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                         DECISION DU COMMISSAIRE

 

Évidence: Méthode de conditionnement des tissus

 

La méthode consiste à mettre les tissus en contact avec un support ou substrat

indéformable dont l'une des surfaces est garnie d'agents de conditionnement. Le

conditionnement des tissus se matérialise à l'intérieur du tambour rotatif tel

celui d'une sécheuse à linge. Les antériorités invoquées ne révèlent pas cette

méthode, et il a donc été conclu que les revendications portent effectivement

sur un perfectionnement brevetable.

 

Décision finale: Infirmée

 

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La présente décision a trait à une demande de révision par le Commissaire des

brevets de la décision finale de l'Examinateur en date du 24 juin 1976, concernant

la demande 125,551 (classe 8-93.11). La demande a été déposée le 19 octobre 1971

et est intitulée: "Méthodes de conditionnement des tissus." La Commission d'appel

des brevets a entendu l'appel le 7 décembre 1977. M. P. Hammond représentait le

demandeur.

 

La demande porte sur le conditionnement des tissus par leur mise en contact avec

un support ou substrat dont l'une des surfaces est garnie d'un agent de condition-

nement. Le conditionnement se matérialise dans un tambour rotatif comme celui

d'une sécheuse à linge par exemple. Le support, qui est indéformable, est libre

de venir en contact avec le linge dans la sécheuse. La figure 1, ci-dessous, fait

état de cet agencement.

 

                                <IMG>

 

Dans sa décision finale, l'Examinateur a rejeté toutes les revendications par

manque d'établir matière brevetable par rapport au brevet suivant:

 

Brevet américain

 

3,442,692                  6 mai 1969                Gaiser

 

Ce brevet fait état d'un substrat souple destiné au conditionnement des tissus

dans une sécheuse. Le substrat est porteur d'un agent assouplisseur qui est

transmis au linge au cours du culbutage. La figure l, ci-après, illustre cette

invention.

 

                      <IMG>

 

La revendication 1 de ce brevet se lit comme suit:

 

Une méthode de conditionnement des tissus comportant le

culbutage des pièces de tissu humides à l'intérieur d'un

tambour de sécheuse automatique traversé par un courant d'air

chaud, en présence d'une feuille souple porteuse d'agents de

conditionnement, ce afin de transmettre ledit agent de condi-

tionnement aux tissus au cours du cycle de séchage.

 

Dans sa décision finale l'Examinateur déclarait (notamment):

 

Le demandeur argumente que ses revendications, face au brevet

de Gaiser, décrivent une invention, parce que ce dernier ne

révèle pas un support rigide indéformable, et parce qu'il

divulgue un support entièrement saturé de la matière assouplis-

sante plutôt qu'un support dont seulement une des surfaces est

enduite de ladite matière. L'Examinateur convient de l'existence

de ces différences et du fait que la méthode du demandeur offre

certains avantages par rapport à celle de Gaiser. Cependant

l'Examinateur estime que ces différneces et ces avantages ne sont

pas non évidents et que leur réalisation ne fait pas appel à

l'exercice d'une ingéniosité créatrice.

 

Les révélations de Gaiser se prêtent à des modifications évidentes

quant à la nature, la forme, la dimension, le mode de préparation

et la disposition de l'article assouplisseur de tissus. Ces modi-

fications évidentes viennent 'tout naturellement à l'esprit de tout

homme du métier qui doit choisir un dispositif de conditionnement

de tissus en fonction des qualités désirées.

 

Le choix d'un support rigide indéformable, bien qu'il ne soit pas

révélé d'une façon explicite dans le brevet de Gaiser, est jugé

être le fruit de l'expérience pratique et non de l'inventivité. Il

est notoire qu'un matériau qui n'est pas indéformable, comme un

morceau de linge, par exemple, se replie et se pelotonne dans une

sécheuse. Par conséquent, l'utilisation d'un dispositif rigide in-

déformable est évidente parce que ledit article n'a pas tendance à se

pelotonner dans la sécheuse, et parce qu'il peut être culbuté plus

facilement et de manière plus régulière par les chicanes de la

sécheuse, de sorte qu'il ne risque pas de rester pris et de tacher

le linge. Il est donc évident que ce sont ces caractéristiques

évidentes tout comme le comportement des supports indéformables qui

leur confèrent ces avantages indéniables. De plus, ces avantages

viennent naturellement à l'esprit d'une personne versée dans le

domaine, dès qu'elle est au courant du but fondamental visé par

Gaiser, c'est-à-dire "l'apport d'un moyen simple et économique de

faire culbuter le linge dans une sécheuse conjointement avec un

substrat porteur d'un agent de conditionnement..." (colonne 2,

lignes 34 à 40).

 

Le demandeur poursuit son argument en disant que "... l'enduction

d'au moins une partie de la surface externe du support..." constitue

également une des caractéristiques inventives de ses revendications.

Cependant, il semble tout naturel à un homme du métier que l'agent

assouplisseur se transmet plus facilement au tissu soit par frotte-

ment ou évaporation, si cet argent de conditionnement se trouve en

surface ou y est à peine noyé. En outre, il semble évident qu'il soit

avantageux de traiter le matériau de support avec la solution de con-

ditionnement de manière à ce qu'une certaine partie ne pénètre le

support et l'empêche ainsi de former des paillettes. Les restrictions

qui ont trait au degré de pénétration de l'agent assouplisseur dans le

support relèvent de la compétence propre à une personne versée dans

la matière et non de sa créativité inventive.

 

Le demandeur, dans sa réponse du 24 septembre 1976 déclarait notamment ce qui

suit:

 

La présente invention a trait à une méthode de conditionnement

des tissus, comme des vêtements par exemple, à l'aide d'un agent

de conditionnement rigide et indéformable tel l'article sphérique

illustré à la figure 1. Comme le substrat souple du brevet de

Gaiser, cet article indéformable est placé dans la sécheuse afin

d'y être culbuté avec les vêtements. Contrairement au substrat

souple de Gaiser, le matériau de support n'est pas saturé de l'agent

assouplissant mais sa surface externe en est plutôt enduite. En

outre, afin de répondre aux exigences de la revendication 1, une

partie de l'agent assouplissant doit pénétrer la partie externe du

support dans un rapport de dix à trente pour cent.

 

Ainsi donc, il y a au moins deux importantes différences entre la

méthode de Gaiser et celle qui est revendiquée ici par la présente

invention, la première étant l'utilisation d'une substance de

conditionnement rigide qui ne peut se désagréger et posée sur la

surface externe du support. Cette caractéristique donne lieu à de

nombreux avantages par rapport à la technique antérieure comme

l'explicite la présente divulgation. Par exemple, il se peut qu'au

cours du culbutage, le substrat souple, objet du brevet américain,

se plie et reste pris entre les vêtements, de sorte qu'il n'est

pas libre de venir en contact avec tout le linge dans la sécheuse.

D'où le risque de souiller ou de tacher le linge en raison de la

trop forte concentration de l'agent sur un endroit particulier.

Etant donné que l'agent de conditionnement de la méthode revendiquée

par la présente invention n'est pas posé sur un support souple mais

plutôt sur la surface externe d'un support indéformable, il est moins

susceptible de se diviser en paillettes. La rigidité du dispositif

de conditionnement empêche les efforts de tension et de compression

de fendiller ou de déchirer le matériau de support.

 

La seconde importante différence de la méthode de l'invention

décrite dans la revendication 1, consiste dans l'application de la

substance de conditionnement sous forme d'enduit à la surface

externe du support. Il importe d'examiner cette caractéristique

distinctive conjointement avec la caractéristique susmentionnée soit

celle d'une substance de conditionnement qui ne peut se désagréger.

Ces deux caractéristiques se conjugent pour apporter un perfection-

nement important par rapport à la technique antérieure. Comme la

substance de conditionnement est appliquée sous forme d'enduit à la

surface externe du support, elle risque fort peu de se diviser en

paillettes sous l'effort de flexion qui lui est imposé dans la sécheuse.

Puisque la substance d'assouplissement est posée à la surface externe

  d'un support et ne peut par conséquent se désagréger, cette dite

substance peut être posée sous la forme d'un enduit dont la majeure

partie ne fait pas corps avec la base. En fait la partie de la

substance assouplissante qui pénètre la base n'équivaut qu'à dix ou

trente pour cent de la quantité qui ne fait pas corps avec la base.

La formation d'une couche à la surface externe du support est impor-

tante puisqu'elle permet l'utilisation optimate de la substance de

conditionnement. Toute substance de conditionnement sous cette sur-

face ne peut être enlevée par le simple frottement de l'article contre

les vêtements.

 

 ...

 

Pour résumer, étant donné que la revendication 1 indépendante décrit

plusieurs caractéristiques distinctives qui donnent trait à des avan-

tages de grande portée dont nul n'a été suggéré par l'antériorité

invoquée, et parce qu'aucune de ces caractéristiques ne viendraient

naturellement à l'esprit d'une personne versée dans le métier, sans

parler de la combination desdites caractéristiques, nous demandons

donc respectueusement que la présente demande soit revisée et jugée

recevable.

 

...

 

Il s'agit donc d'établir ici si les revendications portent ou non sur un

 perfectionnement brevetable. La revendication 1 modifiée se lit comme suit:

 

 Une méthode de conditionnement de tissus au moyen d'une substance

 assouplissante, comportant les culbutage dudit linge à l'état

 humide ou réchauffé conjointement avec une substance rigide de

 conditionnement, laquelle se présente soit comme un composé

 assouplissant à surface active noionique, soit comme composé

 assouplissant soluble dans l'eau à surface active anionique, ou

 soit encore comme un mélange des deux et qui peut être transmise

 aux tissus au cours du cycle de séchage; la continuation du

 culbutage pendant un temps assez long pour permettre aux tissus

 d'absorber une quantité suffisante de ladite substance de condition-

 nement afin qu'ils soient assouplis; selon laquelle la substance

 rigide de conditionnement est sous forme d'enduit posé sur au

 moins une partie de la surface externe d'une base, ladite base

 étant en partie saturée par ladite substance assouplissante dans un

 rapport de dix à trente pour cent de la quantité de substance

 assouplissante qui ne fait pas corps avec ladite base; et selon

 laquelle ladite base est en tout temps indéformable.

 

 Lors de l'audition, M. Hammond a avancé que les revendications étaient brevetables

 par rapport à l'antériorité invoquée. Il a également soulevé de nombreux points

 intéressants que nous allons maintenant examiner.

 

 Un des principaux arguments invoqués afin d'établir la recevabilité des revendi-

 cations est que la base ou le support est rigide et indéformable tandis que

 l'antériorité révèle un substrat "souple". Cette caractéristique donne lieu à de

 nombreux avantages. Par exemple, le substrat souple de l'antériorité risque de

 se plier ou de rester pris au cours du culbutage, ce qui peut être la cause de

 souillures ou de taches en raison de la trop forte concentration de la substance

 sur le substrat. Egalement, si le substrat reste pris dans le linge, il ne pourra

 venir librement en contact avec tous les vêtements de sorte que ces derniers ne

 seront pas conditionnés de faon adéquate.

 

 Un deuxième argument repose sur le fait que l'agent de conditionnement étant sous

 forme d'un enduit posé sur la surface externe d'un substrat rigide, cette méthode

 est supposément plus efficace que si le substrat est entièrement saturé de l'agent

 de conditionnement. M. Hammond a également avancé que l'agent de conditionnement

risque moins de se désagréger si le support est rigide plutôt que souple,

 cependant nous ne considérons pas cet argument probant étant donné qu'une grande

 partie du cycle de séchage se déroule à des températures qui provoquent le

 ramolissement des substances assouplissantes et non de nature à les faire se

 désagréger ou former des paillettes. M. Hammond a également souligné que l'agent

 de conditionnement revendiqué par le demandeur présente l'avantage d'être

 ré-utilisable alors que celui de l'antériorité ne peut servir qu'une seule fois.

 

 Nous avons donc conclus que l'effet combiné de chacune des caractéristiques

 susmentionnées aboutit à l'utilisation optimale de la substance de conditionnement.

 Nous croyons que l'antériorité invoquée qui fait ressortir et revendique l'utili-

 sation d'un substrat souple écarterait toute idée d'utiliser un substrat indéfor-

 mable ou rigide. De plus, comme l'idée de culbuter des objets rigides dans une

 sécheuse pourrait nous laisser anticiper certains problèmes, elle éloignerait de

 notre esprit toute notion de ce qui test ici révélé par le demandeur. Par consé-

 quent, bien que le perfectionnement accompli ne soit pas des plus important, nous

 sommes néanmoins convaincus que le demandeur a obtenu ici un résultat d'une manière

 plus rapide que celui qui est divulgué dans l'antériorité invoquée par l'Examina-

 teur. La présente méthode donne apparemment des résultats meilleurs et perfec-

 tionnés.

 

 Nous ne sommes pas toutefois convaincus de la portée de la revendication 1

 modifiée, particulièrement sous un certain rapport. Il y est dit que "la base

 est indéformable..." Ce qui sous entend n'importe quelle configuration, et il est

 bien entendu que certaines configurations resteraient prises dans le linge. Par

 conséquent, la revendication 1 telle qu'elle est présnetement rédigée devrait être

 refusée. La dernière ligne de cette revendication devrait être modifiée de manière

 à préciser que "ladite base est indéformable et de configuration propre à favoriser

 un culbutage efficace..."

 

 Les revendications 2 à 12 qui sont directement ou indirectement subordonnées à la

 revendication 1, ajoutent certains détails tels que les variations de température

 ainsi que le type, les proportions et les dimensions de l'agent de conditionnement.

 Ces caractéristiques cependant ne rendent pas ces revendications brevetables par

 rapport à la revendication 1 qui est rejetée. Les revendications 2 à 12 ne sont

 pas par elles-mêmes recevables, mais le deviendraient si elles étaient subordonnées

 à une revendication 1 modifiée de la façon que nous venons de conseiller. Nous

 sommes également d'avis que dans la revendication 3 le terme "indéformable"

devrait être changé par "rigide".

 

Nous recommandons que la décision portant le refus des revendications soit

confirmée mais que les revendications soient jugées recevables lorsqu'elles auront

été modifiées de la manière suggérée ou de manière analogue.

 

Le président-adjoint

Commission d'appel des brevets du Canada

 

J.F. Hughes

 

Nous avons revisé l'instruction de la présente demande et souscrivons aux

recommandations de la Commission d'appel des brevets. Par conséquent nous ne

jugeons pas recevables les revendications 1 à 12 modifiées mais sommes disposés

à les accepter lorsqu'elles auront été modifiées de la manière suggérée par la

Commission. Le demandeur dispose d'une période de six mois au cours de laquelle

il pourra interjeter appel de la présente décision aux termes de l'article 44 de

la Loi sur les brevets.

 

Le Commissaire des brevets,

 

J.H.A. Gariépy

 

Mandataire du demandeur

 

Smart & Biggar

B.P. 2999, Succursale D

Ottawa (Ontario)

K1P 5Y6

 

 Fait à Hull (Québec)

ce 22 décembre 1977

 

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