brevet. Mais cette
structure est impuissante à réaliser le chargement d'un
chariot élévateur à fourche sur un camion.
Le demandeur prétend que les revendications de la présente
demande, exposant un ensemble d'éléments nouveaux et non
évidents, constituent un progrès significatif dans la
technique. Il prétend aussi que la combinaison de
références invoquée par l'examinateur n'aurait pu être
réalisée sans l'apport de la divulgation de la présente
demande, ce qui démontre bien que cette demande comporte les
caractères requis de brevetabilité.
...
La question à débattre devant la Commission est celle-ci: le demandeur
propose-t-il vraiment un progrès technique brevetable?
A l'audience M. Fisk plaida avec vigueur qu'il s'agissait bien d'une
invention, et qu'il restait seulement à déterminer la portée du monopole
exercé par l'invention, tel que décrit dans les revendications. Il proclama
aussi sa conviction que les revendications 3, 7, 8 et 9 étaient solidaires
de la revendication 1. Il signala, entre autres choses, que le fait pour les
éléments porteurs de roues de se reployer individuellement, c'est-à-dire,
qu'un élément puisse se reployer alors que l'autre reste en place, tout ceci
comporte des avantages certains, dont celui d'assurer une meilleure stabilité
pour le transport des charges lourdes, ce qui facilite la manoeuvre et permet
un meilleur accès pour le chargement ou le déchargement, en particulier lorsque
les roues du camion nuisent aux roues avant du chariot élévateur à fourche. La
demandeur faut aussi valoir les avantages qu'offrent les roues auxiliaires fixées
à l'arrière de l'assemblage à pivot des châssis accessoires, ce qui favorise
l'équilibre du chariot élévateur, et facilite le chargement sur l'arrière de la
plate-forme du camion. Les roues auxiliaires touchent le sol automatiquement
lorsque les éléments porteurs des roues avant pivotent vers l'arrière
A l'examen, nous constatons que le brevet de Goodacre présente un important
aspect de l'invention telle que décrite par le demandeur, c'est-à-dire, la
présence d'une fourche motorisée actionnée vers le bas sur un chariot
élévateur, permettant audit chariot de se hisser sur l'arrière de la plate-
forme d'un camion équipé pour recevoir les fourchons (voir les figures 8
et 12 du brevet de Goodacre, supra).
Le brevet de Schaffer en dibulgue clairement un autre aspect important,
lorsqu'il présente un chariot élévateur à fourche avec empattement réglable
qui assure une meilleure stabilité pendant le transport de charges lourdes
(voir figure 2 du brevet de Schaffer, supra).
Cependant, après étude détaillée des références citées, nous ne trouvons
aucune allusion à un chariot élévateur à fourche muni de deux roues avant
reposant sur des éléments du châssis accessoire, et individuellement mobiles
vers l'arrière jusqu'à un point adjacent à l'arrière de la fourche. En
outre, il n'existe aucune indication quant à l'utilisation d'une roue auxiliaire
fixée à l'arrière de l'assemblage à pivot de chacun des châssis accessoires.
Bien que ces caractéristiques puissent paraître, au premier abord, relativement
simples, nous sommes d'avis que les problèmes résolus et les avantages obtenus
sont significatifs. Nous concluons donc qu'une véritable invention a été décrite
dans la divulgation et illustrée dans les dessins. En d'autres termes, il
existe une conception, un plan et un degré d'ingéniosité qui, à notre sens,
constituent un progrès réel sur l'antériorité. Nous croyons que le vrai
mérite réside surtout dans la conception ou dans l'intuition, la réalisation
concrète devenant ainsi chose facile.
Examinons maintenant les revendications. La première se lit comme suit:
Chariot élévateur à fourche s"adaptant à une plate-forme
de camion munie de prises pour fourchons, comportant
l'amélioration suivante: chariot élévateur à fourche
motorisée, muni d'un assemblage de châssis et d'une fourche
avec paire de fourchons généralement horizontaux, de dispositifs
de support de ladite fourche pour le levage et la descente
de la fourche actionnée par le moteur du chariot, la fourche
étant installée à l'extrémité avant du chariot, des dispositifs
sur roues supportant l'extrémité arrière du chariot, une paire
de roues à l'extrémité avant du chariot et placées latéralement
à l'extérieur de la fourche, ledit châssis du chariot élévateur
comprenant un châssis principal et des pièces de châssis accessoire
à rallonge avant supportant chacune lesdites paires de roues,
chacune desdites pièces du châssis accessoire étant munie d'un
assemblage mobile fixé au châssis principal à l'arrière de ladite
paire de roues, les pièces du châssis accessoire et les roues
étant mobiles à partir de la position de support du châssis
principal jusqu'à une position relative à l'arrière, reliées au
châssis principal et à la fourche pour permettre l'insertion des
fourchons dans lesdites prises sur le châssis du camion, et le
levage du chariot en imprimant à la fourche un mouvement de descente.
La revendication ne détermine pas la portée du monopole de l'invention en
comparaison des constatations faites à la lumière de l'invention décrite dans
le mémoire descriptif, compte tenu des leçons résultant de l'effet cumulatif
de l'antériorité citée. Cette revendication ne couvre que les deux aspects
importants. tel ou'antérieurement établi. des lecons de l'antériorité citée,
c'est-à-dire les dispositifs de levage et de descente de la fourche à l'aide
du moteur du chariot, et le rôle d'un empattement réglable sur un chariot
élévateur à fourche. M. Fisk soutient que la fourche est élevée et abaissée
à l'aide d'une force hydraulique. A l'audience, le Commissaire a retenu
ce fait, à titre d'expédient courant dans le métier. De toute façon, la
source de puissance comme telle n'est pas pertinente à l'invention. La revendication
établit les limites de la portée du monopole de l'invention en des termes très
vagues, parce que l'antériorité exclut les différences innovatrices de la
revendication. Nous recommandons le rejet de cette revendication. Nous
convenons avec M. Fisk, que les revendications 3, 7, 8 et 9 devraient être
abandonnées avec la revendication 1.
La revendication 2, subordonnée à la revendication 1, attire l'attention sur le
fait que: "...chaque châssis accessoire supporte une roue auxiliaire à
l'arrière de l'assemblage à pivot du châssis accessoire..." L'antériorité
ne faisant aucune allusion à cette particularité: les avantages de cette
caractéristique ont été étudiés. A notre avis, cette revendication, prise dans
son entier, dégage un progrès brevetable dans la technique.
La revendication 4, subordonnée à la revendication 1, a trait à: "... une double
puissance active " déjà invoquée dans la revendication 1, c'est-à-dire "... le
levage et la descente de la fourche à l'aide du moteur du chariot..." La dernière
partie de la revendication décrit un procédé relatif au fonctionnement de la fourche
qui s'abaisse sous l'action du moteur. Compte tenu de nos discussions précédentes,
nous sommes d'avis que ceci ne détermine pas adéquatement les limites du monopole
de l'invention. Cette revendication doit être refusée.
Les revendications 5 et 6, subordonnées à la revendication 1, n'ont trait qu'aux
dispositifs de blocage ou de protection situés entre les châssis accessoires et
le châssis principal. Ces caractéristiques ne rendent évidemment pas ces revendications
acceptables par rapport à la revendication 1 refusée.
La revendication 10, indirectement subordonnée à la revendication 1, insiste
sur "... le reployage et le déployage individuel des roues avant gauche et droite."
Cette revendication, prise dans son entier, compte tenu de nos constatations
précédentes, présente un sujet brevetable.
La revendication 11 n'a trait qu'aux dispositifs de réglage de la distance entre
les roues avant et arrière du chariot élévateur. Elle doit être rejetée en raison
des connaissances fournies par le brevet de Schaffer.
En résumé, nous sommes convaincus que le demandeur contribue à faire progresser la
technique. Nous recommandons le retrait de la décision finale portant refus de la
demande pour défaut d'inventivité, mais que les revendications 1, 3 à 9 et 11 soient
rejetées et que les revendications 2 et 10 soient acceptées. Les revendications 2
et 10 doivent être soumises sous une forme appropriée, compte tenu du problème qui
sera abordé aux termes de l'article 60 des Règlements sur les brevets. Cependant,
certaines des revendications refusées peuvent être acceptables si on les subordonne
adéquatement à l'une ou l'autre des revendications.
J.F. Hughes
Président adjoint,
Commission d' appel des brevets, Canada.
J'ai examiné la poursuite de la présente demande et je souscris à la recommandation
de la Commission d'appel des breveta. En conséquence, je retire la décision finale,
mais je refuse de délivrer un brevet en me fondant sur les revendications 1, 3 à 9
et 11. Toutefois, j'accepte les revendications 2 et 10 présentées sous une forme
appropriée. Le demandeur dispose d'une période de six mois au cours de laquelle il
pourra soumettre la modification, ou interjeter appel de la présente décision aux
termes de l'article 44 de la Loi sur les brevets.
J.H.A. Gariépy Mandataire du demandeur
Commissaire des brevets Gowling & Henderson
B.P. 466, terminal A
Fait à Hull (Québec) Ottawa, Ontario K1N 8S3
le 5 mai 1978